La coopération territoriale dans les politiques touristiques
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La coopération territoriale dans les politiques touristiques
UNIVERSITÉ DE TOULOUSE II - LE MIRAIL INSTITUT SUPERIEUR DU TOURISME, DE L’HÔTELLERIE ET DE L’ALIMENTATION MASTER TOURISME ET HÔTELLERIE Parcours « Tourisme et Développement» MÉMOIRE DE PREMIÈRE ANNÉE La coopération territoriale dans les politiques touristiques de développement local Présenté par : Sandra LAVERGNE Année universitaire : 2012 - 2013 Sous la direction de : Laurence BARTHE L’ISTHIA de l’Université de Toulouse II – Le Mirail n’entend donner aucune approbation, ni improbation dans les projets tutorés et mémoires de recherche. Ces opinions doivent être considérées comme propres à leur auteur(e). REMERCIEMENTS________________________________________ Je tiens à remercier, tout particulièrement, Laurence BARTHE, mon maître de mémoire, pour ses nombreux conseils, très précieux, son aide et sa présence tout au long de ce travail de recherche. J’aimerais également remercier l’ensemble des professeurs de l’ISTHIA ; leurs enseignements de Licence 3 et de Master 1 ont contribué à enrichir considérablement ma réflexion. J’adresse, également, ma gratitude à l’ensemble des professionnels qui ont accepté de m’accorder de leur temps dans le cadre de mes entretiens exploratoires. Les échanges effectués lors de cette phase ont été des plus enrichissants et m’ont permis d’obtenir des informations clés dans le cadre de ma réflexion. Merci à M. Jean SECHERESSE, maître de stage de Licence 3, qui m’avait déjà accordé sa confiance et qui a accepté aimablement de partager son expérience professionnelle et ses ressentis concernant ma thématique de recherche. Merci à Mme Armelle BASTARD, ancienne maître de stage durant mon BTS, qui par le passé m’a donné ma chance et a accepté sans hésitation de m’aider dans le cadre de ce mémoire. Enfin, je remercie Mme Anne-Paule BAÏS et M. COURET d’avoir accepté de me recevoir et d’étoffer mon travail quant à la question de la coopération transfrontalière. Je terminerai par remercier ceux qui ont cru en moi et qui ont su m’apporter bien plus qu’un simple soutien : mes parents, mes amis, ma sœur et tous ceux qui ont su être présents durant ce travail de recherche. Un grand merci à toi, Sébastien. 4 SOMMAIRE_______________________________________________ REMERCIEMENTS ................................................................................................................... 4 SOMMAIRE ............................................................................................................................... 5 INTRODUCTION GENERALE ................................................................................................. 7 PARTIE 1 - TOURISME ET COOPERATION TERRITORIALE : DE NOUVEAUX ENJEUX POUR LE DEVELOPPEMENT LOCAL .............................................................. 9 INTRODUCTION DE LA PARTIE 1 ....................................................................................... 10 CHAPITRE 1 – L’organisation territoriale en France ................................................................ 11 1 – La notion de territoire : un terme à éclaircir ......................................................................... 11 2 – Le découpage territorial administratif en France ................................................................ 16 CHAPITRE 2 – Le tourisme au cœur des politiques touristiques : un vecteur de développement local ? ............................................................................................................... 22 1 – La notion de développement ............................................................................................... 22 2 – Les politiques touristiques ................................................................................................... 26 3 – Les acteurs du tourisme : rôles et compétences .................................................................. 30 CHAPITRE 3 – Coopération, mise en réseau : des éléments moteurs dans le développement touristique ........................................................................................................ 36 1 – La coopération, définition ................................................................................................... 36 2 – Une volonté de s’unir : la création de nouvelles entités territoriales .................................. 38 3 – La coopération à l’échelle transfrontalière .......................................................................... 46 CONCLUSION DE LA PARTIE 1 ........................................................................................... 51 PARTIE 2 – LES ENJEUX DE LA COOPERATION TERRITORIALE DANS LES POLITIQUES TOURISTIQUES .................................................................................. 52 INTRODUCTION DE LA PARTIE 2 ........................................................................................ 53 CHAPITRE 1 – La coopération, un vecteur de valorisation territoriale et touristique .............. 54 1 – Un lien évident entre démarche coopérative et valorisation territoriale ............................... 54 2 – L’Espace Mont-Blanc, une illustration de la valorisation territoriale ................................... 56 CHAPITRE 2 – La mise en réseau d’un système d’acteurs au cœur de la démarche coopérative ................................................................................................................................ 59 1 – Des acteurs issus de structures hétérogènes… ..................................................................... 59 5 2 – …au service d’une ingénierie touristique ............................................................................ 64 3 – Les obstacles relatifs à la coopération ................................................................................. 69 CONCLUSION DE LA PARTIE 2 ........................................................................................... 73 PARTIE 3 – TOURISME ET COOPERATION TERRITORIALE : QUELS LEVIERS ? QUELS OBSTACLES ? ETUDES DE CAS ......................................................................... 74 INTRODUCTION DE LA PARTIE 3 ........................................................................................ 75 CHAPITRE 1 – La coopération à l’échelle locale, cas de la Touraine du Sud ......................... 76 1 – Présentation du territoire ..................................................................................................... 76 2 – Tourisme et coopération au cœur de la valorisation touristique .......................................... 78 3 – Les limites de la coopération ............................................................................................... 82 CHAPITRE 2 – La coopération à l’échelle transfrontalière, cas du syndicat mixte Arize-Lèze de coopération transfrontalière .............................................................................. 87 1 – Le syndicat mixte Arize-Lèze de coopération transfrontalière, porteur du projet «La culture en héritage » ........................................................................................................... 87 2 – Quel bilan tirer de cet exemple de coopération transfrontalière ? ....................................... 90 3 – Les perspectives d’avenir ..................................................................................................... 95 CONCLUSION DE LA PARTIE 3 ........................................................................................... 98 CONCLUSION GENERALE .................................................................................................. 99 BIBLIOGRAPHIE .................................................................................................................. 101 ANNEXES .............................................................................................................................. 104 TABLE DES FIGURES ET DES TABLEAUX ....................................................................... 112 TABLE DES MATIERES ........................................................................................................ 113 6 _____________INTRODUCTION GENERALE_____________ L’année de Master 1 est une année décisive dans le parcours universitaire ; l’exercice le plus délicat est bien entendu le mémoire de recherche. On nous invite à mener une réflexion sur un sujet de notre choix… La tâche est loin d’être facile ; le tourisme est un domaine riche, qui concerne des thématiques diverses et variées. J’ai donc fait le choix de me référer à ma propre expérience professionnelle. A plusieurs reprises, j’avais pu observer la présence de problématiques liées à l’organisation territoriale, notamment dans la mise en œuvre d’actions touristiques. La multitude d’espaces, d’échelles, de professionnels, d’élus mais également, la multiplication d’actions touristiques, m’ont incité à me pencher sur cette problématique. Cela m’a amené à me questionner de manière très pragmatique : Comment s’organise le secteur touristique en France ? Comment parvenir à surmonter ces problématiques dans l’optique d’obtenir une homogénéité dans les politiques touristiques ? Ces éléments apparaissent comme des défis à relever dans le domaine du tourisme. Malgré tout, de manière générale, un élément se distinguait de manière récurrente : la coopération. Dans un contexte de profonds changements institutionnels et politiques en France, la coopération semble omniprésente, que ce soit dans les domaines politiques, économiques ou sociaux. D’ailleurs, la construction européenne illustre parfaitement cette volonté actuelle d’unir les nations, de créer un espace unique, tout en conservant les spécificités de chacun. Le domaine touristique répond également à cette logique. Ainsi, j’ai pris le parti de me lancer dans une réflexion relative à cette thématique, véritable sujet d’actualité. Associé à ce sujet dense, j’ai souhaité orienter ma réflexion vers la problématique du développement local, devenu une préoccupation majeure des territoires. Mon ambition de départ, pour la réalisation de mon mémoire, était de me positionner sur le territoire national français afin de traiter de l’ensemble des formes coopératives présentes dans le tourisme. J’aspirais à comprendre les liens et les relations existantes entre ces thématiques, et ainsi maîtriser le système en place. C’est en cela que j’ai souhaité m’orienter vers les enjeux de cette coopération, afin d’en déceler les leviers et les obstacles. Mon raisonnement s’articule donc autour de la problématique suivante : Quels sont les enjeux de la coopération territoriale dans les politiques touristiques de développement local ? Dans un premier temps, il s’agira de fixer un cadre théorique à notre réflexion, ce qui 7 constitue une démarche nécessaire dans la mise en œuvre de notre raisonnement. Pour cela, il nous faudra définir et éclaircir les nombreux concepts. Il est, donc, essentiel d’appréhender la notion de territoire, de saisir l’évolution territoriale en France, tout en pointant les mutations liées à la décentralisation. Constituant l’un des piliers de notre réflexion, il conviendra d’étudier la notion de développement local, ainsi que l’organisation du tourisme en France, avec les acteurs qui y sont rattachés. Enfin, dernier élément clé, nous traiterons la notion de coopération, ainsi que ses différentes mises en œuvre. Nous évoquerons également les nouvelles formes de territorialités, les enjeux, et leur place dans les politiques touristiques. Nous poursuivrons ce mémoire, en invoquant nos deux postulats, axés sur les enjeux majeurs de la coopération. Cette partie sera l’occasion d’exposer ces hypothèses de recherche, mais également, de soulever d’autres questionnements liés à la problématique de la coopération, d’en saisir de nouvelles dimensions, et ainsi, aller au-delà des données de départ évoquées en première partie. Enfin, nous terminerons par l’étude de deux cas spécifiques, illustrant deux formes coopératives distinctes : l’intercommunalité et la coopération transfrontalière. Nous relèverons les problématiques liées à chaque espace partenarial, en dégageant les leviers et les obstacles en jeu. Pour réaliser ce mémoire, un travail de recherches documentaires étayé a été fait, associé à des entretiens auprès de professionnels, directement concernés par la question de la coopération territoriale dans le secteur touristique. Nos efforts de recherche se sont basés sur des lectures auprès d’ouvrages, de revues, de rapports, de travaux universitaires, de sites internet. Ce travail a été complété par quatre entretiens exploratoires, me permettant d’affiner ma réflexion tout en faisant apparaitre des singularités liées aux enjeux de la coopération. 8 PARTIE 1 Tourisme et Coopération Territoriale: de nouveaux enjeux pour le développement local __________________________________________________________ 9 INTRODUCTION DE LA PARTIE 1____________________________ Cette première partie va nous permettre de poser les principes fondamentaux dans notre réflexion. La thématique de la coopération territoriale induit de nombreux concepts latents comme nous pourrons le constater tout au long de ce mémoire. Ainsi, avant d’aborder ce sujet, il conviendra d’analyser la notion même de territoire, pour ensuite établir un état des lieux quant à l’organisation territoriale en France. Cet historique va nous permettre de comprendre l’évolution liée au territoire français, en termes d’organisation et de structuration, tant aux niveaux spatial que politique. Suite à cela, nous poursuivrons notre réflexion en nous orientant vers le concept de développement local, qui constitue l’un des enjeux majeurs des politiques publiques. Nous verrons, également, que cette notion est en corrélation avec le domaine du tourisme. Nous définirons donc, ce que représentent les politiques publiques, dans l’optique de saisir quels acteurs sont en jeu dans ce type de démarche. Nous terminerons cette première partie en évoquant la notion de coopération, qui nous le verrons, incarne l’élément clé de notre réflexion. La coopération représente le tronc commun des différentes notions que nous aurons défini préalablement. Nous pourrons distinguer que la coopération s’établit sur différentes échelles, permettant ainsi d’illustrer la notion d’interterritorialité. 10 L’organisation territoriale en France Ce premier chapitre permet de poser un premier cadre à notre réflexion. Ainsi, il est essentiel de commencer par définir des notions liées à la thématique de ce mémoire, telles que le territoire, la gouvernance ou l’identité. Il s’agira, également, de comprendre et d’appréhender les diverses mutations de l’organisation territoriale française, et donc de réaliser une rétrospective, qui nous permettra, par la suite, d’en saisir les enjeux actuels. 1. La notion de territoire : un terme à éclaircir Si l’on s’intéresse à la notion de territoire, on constate qu’elle a subi de nombreuses mutations. En effet, chaque civilisation possède un rapport singulier du territoire ; longtemps associé à la religion, au pouvoir politique, ou encore au système sociétal. En France, on a accordé des importances différentes au territoire, en fonction des époques notamment. 1.1 Définition du territoire Le terme « territoire » semble de plus en plus utilisé actuellement, et est associé à de nombreux domaines ; l'aménagement, la géographie, le tourisme. De ce fait, il apparaît nécessaire de le définir afin de l'appréhender au mieux. Le territoire s'apparente à une notion polysémique, complexe et donc, difficile à définir. Ainsi, il convient de s'intéresser aux différents aspects auxquels il peut être associé. L'origine de ce terme vient du latin « territorius » qui renvoyait à une zone conquise par l'armée romaine et gouvernée par une autorité militaire1. D'après le Larousse2, le sens premier du terme territoire désigne « Une étendue de pays ressortie à une autorité, à une juridiction quelconque. Le territoire d'un État est l'espace terrestre, maritime et aérien sur lequel les organes de gouvernement peuvent exercer leur pouvoir ». Cette première définition nous permet de constater, que de prime abord, un territoire est avant tout un espace délimité, dont les frontières sont liées à des caractéristiques géographiques, à un pouvoir et à une gouvernance politique. Le dictionnaire précise qu'il peut s'agir également d' « Une étendue dont un individu ou une famille d'animaux se réserve l'usage » et enfin « Un espace relativement bien délimité que quelqu'un s'attribue et sur lequel il veut garder toute son autorité ». Ces différentes définitions mettent en exergue la diversité sémantique du terme. 1 2 PESQUEUX Yvon. La notion de territoire. Colloque Propedia – Observatoire économique des banlieues, 2009, p 3 Dictionnaire du Larousse http://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/territoire 11 Dans le cadre de cette réflexion, il conviendra de s'intéresser tout particulièrement aux domaines politique, économique et anthropologique en lien avec la notion de territoire. 1.2. Le territoire comme objet politique et économique Le lien qui unit un territoire à la politique est relativement ancestral puisque, déjà à l'époque de la colonisation, les colonies constituaient des territoires nouveaux sur lesquels la vision politique du colonisateur était appliquée. On comprend, donc, qu'un territoire est depuis longtemps rattaché à un espace politique. 1.2.1. Le territoire, symbole du pouvoir politique Jean Gottmann s’illustre comme un spécialiste de la notion de territoire, et s’intéresse notamment à la notion de territoire en tant qu’espace géographique politique. Selon lui, les espaces géographiques coïncident avec les espaces politiques, les deux notions étant inter-reliées. Il considère, de manière juste, que les espaces géographiques correspondent à des critères physiques et naturels et résultent également de l’action de l’Homme. Il fait appel à la notion de « cloisonnement », illustrée de la manière suivante : « L'espace géographique est divisé en entités politiques, à l'intérieur desquelles s'exerce l'action humaine. » (Prévélakis in Bonnemaison, 1996, p 83). Afin d’expliquer la perpétuelle mouvance de la carte politique, sa théorie s’oriente vers la dualité entre « circulation et iconographie ». Le terme « circulation » renvoie à des déplacements inscrits dans un espace physique et engendre un bouleversement des cloisonnements. En revanche, « l’iconographie » est identifiée comme l’ensemble des aspects culturels auxquels sera attachée une communauté (folklore, religion etc.). De ce fait, « l’iconographie », contrairement à la circulation, tend à résister aux changements, privilégiant un cloisonnement statique. Selon Gottmann, cette dualité configure le territoire ; sa théorie repose sur l’existence d’un lien entre les notions de souveraineté et de territoire dans le système politique3. En France, le découpage territorial s’organise en territoires politico-administratifs. De ce fait, un territoire sera nécessairement lié à la notion de pouvoir politique. Nous comprenons donc, qu’un territoire est lié à une autorité souveraine, représentée par le gouvernement d’un Etat. Le pouvoir politique ne peut prendre effet, que s’il est appliqué sur un espace défini, à une population donnée et fixe les règles politiques. De ce fait, le territoire est un espace construit à travers l’exercice d’un pouvoir politique. 3 PREVELAKIS Georges. La notion du territoire dans la pensée de Jean Gottmann. in Bonnemaison Joël, Territoire. Paris : l’Harmattan, 1997, 143 p. 12 1.2.2. Le territoire comme espace de gouvernance Le Larousse définit la gouvernance comme « l'action de gouverner »4, c’est-à-dire, le fait « d'exercer sur un pays, un peuple, le pouvoir politique, en particulier exécutif, de diriger les affaires publiques, la vie publique d'un État ». Ajoutons que « La gouvernance constitue un concept polysémique réapproprié depuis une vingtaine d’années tant en sciences économiques qu’en sciences politiques. » (Leloup, Moyart, Pecqueur, 2005, p 324). Ce terme a évolué et, est aujourd’hui, associé aux modalités d'actions décisionnelles à plusieurs. Globalement, la gouvernance s’impose comme cadre de mise en œuvre des politiques publiques. Cependant, d'un point de vue des sciences politiques, la gouvernance remet en cause le système traditionnel d'État-nation centralisé. 5 L'accent est donc mis sur un mode d’organisation plus moderne, qui lie et relie divers acteurs, prenant part aux actions publiques. Cette théorie met en exergue la nécessité, pour ces acteurs, de collaborer et d'interagir. Actuellement, on parle de plus en plus de gouvernance locale, voire de gouvernance territoriale ; cette notion étant étroitement liée à celle du territoire. Elle induit la présence d'une coordination entre les pouvoirs publics et donc d'une interaction entre les acteurs. Pour ce faire, la gouvernance s'inscrit dans la mise en œuvre d'actions opérationnelles, reflétant la mise en œuvre d'une coopération institutionnelle. Ainsi, la gouvernance territoriale permet de construire une territorialité nouvelle. 1.2.3. La dimension économique au cœur du territoire Un territoire se construit également autour de la dimension économique. Elle apparait via les différents tissus économiques locaux, participant au maintien d’activités et donc à la création d’une certaine attractivité territoriale. Ces activités économiques n’existent qu’en présence de ressources territoriales significatives (industrielles, culturelles, touristiques etc.). La valorisation de ces dernières contribue à l’optimisation des conditions de vie pour les populations locales. Yvon Pesqueux évoque cet aspect dans des actes de colloque intitulés « La notion de territoire »6. Il précise qu’un territoire détient des ressources, assimilables au fondement d’une offre économique. Ces ressources économiques tendent à participer à la construction d’un territoire. En outre, Yvon Pesqueux se réfère à la notion de « polarisation », dimension essentielle du territoire économique. En effet, des activités économiques se concentrent en un espace défini et s’illustrent en tant que « pôles de compétitivité », « pôles de développement » ou encore « pôles d’excellence », aussi regroupés sous l’anglicisme « cluster ». Ce terme s’inscrit dans la notion plus globale d’économie 4 Dictionnaire du Larousse http://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/gouvernance LELOUP F. MOYART L. PECQUEUR B. La gouvernance territoriale comme nouveau mode de coordination territoriale? Géographie Economie Société, 2005, Vol 7, p 321 à 332 6 PESQUEUX Yvon. La notion de territoire. Colloque Propedia – Observatoire économique des banlieues, 2009, 27 p 5 13 de territoire. Ce modèle, explicité par Roger Nifle7, dans lequel le territoire ne fait qu’un avec l’activité économique considérant « le territoire comme une ressource au travers de son patrimoine naturel et culturel ». C’est ainsi que l’économie et le territoire sont deux entités qui se confondent. Nous constatons, ici, que le territoire relève de dimensions diverses, et non seulement géographiques, traduisant uniquement une réalité physique. Cette vision systémique montre en quoi les dimensions politique et économique construisent un territoire et met en avant une certaine interaction. Nous verrons, par la suite, que la dimension identitaire contribue également à déterminer un territoire. 1.3 Les dimensions identitaire et sociale du territoire Notre réflexion nous amène à concevoir le territoire de manière transversale, et donc moderne. Aujourd’hui, on s’aperçoit qu’un territoire fait référence, de manière évidente, à une dimension identitaire. Avant d’expliciter le lien qui existe entre territoire et identité, il convient de définir la notion même d’identité. 1.3.1. L'identité L’identité représente une notion particulièrement complexe et polysémique. Il va s’agir de définir ses principales caractéristiques dans un premier temps. Faisant référence au Larousse8, nous constatons que le terme d’identité vient du latin « identitas », qui signifie « ce qui est même » ; il est ensuite défini ainsi : « caractère permanent et fondamental de quelqu'un, d'un groupe, qui fait son individualité, sa singularité ». L’identité fait donc référence à un caractère commun permettant une certaine unicité. Il est précisé que ce terme relève de la psychologie et fait état d’un sentiment d’appartenance, qui va unir les membres d’un même groupe ; le fait d’appartenir à une catégorie sociale, permet, notamment, d’illustrer ce propos. L’identité revêt, également, la notion d’altérité, laissant entendre qu’une identité se formalise et résulte d’une confrontation avec autrui. Cela induit une mise en échange avec les autres. Cependant, l’identité s’articule autour de diverses dimensions et de différents domaines ; l’identité politique, sociale, géographique etc. Dans le cadre de cette réflexion, nous nous concentrerons principalement sur la notion d’identité collective plutôt qu’individuelle. Celle-ci met en exergue un principe fondamental : le fait, pour un groupement d’individus, de partager des traits communs, quelle que soit leur nature. 7 NIFLE Roger. L’économie de territoire. Journal permanent de l’Humanisme méthodologique. Juillet 2000. 8 Dictionnaire du Larousse http://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/identit%C3%A9 14 1.3.2. Le territoire et l’identité collective Après avoir défini la notion générique d’identité, nous tenterons d’expliciter le lien existant entre le territoire et l’identité collective. Le concept de territoire a évolué et il tend à se raccorder à de nouvelles dimensions, dépassant largement la simple dimension géographique : « Les limites du territoire ne sont plus définies en référence à un périmètre politicoadministratif (aspect politique) ou comme un fragment d’un système productif national (aspect économique), elles définissent le lieu d’intersection de réseaux (physiques ou humains, formels ou informels), de stratégies et d’interdépendances entre partenaires reliés entre eux, le lieu de production, de négociation, de partage d’un devenir commun. »9 Nous comprenons donc, que le territoire apparait comme un espace vécu, autrement dit, un espace de vie, correspondant à des dimensions sociale et culturelle. Il s’agit d’un lieu dans lequel les individus échangent et partagent un même mode de vie, des mêmes pratiques, des représentations similaires vis-à-vis d’un même territoire. Au-delà de cela, l’unicité identitaire semble provenir d’un ensemble d’éléments non matérialisables, tels que les représentations, les symboles, les perceptions. C’est en cela que l’on peut parler de liens relatifs à la culture et à l’imaginaire. Il faut noter que, dans un contexte de mondialisation, où l’unicité et l’homogénéité font rage, la volonté d’exprimer son appartenance à un territoire prend une dimension nouvelle et revêt une importance de plus en plus forte. Cela fait donc écho à la notion d’altérité de l’identité. En outre, il nous semble pertinent d’évoquer le concept d’identité territoriale. Yves Guermond10 définit l’identité territoriale comme un terme ambigu. Il explique en quoi il est réducteur de s’appuyer uniquement sur un espace géographique délimité afin de créer une identité territoriale. Il dénonce l’organisation territoriale française, la considérant comme le résultat d’une instrumentalisation politique : « Ce mécanisme de socialisation est celui de toutes les constructions politiques ; il consiste à rassembler une quantité suffisante de gens par l’identification des croyances personnelles à une croyance commune. » (Guermond, 2006, p 293). L’identité territoriale met l’accent sur des enjeux divers, qu’ils soient politiques, ou socio-culturels. De manière générale, un rapport particulier semble exister entre territoire et identité ; nous pourrions aller jusqu’à parler d’une certaine réciprocité, voire d’une interaction à double sens. Partant de ce postulat, il conviendra d’annoncer qu’un territoire résulte d’une construction sociale. 9 LELOUP F. MOYART L. PECQUEUR B. La gouvernance territoriale comme nouveau mode de coordination territoriale? Géographie Economie Société, 2005, Vol 7, p 326 10 GUERMOND Yves. L’identité territoriale : l’ambiguïté d’un concept géographique. L’Espace géographique, tome 35, p 291 à 297. 15 Le Larousse précise que la société désigne11 « Tout groupe social formé de personnes qui se réunissent pour une activité ou des intérêts communs ». Le territoire constitue, ici, un espace de réunion et de partage. D'apparence simpliste, un territoire se révèle en réalité bien plus complexe. Touchant aux domaines sociaux, économiques, politiques et culturels, il est donc nécessaire de l'aborder de manière systémique. Guy Di Meo fait transparaitre cette idée de manière manifeste : « Le territoire est une appropriation à la fois économique, idéologique et politique (sociale donc) de l'espace par des groupes qui se donnent une représentation particulière d'eux-mêmes, de leur histoire » (DI MEO, 1996, p 40). Plaçant le territoire au cœur de notre réflexion, il est indispensable d’étudier la construction territoriale française. Nous tenterons donc de dresser une rétrospective quant à son évolution, pour ensuite s’intéresser tout particulièrement aux bouleversements apparus dans les années 1980. 2. Le découpage territorial administratif en France Le territoire français a subi, à de multiples reprises, des modifications en termes d’organisation et de structuration. Nous verrons comment l’omniprésence de l’Etat et de ses représentants dans le pouvoir politique s’est vue transformée, notamment à partir des années 1980 suite à la décentralisation. Celle-ci va permettre de modifier et de redéfinir significativement la répartition des compétences sur le territoire national. 2.1. Bref historique de l’organisation territoriale française D’un point de vue politico-administratif, une organisation territoriale particulière s’est construite au fil du temps : on fait ici référence aux communes, aux régions administratives et aux départements. Ce phénomène est loin d’être récent, puisque, le territoire français, et en particulier son organisation territoriale, a connu de profondes mutations. Issu d’une tradition jacobine, le territoire français a longtemps été gouverné dans des optiques d’indivisibilité et d’unicité, dans lequel l’Etat a joué le rôle de centralisateur. Lors de la Révolution française, le territoire est découpé et divisé sous la forme de départements, de districts, de cantons et de de communes. A l’époque, il existait une volonté forte d’uniformiser le territoire et d’instaurer un système harmonieux au niveau national. Il s’agissait d’établir une administration centralisée et de mieux contrôler l’ensemble du territoire national. (Bonnemaison, Cambrezy, 1996, p 9). Cette vision reste quelque peu simpliste, malgré tout, et laisse entendre qu’il existe un cadre territorial bien délimité dans lequel aucune superposition n’existe. Bonnemaison et Cambrezy explicitent cette théorie et parlent d’une vision ordonnée et géométrique où l’espace est assimilé à 11 Dictionnaire du Larousse http://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/soci%C3%A9t%C3%A9 16 un plan continu (Bonnemaison, Cambrezy, 1996, p 8). Cette théorie a été nommée par Gilles Sautter « l’idéologie géographique ». 2.2. Qu'est-ce que la décentralisation ? Longtemps soumis au jacobinisme, le territoire français a été bouleversé lors de la montée de revendications régionales. Les années 1970 ont été les prémices de la décentralisation française, qui s’est concrétisée la décennie suivante. Nous allons donc nous intéresser tout particulièrement à ce phénomène, à sa mise en œuvre ainsi qu’à ses enjeux. 2.2.1. Définition de la décentralisation La décentralisation est un phénomène qui peut être défini de la façon suivante « processus d’aménagement de l’État unitaire qui consiste à transférer des compétences administratives de l’État vers des entités (ou des collectivités) locales distinctes de lui. »12 Le site de l'Assemblée nationale précise que « la décentralisation vise à donner aux collectivités locales des compétences propres, distinctes de celles de l'État, à faire élire leurs autorités par la population et à assurer ainsi un meilleur équilibre des pouvoirs sur l'ensemble du territoire. La décentralisation rapproche le processus de décision des citoyens, favorisant l'émergence d'une démocratie de proximité. »13 Il faut préciser que la décentralisation résulte d’un transfert de compétences mais également d’un transfert de moyens, de l’Etat aux collectivités territoriales. Elle a constitué un bouleversement majeur en France d’un point de vue politique mais également organisationnel. Il convient, dans un premier temps, de comprendre le contexte qui a permis sa création. 