Comment avoir bonne mine malgré le brouillard? Cent jours de

Transcription

Comment avoir bonne mine malgré le brouillard? Cent jours de
Samedi-dimanche 24 - 25 novembre 2012
SAMEDI
Les abeilles, qu’elles soient
à miel ou sauvages,
disparaissent dans des
proportions affolantes.
Un faisceau de maux
serait en cause. AFP
DE LA TÊTE
AUX PIEDS
Comment
avoir bonne
mine malgré
le brouillard?
page 27
Et si
les abeilles
ne revenaient
pas?
SCIENCE
Cent jours de
découvertes
sur Mars
page 28
CULTURE
La folie Dalí
s’empare
du Centre
Pompidou
Le film More Than Honey enquête sur le fléau
qui frappe les ruches. Edifiant
page 29
Gregory Wicky
P
TERROIRS
Du poisson
pané sorti
du Léman
pages 34-35
VC6
Contrôle qualité
armi les scènes marquantes
du film More Than Honey* –
et il y en a beaucoup – ces
images apocalyptiques
prises dans la campagne
chinoise: dans la grisaille,
des hommes et des femmes sur des
échelles s’appliquent à polliniser des
arbres fruitiers. Avec leurs pinceaux, ils
déposent sur chaque fleur, une à une,
un peu de pollen. Un travail dérisoire,
sans fin. Un travail d’insecte. C’est que,
justement, ce serait aux abeilles de le
faire. Mais des abeilles, il n’y en a plus…
Comme ailleurs, elles disparaissent,
mystérieusement, inexorablement. On
appelle cette épidémie d’une ampleur
sans précédent le «syndrome
d’effondrement des colonies». Depuis
une douzaine d’années, avec un pic en
2007, des centaines de milliers de
ruches sont frappées à travers le
monde. Partout, le même scénario: par
milliards, les abeilles quittent leurs
maisons pour ne plus y revenir. Aucun
cadavre à proximité. Aucun prédateur
visible. Et les spécialistes ne savent pas
vraiment qui ou quoi incriminer. Les
pesticides? Les médicaments employés
pour les combattre? Les parasites,
comme le varroa, qui sévit avec
violence depuis vingt-cinq ans? De
nouveaux virus? L’industrialisation de
l’agriculture? La pollution, les ondes de
télécoms? Probablement un peu de tout
ça, en fait.
Essentielles à l’agriculture
C’est ce phénomène que tente de
décortiquer More Than Honey, le
nouveau long-métrage du cinéaste
suisse Markus Imhoof, auteur notamment de La barque est pleine en 1981 (lire
interview en page suivante). Des
gigantesques champs d’amandiers de
Californie, où les abeilles sont amenées
en camion pour une pollinisation
massive et express, au désastre chinois,
en passant par une Suisse présentée
comme un éden de l’apiculture en péril,
le film montre des images belles,
troublantes, effrayantes parfois.
Prouesses techniques, elles nous
emmènent dans l’intimité de cet animal
fascinant, au destin étroitement lié au
nôtre. C’est qu’une quantité innombrable des fruits et légumes que nous
mangeons – pommes, avocats, cerises,
mais aussi oignons, concombres,
arachides, sans parler du coton –
dépendent des abeilles. Au total, les
insectes se chargent de polliniser plus
de 80% des espèces cultivées en Europe
– le vent s’occupant des 20% restants.
La fragile abeille semble symboliser à
elle seule la fragilité des écosystèmes. Et
l’hécatombe des colonies n’épargne pas
nos contrées. André Pasche, responsable de la vulgarisation à la Fédération
vaudoise des sociétés d’apiculture,
rappelle que la situation suisse est assez
unique, dans la mesure où la discipline
est pratiquée uniquement par des
amateurs. Une ruche locale produit
ainsi entre 12 et 15 kilos de miel, contre
50 kilos ou plus dans des conditions
«industrielles». «Mais nous sommes
touchés comme tout le monde, précise
l’apiculteur. En 2011, la moitié de mes
60 colonies sont mortes. La moyenne
des pertes en Suisse était plus ou moins
similaire. Ça a été une année particulièrement mauvaise.» Plus déroutant, les
pertes dans certains ruchers du
Pays-d’Enhaut ont été encore plus
élevées. «Ce sont pourtant des zones où
les pesticides et les ondes sont moins
présents… C’est ce qui rend ce phénomène si difficile à comprendre.»
Lire aussi en page 24
*More Than Honey
De Markus Imhoof
En salles dès mercredi