Le transport des copies d`examen

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Le transport des copies d`examen
chronique juridique
▼ CHRONIQUE JURIDIQUE
Le transport des copies d’examen
La cellule juridique réunie le 12 juin s’est
saisie d’une question d’actualité : le transport
des copies des examens par des personnels transférés aux collectivités territoriales.
Ceci à la suite d’une prise de position d’un
conseil régional (Région centre) et d’une
réponse apportée par la Direction des Affaires
Juridiques du Ministère de l’Éducation nationale, en réponse à la question d’un recteur.
La Région Centre a, en effet, fait
savoir qu’elle s’opposait à ce que
les personnels techniciens, ouvriers
et de service des lycées, soient
chargés du transport des copies
du baccalauréat. Cette dépêche de
l’AEF, largement diffusée, suscite
des inquiétudes légitimes parmi les
personnels de direction, d’autant
que d’autres Régions ont fait part
d’une convergence de vue, sur ce
point, avec la Région Centre.
Un « syndicat de chefs d’établissement » (version AEF), autre
que le SNPDEN, fait valoir, avec
une certaine légèreté, que la
position du Conseil Régional
est infondée au motif « qu’autoriser les agents à manipuler le
mobilier scolaire pour préparer
les examens et leur interdire de
transporter les copies du baccalauréat est contradictoire. Dans
un établissement scolaire, toutes
les tâches ont un rapport plus ou
moins étroit avec la pédagogie ».
On peut cependant se demander si les tâches matérielles liées
à l’installation du mobilier – tables,
chaises…, - qui relèvent du cadre
de vie, du fonctionnement habituel
de l’établissement, peuvent être
placées au même niveau d’engagement de la responsabilité que
tout ce qui concourt à l’accomplissement d’un examen national.
La question du transport des
copies du baccalauréat par des
personnels transférés aux collectivités territoriales est une question
sensible pour chacun de nos établissements scolaires, elle illustre
également, une nouvelle fois, la
complexité de la répartition de
compétences par les lois de décentralisation entre l’État, la Collectivité
territoriale de rattachement, l’établissement public local d’enseignement sur lequel se cristallisent
les questions d’interprétation et les
difficultés de leur mise en œuvre.
La cellule juridique enregistre
avec satisfaction la volonté de
notre Ministère de ne pas laisser
les chefs d’établissement traiter
seuls une telle question. Mais elle
s’interroge sur l’argumentaire présenté et sur les suites éventuellement apportées à ce différend.
Le ministère considère que les
Régions commettent une erreur
d’ordre juridique lorsqu’elles
s’opposent à ce que les personnels TOS des lycées soient chargés du transport des copies du
baccalauréat.
« Ces Régions se trompent sur
la portée du transfert des compétences réalisé par la loi du 13 août
2004 relative aux libertés et aux
responsabilités locales ».
Ainsi, la fiche DAJ envoyée aux
recteurs s’appuie-t-elle sur l’article
L.214-6-1 du code de l’Éducation
pour préciser que les personnels
techniciens, ouvriers et de service
« sont membres de la communauté
éducative et concourent aux missions du service public de l’éducation
nationale dans les conditions fixées
aux articles L-421-23 et L-913-1 ».
Le Ministère ne commet-il toutefois pas une lecture imprudente
de la loi en omettant la limitation
apportée par la loi n° 89-486 du
10 juillet 1989, article 15, dans la
rédaction de certains des articles
auxquels il est fait référence :
« Ils contribuent à la qualité
de l’accueil et du cadre de vie et
assurent la sécurité, le service de
restauration, la protection sanitaire
et sociale, et, dans les internats,
l’hébergement des élèves ».
Comment la DAJ concilie-telle cette définition législative,
strictement limitative ; avec cette
extension aux tâches liées à l’accomplissement des examens,
nullement mentionnée ?
La cellule juridique rappelle
par ailleurs que le chef d’établis-
DIRECTION N° 161 AOÛT/SEPTEMBRE 2008
sement dispose d’une autorité
fonctionnelle et non hiérarchique vis-à-vis des agents TOS :
à ce titre, il organise leur service
pour « les missions transférées »
en application d’une convention
approuvée par le Président du
Conseil Régional et soumise au
contrôle de légalité. Le chef d’établissement agit selon le principe
de compétence liée pour l’application des compétences respectives de la Région et du lycée.
Les modèles de conventions
que nous avions étudiées, élaborés par les Régions, faisaient
apparaître comme objectifs et
priorités : le service d’accueil, le
service de restauration, le service
d’hébergement et annexe d’hébergement, le service général et
de maintenance, la sécurité.
Qu’adviendra-t’il si le président du conseil régional du
Centre, voire d’autres, maintient
son interdiction de transport des
copies du baccalauréat pour les
personnels transférés aux collectivités territoriales ?
Dans cette hypothèse, la saisie éventuelle du juge administratif
relève du recteur d’académie ; il
appartiendrait alors à la juridiction
administrative d’apporter les éclaircissements sur ce point de litige.
L’interprétation donnée par la
Direction des affaires juridiques
fait cependant abstraction d’un
élément d’importance : l’organisation des examens n’est pas une
mission de l’Établissement public
local d’enseignement ! C’est une
mission de l’État. Et il serait légitime que ce dernier, dans le cadre
d’un conventionnement, en assure
le financement. Ce serait là, l’affirmation d’une gestion moderne !
Cette collectivité est depuis
revenue sur sa position.
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