La stratégie marketing du Stade Français

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La stratégie marketing du Stade Français
Pereira Jérémie
Master 1 MIE
La politique de communication et la stratégie marketing du
Stade Français
Mémoire présenté par Pereira Jérémie
En vue de l’obtention de la 1ère année de Master
de Marketing et Production de Services
Sous la direction de : Briot Eugénie
Année académique 2007-2008
Sommaire
Introduction……………………….……………………………………………………….p 4
1.
La stratégie de croissance du Stade Français…………………………………….p10
1.1.
Le développement sportif du club…….………………………………………….p11
1.2.
La politique de sponsoring du Stade Français…………………………………....p12
1.2.1.
Le sponsoring : une activité en évolution depuis les années 1990……………….p12
1.2.1.1. L’évolution économique………………………………………………………….p12
1.2.1.2. Une évolution des méthodes…………………………………………...…………p13
1.2.2.
Les fondements du sponsoring…………………………………………………...p13
12.2.1. Les caractéristiques de l’échange………………………………………...………p13
1.2.2.2. Les sponsoring en tant qu’élément d’un système global…………………………p15
1.2.2.3. Les objectifs du sponsoring………………………………………………………p15
1.2.3.
Pourquoi le Stade Français attire t-il tant de sponsors ?.........................................p18
1.2.3.1. Le sponsoring : une dynamique positive………...……………………………….p19
1.2.3.2. Une recherche de positionnement…………………………………………...…..p20
1.2.3.3. La création d’un lien entre le consommateur et la marque………….……………p21
1.2.4.
Les dangers du sponsoring……………………………………….……………….p21
1.3.
La politique de communication………………………………….……………….p23
1.3.1.
Définition d’une politique de communication……………………………………p23
1.3.1.1. La définition de la cible………………………………………….……………….p23
1.3.1.2. Une cible en mouvement……………………………………….………………...p24
1.3.1.3. Les leçons tirées de l’effet « Coupe du monde 1998 »…………………………..p25
1.3.2.
La communication par l’évènementiel………………………….………………..p26
1.3.2.1. Le premier « essai » au Parc des Princes……………………….………………...p26
1.3.2.2. L’importance des médias…………………………………………………………p27
1.3.2.3. La « fête du rugby » au Stade de France…………………………………………p28
1.3.2.4. L’analyse d’une affiche publicitaire……………………………………………...p30
1.3.3.
La communication média : analyse du site Web : www.stade.fr............................p31
2.
L’entreprise Stade Français………………………………………………………p35
2.1
La stratégie marketing du Stade Français…………………………...……………p35
2.1.1.
Pourquoi peut on parler de stratégie ?....................................................................p35
2.1.2.
La définition des objectifs stratégiques……………………………..……………p36
2
2.1.2.1. Les objectifs d’une association sportive……………………………..…………...p36
2.1.2.2. Le choix d’une stratégie………………………………………………..…………p37
2.1.2.3. L’analyse du marché…………………………………………………..………….p38
2.1.2.4 Le modèle d’analyse SWOT appliqué aux clubs sportifs………….…………….p39
2.1.3.
Le positionnement sur le marché…………………………………………………p43
2.1.3.1 La segmentation du marché………………………………………………………p43
2.1.3.2 Le ciblage…………………………………………………………………………p44
2.1.3.3. Le positionnement………………………………………………………………..p45
2.2.
La gestion de l’entreprise Stade Français……………………….………………..p48
2.2.1.
La marque Stade Français………………………….……………………………..p48
2.2.1.1. Pourquoi peut on parler de marque ?......................................................................p48
2.2.1.2. L’importance de la marque pour une entreprise………………………………….p49
2.2.1.3. La marque comme vecteur d’identité…………………………………………….p50
2.2.2.
La gamme de produits Stade Français…………...……………………………….p52
2.2.2.1. L’offre de base : une prestation de service………...……………………………..p52
2.2.2.2. Les produits de la marque Stade Français………..………………………………p53
2.2.2.3. Une marque innovante…………………………..…………….………………….p55
2.2.3Stade Français VS Olympique Lyonnais……………………….……………………p56
Conclusion……………………………………………………….………………………..p59
Annexes……………………………………………………………………………………p66
Bibliographie………………………………………………………………………………p69
3
INTRODUCTION
« Le sport est l’opium du peuple »1. Cet adage semble avoir fortement inspiré le
nouveau président du Stade Français. En prenant en 1993 les rênes du Stade Français, Max
Guazzini semble vouloir faire de son club, de son sport, le rugby, le nouvel opium de la
population francilienne. En effet, ce brillant chef d’entreprise a repris en main le club parisien
après avoir quitté ses fonctions de président directeur du groupe NRJ, avec pour objectif de
lui donner une plus grande visibilité en Ile de France et à plus long terme sur la scène
nationale. A travers ce projet ambitieux, il veut à la fois populariser un club et un sport en
manque de reconnaissance médiatique. Mais cette visibilité que Max Guazzini veut donner à
son club n’est pas seulement sportive, mais aussi et peut être même surtout commerciale. Il va
se servir de la formidable ascension sportive du Stade Français pour créer une véritable
dynamique commerciale autour du club, qui comme une tout autre une entreprise va être
source de profits importants.
La mise en place de cette stratégie va se faire en plusieurs étapes. Elle s’initie en 1992,
date de reprise du club par M. Guazzini. Elle nécessita la mise en œuvre d’importants moyens
financiers. C’est d’ailleurs M. Guazzini lui même qui investit une partie de sa fortune
personnelle pour le développement du club. Cette stratégie va passer dans un premier temps
par un renouveau du club sur le plan sportif avec la fusion du Stade Français et du CASG
Paris qui est le propriétaire du stade Jean Bouin où joue désormais le club. Puis s’en suit la
mise en place d’un recrutement ambitieux de joueurs de qualités à prix coûtant pour pouvoir
rapidement redonner au Stade Français une envergure de club de première division. Cette
stratégie s’est avérée payante puisque le club accède au TOP 16 dès 1997 et accède au titre
suprême de « Champion de France » la même année. C’est sur cette réussite sportive que va
se baser la deuxième partie de la stratégie de M Guazzini.
Il va faire de son club une véritable machine commerciale en utilisant tous le savoir
faire acquis à la direction du groupe NRJ. Car, comme il le dit lui-même : « entre l’aventure
NRJ et le redressement du Stade Français il y a un point commun : celui d’avoir imposé une
démarche novatrice dans un univers conservateur et conventionnel ». Il va diriger le club de la
1
Guy Lagorce, La fabuleuse histoire des Jeux Olympiques, Ed Minerva, 2004.
4
même façon qu’il aurait dirigé une autre entreprise. Aujourd’hui, la stratégie semble une fois
de plus avoir été payante dans la mesure où le Stade Français, club quasi inconnu de la
majorité des français il y a une dizaine d’années est actuellement un des plus connus sur la
scène nationale. Pour cela, des investissements assez importants vont être réalisés en
communication et en marketing. Ainsi, pour relancer le rugby de clubs en région parisienne, il
va décider de créer des véritables évènements autour de son sport, afin que désormais les
matchs soient vus comme des fêtes familiales. En période d’après Coupe du monde de
football 1998, il va se servir de l’engouement des femmes pour le sport pour tenter de les
amener au stade. Ainsi, pendant la saison 1998-1999, de nombreux « spectacles sportifs »
seront proposés au public, avec notamment des shows de pom pom girls, des karaokés géants,
la présence « des filles du Moulin-Rouge » sur la pelouse du stade pendant la mi-temps…
Tout cela fait qu’en quelques années, le Stade Français a su bousculer l’image vieillissante du
rugby et attirer des spectateurs et des spectatrices de divers horizons dans les tribunes. Cet
engouement pour le club a évidemment eu des retombées économiques très positives. Tout
d’abord grâce aux très bonnes recettes réalisées par les billetteries mais aussi et surtout grâce
à la signature de contrats avec de nouveaux sponsors. Ceux-ci espèrent en effet profiter de la
notoriété acquise par le club pour y associer leur image. Ainsi, depuis 1992, le club à vu les
recettes du sponsoring augmenter de façon considérable, passant de moins de 30 000 euros à
près de 3 millions d’euros en 2006. Cela est du à la signature d’importants contrats avec
notamment l’opérateur téléphonique Orange ou encore l’assureur Axa. De plus, des contrats
de sponsoring ont également été signés avec Moët et Chandon, Calyon ou encore Volvo.
Enfin, après avoir acquis cette notoriété sur la scène régionale puis nationale, le Stade
Français va décider le lancement de nombreux produits dérivés. Par exemple, une chanson est
choisie chaque année comme hymne du club et va être largement diffusé dans les radios et à
la télévision. On se souviendra notamment du succès retentissent de la reprise de « I will
survive » en 1998. Le succès de ce single écoulé à plus de 800 000 exemplaires va de plus
aider à accroître la notoriété à l’époque grandissante du club. Ensuite, le Stade Français à
organiser d’autres grands coups médiatiques et commerciaux dont l’exemple le plus marquant
est l’opération baptisée « Les Dieux du Stade ». Vont être ainsi commercialisé à grande
échelle des calendriers où apparaissent les joueurs plutôt dénudés. Cette opération va une fois
de plus être un grand succès commercial surtout auprès de la gent féminine, et a permis
également un énorme tapage médiatique autour du Stade Français. Enfin, depuis 5 ans
maintenant, le club a fortement misé sur la vente de maillots, en s’essayant à des designs plus
originaux, plus novateurs. On pensera notamment au succès du maillot rose commercialisé
5
l’année dernière. Celui-ci apparaissant plus comme un effet de mode qu’un réel signe
d’affection. La cible visée était donc très large et aura permis l’écoulement en grande quantité
de modèles.
Max Guazzini va donc, pour faire du Stade Français ce qu’il est aujourd’hui utilisé 2
outils essentiels au développement de toute entreprise. Le premier d’entre eux est la
communication. En effet, dans un monde de médias tel que celui où nous évoluons, il est
presque impossible de faire connaître un produit, une entreprise sans communiquer. Et toute
la problématique des dirigeants va consister à valoriser grâce à cette politique de
communication les « avantages » du Stade Français par rapport à ces concurrents directs,
notamment le Paris Saint Germain qui est de par sa proximité géographique le principal rival.
Et pour ce faire, tous les moyens sont bons : écrans publicitaires sur les chaînes de télévision,
affichage sur les murs des villes, prospectus, ou encore mailing. C’est d’ailleurs grâce à la
multiplication des modes de communication que les entreprises se mettent à communiquer de
plus en plus. Mais paradoxalement, bien que les modes de communication se soient
multipliés, il apparaît comme de plus en plus difficile de mettre en place une communication
précise et efficace. Ainsi, bien souvent, celle-ci se met en place de façon intuitive, empirique.
La stratégie est d’autant plus difficile à mettre en place qu’il n’est pas toujours évident pour
l’entreprise de distinguer communication formelle (organisée, voulue) et informelle (qui peut
être engendrée par d’autres actions marketing). Ainsi, on peut définir la communication
comme « l’ensemble des signaux émis par l’entreprise en direction des différents publics,
c’est-à-dire auprès de ses clients, distributeurs, fournisseurs, actionnaires, auprès des pouvoirs
publics et également vis-à-vis de son propre personnel. » (J.J. Lambin). Toute la difficulté de
la mise en place de la stratégie de communication du Stade Français réside dans le fait que ce
n’est pas une entreprise comme les autres. Max Guazzini, à son arrivée à la tête du club a du
s’adapter pour faire face à un nouvel environnement qu’il ne connaissait pas forcément. On ne
communique en effet pas de la même façon sur une station de radio et une association
sportive.
Ensuite, le deuxième levier utilisé par le club pour se développer, économiquement
parlant, est le marketing. Après avoir mis en place une politique de communication assez
globale, visant à se faire connaître par le plus grand nombre, le Stade Français va mettre en
œuvre une stratégie marketing assez ciblée, visant à attirer différentes populations bien
identifiées grâce à une politique de communication efficace. Une politique dite de marketing
6
différencié va être développée. La première étape cette stratégie est de procéder à une
segmentation. On va ainsi pouvoir précisément identifier différents groupes homogènes de
consommateurs afin de pouvoir s’adapter au mieux à leurs désirs. Plusieurs groupes vont
pouvoir être ainsi repérés : les connaisseurs, les novices, les femmes… Un marketing–mix va
pouvoir être développé pour chaque segment identifié. Des produits dérivés bien spécifiques
seront ainsi commercialisés, dans le but de répondre à la demande de chaque segment ou de
susciter une demande chez certains d’entres eux.
De cette façon, on peut espérer une
adaptation maximale aux besoins des consommateurs et donc une hausse globale du niveau
des ventes. Par exemple pour les femmes, le Stade Français a commercialisé un calendrier
devenu aujourd’hui très célèbre, où apparaissent des joueurs de rugby assez dénudés. Le club
a ainsi pu tirer parti de l’intérêt grandissant des femmes pour le rugby à des fins
commerciales. De la même façon, la création et la commercialisation d’un maillot du Stade
Français de couleur rose a été un grand succès. Mais bien souvent, ce ne sont pas les fans du
club qui l’ont acheté, mais plutôt des consommateurs qui recherchent un effet de mode,
trouvent le maillot « fashion », et l’achète ainsi plus pour des raisons purement esthétiques
que pour revendiquer une affection pour le club. Les 2 produits cités précédemment ont été
les dernières années « les produits phares » de la large gamme de produits dérivés
commercialisés par la marque Stade Français et attestent bien d’une politique de marketing
efficace et bien pensée.
Le Stade Français doit donc son formidable développement des 15 dernières années à
l’excellente stratégie de communication mise en place par la présidence du club, afin de le
faire connaître et aimer du grand public. Puis, par la suite, le club a capitalisé sur sa notoriété
grandissante pour mettre en œuvre une stratégie marketing qui lui a permis de récolter les
fruits de sa reconnaissance médiatique. On peut donc se demander qu’est ce qui caractérise la
politique de communication et la stratégie marketing menée par le Stade Français depuis le
début des années 1990 ? À quoi est du sa réussite ?
Pour répondre à ces questions nous nous efforcerons de mettre en place une
méthodologie d’étude rigoureuse.
Tout d’abord, notre réflexion s’appuiera sur plusieurs ouvrages traitant de la
communication, du marketing du sport ou encore du sponsoring. Ainsi, on pourra poser de
façon précise un cadre théorique. Cela permettre également de pouvoir définir avec exactitude
certains termes relativement importants dans la construction de notre raisonnement (les
7
ouvrages utilisés seront cités dans une bibliographie). Ensuite, pour transposer le cadre
théorique posé dans les faits, nous mènerons une étude documentaire exploratoire afin de
capter une large partie des articles écrits dans les dernières années sur la politique cde
communication et la stratégie marketing du Stade Français. La presse est ici la seule façon de
pouvoir obtenir des informations sur notre sujet dans la mesure où aucun ouvrage faisant
référence en la matière n’a à ce jour été édité.
