Georges Malek Cybersécurité Liberté

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Georges Malek Cybersécurité Liberté
Par Georges Malek
Etudiant en MBA Management du Risque
ILV Institut Léonard De Vinci
[email protected]
1- DEFINITION DES TERMES
Tout d’abord pour mieux comprendre les enjeux, il est intéressant de voir les définitions
des principaux termes. Interrogeons-nous sur la liberté, qu’est-ce donc ? La possibilité d’agir
selon ses propres choix, sans avoir à en référer à une autorité quelconque (définition
Larousse). Autre définition « La liberté ne connaît aucune chaîne, aucune limite, aucune
restriction » : si on veut la limiter, on prend le risque de la perdre. Ou encore la bien célèbre
phrase "la liberté des uns s'arrête là où commence celle des autres." La liberté a un sens très
large, la perdre représente par conséquence un enjeu majeur.
De son côté, la cyber-sécurité peut se définir dans une approche de système
d’information qui est un ensemble de techniques et de non techniques de protection
permettant à un système d’information de résister à des évènements susceptibles de
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compromettre la disponibilité, l’intégrité ou la confidentialité des données stockées, traitées
ou transmises (définition SI par la SSI).
Pour aller plus loin, la sécurité peut toujours être considérée comme le compromis entre
un besoin de protection et un besoin opérationnel, l’arrivée de nouvelles technologies et les
ressources financières/ limitations techniques. On retrouve un peu la loi de l’offre et de la
demande, on assure sa sécurité en fonction de ses moyens.
La sécurité est un mot bien large, par sécurité on entend : la disponibilité des
informations, des SI, l’Intégrité : que l’information n’ait pas été corrompue, pas modifiée et
toujours valable, la confidentialité est aussi un élément important, certaines informations
n’ont de valeur que si elles sont limitées dans un périmètre restreint et enfin la preuve. La
sécurité est un processus continu, elle doit faire face et s’adapter à l’arrivée de nouvelles
technologies qui évoluent et aux conditions du réel, en gardant l’équilibre entre mesures de
sécurité et fonctionnalités permises.
Sans aller trop loin voici les briques de base de la cyber-sécurité : on y retrouve les antimalwares, l’authentification forte, les firewalls, les IPS (Intrusion Prevention Systems), le
chiffrement, les réseaux privés virtuels, la surveillance de l’accès au Web, la destruction de
fichier et la sauvegarde.
2- LES ENJEUX
Il est aussi important de s’intéresser aux enjeux. Que risque-t-on de perdre quand on
parle de liberté par rapport à la cyber-sécurité ? On peut potentiellement perdre des
informations personnelles et professionnelles, des données confidentielles qui seront
librement accessibles et une fusion entre vie publique et vie privée. Qu’elles visent les
utilisateurs publics ou privés d'internet, les cybers attaques coûtent aujourd'hui 380 milliards
d'euros par an et pourraient représenter 2 200 milliards d'euros de pertes pour l'économie
mondiale d'ici 2020 (La Dépêche.fr Le 10/04/2015). Face à ces énormes enjeux, la cybersécurité est désormais une priorité, non seulement pour les états, mais également dans un
sens plus large, toute personne naviguant sur internet ou travaillant avec des outils
connectés
On peut définir une échelle de gravité en fonction de l’impact de 1 à 4.
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Le niveau 1 : limité, non détectable par le client et sans conséquences graves,
seulement des perturbations faibles.
Niveau 2 : Important, est lui détectable par le client a des impacts financiers, sur
l’image et des conséquences juridiques limitées.
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Niveau 3 : Grave, implique une désorganisation de l’activité, forte atteinte à l’image,
à des conséquences financières et juridiques très fortes et insupportables.
Niveau 4 : Critique, ne permet plus de remplir le processus, plus aucune satisfaction
pour le client, atteinte à la crédibilité de l’organisme.
3- INSERTION DE LA QUESTION DE LA CYBER-SECURITE DANS
NOTRE SOCIETE
Ces questions de cyber-sécurité sont nouvelles, liées à notre génération et aux
évolutions de la technologie. Auparavant nos systèmes d’information n’étaient pas aussi
performants qu’ils ne le sont aujourd’hui, l’apparition de différents moyens de
communication change notre manière de vivre, la façon dont nous interagissons entre nous,
de communiquer, de vivre en société, de faire de la guerre et de l’intelligence économique.
Même si on sacrifiait un peu de notre liberté, ça ne réglerait pas tous nos problèmes, la
sécurité d’aujourd’hui n’est pas celle de demain. L’imprimerie, la radio, la TV, les pc,
internet, les objets connectés, les réseaux sociaux, le potentiel innovation en matière de
communication bougent sans cesse et repoussent toujours plus loin les limites de ce qu’on
croyait impossible. Je suis sûr qu’à l’apparition de chacune des précédentes inventions
citées, on avait peur de l’impact que cela aurait sur notre liberté, vie privée et vie au sens
large.
A l’heure actuelle on peut même se demander à quelle vitesse disparaît notre liberté
due à notre vie online (avec les réseaux sociaux et Facebook en 1er lieu), obligatoire pour
vivre et s’intégrer aux communautés. On a déjà abandonné une partie de notre liberté :
abandon de notre vie privée pour une vie publique.
On peut se demander à quoi ressemblera le web 3.0, avec le développement du tout
connecté (TV, Voiture, montre, Réfrigérateur, etc…), le développement du Cloud, l’arrivée de
la 5G pour supporter tout ce réseau. Autant de choses qui amélioreront l’accessibilité, la
mobilité et l’universalité.