2.2.2. Le contexte politique La mise en place du système décentralisé en France s'inscrit dans un contexte politique particulier. En effet, durant les années 1970, les territoires se retrouvent confrontés à diverses difficultés, notamment pour l'accueil de nouvelles populations ; ils doivent faire également face à un déclin économique de certaines activités. Impuissants, les territoires n’ont alors ni les moyens, ni les compétences nécessaires pour agir. Ajouté à cela, le rôle de l'État-centralisateur se voit fortement remis en cause par les collectivités. Celles-ci considèrent que l'État ne peut continuer à assurer seul la gestion des nombreuses problématiques sur l’ensemble du territoire national et réclament, de ce fait, un réel renforcement du pouvoir local. Enfin, durant cette période, on remarque la montée en force de la régionalisation. Tous ces phénomènes entrainent l'apparition d'un véritable débat quant à 12 Vie publique, Qu'est-ce que la décentralisation? [en ligne] Disponible sur http://www.vie-publique.fr/decouverteinstitutions/institutions/collectivites-territoriales/principes-collectivites-territoriales/qu-est-ce-que-decentralisation.html Consulté le 11/11/12 13 Assemblée Nationale, Historique et patrimoine; la décentralisation 1789-2010 [en ligne] Disponible sur http://www.assemblee-nationale.fr/histoire/decentralisation.asp Consulté le 11/11/12 17 la mise en place effective de la décentralisation.14 2.3. Le processus de décentralisation La mise en place de la décentralisation en France vise à répondre à différentes problématiques : établir un rapprochement entre les citoyens et les décisionnaires, garantir un pouvoir local, en confiant aux collectivités des compétences et ainsi, encourager les initiatives locales. Pour cela, plusieurs étapes se sont succédées. 2.3.1. L'Acte I de la décentralisation : 1982 / 198315 Ce premier acte de la décentralisation s'est concrétisé au travers de différentes lois, que l'on a nommées les Lois Defferre, en lien direct avec le ministre de l'Intérieur de l'époque. Tableau 1 : Les lois fondatrices de la décentralisation PRINCIPES GENERAUX MESURES La loi relative aux Droits et Libertés des Communes, des Départements et des Régions - Libre administration des collectivités territoriales (fin de la tutelle étatique), - Reconnaissance des régions administratives comme des collectivités territoriales, 1982 - Autonomie territoriales. des collectivités - Obtention de la fonction exécutive pour les régions et les départements. La loi relative au Transfert et à la Répartition des Compétences entre les Communes, les Départements, les Régions et l'État - Transfert de compétences et de moyens de l’Etat aux collectivités territoriales, - Blocs de compétences : le développement économique, l’aménagement du territoire, l’urbanisme, l’action sociale, la formation professionnelle. - Pas de tutelle entre collectivités territoriales. les -Développement l’intercommunalité, de - Création des communautés de communes, 1983 loi « ATR » La loi d’orientation relative à l’Administration Territoriale - Démocratie locale, de la République - Principe de subsidiarité.16 6 février 1992 - Renforcement du mode de coopération locale.17 14 BARTHE Laurence, Politique d’aménagement touristique : la décentralisation, Cours de Licence 3 TD, département ISTHIA, Université de Toulouse II, 2011 15 BARTHE Laurence, Politique d’aménagement touristique : la décentralisation, Cours de Licence 3 TD, département ISTHIA, Université de Toulouse II, 2011. 16 VULBEAU Alain. Contrepoint – Subsidiarité et décentralisation. Informations sociales, juin 2010, n°162, p 85 17 Direction Générale des Collectivités Locales. La décentralisation a 30 ans. [en ligne] http://manage.dgcl.interieur.gouv.fr/sections/les_collectivites_te/vie_democratique_loc/decentralisation/document_compl et/downloadFile/file/decentralisation_30_ans.pdf?nocache=1332424699.2 Consulté le 14/11/12 18 loi Chevènement La loi relative au Renforcement et à la Simplification de la Coopération Intercommunale - Définition des compétences administrées à chaque échelle. 12 juillet 1999 - Création de la communauté d’agglomération (50 000 habitants au moins), - Création de la communauté urbaine (500 000 habitants au moins). 2.3.2. L'Acte II de la décentralisation : 2003 / 2004 On assiste à une véritable prise de conscience dans la nécessité de poursuivre les efforts entrepris dans la mise en œuvre de la décentralisation, de renforcer les compétences des collectivités locales et également, d'accorder plus d'importance aux citoyens. Ce changement s'est donc réalisé par la promulgation de différentes lois, mais aussi à travers une modification de la Constitution française. Il aura donc fallu attendre 2003 pour que la Constitution intègre la décentralisation. Cela se concrétise par l'inscription des collectivités territoriales dans différents articles. La loi relative aux Libertés et Responsabilités Locales – 13 août 2004 Cette loi tend à définir une nouvelle répartition des compétences entre les collectivités territoriales et l'État. Il est notifié, de manière précise, les différentes compétences transférées et les domaines concernés. On note, parmi eux, le domaine du développement économique, du tourisme, de la formation professionnelle.18 2.4. Quel bilan de la décentralisation ? Après avoir examiné les grandes étapes liées à la décentralisation, nous sommes en droit de nous demander quel bilan en tirer trente ans après, et quelles perspectives peuvent être envisagées. 2.4.1. 30 ans de décentralisation, quel bilan ?19 La décentralisation constitue, donc, un tournant majeur dans l'organisation territoriale française. Cependant, quel bilan pouvons-nous dresser trente ans après ? Aujourd’hui encore, la décentralisation fait objet de débat. Pour certains, elle ne représente qu’un désengagement flagrant de l’Etat aux dépends des territoires, pour d’autres, elle reflète une volonté de responsabiliser les acteurs locaux et de renforcer la démocratie locale. Tout d’abord, nous pouvons souligner que la décentralisation a permis de créer une véritable fonction publique territoriale, en construisant une ingénierie solide pour accompagner la mise en 18 Vie publique http://www.vie-publique.fr/actualite/panorama/texte-vote/loi-du-13-aout-2004-relative-aux-libertesresponsabilites-locales.html [en ligne] 19 BARTHE Laurence, Politique d’aménagement touristique : la décentralisation, Cours de Licence 3 TD, département ISTHIA, Université de Toulouse II, 2011. 19 œuvre des nouvelles compétences octroyées. En outre, on peut noter que les élus ont vu leur pouvoir local renforcé. De même, on a vu apparaître un nouveau profil d’élu, proche de celui du chef d’entreprise, beaucoup plus professionnalisé. La décentralisation a consenti, aux collectivités territoriales, à produire de véritables politiques locales. Précisons tout de même que le système de répartition des compétences et des moyens semble soulever des problèmes. En effet, toutes les collectivités n’ont pas les mêmes moyens et présentent des élus différents. Cette situation montre que des inégalités peuvent apparaître ou peuvent être accentuées entre elles. Les ambitions de départ se vouaient à instaurer une démocratie locale plus significative ; il semblerait que la décentralisation n’a en rien fait disparaitre l’Etat du paysage politique. Les moyens attribués aux collectivités territoriales proviennent en grande majorité de ce dernier, par le biais de dotations ou d’aides publiques. De plus, il établit, en aval, un contrôle quant aux décisions politiques des collectivités locales, qui doivent malgré tout, respecter le cadre général législatif et réglementaire de l’Etat. De ce fait, la notion d'autonomie reste quelque peu relative et on devine qu’un lien de subordination persiste. Bien que la décentralisation ait institué une diversification des initiatives locales, le sujet prête malgré tout au débat politique, notamment concernant la place et le rôle de l’Etat, ainsi que les questions d’autonomie. 2.4.2. Vers un Acte III de la décentralisation ?20 Sous la volonté du président de la République Nicolas Sarkozy, une réflexion s’est engagée sur les collectivités territoriales à partir de 2007. Pour cela, un comité a été créé, dénommé le comité Balladur ayant pour mission de répondre à trois préoccupations : - la simplification des institutions locales ; - le renforcement de la compétitivité des territoires ; - le progression de la solidarité territoriale. L’aboutissement de ce processus s’est matérialisé par le vote de la loi du 16 décembre 2010, portant réforme des collectivités territoriales. Celle-ci concerne les communes, la répartition des compétences, la mise en place d’un conseiller territorial. A partir du 1er juin 2013, il est spécifié que toutes les communes de France devront faire partie d’une intercommunalité, afin de répondre à l’objectif de clarification du maillage territorial, et ainsi achever la carte intercommunale. 20 Ministère de l’Intérieur. Brochure de présentation de la réforme des collectivités territoriales. La réforme des collectivités territoriales, une nouvelle impulsion pour les territoires [en ligne] Disponible sur [http://www.corse.pref.gouv.fr/IMG/pdf/Brochure_-_Reforme_des_collectivites_territoriales_cle7b1bf5.pdf] Consulté le 01/11/12 20 La réforme instaure, également, la mise en œuvre de nouvelles formes de regroupement sur la base du volontariat, telles que les métropoles, les pôles métropolitains ou encore les communes nouvelles. L’ambition, ici, est d’accentuer les démarches de coopérations territoriales au sein du territoire français. Concernant la clarification des compétences, la réforme prévoit de nombreuses mesures : - Chaque compétence sera à la charge d’un seul échelon territorial, (excepté pour les domaines du tourisme, du sport et de la culture, du fait de leur transversalité). - Les communes conserveront des compétences générales tandis que les départements et les régions se verront attribuer des compétences spécialisées. - La répartition des compétences entre les régions et les départements se fera au travers d’un schéma régional d’organisation des compétences et de mutualisation des moyens. Enfin, l’un des éléments clés de cette réforme concerne la création d’une nouvelle figure d’élu local : le conseiller territorial. L’objectif initial était de remplacer les 6 000 conseillers régionaux et généraux au profit de 3 500 conseillers territoriaux. Ayant vocation à être plus proche des territoires, il devait jouer un rôle de relai entre la région et les départements. L’objectif était de garantir une certaine homogénéité sur le territoire dans les domaines liés aux compétences attribuées. Cependant, le projet de loi a suscité de vives réactions et s’est vu abrogé par l’Assemblée Nationale. Un article du Parisien fait état des réactions de Nathalie Appéré, rapporteur PS à l’Assemblée, qui désigne les conseillers territoriaux comme des « élus hybrides » et Manuel Valls, ministre de l’Intérieur, d’ajouter « On a voulu faire des fausses économies sur la démocratie locale ».21 En définitive, il aura été important de définir ces notions, afin de préciser l’angle d’analyse choisi. Ce premier chapitre met également en exergue un bref historique quant à l’organisation territoriale en France, liée au système politique français et à son mode de gouvernance. Enfin, il aura été essentiel de discerner les différentes étapes de la décentralisation, afin de préciser en quoi la gouvernance locale s’est vu modifiée et à quels niveaux. Notre réflexion va, à présent, s’orienter vers les politiques publiques, en particulier dans le domaine du tourisme. Nous tenterons de définir les enjeux de celles-ci, les acteurs impliqués et la place qu’occupe le développement local dans ces politiques. 21 Le Parisien. L’abrogation du conseiller territorial examinée par l’Assemblée. [en ligne] Disponible sur [http://www.leparisien.fr/flash-actualite-politique/l-abrogation-du-conseiller-territorial-examinee-par-l-assemblee-16-112012-2326261.php] 21 Chapitre 2 Le tourisme au cœur des politiques publiques : un vecteur de développement local ? Ce chapitre va nous permettre de poursuivre notre démarche quant à la définition de certaines notions ou concepts, nécessaire à l’avancement de notre réflexion. Il traite de la notion globale de développement, et aborde ensuite le concept du développement local. Celui-ci constitue un enjeu devenu considérable dans les politiques publiques en France, notamment dans les politiques touristiques. Ces politiques, étant le fruit d’une réflexion commune de divers acteurs, il convient de les nommer et de distinguer leurs rôles et leurs missions. 1. La notion de développement Le tourisme est un domaine qui incite aux initiatives aussi bien publiques que privées. Tous les acteurs partagent un objectif similaire : asseoir un développement pérenne sur leur territoire. Il nous semble, donc, essentiel de définir cette notion. 1.1. Qu'est-ce que le développement ? Aujourd’hui, nous constatons que le concept de développement est usé de manière récurrente. Malgré tout, nous sommes face à une notion relativement récente. Dans un monde où les inégalités économiques et sociales entre les nations perdurent, le développement constitue un élément comparatif de référence. Cet aspect ressort de manière significative dans le discours du président américain Harry Truman, suite au désastre de la seconde guerre mondiale en 1947. Il pointe les difficultés rencontrées par certains pays européens au moment de leur reconstruction et, ainsi, lance le « Plan Marshall », également appelé « Programme de rétablissement européen ». Il propose une aide militaire et financière, dans l’optique de relancer économiquement l’Europe et donc, de soutenir son développement. Pour la mise en œuvre de cette politique, un organisme spécifique a été créé : l’Organisation Européenne de Coopération Economique (OECE).22 A cette époque, le terme de « développement » n’était pas encore employé, malgré tout, la prise de conscience quant à la nécessité d’aller dans ce sens était bel et bien réelle. La notion de développement, bien qu’abstraite de prime abord, peut se mesurer. En effet, il existe un indicateur de développement humain (IDH) ; cet outil permet de mesurer le degré de développement d’un pays. Créé en 1990 par le Programme des Nations Unies pour le développement, cet indicateur place la notion de développement au cœur d’une réflexion actuelle : pouvons-nous nous cantonner à mesurer un développement simplement en s’appuyant sur des 22 Encyclopédie economique/ Universalis http://www.universalis.fr/encyclopedie/organisation-europeenne-de-cooperation- 22 éléments tels que le niveau de vie, le niveau d’éducation et l’espérance de vie à la naissance ? Il semblerait que cela soit trop restrictif et de moins en moins révélateur d’un degré de développement réel. En effet, l’Organisation de Coopération et Développement (OCDE), succédant à l’OECE, participe, aujourd’hui, à l’évolution de cette notion et utilise un indicateur novateur : l’indice de bonheur mondial (IBM). Au-delà des critères traditionnels économiques, l’IBM intègre des éléments tels que la paix, la sécurité, le respect des droits de l’Homme, le partage de la formation, de l’information ou encore de la communication.23 Le terme « développement » est une notion relativement complexe de par sa polysémie. Le dictionnaire du Larousse24 évoque, d’ailleurs, de nombreux domaines qui s’apparentent au développement : l’économie, les sciences naturelles, l’art etc. Nous allons nous intéresser à la définition qui suit, exprimant le développement comme le « fait pour quelque chose de progresser, de s'accroître, de prendre de l'importance ». La notion de développement laisse donc entendre une amélioration, peu importe sa nature. Elle induit, également, une certaine durabilité, dans le temps et l’espace. Cet aspect est apparu, récemment, suite à diverses crises et évènements internationaux qui ont contribué à associer le développement au qualificatif de durable. 1.2. La notion de développement local25 Tout d’abord, qu’entendons-nous par « local » ? La tentation de se restreindre à une approche de proximité géographique est forte, cependant cela resterait trop réducteur. En effet, le local ne se matérialise pas uniquement dans un aspect matériel mais, également, à l’immatériel. On nomme les spécificités locales d’un lieu ou d’une région, ce qui a trait à la gastronomie, aux traditions, aux savoir-faire. Il s’agit, donc, d’une notion qui se réfère à un ensemble homogène de spécificités territoriales matérielles et immatérielles. Le développement local, quant à lui, a été défini de diverses manières. En 1983, Jean-Louis Guigou avance une première définition lors d’un colloque à Poitiers « Le développement local est l’expression de la solidarité locale créatrice de nouvelles relations sociales et manifeste la volonté des habitants d’une microrégion de valoriser les richesses locales, ce qui est créateur de développement économique ». Cette définition indique que le développement local relève de la mise en œuvre d’actions collectives, par le biais d’une coopération efficiente. Il s’agit ici d’un point clé ; on comprend que la mise en œuvre de ce processus concerne un ensemble d’acteurs publics 23 OECD. Evaluation des programmes de développement. http://www.oecd.org/fr/developpement/evaluation/ Dictionnaire du Larousse http://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/d%C3%A9veloppement 25 BARTHE Laurence, Politique d’aménagement touristique : le développement local ou territorial, quelles pratiques, quels enjeux ?, Cours de Licence 3 TD, département ISTHIA, Université de Toulouse II, 2011 24 23 (élus, services publics), privés (entreprises) mais également des associations locales et les citoyens. Le développement local nait d’une démarche volontaire de la part de ces acteurs, et donc résulte d’une démarche ascendante. De plus, le développement local permet la valorisation des ressources locales, il convient de préciser cette notion. Les ressources locales sont associées à des éléments matériels (infrastructures etc.) immatériels. A titre d’exemple, l’identité locale, le potentiel humain, l’histoire, les valeurs partagées constituent des ressources locales en prenant part aux spécificités d’un territoire. Le développement local tend, donc, à engager des actions de valorisation de ces ressources. La définition du développement local s’est précisée au cours des années, actuellement, nous dirions qu’il s’agit : « […] d’un processus collectif d’innovation territorial inscrit dans la durabilité. Ce processus s’enracine dans un territoire pertinent, il y fédère et organise en réseau les acteurs économiques, sociaux, environnementaux et culturels pétris d’une culture commune de projet dont la finalité est le bien-être collectif et la centralité : l’être humain. » 26 Cette vision du développement local apparait plus enrichie par rapport à la précédente. De nouvelles dimensions sont mises en lumière : - le territoire pertinent ; Le développement local s’inscrit dans une dimension spatiale, or nous l’avons déjà évoqué, mais il convient de ne pas tomber dans l’écueil, en considérant de manière évidente la délimitation géographique comme cadre de référence. Le territoire local doit s’inscrire dans une logique de projet, sous-entendant une nouvelle relation à l’espace. C’est en cela que l’on peut dire que le développement local est un processus qui peut se déployer sur différentes échelles : entre deux intercommunalités, entre une zone située sur deux régions, ou sur deux États. - la transversalité du développement local ; Ce dernier englobe les domaines liés à la notion même de développement, et est donc pluridisciplinaire. On peut parler de développement local lorsque plusieurs champs d’actions (économique, social, environnemental) sont pris en compte de manière simultanée. - la finalité du développement local. Dominique-Paule Decoster explique que les finalités du développement local relèvent d’intérêts communs, dans lesquels l’Homme représente une figure clé. En définitive, le développement local est un processus de transformation économique, sociale, territoriale et politique qui conduit les sociétés à repenser le modèle de développement dans un 26 Dominique-Paule Decoster, Maître de conférence à l’Université Libre de Bruxelles (in Les définitions du développement local, Etudes réunies par Gilles Fiévet, Artois Presse Université, 2002) 24 contexte de mutations. Précisons que le développement local n’est en aucun cas un modèle unique, mais bien un processus qu’il convient d’adapter selon les situations rencontrées. (Annexe A) 1.3. Tourisme, facteur de développement ?27 En 2010, en France, la consommation touristique intérieure représentait 7,12 % du PIB. 28 Le tourisme est, donc, un secteur qui a fait preuve d’une croissance et d’un dynamisme notables ces dernières années, s’établissant comme un élément majeur de l’économie nationale. Suite à ce constat, il est évident que de nombreux élus ou décideurs politiques font le choix de développer le tourisme sur leur territoire, pensant qu’il sera nécessairement un facteur de développement économique. Se focalisant uniquement sur des retombées économiques, ils négligent pourtant la complexité de ce domaine. En effet, le tourisme se distingue de par une forte attache aux dimensions identitaires et sociales. Ces éléments doivent être pris en compte pour instaurer un véritable développement local. Avant toute chose, précisons ce que l’on entend par activité touristique. Il s’agit d’un déplacement d’un point A (environnement quotidien) à un point B (univers inhabituel), l’univers inhabituel touchant à tout ce qui ne relève pas de « constant, ordinaire, fréquent, courant ».29 Contrairement aux autres activités commerciales, le tourisme implique un nécessaire déplacement des visiteurs vers le lieu de visite, pouvant avoir un impact sur celui-ci. Afin d’instaurer une économie touristique facteur de développement, trois fondements doivent être respectés simultanément. Le premier concerne la mobilisation du temps libre, autrement dit le temps non travaillé. Le deuxième renvoie à la liberté de se déplacer et d’accueillir et enfin le dernier correspond à la faculté de mobiliser des moyens financiers. Bien souvent, ces aspects sont totalement occultés lors de la mise en place d’une politique touristique territoriale. L’erreur serait de considérer le tourisme comme une panacée pour le territoire, engendrant obligatoirement un développement local ; or si les fondements que nous venons d’énoncer ne sont pas respectés, aucun développement local ne pourra s’établir à proprement parlé sur le territoire dont il est question. Ces éléments sont révélateurs de la difficile union entre le tourisme et le développement. Après avoir étudié la notion de développement, et l’avoir confrontée au domaine du tourisme, on se rend compte qu’une corrélation apparait entre ces deux éléments. Ainsi, dès lors qu’il existe une volonté politique de développer un territoire, le tourisme devient un domaine prioritaire. De ce fait, 27 TORRENTE Pierre, Fondement du développement durable appliqué au tourisme, Cours de Licence 3 TD, département ISTHIA, Université de Toulouse II, 2011 28 DGCIS. Mémento du tourisme édition 2012 - Le poids économique du tourisme en France. [en ligne] http://www.dgcis.redressement-productif.gouv.fr/files/files/directions_services/etudes-et-statistiques/statstourisme/memento/2012/poids-economique.pdf Consulté le19/02/13 29 Dictionnaire du Larousse http://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/habituel_habituelle/38786 25 il s’inscrit dans les stratégies territoriales, autrement dit, dans les politiques publiques. C‘est ce qui fera l’objet de notre réflexion dans ce qui suit. 2. Les politiques touristiques Intéressons nous, à présent, à la place occupée par le tourisme dans les décisions politiques. Il convient de définir en quoi consiste les politiques publiques, dans un premier temps, pour ensuite établir un lien entre elles et le tourisme. 2.1. Le tourisme dans le système politique Il est essentiel d’appréhender certains concepts liés aux enjeux des politiques touristiques. Ainsi, nous tenterons d’expliquer les principes des politiques publiques, pour ensuite, nous soucier du domaine touristique au cœur de celles-ci. 2.1.1. Qu'est-ce qu'une politique publique ? « Une politique publique constitue un enchaînement de décisions ou d’activités, intentionnellement cohérentes, prises par différents acteurs, publics et parfois privés, dont les ressources, les attaches institutionnelles et les intérêts varient, en vue de résoudre de manière ciblée un problème défini politiquement comme collectif. » (Knoepfel, Larrue, Varone 2001, p 29) Ainsi, une politique publique représente le fruit d’une réflexion collective. Elle est issue d’un ensemble d’acteurs, pouvant exprimer des divergences de visions ou d’objectifs. Cependant, on peut souligner que les politiques publiques tendent à dépasser ces altérités en instaurant une coordination entre ces acteurs. De plus, elles répondent à un objectif commun ; résoudre des problématiques spécifiques aux multiples champs d’intervention. Aussi, l’intérêt collectif étant en jeu, la coopération apparait comme nécessaire. Il convient de rappeler qu’en France, les politiques publiques sont menées par les administrations publiques (gouvernement, Etat, établissements publics et collectivités territoriales) et les champs d’intervention y sont nombreux : l’économie, la sécurité, l’aménagement, la santé. Pierre Muller nous fait part de son analyse quant aux politiques publiques et souligne un paradoxe : la situation économique tend vers une mondialisation de plus en plus exacerbée, or un besoin croissant d’affirmer une citoyenneté dans l’univers de la politique se fait ressentir. Selon lui, les politiques publiques sont le reflet d’une logique sectorielle et auraient pour finalité de « gérer les antagonismes intersectoriels » (Muller, 2011, p 12). Il évoque deux aspects primordiaux : - la coopération entre les acteurs et la prise de décision qui en découle ; - la dépendance entre les différentes politiques publiques. Son analyse de l’action publique renvoie à une analyse cognitive qui induit un référentiel. 26 L’analyse cognitive associe la représentation que l’on se fait du réel et plus globalement, la vision que l’on a du monde dans lequel nous vivons. "Elaborer une politique publique consiste d’abord à construire une représentation, une image de la réalité sur laquelle on veut intervenir. C’est en référence à cette image cognitive que les acteurs organisent leur perception du problème, confrontent leurs solutions et définissent leurs propositions d’action : cette vision du monde est le référentiel d’une politique" (Muller, 2011, p 62). Cette analyse montre donc qu’une politique publique reflète les perceptions sociétales du monde. Il décrit quatre niveaux de perceptions : les valeurs, les normes, les algorithmes et les images. Figure 1 : Processus d’évaluation d’une politique publique Source : Expérimenter pour agir « L’évaluation, un enjeu pour les territoires de projet » n°2 septembre 1999 Disponible sur http://www.parcs-naturels-regionaux.fr/upload/doc_telechargement/grandes/doceval_enjeux.pdf 2.1.2. Les politiques touristiques : concept et mise en œuvre par l’ingénierie de projet Les politiques touristiques font partie intégrante des politiques publiques. Elles donnent les grandes orientations à suivre en matière de tourisme. Elles s’établissent sur plusieurs échelles territoriales. En France, à l’échelle nationale, c’est le Ministre de l’Artisanat, du Commerce et du Tourisme qui a la charge de procéder à une politique touristique. Concrètement, un plan stratégique pour l’industrie touristique est établi, précisant les priorités à adopter.30 La logique reste la même, peu importe l’échelon territorial, il convient de définir un cadre général structurant l’activité touristique et son développement sur son territoire. Or, le territoire français s’apparente à un espace similaire au phénomène des « poupées russes », dans lequel chaque territoire s’enchevêtre avec un autre. Dans un souci de cohérence, chaque politique doit s’intégrer dans les politiques définies aux échelles 30 Portail du Gouvernement. La politique touristique. http://www.gouvernement.fr/gouvernement/la-politique-touristique 27 supérieures, entraînant certaines difficultés. Dans tous les cas, une politique touristique se définit par des axes stratégiques, eux-mêmes mis en œuvre par des actions précises. Il est indispensable de déterminer correctement ces éléments afin d’inscrire le tourisme dans une démarche de développement local. Pour preuve, Mme X, directrice d'un office de tourisme intercommunal, explique lors de son entretien du 27 décembre 2012 : « Il faut qu'il y ait une vision à long terme parce que quand on décide de se lancer sur un projet et qu'il aboutit 2 ans après... Il faut quand même qu'on sache où l'on va, donc on en revient au même, avoir une stratégie. » Son propos souligne la nécessité d’orienter les choix stratégiques en termes de tourisme sur l’intercommunalité. La finalité des politiques touristiques réside dans la mise en œuvre d’actions opérationnelles. De ce fait, on peut parler d'ingénierie de projets touristiques. Il s’agit d’un exercice à part entière, extrêmement complexe. Prenons une définition d’un projet touristique « C’est un système polymorphe qui s’inscrit dans une dimension temporelle et spatiale, dont le principe est de mettre en interrelation les éléments endogènes et exogènes qui le composent ».31 Cette définition nous montre qu’en ingénierie touristique, il convient de considérer un projet comme un système, c’est-àdire, un ensemble d’éléments inter-reliés. Elle met en exergue la nécessité, pour un porteur de projet, de tenir compte de nombreux aspects (le temps, l’espace etc.). De plus, il est impossible de modéliser un projet touristique de par sa polymorphie, il convient donc de s’adapter à l’espace dans lequel il s’inscrit (en tenant compte de ses spécificités, de ses contraintes). C’est en cela que réside toute la difficulté des projets touristiques et de leur mise en œuvre. Malgré tout, une problématique persiste, celle de l’échelle de la gouvernance touristique ; en effet, « Les frontières administratives ont longtemps été des échelles supposées pertinentes pour l’action touristiques ; ce postulat est aujourd’hui remis en cause. Les échelles administratives sont le niveau « classique » de mobilisation des moyens, y compris financiers. Si bien que les institutionnels du tourisme se sont longtemps refusés à appliquer un précepte de base du marketing, à savoir qu’il ne faut communiquer et mettre en marché qu’à une échelle qui corresponde aux besoins du client ».32 2.2. La compétence tourisme La répartition des compétences et des moyens représente le socle de la décentralisation française. Le tourisme, étant un secteur transversal, persiste à s’imposer dans ce système. Ainsi, comment 31 TORRENTE Pierre. Gestion de projets de développement : conduite de projets touristiques. Cours de Master 1 Tourisme et Développement, département ISTHIA, Université de Toulouse II, 2013. 32 GAUDRIOT P-H et al. De la nécessité d’avoir un pilote dans l’avion. Réflexion sur les bonnes échelles de la gouvernance touristique. Revue Espace, n° 301, mars 2013, p 8. 28 s’organise la répartition de la compétence tourisme ? C’est ce que nous tenterons d’expliquer. 2.2.1. Le tourisme, un objet complexe Avant tout, rappelons quelques éléments essentiels du tourisme. Apparu très récemment, le tourisme a connu une expansion rapide au cours du XXème siècle, ce qui en fait un objet instable. Il apparaît, également, comme un domaine complexe et transversal; pour preuve, il a été affecté à de nombreux ministères, que ce soit l'aménagement, les transports etc. en fonction des priorités qu'on lui a donné. En conséquence, la politique en faveur du tourisme en France a considérablement évolué au cours du XXème siècle. Dans son ouvrage Les institutions du Tourisme, Pierre Michaud33 évoque l’implication de l’Etat dans la mise en œuvre d’actions relatives à ce domaine. L’exemple le plus marquant reste sans aucun doute l’élaboration des grandes opérations d’aménagement en milieu littoral et montagnard. Ces dernières se sont effectuées par le biais d’une institution interministérielle : la Délégation à l’Aménagement du Territoire et à l’Action Régionale34. Elle est chargée de préparer les orientations et de mettre en œuvre la politique nationale d'aménagement et de développement du territoire35. Malgré l’importance économique du tourisme, Pierre Michaud pointe le fait qu’une idée-reçue persiste : aux yeux des décideurs, une politique spécifique dédiée entièrement au secteur du tourisme n’apparait pas nécessaire. 2.2.2. La question de la répartition de la compétence tourisme, une question sans réponse ? L’Etat s’est, donc, imposé comme le garant de l’action touristique, dans le domaine public. Cependant, la décentralisation française a instauré un système nouveau : les transferts de moyens et de compétences auprès des collectivités territoriales, obligeant à définir une organisation des compétences relevant du tourisme, et à désigner des organismes chargés de les gérer. C’est ce qu’a tenté d’effectuer la loi du 23 décembre 1992, dite la loi Mouly. Le premier article de cette loi indique que “L’État, les régions, les départements et les communes sont compétents dans le domaine du tourisme et exercent ces compétences en coopération et de façon coordonnée.” L’ensemble des acteurs publics et des collectivités territoriales sont compétents en matière de tourisme. La loi Mouly a permis d’attribuer des champs d’intervention à chaque échelle territoriale. Afin de préciser ce propos, nous nous appuierons sur le rapport intitulé « Tourisme et Intercommunalité » du Conseil national du tourisme réalisé en 2004-200536, qui met en avant 33 MICHAUD Jean-Luc. Les institutions du tourisme. Paris: Presses Universitaires de France, Que sais-je ?, 1995, 127 p. Actuelle Délégation à l’Aménagement du Territoire et à l’Attractivité Régionale. 35 Décret du 14 décembre 2009 n° 2009-1549. 