Le sourire au fil du temps

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Le sourire au fil du temps
Le sourire au fil du temps
Dr. Jean-François Lasserre, Bordeaux
Face à la quête des patients de retrouver un sourire lumineux et harmonieux, l’apanage
de la jeunesse, « Le sourire au fil du temps » propose une approche esthétique des
thérapeutiques dentaires. Elle réoriente les traitements vers une plus grande prise en
compte de l’âge des patients avec des techniques moins mutilantes qui respectent les
tissus restants.
Les principaux changements des traitements sont liés aux progrès des biomatériaux et à
l’avènement de nouvelles procédures reconstructrices et restauratrices, principalement
dans le domaine des collages de composites et de céramiques et dans le domaine de
l’implantologie.
Le sourire au cœur de la communication
Le sourire est une arme secrète : du bout des lèvres ou à pleines dents, chaque sourire
est unique. Il est le témoin d’une émotion intérieure, humaine et universelle. Un sourire
n’a ni frontières, ni âge. En termes de communication, il est scientifiquement démontré
que le sourire prime sur le regard, notamment en raison de l’imaginaire rattaché aux
dents et à la bouche.
Les dents ont une triple symbolique richement illustrée dans les dictons populaires.
Force, arme et agressivité : « montrer les dents » « être armé jusqu’aux dents » Jeunesse et vitalité : « 20 ans et toutes ses dents » « mordre la vie à pleine dents » Sensualité et sexualité : le psychanalyste Bachelard remarque que la bouche et les lèvres
sont le terrain de la sensualité permise.
« Je parle avec ma main, tu écoutes avec tes yeux et nous nous comprenons, n'est ce
pas, en un seul sourire.» Shi Tao, philosophe chinois
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Le temps, nouvelle dimension des traitements esthétiques
L’esprit, les fonctions organiques, les années, le vécu émotionnel, les accidents modèlent
lentement l’expression du visage et du sourire pour lui donner une signature unique qui
traverse les années. L'esthétique concerne toutes les classes d'âge et doit être mieux
prise en compte par les chirurgiens-dentistes. Les restaurations doivent être adaptées à
l’âge du patient tout en tenant compte de la demande légitime de rajeunissement du
sourire dans une société imprégnée du dictat de la jeunesse.
Le plus souvent, les prothèses instantanées réalisées s’intègrent à l’esthétique du jour,
sans conscience des changements tissulaires majeurs qui surviendront au cours du
vieillissement et à l’inadaptation qui en découlera. Pourtant, les prothèses et les soins
restaurateurs ont des longévités limitées que l’on s’accorde, suivant le contexte clinique,
à estimer entre 9 et 15 ans. Par exemple, une jeune fille de 20 ans avec une couronne
céramique sur son incisive centrale doit être avertie que compte tenu de son espérance
de vie (actuellement 89 ans), elle aura probablement cinq couronnes successives pour
réadapter l’esthétique et la fonction de sa dent. Ceci dans le meilleur des cas et en
espérant que les délabrements successifs causés par les traitements n’entraînent pas la
perte de la dent et la mise en place d’un implant et d’une couronne sur implant. Cet
exemple suffit à comprendre l’intérêt à long terme des traitements peu invasifs. Le
principe « d’économie tissulaire » doit ainsi guider les choix thérapeutiques actuels et à
venir des chirurgiens-dentistes.
Une approche pluridisciplinaire est souvent nécessaire. De l'orthodontie jusqu'à la
prothèse en passant par les soins restaurateurs, il existe un gradient dans l'agression
tissulaire des dents.
Face à une demande esthétique, le premier réflexe doit être de privilégier l’orthodontie,
la moins mutilante des thérapeutiques. Viennent ensuite les techniques très esthétiques
de collages de céramiques (facettes et micro facettes) souvent combinées aux méthodes
d’éclaircissement des dents. L'idée est de régénérer (greffe conjonctive, régénération
osseuse) ou de recréer les organes absents (implants versus bridge traditionnel) pour
éviter ou repousser les échéances de prothèses mutilantes (dépulpations des dents,
bridge complet, prothèse amovible) à un âge plus avancé.