4- LES CONSEQUENCES POSSIBLES : HYPOTHESES
Prenons l’hypothèse où nous acceptons de perdre un peu de liberté pour plus de
sécurité. Cela ne serait valable que pour un temps, nous n’avons aucun moyen de garantir
notre cyber-sécurité éternellement, juste momentanément. Alors que si on sacrifie notre
liberté, on peut presque être sûr de la perdre définitivement. Et en ce sens la citation est
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vraie si on est prêt à sacrifier notre liberté pour plus de sécurité, on risque de perdre les
deux.
Donc, la logique serait de ne pas transiger, car si on est prêt à faire des sacrifices, on est
prêt à abandonner notre liberté ! C’est par conséquent un aveu de faiblesse. Si on s’autorise
à perdre de la liberté, où est la limite ? Où nous arrêterons-nous ? C’est une pente glissante
que de suivre ce chemin, à l’issue bien incertaine.
La sécurité ne sera jamais totale ni existante, elle sera toujours partielle : il faut donc
savoir ce que l’on veut protéger, ce qui nécessite de la cyber- sécurité. Vouloir une sécurité
absolue est un objectif idéaliste et inatteignable. Notre vision et notre volonté d’avoir plus
de sécurité et de cyber-sécurité a évolué avec le temps. Les mentalités ont changé, notre
perception du risque et nos peurs également. Les processus de judiciarisation, l’éclatement
de certains tabous, font que notre seuil de tolérance avec les menaces potentielles diminue,
nous avons des acquis et nous voulons les protéger, c’est pourquoi il y a ce débat autour de
plus de cyber-sécurité.
Mais nous Français, nous voulons des résultats, et des résultats immédiats ! Suite aux
récentes attaques qui ont frappé Paris avec l’affaire Charlie Hebdo, les Français sont
favorables à plus de répressions pour moins de libertés (selon une enquête Ipsos/SopraSteria pour Le Monde et Europe 1 du 22/01/15) sans entrer dans les détails de l’enquête.
Le monde ne restera pas figé et la règlementation évolue déjà, les OIV (218 Opérateurs
d’Importance Vitale : entreprises dont l’activité est jugée stratégique pour la nation) doivent
déjà par décret répondre à de nouvelles obligations en matière de cyber-sécurité. Les OIV
devront mettre en place des systèmes de détection des intrusions dont ils font l’objet et
procéder à des audits en faisant appel soit à l'Agence Nationale de la Sécurité des Systèmes
d’information (ANSSI), soit à des prestataires labellisés comme Thales. De plus, ils devront
communiquer sur les intrusions dont ils sont victimes, chose que les OIV sont très réticentes
à effectuer.
5- SOMMES-NOUS PRETS ?
Un des termes de cette citation intéressant à analyser, c’est le « mérite » : nous
considérons nos privilèges et libertés comme acquis, dans notre mentalité, il est
inimaginable de perdre et notre liberté et notre cyber-sécurité.
Mais sommes-nous prêts à plus de cyber-sécurité pour moins de liberté ? Cela me
rappelle une citation de Blaise Pascal « La justice sans la force est impuissante, la force sans
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la justice est tyrannique.» ce qui démontre bien que la frontière est toujours très fine et
mince entre liberté et sécurité, la question primordiale est alors comment établir un juste
équilibre entre justice et force, la force étant plus de sécurité. Est-ce seulement possible
d’avoir la liberté et la cyber-sécurité ? Un proverbe chinois dit « En établissant des lois il faut
être sévère ; en les appliquant, il faut user de clémence », dans un monde virtuel, peut-on
appliquer cette idéologie ? Avec les autorités de contrôle ?
Imaginons un instant les conséquences de notre perte de liberté sur le développement
de notre société, « Si un arbre est sorti de terre sous un baobab, il meurt arbrisseau » ce
proverbe africain souligne bien que si une personne n’a pas assez de liberté pour grandir,
elle finit par étouffer et ne plus pouvoir vivre. Une société qui se développe sur un système
qui mène sa population à la dépression, aux manques d’alternatives et de choix mènerait
sûrement au chaos, au développement des marchés noirs, ou à l’esclavagisme. Par
conséquent : non ! Nous ne devons pas sacrifier notre liberté (même un peu) pour plus de
cyber-sécurité, le risque et les enjeux sont bien trop grands ! Et comme le dit Jean-Paul
Sartre « Etre libre, c'est savoir dire non. ».
6- CONCLUSION
D’un point de vue plus neutre, on peut se poser la question de savoir si on n’a jamais été
vraiment libre ? Dans certaines mesures, je dirais que non, nous suivons un ensemble de
règles de bonnes conduites. Pour bien vivre en société, nous obéissons aux lois et au Droit.
Nous sommes libres de nos choix, mais nos choix sont fortement influencés, donc d’une
certaine manière nous avons déjà perdu notre liberté. Et même si nous voulons plus de
cyber-sécurité ce n’est qu’un mirage illusoire « Inutile de tirer votre épée pour couper de
l’eau ; elle continuera de couler » (Proverbe chinois), tout finira par s’autoréguler.
On améliorera sans cesse notre cyber-sécurité, mais les intrus trouveront toujours une
faille par laquelle passer, comme un cercle infini. Par conséquent, il faut essayer de trouver
les meilleurs compromis pour garder notre liberté et maintenir un minimum de cybersécurité vitale au développement. Tel est le challenge de ce 21ème siècle.
Georges Malek
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