36 Conseil national du tourisme, section Politiques territoriales touristiques. Tourisme et Intercommunalité. Session 20042005, 90 p. 34 29 plusieurs éléments. L’intervention touristique relève de cinq champs : la promotion et les aides à la commercialisation, l’accueil et l’information, les aménagements et équipements touristiques, l’animation, les statistiques et études. Malgré une volonté forte de clarifier cette répartition liée aux compétences en matière de tourisme, des défaillances persistent. Nous le savons, le transfert de compétence s'est établi via des blocs de compétences, or, il n'existe aucun bloc de compétence tourisme à proprement parlé. Le tourisme est donc réparti dans des champs, tels que l’aménagement ou encore l’économie. L’objectif de simplification ne semble pas atteint et le système de répartition des compétences tourisme reste sibyllin. Cela s’explique, également, du fait que certains champs soient attribués à plusieurs échelles. Une même compétence peut donc être l’affaire de l’échelle régionale comme communale. Cela suppose une nécessaire entente entre les collectivités, afin de conserver une homogénéité sur un territoire global. On comprend que cette répartition implique la mise en place d’une coopération et d’une coordination entre les acteurs qui se partagent la compétence, source de difficultés évidentes. L’une d’elles, par exemple, concerne la nécessaire définition de l’intérêt communautaire. Ainsi, une intercommunalité se devra de préciser ce qui relève ou non de cet intérêt, permettant de définir une répartition des compétences entre intercommunalité et communes-membres. La démarche est loin d’être évidente, d’autant qu’une fois une compétence déléguée à un EPCI, celle-ci ne peut plus être exercée par les communes membres. Nous avons, ici, pu saisir les intérêts et les enjeux des politiques publiques. La multiplicité des domaines d’actions et la myriade d’acteurs et d’échelles concernées en font un objet particulièrement complexe. Le tourisme étant transversal, on constate qu’il se positionne comme l’un des domaines les plus difficiles à organiser au sein des différentes politiques, mais également en termes de répartition de compétences. Il va s’agir, à présent, de focaliser notre réflexion sur ces acteurs en question, sur leurs rôles et leurs compétences. 3. Les acteurs du tourisme : rôles et compétences De prime abord, le tourisme est un domaine confié au secteur privé. Il existe bon nombre d’exemple pour l’illustrer : les agences de voyages, les autocaristes, les tour-opérateurs etc. Mais nous l’avons vu précédemment, le tourisme induit également l’intervention de l’action publique, que ce soit en termes d’aménagements ou de développement territorial. Nous allons donc tenter, ici, de préciser qui sont ces acteurs et quels rôles leur sont attribués dans le domaine touristique. 3.1. Les acteurs publics Dans un premier temps, nous aborderons la question des acteurs publics, autrement dit, les 30 collectivités territoriales. Rappelons que ces dernières ont obtenu un pouvoir local suite aux lois de la décentralisation en France dans les années 1980. Avant cela, la tradition jacobine était de mise et l’Etat représentait l’acteur clé en termes d’actions et de décisions politiques. 3.1.1. Définition d'une collectivité territoriale37 Rappelons que les collectivités territoriales désignent les communes, les départements et les régions. L’article 72 de la Constitution définit les grandes orientations et les principes de l’organisation des collectivités territoriales. Il y est énoncé qu’elles s’administrent de manière libre en fonction des prédispositions énoncées par la loi. Elles bénéficient du transfert de compétences et de moyens par l’Etat, compétences exclusivement administratives. A la différence des EPCI, il est nécessaire que chaque collectivité territoriale se soit vue attribuée une compétence générale soulignant une vocation d’intérêt local. 3.1.2. L'échelon régional38 Les régions administratives ont été déclarées, de manière assez tardive, collectivités territoriales lors du processus de décentralisation en 1982. Elles constituent les collectivités les plus récentes. La région joue un rôle de coordinateur entre les départements et communes intégrés sur son territoire. L’action touristique s’intègre dans la planification d’un schéma régional de développement touristique, symbole des objectifs liés au développement du tourisme, définis par la région. La région a à sa charge également le recueil, le traitement et la diffusion des données en lien avec l’activité touristique au sein du territoire régional.39 Tableau 2 : Présentation de l’échelle régionale Nombre 27 Organisme référent Conseil Régional Compétence(s) - Développement économique, - Aménagement du territoire, - Développement local, - Planification, - Formation, Enseignement, - Culture, Santé. Ressources Dotations de l’Etat, Outils Schéma régional de développement économique, Fiscalité. Contrats de plan EtatRégion. 37 Vie Publique. Qu’est-ce qu’une collectivité locale ? http://www.vie-publique.fr/decouverteinstitutions/institutions/collectivites-territoriales/categories-collectivites-territoriales/qu-est-ce-qu-collectivite-territorialeou-collectivite-locale.html 38 Vie Publique. Qu’est-ce qu’une région ? http://www.vie-publique.fr/decouverte-institutions/institutions/collectivitesterritoriales/categories-collectivites-territoriales/qu-est-ce-que-region.html 39 JEGOUZO Laurence. Les collectivités territoriales et le tourisme : faut-il modifier la répartition des compétences ? Revue mensuelle Lexisnexis Jurisclasseur, août-septembre 2009, p 16 31 3.1.3. L'échelon départemental40 Les départements ont été créés durant la Révolution française en 1789, actuellement ils se voient confier des missions spécifiques en termes de tourisme. Tout en respectant la politique touristique régionale, le département réalise un schéma d’aménagement touristique départemental. Son action se complète par la définition d’un Plan Départemental des Itinéraires de Promenades et des Randonnées (PDIPR), contribuant aux actions de développement du tourisme rural.41 Tableau 3 : Présentation de l’échelle départementale Nombre 101 (dont 5 outre mer) Organisme référent Conseil Général Compétence(s) - Action social (2/3 du budget), - Aménagement spatial / d’équipements, - Santé, Formation, Enseignement. Ressources Dotations de l’Etat , Fiscalité. 3.1.4. L'échelon communal42 Les communes représentent l'échelon local, également appelé échelon de proximité. Tout comme les départements, elles sont apparues lors de la Révolution française, représentant, à l’époque, une communauté d’habitants. L’action touristique s’installe également à l’échelle locale, une commune peut prendre le parti de s’établir en tant que commune touristique ou station classée. Elle a la possibilité, également, de créer un Office de Tourisme43 qui sera en charge d’assurer des missions d’accueil, d’informations et de promotion touristique du territoire44. Tableau 4 : Présentation de l’échelle communale Nombre 36 000 Organisme référent Conseil Municipal Compétence(s) Ressources Clause générale : tout domaine d’intérêt communal. (Urbanisme, enseignement, action économique et sociale) Dotations de l’Etat, Fiscalité. 40 Vie Publique. Qu’est-ce que le département ? http://www.vie-publique.fr/decouverteinstitutions/institutions/collectivites-territoriales/categories-collectivites-territoriales/qu-est-ce-que-departement.html 41 JEGOUZO Laurence. Les collectivités territoriales et le tourisme : faut-il modifier la répartition des compétences ? Revue mensuelle Lexisnexis Jurisclasseur, août-septembre 2009, p 16 42 Vie Publique. Qu’est-ce qu’une commune ? http://www.vie-publique.fr/decouverteinstitutions/institutions/collectivites-territoriales/categories-collectivites-territoriales/qu-est-ce-qu-commune.html 43 Cet aspect est détaillé dans le 3.1.3. L’échelle locale : les Offices de Tourisme et Syndicats d’Initiative 44 JEGOUZO Laurence. Les collectivités territoriales et le tourisme : faut-il modifier la répartition des compétences ? Revue mensuelle Lexisnexis Jurisclasseur, août-septembre 2009, p 16 32 3.2. Les organismes d’appui au développement touristique Le domaine du tourisme s’inscrit dans les politiques publiques mais possède, évidemment, des organismes spécifiques qui lui sont dédiées. Comme les collectivités territoriales, elles s’organisent selon les différentes échelles territoriales. 3.1.1. L’échelle régionale : le Comité Régional du Tourisme En 1942, les Comités Régionaux du Tourisme (CRT) avaient pour mission de « coordonner, dans le cadre d'une ou plusieurs régions économiques, les efforts de toute nature accomplis en vue du développement du tourisme »45. Cependant, les CRT travaillaient en collaboration avec un organisme déconcentré (étatique) ; de ce fait, la répartition des compétences entre ces organismes n’était pas flagrante et a entrainé une confusion quant au rôle de chacun. La nécessaire clarification a été d’autant plus présente suite à la décentralisation française ; ainsi la loi du 3 janvier 1987 précise le statut et le rôle des CRT. Il est alors désigné comme l’« instrument d'élaboration et de mise en œuvre de la politique de la région dans le domaine du tourisme » (Michaud, 1995, p 26). Tableau 5 : Présentation du Comité Régional du Tourisme Date de création Loi 12 janvier 1942 Statut Organisme référent de promotion touristique régionale en France et à l’étranger. Outil Ressources Schéma régional de développement touristique et de loisirs. Subventions publiques (collectivités territoriales). Organisme national Fédération Nationale des Comités Régionaux du Tourisme (FNCRT) [association loi 1901]. Favoriser échanges, connaissances.46 3.1.2. L’échelle départementale : le Comité Départemental du Tourisme De statut associatif, ils ont pour objectif d’élaborer, de promouvoir et de commercialiser les produits touristiques, et de coordonner les actions en lien avec le tourisme. Le CDT a été reconnu comme « l'interlocuteur départemental privilégié en matière touristique » (Michaud, 1995, p 21), suite à la signature d’une convention entre la Fédération Nationales des Comités Départementaux du Tourisme (FNCDT) et le ministère chargé du tourisme. 45 46 Décrets-lois du 12 janvier 1942 http://www.fncrt.com/ 33 Tableau 6 : Présentation du Comité Départemental du Tourisme Date de création Milieu des années 1970 Statut Outil Ressources Organisme national Organisme de promotion touristique. Politique touristique départementale (loi 23 décembre 1992). Subventions publiques (collectivités territoriales). Fédération Nationale des Comités Départementaux du Tourisme (FNCDT). Initiative des Conseils Généraux. Informer, animer, coordonner, harmoniser les actions touristiques.47 3.1.3. L’échelle locale : les Offices de Tourisme et Syndicats d’Initiative Les Offices de Tourisme et Syndicats d’Initiative (OTSI) possèdent le statut d’association à but non lucratif de la loi 1901. Ils occupent une place importante au niveau local et doivent remplir un certain nombre de missions : l’information et l’accueil des touristes, la promotion touristique locale, la valorisation des ressources territoriales, l’organisation d’animations sportives, culturelles etc. L'article L133-3 du code du tourisme précise les missions et les compétences attribuées aux offices de tourisme. Les OTSI collaborent avec de nombreux acteurs locaux, qu’ils soient publics ou privés. Tableau 7 : Présentation des Offices de Tourismes Syndicats d’Initiatives Date de création Statut Ressources 1889 Organisme touristique référent à l’échelle locale. Subventions publiques (collectivités territoriales). 1er syndicat d’initiative. Organisme national Fédération Nationale des OTSI (FNOTSI), Fédération Régionale des OTSI (FROTSI), Union Départementale des OTSI (UDOTSI). Représenter les OTSI en France Assurer cohérence de l’action touristique. Indéniablement, le tourisme, secteur complexe, implique des interventions multi scalaires. Les divers échelons territoriaux associés à une multitude d’acteurs compliquent la répartition des compétences et des missions de chacun. « Il est, à nouveau, constaté un enchevêtrement des compétences et des interventions, des financements croisés divers, ainsi que, trop souvent, une absence ou insuffisance de coopération dans la mise en œuvre des actions. »48 Les nombreuses 47 Ministère de l’Agriculture, de l’Agroalimentaire et de la forêt. FNCDT. http://agriculture.gouv.fr/fncdt-federationnationale-des 48 COUVE Jean-Michel. Rapport au Premier ministre sur l’organisation territoriale, l’observation statistique et les 34 initiatives touristiques « tendent paradoxalement à affaiblir un peu plus la cohésion de ses acteurs et la cohérence de sa dynamique » (Michaud, 1995, p 125). Il est indispensable d’établir des opérations de coopérations afin de répondre à un enjeu de « cohérence et [d’] efficacité de l’action publique globale, menée tant sur le territoire avec son projet que par l’Etat, la région, le département avec leurs politiques propres ».49 accords bilatéraux de la France dans le domaine du tourisme, juillet 2008, 146 p. 49 La lettre du développement local n° 56, 2008, p 22 35 Chapitre 3 Coopération, mise en réseau : des éléments moteurs pour le développement touristique Ce chapitre sera pour nous l’occasion de définir la notion clé de notre raisonnement : la coopération. Nous tenterons de déceler ses principes et ses moyens de mise en œuvre. Nous aborderons, également, les nouveaux espaces de coopération : les territoires de projet. Nous terminerons par la coopération transfrontalière, donnant une dimension internationale à notre réflexion. 1. La coopération, définition « La coopération, ce n’est pas du voyage, mais bien des projets qui nous permettent de mobiliser et d’impliquer des acteurs locaux » - Pascal Brise, ancien animateur du Pays du TrégorGoëlo.50 1.1. Qu'est-ce que la coopération ? Actuellement, le phénomène coopératif est présent dans de nombreux domaines : économique, touristique, politique, social, industriel. Le terme de « coopération » transparait de manière récurrente ; on parle de coopération décentralisée, internationale, transfrontalière, intercommunale etc. Chaque démarche coopérative engage des enjeux et des spécificités qui lui sont propres, malgré tout, des similarités existent. En effet, cette notion peut être assimilée au « partenariat » ou à la « mise en réseau ». Intéressons-nous à la définition du Larousse : la coopération s’apparente à « l’action de coopérer, de participer à une œuvre commune »51. On comprend qu’une coopération résulte de l’engagement de deux ou plusieurs parties, procédant à des échanges, des partages de savoir-faire ou d’informations. Elle implique, également, une mutualisation des moyens, mais aussi de savoirfaire, grâce à un travail commun entre plusieurs acteurs locaux. C’est un moyen d’assoir une certaine ouverture et d’engager une perception novelle de son environnement. Malgré tout, la coopération suppose d’autres enjeux. En effet, partager des objectifs et des enjeux communs constitue un élément décisif dans la coopération. Face à des difficultés similaires, les acteurs territoriaux (élus, techniciens etc.) se tournent vers une forme partenariale de manière naturelle. Enfin, en termes d’ingénierie de projets, la coopération fait office d’outil pertinent, permettant une mutualisation des moyens. 50 51 Extrait du magazine de Leader + en France Pilote, juin 2004 Dictionnaire du Larousse http://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/cooperation 36 En ce qui concerne le tourisme, , la coopération apparait comme une alternative appropriée afin d’éviter les proliférations d’initiatives et d’actions incontrôlées. Certes, le tourisme est un domaine complexe, transversal, impliquant de nombreux acteurs (privés ou publics), cependant, la coopération touristique permet d’amoindrir ces difficultés, afin d’insuffler des politiques touristiques homogènes. C’est un moyen de dépasser l’échelle territoriale administrative, afin d’obtenir une nouvelle perspective, et un meilleur impact. La coopération est un objet multidisciplinaire : on parle de coopération économique, sociale ou encore solidaire. Dans le cadre de ce mémoire de recherche, notre réflexion se cantonnera à la question de la coopération territoriale. Cette dernière s’accomplit par la mise en œuvre de politiques et de projets. Cet aspect fera l’objet du paragraphe qui suit. 1.2. Les moyens d’actions en faveur de la coopération Qu’elle que soit l’échelle (locale, régionale, nationale, européenne), la coopération territoriale représente un enjeu de plus en plus important. Elle résulte, d’ailleurs, de nombreuses politiques nationales, souhaitant favoriser un partenariat inter territorial. La volonté étatique, d’inciter aux initiatives de coopération à l’échelle locale, s’est accélérée à la suite de la décentralisation en France. Rappelons que celle-ci tendait à impulser davantage de pouvoir aux acteurs locaux et à s’ancrer dans un système démocratique local. Ces principes s’illustrent dans le système de coopération décentralisée. Elle regroupe « l’ensemble des initiatives et actions de coopération internationale menées par une ou plusieurs collectivités territoriales et/ou leurs groupements d’une part, et une ou plusieurs autorités territoriales étrangères et/ou leurs groupements d’autre part. »52. A la suite de la seconde guerre mondiale, la coopération décentralisée a pris la forme de jumelage, symbole d’une amitié entre territoires, et s’est par la suite largement développée. Il faut noter que la coopération transfrontalière, que nous détaillerons ultérieurement, fait figure d’une des modalités les plus parachevées au sein de la coopération décentralisée. Pour preuve, aujourd’hui, la coopération décentralisée peut concerner des actions d’aide technique au développement, des actions d’échanges économiques ou encore des opérations communes de gestion ou de création de biens, d’équipements, d’aménagement. Toutefois, cette forme de coopération, initiée par l’Etat, permet aux collectivités locales, de décider librement si elles souhaitent s’y engager ou non. Ainsi, cet exemple illustre les principes de libre administration et de démocratie locale voulus par la décentralisation. Malgré tout, ces principes semblent remis en cause, considérant que les collectivités locales se doivent de respecter le cadre 52 DGCL. La coopération décentralisée. http://www.dgcl.interieur.gouv.fr/sections/les_collectivites_te/missions_collectivit/cooperation_internat/cooperation_dece ntra/ 37 institutionnel national issu de l’Etat (exemple : la politique étrangère décidée par le gouvernement). Le système décentralisé a poursuivi ses efforts afin de développer et simplifier les démarches coopératives, notamment grâce à la mise en œuvre d’un cadre règlementaire. Ainsi, dans les années 1990, de nouvelles formes de coopération se sont dessinées : la coopération intercommunale, puis les territoires de projet, se révélant être des initiatives étatiques marquantes. 1.3. La coopération : une solution face à un contexte de concurrence accrue? En considérant le contexte économique actuel, associé à l’organisation politico-administrative de la France, il semblerait que les territoires soient tous confrontés à une certaine concurrence, voire à une compétition. Ainsi, chacun doit faire face aux inégalités et aux écarts qui se creusent. De ce fait, nous verrons en quoi la coopération semble être un moyen adapté pour lutter contre ce phénomène. Il convient alors d’évoquer la notion de « coopétition ». Néologisme issu du mélange entre « coopération » et « compétition », il est employé, en premier lieu par Ray Noorda, fondateur de Novell et sera par la suite démocratisé dans l’ouvrage de Nalebuff et Branderburger « Coopétition » en 1996. Il concerne principalement le domaine économique et entrepreneurial et remet en cause l’idéologie de Porter, selon laquelle chaque entreprise doit obtenir un avantage concurrentiel afin d’être compétitive. De prime abord contradictoire, la « coopétition » sous-entend une recomposition du système stratégique basique selon lequel ne peut exister qu’une coopération ou une compétition entre deux firmes. Or, la « coopétition » se matérialise par le rapprochement de deux organismes concurrents qui mutualisent leurs moyens, tout en obtenant des avantages bipartites.53 Intégrer cette notion au domaine touristique bouleverserait les perspectives territoriales en France. En effet, le tourisme ne peut s’employer uniquement sur un territoire issu de l’organisation administrative telle que nous la connaissons. Il convient d’aller outre ce système afin d’engager une coopération efficiente. 2. Une volonté de s'unir : la création de nouvelles entités territoriales « Les instances de décision politique couvrent des espaces qui ne coïncident pas nécessairement avec les espaces de synergie des acteurs locaux »54. Partant du principe que le cadre administratif ne correspond pas à un espace adapté pour le tourisme, il apparait nécessaire 53 BATTISTA DGNINO Giovanni. La dynamique des stratégies de coopétition, Revue française de gestion, juillet 2007, n° 176, p. 87-98. 54 PECQUEUR Bernard. Le développement local. 2ème édition Paris : Syros, 2000, p 118 38 d’appréhender l’espace différemment, notamment lorsqu’il s’agit de développement local. Souhaitant répondre à cette problématique, plusieurs lois ont été promulguées et de nouvelles formes d’interterritorialité sont nées. 2.1. La coopération intercommunale La coopération intercommunale constitue l’une des premières véritables opérations de coopération territoriale. Nous tenterons d’observer sous quelles formes elle transparait et en quoi cette démarche a insufflé un renouveau en termes d’organisation territoriale et d’ingénierie touristique. 2.1.1. L’intercommunalité55 En France, c’est suite à la promulgation de la loi du 22 mars 1890 que la notion d’intercommunalité est apparue. Il s’agissait, à cette époque, d’inciter les communes à s’associer en créant des syndicats intercommunaux à vocation unique. Ce regroupement visait à mutualiser les moyens des communes regroupées pour ainsi faciliter la gestion de problématiques interterritoriales.56 Au cours du XXème siècle, ce principe s’est renforcé, en particulier suite à la promulgation de la loi de 1992, dite la loi ATR, évoquée précédemment. Elle a permis à l'intercommunalité de se concrétiser et a instauré la forme des communautés de communes pour les territoires ruraux. Précisons que chaque strate de l’intercommunalité répond au même principe : « Les communes membres sont regroupées au sein d’un espace de solidarité, en vue d’élaborer et de conduire ensemble un projet commun de développement et d’aménagement de leur territoire. » (Rouault, 2011, p 108). L’intercommunalité s’organise par l’action d’Etablissement Public de Coopération Intercommunale (EPCI). Nous ne nous intéresserons, ici, qu’aux formes d’intercommunalité à fiscalité propre. Il s’agit d’un établissement public administratif, qui s’administre librement, et possède ses propres ressources financières. Malgré tout, le principe de liberté ne reste que partiel puisque les décisions sont soumises au contrôle de l’Etat par le biais des préfets et de la juridiction administrative. En matière de compétences, les EPCI sont assujettis au principe de spécialité et n’interviennent que dans le cadre des compétences qui leurs ont été confiées. De plus, l’intercommunalité s’articule autour de la notion « d’intérêt communautaire » (Rouault, 2001, p 108). Celui-ci désigne l’ensemble des compétences et des domaines d’actions qui sont délivrés à l’intercommunalité. Sa mise en œuvre constitue une réelle difficulté pour les élus, notamment dans le domaine du tourisme, souvent dispersé dans de nombreux blocs de compétences. D’ailleurs, « 34% des EPCI 55 AdCF Assemblée des Communautés de France. Qu’est-ce que l’intercommunalité ? [en ligne]. Disponible sur < http://www.adcf.org/5-356-Qu-est-ce-que-l-intercommunalite.php > Consulté le 01/12/12 56 Sénat. L’intercommunalité à fiscalité propre. http://www.senat.fr/rap/r05-193/r05-1931.html 39 ayant pris la compétence tourisme et déclarant la mettre en œuvre n’ont ni service tourisme, ni OT intercommunal ».57 Ainsi, des difficultés d’appropriation des compétences, et en particulier du tourisme persistent. Figure 2: Evolution de l’intercommunalité en France de 1999 à 2012. Source : DCL, département des études et des statistiques locales, EPCI à fiscalité propre depuis le 1 er janvier 1999, mars 2012. Par-dessus tout, l’échelle intercommunale apporte des réponses aux enjeux touristiques58 ; elle instaure une synergie et une mutualisation des moyens, permettant d’éviter les « doublons organisationnels ». Une cohérence territoriale peut être effective par la mise en réseau des ressources touristiques, facilitant une visibilité en terme d’image touristique. Enfin, l’intercommunalité met en jeu une capacité d’expertise plus élaborée. En définitive, l’intercommunalité semble constituer l’une des démarches coopératives les plus importantes en termes d’innovation et d’organisation territoriale française59. 2.1.2. Les communautés de communes Actuellement, on compte environ 2 350 communautés de communes à fiscalité propre, ce qui représente un peu plus de 35 000 communes concernées, soit environ 96 % des communes françaises.60 En ce qui concerne l’attribution des compétences définitives, elle se fait par le biais des conseils municipaux, et figureront dans les statuts de l’EPCI. 57 LEWY Richard, DORIA Marc, Tourisme et intercommunalité, enjeux et problématiques. Cahiers Espaces n°91, novembre 2006, p 11. 58 CHATEAU Loïc, L’intercommunalité touristique en question. Cahiers Espaces n°91, novembre 2006, p 16 à 22 59 Conseil national du tourisme, section Politiques territoriales touristiques. Tourisme et Intercommunalité. Session 20042005, 90 p. 60 DGCL. Les collectivités locales en chiffre, 2012 [en ligne]. Disponible sur <http://www.dgcl.interieur.gouv.fr/workspaces/members/desl/documents/clench/2012/les_collectivites_lo6345/download File/file/Publication_globale.pdf?nocache=1334926826.66> Consulté le 14/11/12 40 Tableau 8 : Présentation des Communautés de Communes Requis obligatoire Pas de minimum démographique requis Compétences obligatoires Compétences optionnelles -Aménagement de l’espace -Protection et mise en valeur de l’environnement -Développement économique -Construction, entretien et gestion d’équipements culturels et sportifs 2.1.3. Les communautés urbaines et d’agglomération Suite à la loi ATR, la loi relative au Renforcement et à la Simplification de la Coopération Intercommunale du 12 juillet 1999, dite loi Chevènement, est venue préciser l’intercommunalité. Elle a pour objectif de simplifier les règles applicables aux EPCI ; de favoriser le développement de l’intercommunalité en milieu urbain et rural et, enfin, d'encourager l’adoption de la taxe professionnelle unique. Cette loi suppose, donc, la mise en place d'une nouvelle organisation institutionnelle notamment par la simplification des structures de l’intercommunalité et leur mode de fonctionnement. Elle a donc ajouté, en plus de la communauté de communes, la communauté urbaine et la communauté d’agglomération. Tableau 9 : Présentation des Communautés d’agglomération Nombre 200 Requis obligatoire Entre 50 000 et 500 000 habitants Compétences obligatoires -Aménagement de l’espace, -Développement économique, -Equilibre social de l’habitat. Compétences optionnelles Construction, aménagement, entretien et gestion d’équipements culturels et sportifs Tableau 10: Présentation des Communautés urbaines Nombre 15 Requis obligatoire Plus de 500 000 habitants. Compétences obligatoires - Développement, aménagement économique, social et culturel, - Aménagement de l’espace communautaire, - Gestion des services d’intérêt collectif61. 61 Assemblée des Communautés de France. L’intercommunalité. [en ligne] http://www.adcf.org/files/Offre-deservice/AdCF_Municipales2008.pdf Consulté le 1/12/13 41 A l’heure actuelle, l’intercommunalité fait partie intégrante du paysage organisationnel territorial français et a fait preuve d’un essor remarquable. Elle reflète une certaine volonté de développer les territoires de projet en tant qu’espace de réflexion. Cependant, la répartition des compétences entre les structures semble poser problème. L’intercommunalité apparait tout de même comme un élément fondateur dans la recomposition de l’espace français, comme le sont les Pays. 2.2. La coopération de projet La coopération de projet s’inscrit inévitablement dans un territoire de projet. Ce concept peut se résumer ainsi : « espace économique, social et physique sur lequel un projet de territoire s'élabore. Organisé, il est en capacité de contractualiser sur un projet global avec les autorités chargées de l'aménagement et du développement territorial »62. De plus, comme le souligne Georges Gontcharoff, administrateur de l'Adels 63, « Il n’y a pas de territoires sans projet des acteurs qui les habitent. Le territoire est alors déterminé par le réseau des acteurs qui sont capables de travailler ensemble à un projet global de développement ». 2.2.1. Les Pays Dans les années 1960-1970, la France fait face à un mouvement social particulier : les français réclament un retour au particularisme symbolisé par l’expression « vivre et travailler au pays » et sont certains qu’un retour au local serait une solution pour le développement économique et social. (Di Meo, 1996, p 18) Le terme « pays » a depuis évolué et a été réintroduit par la loi d’Orientation à l’Aménagement et au Développement du Territoire (LOADT) du 4 février 1995, dite loi Pasqua. Un Pays est alors défini comme un territoire présentant une « cohésion géographique, économique, culturelle ou sociale, à l'échelle d'un bassin de vie ou d'emploi ».64 La loi du 25 juin 1999, dite la loi Voynet viendra compléter et préciser la loi Pasqua en intégrant la notion de développement durable. Ces lois représentent le symbole d’une volonté étatique de favoriser les démarches coopératives, ainsi qu’une simplification des espaces administratifs et des compétences. Un Pays n’est pas une collectivité territoriale, ni un EPCI, mais un espace de contractualisation. De ce fait, les Pays collaborent avec différentes entités (Etat, région, département) par le biais de contrats. Ils se démarquent du fait qu’ils résultent d’une démarche volontariste des acteurs locaux, qui souhaitent développer un espace défini comme homogène (bassin de vie, d’emploi). Les Pays représentent de réels espaces de coopération entre acteurs (élus, acteurs associatifs etc.) et des lieux privilégiés de partenariat. De ce fait, ils apparaissent comme des territoires pertinents, et 62 Réseau lorrain des acteurs du développement local. Qu’est-ce qu’un territoire de projet ? http://cpl.asso.fr/page/questce-quun-territoire-de-projet 63 Association pour la démocratie et l’éducation locale et sociale, association à l’origine de la revue Territoires 64 Article 22 de la loi du 25 juin 1999 42 permettent de mener une réflexion à partir d’un projet de développement territorial. L’échelle du Pays correspond à un territoire adéquat pour définir une stratégie globale de développement, mise en œuvre par les intercommunalités. Tableau 11: Présentation des Pays Nombre 367 Pays en 2012 soit 79% du territoire français65 Rôle / Missions -Coordinateur -Intermédiaire entre les strates territoriales Organisme référent Structure associative ou Syndicat mixte de Pays ou Groupement d’intérêt public La notion de territoire pertinent est d’autant plus visible, dès lors que l’on parle de tourisme. En effet, les Pays touristiques forment des espaces homogènes et cohérents, partageant des valeurs et des modes de vie propres. Ceci tend à faciliter une politique de communication ou d’ingénierie touristique cohérente. Ne subissant pas de frontières administratives à proprement parler, la diffusion d’une image touristique harmonieuse semble simplifiée. « L’identité, elle est plutôt au niveau du Pays. Quand on se place au niveau du Pays, on a une offre qui est plus identitaire et donc plus facile à mettre en marché, parce qu'elle est diversifiée et identitaire. La pertinence d’un territoire, c'est son identité et l'intérêt qu'on peut retirer de cette identité pour y développer un produit touristique.» déclare le consultant sénior d’ingénierie touristique, lors de son entretien du 27 décembre 2012. (Annexe B) 2.2.2. Bilan et perspective des Pays De manière générale, on constate que la mise en œuvre des Pays a fait écho à un engouement important en France, où l’ambition première était de « mettre en œuvre des actions d’ampleur nouvelle, d’impulser des coopérations locales et de créer des équipes d’ingénierie territoriales »66. Pour l’illustrer, on dénombrait 40 Pays en 1995, à la suite de la loi Pasqua, cela a été multiplié par huit en seulement une dizaine d’années, atteignant environ 334 Pays au 1er janvier 2007.67 Les Pays se positionnent sur la coordination, la stratégie et la perspective. Ils instaurent une mobilisation des élus efficiente, et permettent de mener des réflexions et des approches globales quant aux enjeux locaux du territoire. Malgré tout, il convient de mettre en exergue les difficultés auxquelles doivent faire face les Pays. 65 Association de promotion et de fédération des Pays. Panorama 2012. [en ligne] Disponible sur <http://www.pays.asso.fr/IMG/pdf/Panorama_des_Pays_2012.pdf> Consulté le 08/03/13 66 La Lettre du développement local Hors Série n°2. Territoires de projet, bilan et perspectives. 