Sous l’éclairage du tryptique décisionnel « coût/santé/sécurité », cette approche peu
invasive est efficace à long terme.
Le chirurgien-dentiste : artisan du sourire de la vie !
Artisan du sourire, le chirurgien-dentiste accompagne chaque individu tout au long de sa
vie, séquencée en 4 étapes majeures qui se reflètent tout naturellement dans les dents.
On peut puiser dans les richesses de la nature pour établir la métaphore :
- la dent de l’enfance à l’adolescence : la dent est vierge, lumineuse, à texture de
surface marquée avec parfois des trilobes et des formes en fleur de lys, riche en effet
opalescent
- la dent de l’adulte : les couleurs sont plus chaudes et ensoleillées, à aspect de
surface plus lisse et aux facettes d’usure visibles
- la dent du senior : l’usure développe un aspect de surface émoussé luisant, les
couleurs se saturent, les collets des dents commencent à se dénuder et l’opalescence
tend à disparaître
- la dent du grand âge : la morphologie est très altérée par l’usure qui laisse apparaître
des plages de dentine importantes, l’émail restant est riche en micro craquelures, la
fluorescence augmente et les dénudations radiculaires sont généralement importantes.
La généralisation des prothèses CFAO (Conception et Fabrication Assistées par
Ordinateur) permet d’éviter les étapes de laboratoire longues, fastidieuses et aléatoires
pour la fabrication d’infrastructures céramiques ou métalliques. Cependant, elle préserve
la part indispensable de travail artistique et de personnalisation du « cosmétique » du
chirurgien-dentiste.
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La forme, la couleur et l’agencement des dents antérieures créées doivent conduire à un
sourire expressif et naturel. La personnalité, l’âge et le sexe sont les trois facteurs
classiques, mais toujours d’actualité, mis en place dès les années 50 par la
« dentogénique ». Les critères esthétiques communément admis évoquent l’équilibre des
formes, la régularité et la symétrie du sourire comme des objectifs importants dans les
restaurations prothétiques. Cependant, si les règles doivent être apprises il faut aussi
savoir les dépasser pour introduire la différence, la variabilité et l’asymétrie naturelle du
vivant dans la micro morphologie et les nuances colorées des restaurations esthétiques.
10 règles esthétiques de l’art du sourire
1- Le nombre d’or et la règle d’or développés par Euclide (les proportions d’or – l’homme
de Vitruve de Léonard de Vinci) constituent un canon grec communément admis en
chirurgie esthétique. Il ne se vérifie pas pour la restauration du sourire.
2- Quel que soit l’âge, les dents naturelles ne sont pas blanches, toutes les dents
humaines ont une dominante jaune orangée avec des nuances plus jaunes ou plus
roses suivant les cas.
3- Le canon esthétique de « l’incisive centrale dominante » est communément admis
dans la réhabilitation d’un sourire.
4- Les incisives centrales doivent toujours être reconstruites avec leurs grands axes
parallèles au médian du visage et leurs bords incisifs parallèle à la ligne du regard.
5- Le bord des incisives du haut doit créer une ligne courbe identique à celle de la lèvre
inférieure lors du sourire.
6- « L’esthétique rose », celle de la gencive, est tout aussi importante que la beauté
propre des dents, elle constitue un écrin qui par sa couleur (absence d’inflammation) et
sa régularité (ligne gingivale) contribue à la beauté du sourire.
7- La déviation des incisives par rapport au médian du visage et en particulier par
rapport au nez n’a que peu d’impact sur l’harmonie d’un visage.
8- La texture de surface est un élément essentiel pour traduire l’âge d’une dent.
9- Tous les visages sont asymétriques et présentent une hémiface droite et gauche, il
existe une attractivité plus grande pour le visage gauche qui est porteur de nos
émotions.
10- L’asymétrie subtile du sourire donne vie à l’expression du visage et doit
s’harmoniser avec l’importance des hémifaces droites et gauches en particulier
l’agencement des incisives latérales et des canines par rapport aux incisives centrales.
Droits photos - DR : visuels communiqués par le Dr Lasserre
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