Notre cadre théorique va se baser sur des ouvrages traitant de la communication et du
marketing. Cela nous permettre ainsi de définir les concepts de base requis pour mener à bien
cette étude. Ces ouvrages nous permettront par exemple de mieux définir des concepts tels
que le marketing-mix, le positionnement, le ciblage ou encore la segmentation qui sont
essentiels à la bonne compréhension d’un politique marketing. Nous allons par ailleurs nous
servir dans notre analyse de différents modèles tels que le modèle SWOT, pour mieux
comprendre l’environnement auquel doit faire face le Stade Français. S’agissant d’une
association sportive, nous allons utiliser une variante de ce modèle, le « modèle d’Ansoff
appliqué aux clubs sportifs ». L’analyse de la marque Stade Français nécessitera par ailleurs
l’utilisation du « prisme de l’identité » de la marque théorisé par Kapferer.
Cette étude va donc s’appuyer sur divers concepts que nous tacherons d’expliquer au
mieux, ainsi que sur l’analyse du club à travers différents modèles théoriques que nous nous
efforcerons d’appliquer de façon plus pratique au sujet auquel nous nous intéressons.
L’état des lieux de la littérature consacrée à la gestion des clubs sportifs semble
montrer que le sujet intéresse aujourd’hui bon nombre d’auteurs. Plusieurs ouvrages
s’intéressant au management du sport, au marketing du sport ou encore à la communication
du sport peuvent ainsi être recensés. L’édition mai/juin 2004 de la Revue Française de
Gestion consacre même tout un dossier à la gestion du sport.
Cette étude se basera sur plusieurs ouvrages auxquels Gary Tribou a contribué. Cet
auteur s’est en effet beaucoup penché sur le sujet. Il est par ailleurs maître de conférence et
dirige un master de marketing et de gestion du sport.
De plus, le contact a été pris avec un bloggeur ayant obtenu un master en marketing et
communication à l’Institut Supérieur du Commerce de Paris. Son mémoire était d’ailleurs
consacré au « Marketing sportif au service de l’entreprise ». La lecture de son mémoire,
l’échange de mails a pu m’apporter quelques pistes à suivre dans l’élaboration de cette
analyse.
8
Ainsi, notre réflexion va s’élaborer autour de 2 grandes parties.
Dans la première, nous nous efforcerons de caractériser la stratégie de croissance du
club. Comment le Stade Français a-t-il pu passer si rapidement de l’anonymat le plus complet
à une réussite si impressionnante. Pour ce faire, nous étudierons son développement à travers
plusieurs étapes. Tout d’abord, nous verrons que la croissance, la réussite du club passe tout
d’abord par l’obtention de résultats sportifs probants. Ce sont les résultats qui vont donner au
club de la visibilité sur la scène nationale, c’est ce qui va servir à faire connaître le Stade
Français. Ensuite, nous analyserons la politique de sponsoring, de partenariats entreprise par
le club à partir de 1997, avec pour objectif de développer le club économiquement, en
injectant des liquidités dans les caisses, de capitaliser sur leur notoriété grandissante. Puis,
nous verrons que cette notoriété n’aurait jamais pu être acquise si rapidement sans la politique
de communication mise en place par la présidence du Stade Français.
Dans une seconde partie, nous tenterons d’expliquer comment le club a su tirer profit
de sa notoriété pour devenir une véritable « machine commerciale ». Dans cette optique, nous
allons tout d’abord nous intéresser de plus près à la stratégie marketing que mène le Stade
Français depuis une dizaine d’années. Nous verrons en quoi elle a contribué à l’essor du club,
quelles sont les originalités de cette politique. Pour cela, nous analyserons ce que l’on pourrait
appeler la « marque Stade Français » pour voir quels types de produits sont commercialisés, et
pour quels publics ils le sont? Enfin nous comparerons le modèle de réussite sportive du club
de rugby à un autre modèle de réussite sportive, mais cette fois ci dans le milieu du football :
l’olympique Lyonnais.
9
I/ la stratégie de croissance du Stade Français
Avant de devenir l’un des clubs de rugby les plus reconnus sur la scène nationale, le
Stade Français a traversé une période noire. Ainsi, pour pouvoir se développer
économiquement et devenir une véritable entreprise, le club à dans un premier temps du se
distinguer par des résultats sportifs probants. Comment en effet peut on imaginer
commercialiser et vendre des produits dérivés concernant un club qui végète dans les
profondeurs du classement des divisions secondaires ?
Une fois que le club aura acquis une certaine notoriété, une crédibilité de par ses
résultats sportifs, il s’agira alors de le faire croître en se dotant d’une structure financière
solide. Dans cette optique, le club va se mettre à la recherche de partenaires, de sponsors
susceptibles de lui apporter rapidement les financements nécessaires à la croissance
économique du club
Enfin, pour asseoir définitivement la notoriété du club, il va falloir le faire connaître et
le faire aimer. C’est pour cela que des grande campagnes de communication vont être menées
par les dirigeants du Stade Français. Cette politique va prendre diverses formes et nous
verrons qu’elle va s’avérer payante.
10
1.1. Le développement sportif du club
Quand en 1993 Max Guazzini devient président du Stade Français, le club végète dans
les profondeurs du classement de la 4ème division nationale. Il ne reste alors au club qu’un
lointain passé glorieux (huit titres nationaux entre 1893 et 1908). Les matchs n’attirent par
conséquent que quelques dizaines de passionnés dans les tribunes du stade Jean Bouin.
« Nous deviendront grands » déclarait à l’époque le président dans les colonnes des
quotidiens sportifs. Au départ, peu de personnes croyaient à ce projet qui paraissait
complètement fou de ramener le club parmi l’élite du rugby français.
De plus, beaucoup s’interrogeaient sur les capacités de cet homme d’affaires à diriger
un club de rugby. Mais son savoir-faire de gestionnaire acquis au sein du groupe NRJ (dont il
est le co-fondateur) mais aussi et surtout son argent (il détient à l’époque l’une des plus
grosses fortunes de France) vont contribuer à sortir peu à peu le club de l’anonymat le plus
complet dans lequel il se trouvait. Il va tout d’abord recruter des hommes compétents.
Bernard Laporte2 va être choisi comme entraîneur. Bien que n’étant pas aussi médiatisé qu’il
peut l’être aujourd’hui, il jouissait déjà en 1992 d’une bonne réputation dans le monde du
rugby. Ensemble, ils vont élaborer une politique de recrutement ambitieuse, en allant chercher
selon leurs propres termes « des joueurs revanchards ». Le club va ainsi miser sur des joueurs
plus âgés, ayant déjà évolué dans les divisions supérieurs et en quête d’un dernier défi, pour
accompagner les joueurs déjà présent dans l’effectif, moins expérimentés. Ils vont ainsi
séduire toute une équipe de joueurs talentueux motivés par le défi sportif ambitieux qui leurs
était proposé.
Cette stratégie ne tarde pas à porter ses fruits. Dès 1995, le club accède à la poule B3.
Puis un an plus tard, le Stade Français se retrouve en poule A24. L’année qui suit, le club
décroche enfin son billet pour le TOP 165. L’année de l’accession au TOP 16, le Stade
Français remporte le Bouclier de Brennus6 plus de 90 ans après son dernier sacre. Le pari de
Max Guazzini était donc en passe d’être réussi. Il décidé alors de se fixer des objectifs plus
élevés en tentant de remporter la Coupe d’Europe. Malgré 2 finales perdues en 2001 et en
2005, cet objectif n’est toujours pas atteint et reste le prochain grand défi du club afin de
pouvoir acquérir une vraie légitimité sur la scène internationale.
2
Ancien entraîneur de l’équipe de France de rugby et actuel secrétaire d’Etat aux sports.
L’équivalent de la 3ème division.
4
L’équivalent de la 2ème division.
5 ère
1 division nationale.
6
Trophée remis au champion de France de rugby.
3
11
Le club a donc connu une ascension sportive fulgurante en moins d’une dizaine
d’années. Cette réussite est avant tout due au savoir faire de son président Max Guazzini qui a
su imposer sa vision, son goût du défi à l’ensemble des acteurs du club. Mais pour arriver à un
tel niveau de performance en si peu de temps, le club à dû également trouver des sources de
financement externes. Le sport moderne étant aujourd’hui dominé par l’argent, le club a du se
procurer des fonds pour avoir des moyens à la hauteur de ses ambitions. Nous allons donc
voir comment le club a réussi à dégager une manne financière pour pouvoir investir et
continuer de se développer.
1.2. La politique de sponsoring du Stade Français
Nous allons ici nous intéresser aux activités de sponsoring du club de rugby francilien.
Dans un premier temps nous allons poser les bases théoriques relatives au domaine du
sponsoring pour ensuite pouvoir analyser plus particulièrement le cas du Stade Français, les
bénéfices retirés de ces activités, les raisons d’un tel engouement des sponsors pour ce club.
1.2.1. Le sponsoring : une activité en évolution depuis les années 1990
1.2.1.1 L’évolution économique
Pour grandir et devenir un club d’envergure, toute entreprise doit disposer de moyens
financiers importants. Cela fut une des grandes problématiques du Stade Français depuis la fin
des années 1990 : comment se doter d’une capacité financière à la hauteur des ambitions que
le président Max Guazzini a pour le club ?
Aux vues de l’impact économique que le sponsoring a sur le milieu du sport en
général, la signature de contrats avec de nouveaux partenaires est apparue comme une
évidence. En effet selon une étude réalisée par TNS Sport pour le journal « Les Echos », les
activités de sponsoring auraient généré en France au cours de l’année 2004 un chiffre
d’affaires de près de 4 milliards d’euros7. Au niveau mondial, on estime ce chiffre à près de
30 milliards. Et les perspectives semblent aller vers un accroissement de ces valeurs dans les
années à venir. Les investissements en sponsoring ont en effet connu une croissance très
7
Les Echos du 15/10/2004.
12
importante lors des années 1990 (près de 10% de hausse par an), bien que ce phénomène soit
à nuancer selon les pays ou encore selon les disciplines.
1.2.1.2Une évolution des méthodes
Au début des années 1990, par sponsoring on entendait l’activité qui consiste à se
focaliser sur la valorisation de l’exposition de la marque. Il s’agissait plus de faire apparaître à
tout prix la marque, le logo à travers différents supports (banderoles, maillots, dossards).
Progressivement, on est passé à une logique quelque peu différente qui consiste en une
« activation de la marque auprès des personnes s’intéressant à l’évènement ». On va à présent
chercher à distraire, à donner du plaisir aux consommateurs, à les tenir informer sur les
évolutions de la marque. Le sponsoring va devenir une activité de plus en plus stratégique. On
va chercher à présent à évaluer les résultats des politiques de sponsoring menées, à trouver de
nouvelles opportunités intéressantes en relation avec la stratégie globale de l’entreprise ainsi
qu’à mettre à jour des synergies entres l’activité de sponsoring et les autres activités de
l’entreprise (le marketing notamment).
Le sponsoring est par ailleurs très présent dans le monde du sport. Certaines marque
plutôt que de sponsorisé un club en particulier vont même aller jusqu’à sponsoriser un
évènement sportif auquel elles vont prêter leur nom. Louis Vuitton organise par exemple des
régates, la « Coupe Louis Vuitton », l’une des plus prestigieuses au monde. Cela est bénéfique
en terme d’image, car cela contribue à véhiculer une image de luxe, de prestige qui ne peut
qu’avoir des retombées positives sur une marque comme nous le verrons plus loin.
1.2.2. Les fondements du sponsoring
12.2.1. Les caractéristiques de l’échange
L’activité de sponsoring va se caractériser par un processus d’échanges. Il va s’agir
pour chacune des parties qui s’engagent d’obtenir quelque chose en contrepartie de cet
engagement. Cela va supposer plusieurs conditions :
1. l’organisation en recherche de sponsors doit concevoir une offre de sponsoring en
rapport avec les droits qu’elle possède, afin que tout problème au niveau juridique
puisse être évité
2. l’offre doit avoir une valeur pour le sponsor potentiel
13
3. l’organisation doit être en mesure de délivrer la prestation spécifiée lors de l’échange
4. le sponsor potentiel doit être libre d’accepter ou de refuser l’offre (que cela porte sur
l’échange d’un produit ou d’un service)
Ces relations entre le sponsor et l’organisation propriétaire des droits peut être modélisés par
le schéma suivant :
Organisation
propriétaire
des droits
Echange et transaction
Capacité à délivrer
un service
conforme à l’offre
proposée
Sponsor
Liberté d’accepter
ou de refuser
P. Chantelat, La professionnalisation des organisations sportives. Nouveaux enjeux,
nouveaux débats, Paris, L’Harmattan, 2001
Il va donc falloir que la relation entre le sponsor et l’organisation qui détient les droits
s’organise afin que cette coopération puisse être bénéfique aux deux parties. Cette démarche
peut être mise en évidence par 5 points8 :
1. les diverses étapes du processus pour les 2 parties en présence. Cela va de l’analyse et
du diagnostic à l’élaboration d’une stratégie qui va être conjointement planifiée,
exécutée et contrôlée
2. la définition de l’objectif poursuivi
3. l’aire couverte
8
Kotler et Dubois. 1992.
14
4. le contexte concurrentiel
5. la valeur aussi bien économique que sociale de l’échange qui va être réalisé entre les 2
parties
1.2.2.2. Les sponsoring en tant qu’élément d’un système global
Le sport, en se développant s’est institutionnalisé, s’est doté de règles et de règlements
qui vont avoir un impact sur les différentes parties prenantes. Dans ce cadre, le sponsoring
ne va plus se définir comme une activité bilatérale entre une organisation et un sponsor.
C’est en réalité une relation multilatérale entre les différentes parties impliquées (sportifs,
clubs, collectivités territoriales…). Il va donc falloir prendre en compte l’existence de ces
différentes parties prenantes qui vont révéler des interdépendances.
Dans notre cas, les interactions entre l’organisation propriétaire des droits, à savoir le
Stade Français et les médias, notamment télévisés (qui sont une partie prenante en tant que
sponsor et diffuseur des évènements) vont être prépondérantes. C’est en effet parce que le
rugby devient un sport de plus en plus populaire et le Stade Français un des clubs préférés
des français que Canal + (qui détient les droits de retransmission du TOP 14 depuis 1998)
va décider de diffuser les matches du club plutôt que ceux d’un autre. Ainsi les 2 parties
vont y trouver leur compte. Canal + va pouvoir attirer plus de téléspectateurs et donc
augmenter ses ventes d’abonnements et ses recettes publicitaires par la même occasion.
En contrepartie, le Stade Français va voir sa présence médiatique augmenter encore un
peu, et donc sa popularité auprès du public Français va continuer de croître.