2007, p 16 67 Entretien avec Pierre Mirabaud, délégué interministériel à l’aménagement et à la compétitivité des territoires, propos recueillis par François Collignon 43 Souvent peu connus par les habitants mêmes du territoire, les Pays constituent une strate territoriale floue, accentuant l’effet de maillage territorial. Françoise Ardillier-Carras met en avant l’ambiguïté issue de la multiplication des échelles territoriales, entrainant une certaine confusion auprès des habitants et des touristes.68 En effet, les délimitations spatiales ne se calquent sur aucun espace préétabli ; les dénominations, quant à elles, sont souvent évocatrices pour les locaux mais se révèlent incompréhensibles pour des visiteurs, se moquant d’être sur tel ou tel Pays. Figure 3 : Territoires concernés par les Pays et les Contrats de Développement Durable Rhône-Alpes en 2012 Source : Site Internet de l’Association de Promotion et de Fédération des Pays Enfin, la loi de la réforme des collectivités territoriales de 2010 remet en cause les Pays, et indique qu’à l’avenir aucun nouveau Pays ne pourra être créé. Cette décision montre une certaine fragilité de l’entité, alors qu’elle avait connu un succès important lors de sa création. Il semblerait, qu’à l’heure actuelle, l’Etat ne souhaite plus accorder autant d’importance aux Pays. Ainsi, le devenir de ces espaces reste actuellement en suspens. 68 ARDILLIER-CARRAS Françoise. Le Pays et l’espace vécu, quelles logiques pour quels territoires ? Norois, janvier 1999, n°181, p 173 à 181 44 2.2.3. Les Parcs Naturels Régionaux69 Dans le cadre de notre réflexion axée sur les territoires de projet, il convient d’évoquer brièvement le concept dédié aux Parcs Naturels Régionaux (PNR). Leur instauration fait suite à une volonté étatique de simplifier les démarches de création de parcs, moins contraignantes que celles des Parcs Naturels Nationaux. Les PNR ont, donc, été créés suite à un décret de 1967, qui précise qu’un territoire peut être classé PNR lorsque « le territoire de tout ou partie d’une ou de plusieurs communes […] présente un intérêt particulier par la qualité de son patrimoine naturel et culturel, pour la détente, le repos des hommes et le tourisme, qu’il importe de protéger et d’organiser ».70 Ils répondent à trois objectifs principaux : - équiper les grandes métropoles d’équilibre en aires de détentes ; - animer les secteurs ruraux en difficulté ; - trouver, dans les voies nouvelles de développement, la possibilité d’une mise en valeur des richesses naturelles et culturelles, de la préservation de la flore, de la faune, des paysages. Ainsi, un PNR induit une volonté forte de protection des espaces naturels, tout en l’alliant à un développement économique et social. Il résulte d’une ambition caractérisée par la recherche d’un équilibre entre préservation et développement. Il est important de noter que la création d’un PNR, contrairement à un Parc Naturel National, est issue d’une volonté locale, et non étatique. Nous nous retrouvons, donc, dans une démarche dite ascendante. Néanmoins, la décision finale de classement sera accordée par l’Etat. En ce qui concerne son fonctionnement, nous pouvons noter qu’un PNR est composé de plusieurs communes, qui adhèrent de manière volontaire. Il est régi par une charte, qui définit le programme de conservation, d’étude et de développement à mettre en œuvre sur le territoire, et ce pour douze ans. La gestion du PNR se fait par le biais d’un organisme dédié, sous la forme d’un Etablissement Public de Coopération, le plus souvent, il s’agit d’un syndicat mixte ; c’est-à-dire qu’il regroupe des acteurs issus des mondes politique et professionnel.71 Depuis 45 ans, le nombre de PNR a considérablement augmenté ; on en compte actuellement 48 en France. Les PNR s’associent, tout comme les Pays ou les EPCI, à une démarche locale, à une volonté de réunir différents acteurs, sur un nouvel espace considéré comme pertinent, souvent en dehors d’un espace administratif traditionnel. 69 Site web de la Fédération des Parcs Naturels Régionaux – Les Parcs Naturels Régionaux, 40 ans d’histoire…. [en ligne] Disponible sur http://www.parcs-naturels-regionaux.tm.fr/upload/doc_telechargement/grandes/Histoire40%20ans.pdf 70 Décret du 1er mars 1967 71 LAFFORGUE Laurence. Droit public : La protection des ressources touristiques par la politique d’aménagement du territoire. Cours de Master 1 Tourisme et Développement, Département ISTHIA, Université de Toulouse II, 2013. 45 En définitive, on peut remarquer que les territoires de projet ont été formalisés grâce à une démarche étatique, mais, leur création dépend d’une volonté locale, symbole d’une démarche ascendante. Nous pouvons citer Martin Vanier, qui livre son opinion quant à l’interterritorialité : « L’interterritorialité relève aujourd’hui d’un « bricolage » construisant des réponses spécifiques à des contextes locaux différents »72. Ajoutons que Roger Nifle invoque une « ère des communautés de devenir » spécifiant qu’une communauté de devenir reflète un partage de sens du devenir, de sens des valeurs communes, de sens du développement etc. Cette vision montre en quoi la perception des territoires et des politiques a su évoluer73. 3. La coopération à l'échelle transfrontalière Jusqu’à présent, nous avons pu constater que la coopération territoriale concernait aussi bien la coopération intercommunale ou de projet, cependant, il est important de noter que cette coopération peut, également, s’organiser à l’échelle transfrontalière. 3.1. Qu’est-ce que le transfrontalier ? Nous allons, dans un premier temps, nous intéresser à la notion de transfrontalier ; il convient de définir ce que représente une frontière, dans un premier temps, puis un territoire transfrontalier. 3.1.1. Frontière Avant tout, il convient de préciser que le transfrontalier a trait : « au franchissement d’une frontière » et concerne « les relations entre pays de part et d’autre d’une frontière »74. A partir de cela, il est nécessaire de définir ce qu’est une frontière ; il s’agit d’une « limite séparant deux zones, deux régions caractérisées par des phénomènes physiques ou humains différents ». Cette définition met en avant le fait qu’une frontière matérialise et concrétise les différences entre deux espaces. Malgré tout, le Larousse définit une frontière comme une « limite du territoire d'un État et de l'exercice de la compétence territoriale ». La dimension politique apparait clairement ici. Bien que construite à partir d’éléments physiques et naturels, une frontière résulte d’un procédé humain, et en particulier de choix politiques. Dans des contextes politiques apaisés, une frontière s’apparente à un espace de proximité, de partage, constituant une zone privilégiée de l’échange. C’est alors que l’on peut pointer le fait que la relation de proximité établie entre deux Etats prime. Perçue positivement par les acteurs locaux, 72 73 La lettre du développement local n° 56, novembre-décembre 2008, Propos recueillis par Gilles Rey-Giraud, p 10. NIFLE Roger. Territoires ou communautés de devenir. Journal Permanent de l’Humanisme Méthodologique, janvier 1999. 74 Dictionnaire du Larousse http://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/transfrontalier 46 la frontière constitue un moyen de créer un réseau, de favoriser les partenariats et ainsi de s’inscrire dans une optique de développement local. 3.1.2. Territoire transfrontalier Pour aborder la notion de territoire transfrontalier, il convient d’expliquer ce qu’est la Mission Opérationnelle Transfrontalière (MOT). Issue d’une initiative nationale, elle est créée en 1997 par le Comité Interministériel d’Aménagement et de Développement des Territoires (CIADT). Structure interministérielle dirigée par la DATAR, elle a pour principal objectif de coordonner et faciliter la réalisation de projets transfrontaliers au niveau local75. La MOT propose une définition d’un territoire transfrontalier comme « un espace de projet délimité. Il suppose donc une volonté forte de se donner un destin commun ». Nous parlerons de territoire transfrontalier dès lors que deux états seront limitrophes et partageront des intérêts communs. Afin de caractériser ces territoires transfrontaliers, nous dirions qu’ils découlent d’une volonté politique, où les notions de partage, de lien et d’échange sont au cœur du concept. Ils permettent de créer une dynamique territoriale, rassemblant des acteurs souhaitant concrétiser des objectifs communs. Ainsi, ces territoires transfrontaliers, propices à la coopération, peuvent être vecteurs de développement local. En terme de reconnaissance, les territoires transfrontaliers ont bénéficié de la construction et de l’élargissement de l’Europe. En effet, l’Europe démontre une volonté permanente d’unir des nations afin de créer un seul et même espace, ayant un pouvoir et une envergure forts. Les territoires transfrontaliers s’inscrivent dans cette même vision, privilégiant la collaboration et le rapprochement des espaces et des peuples. Afin d’être en mesure de mener des actions communes, voire des politiques de développement, ces territoires transfrontaliers doivent, par principe, partager un espace géographique dans lequel se dégage une certaine harmonisation en termes de ressources économiques, touristiques, culturelles etc. C’est d’autant plus indispensable que ces ressources permettront la mise en œuvre de projets ponctuels ou durables. 3.2. Coopération transfrontalière, définition76 Comme nous avons pu le spécifier auparavant, l’Europe a joué un rôle primordial et, est d’une certaine façon, à l’origine de l’accomplissement de la coopération transfrontalière. En effet, le 21 75 MOT. http://www.espaces-transfrontaliers.org/indexsite.php DA COSTA Elodie. La coopération transfrontalière en faveur du développement du tourisme équestre : Etude de cas du territoire de l’Ariège. Mémoire de Master 1 Tourisme et Développement. Foix : Université de Toulouse II – Le Mirail, Département CETIA, 2010, 100 p. 76 47 mai 1980, la Convention-cadre européenne sur la coopération transfrontalière des collectivités ou autorités territoriales a été signée entre les Etats-membres du Conseil de l’Europe. Ceci a pour ambition d’inciter à la coopération entre les états limitrophes et de simplifier sa mise en œuvre, notamment d’un point de vue juridique et institutionnel77. L’article 2 de cette convention définit la coopération transfrontalière de la manière suivante : « Est considérée comme coopération transfrontalière, au sens de la présente Convention, toute concertation visant à renforcer et à développer les rapports de voisinage entre collectivités ou autorités territoriales relevant de deux ou plusieurs Parties contractantes, ainsi que la conclusion des accords et des arrangements utiles à cette fin. »78. Les projets de coopération transfrontalière concernent majoritairement les domaines de l’aménagement du territoire, de la culture, du tourisme, des transports. Afin de compléter les modalités de la coopération transfrontalière, la convention désigne les acteurs qui sont en mesure de mener et de participer à ce type d’initiatives. Ils sont regroupés sous le terme d’« autorités territoriales », définis ainsi : « des collectivités, autorités ou organismes exerçant des fonctions locales et régionales et considérées comme telles dans le droit interne de chaque Etat. » Assurément, la coopération doit pouvoir s’inscrire dans le cadre des compétences dont jouissent les collectivités. Actuellement, la coopération transfrontalière jouit d’une règlementation précise et indique qu’elle est issue d’une décision locale, volontaire. Malgré tout, certaines conditions doivent être remplies dès lors que l’on souhaite associer coopération transfrontalière et développement local. Une réflexion globale en terme de développement doit être engagée par les acteurs, afin d’éviter l’écueil d’actions ponctuelles, stériles au développement. Ainsi, les notions de durabilité et de pérennité sont au cœur des actions issues de coopération transfrontalière. 3.3. Les programmes européens : des leviers pour la coopération territoriale 79 L’Union Européenne a perçu les enjeux liés à la coopération. En effet, au début des années 1990, l’Europe a lancé différents programmes expérimentaux. L’un d’eux, INTERREG, a été mis en œuvre pendant quinze ans, durant lesquels trois générations se sont succédées80. Ce Programme d’Initiative Communautaire (PIC) a pour fin de renforcer la cohésion économique et sociale au sein 77 Convention-cadre européenne sur la coopération transfrontalière des collectivités ou autorités territoriales. http://conventions.coe.int/Treaty/fr/Summaries/Html/106.htm 78 Convention-cadre européenne sur la coopération transfrontalière des collectivités ou autorités territoriales. http://conventions.coe.int/Treaty/fr/Treaties/Html/106.htm 79 BARTHE Laurence, Politiques touristiques européennes : La politique de cohésion, Cours de Master 1 TD, département ISTHIA, Université de Toulouse II, 2013 80 INTERREG I 1990-1993 / INTERREG II 1994-1999 / INTERREG III 2000-2006 48 de l’Europe et de soutenir le développement local. Cela se traduit par le financement de projets de coopération en vue d’atteindre une homogénéité et une harmonisation au cœur de l’espace européen. En 2007, face au constat de l’efficacité et de l’intérêt de ce programme, l’Union Européenne a souhaité l’intégrer dans sa politique régionale communautaire, également nommée politique de cohésion 2007-2013. Celle-ci résulte d’une prise de conscience quant aux écarts de richesses au sein même de l’Union européenne ; elle tend donc à les atténuer, à apporter de l’aide aux pays les plus défavorisés et à renforcer la cohésion économique et sociale. La politique de cohésion 2007-2013 intègre trois objectifs distincts : - politique de convergence ; - compétitivité régionale et emploi ; - coopération territoriale. On note donc que la coopération territoriale, et particulièrement transfrontalière, a été désignée comme étant l’un des objectifs principaux au sein de cette politique. Bien que représentant 3,9 % du budget global de la politique de cohésion, soit 13 millions d’euros, on peut considérer que la coopération transfrontalière a atteint une certaine reconnaissance. Le volet de la « coopération territoriale » s’organise sur trois échelles : - transfrontalière - développement régional intégré entre régions frontalières (Programme opérationnel POCTEFA) ; - transnationale - constitution de grands groupes de régions européennes (Programme SUDOE) ; - interrégionale - échange d'informations et partage d'expériences. La coopération transfrontalière s’inscrit, actuellement, dans le cadre de la génération 2007-2013, appelée INTERREG IV. Cette dernière génération impose le respect de trois priorités qui découlent de la stratégie européenne et des objectifs des stratégies de Lisbonne et de Göteborg : - compétitivité et emploi ; - développement durable ; - qualité de vie. L’Europe contribue de manière importante au déploiement des initiatives coopératives entre les Etats européens et le programme INTERREG est un bel exemple de réussite. Dans un contexte où l’élargissement de l’espace européen prime, la coopération semble être un outil pertinent, participant à la construction d’un espace européen solide et uni. 49 Au-delà des objectifs énoncés précédemment, l’Europe tend à atténuer les effets de frontières entre les Etats, pour engager un rapprochement entre les citoyens européens, par des échanges et des partages. Malgré tout, il semble essentiel que les acteurs en jeu parviennent à s’approprier les enjeux de ce programme, pour proposer des projets viables, durables, répondant aux ambitions européennes. 50 CONCLUSION DE LA PARTIE 1______________________________ Cette première partie nous a permis d’appréhender de nombreux concepts en lien avec la thématique générique de la coopération territoriale, notamment dans le domaine du tourisme. Nous avons ainsi pu constater que des difficultés persistent ; le territoire français est en perpétuel mouvance, et devient de plus en plus complexe. A l’heure actuelle, les territoires se multiplient, se superposent, l’expression de « mille-feuille » territorial apparait alors des plus pertinents pour caractériser l’espace français. Chaque territoire étant associé à une instance politique ou associative, on constate donc une prolifération d’acteurs et d’organismes décisionnaires. Selon Nifle, « C'est là le signe d'une crise qui est liée à la mutation profonde de notre époque. »81. De même, on peut aisément percevoir des faiblesses en terme de répartition des compétences entre les échelons ; les missions et rôles de chacun ne semblent pas correctement définis. Nous l’avons également noté, le tourisme est de plus en plus sollicité dans les démarches de politique de développement local, il se place comme l’un des domaines phares au cœur de l’action publique. Cependant, sa transversalité complique davantage le processus de mise en œuvre des politiques publiques. Face à ce constat, on comprend que la coopération joue un rôle déterminant, soulevant une nécessaire évolution, et donc de nouveaux enjeux. Ainsi, nous nous concentrerons sur la problématique suivante : Quels sont les enjeux de la coopération territoriale dans les politiques touristiques de développement local ? 81 NIFLE Roger. Territoires ou communautés de devenir. Journal Permanent de l’Humanisme Méthodologique, janvier 1999. 51 PARTIE 2 Les enjeux de la Coopération Territoriale dans les politiques touristiques __________________________________________________________ 52 INTRODUCTION DE LA PARTIE 2____________________________ Dans la partie précédente, nous avons évoqué et présenté les principaux acteurs concernés par le secteur du tourisme : - les décideurs politiques, qui définissent les politiques publiques touristiques ; - les techniciens, qui se chargent de la mise en œuvre opérationnelle des actions touristiques. Cependant, la France regorge de structures, en lien plus ou moins direct avec le tourisme. Ainsi, le « mille-feuille » territorial français et la multiplicité des acteurs constituent de véritables défis dans la mise en œuvre des politiques touristiques, s’intégrant dans un développement local. De manière générale, nous tenterons d’apporter les premiers éléments de réponse à notre problématique, en tentant de soulever les enjeux de la coopération territoriale dans le développement touristique. Ces derniers sont divers : mutualisation des moyens humains et financiers, capacité d’innovation, mise en jeu et renforcement d’une cohésion stratégique et construction d’une vision partagée induisant un renforcement des liens sociaux et institutionnels etc. Ainsi, nous commencerons cette partie en nous focalisant sur une première hypothèse qui tend à relever l’impact des politiques touristiques et des coopérations territoriales dans la valorisation des ressources territoriales. Puis, nous aborderons notre seconde hypothèse, relevant davantage du domaine sociologique, dans laquelle nous expliquerons que l’humain constitue l’élément moteur de la coopération. En effet, nous verrons que l’harmonisation et l’entente entre les nombreux acteurs en présence constituent un enjeu fondamental dans la réussite du développement touristique. 53 La coopération, un vecteur de valorisation Chapitre 1 territoriale et touristique Ce premier chapitre va nous permettre d’exposer une première hypothèse de recherche quant à la question des enjeux de la coopération territoriale. Il va s’agir d’expliciter en quoi nous tendons à croire que la mise en réseau des acteurs dans le secteur touristique peut être un moyen de valoriser un territoire. 1. Un lien évident entre démarche coopérative et valorisation territoriale Nous évoquerons, dans un premier temps, certaines notions telles que la ressource territoriale ou encore l’attrait touristique, tout en effectuant des liens avec des notions citées au préalable. 1.1. La valorisation touristique, outils et enjeux Nous commencerons par étayer la notion de ressource territoriale, évoquée dans la partie précédente, puis nous nous concentrerons sur le lien entre communication et territorialité. 1.1.1. Qu’est-ce qu’une ressource territoriale ?82 Notre réflexion tend à montrer que la coopération peut être facteur de valorisation territoriale. Ainsi, il convient d’invoquer la notion de ressource territoriale et de la définir. De prime abord, le terme générique de « ressource » renvoie à des connotations plutôt positives. Par définition, tout territoire possède un potentiel en termes de ressources. Ainsi, elle peut être économique, humaine, financière, touristique, culturelle etc. er donc relever des dimensions matérielle ou immatérielle (identité, histoire, potentiel humain). A partir de ce constat, un lien semble évident entre la notion de ressource territoriale et le développement local. Ce dernier a évolué, nous l’avons expliqué au début de notre raisonnement, et il suppose de définir ce que sont les ressources d’un territoire. Il convient donc pour les acteurs locaux de se demander « Quelles sont nos ressources ? Que souhaitons-nous valoriser sur notre territoire ? ». Cependant, cet exercice n’est pas si simple et implique d’aborder une approche particulière, afin de déceler des ressources spécifiques. En définitive, une ressource territoriale reflète les valeurs portées par les sociétés sur leur environnement et elle doit permettre de participer à la construction sociale et économique du territoire. En partant de ce constat, nous pouvons affirmer qu’une ressource territoriale constitue un objet en perpétuel renouvellement. 82 BARTHE Laurence. Le développement local : quelles pratiques ? quels enjeux ? Cours de Licence 3 Tourisme et Développement, département ISTHIA, Université de Toulouse 2 le Mirail, 2011. 54 Afin de déceler ces ressources, les acteurs du territoire doivent travailler en collaboration et établir un accord quant à l’identification des ressources territoriales. Cela nécessite donc un travail à des échelles spécifiques, ce qui peut être source de complication et de désaccords. En effet, se pose alors la question d’attrait, d’autant plus lorsqu’il s’agit du domaine touristique. Cependant, cette notion ne possède pas de conceptualisation précise et entraine des divergences d’interprétation. « La signification que nous donnons à ce concept peut avoir des conséquences sur la façon dont nous percevons l’activité touristique et la façon dont nous mettons en valeur nos territoires.»83. En effet, un attrait touristique renvoie directement aux ressources, qu’elles soient naturelles, culturelles, qui possèdent un potentiel d’attractivité. Ainsi, une ressource touristique, pour exister en tant que telle, doit servir aux produits et à l’offre touristique du territoire. 1.1.2. La destination touristique, un territoire pertinent de valorisation touristique ? Il faut noter que la valorisation de ces ressources s’effectue par le biais d’actions de promotion et de communication. Pour cela, il convient de déterminer l’espace d’intervention adéquat ; ainsi se pose la question de l’échelle pertinente en terme de communication touristique. Or, une confusion existe entre les notions de « territoire administratif » et « destination touristique ». Il semble approprié d’engager une communication touristique sur un espace regroupant des caractéristiques culturelles, patrimoniales similaires. En cela, il convient d’intégrer la notion de « destination touristique » dans leurs réflexions stratégiques, tenant compte du fait que les touristes n’ont pas de frontières. Malgré tout, bien que les acteurs touristiques appliquent leurs actions de promotion sur un territoire de projet, censé répondre aux caractéristiques d’une destination touristique, des disparités entre les deux notions peuvent exister. « Le territoire de projet est celui à l’échelle duquel est déterminée et mise en œuvre une politique de développement touristique, alors que la destination touristique correspond au territoire promu à l’extérieur dans le cadre d’une stratégie de communication. Ces deux territoires peuvent, dans certains cas, être identiques et, dans d’autres, différents. »84 Enfin, nous constatons que l’ensemble de ces éléments entrainent une forte confusion territoriale, c’est en cela que réside la difficulté du tourisme. « Les touristes, comme les habitants eux-mêmes, risquent d’avoir de plus en plus de mal à se retrouver dans cette inflation de pays s’emboîtant les uns dans les autres, comme des poupées russes.85 83 DE GRANDPRE François. Attraits, attractions et produits touristiques : trois concepts distincts dans le contexte d’un développement touristique régional, Téoros, été 2007, p 12. 84 MARCHAL Christophe, DUUCHESNE Arnaud, Territoire de projet et destination touristique, des notions à clarifier. Cahiers Espaces n°91 Intercommunalité & Tourisme, novembre 2006, p 34. 85 MARCHAL Christophe, DUUCHESNE Arnaud, Territoire de projet et destination touristique, des notions à clarifier. Cahiers Espaces n°91 Intercommunalité & Tourisme, novembre 2006, p 35. 55 1.2. Les enjeux de la coopération dans la mise en valeur de ces ressources Nous comprenons donc que, dans ce contexte, les acteurs du tourisme doivent faire face à de nombreux obstacles afin de valoriser un territoire. C’est pourquoi, nous tenterons de démontrer en quoi la coopération territoriale peut se placer comme un élément de réponse face à ces problématiques. Nous l’avons vu, il convient de dépasser le système territorial institutionnel existant pour être en adéquation avec les perceptions des touristes. En cela, la démarche coopérative est un moyen efficace pour gommer ces frontières et placer les ressources territoriales au cœur de ce processus. Notons, que celui-ci se réalise à double sens ; la valorisation des ressources territoriales peut entrainer un renforcement de la coopération, établir une meilleure entente entre les acteurs et ainsi se placer comme un cercle vertueux. Enfin, le fait de concevoir une valorisation territoriale à partir d’un élément naturel, culturel phare va nécessairement impliquer un partenariat. C’est ce que nous allons pouvoir détailler dans l’exemple qui suit : l’Espace Mont-Blanc. 2. L’espace Mont-Blanc, une illustration de la valorisation territoriale86 La France regorge d’espaces naturels remarquables, et le tourisme peut être un vecteur de valorisation territoriale. De ce fait, nous avons pris le parti d’évoquer, en second plan, un exemple concret, celui de l’Espace Mont-Blanc, afin d’illustrer nos propos énoncés préalablement. 2.1. Présentation du projet L’Espace Mont-Blanc concerne trois pays : la France, l'Italie et la Suisse et s’étend sur une superficie d'environ 2 800 km². Comme son nom l’indique, il se situe dans les Alpes, sur la zone du plus haut sommet, le Mont-Blanc. Cet espace de coopération est né suite à une prise de conscience, spécifiant la nécessité de protéger cet espace naturel. Après diverses démarches, le projet a vu le jour au début des années 1990 et souhaitait répondre à 4 objectifs majeurs : - aider à la conservation d'un espace cultivé en soutenant l'agriculture de montagne et les activités pastorales ; - développer une stratégie commune de sauvegarde de la nature et des paysages, notamment des milieux les plus sensibles ou menacés ; - encourager un tourisme intégré compatible avec la sauvegarde des ressources et de l'environnement ; - limiter l'impact des transports et de leurs infrastructures dans l'intérêt des habitants et de 86 Espace Mont-Blanc. http://www.espace-mont-blanc.com/ 56 l'environnement en privilégiant le trafic rail-route et le transport collectif. Cet espace de coopération transfrontalière a donc pour vocation de protéger et de valoriser le MontBlanc, symbole d’un patrimoine naturel et environnemental d’exception, où s’inscrivent des activités économiques et touristiques de dimension internationale. Nous pouvons appuyer notre propos en se basant sur quelques axes stratégiques tels que : - le renforcement d’une identité commune par les échanges autour de la valeur symbolique du Mont Blanc ; - le renforcement d’une organisation de coopération ; - la préservation et la mise en valeur du patrimoine historique, culturel et naturel. Ces éléments font écho aux propos tenus par Christian Bourret,87 qui évoque la présence d’un lien entre identité et coopération. Il explique que, face à un émiettement territorial, la recherche identitaire sociétale prend une dimension nouvelle, dans laquelle la cohésion devient un réel enjeu. Afin d’instaurer une identité homogène, il est nécessaire de tenir compte de la polymorphie territoriale. Cet élément rappelle directement aux prémices de notre raisonnement, où nous avions défini la notion de territoire, miroir d’une organisation administrative, d’une identité, d’un espace économique etc. Ainsi, la coopération permet de concevoir le territoire local comme une ingénierie multi-projet, symbolisant une nouvelle relation au temps et à l’espace de la société. Enfin, un territoire s’appuie sur une identité forte afin d’engager un développement local ; la coopération constitue donc un outil privilégié grâce au partage de connaissances, et à un apprentissage collectif. 2.2. La place du tourisme dans la valorisation territoriale Nous terminerons en nous intéressant à l’activité touristique présente sur l’Espace Mont-Blanc. Il faut relever que le tourisme représentait une des préoccupations majeures dès le début de cette coopération, puisqu’il apparaissait dans les 4 objectifs cités au dessus. Et pour cause, il s’apparente à une activité économique d’importance pour cette région. L’un des dix axes stratégiques établis pour l’avenir accentue cette prise de conscience et incite à le « réorienter vers un tourisme durable, diversifié, respectueux du territoire et de ses composantes ». Pour répondre à ces défis, l’Espace Mont-Blanc tend à développer un tourisme intégré, conciliant un développement socio-économique et une préservation de l’environnement. Pour cela, trois axes d’actions ont été désignés : - une meilleure gestion des flux touristiques ; - l'atténuation de la pression touristique sur les zones écologiquement sensibles ; 87 BOURRET Christian. Eléments pour une approche de l’intelligence territoriale comme synergie de projets locaux pour développer une identité collective. Projectics / Proyéctica / Projectique, janvier 2008, n° 0, p. 79-92. 57 - la concertation entre les collectivités locales afin de valoriser les complémentarités et les synergies dans l'offre touristique. Dans l’optique de valoriser les ressources territoriales via le tourisme, l’Espace Mont-Blanc a mis en place un projet d’itinéraires de randonnées. Cette initiative tend à mettre en avant les richesses naturelles et les paysages du Mont-Blanc auprès des visiteurs, les incitant à apprécier des sites hors des sentiers battus. Ainsi, nous avons pu appuyer l’hypothèse, selon laquelle, la coopération subsiste en tant que moyen de valorisation des ressources, dans le cadre d’une activité touristique adaptée et maitrisée. Nous avons pu montrer combien il était essentiel de concevoir un territoire de manière systémique, afin d’appréhender la mécanique des ressources territoriales, situées au cœur de la valorisation touristique. Il convient, à présent, de présenter notre seconde hypothèse de recherche, axée sur la logique systémique des acteurs dans la coopération. 58 Chapitre 2 La mise en jeu d’un système d’acteurs au cœur de la démarche coopérative Ce chapitre va nous permettre de détailler certains éléments évoqués dans notre première partie. En effet, il convient de préciser notre propos quant aux acteurs en présence dans le tourisme. Nous avons parlé des politiques publiques, cependant elles ne peuvent s’établir que par le biais d’actions opérationnelles, laissant entendre l’intervention d’une ingénierie de projet. Véritable enjeu et défi à la fois pour ces acteurs, nous verrons quelles difficultés peuvent résulter de ce système. 1. Des acteurs issus de structures hétérogènes… La multiplicité des acteurs dans le champ du tourisme est l’une des conséquences de la transversalité de ce domaine. La coopération territoriale, quant à elle, induit la présence de plusieurs partenaires. L’un dans l’autre, les acteurs d’un territoire se retrouvent face à un système touristique difficile à appréhender. 1.1. Les différents acteurs en jeu Nous avons d’ores et déjà posé un cadre en expliquant quels étaient les acteurs en jeu dans l’appui au développement touristique et dans l’instauration des politiques publiques. Malgré tout, les acteurs publics ne sont pas seuls à intervenir dans le champ du tourisme. Il s’agit ici d’étayer nos propos en montrant que le tourisme touche de nombreux autres acteurs, ayant une légitimité dans le développement touristique ; au même titre que ceux cités précédemment. 