1.2.2.3. Les objectifs du sponsoring
Le sponsoring peut apparaître comme une activité essentiellement mercantile, tant
pour l’entité sponsorisée que pour le sponsor, dont le seul but serait d’augmenter les ventes
d’un produit ou d’un service. Bien que cette conception ne soit pas totalement erronée, les
activités de sponsoring peuvent par ailleurs répondre à d’autres objectifs. Ces objectifs sont
explicités par F. Ohl dans un ouvrage intitulé Marketing du sport.9
9
Michel Desbordes, Fabien Ohl, Gary Tribou, Marketing du sport, Paris, Editions Economica, 2001, 513p.
15
Le sponsoring de crédibilité
Le « sponsoring de crédibilité » va en effet être le premier des objectifs de ce genre
d’activités. La marque qui va s’associer à l’organisation propriétaire des droits va vouloir
faire la preuve de la fiabilité, de la qualité, de la performance de ces produits. Ce sont en
général les marques qui sont des « fournisseurs officiels » qui ont ce genre d’objectifs. Dans
le cas du Stade Français, à travers son activité de sponsoring, Adidas va vouloir démontrer
tout son savoir faire en tant qu’équipementier sportif. Etant donné que certains joueurs sont
déjà sous contrat avec d’autres marques qui leur fournissent en général les chaussures à
crampons, Adidas à décider de faire valoir son savoir faire à travers les maillots fournis au
club. La marque fut en effet une des premières à innover dans la conception des maillots, en
étant la première à utiliser de nouvelles matières plus légères, plus moulantes afin d’améliorer
les performances des joueurs. Elle a donc pu démontrer toute l’étendue de son savoir faire
technique à travers son action de sponsoring avec le Stade Français.
Le sponsoring de notoriété
Le fait de sponsoriser un club ou une marque peut en effet avoir des retombées
positives en terme de notoriété pour le sponsor. La notoriété correspond à la renommée, la
diffusion, la connaissance d’une marque ou d’un produit dans sa population. « Au sens strict,
on peut considérer la notoriété comme le fait d’être reconnu ou cité, indépendamment des
composantes qualitatives de l’image10 ». Il existe 2 types de notoriétés. La notoriété
spontanée, qui va correspondre au pourcentage de personnes capables de citer la marque
spontanément dans l’univers du produit considéré (le but étant d’être le « top of mind », c'està-dire la marque la plus souvent citée en première position). On la distingue de la notoriété
assistée, qui va cette fois correspondre au pourcentage de personnes capables de citer la
marque à partir d’une liste relative à une catégorie de produit. Ainsi, en s’associant à un club
de l’envergure du Stade Français, les sponsors sont pratiquement assurés de retombées très
importantes en terme de notoriété. C’est ce qui va permettre au club de négocier des
compensations financières importantes pour tout sponsor voulant associer son image à celle
du club. Grâce à cette volonté de la part de certaines marques de vouloir acquérir plus de
10
Citation de Serraf, sociologue du sport, utilisé par : Gary Tribou, Sponsoring sportif, Paris, aux éditions
Economica, 2004.
16
notoriété, le Stade Français a dans les dernières années enregistré la signature de plusieurs
contrats importants de sponsoring avec des entreprises renommée telles que l’assureur Axa ou
l’opérateur de téléphonie Orange.
Le sponsoring d’image
L’image peut être définie ici comme un ensemble d’associations faites par le
consommateur entre une marque et un évènement. Les sponsors vont ici chercher à
s’approprier certains éléments de la marque Stade Français susceptibles d’être bénéfique pour
eux en terme d’image. En effet, on sait que l’image de la marque peut avoir un impact direct
sur la décision d’achat et par conséquent sur les ventes. Les sponsors vont donc chercher à
renforcer leur image en transférant des éléments de l’entité sponsorisée. D’autre part, des
efforts pourront être faits pour renforcer les associations entre le sponsor et l’entité
sponsorisée. Ainsi, la marque sponsor sera directement associée à l’image de l’entité
sponsorisée, en l’occurrence le Stade Français. Tous les consommateurs ayant une image
positive du club seront ainsi susceptibles d’avoir une image plus positive des sponsors du
club, influençant éventuellement la décision d’achat. Il est donc nécessaire de réaliser un
diagnostic stratégique avant de mener une action sponsoring. C’est ce que Ferrand et Pagès on
chercher à théoriser à travers le schéma présenté ci-dessous. Il s’agit dans un premier temps
d’analyser l’image du sponsor et de la marque sponsorisable. Puis à partir de ce diagnostic, le
sponsor va devoir élaborer sa stratégie. Il peut décider de transférer certains éléments de
l’entité sponsorisable, il peut également décider de renforcer son image de marque à travers
différentes actions marketing. Ensuite, suite à l’analyse de l’identité du sponsor, celui-ci va
pouvoir juger de la pertinence de son association avec l’entité sponsorisable. Il va évaluer
l’intérêt de sponsoriser cette marque, ce que cela peut lui apporter en terme d’image, de
crédibilité. Cela peut se faire par exemple par l’élaboration d’un « focus groupe » relatif à
l’association entre le sponsor et l’entité. On pourrait ainsi recueillir l’avis de consommateurs
sur la pertinence de l’association ou encore sur les traits d’image qu’il serait judicieux de
transférer.
17
Image entité
sponsorisable
Diffusion et
crédibilité de
l’association
Evaluation et
diagnostic
Image du
sponsor
Stratégie de
renforcement
et/ou de transfert
Identité du
sponsor
Source : Alain Ferrand, Luigino Torrigiani, Andreu Camps i Povill, Sport et
Sponsoring, Paris, INSEP publications 2006
1.2.3. Pourquoi le Stade Français attire t-il tant de sponsors ?
Le Stade Français est un club qui attire une multitude de sponsors. Il en compte
aujourd’hui plus d’une dizaine. La signature de contrats de sponsoring est plutôt
avantageuse car cela lui permet de disposer de ressources financières importantes contre
un « simple prêt de son image ». Au cours de la saison 2006/2007, près d’un tiers des
revenus du club provenaient des divers contrats signés avec les sponsors, comme le
montre le schéma suivant11
11
Daniel Rovira, Le Stade Français c’est aussi une entreprise, dans L’Entreprise n°260 (octobre 2077), p.64.
18
On va donc chercher à expliquer pourquoi tant de marque désire associer leur nom,
leur image à celle du Stade Français.
1.2.3.1 le sponsoring : une dynamique positive
L’analyse de l’historique des activités de sponsoring du Stade Français nous
démontre en effet que ce phénomène s’inscrit dans une sorte de dynamique. Au départ, il
était assez difficile pour le club de trouver des sponsors de poids. Le club devait donc se
contenter à l’époque de sponsors régionaux (mairie de Paris) et compter sur le soutien
financier de son président. Mais au fur et à mesure que le club progressait sportivement et
commençait à faire parler de lui, les sponsors ont afflué. Le premier sponsor d’envergure à
avoir associé son nom à celui du club est Brother. Cette entreprise spécialisée dans les
activités d’impression et de télécopie va décider en 1999 de signer un contrat de
partenariat avec le Stade Français afin que la marque apparaisse sur le maillot du club. Et
ce fut le premier d’une longue série.
La même année, Moet Hennessy Wine Estates décide également de sponsoriser le club
et de lui fournir des vins et spiritueux pour les fêtes d’après matches. En 2001, c’est au
tour du constructeur automobile Renault de passer un accord avec le club francilien. C’est
cette même année que le géant allemand Adidas devient l’équipementier du club. L’année
suivante, ce sont RSI (entreprise spécialisée dans le travail intérimaire) et le CA LYON
qui vont s’associer également au Stade Français.
19
Puis en 2004, l’opérateur téléphonique Orange et l’assureur AXA vont venir « grossir
les rangs » de l’équipe des sponsors du club. Plus récemment, en 2006, Phone House et
Sony Ericsson sont devenus partenaires pour un projet spécifique : la création et la
commercialisation d’un téléphone portable.
1.2.3.2 Une recherche de positionnement
Les entreprises qui vont sponsorisées un évènement, une marque, un club vont
chercher à se donner une image positive auprès des consommateurs, à communiquer sur leur
positionnement. Or, « le sport en tant que média est le seul support qui entretient avec son
audience une aussi forte relation émotionnelle, ce qui fait de lui in vecteur de communication
sans équivalent pour les marques »12. Ainsi, le fait de sponsoriser un club, un évènement
sportif va s’avérer être particulièrement intéressant en terme d’image pour les entreprises
sponsors. C’est d’autant plus vrai avec le Stade Français, dans la mesure où on associe bien
souvent au rugby des valeurs de combativité, d’abnégation mais aussi de fête. Les marques
par cette occasion affinent leur positionnement et vont pouvoir ainsi se démarquer de leurs
concurrents. Au fur et à mesure qu’il se développait et gagnait en popularité, le Stade Français
est devenue une cible privilégiée des entreprises cherchant à trouver un partenaire qu’elles
pourraient sponsoriser. D’où la multiplication des contrats de sponsoring ces dernières années.
Le Stade Français compte aujourd’hui plus d’une dizaine de sponsors parmi lesquels de
grandes multinationales telles que Sony Ericsson, Renault ou encore Adidas. Nous
évoquerons plus loin les liens commerciaux que vont tisser les partenaires et les différentes
offres commerciales qui seront mises en place suite à ces partenariats.
1.2.3.3 La création d’un lien entre le consommateur et la marque
Par l’association de son image à un évènement sportif, le sponsor peut espérer créer un
lien affectif entre sa marque et le consommateur. En effet, l’évènement sportif se caractérise
comme étant avant tout « un fait social fort, lieu où des hommes et des femmes se rassemblent
12
Jean Claude Darmon, site Internet www.darmonsport.com, mai 2002.
20
dans une sorte de célébration collective pour assister à un spectacle sportif ou culturel »13. La
participation à un évènement sportif va donc contribuer à créer une sorte de lien social entre
les individus présents dans le stade. Pour le sociologue Bourdieu, « les évènements sportifs
ont un ancrage socioculturel possédant une identité qui leur est propre »14. Dans cet optique,
l’évènement sportif va apparaître comme un facteur de différenciation, un vecteur de valeurs
et de représentations sociales. Or, l’émotion étant une des composantes principales qui
poussent les spectateurs à assister à un évènement sportif, celui-ci va réunir toutes les
conditions optimales pour que se produise ce que Rimé appelle « la contagion
émotionnelle »15, la création de « communautés affectuelles ». Ainsi, en figurant comme
sponsor du club lors d’un évènement sportif, la marque va rester ancrée dans l’esprit des
spectateurs et sera directement associée aux émotions vécues lors de l’expérience. Le
sponsoring va donc apparaître comme un bon moyen de créer des associations entre une
marque et les consommateurs en les associant à des expériences vécues, contribuant à donner
une image positive de la marque. Le sponsoring est donc un outil de positionnement très
efficace à la disposition des marques à travers la création d’un lien affectif.
1.2.4. Les dangers du sponsoring
Bien que comme nous l’avons vu précédemment le sponsoring peut être une
opportunité très intéressante pour des marques voulant accroître leur notoriété, renforcer leur
image, se positionner dans l’esprit des consommateurs, cette activité peut parfois se révéler
avoir des effets plutôt mitigés. En effet, comme nous l’avons vu, les actions de sponsoring
sont basées sur une association de 2 marques, de 2 images. Ainsi, le succès de l’action de
sponsoring va grandement dépendre des résultats de l’entité sponsorisée. Dans le cas du Stade
Français, s’agissant d’une organisation sportive, cela va dépendre grandement des résultats
obtenus sur le terrain. Des mauvaises performance pourraient conduire à une certaine
dégradation de l’image du club et donc par conséquent celles de ses sponsors. On peut
imaginer les conséquences d’une descente en 2ème division sur les recettes en sponsoring pour
le club. Les sponsors ne trouvant plus aucun intérêt à l’association avec le Stade Français,
13
Citation de Piquet, sociologue du sport, tiré de : P. Duret, Sociologie du sport, Paris, Armand Collin, 2001.
P. Bourdieu, Comment peut on être sportif ?, Revue Française du Marketing, 138, 1992, p.8-16.
15
Sociologue français, extrait de : Patrick Bouchet et Claude Sobry, Management et marketing du sport : du
local au global, aux éditions Presses Universitaires du Septentrion, 2005.
14
21
dont l’image serait en décalage avec la leur, décideraient sûrement de rompre les contrats les
unissant.
On prendra pour exemple l’échec de l’équipe de France de football à la Coupe du
Monde 2002. À l’époque championne du monde et d’Europe, les sponsors s’arrachaient tout
ce qui pouvait toucher à cette équipe. Mais une élimination prématurée (dès le premier tour)
avec de piètres prestations mis les sponsors dans une position délicate. Alors qu’ils voulaient
renforcer leur image en s’associant à une équipe qui symbolisait des valeurs d’abnégation, de
réussite, de victoires, ils ont du faire face à un retournement de la situation en leur défaveur
suite à l’élimination. Les sponsors ont dû se confronter à un décalage entre l’image qu’ils
voulaient véhiculer et l’image réelle. Certains d’entre eux ont d’ailleurs décidé de cesser la
diffusion de spots publicitaires qui étaient censés être diffusés tout au long de la compétition.
Ce fut notamment le cas de Adidas, dont la diffusion du spot ayant pour slogan « la victoire
est en nous » à du jour lendemain été stoppée à cause justement de ce décalage d’image.
La situation vécue par le PSG lors de la saison 2007-2008 semble aussi parfaitement
illustrer une des facettes des « dangers du sponsoring ». L’image du club tend en effet à se
dégrader depuis plusieurs années, à cause notamment de l’influence des groupes de pseudo
supporters (Boulogne Boys). Ces groupes sont bien souvent auteur de violences en marge des
matches, d’affrontements avec des groupes de supporters rivaux. Cette dégradation de l’image
du club semble atteindre son apogée cette année avec ce que la presse a appelé « l’affaire de
la banderole ». Lors de la finale de la Coupe De France de football, ces supporters ont déployé
une banderole géante à l’attention des supporters du RC Lens, l’adversaire du soir. On pouvait
y lire « pédophiles, chômeurs, consanguins : bienvenue chez les ch’tis ». Cette affaire qui a
provoqué un véritable tôlé médiatique a eu de lourdes conséquences. Tout d’abord le club
s’est vu exclure de la compétition pour la saison à venir. Mais plus grave encore pour le club,
certains sponsors, soucieux de leur image, ont décidé de rompre leur contrat avec le club.
C’est notamment le cas pour Louis Vuitton, qui était pourtant un des partenaires historiques
du club. Mais jugeant que l’association de son image à celle du club parisien pouvait lui être
préjudiciable, ce sponsor a préféré se désengager.
Le sponsoring a donc permis au club de croître grâce a la manne financière que
représente la signature de nombreux contrats avec notamment plusieurs firmes
multinationales (Renault, Adidas, Orange…). Le sponsoring est d’ailleurs aujourd’hui
l’activité qui génère le plus de recettes au sein du club. Le Stade Français, qui bénéficie d’une
22
image assez attractive auprès du public Français parvient à attirer une multitude d’entreprises
voulant associer leur image à celle du club. Les sponsors y trouvent bien évidemment une
contrepartie. Ceux-ci vont par le biais des actions de sponsoring renforcer leur image auprès
du public, affirmer leur positionnement et pouvoir ainsi augmenter les ventes de leurs produits
ou services. Mais cette activité peut par ailleurs s’avérer dangereuse dans la mesure où elle est
basée sur une performance sportive, qui est par définition incertaine.
Malgré tout, le Stade Français attire comme nous venons de le voir de plus en plus de
sponsors. Cela est principalement dû à la grande notoriété du club auprès du public national.
Nous allons maintenant tâcher de comprendre comment ce club quasi inconnu il y a une
quinzaine d’années a réussi à devenir si populaire.
1.3. La politique de communication
L’une des grandes forces du Stade Français est d’avoir su se faire connaître tés rapidement du
grand public. Les dirigeants ont en effet réussi à développer une politique de communication
efficace visant l’adhésion du public francilien puis du public Français à la marque « Stade
Français »
1.3.1. Définition d’une politique de communication
1.3.1.1. La définition de la cible
Le principal objectif d’une politique de communication est d’acquérir une certaine
notoriété auprès du public visé. Il va donc dans un premier temps s’agir de définir une cible
afin de ne s’adresser qu’à une frange de la population que l’on estime susceptible d’être
intéressée par l’offre qui lui sera faite. Ainsi, les dirigeants du Stade Français vont avoir une
vision très pragmatique dans la définition de cette cible. Ils vont décider dans un premier
temps de s’adresser à un public géographiquement proche du club, c'est-à-dire la population
francilienne. Il n’apparaîtrait en effet pas très pertinent de communiquer dans un premier
temps à l’échelle nationale. Le rugby étant à la fin des années 1990 un sport encore en quête
de popularité. Seul les régions du sud de la France sont déjà ancrées dans ce que l’on peut
appeler la « culture rugby ». Mais l’attachement des supporters au club de leur région est
23
tellement fort qu’il serait totalement inutile de communiquer auprès de ce public sur un autre
que le leur. Il va ainsi être décidé de s’adresser à une population majoritairement présente en
Ile de France. La segmentation ne va pas ensuite être affinée par tranche d’âge ou encore par
sexe, l’offre se voulant être destinée à tous. Aucune frange de la population ne va être exclue
de cette cible, l’objectif étant de populariser un sport encore un peu marginal. Il s’agit donc
d’y faire adhérer le plus grand nombre. Mais cette cible, qui au départ était définie de façon
géographique s’est ensuite étendue plus largement.
1.3.1.2 Une cible en mouvement
Mais l’évolution de la cible visée va de pair avec l’évolution de l’image que va
chercher à véhiculer le Stade Français. Le but de la politique de communication menée par le
club étant de se faire connaître, il va falloir définir une « image de marque » dans laquelle un
grand nombre de personnes pourra se reconnaître tout en veillant à se qu’elle soit différente de
ce que peuvent proposer ses concurrents, c'est-à-dire les autres clubs de rugby « reconnus
médiatiquement » et plus largement les autres associations sportives qui touchent d’autres
domaines que le rugby (essentiellement les clubs de football). Il va dans un premier temps
s’agir de séduire la population francilienne. Le principal concurrent duquel il va falloir se
démarquer est une autre association sportive : le Paris Saint Germain. Le sport roi en Ile de
France est en effet depuis bien longtemps le football. Toute la problématique des dirigeants du
Stade Français va s’articuler autour de la question suivante : « comment intéresser au rugby
une population qui à l’origine est plus tournée vers le monde du football ? ». Les dirigeants
vont tout d’abord chercher à donner une image festive au rugby, qui vient contraster avec la
recrudescence des violences dans les stades de football que l’on commence à observer vers la
fin des années 1990. Ils vont ainsi chercher à donner une image de convivialité, d’un sport
chaleureux qui pourrait réunir toute la famille dans une ambiance de fête. Un « hymne du
Stade Français » va ainsi être choisi chaque année et un single sera commercialisé et
largement diffusé sur les ondes radios et sur les plateaux de télévisions. C’est ainsi à partir de
1998, avec le succès retentissant qu’a connu la reprise de « I will survive »16 de Gloria
Gaynor que l’on va commencer à véritablement entendre parler de ce club. Et très
paradoxalement, c’est au monde du football que l’on doit cet énorme succès. C’est en effet
grâce à la Coupe du monde de football 1998 que cette chanson a bénéficié d’un tel
16
Vendu à plus de 500 000 exemplaires selon l’IFOP.
24
retentissement. Ce titre était en effet chanté par les joueurs de l’équipe de France championne
du monde dans les vestiaires puis après les matchs pour célébrer les victoires. C’est ainsi que
durant l’été 1998 ce titre a été le symbole de la réussite de l’équipe de France de football pour
des millions de Français.
C’est ainsi que, profitant de l’effet Coupe du monde, le Stade Français va acquérir une
certaine notoriété grâce à l’utilisation de la musique comme moyen de communication. C’est
par ailleurs l’effet de mode suscité par cette chanson suite à la Coupe du monde 1998 qui
aura très largement contribué à faire connaître le club et à diffuser cette image festive qui va
devenir en quelque sorte sa marque de fabrique. Mais au fil du temps, l’image du club va
évoluer, elle va s’enrichir à travers d’autres actions de communication qui vont être menées.
1.3.1.3. Les leçons tirées de l’effet « Coupe du monde 1998 »
Cette première grande action de communication ayant été un franc succès, le Stade
Français va réussir à s’attirer la sympathie de la population francilienne qui va par la même
occasion commencer à s’intéresser à ce sport. Ainsi les tribunes vont commencer à se remplir
de plus en plus posant d’ailleurs le problème de capacité du stade sur lequel nous reviendrons
plus tard. Mais la population d’Ile de France semble ne pas avoir été la seule à succomber à
l’effet de mode susciter par le club de Max Guazzini. L’engouement pour le Stade Français va
en effet pouvoir se mesurer à l’échelle nationale. Ainsi, la direction va chercher à capitaliser
sur le « phénomène Stade Français » pour continuer à promouvoir l’image du club sur la
scène nationale.
Mais ils notèrent cependant que ce sport attirait encore une population essentiellement
masculine. Or pendant la Coupe du monde de football 1998, on s’est rendu compte que les
femmes commençaient de plus en plus à montrer un intérêt réel pour le sport. Ainsi, la cellule
de communication du club va chercher à donner une image plus « glamour » au rugby afin
que la gent féminine puisse également s’y intéresser. C’est de cette façon que va naître l’idée
du célèbre « calendrier du Stade Français ». Les joueurs du club vont en effet accepter de
poser, de façon plutôt dénudée (cf. annexe n°2), dans un calendrier qui va ensuite être
commercialisé à grande échelle. Les différents joueurs ayant posés vont par ailleurs se muer
en véritable VRP du club, multipliant les apparitions sur les plateaux télés ou dans la presse
écrite pour faire la promotion de ce fameux calendrier. De plus, une partie des fonds récoltés
par la vente de ce calendrier vont être reversés à des associations caritatives. Ainsi, le club va
25
réussir à féminiser sa cible, en « attirant » la population féminine par l’aspect esthétique de ce
sport bien souvent jugé comme assez rugueux. D’autre part, il va réussir à se donner une
image plutôt positive auprès des Français de par sa participation à des œuvres caritatives.
1.3.2. La communication par l’évènementiel
Nous évoquions précédemment le problème posé par la capacité du stade Jean Bouin,
où évolue habituellement le Stade Français lors de la réception de ces adversaires. Mais c’est
justement de cette contrainte que va naître une des plus brillantes idées de la direction du club,
qui va définitivement asseoir la notoriété du Stade Français. Compte tenu de la vétusté de
cette enceinte (construite en 1925 et rénovée pour la dernière fois il y a de cela plus de 30 ans)
et de sa faible capacité d’accueil, les dirigeants du club vont étudier l’idée d’utiliser des stades
plus grands de la région parisienne pour accueillir les rencontres jouées à domicilie. Deux
possibilités vont ainsi s’offrir aux dirigeants : le Parc des Princes, stade du Paris Saint
Germain ou le Stade de France qui est lui inoccupé et ne sert qu’à de rares occasions (pour
des matchs de l’équipe de France de football ou pour des spectacles divers). Dans un premier
temps, c’est le Parce des Princes qui va être choisi, le pari du Stade de France ayant sûrement
paru quelque peu ambitieux pour une première opération de ce genre.
1.3.2.1 Le premier « essai » au Parc des Princes
C’est ainsi que le 9 septembre 1998, et ce pour la première fois, le Stade Français a
accueilli l’équipe de Castres dans l’enceinte du Paris Saint Germain. Mais à cette occasion,
Max Guazzini a voulu voir les choses en grand. Il faut selon ses propres mots « habiller le
match autant que faire ce peut »17. Il a ainsi voulu créer une véritable atmosphère festive
autour de ce match. Cet évènement s’est accompagné d’une campagne de communication
hors média. Des affichettes de promotion ont ainsi été distribuées dans les rues de la capitale.
Ces affichettes portaient le message « vous êtes nos invitées » (l’entrée au stade étant pour
cette occasion gratuite pour les femmes), montrant clairement la volonté de faire venir les
femmes au stade. Plusieurs joueurs du club ont d’ailleurs prêté leur image à cette campagne
de communication. Pour ce qui est du côté festif de l’évènement, Max Guazzini n’a pas lésiné
sur les moyens, n’hésitant pas a faire venir les « Filles du Moulin Rouge » pour une
17
Le Monde, 9 septembre 1998.
26
représentation exclusive avant le début du match. Pendant les temps morts, des pom pom girls
se chargeaient de divertir le public afin de créer une véritable ambiance, pour que cette
expérience soit vécue comme quelque chose d’unique par les spectateurs. C’est là que se situe
tout l’enjeu du domaine de l’évènementiel : étant donné la concurrence qui se fait de plus en
rude, l’organisateur d’un évènement quel qu’il soit se doit d’être innovant. Il s’agit de
proposer au spectateur un spectacle qu’il ne pourra pas revoir ailleurs, lui faire vivre une
expérience de laquelle il se rappellera longtemps et qui lui donnera envie de revenir si
l’occasion se présente. L’objectif étant de créer une véritable rupture par rapport à l’offre
existante, afin de pouvoir satisfaire au mieux le client, ou le spectateur dans le cas du Stade
Français. C’est en ce sens que l’on peut dire que l’évènementiel peut se définir comme « l’art
de créer, d’innover pour que s’expriment la force et le mouvement »18. C’est pour cela que
l’idée de créer ces évènements autour du rugby fut une des plus grandes réussites du club en
termes de communication. L’évènementiel apparaît en effet comme un outil puissant pour
véhiculer une image, communiquer sur un produit ou une marque. Et on peut dire que le
premier pari de Max Guazzini s’est avéré être un vrai succès puisque plus de 18 000
personnes avaient assisté à ce match, une première en Ile de France.
1.3.2.2 L’importance des médias
De plus, outre la notoriété auprès des spectateurs, qui sont au fil des diverses actions
de communication devenus de plus en plus nombreux et passionnés, ce type d’évènements a
également permis au Stade Français d’acquérir une véritable reconnaissance médiatique. Bien
que le rugby soit le 2ème sport le plus médiatisé en France, il était jusqu’à présent bien loin
du sport considéré comme le « sport roi », c'est-à-dire le football. Mais, grâce à l’organisation
de ces véritables shows, le club a peu à peu commencé à avoir les faveurs des médias. Les
dirigeants du club ont ainsi pu compter sur l’aide de la chaîne privée Canal + (qui devient à
partir de 1998 le nouveau partenaire exclusif du rugby Français) pour organiser et
retransmettre les matchs du Stade Français. Car il ne faut pas oublier que les médias sont les
premiers demandeurs de ce genre de spectacles, bien avant les spectateurs qui ne représentent
qu’une part minoritaire par rapport aux téléspectateurs potentiels. Ceux-ci se placent dans une
logique plus économique que dans une réelle démarche d’accompagnement d’une discipline
sportive dans le but de la promouvoir. L’objectif principal de la chaîne privée Canal + lors de
18
Comité olympique des jeux olympiques de 1998 à Atlanta.
27
l’acquisition des droits télévisuels du TOP 16 était de glaner des parts de marché aux chaînes
concurrentes en faisant de ce sport à la notoriété grandissante une sorte de « produit d’appel »,
afin d’inciter les fans de rugby à s’abonner à la chaîne cryptée. Canal + est en effet la chaîne
qui a la plus large programmation sportive en France. Le volume horaire de diffusion de
sports en tous genres (basket ball, football, golf, rugby…) représente plus de 50% du volume
horaire des six chaînes hertziennes. Le sport est l’argument commercial numéro 1 de Canal +
pour convaincre les abonnés. En moyenne, sur l’année, plus de 3 heures par jour sont
consacrées à la diffusion d’évènements sportifs. C’est pour cela que la présence de Canal + en
tant que partenaire du championnat de France de rugby est prépondérante dans la stratégie de
communication du Stade Français. La diffusion des matchs du club, plus particulièrement
ceux réalisés au Stade de France représente une opportunité unique de se montrer sur la scène
nationale et de toucher une cible beaucoup plus large que les 80 000 personnes qui seront
présentes physiquement au stade pour assister à la rencontre. On peut espérer par ailleurs que
la place accordée aux retransmissions de matchs de rugby augmente considérablement dans
les prochaines années. En effet, les retransmissions réalisent des scores d’audience de plus en
plus probant, avec un record historique pour la rencontre Stade Français-Clermont du 27
octobre 2007 (plus de 30% de parts d’audience19). De plus, les audiences recueillies lors des
matchs de championnat de France de football étant en légère baisse en 2007 (-14%)20, il se
pourrait bien que la chaîne cryptée fasse du rugby son nouveau sport phare, ce qui permettrait
au Stade Français d’être une fois de plus sous les feux des projecteurs.
1.3.2.3 La « fête du rugby » au Stade de France
En effet, suite au succès rencontré lors du premier essai au Parc des Princes, Max
Guazzini décida de renouveler plusieurs fois l’expérience pour d’autres matchs de prestige
avec chaque fois plus de succès. Ainsi, les locaux du PSG vont apparaître comme de plus en
plus inappropriés aux flux de spectateurs que génèrent ces évènements. Les dirigeants du club
vont alors prendre la décision de passer à un stade de capacité supérieure et se sera à présent
le Stade de France qui va être mis à profit pour accueillir la « grande fête du rugby », cette
image que cherche à promouvoir le président du Stade Français. Pour la première au Stade de
France, Max Guazzini avait encore une fois décidé de voir les choses en grand. De
nombreuses animations ont été ainsi proposées aux spectateurs ayant fait le déplacement. Tout
19
20
Selon l’institut de Médiamétrie.