1.1.1. Les réseaux associatifs Nous commencerons par aborder, dans un premier temps, les réseaux associatifs, qui constituent des structures dynamiques et omniprésentes dans le domaine touristique. En effet, nous avons pu constater que ce secteur s’organise de plus en plus via des structures associatives. A l’échelle nationale et dans le domaine touristique, les structures associatives sont nombreuses : s’organisant via des fédérations ou des réseaux nationaux. Nous pouvons faire référence à l’hébergement touristique par exemple, et aux nombreux réseaux existants. « Gîtes de France »,88 notamment, est un réseau d’hébergement chez l’habitant, déployé dans toute l’Europe. Sa gestion est assurée par une fédération nationale, disposant du statut associatif de la loi de 1901. Il s’agit, donc, de la structure de référence nationale ; cependant, des structures départementales dédiées accompagnent la fédération nationale et jouent un rôle dans la promotion et la commercialisation de ces hébergements touristiques. Nous sommes, à présent, en droit de nous demander en quoi les 88 Gîtes de France. http://www.gites-de-france.com/nos-valeurs.html 59 réseaux associatifs peuvent favoriser le développement touristique. Aisément, nous pouvons dire que le réseau « Gîtes de France » permet aux hébergements-membres de profiter d’avantages, notamment en termes d’actions promotionnelles, de communication ou encore de commercialisation. Ils jouissent ainsi de la notoriété et de la visibilité de ce label. De nouveau, cet exemple illustre l’omniprésence des réseaux dans le domaine du tourisme. En réalité, nous pouvons également constater que les associations locales ; qu’elles soient culturelles ou sportives, participent à la structuration de l’offre touristique ainsi qu’à la dynamique locale. L’enjeu du réseau est de nouveau très présent, puisque ces associations travaillent en collaboration, de plus en plus, avec des structures telles que les Offices de Tourisme par exemple. Cette démarche tend à soulever une volonté de s’unir afin d’atteindre des objectifs communs : le développement touristique et territorial. De manière générale, nous pouvons affirmer que la mise en réseau associative consent à dynamiser un territoire, à développer les actions opérationnelles et à inscrire divers acteurs dans une démarche commune. 1.1.2. Le secteur privé Nous poursuivons notre réflexion dédiée à la diversité des acteurs dans le domaine du tourisme. Il s’agit, à présent, de souligner en quoi les acteurs publics et les organismes d’appui au développement touristique se doivent d’intégrer les prestataires privés dans l’organisation des politiques de développement touristique. En effet, ces prestataires font partie de l’offre touristique locale ; les hébergeurs, les restaurateurs, les exploitants de sites touristiques ou de loisirs etc. Le tourisme s’inscrit dans les secteurs publics et privés et il est indispensable, pour eux, de se consulter et d’établir un travail commun. Certes, le secteur privé tend à conduire des démarches de profit économique essentiellement ; bien que cela ne soit pas l’objectif premier des acteurs institutionnels, cet aspect semble nécessaire pour développer le territoire. Nous l’avons vu, le développement local ne se résume pas à la simple dimension économique, malgré tout, elle intègre le système du développement local. Pour illustrer nos propos, il convient de se référer à un exemple concret. Les territoires ruraux reflètent de parfaits exemples de la mise en réseau entre le privé et le public. En effet, les prestataires touristiques, en milieu rural, se retrouvent face à des problématiques spécifiques : manque de moyens, manque de visibilité etc. Or, nous savons qu’en milieu rural, le secteur touristique souffre d’une offre souvent diffuse. Ainsi, pour atténuer cet effet et tenter de créer une offre touristique forte et visible, la solution semble avoir été trouvée grâce à un travail de 60 collaboration. En adhérent à l’office de tourisme du territoire, un hébergeur bénéficiera d’une aide en terme de communication, ainsi que d’une meilleure visibilité. De ce fait, il existe bel et bien une relation entre acteurs institutionnels et acteurs privés dès lors que l’on tente de mettre en œuvre des politiques touristiques de développement territorial. De nouveau, on constate que la coopération fait figure d’élément fédérateur entre les acteurs ; permettant d’orienter des actions vers une même direction, au service d’une finalité qui les concerne tous : le développement. 1.1.3. La population locale En dernier lieu, il convient de préciser que la population locale fait figure d’acteur local indispensable dans le développement du territoire. Souvent peu consultée, les élus ont tendance à ne pas impliquer la population dans leurs prises de décisions politiques. Or, elle est la première concernée par ces questions ; le territoire correspondant à son lieu de vie quotidienne. Les élus sous-estiment la force et l’importance que la population locale peut avoir sur un territoire, d’autant plus lorsqu’il s’agit de valorisation touristique. C’est ce que révèle Philippe Violier89 lorsqu’il insiste sur la pluralité des acteurs dans le tourisme. Il s’interroge sur la place occupée par la population locale et sur son rôle à jouer. On constate qu’il prend le parti d’affirmer que celle-ci peut contribuer aux actions de valorisation territoriale. En effet, les habitants locaux peuvent revêtir le rôle d’ambassadeur du territoire, contribuant à diffuser des valeurs et des images positives. C’est en cela que nous pouvons dire que l’activité touristique rassemble l’ensemble des acteurs d’un territoire, et induit de manière significative la mise en œuvre de collaboration, voire de coopération entre ces derniers. 1.2. La mise en réseau des acteurs, une articulation méthodologique Une simple énumération relative aux acteurs concernés par le tourisme est insuffisante pour comprendre la mécanique de la coopération. Nous allons donc nous intéresser à la question de l’articulation entre ces différents acteurs, ainsi qu’à la nature de ces relations, nécessitant, nous le verrons, une répartition des compétences. 1.2.1. Quelle répartition des compétences ? Nous avons, d’ors et déjà, pointé les difficultés liées à la compétence tourisme : il n’existe pas de 89 VIOLIER Philippe. L’espace local et les acteurs du tourisme. Rennes : Presses Universitaires de Rennes. Espaces et territoires, 1999, 177 p. 61 bloc de compétence spécifique attitré au tourisme et ce dernier se démarque de par sa transversalité. De plus, nous avions spécifié que chaque échelon territorial possède des compétences relatives à l’action touristique. Cette configuration, des plus complexes, n’est malgré tout pas insurmontable. Nous avons décidé de faire référence à un exemple d’organisation et de répartition des compétences dans le champ du tourisme ; il s’agit du département des Deux-Sèvres, situé en Poitou-Charentes90. Face aux difficultés évoquées précédemment, ainsi qu’à un manque de cohérence flagrant entre les offices de tourisme du département, une réflexion globale a été engagée. Celle-ci concerne aussi bien les organismes d’appui au développement touristique (OTSI, CDT) que les collectivités territoriales (Conseil Général). Une méthodologie a donc été proposée, s’organisant grâce à des groupes de travail dédiés à la problématique de la compétence tourisme. Afin de garantir une cohérence entre les OTSI sur l’ensemble du département, les acteurs du tourisme se sont tournés vers le concept d’Office de Tourisme de pôle. Le Conseil Général, participant à cette démarche, a défini un cadre de référence à cette notion, et a participé financièrement à la démarche. Précisons que les Offices de Tourisme de pôle doivent s’inscrire dans le schéma de développement touristique. Pour énoncer leur statut, le Conseil Général s’est appuyé sur trois notions : - le « Pays », comme territoire de référence ; - la compétence tourisme, comme socle d’exercice ; - le service au client, comme préoccupation principale. Un des enjeux majeurs a été de définir une répartition claire et effective des compétences. Pour se faire, trois familles d’actions ont été désignées : - le développement et l’amélioration de l’offre touristique (adapter les infrastructures et les services) ; - la promotion et la mise en marché (améliorer la visibilité et l’attraction des produits touristiques) ; - l’accueil, l’information et l’animation (satisfaire les visiteurs). Puis, chaque échelon territorial s’est vu attribué le rôle de chef de file de l’une de ces actions, en prenant en compte ses forces, et son degré de légitimité. 90 RICHET Marc. La fin du mille-feuille touristique ? L’expérience des Deux-Sèvres. Revue Espace Tourisme et Loisirs n°301, mars 2012, p 8 à 15. 62 Les étapes de la réorganisation du tourisme dans les Deux-Sèvres La répartition des compétences du tourisme dans les Deux-Sèvres 1- Rendre les OT plus forts 2- Apprendre à se faire pleinement confiance et à mieux travailler ensemble 3- Partager des stratégies 4- Identifier et valoriser les compétences de chacun 5 – Expérimenter et ajuster les responsabilités de chacun 1- Développement de l’offre touristique Echelon de pilotage : département (ADT) 2- Promotion et mise en marché Echelon de pilotage : région (CRT) 3 – Accueil, information, animation Echelon de pilotage : intercommunalité (OT de pôle) Cette démarche est relativement récente, et nécessite encore de nombreux efforts pour tendre vers une amélioration. Il semble un peu tôt pour établir un véritable bilan quant à la pertinence de ce système et à la réussite engagée. Malgré tout, cette démarche fait suite à une prise de conscience collective et s’inscrit dans une organisation de type « mode projet ». Marc Richet, directeur de l’ADT des Deux-Sèvres précise qu’ « Outre le sentiment d’avoir construit ensemble quelque chose de solide et d’en retirer une certaine fierté collective, nous pensons avoir ainsi mutuellement légitimé nos structures respectives » (Richet, 2012, p 14) Cet exemple met parfaitement en exergue le fait que la coopération a constitué un outil privilégié afin d’établir une cohérence entre les OTSI sur tout le département ; cette vision fait écho à la nécessaire répartition et clarification des compétences comme l’explique Marc Richet « Plutôt que chacun apporte une réponse isolée, la recherche de solutions globales est privilégiée, sur la base d’une remise à plat du « qui fait quoi ». (Richet, 2012, p 10) En définitive, il souligne l’importance de chaque acteur dans l’élaboration de démarche collective de ce type : « Il y a une place pour tous les acteurs du tourisme institutionnel, la valorisation d’égal à égal de tous les partenaires est une condition clé du succès individuel et collectif » (Richet, 2012 p 15) 1.2.2. La coopération, une entité multisectorielle Nous tenterons, à présent, d’expliciter dans quels domaines s’inscrit une démarche coopérative, reflétant la complexité de notre objet d’étude. Avant toute chose, rappelons que « le système d’acteur résulte d’une volonté politique » (Violier, 1999, p 168) et de ce fait, il n’est en rien évident ou naturel. Philippe Violier fait référence à la pensée d’Erhard Friedberg, qui a travaillé sur la question de l’action collective et des relations entre acteurs et système. Il explique que ce système correspond à un construit social dans lequel existent 63 des interdépendances des acteurs. Selon lui, la démarche volontaire entre élus et techniciens constitue une condition sine qua non dans la réussite coopérative et doit résulter d’une prise de conscience collective, s’inscrivant dans une vision pragmatique. De ce fait, on peut percevoir que la coopération territoriale met en avant des enjeux et des leviers d’ordre politique. De plus, les facteurs économiques correspondent, également, à des enjeux majeurs de la coopération. Nous l’avons vu précédemment, la valorisation des ressources touristiques constitue un élément clé de la coopération. Cependant, nous pourrions dire qu’il s’agit à la fois d’un enjeu, et donc d’un objectif à atteindre, mais également d’un moyen d’action. En effet, cette valorisation peut être un moyen pour tendre vers des fins économiques. De ce fait, la démarche coopérative intègre également des leviers économiques, se traduisant par une recherche de nouveaux marchés et s’établissant par une mise en commun des moyens financiers. Enfin, la coopération ne peut être effective sans ingénierie territoriale. C’est pourquoi, nous pouvons affirmer que les facteurs sociologiques sont des leviers de la coopération. Elle sous-tend la mise en œuvre d’échanges, de partage et surtout une entente entre les partenaires. Nous pouvons de nouveau faire référence à Friedberg, qui défend l’idée qu’une organisation résulte de l’expression des comportements humains et constitue donc un phénomène sociologique91. Cet aspect fait l’objet de notre réflexion dans la partie qui suit. Ainsi, il convient de spécifier que le tourisme, en tant que système, s’organise via des interrelations entre des acteurs, issus d’univers divers, mais toutefois complémentaires. Ces derniers représentent donc des éléments endogènes au système touristique. La coopération s’inscrit donc dans ce cadre et est elle-même un système complexe et pourtant nécessaire dans la mise en œuvre opérationnelle d’actions touristiques. 2 – … au service d’une ingénierie touristique Nous poursuivons notre réflexion liée aux enjeux de la coopération territoriale, en nous focalisant sur des aspects davantage liés au domaine sociologique. En effet, nous verrons que la notion même de mise en réseau place la dimension humaine comme élément déterminant de sa réussite. 2.1. Qu’est-ce que l’ingénierie de projet ? Il va s’agir ici de définir en quoi consiste l’ingénierie de projet et en particulier dans le domaine du tourisme. Nous verrons quelles notions cela induit, et quels enjeux en ressortent, notamment dans 91 CROZIER Michel, FRIEDBERG Erhard. L’acteur et le système : les contraintes de l’action collective. http://mipms.cnam.fr/servlet/com.univ.collaboratif.utils.LectureFichiergw?ID_FICHIER=1295877017933 64 la coopération territoriale. 2.1.1. Rôle et objectifs de l’ingénierie territoriale Avant toute chose, il nous semble essentiel de procéder à une analyse du concept de l’ingénierie territoriale. En quoi consiste-t-elle ? Quel rôle joue-t-elle dans le secteur touristique ? C’est à ces questions que nous tenterons de répondre. La notion d’ingénierie territoriale est relativement récente et a atteint une réelle consécration en 2003, lorsque le Comité Interministériel de l’Aménagement et de Développement du Territoire (CIADT) a émis sa volonté d’instaurer une plate-forme d’ingénierie territoriale, employant officiellement le terme « d’ingénierie territoriale ». L’objectif principal résidait dans la mise en œuvre d’une organisation de rapprochements entre acteurs et chercheurs, s’associant dans des travaux de recherche-formation-action92. Elle a été définie l’année suivante, par le Comité des directeurs pour le développement urbain, comme un « ensemble des savoir-faire professionnels dont ont besoin les collectivités publiques et les acteurs locaux pour conduire le développement territorial ou l’aménagement durable des territoires ». La notion d’ingénierie territoriale est apparue en parallèle du développement territorial, lui-même issu de la décentralisation et des innovations en terme de logique de projet dans le management public93. Complétons notre propos en mentionnant une définition plus élaborée de l’ingénierie territoriale, désignée par Sylvie Lardon comme « L'ensemble des concepts, méthodes, outils et dispositifs mis à disposition des acteurs des territoires, pour accompagner la conception, la réalisation et l'évaluation des projets de territoire. Cela concerne non seulement les acteurs du développement local, élus, habitants et animateurs locaux, mais aussi l'ensemble des acteurs confrontés aux enjeux du développement territorial ». Nous comprenons que l’ingénierie implique une maîtrise d’outils et de méthodologies associée à des connaissances multisectorielles extrêmement précises. Ce travail découle d’une concertation entre plusieurs experts, souvent spécialisés, laissant entendre une nécessaire coopération. Plus généralement, nous pourrions dire que l’ingénierie désigne l’ensemble des pratiques et des méthodes du « faire-ensemble », dont l’objectif est de construire un territoire. L’ingénierie touristique s’articule dans les mêmes logiques ; les cabinets d’études, structures dédiées à l’ingénierie, participent à des études de marché, de faisabilité, bâtissent des stratégies de 92 TROGNON Laurent, LARDON Sylvie, PAYRE Mathieu. 1ère conférence intercontinentale en intelligence territoriale ; la chaîne d’ingénierie territoriale, vers un ingenium territorial ? 2011, 13 p 93 TROGNON Laurent, LARDON Sylvie, PAYRE Mathieu. 1ère conférence intercontinentale en intelligence territoriale ; la chaîne d’ingénierie territoriale, vers un ingenium territorial ? 2011, 13 p 65 développement, des montages financiers94. Ce travail constitue un moyen d’orienter les prises de décision. La complexité de l’ingénierie réside dans sa transversalité ; pour établir un diagnostic viable, il est nécessaire d’appréhender de nombreux champs (urbanisme, juridique, marketing, économique etc.). Nous pourrions aller jusqu’à dire que les compétences et les connaissances dans le champ du tourisme constituent des éléments au cœur du principe d’ingénierie touristique ; nous constatons que les structures d’aide au développement touristique semblent les mieux armées de ce point de vue. Ainsi, les collectivités territoriales peuvent s’appuyer sur ce travail d’expertise. Afin de démontrer le rôle essentiel de l’ingénierie, nous pouvons nous appuyer sur les propos de Jean-Paul Delevoye, ancien Ministre de la Fonction Publique qui pointe « la difficulté, voire l’incapacité de certains territoires à concevoir des projets du fait d’un déficit qualitatif en ingénierie »95 ; il souligne la contradiction existante entre le principe d’égalité des chances des territoires et la réalité. Il termine en exprimant sa volonté d’encourager la mise en réseau des acteurs, la coordination et la recherche de complémentarités des interventions et l’échange de bonnes pratiques. Malgré tout, le concept d’ingénierie territorial a su évoluer, se devant de répondre aux nombreux défis apparus dans les politiques publiques. L’un des plus importants se révèle être le développement durable, devenu aujourd’hui omniprésent. Cependant, nous pourrions mettre en exergue une diversité flagrante de défis actuels à relever : la mise en œuvre de l’action multipartenariale, l’anticipation, l’innovation, la compétitivité. Il convient également de tenir compte de la mouvance territoriale et de la recomposition du territoire français, laissant poindre des intercommunalités et des territoires de projet de plus en plus influents. C’est ainsi que le concept d’ingénierie territorial a, peu à peu, glissé vers un autre concept : l’intelligence territoriale. 2.1.2. L’intelligence territoriale, un concept à intégrer dans les actions de coopération Comme nous venons de l’évoquer, le concept d’intelligence territoriale tend à intégrer des notions pertinentes et développées dans l’ingénierie de territoire. Cela se traduit par une intelligence collective souhaitant bâtir un système d’appui au développement. Concrètement, il s’agit d’un perfectionnement des acteurs publics, tant au niveau des méthodes que des outils afin de « concevoir, mettre en œuvre et gérer leur propre projet de développement, en adéquation avec les 94 GEFIL. L’ingénierie touristique et culturelle, qu’est-ce que c’est ? http://www.gefil.org/article/l-ingenierie-touristique- et 95 ETD, centre de ressource du développement territorial. La conduite du projet de territoire, septembre 2003, 74 p 66 besoins de leurs territoires et les exigences de leurs partenaires financiers.»96 Avant tout, l’intelligence territoriale fait suite au principe d’intelligence économique territoriale. Brièvement, nous dirons que celui-ci répond à une problématique de stratégie compétitive, souhaitant dépasser les difficultés liées à l’environnement concurrentiel actuel. L’intelligence économique territoriale s’organise par le biais d’un management offensif, où l’attractivité du territoire et le système économique constituent des fins en soi. Ce concept s’est développé face à un contexte de concurrence accrue, dans lequel la maîtrise stratégique correspond à un facteur de réussite économique. Ce concept a été défini, par Alain Juillet97, ainsi : « la maîtrise et la protection de l’information stratégique utiles aux acteurs économiques ». L’intelligence économique renvoie à des opérations de veille, se traduisant par un décryptage de l’environnement et une surveillance de la stratégie des acteurs, associée à une sécurisation de l’information, une protection contre les attaques concurrentielles98. En allant au-delà de la vision purement économique du territoire, l’intelligence territoriale articule ses principes en intégrant le développement local dans son ensemble. Les logiques de coordination sont plus développées, ne se limitant pas à celles issues du marché ou de l’Etat. Ainsi, l’intelligence territoriale tend à définir une gouvernance territoriale en répondant aux enjeux de collaboration, d’apprentissage collectif ou encore de connaissance collective autour des projets locaux. Souhaitant définir clairement ce concept, nous nous appuierons sur la définition complète énoncée par Bertacchini : «On peut considérer l'intelligence territoriale comme un processus informationnel et anthropologique, régulier et continu, initié par des acteurs locaux physiquement présents et/ou distants qui s'approprient les ressources d'un espace en mobilisant puis en transformant l'énergie du système territorial en capacité de projet. De ce fait, l’intelligence territoriale peut être assimilée à la territorialité qui résulte du phénomène d’appropriation des ressources d’un territoire puis aux transferts des compétences entre des catégories d’acteurs locaux de culture différente.»99 Les préoccupations majeures de ces deux concepts (ingénierie territoriale et intelligence territoriale) restent globalement proches, notamment en termes de déploiement de l’information et de la connaissance, au service d’un développement territorial. Encore faut-il considérer le territoire comme une entité polymorphe, qui établit et pense son action dans une dimension de projet 96 TROGNON Laurent, LARDON Sylvie, PAYRE Mathieu. 1ère conférence intercontinentale en intelligence territoriale ; la chaîne d’ingénierie territoriale, vers un ingenium territorial ? 2011, 13 p 97 Haut responsable chargé de l’intelligence économique auprès du Secrétariat Général de la Défense Nationale 98 DELBECQUE Eric. Les politiques d’intelligence économique. Paris : Presses Universitaires de France, 2008, 126 p 99 TROGNON Laurent, LARDON Sylvie, PAYRE Mathieu. 1ère conférence intercontinentale en intelligence territoriale ; la chaîne d’ingénierie territoriale, vers un ingenium territorial ? 2011, 13 p 67 prospective. Ces notions, étant au cœur de ces concepts, nous comprenons combien il est important pour les acteurs participant à une coopération territoriale dans le tourisme, de les y intégrer et d’en percevoir les clés de réussite dans sa mise en œuvre. 2.2. Une dimension sociologique Il faut spécifier que la coopération territoriale induit des facteurs d’ordre sociologique ; nous l’avons déjà évoqué, mais les relations humaines constituent à la fois un moyen de réussite mais également un réel enjeu de la coopération. C’est en cela que nous pouvons associer certains principes clés à la démarche globale de coopération, comme le sont les notions de partage, d’échange d’informations, de connaissances, de savoir-faire etc. La coopération va s’établir grâce à un réseau à échelle humaine, dans lequel des disparités peuvent exister en termes de compétences, de savoir-faire. De ce fait, le travail partenarial implique une complémentarité à diverses échelles, pouvant permettre une mise en œuvre opérationnelle effective. Pour y arriver, il ne faut, malgré tout, pas se cantonner à une simple approche de « mettre en commun », mais bien intégrer les interactions existantes entre les acteurs pour s’inscrire dans une communication entendue au sens de la théorie de l’Ecole de Palo Alto. En effet, celle-ci tend à dire que la communication doit être considérée comme un ensemble systémique, révélant un réseau indissociable de relations. La relation constitue l’élément central de la communication, et non les acteurs ou les messages en jeu100. Enfin, il est indispensable de soulever la notion de confiance, caractéristique de l’interaction humaine. C’est ainsi que nous pouvons mentionner le principe de la dynamique de la confiance instaurée par Gilles Le Cardinal, Jean-François Guyonnet et Bruno Pouzoullic, la considérant comme un paramètre essentiel pour construire une coopération durable et viable entre les acteurs d’un projet101. Ces derniers ont mené une réflexion sociologique sur les systèmes sociaux actuels à une échelle micro. Pour expliquer ce principe, ils ont mis en place la méthode PAT-Miroirs102 qui constitue un outil de référence afin d’aider les professionnels. Cette méthode invite chaque participant au projet à mettre des mots sur ses peurs, sur les attraits et les tentations ressentis face à une situation complexe de projet. Cette démarche, pour le moins originale, tend à instaurer un climat de confiance mutuelle, garantissant une coopération réussie. 100 SAJUS Jean-Pierre. Gestion des Ressources Humaines : La communication dans l’entreprise. Cours de Master 1 Tourisme et Développement, département ISTHIA, Université de Toulouse 2, 2013. 101 Présentation de PAT-Miroir par Gille le Cardinal. http://www.youtube.com/watch?v=0UutSOTY9ZM 102 Méthode Peurs, Attraits, Tentations 68 Ces éléments semblent opportuns afin d’établir une entente et une cohérence durable entre les acteurs s’organisant autour d’un projet, quelle que soit sa nature. Figure 4 : Le processus de mise en œuvre de politique de développement touristique Source : Centre de ressources et d’ingénierie du tourisme en espace rural (CRITER) Ce schéma établit un récapitulatif de la mise en place d’une politique de développement touristique, soulignant les nombreux acteurs en jeu et les relatons établies entre chacun, la longue temporalité et la multitude d’étapes à suivre. 3 – Les obstacles relatifs à la coopération Ce dernier point va nous permettre de souligner les difficultés auxquelles sont confrontés la plupart des acteurs du tourisme, dès lors qu’une coopération se met en place. Dans un premier temps, ces freins peuvent provenir des acteurs en eux-mêmes et de leurs divergences d’opinions. Nous constaterons, enfin, qu’il est nécessaire de tenir compte d’éléments exogènes empêchant une démarche coopérative effective. 69 3.1. Des contradictions entre acteurs Nous nous pencherons, tout d’abord, sur les contradictions qui peuvent émaner de l’ensemble des acteurs impliqués dans les prises de décisions touristiques. 3.1.1. Contradiction entre élus et techniciens Nous avons pu préciser auparavant le rôle exercé par chacun, que ce soit les élus ou les techniciens. Comme nous pourrons le constater, ici, les divergences d’opinions entre élus et techniciens constituent des éléments récurrents, avec lesquels il leur faut s’adapter. Pour comprendre d’où proviennent ces difficultés de compréhension, il convient de faire référence aux Cahiers Espaces « Elus et Tourisme »103, qui ont été spécialement consacrés à notre problématique et tentent d’apporter des réponses face à ces questionnements : Quel rôle occupe véritablement les élus dans le monde du tourisme ? A quelles difficultés sont-ils confrontés ? Les élus locaux sont nécessairement impliqués dans la mise en œuvre des politiques touristiques. Leurs interventions, souvent variées, peuvent être liées à la réhabilitation du patrimoine, à l’hébergement, à la gestion des équipements de loisirs par exemple. Le tourisme est donc bel et bien au cœur des décisions politiques ; cependant, il est souvent difficile de le percevoir pour les élus. Egalement, le degré d’importance qu’on lui accorde est souvent disparate selon les territoires et les élus en place. Le tourisme apparait comme à une panacée pour le développement local. Les élis se lancent dans une politique du « tout-tourisme », le considérant comme le moteur économique unique du territoire104. De manière générale, il faut noter que les élus manquent de connaissances, et plus globalement de culture du tourisme. Pour eux, le tourisme est souvent perçu à travers des préjugés et n’apparait pas comme un objet d’étude à part entière. De ce fait, ils éprouvent des difficultés flagrantes à cerner les problématiques territoriales liées au tourisme. Face à cela, les techniciens du tourisme s’inscrivent dans un univers différent, dans lequel les préoccupations s’orientent davantage vers une valorisation générale des ressources et un développement local. Souvent plus conscients des problématiques territoriales et des relations existantes en son sein, ils semblent appréhender l’espace différemment. Le tourisme et sa complexité sont souvent mieux maitrisés grâce à un apprentissage théorique associé à des expériences de terrain. La globalité de ces éléments entraine indéniablement des divergences d’opinions ; élus et techniciens ne se trouvant pas sur un pied d’égalité en termes de connaissances 103 Cahiers Espaces n° 289, février 2011, Elus et Tourisme, 48 p. MARTINETTI Jean-Pierre. Vers la fin des malentendus entre tourisme et politique ? Cahiers Espaces, n° 289 , Février 2011. 104 70 touristiques. Philippe Violer précise que « les élus [sont] plus attachés aux territoires et les techniciens [sont] davantage sensibles à des critères techniques de sélection des espaces » (Violier, 1999, p 171) Ainsi, on comprend qu’il est essentiel pour les élus d’appréhender la concertation entre les acteurs du territoire. Un travail de collaboration doit être effectif entre élus et techniciens. En outre, il est nécessaire, que les élus aient une vision allant au-delà de leur statut politique afin de saisir l’activité touristique comme facteur de développement. Une prise de conscience générale semble apparaître, mais reste encore rudimentaire. « Etre élu chargé du tourisme nécessite d’avoir une lecture complète de ces attentes diverses, parfois contradictoires. C’est la condition pour définir une politique frappée au coin de la transversalité » 3.1.2. Contradiction entre techniciens et acteurs économiques Cette seconde contradiction est également pointée du doigt par Philippe Violier. Il exprime l’incompréhension existante entre techniciens du tourisme et acteurs économiques. Alors que les différences entre élus et techniciens se comprennent aisément, il semble qu’ici cela soit plus subtil. En effet, sans revenir sur l’ensemble des éléments évoqués précédemment, les techniciens du tourisme possèdent une vision du territoire et du secteur touristique qui leur est propre. Celle-ci s’axe sur la notion de développement local, constituant le moteur de toute réflexion. Les acteurs économiques, autrement dit, les prestataires touristiques, sont focalisés sur un aspect qui leur semble primordial : les bénéfices économiques. Alors qu’il est essentiel pour ces deux types d’acteurs d’engager un travail commun, ce dernier semble difficile à mettre à œuvre face à ces disparités. Afin d’aller outre, il est indispensable d’assister à une évolution des mœurs. Les prestataires touristiques doivent percevoir l’intérêt de s’inscrire dans une démarche globale de développement, sans se limiter à des intérêts économiques. Pour ce faire, il serait bon que les techniciens emploient des démarches d’informations, de sensibilisation auprès d’eux, dans le but de les placer sur un pied d’égalité en termes de méthodes de travail. 3.2. Des éléments exogènes sources de contraintes dans la réussite de la coopération Nous allons dans cette dernière partie, soulever en quoi le contexte politique général constitue un obstacle dans la mise en œuvre de la coopération. Que ce soit à l’échelle locale ou nationale, il existe une instabilité permanente dans le monde politique. Au niveau local, les élus ont un mandat plus ou moins court, et la sphère politique est en 71 mouvance perpétuelle. La situation est identique au niveau national. Nous l’avons vu, la décentralisation a bouleversé le fonctionnement politique français, et cela a nécessité un temps relativement long d’adaptation. D’ailleurs, nous constatons que les dernières réformes ont contribué à modifier l’environnement politique, relançant la question de la gouvernance en France. Dans tous les cas, il est indispensable que chacun, à son échelle, s’approprie ce genre de mesures et cela implique une temporalité longue. Notons, également, que nous nous trouvons actuellement dans un contexte où les ressources financières se font de plus en plus rares, malgré tout, les programmes incitant à la coopération sont de plus en plus nombreux, plaçant les décideurs dans un schéma paradoxal. Or nous le savons, la coopération est une démarche complexe, plaçant les Hommes au cœur d’une ingénierie territoriale. De ce fait, cela implique que chaque acteur se fabrique des points de repères, des habitudes, et tente d’appréhender les méthodes de travail des acteurs issus de milieux différents, afin d’instaurer et de partager des références communes ; il s’agit, donc, d’un ensemble d’éléments d’appropriation qui demandent un temps important. Face à ce contexte, il apparaît difficile et complexe de déployer, et de consolider une démarche coopérative s’inscrivant dans le temps. Malgré tout, nous savons que le tourisme ne saurait exister sans coopération, de ce fait, il suffit aux acteurs de tenir compte de principes permettant de dépasser ce paradoxe. En effet, en plus de mener des actions dans le champ du tourisme, il est important de mettre en place un dispositif en parallèle afin de développer l’animation, de garantir un accompagnement et surtout, d’intégrer une formation en continue auprès des acteurs impliqués. En définitive, ce chapitre a illustré notre seconde hypothèse de réflexion axée sur le rôle des acteurs en présence dans les politiques touristiques. Nous avons pu noter comment ces derniers étaient inter reliés et avons pu désigner la nature de ces relations. Cet aspect accentue les difficultés liées à la transversalité, cependant, nous avons constaté qu’il existait des moyens de contourner les nombreux écueils relatifs à la coopération touristique. De manière générale, ce chapitre a tenté d’illustrer en quoi la coopération pouvait aller au-delà des dimensions politiques et économiques. Les relations humaines sont décisives dans sa mise en œuvre et il convient les considérer véritablement. Enfin, nous pouvons affirmer que cette dimension sociologique peut constituer un moyen de mise en œuvre coopérative, mais n’oublions pas qu’il s’agit surtout d’un objectif à part entière, sa réussite n’étant pas assurée d’avance. 