Selon l’institut de Médiamétrie.
28
à été fait pour créer une véritable ambiance festive, avec l’organisation d’un karaoké géant, où
des grands standards de la chanson Française étaient repris en cœur par près de 80 000
personnes. Depuis 4 ans, près de 10 rencontres du club ont été jouées dans ce stade, en
rassemblant à chaque fois près de 80 000 personnes. Le dernier en date, Stade Français-Stade
Toulousain a battu tous les records d’affluence avec 79 793 spectateurs. Tout cela nous
montre bien que Max Guazzini, par sa stratégie de communication hors média,
essentiellement basée sur l’organisation de grands évènements a réussi le pari de faire aimer
un club. Il est désormais capable de remplir un stade de 80 000 personnes alors qu’il y a 15
ans, à peine quelques dizaines de spectateurs étaient présents dans les travées du stade Jean
Bouin.
Ce type d’évènement est en outre très intéressant dans la mesure où il peut créer ce que
certains chercheurs en psychologie ou en sociologie ont appelé « l’attachement au lieu ». Ce
concept a par la suite été repris dans le champ du marketing pour caractériser « la relation
durable entre un consommateur et une marque dans une perspective relationnelle » (Cristau,
2001, Heilbrunn, 2001, Lacoeuilhe, 1997, 2000, Thomson, Mc Innis et Park, 2005). Ces
études ont pour point de départ un concept complexe, celui d’attachement, autrement dit du
lien affectif qui unit un consommateur à une marque. Or, le lieu de consommation peut être
une des variables qui favorise la création de ce lien affectif. «L’attachement au lieu de
consommation est un lien affectif positif et identitaire de long terme entre un consommateur
et un lien de consommation spécifique.21Ainsi, les spectacles organisés au Stade de France
favorisent la création de ce lien grâce à l’ambiance qui y règne, à la communion du public.
Cela va être bénéfique au Stade Français en engendrant des « réponses cognitives et
comportementales récurrentes »22 :
•
une fidélité militante de la part du consommateur : on parle de fidélité car le
consommateur va chercher à revenir sur le lieu, même si cela s’avère contraignant afin
de revivre cette expérience de consommation. Cette fidélité est dite militante car le
consommateur va chercher à défendre ce lieu quand il fait l’objet de critiques.
•
un comportement d’ambassadeur : qui peut consister à effectuer un bouche-à-oreille
positif ou à faire découvrir le lieu à des proches.
21
Debenedetti S. (2003), L’expérience de visite des lieux de loisirs : le rôle central des compagnons, Recherche
Applications en Marketing, 18, 4, 71-87.
22
Debenedetti S. (2003), L’expérience de visite des lieux de loisirs : le rôle central des compagnons, Recherche
Applications en Marketing, 18, 4, 71-87.
29
•
Une idéalisation du lieu : qui caractérise la tendance du consommateur à devenir
imperméable aux côtés négatifs du lieu au fur et à mesure que leur attachement
grandit.
Le fait que les consommateurs s’attachent ainsi au lie de consommation, le Stade de
France ne peut être que bénéfique au Stade Français, dans la mesure où cela va lui assurer des
retombées positives, tant en terme d’image dans l’esprit des consommateurs qu’en terme de
consommateurs potentiels. Le bouche-à-oreille va avoir tendance à augmenter le nombre de
spectateurs potentiels, susceptibles de venir au stade afin de vivre une expérience qui leur aura
été décrite en des termes avantageux.
Nous allons à présent étudier une des affiches publicitaires destinée à promouvoir les
spectacles organisés par le Stade Français.
1.3.2.4 l’analyse d’une affiche publicitaire
30
La communication sur les évènements organisés par le club se fait également à travers
des affiches du type de celle-ci. Ces affiches publicitaires vont avoir 2 fonctions principales.
Tout d’abord il va s’agir de communiquer sur l’évènement en lui-même, de donner envie aux
spectateurs potentiels de venir assister à la rencontre. L’affiche est donc volontairement assez
colorée, avec beaucoup de rose notamment, qui en quelque sorte devenu la couleur
« symbole » du club. En arrière plan, on peut voir un stade illuminé où le public semble être
en fête, avec des confettis dans les airs. Au premier plan, on peut voir 2 joueurs du club ainsi
que le drapeau aux couleurs du Stade Français. On cherche de cette façon a montrer que l’on
vient pour assister à un match de rugby (premier plan), mais que qu’on vient également pour
partager et vivre une ambiance festive.
Mais en réalité, ces affiches ne sont pas réalisées dans le simple but de vendre des places.
Les places pour ce genre d’évènements sont en effet bien souvent déjà toutes vendues lorsque
les affiches sont placardées sur les murs de la capitale. Pour preuve, le prochain match qui
sera joué au stade de France (Stade Français-Biarritz) en juin 2008 affiche déjà complet
depuis le mois de mars. Ces affiches sont en fait créées dans le but d’attirer des spectateurs
pour les matches suivants. En voyant cette affiche, les spectateurs potentiels séduits par la
promesse perçue (ambiance, fête du rugby), vont chercher à se procurer des places. Etant
donné que bien souvent il n’y en aura déjà plus, il cherchera à tout prix à ne pas rater
l’évènement suivant et tachera de se procurer ses billets dès leurs mises en vente. Ainsi, en
plaçant les spectateurs dans un état que l’on pourrait qualifier de « manque », ces affiches
vont servir à promouvoir les matchs futurs du club ainsi que son image. (cf. : autres affiches
annexe n°1)
1.3.3. La communication média : analyse du site Web : www.stade.fr
Les dirigeants du Stade Français on très vite compris l’utilité d’Internet comme moyen
de communication auprès des jeunes notamment. Ainsi, un site a été développé assez tôt, ce
qui permet au club d’avoir une bonne longueur sur ses concurrents dans ce domaine. Le site
du club est en effet très bien conçu et reflète parfaitement l’image que les dirigeants veulent
donner au club. C’est en effet un véritable outil de communication, 70% des internautes
31
Français considèrent qu’une marque sans site Internet se désintéresse de ses clients23. Il est
donc primordial d’offrir à ses consommateurs un site de qualité, pour les fidéliser, leur
montrer que la marque aussi se soucie d’eux. Une étude
24
a démontré que le site Internet
pouvait agir comme facteur d’influence sur l’intention d’achat (+5% en moyenne quand le
site est de bonne qualité), sur l’image de la marque. Mais il exerce aussi une influence sur les
rapports aux produits au niveau relationnel et affectif. Ainsi, selon cette étude, 87% des
femmes internautes européennes déclarent qu’Internet développe leur intérêt pour des
marques qu’elles affectionnent déjà. Or, quand on connaît la volonté des dirigeants du Stade
Français de séduire une population de plus en plus féminine, le développement d’un site de
qualité peut être un atout majeur. Nous allons donc voir si le site développé par le club est
réellement de qualité. Pour ce faire nous allons l’analyser à travers la méthode des 7 C.
Le modèle des 7 C
Ce modèle, théorisé par Mohamed R.A., Fischer R.J., Jaworski J.B. et Paddison J.G se
propose d’analyser la qualité d’un site Internet à travers 7 critères :
•
Le contenu : tous les contenus multimédias présents sur le site
 Le site du Stade Français dispose d’une très grande richesse de contenu, avec une
grande quantité de vidéos disponibles et téléchargeables directement à partir du site
(résumé de matchs, spectacles organisés au Stade de France, « making of du
calendrier » pour un total de plus de 200 vidéos disponibles dans la rubrique « Stade
TV »). Des fonds d’écrans sont par ailleurs également disponibles et téléchargeables
gratuitement. Une photothèque retraçant les grands moments de l’histoire du club a été
créée et les photos peuvent par ailleurs être téléchargées par les internautes.
•
le contexte : le contenu du site et les fonctionnalités
 Le site est très complet, très riche en informations de toutes sortes. L’internaute est
tenu au courant de l’actualité sportive grâce à la publication d’articles résumant les
derniers matchs joués, le classement du TOP 14 est également disponible sur la page
d’accueil. L’internaute peut avoir accès à des informations plus générales sur le club,
les saisons passées et les compétitions dans lesquels le Stade Français est encore
engagé.
23
24
www.journaldunet.fr, enquête 2006.
TNS Sofrès-auféminin.com, janvier 2008.
32
•
les communautés : groupes qui se forment en fonction des intérêts pour un
même sujet
 Un onglet « Forum » est disponible sur le bandeau déroulant de la page d’accueil du
site. Les internautes ont ainsi la possibilité de se réunir et de parler de sujets qui les
intéressent, partager leurs impressions sur les derniers résultats du club ou encore de
l’équipe de France de rugby.
•
customisation : capacité du site à être modifié (par l’utilisateur notamment)
 aucune customisation n’est possible sur ce site.
•
la communication : dialogue entre le site et les utilisateurs
 L’internaute a la possibilité d’envoyer des mails à l’administrateur du site, à condition
d’avoir créé préalablement un compte. Il est également possible d’être tenu informé de
l’actualité du club à travers l’inscription à des newsletters.
•
les connexions : réseau de lien avec d’autres sites
 Le site du club propose une multitude de liens disponibles sur un onglet « nos liens »
prévu à cet effet. On y retrouve des liens pour se rediriger vers tous les sponsors du
Stade Français. Mais on retrouve également dans cette rubrique des liens permettant
d’accéder au site d’un restaurant (détenu par Max Guazzini), à des sites d’informations
sportives. Plus étonnant, on y retrouve des liens permettant d’aller sur les sites Internet
des autres clubs de rugby en possédant un. C’est assez judicieux car ainsi les
internautes peuvent se rendre compte de l’écart entre le site du Stade Français et ceux
des autres clubs. Renforçant ainsi l’image de modernité, de club se souciant de ses
supporters.
•
le commerce : capacité transactionnelle du site
 Le site est doté d’une capacité transactionnelle assez importante. On peut tout d’abord
y acheter les billets pour les rencontres à venir. Mais l’onglet « boutique » va proposer
à l’internaute une large gamme de produits en tous genres de la marque Stade
Français. Plus de 500 articles sont proposés, allant des maillots traditionnels, aux
calendriers du Dieux du Stade ainsi que des jeux de literies. Le site est donc
clairement utilisé comme un outil de vente.
Le site du Stade Français peut donc à travers cette analyse des 7 C être reconnu comme un
site de qualité, de part la richesse de son contenu multimédia, de la richesse des informations
sur le club. Ce site est par ailleurs très utile financièrement puisque la boutique on-line est
susceptible de générer un chiffre d’affaires assez important.
33
Depuis qu’il a pris les rênes du Stade Français, Max Guazzini a fait d’un club au passé
glorieux un club ambitieux et plein d’avenir. Il a gagné le pari que beaucoup considéraient
comme fou de redorer le blason d’un club ayant connu la gloire au début du siècle et ce, en
moins de 10 ans. Il a d’abord permis au club de revenir au plus haut niveau sur le plan sportif.
Ensuite, grâce à la popularité acquise par ces actions de communications à succès, il a réussi à
faire aimer son club. L’engouement en région parisienne est sans précèdent pour un sport qui
il n’y a pas si longtemps était méconnu du grand public. Cela est notamment dû à des
investissements assez importants effectués dans un premier temps grâce à la fortune
personnelle du président. Mais par la suite, le club a multiplié les contrats de sponsoring et a
pu dégager des fonds importants. A tel point que le président avoue aujourd’hui ne presque
plus investir de sa fortune personnelle dans le club.
Le premier pari, celui de faire aimer son club étant très largement réussi, nous allons à
présent voir que le club va chercher à capitaliser sur cette popularité. Toute une politique
marketing va être mise en place, une offre commerciale va clairement être définie afin de faire
prospérer la marque Stade Français.
2. L’entreprise Stade Français
34
Comme nous l’avons vu précédemment, le Stade Français a réussi, grâce a une
politique de communication efficace notamment, à se faire aimer du public francilien et plus
largement du public Français. Toute la problématique des dirigeants va dés lors consister à
mettre à profit cette popularité afin de pouvoir continuer de faire croître le club tant
économiquement que sportivement.
C’est pour cela que petit à petit, une stratégie marketing va être élaborée par la
direction du club. Il va ainsi pouvoir miser sur le « capital sympathie » dont il dispose auprès
du grand public pour commercialiser toutes sortes de produits dérivés à grande échelle. Plus
qu’un club, le Stade Français va ainsi devenir une vraie marque avec une force commerciale
assez importante.
2.1 La stratégie marketing du Stade Français
2.1.1. Pourquoi peut on parler de stratégie ?
On peut dans ce cas parler d’une véritable «stratégie » marketing dans le sens où les
décisions qui vont être prises vont affecter durablement la vie du club. Ces décisions vont en
effet avoir un impact direct et réel sur le développement de la marque Stade Français et plus
globalement sur celui du club. Le fait de se repositionner sur une cible différente de celle
visée jusque là n’aura pas les mêmes implications stratégiques que le lancement d’un simple
campagne d’affichage. On parle donc de décisions stratégiques dans le sens où celles-ci vont
avoir des implications lourdes sur la vie du club. Si les orientations stratégiques s’avèrent être
payantes et couronnées de succès, le club va pouvoir continuer de croître et se développer. A
l’inverse, si les orientations se révèlent peu judicieuses, cela va également avoir un impact,
cette fois ci négatif, dans la mesure où les décisions stratégiques impliquent la mise en œuvre
de moyens plus ou moins importants. Une orientation erronée conduit à l’échec d’un projet, et
donc à la perte des capitaux investis.
35
C’est pour cela que les choix stratégiques du club doivent être clairement définis après
avoir réaliser une étude préalable du marché. Et cela passe surtout par la définition d’objectifs
stratégiques précis.
2.1.2. La définition des objectifs stratégiques
2.1.2.1. Les objectifs d’une association sportive
Un club comme le Stade Français peut aussi être considéré comme une entreprise à
part entière étant donné l’importance de ses activités commerciales. Mais cependant, il n’en
reste pas moins une association sportive et cela va avoir un impact sur la définition de ses
objectifs.
L’uns des objectifs principaux va être bien évidemment de développer
économiquement le club. Cela va nécessiter différents types d’actions. Il va par exemple
falloir séduire les médias et les sponsors comme nous l’avons vu précédemment. Cet objectif
apparaît aujourd’hui comme une nécessité dans la vie des associations sportives
professionnelles étant donné la réduction des subventions ministérielles amorcées par l’état
depuis une dizaine d’années.
Il va ensuite s’agir de développer la pratique sportive en tant que telle. Les clubs vont
chercher à augmenter le nombre de leurs adhérents licenciés. Ainsi, ils peuvent espérer
augmenter le « rayonnement » de leur pratique, ce qui pourra également contribuer à remplir
le premier objectif évoqué précédemment.
Le objectifs vont ainsi s’avérer être aussi complémentaires que contradictoires. En
effet, pour qu’une pratique sportive soit considérée comme attractive, pour que les médias s’y
intéressent, il est nécessaire de voir émerger une élite de compétiteurs capables d’offrir du
spectacle. Mais pour que cette élite de compétiteurs émerge, il est aussi nécessaire que les
clubs investissent dans la formation, qu’ils disposent d’un maximum de licenciés, afin d’avoir
à leur disposition un « vivier de talents potentiels ». Les objectifs d’augmentation du nombre
de licenciés et de développement économique semblent donc aller de paire.
Mais bien souvent, les clubs ne disposent que d’un budget assez limité et doivent
opérer des arbitrages entre ces 2 objectifs principaux : le développement économique du club
est ainsi bien souvent préféré à des investissements en formation, en infrastructures. C’est
notamment à cause de ce conflit d’objectifs que les subventions ministérielles tendent à
36
baisser. En effet, cette baisse des subventions apparaît comme une forme de répression à la
volonté des clubs de vouloir plus investir dans leur développement économique que dans la
formation et le développement d’une pratique de haut niveau.
La particularité du Stade Français est d’avoir su inverser ce processus. Les dirigeants
ont en effet réussi à augmenter le nombre de licenciés grâce au rayonnement que connaît le
club de par son développement économique.
Nous allons à présent voir comment les dirigeants ont réussi à remplir leur premier
objectif, c'est-à-dire donner une dimension économique au club.
2.1.2.2. Le choix d’une stratégie
Les entreprises doivent bien souvent arbitrer entre 2 grands types de stratégies : la
spécialisation ou la diversification. Alors que la spécialisation permet de faire figure de
spécialiste dans un secteur d’activité, la diversification va permettre à une entreprise d’élargir
son portefeuille d’activités, d’être plus présente sur différents marchés. Etant donné la volonté
du Stade Français de se développer économiquement et rapidement, les dirigeants ont opté
pour une stratégie de diversification des activités. La marque Stade Français va ainsi se
décliner en une large gamme de produits comme nous le verrons plus tard. Cette stratégie de
diversification va ainsi présenter plusieurs avantages. La marque Stade Français va couvrir
divers marchés assez différents (téléphonie mobile, textile, articles sportifs…) ce qui sera
synonyme de chiffre d’affaires élevé pour le club. De plus, cela permet une meilleure gestion
du portefeuille d’activités. Cela va permettre d’atteindre un certain équilibre du portefeuille
du point de vue des cycles de vie des produits et de leur rentabilité.
Mais cette stratégie de diversification menée par le club suppose différentes conditions
de réussite. Tout d’abord il doit y avoir des synergies d’image entre les différents produits des
différentes gammes mises sur le marché. En l’occurrence, le Stade Français se base sur une
image de modernité, de mode, de maîtrise des nouvelles technologies, qui va servir de « socle
d’image », de base commune à ces différents produits. Par exemple, entre le téléphone mobile
lancé en partenariat avec Sony Ericsson et un maillot de rugby, la synergie d’image ne semble
pas aller de soi. Mais les 2 produits utilisent pourtant des représentations communes : la
mode, le coté « fashion » grâce à la présence des fleurs roses sur les maillots et le téléphone
(qui symbolisent aujourd’hui assez bien l’image du Stade Français) ; la maîtrise des
37
technologies, d’une part car un téléphone est aujourd’hui un véritable concentré de
technologies et d’autres part par l’utilisation de nouvelles matières dans la fabrication des
maillots.
Cela suppose aussi que l’entreprise dispose de capacités organisationnelles lui
permettant de gérer au mieux un portefeuille d’activités très large. Or au sein du club, c’est
au département marketing qu’incombe la lourde tâche de coordonner et mettre en place toutes
les actions de développement et de promotion des nouveaux produits mis en vente sur le
marché. Cette gestion simplifiée des opérations peut s’avérer positive en termes
organisationnels, évitant ainsi des conflits intra services.
Enfin, le choix de la diversification va impliquer des efforts financiers assez
importants pour couvrir différents marchés simultanément. Il est donc nécessaire de disposer
d’une structure financière assez solide et équilibrée pour pouvoir réaliser des investissements
qui peuvent parfois s’avérer être assez lourds. C’est d’ailleurs pour cela que, comme nous
l’avons vu précédemment, le Stade Français s’est entouré de nombreux sponsors et
partenaires afin de pouvoir disposer d’un budget assez conséquent.
2.1.2.3. L’analyse du marché
Pour pouvoir prendre des décisions stratégiques intégrant une marge d’erreur la plus
faible possible, il est nécessaire de procéder à une analyse du marché. Il va s’agir pour le club
de faire mieux que les concurrents en présence, de se positionner différemment ou plus
efficacement afin que le consommateur repère les spécificités de la marque et devienne un
acheteur potentiel. Il faut d’abord repérer dans quelle situation de marché l’on se trouve. On
en distingue généralement 3 différentes :
•
Marché en expansion, où l’objectif va être de maintenir ou d’augmenter ses
parts de marché afin d’assurer le chiffre d’affaires
•
Marché stagnant, où il va s’agir de développer ses parts de marchés au
détriment des concurrents directs
•
Marché en régression, où 2 possibilités sont envisageables : se retirer ou
s’imposer face aux concurrents.
Dans notre cas, il s’agit bien évidemment d’un marché en pleine croissance sous une
double impulsion : l’augmentation des ventes d’articles de sport et la popularité grandissante
du rugby auprès du public Français. Il va donc falloir pour le Stade Français élaborer une
38
stratégie qui vise au développement de ses parts de marchés vis-à-vis de ses concurrents
directs. Les principaux concurrents du Stade Français vont être les autres associations
sportives qui disposent d’une certaine notoriété sur la scène nationale. Les clubs de football
les plus connus (l’Olympique de Marseille, Paris Saint Germain ou encore l’Olympique
Lyonnais) ainsi que des clubs de rugby tels que le Stade Toulousain ou le Biarritz Olympique
dans une moindre mesure.
Pour analyser la concurrence à laquelle doit faire face le Stade Français, nous allons
utiliser le modèle de base d’Ansoff qui est plus couramment appeler SWOT (strengths,
weaknesses, opportunities, threats). Ce modèle va consister en une double analyse de
l’environnement direct du club avec d’une part les opportunités et les menaces et d’autre part
les forces et les faiblesses.
2.1.2.4 Le modèle d’analyse SWOT appliqué aux clubs sportifs
Le modèle d’Ansoff ou SWOT s’applique en général à des entreprises traditionnelles.
S’agissant ici d’une association sportive, il va falloir prendre en compte ce facteur dans
l’analyse. C’est pourquoi nous utiliserons le modèle d’Ansoff appliqué aux clubs sportifs.
Diagnostic externe de l’environnement
Il va dans un premier temps s’agir d’analyser l’environnement externe du club afin de
déceler quelles peuvent être les opportunités ou à l’inverse les menaces qui vont peser sur le
club.
Les opportunités sont ici assez nombreuses. En effet, l’actualité sportive est plus que
favorable. Le rugby est un sport en pleine croissance depuis quelques années (grâce
notamment à l’impulsion du Stade Français), le nombre de licenciés augmente, les résultats
sportifs du Stade Français sont assez probants et les clubs de rugby Français font
régulièrement assez bonne figure dans les compétitions internationales. Enfin l’équipe de
France de rugby obtient elle aussi des bons résultats que cela soit au niveau européen ou
mondial (elle a notamment accédé aux demi finales des 2 dernières Coupe Du Monde de
rugby). Le rugby apparaît donc comme un sport de plus en plus populaire et les clubs peuvent
espérer tirer profit de cette popularité.
39
De plus le rugby est aujourd’hui un des sports les plus médiatisés, juste derrière celui
qui reste toujours le « sport roi », c'est-à-dire le football. Mais les bonnes audiences réalisées
par les matchs du top 14 sur la chaîne privée Canal + laisse présager un bel avenir pour le
rugby en terme de retransmissions télévisuelles. Cette couverture médiatique importante
représente donc une vraie opportunité pour les clubs qui disposent à présent d’une meilleure
visibilité et qui peuvent ainsi se faire connaître plus facilement du grand public.
De par la couverture médiatique dont il dispose, la popularité grandissante de la
pratique et les résultats sportifs probants des clubs Français, le rugby apparaît donc comme un
secteur d’activité plein d’avenir avec des perspectives assez florissantes pour les différents
clubs dont le Stade Français.
Mais certaines menaces vont également peser sur l’environnement concurrentiel du
club de rugby francilien.
Tout d’abord, avec la professionnalisation croissante de ce sport, on peut craindre de
voir apparaître les mêmes fléaux que dans certains autres sports. La haute compétition,
l’enchaînement des matchs durant la saison peuvent amener les joueurs à succomber à la
tentation du dopage pour pouvoir rester performants tout au long de l’année. De plus, la
professionnalisation d’un sport engendre bien souvent des affaires de tricheries, de corruption
(on prendra pour exemple les cas « Apito Dourado »25 au Portugal ou le Calciopoli en
Italie26). Ce genre de phénomènes pourrait ainsi nuire gravement à l’image d’un sport
considéré aujourd’hui comme sain et festif.
Mais la plus grande menace vient sans doute des autres clubs, aussi bien de rugby que
de football. En effet, certains clubs de rugby, sentant le potentiel assez exceptionnel de ce
marché, ont également commencé à mettre en place des actions marketing pour venir
concurrencer le Stade Français. On prendra pour exemple le Stade Toulousain qui a
complètement remodelé son site Internet, et qui a recommercialisé un maillot rose, dont il
avait eu l’idée bien avant que le club francilien ne commercialise le sien. En effet, dès 2000 le
club de la « ville rose » avait déjà imaginé et mise en vente un maillot aux couleurs de la ville,
mais cela n’avait pas été un franc succès, donc l’idée fut abandonnée l’année suivante.
25
Affaire de corruption ayant eu lieu au Portugal entre 2004 et 2006 impliquant 3 clubs de première division et
une trentaine d’arbitres.
26
affaire de corruption ayant eu lieu en Italie durant la saison 2005-2006 impliquant plusieurs clubs de première
division et plusieurs arbitres, ayant conduit à la rétrogradation du vainqueur du championnat, la Juventus de
Turin .
40
La menace la plus sérieuse provient des clubs de football Français. Le Paris Saint
Germain notamment, de par sa proximité géographique semble être un concurrent assez fort.
Le club dispose lui aussi d’une large gamme de produits estampillés PSG et des actions
marketing sont régulièrement mises en place. Par exemple, lors de la saison 2006/2007, le
club avait confié à Louis Vuitton le soin de concevoir le maillot que l’équipe porterait lors de
ces matchs à l’extérieur. Cet article avait été un franc succès dans les boutiques de sport
Françaises. L’olympique de Marseille bien que plus éloigné peut aussi apparaître comme un
conçurent sérieux car ce club reste aujourd’hui l’association sportive préférée des Français et
ce malgré les différentes affaires obscures auxquelles le club c’est retrouvé mêlé et l’absence
de résultats sportifs. Enfin, l’Olympique Lyonnais peut aussi apparaître comme un concurrent.
Ce club présente d’ailleurs un bon nombre de similitudes avec le Stade Français comme nous
le verrons un peu plus loin27.
Diagnostic interne du club
Dans un deuxième temps, le modèle d’Ansoff ou SWOT va consister en un diagnostic
interne de l’entreprise afin d’évaluer quelles sont les forces mais aussi les faiblesses de celleci.
Tout d’abord au niveau des faiblesses, le rugby est encore un sport trop amateur. Bien
que cela soit en terme d’image assez bénéfique aux vues des dérives que connaissent les
sports professionnels de nos jours (violences, hooliganisme…), cela peut également nuire à la
pratique. Le fait que seuls 3 ou 4 quatre clubs du TOP 14 soient réellement dotés de structure
modernes, soient en voie de professionnalisation peut conduire à une certaine lassitude du
public. En effet, ce sont toujours les mêmes clubs qui parviennent à gagner des titres, et ce
manque de concurrence peut nuire à l’intérêt porté au sport et donc plus particulièrement au
Stade Français. On prendra pour exemple l’hégémonie de l’Olympique Lyonnais sur le
football Français (7 titres consécutifs de champion de France) qui a conduit à une perte
d’intérêt pour un championnat dont l’issue semble connue d’avance.
Ensuite, au niveau du club même, le Stade Français pourrait dans un avenir proche
pâtir de son manque de résultats sur la scène européenne. Bien que les résultats sur la scène
nationale aient été satisfaisants ces dernières années, le Stade Français ne parvient pas à
27
C.f. : « 2.2.3 : Stade Français VS Olympique Lyonnais ».
41
s’imposer en Coupe d’Europe. A terme, les spectateurs et donc aussi les consommateurs
pourront se tourner vers un club Français plus prestigieux de par son palmarès comme le
Stade Toulousain par exemple, qui ont été victorieux sur la scène européenne 2 fois ces 5
dernières années (2003 et 2005). Le succès futur des actions marketing du Stade Français sera
donc fortement lié aux parcours en Coupe d’Europe dans les années à venir.
Enfin, la vétusté du stade Jean Bouin peut aussi apparaître comme une faiblesse pour
un club qui veut se donner une image moderne. L’enceinte, en plus de ne pas briller par son
esthétisme, ne permet d’accueillir qu’un nombre réduit de spectateurs. Des actions ont tout de
même été entreprises en ce sens et un nouveau stade pourrait voir le jour dans les 5 prochaines
années.
Le club francilien dispose tout de même de nombreuses forces au niveau interne.
C’est tout d’abord un club très bien structuré. L’organisation interne est par ailleurs un
des éléments clés de la stabilité du club. A sa tête se trouve un président ambitieux qui est
l’une des clés de la réussite du club. Le rôle joué par le département marketing est également
assez primordial dans la vie et le développement du Stade Français.
Le club francilien bénéficie en outre d’une image favorable dans l’opinion publique
puisque il apparaît comme l’un des clubs phares d’une discipline en plein essor. Les valeurs
véhiculées par le rugby sont également une force importante. A l’heure où des sports comme
le football ou le cyclisme s’illustre plus par leurs affaires de violences, de corruption ou de
dopage, les valeurs « saines » transmises par le rugby (festivité, tradition, fair-play) sont une
véritable bouffée d’air frais pour le monde du sport en général.
En conclusion, bien que le Stade Français bénéficie d’un environnement favorable,
que cela soit sur le plan externe (avec l’essor et la popularité que connaît le rugby
aujourd’hui) ou interne (de par son organisation et l’image que le club véhicule), certains
facteurs de l’environnement doivent être envisagés sérieusement. Ce sport considéré comme
sain se doit d’éviter de tomber dans les dérives du sport professionnel sous peine de ternir son
image (jusque là assez immaculée). De plus le club francilien doit garder un œil attentif sur
ses concurrents directs, qu’ils proviennent du milieu rugbystique ou footballistique.