72 CONCLUSION DE LA PARTIE 2______________________________ Cette deuxième partie a été un moyen d’exprimer et de développer nos deux hypothèses de recherche, liées à la problématique des enjeux de la coopération territoriale. Ainsi, la première consistait à considérer la coopération comme un vecteur de valorisation des territoires, quant à la seconde, elle a permis de mettre en exergue une dimension sociologique à notre réflexion, notamment en s’appuyant sur la complexe articulation entre acteurs dans la coopération. Néanmoins, nous pouvons affirmer que ces hypothèses ne sont pas tant des enjeux de la coopération, mais s’affichent également comme des outils, des moyens. Cette réflexion nous a amené à considérer, de ce fait, la présence d’interactions entre le système coopératif et les enjeux voulus. Nous irons plus loin, en affirmant que la coopération est, en elle-même, un véritable défi, se positionnant comme un enjeu dans la mise en œuvre d’une politique touristique. Globalement, nos recherches exploratoires nous ont conforté dans nos postulats de départ. Nous avons conscience de la pluralité des enjeux liés à la coopération, toutefois, nous continuons à penser que ces deux hypothèses constituent à la fois des objectifs essentiels de la coopération et des défis de taille. 73 PARTIE 3 Tourisme et Coopération Territoriale: Quels leviers ? Quels obstacles ? Etudes de cas __________________________________________________________ 74 INTRODUCTION DE LA PARTIE 3____________________________ Cette dernière partie va nous permettre d’appuyer notre propos et de l’illustrer par des études de cas. Nous avons, jusqu’à présent, présenté et expliqué divers concepts en lien avec notre sujet de réflexion. Cette étape s’est révélée essentielle afin de saisir le sens et les enjeux de notions souvent complexes. Nous avons, ainsi, tenté d’apporter des premiers éléments de réponse à notre problématique, qui constitue le fil directeur dans cette réflexion. Nous avons pris le parti de nous intéresser à deux cas d’études particulières. Ce mémoire, étant consacré à l’étude globale des modes de coopérations territoriales, nous avons souhaité étudier un cas d’étude relevant de la coopération de proximité interterritoriale, ainsi qu’un second lié à la coopération transfrontalière. Nous avons opéré un choix de territoire grâce aux entretiens exploratoires que nous avons effectués dans le cadre de cette recherche. Notre étude démarrera, en premier lieu, par le cas de l’intercommunalité de la Touraine du Sud. Après avoir présenté ses spécificités, nous tenterons de relever dans quel cadre la coopération touristique s’effectue, pour enfin pointer les difficultés et les réussites qui y sont rattachées. Notre démarche se fera à l’identique pour notre étude consacrée à la coopération transfrontalière francoespagnole, pilotée par le syndicat mixte Arize-Lèze de coopération transfrontalière. Ces deux études de cas nous permettront de mettre en exergue les enjeux et les obstacles relevant d’opérations de coopération territoriale, mais également, de dégager les spécificités liées aux différentes mises en œuvre coopératives, qu’elles soient intercommunales ou transfrontalières. 75 Chapitre 1 La coopération à l’échelle locale : cas de la Touraine du Sud Ce premier chapitre va se focaliser sur une première étude de cas, la communauté de communes de la Touraine du Sud, située en Indre-et-Loire. Notre choix s’est porté sur ce territoire du fait de ses nombreuses particularités, notamment sa situation géographique. L’étude de cette intercommunalité va nous permettre de soulever des problématiques intéressantes, en lien avec les thématiques abordées précédemment. 1. Présentation du territoire Afin de débuter cette troisième partie, nous allons établir une présentation générale du territoire de la Touraine du Sud. Il s’agira de mettre en avant ses particularités, pour ensuite s’intéresser à la place occupée par l’activité touristique sur le territoire. 1.1. La Touraine du Sud, présentation Commençons ce premier chapitre avec une présentation du territoire sur lequel porte notre étude : la communauté de communes de la Touraine du Sud. 1.1.1. Fonctionnement et organisation de la communauté de communes de la Touraine du Sud La communauté de communes de la Touraine du Sud (CCTS) se situe au sud du département de l’Indre-et-Loire, en région Centre et s’intègre dans un espace rural. C’est un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre, qui a instauré la taxe professionnelle unique (TPU) ; il existe depuis 2001. La CCTS comprend, actuellement, 21 communes membres et compte environ 16 000 habitants105. Comme tout EPCI, son fonctionnement dépend des compétences choisies. Comme nous avons pu l’expliquer auparavant, il existe deux catégories de compétences : obligatoires et optionnelles. Les deux compétences obligatoires de la CCTS relèvent du développement économique et de l’aménagement de l’espace communautaire. Pour ce qui est des compétences optionnelles, on peut noter qu’elles sont particulièrement nombreuses. Celles concernant le tourisme, la culture et le sport en font partie. Il est nécessaire de rappeler qu’en ayant ces compétences, les communes membres ne sont désormais plus compétentes dans ces domaines. La CCTS est dirigée par un conseil communautaire, composé de 60 membres ; il se charge de 105 Données INSEE au 1er janvier 2012 [en ligne] Disponible sur donnees/recensement/populations-legales/pages2011/pdf/dep37.pdf http://www.insee.fr/fr/ppp/bases-de- 76 régler les questions concernant le budget, les projets, les statuts et la vie administrative de la communauté de communes. Malgré tout, dans un souci de praticité, le conseil communautaire est épaulé par le bureau communautaire, composé de 22 membres. Ce dernier constitue un relai du conseil communautaire et règle les problématiques qui ne concernent ni le budget, ni les axes stratégiques de la CCTS106. Figure 5 : Logo de la Communauté de Communes de la Touraine du Sud Source : Site internet de la Communauté de Communes de la Touraine du Sud 1.1.2. La compétence tourisme Comme nous avons pu le spécifier, la CCTS possède diverses compétences, allant de la gestion des déchets ménagers à la politique de logement. Cependant, nous allons, ici, nous focaliser sur la compétence tourisme et la manière dont elle est gérée. Notons que les statuts de la CCTS précisent ce qui relève de cette compétence : - signalétique touristique ; - création d’un sentier appelé à recevoir le label de sentier de Grande Randonnée de Pays ; - signalétique des sentiers inscrits au Schéma Départemental ; - création, aménagement, entretien et fonctionnement d’un office de tourisme communautaire ; - création, promotion des circuits de randonnée et parcours d’orientation, l’entretien reste de la responsabilité des communes concernées sauf conventions particulières (ONF) ; - actions de promotion touristique concernant l’ensemble du territoire communautaire en concertation avec les structures partenaires associées ; - aménagement, entretien et gestion d’un plan d’eau à la Celle-Saint-Avant. Les statuts instaurent la mise en place d’un office de tourisme intercommunal (OTI), désigné comme étant l’organisme garant de la compétence tourisme. Afin de couvrir correctement le territoire et assurer un accueil touristique adéquat, deux antennes viennent s’associer à l’OTI. Il existe depuis 2006 et possède un statut associatif à but non lucratif, de la loi de 1901. L’office de tourisme communautaire a pour mission de mener des actions de développement touristique sur le 106 Site web de la CCTS http://www.tourainedusud.fr/les-elus-article-2-0-3.html 77 territoire de la CCTS, de promouvoir l’ensemble du territoire, et de le dynamiser notamment par la création d’animations culturelles et sportives d’intérêt communautaire. 1.1.3. La CCTS, un territoire singulier La CCTS fait l’objet d’une spécificité géographique notable ; en effet, elle fait partie du département de l’Indre-et-Loire en région Centre, cependant elle est à proximité de deux autres départements, l’Indre et la Vienne (la Vienne faisant partie de la région Poitou-Charentes). Cette situation place le territoire dans une configuration particulière. D’un point de vue touristique, cette singularité sous-entend une possible mutualisation des moyens avec ces territoires de proximité. Cela peut concerner, notamment, des actions liées à l’animation territoriale, ou à la promotion dans l’optique de créer et de diffuser une image territoriale homogène. Ainsi, cela induit qu’il est nécessaire pour les différents acteurs du tourisme de mener des réflexions autour de ces problématiques, d’autant plus s’ils souhaitent créer un véritable développement territorial. Ces caractéristiques nous ont, donc, incité à choisir ce territoire comme objet d’étude dans le cadre de notre réflexion. 2 – Tourisme et coopération au cœur de la valorisation touristique Après avoir exposé les caractéristiques générales de la communauté de communes de la Touraine du Sud, nous allons nous centrer sur l’activité touristique et la place qu’elle occupe au sein de ce territoire. Il s’agira de mettre en lumière les différents leviers possibles grâce aux actions de coopération territoriale. 2.1. Le tourisme, un élément moteur dans l’économie locale ? Le tourisme représente l’un des secteurs économiques les plus exploités en France. C’est évidemment le cas sur le territoire de la Touraine du Sud. Nous allons tenter de préciser quelles sont les ressources du territoire pour ensuite déterminer l’importance que ce secteur a sur le territoire. 2.1.1. Les ressources touristiques du territoire Il ne va pas s’agir, ici, d’effectuer un inventaire précis quant aux ressources touristiques du territoire. Nous allons plutôt nous focaliser sur les éléments forts de la CCTS. Nous sommes en présence d’un territoire rural proposant une offre touristique caractéristique de ce milieu. Les ressources touristiques locales s’axent principalement sur un patrimoine vernaculaire et sur des espaces naturels intacts. De ce fait, les efforts en termes de promotion et de valorisation touristiques se centrent sur un tourisme culturel et historique, ainsi qu’un tourisme de nature. Précisons tout de même qu’une thématique se démarque au sein de l’offre touristique : la préhistoire. Dolmens, musées dédiés, festival, circuits thématiques, celle-ci occupe une place 78 importante sur le territoire et est largement privilégiée. De plus, les activités de pleine nature sont omniprésentes sur l’ensemble du territoire ; boucles cyclo-touristiques, sentiers de grande randonnées, circuits thématiques etc. A pied, à cheval ou à vélo, l’offre touristique de la CCTS donne la possibilité aux visiteurs de découvrir le territoire tout en profitant des paysages tourangeaux. Enfin, de nombreuses manifestations ont lieu durant la période estivale : brocantes, expositions, festivals, circuits découverte, théâtre, marchés etc.107 Nous comprenons, donc, que la CCTS fait figure de territoire rural, ne constituant pas un fort pôle touristique en soi, mais elle tente de se distingue grâce à ses spécificités rurales et touristiques. Notons que le président de la Commission Tourisme de la Touraine du Sud décrit son territoire ainsi : « A l’écart des grands flux touristiques, la Touraine du Sud a su garder une rare authenticité. Vous serez séduits par la qualité et la richesse de son patrimoine et la douceur de ses paysages. En parcourant ses boucles cyclistes, en empruntant son sentier de Pays et en flânant dans ses villages, vous découvrirez un territoire marqué par l’histoire et vivrez avec passion ses grands événements culturels »108. 2.1.2. Le tourisme, une activité difficilement structurée Nous allons, à présent, tenter de comprendre comment s’organise le tourisme sur ce territoire, d’un point de vue stratégique. Nous pouvons noter que l’activité touristique est organisée dans une optique de court terme uniquement. En effet, l’office de tourisme communautaire n’a, pour le moment, pas mis en place de véritable politique touristique. Il s’agit d’un vrai problème d’un point de vue du développement territorial. De manière générale, les animations et l’offre touristique font figure de simple multiplication d’initiatives ponctuelles, ne s’intégrant pas dans une réflexion de développement touristique global. Ainsi, aucun objectif à long terme n’a été fixé, aucune orientation n’a été décidée. On comprend, donc, qu’il semble difficile de faire de l’activité touristique un vecteur de développement territorial. Le territoire est, également, confronté à un problème supplémentaire : la CCTS est difficilement considérée comme une destination touristique à part entière. Face à la proximité des châteaux de la Loire et à leur forte notoriété, elle rencontre de réelles difficultés à s’imposer d’un point de vue touristique. Elle s’apparente davantage à un espace situé hors des sentiers battus, où les touristes sont généralement peu nombreux. Bien que possédant des ressources touristiques, le tourisme semble rester en marge au sein de l’économie locale. La France fourmille de territoires ruraux possédant des ressources similaires à la CCTS, il est donc difficile de se démarquer véritablement ; un manque de notoriété semble évident. 107 108 Site de la CCTS. http://www.tourainedusud.fr/ Brochure touristique : le Calendrier de vos envies 79 2.2. Une activité touristique renforcée par une coopération territoriale Face à ces lacunes, la CCTS a privilégié la mise en œuvre d’actions communes et s’est engagée dans des démarches de coopération. En agissant ainsi, la CCTS fait preuve de réactivité et de dynamisme. Nous tenterons, ici, de déceler en quoi ces démarches ont permis de créer des leviers pour le développement touristique territorial. 2.2.1. La création d’une image touristique forte La CCTS travaille en collaboration avec le Pays touristique de la Touraine Côté Sud. Avant toute chose, il convient de présenter succinctement cette structure. Le Pays touristique est géré par une agence touristique, association de la loi 1901, et possède environ 239 adhérents. Il a pour mission de développer la promotion et la communication touristique et d’assurer la structuration, la commercialisation et le développement de l’offre touristique du territoire. Il assurer également la mise en réseau des acteurs touristiques, et joue le rôle d’interface entre les institutions touristiques et les territoires de proximité.109 Intéressons-nous aux actions de communication touristique, et en particulier à l’image de marque du Pays touristique. Actuellement, le Pays porte le nom de Touraine Côté Sud et est associé au slogan « Histoire de voir la vie du bon côté ». Or, cette image va prendre un tournant déterminant à compter de 2013. Cette démarche fait suite à la mise en place d’une stratégie e-marketing, définie il y a peu. Le Pays deviendra « Loches, Touraine, Châteaux de la Loire ». En s’associant aux châteaux de la Loire, sites touristiques de renommée internationale, cette initiative soulève une volonté d’imposer le territoire comme une destination touristique à part entière. Ce nom fait également écho à l’image de marque choisie par l’Agence Départementale du Tourisme de l’Indreet-Loire « Touraine Loire Valley ». Cette nouvelle image s’intègre donc dans la stratégie de communication départementale. Figure 6 : Nouveau logo du Pays touristique en Touraine du Sud Source : Site internet du Pays de la Touraine Côté Sud Faisant partie des quatre communautés de communes intégrées au Pays110, la CCTS participe donc à une démarche de coopération et bénéficie d’une image de marque touristique. Nous l’avons dit, la 109 Touraine Côté Sud. Qui sommes-nous ? http://www.loches-tourainecotesud.com/fr/qui-sommes-nous Communauté de communes de Loches Développement, Communauté de communes du Grand Ligueillois, Communauté de communes de Montrésor et la CCTS 110 80 CCTS ne bénéficie pas d’une forte notoriété, ni d’une offre touristique dominante. Le Pays se place, ainsi, comme un coordinateur et instaure une image touristique harmonieuse et cohérente sur l’ensemble du territoire. D’ailleurs, il est plus aisé pour le Pays, plutôt que pour le département, de valoriser et promouvoir l’ensemble des ressources touristiques territoriales, du fait de sa proximité. Nuançons notre propos en soulignant le fait que la ville de Loches soit placée comme le produit touristique phare du territoire. Nous sommes en droit de nous demander dans quelle mesure la CCTS bénéficie de cette communication, étant quelque peu mise à l’écart. 2.2.2. La création d’une dynamique territoriale La coopération ne se résume pas à la promotion et à la communication touristique territoriale. En effet, les offices de tourisme interagissent avec de nombreux acteurs, notamment avec le secteur privé. Les prestataires touristiques privés peuvent adhérer à l’office de tourisme intercommunal, simplement via une cotisation. Cela permet d’apparaitre dans les documents de promotion, de bénéficier d’une meilleure visibilité afin de développer leur activité. Il s’agit d’un moyen pour les professionnels du tourisme de limiter leurs investissements dans la communication, qui sont la plupart du temps très coûteux. L’office de tourisme, quant à lui, met en avant les prestataires touristiques locaux et instaure une mise en réseau professionnelle. Ajoutons qu’il existe des démarches de collaboration entre techniciens du tourisme et producteurs locaux. Cela est d’autant plus fréquent en milieu rural, les offices de tourisme souhaitant valoriser le terroir et les savoir-faire locaux. Les productions locales, qu’elles soient artisanales, agricoles, concernent des artisans, qui doivent face à des difficultés de plus en plus nombreuses dans contexte de crise économique. Ainsi, cette opération tend à apporter une aide concrète à ces producteurs. L’OTI de la Touraine du Sud possède des partenariats avec ces producteurs, et propose des produits locaux à la vente (miel, vins, fromages, sucreries etc.). Notons que l’OTI a intégré ces prestataires dans une de ses animations « les circuits découvertes ». Sur une demi-journée, ces derniers proposent aux touristes de découvrir la Touraine du Sud par le biais d’une visite culturelle (musée, château) associée à une visite chez un producteur ou un artisan local (fromagerie, ferme, atelier d’art). Ces actions participent à la mise en place d’une dynamique territoriale locale. L’OTI contribue à la valorisation des ressources locales, mais également au développement de l’économie locale. Nous comprenons que chaque structure a finalement besoin des autres ; il existe une interrelation entre les secteurs publics et le privé, particularité du secteur du tourisme. 2.2.3. Une envergure coopérative de plus en plus importante Ainsi, la coopération est omniprésente, et constitue l’essence même du secteur touristique. 81 Cependant, la CCTS va plus loin encore dans ses démarches de développement territorial. Suite au constat qu’il n’y avait que très peu de contact et d’échanges d’informations entre les offices de tourisme des territoires de proximité, les élus ont émis la volonté de se lancer dans un projet de coopération. Il s’agit d’un projet de coopération financé à hauteur de 55% par le programme européen Leader. Actuellement en cours de réalisation, ce projet dédié à l’e-tourisme, résulte d’une réflexion commune entre la CCTS, le Parc Naturel Régional de la Brenne (situé dans le département de l’Indre) et la communauté de communes des Vals de Gartempe et Creuse (située dans le département de la Vienne). Ces derniers ont décidé de mener une stratégie globale de politique axée sur la thématique de l’e-tourisme à partir de 2009. En décidant de s’inscrire dans ce processus, l’idée était de se baser sur un nouveau territoire construit à partir de ces trois entités pour ensuite mener des actions de communication touristique. Volontairement, il a été décidé de ne faire aucune référence à un nom géographique relatif à un territoire administratif ; il prend donc le nom « Les 3 petits tours ». A partir de 2013, de nouveaux supports de communication vont donc être exploités : la création d’un site internet spécifique promouvant ce nouveau territoire, la mise en place d’une cartographie réunissant les trois entités afin d’éviter de distribuer plusieurs cartes touristiques aux visiteurs et également une application pour les mobiles. Dans les années à venir, il est prévu que des films promotionnels soient diffusés dans les offices du tourisme ainsi que dans les sites touristiques. Les Pays touristiques, ainsi que les différents CDT seront mis à contribution lors de la réalisation de ces outils promotionnels. (Annexe) Nous pouvons affirmer que ce projet s’inscrit dans une démarche résolument novatrice. Allant outre les frontières administratives, celui-ci tend à resserrer les liens entre les collectivités territoriales de proximité. Il montre à quel point il est nécessaire de s’engager dans des actions sur du long terme, dès lors que l’on souhaite développer un territoire. Partageant des enjeux similaires voire communs, la coopération fait office d’outil privilégié et permet de créer des projets d’une envergure nouvelle. 3 – Les limites de la coopération Cette dernière partie a pour objectif de mettre en lumière les difficultés rencontrées par la CCTS dans les démarches coopératives, notamment dans le domaine du tourisme. 3.1. La coopération à l’échelle locale Nous nous focaliserons, dans un premier temps, sur la coopération entre les acteurs à l’échelle locale. Nous nous cantonnerons aux actions partenariales sur les territoires administratifs uniquement. 82 3.1.1. La coopération entre élus et techniciens du tourisme sur la CCTS La CCTS possède la compétence tourisme et a ainsi mis en place un office de tourisme communautaire. Ensemble, ils se doivent de gérer les actions liées à ce secteur. Cette tâche s’avère particulièrement complexe. En effet, au sein de la CCTS, les décisions relatives au tourisme relèvent de la commission tourisme. Celle-ci est composée de 25 élus, qui se sont inscrits de manière volontaire. Ces derniers manifestent donc un certain intérêt au tourisme, malgré tout, élus et techniciens éprouvent des difficultés à se comprendre et parfois à orienter les opérations touristiques dans la même direction. En effet, les élus sont avant tout des hommes publics et ont, donc, un rôle politique à jouer. Il arrive que les enjeux liés à une élection puissent influencer la prise de décision politique. Dans ce cas, les choix résultent, non pas d’une volonté de développer le territoire durablement grâce au tourisme, mais plutôt, d’une envie d’imposer une image positive et plaisante auprès de l’électorat. De plus, les décideurs politiques font face à un problème de taille : un manque de connaissance du monde touristique. Les élus ont tendance à ne pas considérer le tourisme comme un objet complexe, ainsi, ils perçoivent difficilement les réels enjeux de ce secteur, et ne discernent pas toujours les risques que le tourisme peut engendrer sur un territoire. Ce secteur reste le plus souvent à leurs yeux un objet méconnu, considéré comme secondaire, et ne maîtrisent que partiellement le fonctionnement touristique et les interactions en jeu. De ce fait, très souvent, les élus n’ont pas toutes les cartes en main pour prendre des décisions adéquates. Les techniciens du tourisme sont, quant à eux, beaucoup plus sensibilisés aux problématiques liées au développement, par exemple les notions de capacité de charge. Souvent issus de formations spécialisées, ils ont une vision d’experts du territoire et du tourisme. Etant au cœur de leur métier, le tourisme est appréhendé de manière plus professionnelle ; ils sont capables de saisir ce qu’une décision peut engendrer, en termes de contraintes techniques, matérielles ou encore financières. Ces deux types d’acteurs s’intègrent dans des mondes complètement différents. Malgré ces difficultés, élus et techniciens semblent avoir trouvé un équilibre au sein de la CCTS. La directrice de l’office de tourisme intercommunal, dans son entretien du 27 décembre 2012, évoque la présence d’une complémentarité entre eux « Quand j’explique un projet, les aspects administratifs et techniques, les membres de ma commission prennent leurs responsabilités et tranchent. » 3.1.2. La coopération entre la CCTS, le département et la région La CCTS s’intègre dans différents territoires, qu’ils soient administratifs ou non : le Pays touristique de la Touraine Côté Sud, le département de l’Indre-et-Loire et enfin la région Centre. Nous le savons, chaque strate territoriale possède sa ou ses structures de référence. Nous tenterons 83 de déceler en quoi la coopération semble atteindre ses limites ici. Tout d’abord, la coopération avec l’échelon départemental ne semble pas efficiente. En effet, la CCTS ne se sent pas réellement intégrée au sein de la politique de promotion du CDT de l’Indre-etLoire. Cette dernière se focalise, bien souvent, sur des sites phares tels que la ville de Tours, et tout ce qui a trait à la Loire, prenant le parti de placer l’Indre-et-Loire comme destination ligérienne. Il semblerait que le CDT ne maîtrise pas l’ensemble de l’offre touristique départementale, ce qui pose un véritable problème. Des efforts devraient être menés afin de soutenir les territoires ruraux, en les valorisant au même titre que les sites de renom. Il faut préciser que ce CDT est actuellement en pleine restructuration et va devenir une Agence Départementale du Tourisme (ADT). Jusqu’à présent, les échanges entre la CCTS et le niveau départemental s’effectuaient auprès du Conseil Général, via le service tourisme, qui a joué le rôle d’interlocuteur privilégié. Ces échanges concernaient, notamment, les démarches de demande de subventions ou encore le développement de projets touristiques. En définitive, la restructuration du CDT en ADT devrait permettre de freiner ces difficultés, se chargeant de la promotion et du développement des projets touristiques. La CCTS se retrouve face à une situation similaire avec la région Centre, où les contacts sont relativement rares. Cette situation peut s’expliquer par la configuration du territoire, la région administrative comptant six départements, ce qui ne facilite pas les procédures d’échanges d’informations.111 De ce fait, la CCTS obtient des informations relevant de la région grâce au Pays, qui sert d’intermédiaire entre les deux structures. Nous pouvons donc affirmer, que la coopération entre l’échelle locale et les échelles départementale et régionale ne se fait pas sans peine. Nous l’avons expliqué auparavant, les stratégies de développement touristique se doivent d’être cohérentes entre chaque strate, cependant, cela s’avère quelque peu compliqué dès lors que la coopération entre les acteurs n’est pas effective, voire parfois inexistante. 3.2. La coopération interterritoriale Notre étude va, à présent, s’axer sur la coopération entre la CCTS et ses territoires de proximité, et en particulier, sur les obstacles rencontrés dans sa mise en œuvre. Précisons qu’il s’agit de territoires administratifs et de projets. 3.2.1. La Touraine du Sud et le Parc Naturel Régional de la Brenne Nous l’avons déjà notifié, mais le Parc Naturel Régional de la Brenne jouxte la Touraine du Sud. 111 Observatoire de l’Economie et des Territoires touraine.com/territoires_indre_et_loire/intercommunalite.aspx en Touraine. http://www.economie- 84 Pour être très précis, la commune d’Azay-le-Ferron (située dans la Brenne, en Indre) n’est qu’à douze kilomètres de celle de Preuilly-sur-Claise (intégrée à la CCTS). Il semblerait que, malgré une proximité évidente, les deux entités n’aient pour le moment pas développé d’actions conséquentes dans le domaine du tourisme. Sans tenir compte du projet e-tourisme, nous pouvons noter que les échanges et les interventions communes en termes d’animations touristiques restent exceptionnels. Prenons un exemple concret de projet touristique liant ces deux entités : la création de boucles cyclo-touristiques. A l’initiative de l’OTI de la CCTS, les itinéraires cyclables concernent essentiellement la Touraine du Sud mais ils traversent également le département voisin, et donc le PNR de la Brenne. De ce fait, il a été nécessaire pour l’OTI de prendre contact avec le département ainsi que le PNR, afin d’obtenir des autorisations vis-à-vis de la signalétique. En définitive, nous sommes loin d’être dans le cadre d’une action de coopération. Cela relève davantage d’une question pratique, l’objectif étant d’instaurer une signalétique homogène sur l’ensemble des circuits et non disparate selon les départements. L’exemple précédent est un cas de figure dans lequel les responsables ont trouvé un accord de manière aisée, cependant, ce n’est pas toujours le cas. Il arrive que certains projets touristiques ne puissent se concrétiser à cause des divergences d’opinion entre les responsables. Cela constitue un réel frein pour certaines entités. L’OTI de la CCTS y a déjà été confronté lorsqu’il a souhaité réaliser un labyrinthe touristique dans la forêt de Tours-Preuilly. Cette forêt s’établit entre l’Indreet-Loire et l’Indre. Ainsi, il a été indispensable de consulter le département de l’Indre pour, de nouveau, mettre en place une signalétique identique sur l’ensemble de la forêt. Après avoir effectué des demandes de devis de signalétique, l’OTI les a fait valider par l’Indre-et-Loire. En revanche, l’Indre a fait entendre son désaccord quant au choix réalisés. Dans ce cas de figure, le système administratif instaure un blocage dans l’ingénierie de projet et ralentit considérablement les démarches entreprises. 3.2.2. La Touraine du Sud et le département de la Vienne Pour terminer, nous allons aborder les relations entretenues entre la CCTS et la Vienne, en PoitouCharentes. Tout comme la Brenne, la Vienne avoisine la Touraine du Sud ; la station thermale de la Roche-Posay (dans la Vienne) est à seulement 4,5 kilomètres de la commune d’Yzeures-sur-Creuse (en Touraine). En termes de coopération, le constat reste globalement le même : des difficultés persistent pour s’orienter vers des démarches durables de partenariats. Ces freins sont d’autant plus profonds, que ces deux territoires s’inscrivent dans deux régions administratives distinctes, ayant donc des politiques touristiques différentes. D’un côté, la Roche-Posay s’impose grâce à la notoriété liée aux cures thermales dédiées aux soins de la peau et de l’autre, la Touraine du Sud se montre comme un territoire où le tourisme de nature s’impose. Les images territoriales choisies par chaque territoire sont foncièrement divergentes, et de ce fait, les clientèles ciblées le sont 85 également. Dans ce cadre, il convient qu’il ne soit pas aisé d’entreprendre des projets dans lequel chacun obtient des bénéfices. Depuis 2006, l’OTI de la Touraine du Sud travaille avec l’office de tourisme et du thermalisme de la Roche-Posay sur la mise en œuvre de circuits découverte. Le projet, en lui-même, est de permettre aux visiteurs de la Roche-Posay de découvrir le territoire tourangeau. S’agissant essentiellement de curistes, l’animation a été pensée en fonction de cette cible de clientèle. Ainsi, durant tout l’été, les visiteurs ont la possibilité de passer une demi-journée en Touraine. La prestation comprend les trajets en navette, et deux prestations touristiques (visite culturelle, visite chez un producteur local). La gestion des réservations s’effectuent par les deux OT. Une nouvelle fois, avant de participer au projet e-tourisme, les deux territoires n’entretenaient pas de lien concret et durable dans le domaine du tourisme. On a donc assisté à une évolution visible et conséquente, qui a sans aucun doute, fait suite à une prise de conscience générale de part et d’autre. En définitive, l’exemple de la Touraine du Sud a permis d’illustrer les difficultés auxquelles font face les territoires ruraux : manque de moyens humains, financiers etc. La coopération vient donc répondre à ces problématiques, notamment grâce à une mutualisation des moyens entre les structures, ainsi qu’à la mise en œuvre d’actions de communication touristique. Elle permet de dynamiser les territoires, tout en répondant aux enjeux et aux intérêts de chacun. Il faut noter, néanmoins, que l’échelon intercommunal s’apparente à un échelon déterminant dans le maintien des services à la population, participant à l’amélioration des conditions de vie de la population. En effet, bien avant de songer à développer une quelconque activité touristique, il est essentiel de faire d’un territoire un espace de vie décent, et ainsi de tenir compte de la population locale. 86 La coopération à l’échelle transfrontalière : cas Chapitre 2 du syndicat mixte Arize-Lèze de coopération transfrontalière Ce chapitre s’oriente, à présent, vers un cas d’étude de coopération à l’échelle transfrontalière. Nous nous intéresserons à la mise en œuvre d’un projet transfrontalier passé entre la France et l’Espagne. L’objectif est d’appréhender ce type de projet touristique, de déceler les réussites liées à cette démarche, mais également, de mettre en avant les problématiques que cela soulève. 