Mais il est permis de penser que les opportunités du marché promettent au rugby en
général et au Stade Français en particulier des perspectives plus que florissantes sur les
marchés ou le club est engagé.
42
2.1.3. Le positionnement sur le marché
Toute entreprise souhaitant se positionner sur un marché va devoir au préalable
effectuer une segmentation de celui-ci puis repérer les cibles qui lui semblent être les plus
attrayantes pour enfin développer une stratégie visant à en séduire plusieurs à la fois ou une
en particulier.
2.1.3.1 la segmentation du marché
Cette étape va donc consister à découper le marché en groupes homogènes de
consommateurs. Il est nécessaire de déterminer des critères de segmentation afin de savoir
quelles seront les caractéristiques qui vont servir à différencier les groupes de consommateurs.
Dans le cas du Stade Français, nous avons vu précédemment que le facteur
géographique est assez important. L’offre de base étant en effet un spectacle sportif, il est
primordial qu’elle s’adresse à un public proche du lieu où l’évènement se produit. Le sexe de
la personne à laquelle on s’adresse va aussi avoir son importance. On sait en effet que les
hommes et les femmes ne sont « pas égaux dans la consommation de services et produits
sportifs ». Les hommes ont une propension beaucoup plus élevée à consommer ce type de
prestations que les femmes. D’autres facteurs sociodémographiques vont aussi rentrer en ligne
de compte, notamment l’influence de la catégorie socioprofessionnelle. On sait par exemple
que les professions intermédiaires et supérieures ainsi que les ouvriers qualifiés ont une
propension plus grande à assister à des spectacles sportifs28. Enfin l’âge apparaît également
comme un critère essentiel. On sait en effet que les plus jeunes fréquentent plus les spectacles
sportifs que les autres. En 2002, 40% des 15-19 avaient assisté à un évènement sportif contre
24% des 40-59 ans29
Ces critères de segmentation vont ainsi permettre de distinguer plusieurs groupes de
consommateurs qui vont réagir de façons différentes à l’offre proposée par le Stade Français.
Les hommes, les jeunes ainsi que les CSP+ vont avoir une plus grande propension à
28
29
C.f. Annexe 1.
C.f. Annexe 2.
43
consommer ce type de spectacles que les autres. Reste désormais à savoir si le club va
chercher à cibler un ou plusieurs des groupes identifiés.
2.1.3.2 Le ciblage
Le ciblage consiste à choisir une ou plusieurs cibles pour lesquelles un marketing mix
(produit, prix, place, promotion) sera développé par la suite. Plusieurs stratégies sont ainsi
possibles. On peut choisir de ne s’adresser qu’à une seule cible (marketing concentré)
permettant ainsi de bénéficier d’une réputation de spécialiste auprès du public, de mieux
satisfaire celui-ci. Mais en contrepartie il existe un risque important lié à l’avenir du segment
choisi.
L’entreprise peut aussi opter pour un marketing différencié, c’est-à-dire qu’elle va
développer un mix pour chaque segment identifié. Mais bien que cela permette une meilleure
couverture du marché et donc potentiellement un meilleur chiffre d’affaires, les coûts
d’exploitation engendrés sont bien souvent rédhibitoires.
Enfin, l’entreprise peut choisir de s’adresser à tous les publics de la même façon, c’est
ce qu’on appelle du marketing global, qui va permettre de toucher une large partie de la
population à moindre coût.
Toute l’originalité du ciblage du Stade Français va consister dans le mélange entre ces
différentes stratégies. Le marketing va se vouloir à la fois global, dans une perspective
d’attraction du plus grand nombre et à la fois assez différencié lorsque cela peut se révéler
opportun. Par exemple, lors du premier match réalisé au Parc de Princes, le club à développer
un mix marketing qui s’adressait à tous et un mix marketing qui s’adressait lui plus
particulièrement à une frange spécifique de la population : les femmes. Des affichettes « vous
êtes nos invitées » leurs étaient distribuées dans Paris, et elles bénéficiaient d’une politique
tarifaire différente puisque l’entrée au stade leur était offerte.
Mais la ligne directrice semble tout de même être orientée vers un marketing plus
global tout en poursuivant des objectifs de différenciation vis-à-vis de la concurrence, qui va
de pair avec la volonté des dirigeants du Stade Français de « démocratiser » le rugby, de le
rendre accessible au plus grand nombre. Car ensuite l’offre du club ne va pas se limiter au
spectacle sportif. La marque Stade Français va se décliner en une multitude de produits
dérivés qui vont chacun être adressés à un public, à un groupe de consommateur différents.
44
Le téléphone créé en partenariat avec Sony Ericsson va plutôt être destiné aux jeunes,
qui sont beaucoup plus sensibles à ce genre de produit qui va mêler 2 aspects importants
vecteurs de signes, de symboles dans lesquels beaucoup de jeunes se reconnaissent : le sport
et la technologie.
A l’inverse, la commercialisation du calendrier des Dieux du Stade va se destiner à
une population essentiellement féminine, mais également à la population homosexuelle. Pour
attirer le public homosexuel, ce calendrier va constituer un atout indéniable puisqu’il va jouer
sur les codes, les tendances du moment, notamment celle des « métrosexuels ». Ce calendrier
tend à montrer une image différente des rugbymen, plus glamour. Ce sont avant tout des
athlètes, et à ce titre, ils prennent soin de leur corps comme le font les « métrosexuels ». De
plus, la création de la ligne de cosmétique « Stade Français » semble aller dans ce sens. Cette
tentative de séduction du public homosexuel peut être directement mise en corrélation avec la
création du Paris foot gay, « le club de football qui défend le droit à la différence ». C’est une
association sportive créée en 2003 en partenariat avec le PSG, pour lutter notamment contre
l’homophobie prônée par certains groupes de supporters parisiens. Le PSG espérait ainsi
redoré un peu son image en s’inscrivant dans un projet de lutte contre les discriminations.
Ainsi, le Stade Français qui ne voulait sûrement pas perdre ce public potentiel a à son
tout entamé une politique de séduction de cette population
Le maillot rose à l’effigie du club va lui plutôt être un produit qui va s’adresser à
toutes les cibles, il va devenir le symbole de l’appartenance au club des « supporters du Stade
Français ».
2.1.3.3 Le positionnement
Cela va consister à donner une place au produit, à l’offre de l’entreprise dans l’esprit
du consommateur. Toute la problématique de cette étape réside dans la différenciation par
rapport aux offres des concurrents.
Le losange du positionnement
Ce losange va définir les 4 grandes questions que doit se poser une entreprise qui souhaite se
positionner dans l’esprit du consommateur :
45
Pourquoi ?
Contre qui ?
Qui ?
Quand ?
•
Pourquoi ? : autrement dit quels sont les bénéfices pour le consommateur. Dans notre
cas, le consommateur qui va venir assister à un évènement sportif va pouvoir
bénéficier d’une ambiance chaleureuse, d’un spectacle de qualité qu’il ne retrouvera
pas dans un autre stade d’Ile de France
•
Contre qui ? : les concurrents sont ceux que nous avons déjà identifiés auparavant, à
savoir les autres clubs de rugby ou de football jouissant d’une forte côte de popularité
en France. Le concurrent le plus sérieux étant celui le plus proche géographiquement,
le Paris Saint Germain
•
Quand ? : qui va définir la situation d’usage de l’acte de consommation
•
Qui ? : on cherche à savoir quelle est la cible visée. Les cibles peuvent également être
variées comme nous l’avons vu précédemment.
Mais créer un positionnement c’est avant tout créer une association entre le produit
offert et une enveloppe symbolique, c'est-à-dire une référence susceptible d’être mémorisée
par le consommateur. Pour ce faire, différentes solutions peuvent être envisagées. On peut se
servir aussi bien d’un logo que de certaines couleurs ou encore de la diffusion d’un système
46
de valeurs auxquelles les consommateurs vont pouvoir s’identifier. Ce sont ces 3 axes qui ont
été suivi par le Stade Français dans sa recherche de positionnement.
Le logo, dont les dirigeants ont jugés qu’il véhiculait une image vieillissante, a tout
d’abord été changé. Le club arbore à présent un nouveau logo, plus moderne, où
l’on peu désormais voir apparaître « les éclairs » du Stade Français. Ce logo
symbolise parfaitement le renouveau du club, dont il reprend tous les éléments
forts de la politique marketing. On y voit apparaître donc les fameux éclairs, dessinés en rose.
Ces 2 éléments, le dessin et la couleur rose sont aujourd’hui dans l’esprit des consommateurs
ce qui représente le Stade Français. Le changement de logo va donc être le point d’orgue du
renouveau du club. Il marque l’entrée définitive dans la nouvelle ère du Stade Français.
Comme nous venons de le voir, la couleur rose est l’un des leviers utilisé par les
dirigeants du club pour créer un positionnement dans l’esprit des consommateurs
Le Stade Français est aujourd’hui directement associé à la couleur rose de son
maillot. Ce sont 2 éléments indissociables
L’utilisation massive de la couleur rose, que cela soit dans le logo ou dans les produits
dérivés n’est une fois de plus pas anodine. Cela correspond à une volonté clairement affichée
de séduire une population féminine. De la même façon, l’utilisation des motifs fleuris peut
être assimilée à une tentative de séduction de la gent féminine.
Enfin, pour se créer un positionnement, le club a également beaucoup misé sur la
diffusion de valeurs dont certaines sont propres au rugby et d’autres vont être propres au
Stade Français. Le rugby est en effet dans l’esprit des consommateurs vecteur de combativité,
de tradition, de respect de l’adversaire. Autant de valeurs que le club francilien cherche à
transmettre et à diffuser mais en ajoutant une « valeur ajoutée », celle de la festivité, de
l’ambiance. Cet aspect du positionnement du club est d’autant plus important que le rival et
voisin du club, le Paris Saint Germain a vu son image se ternir depuis plusieurs années.
En effet, à la fin de la décennie 1990, le Paris Saint Germain était le club le plus
populaire en France. Cette place d’honneur était jusque là occupée par l’Olympique de
Marseille, mais suite à la relégation pour cause juridique du club phocéen, c’est le club de la
capitale qui attirait sur lui la sympathie d’une majorité des amateurs de football. Mais l’image
47
du club tend à se ternir depuis plusieurs années. Des affaires de violence30 ayant émaillé bon
nombre de rencontres conduisant parfois à des drames. La dernière affaire en date remontant
au mois de mai lors de la finale de la Coupe de France ou des banderoles à caractère raciste
avaient été déployées par les supporters du club. L’image du Paris Saint Germain est
aujourd’hui bien souvent associée au racisme véhiculé par des groupes de pseudo supporters
(comme les Boulogne Boys par exemple) ou à la violence dans les stades.
On peut donc parler pour le Stade Français de la mise en œuvre d’une vraie politique
marketing. Cela passe par la prise de décisions, la fixation d’objectifs stratégiques. Par
ailleurs, la mise en place de cette stratégie marketing s’est opérée grâce à une analyse
préalable du marché, de l’environnement concurrentiel. Puis, les dirigeants ont identifié les
différents groupes de consommateurs auxquels il leur était possible de s’adresser pour
finalement n’en retenir que certains. Enfin, la dernière étape a été la création d’un
positionnement durable dans l’esprit des consommateurs grâce à différents éléments
distinctifs tels que le logo.
Nous allons à présent voir que le Stade Français n’est pas qu’un simple club de rugby,
mais une véritable entreprise commerciale avec une politique de merchandising très élaborée.
Le nom du club francilien est aujourd’hui une marque déposée, innovante, qui offre aux
consommateurs une gamme de produits très étendue.
2.2. La gestion de l’entreprise Stade Français
2.2.1. La marque Stade Français
2.2.1.1. Pourquoi peut on parler de marque ?
Une marque peut être considérée comme « un signe ou un symbole, un dessin ou
toutes combinaisons de ces éléments servant à identifier les produits ou les services d’une
entreprise et à les différencier de ces concurrents31 ». C’est en quelque sorte un ensemble de
signes tangibles et concrets qui sont censés représenter une entreprise ou un club par exemple.
30
31
Mort d’un supporter du PSG le 24 novembre 2006 suite aux affrontements des supporters après un match.
Marketing management- Kotler, Dubois, Monceau (2006).
48
Une marque va donc être constituée de signes constituant une identité, qu’elle soit visuelle,
olfactive ou encore sonore. Dans le cas du Stade Français, l’identité va être à la fois visuelle et
sonore.
L’identité visuelle va être symbolisée par le logo du club, changé récemment ainsi que
par une couleur : le rose. L’un des produits emblématique de la marque est d’ailleurs un
maillot rose frappé du logo du club. De plus, le marque Stade Français dispose aussi d’une
véritable identité sonore. En effet, plusieurs années de suite, le club a commercialisé un single
en tant « qu’hymne de l’année » dont un, « I will survive », est depuis lors resté dans les
mémoires.
On peut donc bien parler de marque pour ce club dans la mesure où il réunit tous les
attributs symboliques, caractérisé par la création de ce système de signes, pour être considéré
en tant que tel.
2.2.1.2 L’importance de la marque pour une entreprise
Le fait de se poser en tant que marque va s’avérer prépondérant pour une entreprise
pour diverses raisons.
C’est tout d’abord sur un plan purement juridique que cela va se révéler intéressant. Le
fait d’être une marque va en effet apporter une réelle protection à l’entreprise. Cela lui évitera
des désagréments tels que la copie de ces produits. Et si tel s’avérait être le cas, elle
disposerait d’un recours juridique devant les tribunaux et pourrait demander des
dédommagements à toute entreprise ayant utilisé l’image du Stade Français sans en avoir
demandé l’autorisation ou sans avoir payé de licence ou de franchise.
C’est ensuite un outil de différenciation vis-à-vis de la concurrence. La marque, qui se
caractérise par un ensemble de signes, de symboles va ainsi contribuer à créer un
positionnement dans l’esprit du consommateur. Le but de la marque étant de devenir un « top
of mind » (marque la plus citée lorsqu’on évoque le domaine d’activité dans lequel elle se
trouve). La marque Stade Français contribue donc au succès du club dans la mesure où elle
contribue à sa popularité, à la diffusion de son image.
La marque est par ailleurs un actif que l’on peut valoriser. Cela peut être intéressant
dans l’hypothèse (peu probable actuellement dans le cas du Stade Français) où le président
souhaite revendre le club. L’actif étant très valorisé sur le marché, il pourra le vendre à un
prix substantiellement supérieure au prix d’achat.
49
Enfin, la marque est aussi un levier marketing à part entière. Elle va permettre à
l’entreprise de créer ce qu’on appelle un « effet de masse » qui va servir à amortir les
dépenses marketing.