1. Le syndicat mixte Arize-Lèze de coopération transfrontalière : porteur du projet « La culture en héritage » Nous allons, dans un premier temps, présenter l’organisme référent du projet : le syndicat mixte Arize-Lèze de coopération transfrontalière. Nous nous focaliserons sur un projet en particulier, issu d’une collaboration avec l’Espagne, dénommé « La culture en héritage ». 1.1. Présentation générale de l’étude de cas 1.1.1. Le contexte de la création du syndicat mixte Le projet « La culture en héritage » a émané d’une volonté politique de valoriser les ressources culturelles de la commune du Carla-Bayle, en Ariège. Commune rurale, de moins de 1 000 habitants, située à 50 kilomètres de Toulouse, elle se distingue par son côté pittoresque et créatif. De nombreux artistes s’y sont d’ailleurs installés (peintres, sculpteurs etc.) et se sont regroupés sous forme d’une association « La Rue des Arts ». De ce fait, le maire a émis le souhait d’établir un développement culturel sur son territoire, notamment en appuyant financièrement les artistes locaux. Cependant, la commune seule n’était pas en mesure d’assurer, ni le financement, ni la mise en œuvre d’actions suffisantes pour permettre un tel développement territorial. Il s’est donc tourné vers sa communauté de communes, la Lèze, ainsi que la communauté de communes voisine, l’Arize. Conscient d’une potentielle opportunité de percevoir des fonds européens, le maire du Carla-Bayle a fait appel au maire de la ville espagnole de Barbastro, en Aragon ; par affinité politique. C’est ainsi, que le lancement d’une démarche de coopération transfrontalière a pu s’engager, et le syndicat mixte Arize Lèze de coopération transfrontalière (SMALCT) a été créé. 1.1.2. Présentation du SMALCT et du projet « La culture en héritage » Il convient, à présent, de préciser quelques points quant au SMALCT. Il est composé de deux communautés de communes, celle de l’Arize et celle de la Lèze. Ses statuts indiquent qu’il est régi par le code général des collectivités territoriales ; son fonctionnement est défini par le règlement 87 intérieur de la structure. En ce qui concerne ses domaines d’actions, le SMALCT a à sa charge la conception et la rédaction administrative de projets de coopération transfrontalière. Il se doit également de réaliser les actions et activités qui y sont liées, la mise en œuvre de la communication, la gestion administrative et enfin, la création, l’aménagement et la gestion d’équipements relatifs à ces projets. Le SMALCT doit s’impliquer dans tous les projets résultant de financements européens dès lors qu’ils s’inscrivent dans un espace intercantonal. Figure 7 : Commune du Carla-Bayle, Ariège Source : Site internet de la commune du Carla-Bayle Notre étude va s’axer sur le projet transfrontalier « La culture en héritage », établi sur trois années. Celui-ci s’inscrit dans le programme d’initiative communautaire (PIC) INTERREG, financé par le Fonds Européen de Développement Régional (FEDER). L’ambition de ce PIC est de développer les démarches de coopération transfrontalière entre les territoires. « La culture en héritage » s’inscrit dans le cadre de l'initiative communautaire INTERREG IV A France-Espagne 20072013. Le programme opérationnel (PO) 2007-2013 constitue la 4ème génération d'appui financier communautaire visant à renforcer l'intégration économique et sociale de la zone frontalière entre l'Espagne et la France. Le PO France-Espagne-Andorre est défini selon trois grands objectifs :112 Priorité 1 : Renforcer l´intégration transfrontalière en renforçant les complémentarités dans le domaine des activités économiques, de l´innovation et du capital humain ; Priorité 2 : Valoriser les territoires, le patrimoine naturel et culturel dans une logique durable ; protéger et gérer les ressources environnementales ; Priorité 3 : Améliorer la qualité de vie des populations à travers des stratégies communes de structuration territoriale et de développement durable. Pour le projet de « La culture en héritage », la priorité 2 a été privilégiée, souhaitant axer 112 POCTEFA. http://www.poctefa.eu/arbol/index.jsp?id=6a560b7166f3e26b1ff742182d22567b 88 lesdémarches vers la valorisation du patrimoine culturel. 1.2. Les actions menées durant le projet « La culture en héritage » Nous avons d’ores et déjà présenté brièvement le concept du projet « La culture en héritage ». Nous allons, donc, évoquer les 3 axes de développement choisis pour sa réalisation. Pour chacun, des actions spécifiques ont été élaborées. 1.2.1. Action 1 : Formation linguistique – Accompagner l’apprentissage du français et de l’espagnol Cette première action aspirait à proposer des ateliers linguistiques d’espagnol destinés aux professionnels (agents de développement, animateurs des communautés de communes, élus locaux etc.). L’objectif était de permettre à ces acteurs d’améliorer considérablement leur niveau de langue en espagnol, dans le but de faciliter les échanges entre prestataires français et espagnols lors de projets communs. En développant ce type de compétence professionnelle, ces acteurs gagnent considérablement en autonomie, dans la mise en œuvre de projets de coopération avec l’Espagne. A long terme, ces ateliers s’opéraient dans l’optique d’inciter davantage les initiatives liées aux développements de projets transfrontaliers. 1.2.2. Actions 2 et 3 : Amélioration de la connaissance du patrimoine culturel transfrontalier – Accompagnement des échanges artistiques transfrontaliers Les domaines culturels et artistiques sont au cœur de cette démarche et ont donc suscité un fort engouement. De nombreuses actions culturelles ont pu voir le jour : expositions, événementiels, parcours thématiques etc. Ces animations culturelles ont donc eu lieu, non seulement, à Barbastro, mais aussi, dans les vallées de l’Arize-Lèze. Au Carla-Bayle, l’un des principaux événements a été l’Opéra Messidor d’Emile Zola. Egalement connu sous le nom de « L’or de L’Ariège », cet opéra fait figure d’élément clé dans la culture locale. Deux représentations ont eu lieu dans le village du Carla-Bayle durant la saison estivale de 2009. Le projet de « La culture en héritage » a, également, été l’occasion de valoriser une figure emblématique de la ville du Carla-Bayle : Pierre Bayle, philosophe natif de la commune portant son nom. Il existait déjà une maison qui lui était dédié au Carla-Bayle, retraçant sa vie et son œuvre. Cependant, grâce au projet, la muséographie a pu être modernisée et le site a accueilli une exposition itinérante bilingue français-espagnol. Cette exposition itinérante a donc été par la suite installée à Barbastro et a permis de valoriser le travail de deux figures emblématiques : Pierre Bayle et Miguel Servet. Elle se compose de textes et de réflexion relatifs à l’Intolérance religieuse. Ajouté à cela, la coopération transfrontalière a permis de réaliser un travail de pédagogie avec la mise en place de colloques franco-espagnols sur la thématique abordée dans les réflexions de Pierre 89 Bayle : la tolérance. Dans son entretien du 7 février 2013, la chargée de mission du SMALCT confie qu’« Il y a quand même eu un travail de vulgarisation et de pédagogie qui a pu se faire en Espagne et l'avantage, c'est que ça peut être pérennisé. » Enfin, le projet concernait la mise en valeur des arts plastiques et le rapprochement entre artistes français et espagnols. De ce fait, le SMALCT a travaillé avec l’association française « La Rue des Arts ». A partir de là, ils ont souhaité mettre en place un parcours sculptures en plein air au CarlaBayle. Afin d’exposer des œuvres franco-françaises, des appels à candidature ont été lancées à Barbastro et une sélection a été faite. Cette opération résulte d’un véritable travail technique et artistique des deux côtés de la frontière. 1.2.3. Action 4 : Valorisation touristique du territoire transfrontalier – Mise en place d’outils de promotion du patrimoine culturel et artistique transfrontalier Pour terminer, le dernier volet s’axait sur le domaine du tourisme. Il semblerait que les actions aient été quelque peu limitées dans ce champ d’action. En effet, la coopération a permis la création d’un guide touristique multimédia géo localisé. Cette opération s’est effectuée en collaboration avec l’office de tourisme Arize et Lèze. Ce projet consistait à concevoir des applications destinées aux Smartphones, qui permettraient des visites touristiques en autonomie. Il s’agit de l’action principale à mettre en œuvre dans ce volet, cependant, des rencontres entre groupes espagnols et français durant des animations touristiques au Carla-Bayle ont été organisées également. L’animation des « Jeudis du Carla » par exemple illustre totalement notre propos. Tous les jeudis soirs, au Carla-Bayle, des concerts gratuits et des repas ont investi la place du village, réunissant des groupes de musique franco-espagnols. Ainsi, on devine aisément que la coopération transfrontalière a été un outil performant dans la diversification de l’offre touristique. Nous avons donc expliqué le contexte dans lequel s’inscrit l’origine du projet, et donc la création du SMALCT. Nous avons pu constater que les axes stratégiques choisis ont conduit à la mise en œuvre de nombreuses actions. (Annexe C) 2. Quel bilan tirer de cet exemple de coopération transfrontalière ? Ce projet s’est étendu sur trois années, de novembre 2008 à octobre 2011. Il convient, à présent, d’en dégager un bilan. Quelles ont été les réussites, les défaillances ? Que dire du projet de coopération transfrontalière dans son ensemble ? Les objectifs de départ ont-ils été atteints ? C’est que nous tenterons de comprendre. 2.1. Les réussites Pour commencer ce bilan, nous allons nous intéresser, dans un premier temps, aux grandes lignes 90 relatives aux réussites engrangées par le projet « La culture en héritage ». Nous préciserons en quoi ces aspects ont été positifs, et à quel niveau. 2.1.1. La création d’un territoire dynamique et attractif Le projet, et les nombreuses actions qui y sont associées, ont permis de dynamiser véritablement le territoire de l’Arize-Lèze. Les actions dédiées à l’axe concernant la valorisation des ressources culturelles sont à l’origine de ce succès. Nous avons présenté, précédemment, les diverses animations culturelles organisées durant ce projet ; il s’agit à présent de déceler en quoi elles ont été bénéfiques au territoire. Au travers de divers exemples d’animations culturelles, nous nous appuierons sur les indicateurs d’évaluation utilisés dans les différents rapports d’exécution, pour établir un bilan. Les jeudis du Carla, qui ont eu lieu durant l’été 2009, ont connu un franc succès : sept soirées festives ont été organisées, rassemblant pas moins de 2 350 spectateurs, illustrant une hausse de la fréquentation touristique sur la même période par rapport à l’année précédente. Pour ce qui est de l’Opéra Messidor, qui s’est déroulé sur deux soirs en septembre 2009, les rapports d’exécution stipulent que les deux représentations ont accueilli environ 1 700 personnes au Carla-Bayle et se sont déroulées à guichet fermé. Nous prendrons également l’exemple des parcours sculptures, qui ont été réitéré sur les trois années de la coopération. La 3ème édition du parcours sculpture, qui s’est déroulé en juillet et août 2010, montre les résultats suivants : Tableau 12 : Données quantitatives relatives aux parcours sculptures Source : Rapport d’exécution, La culture en héritage. Période du 8 mai 2010 au 31 décembre 2010 En définitive, nous comprenons que d’une certaine façon, ces multiples démarches ont consenti à une valorisation des ressources culturelles françaises et espagnoles, ainsi qu’à une diffusion interterritoriale de celles-ci. Suite aux efforts menés, les territoires ont bénéficié d’une meilleure 91 visibilité, d’une attractivité nouvelle et d’un dynamisme marquant. 2.1.2. Des échanges enrichissants Entre les populations locales Côté français, les formations linguistiques ont été un vrai succès notamment auprès de la population locale. En effet, le public concernait principalement des retraités ou des personnes en recherche d’emploi. La chargée de mission du SMALCT en témoigne : « Ceux qui ont répondu favorablement et de manière assez massive, ce ne sont pas les agents de développement, mais des gens qui vivent sur le territoire et qui étaient très intéressés du fait de la proximité de l'Espagne de pouvoir échanger et améliorer leur niveau, on a eu des profils de gens soit qui étaient au chômage, soit en retraite. Finalement, on a répondu à une demande anticipée qui est que les gens souhaitaient bénéficier de cette formation. ». Des enquêtes d’évaluation ont été instaurées tout au long du projet et les résultats apparaissent dans des rapports d’exécution ; ils révèlent le succès de ces formations, preuve en est, les groupes de travail étaient complets. Pour ce qui est des séjours linguistiques destinés aux stagiaires, le rapport précise « Suite à une enquête de satisfaction réalisée à la fin du séjour, de manière unanime, les stagiaires étaient ravis de leur séjour et particulièrement de l'accueil qui leur a été réservé ». En contrepartie, les stagiaires espagnols ont également eu la possibilité de participer à un séjour afin de découvrir la région Midi-Pyrénées et son patrimoine culturel, historique et gastronomique. Dans tous les cas, un fort enthousiasme et un réel engouement s’est fait sentir de la part des populations, qu’elles soient espagnoles ou françaises ; se sentant sans aucun doute au cœur de ce projet. Elles ont pu participer à ces actions dans le cadre d’une coopération transfrontalière, profitant d’échanges culturels particulièrement enrichissants. « En Espagne, ils l'ont fait, il y a eu aussi énormément de succès, malgré tout dans la tête des gens, pouvoir communiquer et se mettre en relation avec nos voisins espagnols, ça a un sens.» précise la chargée de mission du SMALCT, évoquant les formations linguistiques. Entre les professionnels De manière générale, sur l’ensemble du projet, il a été nécessaire pour les professionnels, les élus, les artistes français et espagnols de travailler en collaboration. Cette mise en réseau constitue un véritable enjeu au cœur de la coopération transfrontalière. En travaillant sur un territoire que l’on côtoie depuis un certain temps, il devient difficile et d’apprécier les problématiques différemment et de prendre du recul. Souvent coincé dans une vision endogène, les professionnels éprouvent des difficultés à se détacher des modes de pensées et de travail habituels. En cela, la coopération garantit un certain recul quant à son propre territoire et 92 permet de s’orienter vers de nouvelles visions. Concrètement, la mise en œuvre d’un travail commun entre professionnels est un gage, à la fois de partage, et de confrontation d’idées. En prenant de la hauteur, les acteurs concernés pourront établir une vision dépassant leurs problématiques spécifiques. Une mise en commun des méthodes de travail, qui peuvent être sensiblement différentes, implique donc des efforts d’organisation ainsi qu’un accord entre les parties. Chacun a à s’adapter à l’autre et fait ainsi preuve d’une certaine accoutumance. En termes de compétences professionnelles, chacun est en mesure d’apporter à l’autre ; la diversification de celles-ci permet aux acteurs d’être complémentaires et de gagner en efficacité. Cela s’applique aux techniciens ayant contribué au projet, mais également, aux nombreux artistes français et espagnols qui ont eu l’opportunité de participer à des actions communes. La chargées de mission du SMALCT met en évidence qu’« Au niveau de la collaboration professionnelle, il y a un impact important au niveau de la solidarité et des échanges. » Bien que la mise en réseau ne soit pas une fin en soi, les échanges d’idées sont enrichissants, et permettent d’avoir un recul sur son propre environnement pour ainsi percevoir les problématiques sous un angle nouveau. En prenant de la hauteur, nous distinguons que les territoires de proximité peuvent éprouver des difficultés à s’inscrire dans une dynamique de coopération locale, or les projets européens concèdent à un rapprochement des acteurs locaux. Paradoxalement, « Cette coopération supranationale peut amener à mieux penser ces relations intra locales.» et c’est en cela que ces projets jouent un rôle déterminant dans l’organisation du territoire. 2.2. Les obstacles Malgré les éléments évoqués précédemment, il convient de prendre un certain recul face à ce projet. Cela nous amène à pointer certaines difficultés qui ont émergées durant la mise en œuvre du projet « La culture en héritage ». 2.2.1. Un manque de pérennité Nous l’avons déjà noté, les formations linguistiques ont été particulièrement plébiscitées par la population locale. Une fois le projet arrivé à terme, et les crédits européens consommés, celles-ci n’ont pu être poursuivies. Les habitants, qui ont manifesté leur intérêt pour ces modules, ont donc fait part de leur déception de les voir s’arrêter. Il en est de même pour les artistes, qui ont pu échanger durant ces trois années de partenariat, lorsqu’ils ont constaté que les animations culturelles ne pouvaient être reconduites en dehors du cadre de projet européen. Alors que les artistes français sont visibles grâce à l’association « La Rue 93 des Arts », les espagnols n’ont quant à eux pas émis le souhait d’entreprendre la même démarche. Ainsi, le projet n’a pas abouti à la mise en place d’une structure de référence, réunissant les artistes de Barbastro. En dehors du projet, les échanges entre artistes apparaissent difficiles à se concrétiser. Enfin, il faut préciser que les postes, liés à ce type de projets, sont souvent précaires, induisant un turn-over important. Or, il s’agit d’un vrai problème puisque le partenariat et l’ingénierie de projet reposent sur des relations interpersonnelles. S’inscrivant dans une dimension temporelle importante, il semble préférable d’impliquer les mêmes personnes tout au long de la mise en œuvre du projet. De nouveau, une coopération de cette envergure nécessite du temps, et ne peut aboutir instantanément. 2.2.2. La problématique du développement territorial La notion de pérennité constitue un critère indispensable dans les projets européens. Notre réflexion s’axera ici sur ce point. Il convient de se demander si le projet « La culture en héritage » a participé à un quelconque développement territorial pérenne, inscrit dans du long terme. Cela soulève les divergences de perceptions entre les élus et les techniciens assignés au projet. Nous percevons, de manière évidente, que les enjeux associés au projet sont différents selon les élus et les techniciens. Nous l’avons vu, ici, la plupart des décisions proviennent d’une volonté politique déterminée. Les élus perçoivent ce projet comme un moyen d’améliorer l’image du territoire, de le rendre plus dynamique et de gagner en visibilité, notamment grâce à une certaine médiatisation. Leur vision s’apparente davantage à du marketing territorial plutôt qu’à une volonté de développer le territoire de manière pérenne. En revanche, les techniciens cernent aisément ce qui relève du développement territorial et y accordent davantage d’importance; une réelle question se pose : peut-on assimiler le projet de « La culture en héritage » a une simple accumulation d’animations réalisées dans un temps donné ? Ou bien, peut-on dire de ce projet qu’il a contribué à un développement territorial ? La question de pertinence en termes de coopération territoriale peut également être soulevée. Un premier élément de réponse peut déjà être évoqué : les prémices du projet n’ont pas intégré un quelconque schéma de développement territorial. Cet outil illustre pourtant une volonté de définir des directives précises et ainsi d’orienter les choix stratégiques en termes d’actions à mener. Face à ce constat, le projet apparaît comme un ensemble d’actions ponctuelles, ayant très peu d’influence sur le territoire dans le long terme. 2.2.3. Les difficultés rencontrées lors de la mise en œuvre d’un projet européen Au-delà de cela, ce projet nous incite à orienter notre réflexion sur le système lié à la mise en œuvre des projets européens. Il faut noter que l’Europe souhaite obtenir des justificatifs quant à la 94 consommation des crédits qu’elle a accordés. Elle a donc imposé des indicateurs d’évaluation et d’impacts, devant déterminer si les objectifs ont été atteints. Cependant, l’analyse et l’évaluation de ces projets ne s’effectue que sous un seul angle, l’angle financier. Alors, comment déterminer si ce projet a été vecteur de développement local ? Cela semble particulièrement compliqué. L’Europe ne met en place aucun accompagnement dans la mise en œuvre d’outils pertinents et adéquats pour mesurer un réel impact. Ce type de méthode semble contestable, s’axant sur des données quantitatives et non qualitatives. Ainsi, au terme du projet, le bilan obtenu semble partiel, laissant de nombreuses zones d’ombres ; par exemple, le SMALCT n’a obtenu aucune information quant à la perception des visiteurs et des locaux vis-à-vis de l’ensemble du projet, le degré de satisfaction ou encore les éléments qui pourraient éventuellement être améliorés. Les structures ne sont pas en mesure de mettre en place des outils spécifiques qui seraient un moyen d’évaluer le projet d’une manière transversale et complète. D’un autre côté, l’Europe souhaite développer les démarches de coopération grâce à ses différents programmes opérationnels, cependant la procédure qui y est associée est particulièrement lourde et complexe. Paradoxalement, cet aspect va freiner considérablement les prises d’initiative, étant considéré comme un frein important. Le travail d’ingénierie de projet, dans sa globalité, présente de nombreuses contraintes administratives ; on constate par exemple que les demandes se font rares, dès lors que les structures ne sont pas en capacité d’assumer de telles démarches. On dénombre environ huit projets sur le département de l’Ariège selon la chargée de mission du SMALCT. De plus, les structures répondant à des appels à projets et souhaitant obtenir des fonds européens doivent être capable d’avancer des sommes souvent très élevées sur un temps relativement long. Les délais pour percevoir certains fonds européens sont extrêmement longs, il s’agit d’une vraie difficulté pour les territoires ruraux particulièrement. D’autres frais financiers importants découlent de ce projet, souvent difficile à supporter. « Ceci dit, ils ne sont pas non plus en capacité de refuser, il faut qu'ils puissent justifier auprès de l'union européenne d'un certain pourcentage de projets déposés, d'un certain pourcentage de projets adoptés et s'ils devaient rejeter tous les projets qui ne présentaient pas une pérennité suffisante, il n'y en aurait quasiment pas.» 3. Les perspectives d’avenir Nous terminerons cette troisième et dernière partie en nous intéressant aux perspectives d’avenir possible, que ce soit d’un point de vue des futurs projets sur lesquels travaillera le SMALCT. Nous pointerons, également, des éléments qui nous semblent essentiels pour la mise en œuvre de nouveaux projets, dont le SMALCT devrait tenir compte afin d’éviter certains écueils. 95 3.1. « L’après projet » : quelles perspectives ? Les personnalités politiques ont exprimé leur enthousiasme et leur satisfaction face aux résultats obtenus, suite au projet de « La culture en héritage » et comptent donc réitérer l’expérience lors de la prochaine génération 2014-2020. A l’heure actuelle, des grands axes de réflexion sont apparus pour poursuivre la démarche déjà engagée. Celle-ci s’apparenterait de nouveau à une coopération transfrontalière entre l’Espagne et la France. Le document intitulé « Projet de développement économique » met en avant les axes de travail prévus pour la suite du projet. Par le biais de ce document, on exprime une envie d’aller au-delà de ce qui a pu être réalisé ; en effet, le SMALCT espère élargir son champ d’action, ses secteurs d’intervention pour développer davantage les partenariats. Les trois axes de réflexion sont les suivants : - Amélioration de l’accès à l’emploi ; - Développement du commerce agroalimentaire et logistique Import/Export ; - Développement de l’économie touristique. On constate donc que la partie dédiée au domaine culturel, qui prenait une place des plus importantes, n’apparaît plus du tout. Le tourisme reste une des priorités malgré tout. Nous avions pu constater que, durant le projet « La culture en héritage », l’axe relatif au tourisme n’avait pas été extrêmement exploité. De ce fait, il s’agira pour le SMALCT de participer au développement de l’économie touristique par le biais d’une meilleure prise en compte de l’accueil touristique ainsi que par la création d’un parc d’hébergements touristiques. L’objectif partenarial, dédié aux échanges et partages, reste bel et bien présent, et apparaît de manière transversale. Enfin, le SMALCT réfléchit quant aux éventuelles possibilités de collaborer avec le Pays et ainsi profiter de certains avantages. D’un point de vue technique et organisationnel, le Pays semble mieux structuré et possède des moyens humains plus importants. De plus, l’échelle territorial du Pays semble plus pertinente afin de mettre en œuvre des projets de développement, ou encore de percevoir des fonds européens. Une collaboration avec le PNR pourrait également voir le jour durant la prochaine génération. Le SMALCT a conscience des enjeux liés aux partenariats avec des territoires de projet et espère intégrer ces structures sur la mise en œuvre des futurs projets. 3.2. Des préconisations pour les projets futurs Nous terminerons notre analyse, consacrée à la coopération transfrontalière franco-espagnole, en émettant quelques préconisations. Nous l’avons vu, la démarche coopérative constitue un exercice des plus compliqués et nécessite la prise en compte de différents aspects. 96 Souhaitant réitérer cette démarche, le SMALCT devrait mener une réflexion préalable quant au développement territorial et mener des actions sans perdre de vue cette optique. De ce fait, les projets sélectionnés s’inscriront dans une démarche globale et pourront répondre à l’objectif de pérennité. Précisons, également, que le SMACLT se trouve dans un environnement rural qu’il est essentiel de ne pas occulter. En effet, l’espace rural possède des caractéristiques qui lui sont propres que ce soit en termes d’opportunités comme de menaces. En gardant à l’esprit une volonté de développement local, ces aspects doivent être intégrés à la réflexion préalable. 97 CONCLUSION DE LA PARTIE 3______________________________ Cette troisième et dernière partie nous a permis de placer notre réflexion dans un environnement plus empirique. Il semble évident que celle-ci ne puisse s’inscrire dans un cadre strictement théorique ; il s’agissait ici de l’étayer par le biais de ces deux études de cas. Ainsi, nous avons pu intégrer des données relatives à une expérience de terrain. En effet, nous nous sommes appuyés sur les perceptions et les ressentis exprimés par certains professionnels du tourisme. Nous pouvons, donc, noter que la coopération territoriale s’avère complexe et difficile à mettre en œuvre. De manière générale, nous avons pu constater que ces deux territoires ont présenté des similitudes en termes de leviers et d’obstacles dans l’action coopérative. Nous irons jusqu’à dire que ces études de cas ont participé à nous conforter dans nos hypothèses, dans lesquelles nous expliquions deux enjeux de la coopération, qui nous paraissaient déterminants. Néanmoins, cette étude empirique a consenti à déceler des aspects qui n’avaient, jusqu’alors, pas été perçus. On comprend donc que la coopération induit des difficultés de type expérimentales, souvent difficiles à distinguer, et qu’il faut pourtant savoir anticiper dans l’ingénierie de projet coopérative. 98 ________________CONCLUSION GENERALE_________________ Ce mémoire nous a permis de souligner combien la coopération territoriale constitue un objet d’étude particulièrement complexe. Bien qu’elle soit omniprésente actuellement, elle apparait difficile à appréhender. La notion de développement local, quant à elle, s’impose comme moteur pour les territoires, cependant, les acteurs locaux n’en saisissent pas toujours l’essence. Notre réflexion a été un moyen de clarifier ces notions et de nous les approprier. Nous avons donc rattaché ces éléments au domaine du tourisme, et en particulier, aux politiques publiques touristiques. Ce point nous a amené à traiter des nombreux acteurs présents dans les prises de décision touristiques, institutionnels ou non, ainsi que des moyens employés pour coopérer. Initialement, notre raisonnement résulte d’une observation empirique, qui a discerné un maillage territorial complexe. De ce fait, ce mémoire nous a permis de comprendre le système territorial et politique français, afin de saisir la mise en œuvre existante en termes de politiques touristiques. Cependant, il nous a fallu dépasser le stade de simple inventaire, afin de nous orienter vers les articulations et les relations unissant les notions en jeu. De ce fait, en posant l’ensemble de ces principes comme fondement à notre raisonnement, nous nous sommes tournés vers la problématique des enjeux de la coopération territoriale. Il est vrai que notre objet principal d’étude est particulièrement vaste, malgré tout, nos recherches documentaires associées aux entretiens exploratoires, nous ont permis de mettre en exergue deux aspects qui nous ont semblé primordiaux. Nous avons donc considéré la coopération comme un moyen pour procéder et mettre en œuvre une valorisation des ressources territoriales. Ajoutons, que notre démarche a pu prendre un tournant plus sociologique, en admettant que la coopération symbolise un enjeu lié à une mise en réseau à l’échelle humaine. Ces hypothèses ont contribué à diriger notre réflexion sur des concepts ou des notions, qui avaient pu nous échapper jusqu’alors. En dernier lieu, nous avons émis le souhait de nous intéresser à deux cas d’étude ; l’un concernant une intercommunalité, l’autre, une coopération transfrontalière. En les traitant sous une même démarche d’analyse : « Quels leviers ? Quels obstacles ? », nous avons pu appuyer nos hypothèses de recherche mais, également, saisir de nouveaux enjeux. Finalement, l’ensemble de ce mémoire a contribué à prendre du recul sur notre thématique, à mesurer son ampleur et ainsi avoir une vision globale de celle-ci. L’alliance entre recherches théoriques et pratiques a été bénéfique à l’avancement de notre raisonnement, nous permettant de dépasser le simple postulat initial. 99 Notre mémoire soulève des questions profondément actuelles ; en terme de territorialité, nous sommes en droit de nous demander jusqu’où la décentralisation peut aller et donc qu’adviendra-il du découpage territorial en France ? Pour ce qui a trait à la coopération, nous le savons, c’est un élément clé dans le champ du tourisme. En ce sens, il constitue à la fois un moyen, un enjeu et un outil. Cependant, cette triple approche est-elle réellement perçue par les décideurs ? 100 BIBLIOGRAPHIE__________________________________________ OUVRAGES BONNEMAISON J., CAMBREZY L., BOURGEOIS-QUINTY L. Territoire. Paris : l’Harmattan, 1997, 143 p. DI MEO Guy. Les territoires du quotidien. Paris/Montréal : l’Harmattan, 1996, 207 p. KNOEPFEL P., LARRUE C., VARONE F. Analyse et pilotage des politiques publiques. Genève, Helbing & Lichtenhahn, 2001, 387 p. MICHAUD Jean-Luc. Les institutions du tourisme. Paris: Presses Universitaires de France, Que sais-je ?, 1995, 127 p. MULLER Pierre. Les politiques publiques. 9ème édition, Paris : Presses universitaires de France, 2011, 126 p. PECQUEUR Bernard. Le développement local. 2ème édition, Paris : Syros, 2000, 132 p. ROUAULT Marie-Christine. L’essentiel de l’organisation administrative. 2ème édition, Paris : Gualino, 2011, 113 p. RUBIO-AYACHE Danièle. 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Syndicat Mixte Arize-Lèze de Coopération Transfrontalière. Rapport d’exécution, La culture en héritage. Période du 8 mai 2010 au 31 décembre 2010. TROGNON Laurent, LARDON Sylvie, PAYRE Mathieu. 1ère conférence intercontinentale en intelligence territoriale ; la chaîne d’ingénierie territoriale, vers un ingenium territorial ? 2011, 13 p 103 ANNEXE A Le processus de développement local 104 Rôle des acteurs (associations, collectivités locales, intercommunalités, population locale) Quelle coopération ? Quelle participation ? Approche solidaire / ascendante Objectifs - Créer des emplois - Maintenir les jeunes sur le territoire - Former - Déceler les nouveaux enjeux de développement (diversification des activités) - Utiliser l’espace de manière optimale Construction d’un projet autour de la valorisation des ressources locales Approche transversale (social, culturel, économique, touristique, artisanal, agricole) L’espace Territoires de proximité entre communes entre quartiers Espace vécu intercommunalités Pays Construction d’un territoire Temporalité longue Le développement local, un processus dynamique, différencié (d’innovation) Source : BARTHE Laurence. Politique d’aménagement touristique : le développement local ou territorial, quelles pratiques, quels enjeux ?, Cours de Licence 3 TD, département ISTHIA, Université de Toulouse II, 2011 105 ANNEXE B Guide d’entretien Consultant sénior d’ingénierie touristique 106 GUIDE D’ENTRETIEN Entretien avec un consultant sénior d’ingénierie touristique. Lieu d'entretien : au domicile de l'enquêté, le 27 décembre 2012. I- Présentation Pourriez-vous vous présenter en quelques mots ? (âge, région d’origine, poste occupé depuis quand…) Description de son poste : Quelle sont vos missions ? Quel est votre cœur de métier ? Sur quel type de territoire travaillez-vous ? Et avec qui ? Pourquoi avoir choisi de travailler dans le tourisme ? II- Problématiques récurrentes Vous êtes amené à travailler avec des structures telles que des établissements publics de coopération intercommunale (Communautés de Communes, d’agglo etc.) a- Remarques générales Quels sont les problèmes les plus récurrents? Avez-vous des exemples précis ? b- Rôle des élus dans le domaine touristique Quel est le degré d’implication des élus dans le milieu du Tourisme ? (rôles, prises de décision etc.) Le Tourisme a longtemps été considéré comme un élément marginal, peu sérieux selon les élus ; qu’en est-il à l’heure actuelle ? Selon, vous, ont-ils conscience des enjeux du Tourisme ? Sont-ils réellement formés à ces problématiques ? c- Rôle des professionnels du Tourisme Comment les professionnels du tourisme se comportent-ils ? Quels sont leurs rôles ? Représentent-ils des acteurs clés des territoires ? d- Mise en œuvre des projets touristiques / coopérations territoriales En définitive, y a-t-il un travail efficient de coopération entre ces deux types d’acteurs ? Si oui, à quel niveau se fait-elle ? En quoi les projets touristiques peuvent-ils être considérés comme légitimes ? Comment définir leur degré de pertinence ? Font-ils suite à une véritable réflexion globale territoriale ? Quelles difficultés peuvent apparaître lors d'un travail de coopération touristique ? Quels sont les freins à la mise en place de projets touristiques ? 107 Au contraire, quelles sont les facteurs clés de réussite d’une coopération territoriale ? Connaissez-vous des exemples de coopérations réussies ? Si oui, lesquelles ? e- Compétence Tourisme Est-elle toujours bien comprise par les élus / les techniciens? Globalement, quelle place occupe le Tourisme dans les politiques territoriales ? A quoi est-il rattaché dans les compétences ? f- Pertinence des territoires Quel est, selon vous, un territoire pertinent dans la mise en œuvre de politiques touristiques locales? Quels critères semblent les plus adaptés pour définir la notion de « territoire pertinent » ? Êtes-vous confronté de manière récurrente à la confusion entre les notions de destinations touristiques et les territoires administratifs ? g- Autres problématiques ? III- Avis personnel On parle de « mille-feuille » touristique : qu’en pensez-vous ? (Système territorial actuel en France, empilement d’échelles, multiplication des acteurs dans le Tourisme) Quelles sont les avantages / les limites de ce système ? Quels éléments pourraient constituer des solutions à l’avenir selon vous ? Autres remarques ? 108 ANNEXE C Article de presse Ariègenews 13 janvier 2010 « Arize-Lèze-Barbastro : la coopération continue… » 109 Le Syndicat Mixte Arize-Lèze de Coopération Transfrontalière et la commune de Barbastro se sont retrouvés lors d'un comité technique transfrontalier, les 10 et 11 décembre 2009, afin d'élaborer ensemble les actions de partenariat qui verront le jour en 2010. Le projet de coopération territoriale Espagne-France-Andorre 2007-2013 «La culture en héritage», initié en 2008 par la commune de Barbastro, présidée par M. Antonio Coscuella et le Syndicat Mixte Arize-Lèze de Coopération Transfrontalière (SMALCT), présidé par M. Jean-Luc Couret, maire du Carla-Bayle, est à l'origine de diverses actions transfrontalières. Ainsi, sur l'année 2009, le public a pu assister au premier salon d'art contemporain transfrontalier, à l'opéra Messidor l'or de l'Ariège, au parcours sculpture transfrontalier du Carla Bayle, à la venue des Géants de Barbastro lors de la fête de la figue 2009 ainsi qu'au colloque Pierre Bayle héritier et médiateur de la liberté de conscience à l'âge classique. Les 10 et 11 décembre 2009, un comité technique transfrontalier, réunissant les partenaires français et espagnols, a permis d'organiser les actions transfrontalières de l'année 2010. Les échanges ont portés essentiellement sur trois grandes actions: l'organisation en mars 2010 d'une exposition transfrontalière d'arts plastiques à Barbastro, les échanges linguistiques et scolaires et la résidence d'artistes franco-espagnole. Première exposition transfrontalière d'arts plastiques à Barbastro en mars 2010 La première exposition artistique transfrontalière de Barbastro se tiendra en mars 2010 au palais des congrès de Barbastro. Un espace d'exposition dédié permettra d'accueillir 50 artistes plasticiens originaires ou résidant à Barbastro ainsi que sur le territoire de l'Arize-Lèze. Chaque artiste exposera 3 à 4 œuvres, et un espace spécifique sera consacré aux sculptures. Les artistes français seront sélectionnés par l'association Rue des arts en partenariat avec le SMALCT. L'exposition s'étendra sur 3 semaines et sera inaugurée en présence du SMALCT et de ses partenaires. Un catalogue d'exposition sera édité dans les deux langues. Les échanges linguistiques et scolaires Depuis la rentrée scolaire 2009-2010, des cours gratuits de langue espagnole pour adultes, coordonnés et animés par le GRETA de l'Ariège, ont démarré au collège du Mas d'Azil chaque lundi de 9h à 12h30 pour le groupe n°1 et de 13h30 à 17h pour le groupe n°2. Ces cours pour débutants sont ouverts aussi bien aux partenaires du projet qu'à l'ensemble de la population locale. On dénombre actuellement 25 stagiaires soit le maximum que l'on puisse accueillir. En 2010-2011, les cours proposés seront des cours d'approfondissement permettant d'aborder des champs plus précis de la langue et de la culture espagnole. De son côté, la commune de Barbastro compte 50 stagiaires aux cours de langue française. Aux cours des prochains trimestres l'objectif est de permettre aux stagiaires français et espagnols d'échanger à distance afin de mieux se connaître avant d'aborder des aspects thématiques plus spécifiques (culture, tourisme, philosophie). A l'issue du cursus, en 2011, un voyage d'étude sera organisé à Barbastro et sur le territoire de l'Arize-Lèze. Enfin, une réunion en présence des deux collèges de Barbastro, l'IES Martínez Vargas et l'IES 110 Hermanos Argensola, et du collège du Mas d'Azil a permis de confirmer le partenariat émergent entre ces trois institutions scolaires. Ainsi, sur l'année 2010 des réunions de travail seront programmées afin d'organiser un échange scolaire pour les élèves de 3ème au titre de l'année scolaire 2010-2011. Une résidence d'artistes franco-espagnole Lors d'une réunion de travail spécifique, Claus Sauer, directeur de la résidence d'artistes du Mas d'Azil, la Cazadoro, a exposé devant les artistes de Barbastro présents son appel à projets pour une création d'art contemporain. En effet, Caza d'oro, lieu de résidence d'artistes et laboratoire expérimental offre deux séjours en résidence avec deux bourses à la création à des artistes un(e) originaire de Barbastro et/ou œuvrant à Barbastro en Espagne et un(e) de France dans le cadre du projet «La culture en héritage» La sélection sur dossier se fera d'ici fin avril 2010 et deux propositions de séjours sont prévus, un entre juillet et septembre 2010 et un séjour entre mars et mai 2011. L'objectif du projet est de divulguer les connaissances sur la valorisation du patrimoine culturel local. A la suite de cette réunion, la délégation française a pu rencontrer et visiter les ateliers de deux des artistes présents dont celui de Maria Maza et Miguel Ángel Encuentra. Ces rencontres ont permis d'affiner les attentes de chacun et d'identifier des pistes de travail communes. Actions à venir D'autres actions ont également été préparées comme l'accueil au château de Pailhès, en juillet 2010, du spectacle historique Le siège de Barbastro qui sera accompagné des groupes de danse et musique folkloriques d'Aragon. Il a également été évoqué l'accueil de groupes de musiques actuelles espagnoles lors de l'édition 2010 des Jeudis du Carla ou encore la représentation à Barbastro, en mai 2010, de l'opéra Messidor l'or de l'Ariège. Enfin, pour l'année 2011, ont d'ores et déjà été programmés les jeux préhistoriques transfrontaliers au Mas d'Azil qui seront organisés conjointement par l'association Le propulseur azilien et le Parc Culturel du Rio Vero. Une exposition commune autour de l'art rupestre y sera présentée à côté de nombreuses autres animations. Pour tout renseignement complémentaire, vous pouvez consulter le site internet du projet: www.culture-en-heritage.eu. Par email, Syndicat Mixte Arize-Lèze de Coopération Transfrontalière 111 TABLE DES FIGURES ET DES TABLEAUX___________________ FIGURES Figure 1 : Processus d’évaluation d’une politique ....................................................................... 27 Figure 2 : Evolution de l’intercommunalité en France de 1999 à 2012 ....................................... 40 Figure 3 : Territoires concernés par les Pays et les Contrats de Développement Durable Rhône-Alpes en 2012 ................................................................................................................... 44 Figure 4 : Le processus de mise en œuvre de politique de développement touristique ............... 69 Figure 5 : Logo de la Communauté de Communes de la Touraine du Sud .................................. 77 Figure 6 : Nouveau logo du Pays touristique en Touraine du Sud ............................................... 80 Figure 7 : Commune du Carla-Bayle, Ariège ............................................................................... 88 TABLEAUX Tableau 1 : Les lois fondatrices de la décentralisation ................................................................. 18 Tableau 2 : Présentation de l’échelle régionale ............................................................................ 31 Tableau 3 : Présentation de l’échelle départementale ................................................................... 32 Tableau 4 : Présentation de l’échelle communale ........................................................................ 32 Tableau 5 : Présentation du Comité Régional du Tourisme ......................................................... 33 Tableau 6 : Présentation du Comité Départemental du Tourisme ................................................ 34 Tableau 7 : Présentation des Offices de Tourismes Syndicats d’Initiatives ................................. 34 Tableau 8 : Présentation des Communautés de Communes ......................................................... 41 Tableau 9 : Présentation des Communautés d’agglomération ...................................................... 41 Tableau 10: Présentation des Communautés urbaines ................................................................... 41 Tableau 11: Présentation des Pays ................................................................................................. 43 Tableau 12 : Données quantitatives relatives aux parcours sculptures .......................................... 91 112 TABLE DES MATIERES____________________________________ REMERCIEMENTS ...................................................................................................................... 4 SOMMAIRE .................................................................................................................................. 5 INTRODUCTION GENERALE .................................................................................................... 7 PARTIE 1 - TOURISME ET COOPERATION TERRITORIALE : DE NOUVEAUX ENJEUX POUR LE DEVELOPPEMENT LOCAL .................................................................... 9 INTRODUCTION DE LA PARTIE 1 ............................................................................................. 10 CHAPITRE 1 – L’organisation territoriale en France ..................................................................... 11 1 – La notion de territoire : un terme à éclaircir .............................................................................. 11 1.1. Définition du territoire ......................................................................................................... 11 1.2. Le territoire comme objet politique et économique ............................................................ 12 1.2.1. Le territoire, symbole du pouvoir politique .............................................................. 12 1.2.2. Le territoire comme espace de gouvernance ............................................................ 13 1.2.3. La dimension économique au cœur du territoire ...................................................... 13 1.3. Les dimensions identitaire et sociale ................................................................................... 14 1.3.1. L’identité ................................................................................................................... 14 1.3.2. Le territoire et l’identité collective ........................................................................... 15 2 – Le découpage territorial administratif en France ...................................................................... 16 2.1. Bref historique de l’organisation territoriale en France ...................................................... 16 2.2. Qu’est-ce que la décentralisation ? ..................................................................................... 17 2.2.1. Définition de la décentralisation ............................................................................... 17 2.2.2. Le contexte politique ................................................................................................ 17 2.3. Le processus de décentralisation ......................................................................................... 18 2.3.1. L’acte I de la décentralisation : 1982 / 1983 ............................................................. 18 2.3.2. L’acte II de la décentralisation : 2003 / 2004 ........................................................... 19 2.4. Quel bilan de la décentralisation ? ...................................................................................... 19 2.4.1. 30 ans de décentralisation, quel bilan ? .................................................................... 19 2.4.2. Vers un acte III de la décentralisation ? .................................................................... 20 CHAPITRE 2 – Le tourisme au cœur des politiques touristiques : un vecteur de développement local ? .................................................................................................................... 22 1 – La notion de développement ..................................................................................................... 22 1.1. Qu’est-ce que le développement ? ...................................................................................... 22 1.2. La notion de développement local ...................................................................................... 23 113 1.3. Tourisme, facteur de développement ? ................................................................................ 25 2 – Les politiques touristiques ......................................................................................................... 26 2.1. Le tourisme dans le système politique ................................................................................ 26 2.1.1. Qu’est-ce qu’une politique publique ? ..................................................................... 26 2.1.2. Les politiques touristiques : concept et mise en œuvre par l’ingénierie de projet .... 27 2.2. La compétence tourisme ..................................................................................................... 28 2.2.1. Le tourisme, un objet complexe ............................................................................... 29 2.2.2. La question de la répartition de la compétence tourisme, une question sans réponse ? ............................................................................................................................. 29 3 – Les acteurs du tourisme : rôles et compétences ........................................................................ 30 3.1. Les acteurs publics .............................................................................................................. 30 3.1.1. Définition d’une collectivité territoriale ................................................................... 31 3.1.2. L’échelon régional .................................................................................................... 31 3.1.3. L’échelon départemental ........................................................................................... 32 3.1.4. L’échelon communal ................................................................................................ 32 3.2. Les organismes d’appui au développement touristique ...................................................... 33 3.2.1. L’échelle régionale : le Comité Régional du Tourisme ............................................ 33 3.2.2. L’échelle départementale : le Comité Départemental du Tourisme .......................... 33 3.2.3. L’échelle locale : les Offices de Tourisme et Syndicats d’Initiative ......................... 34 CHAPITRE 3 – Coopération, mise en réseau : des éléments moteurs pour le développement touristique ....................................................................................................................................... 36 1 – La coopération, définition ......................................................................................................... 36 1.1. Qu’est-ce que la coopération ? ............................................................................................ 36 1.2. Les moyens d’actions en faveur de la coopération ............................................................. 37 1.3. La coopération : une solution face à un contexte de concurrence accrue ? ......................... 38 2 – Une volonté de s’unir : la création de nouvelles entités territoriales ........................................ 38 2.1. La coopération intercommunale .......................................................................................... 39 2.1.1. L’intercommunalité .................................................................................................. 39 2.1.2. Les communautés de communes .............................................................................. 40 2.1.3. Les communautés urbaines et d’agglomération ....................................................... 41 2.2. La coopération de projet ...................................................................................................... 42 2.2.1. Les Pays .................................................................................................................... 42 2.2.2. Bilan et perspective des Pays ................................................................................... 43 2.2.3. Les Parcs Naturels Régionaux .................................................................................. 45 3 – La coopération à l’échelle transfrontalière ................................................................................ 46 3.1. Qu’est-ce que le transfrontalier ? ........................................................................................ 46 114 3.1.1. Frontière ................................................................................................................... 46 3.1.2. Territoire transfrontalier ........................................................................................... 47 3.2. Coopération transfrontalière, définition .............................................................................. 47 3.3. Les programmes européens : des leviers pour la coopération territoriale ........................... 48 CONCLUSION DE LA PARTIE 1 ................................................................................................. 51 PARTIE 2 – LES ENJEUX DE LA COOPERATION TERRITORIALE DANS LES POLITIQUES TOURISTIQUES ........................................................................................ 52 INTRODUCTION DE LA PARTIE 2 ............................................................................................. 53 CHAPITRE 1 – La coopération, un vecteur de valorisation territoriale et touristique ................... 54 1 – Un lien évident entre démarche coopérative et valorisation territoriale .................................... 54 1.1 La valorisation touristique, outils et enjeux ......................................................................... 54 1.1.1. Qu’est-ce qu’une ressource territoriale ? .................................................................. 54 1.1.2. La destination touristique, un territoire pertinent de valorisation touristique ? ........ 55 1.2. Les enjeux de la coopération dans la mise en valeur de ces ressources .............................. 56 2 – L’Espace Mont-Blanc, une illustration de la valorisation territoriale ........................................ 56 2.1. Présentation du projet .......................................................................................................... 56 2.2. La place du tourisme dans la valorisation territoriale ......................................................... 57 CHAPITRE 2 – La mise en réseau d’un système d’acteurs au cœur de la démarche coopérative ...................................................................................................................................... 59 1 – Des acteurs issus de structures hétérogènes… .......................................................................... 59 1.1. Les différents acteurs en jeu ................................................................................................ 59 1.1.1. Les réseaux associatifs ............................................................................................. 59 1.1.2. Le secteur privé ........................................................................................................ 60 1.1.3. La population locale ................................................................................................. 61 1.2. La mise en réseau des acteurs, une articulation méthodologique ........................................ 61 1.2.1. Quelle répartition des compétences ? ....................................................................... 61 1.2.2. La coopération, une entité multisectorielle ............................................................... 63 2 – …au service d’une ingénierie touristique .................................................................................. 64 2.1. Qu’est-ce que l’ingénierie de projet ? ................................................................................. 64 2.1.1. Rôle et objectifs de l’ingénierie territoriale .............................................................. 65 2.1.2. L’intelligence territoriale, un concept à intégrer dans les actions de coopération .... 66 2.2. Une dimension sociologique ............................................................................................... 68 3 – Les obstacles relatifs à la coopération ....................................................................................... 69 3.1. Des contradictions entre acteurs .......................................................................................... 70 115 3.1.1. Contradiction entre élus et techniciens ..................................................................... 70 3.1.2. Contradiction entre techniciens et acteurs économiques .......................................... 71 3.2. Des éléments exogènes sources de contraintes dans la réussite de la coopération ............. 71 CONCLUSION DE LA PARTIE 2 ................................................................................................. 73 PARTIE 3 – TOURISME ET COOPERATION TERRITORIALE : QUELS LEVIERS ? QUELS OBSTACLES ? ETUDES DE CAS ............................................................................... 74 INTRODUCTION DE LA PARTIE 3 ............................................................................................. 75 CHAPITRE 1 – La coopération à l’échelle locale, cas de la Touraine du Sud ................................ 76 1 – Présentation du territoire ........................................................................................................... 76 1.1. La Touraine du Sud, présentation ........................................................................................ 76 1.1.1. Fonctionnement et organisation de la communauté de communes de la Touraine du Sud .................................................................................................................. 76 1.1.2. La compétence tourisme ........................................................................................... 77 1.1.3. La CCTS, un territoire singulier ............................................................................... 78 2 – Tourisme et coopération au cœur de la valorisation touristique ................................................ 78 2.1. Le tourisme, un élément moteur dans l’économie locale ? ................................................. 78 2.1.1. Les ressources touristiques du territoire ................................................................... 78 2.1.2. Le tourisme, une activité difficilement structurée .....................................................79 2.2. Une activité touristique renforcée par une coopération territoriale ..................................... 80 2.2.1. La création d’une image touristique forte ................................................................. 80 2.2.2. La création d’une dynamique territoriale ................................................................. 81 2.2.3. Une envergure coopérative de plus en plus importante ............................................ 81 3 – Les limites de la coopération ..................................................................................................... 82 3.1. La coopération à l’échelle locale ......................................................................................... 82 3.1.1. La coopération entre élus et techniciens du tourisme sur la CCTS .......................... 83 3.1.2. La coopération entre la CCTS, le département et la région ..................................... 83 3.2. La coopération interterritoriale ........................................................................................... 84 3.2.1. La Touraine du Sud et le Parc Naturel Régional de la Brenne ................................. 84 3.2.2. La Touraine du Sud et le département de la Vienne ................................................. 85 CHAPITRE 2 – La coopération à l’échelle transfrontalière, cas du syndicat mixte Arize-Lèze de coopération transfrontalière ..................................................................................... 87 1 – Le syndicat mixte Arize-Lèze de coopération transfrontalière, porteur du projet «La culture en héritage » ................................................................................................................. 87 1.1. Présentation générale de l’étude de cas ............................................................................... 87 116 1.1.1. Le contexte de la création du syndicat mixte ........................................................... 87 1.1.2. Présentation du SMALCT et du projet « La culture en héritage » ........................... 87 1.2. Les actions menées durant le projet « La culture en héritage » .......................................... 89 1.2.1. Action 1 : Formation linguistique – Accompagner l’apprentissage du français et de l’espagnol ..................................................................................................... 89 1.2.2. Actions 2 et 3 : Amélioration de la connaissance du patrimoine culturel transfrontalier – Accompagnement des échanges artistiques transfrontaliers ................... 89 1.2.3. Action 4 : Valorisation touristique du territoire transfrontalier – Mise en place d’outils de promotion du patrimoine culturel et artistique transfrontalier .............. 90 2 – Quel bilan tirer de cet exemple de coopération transfrontalière ? ............................................. 90 2.1. Les réussites ........................................................................................................................ 90 2.1.1. La création d’un territoire dynamique et attractif ..................................................... 91 2.1.2. Des échanges enrichissants ....................................................................................... 92 2.2. Les obstacles ....................................................................................................................... 93 2.2.1. Un manque de pérennité ........................................................................................... 93 2.2.2. La problématique du développement territorial ....................................................... 94 2.2.3. Les difficultés rencontrées lors de la mise en œuvre d’un projet européen .............. 94 3 – Les perspectives d’avenir .......................................................................................................... 95 3.1. « L’après-projet », quelles perspectives ? ........................................................................... 96 3.2. Des préconisations pour les projets futurs ........................................................................... 96 CONCLUSION DE LA PARTIE 3 ................................................................................................. 98 CONCLUSION GENERALE ......................................................................................................... 99 BIBLIOGRAPHIE ........................................................................................................................ 101 ANNEXES .................................................................................................................................... 104 TABLES DES FIGURES ET DES TABLEAUX .......................................................................... 112 TABLE DES MATIERES ............................................................................................................. 113 117 Ce mémoire résulte d’un travail universitaire réalisé dans le cadre d’un master 1 Tourisme. Il traite de la problématique de la coopération territoriale, omniprésente aujourd’hui dans de nombreux domaines. Vaste thématique, ce mémoire aborde la question de la territorialité, illustrée par l’évolution de l’organisation territoriale en France et les mutations politiques qui en découlent. Le maillage territorial français constitue une problématique en soi, qu’il a été nécessaire d’évoquée. En effet, les strates territoriales ont largement évolué ces dernières décennies, laissant apparaître de nouveaux espaces de coordination : intercommunalité, Pays, Parcs Naturels Régionaux notamment. Ce phénomène a, de ce fait, eu des incidences notables dans le domaine du tourisme, et en particulier dans les politiques publiques qui y sont rattachées. Nouvel enjeu de ces politiques, le développement local représente une aspiration politique et touristique, souvent difficile à atteindre. Face à ce constat, ce travail de recherche tend à déceler et définir les interrelations qui sont en jeu. Outre mesure, il a fallu s’interroger sur la nature des enjeux liés à la coopération. De ce fait, deux éléments primordiaux ont été énoncés : la coopération comme moteur de valorisation touristique ainsi que la mise en jeu d’un système d’acteurs, constituant à la fois des enjeux et des défis à relever. Souhaitant associer données théoriques et pragmatiques, ces hypothèses ont pu être appuyées grâce à deux études de cas ; l’une portant sur une intercommunalité, l’autre sur une coopération transfrontalière. Ce mémoire consent à traiter la notion de coopération sous un angle global, ce point de vue dévoile la multitude de concepts et de domaines fédérés. Il met également en exergue des problématiques actuelles, s’interrogeant sur l’avenir du territoire français et de la gouvernance touristique, ainsi que sur la notion du développement local. Mots clés : coopération territoriale, développement local, politiques publiques, politiques touristiques, ingénierie territoriale, territorialité. This thesis is the result of a first year’s of master degree. It deals with the territorial cooperation problems, currently omnipresent in many domains. Vast issues, this thesis mentions the question of territoriality, with the territorial organization evolution and the political transformations. The French territorial network is a real problem, evoked in this thesis. In fact, the territorial scales have been changed, and new coordination spaces appeared: “intercommunalité”, “Pays”, “PNR”. This phenomenon influenced considerably tourism industry, more precisely public policy. The local development is a real challenge, often hard to achieve. Considering all of this, this thesis searches for the interrelations at stake. That is why, the cooperation aim have been questioned. On one hand, we took an interest in the cooperation as a tourist promoting tool, and on the other hand, we approached the system’s operators, which is both an aim and a challenge. To finish, we chose to illustrate our remarks with two study cases: “intercommunalité” and transborder cooperation. This thesis studies the cooperation notion in a general point of view. Most of all, it evidences contemporary problems: What can be the French territory future? What about the tourist governance or the local development? Key words: territorial cooperation, local development, public policies, tourist policies, territorial engineering, territoriality. 118