2.2.1.3 La marque comme vecteur d’identité
La marque va en effet être le reflet de l’identité qu’une entreprise veut se donner. Cette
relation entre marque et identité a été théorisée par Kapferer dans son « prisme d’identité de la
marque ». Cet outil va servir à décrire ce qui est « voulu » par l’entreprise en terme d’image.
Personnalité
Physique
Culture
Relation
Mentalisation
Reflet
L’identité d’une marque, ou du moins celle qu’elle veut se donner peut donc ainsi être
étudiée à travers ces 6 caractéristiques :
•
La personnalité : ce sont les traits de caractère associés à la marque. Pour le Stade
Français, la personnalité peut se résumer au sport et à la modernité. C’est en effet
avant tout une association sportive qui va se distinguer par son approche assez avant
gardiste du monde du rugby.
•
La culture : peut se définir comme le système de valeurs associées à la marque. Dans
notre cas, la marque véhicule les valeurs qui sont celles du rugby et du Stade Français
plus particulièrement : la festivité, la tradition alliée à la modernité.
50
•
La mentalisation : qui correspond à l’objectif que le consommateur cherche à
atteindre en achetant la marque. Ici, en achetant des produits Stade Français, le
consommateur va chercher à montrer son appartenance au club, que ce soit par réelle
passion du rugby, ou juste à cause de l’effet de mode.
•
Le reflet : image que la marque donne à sa cible. le Stade Français veut donner à ses
consommateurs une image dynamique, sportive et « fashion ».
•
La relation : qui se caractérise comme la forme d’échange implicite que la marque
veut faire valoir. Le club francilien cherche à intégrer les consommateurs dans ce
qu’on pourrait appeler la tribu Stade Français. Ceux-ci vont, à travers leur acte
d’achat, se sentir intégrés au sein d’un groupe, ils vont renforcer leur sentiment
d’appartenance à ce groupe.
•
Le physique : ce sont les signes, les éléments tangibles de la marque. Comme nous
l’avons vu auparavant, cela peut aussi bien être caractérisé par le logo que par la
couleur rose par exemple.
Il est important de noter que dans le cas du Stade Français, l’identité voulue est assez
proche de l’identité réelle, telle qu’elle est perçue par la population. Ce qui montre encore une
fois l’efficacité de la stratégie de marketing et de communication du club. En effet, le club
affiche aujourd’hui une image moderne, populaire. Le Stade Français apparaît comme une
association sportive capable de fédérer des franges diverses de la population qui vont
s’identifier au club pour diverse raisons (passion pour le rugby, ambiance festive, effet de
mode). Enfin, les éléments physiques de l’identité de la marque semblent avoir été bien
assimilés par le grand public car 68% des Français associent la couleur rose au Stade
Français.32
Après avoir vu en quoi le terme de marque est applicable au Stade Français et quels en
sont les avantages pour le club, nous allons nous intéresser à la gamme de produits offerts.
32
Sondage réalisé par www.lequipe.fr, 22/02/2007, la question posée était : « A quelle organisation sportive
associez vous la couleur rose ? ».
51
2.2.2. La gamme de produits Stade Français
2.2.2.1. L’offre de base : une prestation de service
Au départ, le produit offert par le Stade Français était une prestation de service. Le
club vend des places pour pouvoir assister à un spectacle sportif. Pour analyser cette
prestation de service, nous allons utiliser des théories de « marketing des services »,
notamment le « Basic Service Package » de Gronroos et Lovelock33. On va ainsi pouvoir
distinguer au sein d’une même prestation différents types de services.
On a tout d’abord le cœur de service, la raison pour laquelle une firme est présente sur
un marché. C’est donc ici le spectacle sportif qui va être proportionné par les 30 joueurs
présents sur le terrain.
Puis ensuite il convient de distinguer 2 autres types de service :
1. les services facilitants : autrement dit les services supplémentaires mais qui
vont être nécessaires aux clients pour qu’ils puissent utiliser le service de base.
Ces services facilitants vont par exemple être relatifs à l’information
(conditions de ventes des billets, horaires, prix), mais aussi à la prise de
commande (possibilité de prendre un abonnement à l’année, de commander par
Internet les billets via la boutique on-line du club) ou encore le payement (site
sécurisé pour le règlement par carte bancaire).
2. les services de soutien : qui sans être fondamentalement nécessaire au bon
déroulement du service, vont en augmenter la valeur et créer la différence visà-vis des concurrents. En revanche, l’absence de ce type de service peut
entraîner un affaiblissement de l’intérêt que le client porterait à l’offre. C’est
justement dans ce domaine que le Stade Français va se distinguer en offrant
une multitude de services de soutien qui vont faire de l’offre du club une offre
unique en son genre.
La stratégie de l’entreprise va être déterminante dans le choix des services de soutien,
car ces choix doivent être directement corrélés à la recherche de positionnement marketing de
l’entreprise. Or, le Stade Français cherche clairement à se différencier de la concurrence. Le
33
Gronroos et Lovelock, Marketing des services, Stratégie, outils, management, Publi-Union, 1999.
52
club va créer de véritables évènements autour du match du rugby, pour en faire des spectacles
uniques. Des karaokés géants ont ainsi été organisé à la mi temps de certains matchs, des
shows de moto cross ont eu lieu en ouverture. Et ce ne sont que quelques exemples de ce que
le Stade Français est capable de réaliser pour satisfaire ses consommateurs.
Mais l’offre du Stade Français ne se limite plus à la simple prestation de service. Le
club a aujourd’hui développé toute une gamme de produits dérivés qui sont commercialisés
dans des boutiques traditionnelles ou via sa boutique on-line.
2.2.2.2. Les produits de la marque Stade Français
Le club poursuit en effet une stratégie de diversification qui va se traduire dans les
faits par plusieurs extensions de marque. Ce procédé consiste à introduire sous le nom d’une
marque déjà existante des produits de natures et de fonctions différentes des produits initiaux
de la marque. Une extension de marque peut répondre à des objectifs économiques
(valorisation d’un actif pour réaliser de meilleures performances) ou stratégiques (augmenter
sa visibilité pour renforcer sa notoriété). Pour que cela fonctionne, il faut que les nouveaux
produits lancés aient une certaine cohérence avec les valeurs de la marque. Il faut également
qu’ils disposent d’une certaine légitimité sur le marché et enfin que les nouveaux produits
apportent une réelle valeur ajoutée à la marque. Nous allons donc voir si le club francilien a
su respecter ces conditions et mettre en œuvre une stratégie efficace de diversification.
Le Stade Français est en effet comme nous venons de le voir un prestataire de
services. Le club commercialise tout naturellement, comme le font tous les autres clubs, les
équipements de rugby que portent les joueurs, en partenariat avec Adidas, un des sponsors du
club. Il va donc s’appuyer sur ce savoir faire pour commercialiser des habits estampillés de la
marque « Stade ».
C’est ainsi que le club a débuté à concevoir et distribué des lignes de vêtements pour
hommes, femmes et enfants. La boutique du club va ainsi proposer plus de 200 produits
d’habillements (t-shirt, short, pulls, caleçons…). Cette extension peut paraître pertinente dans
la mesure où les vêtements de la marque Stade sont commercialisés à des prix bien inférieurs
à ceux de la marque Adidas (35 euros le t-shirt de la marque Stade contre 75 euros pour un tshirt Adidas). Cela va ainsi permettre au club de toucher une plus large partie des
53
consommateurs désireux de montrer leur appartenance au Stade Français mais qui seraient
rebutés par les prix exorbitants des maillots de la marque allemande.
Le club a également lancé une gamme de produits cosmétiques qui gardent un « esprit
rugby ». En effet cette gamme se compose de quinze parfums différents ayant chacun un nom
évoquant l’univers de ce sport (« retour au vestiaire », « carton rouge » ou encore « sous la
mêlée »). Une fois de plus cette extension apparaît comme assez pertinente car elle vient
renforcer l’image assez « glamour » que les dirigeants tentent de donner au rugby. Cette
gamme de cosmétique s‘inscrit dans la droite lignée d’un autre produit phare du club : le
calendrier du Stade Français.
Le calendrier des « Dieux du Stade » est en effet une autre grande réussite
commerciale du club. A tel point que cette opération qui devait être à l’origine unique, a
depuis été répétée tous les ans. Ce produit dérivé du Stade Français est également très
pertinent car il contribue à modifier l’image que les consommateurs peuvent se faire du rugby,
cette « glamourisation » tend à rendre ce sport plus accessible au grand public et surtout plus
attrayant pour le public féminin.
Le club a même lancé récemment, en partenariat avec Sony Ericsson, une gamme de
téléphones portable avec un design reprenant les couleurs du Stade Français34. Cela peut
paraître intelligent dans la mesure où le club veut se donner une image moderne. Or, le
téléphone portable est aujourd’hui un des objets qui symbolise le mieux l’aspect
technologique étant donné les multiplies fonctionnalités qu’il offre (téléphone, appareil photo,
caméra, navigateur Internet…)
Enfin, les boutiques Stade Français proposent aussi divers accessoires pour les fans
inconditionnels du club francilien comme des casquettes, des cravates, des peignoirs de bain
ou encore des parures de literie.
Tous les produits commercialisés peuvent bien évidemment être acheté via Internet.
Le club a fortement misé sur le commerce en ligne en dédiant tout une partie de son site à ces
activités. La boutique on-line permet donc de retrouver facilement les différents produits de la
gamme et de payer de façon sécurisée par carte bleue ou par Paypal.
Le Stade Français propose donc un large assortiment de produits qui ont tous une
certaine pertinence vis-à-vis de la stratégie développée par le club. Ces produits dérivés vont
servir les intérêts du club, tout d’abord sur le plan économique, grâce à la manne financière
34
C.f. annexe 3.
54
que représentent les ventes de ces articles. Mais au-delà de l’aspect économique, la marque
Stade permet de populariser le club, de le rendre plus visible aux yeux du grand public grâce à
des produits de toutes sortes. De plus, certains articles vendus contribuent à modifier l’image
que le grand public a du rugby et va donc permettre de toucher des publics différents, donc
d’attirer de nouveaux consommateurs. Ainsi, on est passé d’une logique où les
consommateurs de produits dérivés étaient déjà consommateurs de l’offre de base (la
prestation de service) à une autre logique, où les produits dérivés servent en quelque sorte de
« produits d’appels » pour drainés de nouveaux flux de consommateurs pour l’offre de base.
Nous venons donc de voir comment la stratégie de diversification par l’extension de
marque a permis au Stade Français de créer un cercle vertueux qui lui permet de séduire sans
cesse de nouveaux consommateurs. Nous allons à présent nous intéresser à une des raisons
qui fait que cette marque connaît un tel succès.
2.2.2.3. Une marque innovante
« La logique marketing repose sur la volonté constante de l’offre de réaliser la
massification des marchés en levant méthodiquement tous les obstacles »35. C’est pour cela
qu’il faut rechercher à étendre le marché à d’autres catégories de consommateurs. Le
prestataire va donc identifier une cible à partir des différents critères sociodémographiques
afin de dresser un profil type du consommateur. Nous avons vu précédemment que le profil
type d’un consommateur de la marque Stade Français était plutôt jeune, de sexe masculin,
issu de familles de professions supérieures ou d’ouvriers qualifiés. Il va ensuite s’agir de
définir une politique d’innovation tournée vers une cible qui n’est pas celle définie à priori.
C’est pour cela que le club à développer toute une série de produits dérivés destinés
aux femmes. Le calendrier des « Dieux du Stade » en est l’exemple le plus flagrant. De plus la
ligne de cosmétique créée par le club va venir s’adresser à une population masculine
substantiellement plus âgée que la cible d’origine.
Toutes le innovations de produits sont donc majoritairement destinées à séduire des
publics qui semblent à priori quelque peu éloignés du profil du consommateur type.
35
Tribou, « La rationalisation économique d’un club sportif », revue STAPS, 34 2002.
55
Le Stade Français est donc à l’heure actuelle un club très populaire et qui mise sur
cette popularité pour commercialiser des produits dérivés qui vont qui plus est contribuer à
rendre le club encore plus connu. Il est toutefois intéressant de s’intéresser aux facteurs qui
ont fait du club francilien un modèle de réussite sportive et économique, tout en devenant un
des clubs préférés des Français
2.2.3 Stade Français VS Olympique Lyonnais
Pour comprendre les raisons du succès et surtout de la popularité du Stade Français, il
peut être intéressant de le comparer à un autre modèle de réussite économique et sportive,
mais cette fois ci dans le monde du football : l’Olympique Lyonnais.
Ces 2 clubs présentent en effet un certains nombres de similitudes. Ils ont tous 2 été
repris par des hommes affaires passionnés. L’Olympique Lyonnais fut racheté par le président
du groupe Pathé, Jean Michel Aulas en 1992. Un an plus tard, le président du groupe NRJ,
Max Guazzini décide de prendre en main le club de rugby francilien. Tous 2 ont par ailleurs
choisi à l’époque des entraîneurs peu expérimentés (Bernard Laporte pour l’un, Raymond
Domenech pour l’autre) qui par la suite sont devenus sélectionneurs de l’équipe de France
dans leurs sports respectifs. Mais les similitudes ne s’arrêtent pas là.
En effet, sur le plan sportif, les 2 clubs connaissent des trajectoires assez similaires. Ils
remontent tous 2 en première division assez rapidement avant d’accéder au titre de Champion
de France. Le Stade Français a remporté lors de ces 10 dernières années 4 titres de champion
national alors que son homologue lyonnais règne en maître sur la première division de
football Française avec 7 titres consécutifs depuis la saison 2000-2001. Mais les clubs se
trouvent confronter au même problème : l’absence de titre au niveau européen. Bien que tous
2 soient très brillants sur la scène nationale, les lyonnais n’ont jamais dépassé les ¼ de finale
d’une compétition européenne et le club francilien n’est jamais parvenu a gagné un titre
continental malgré une finale perdue en 2001.
Sur le plan économique, les 2 clubs présentent également des points communs. Ils ont
tous 2 su miser sur leur réussite sportive pour se constituer en véritable entreprise avec des
résultats financiers conséquents. L’Olympique Lyonnais dispose aujourd’hui du budget le
plus élevé de toute la Ligue 1 Orange36, celui-ci dépassant les 200 millions d’euros pour
l’exercice 2007-2008 et est côté en bourse depuis plus d’un an. La réussite économique des 2
36
Nom donné à la première division français de football.
56
clubs passe également par le lancement de gammes de produits dérivés. Mais c’est à ce niveau
là que la différence semble se faire entre l’Olympique Lyonnais et le Stade Français. Alors
que le club de rugby a vu ses ventes augmenter grâce à l’attraction de nouveaux
consommateurs, l’offre du club de football ne semble séduire que les inconditionnels du club
rhodanien. En effet, malgré l’hégémonie du club sur le championnat, il ne semble pas pour
autant réussir à s’attirer les faveurs du public (qui lui préfère toujours le Paris Saint Germain
ou l’Olympique de Marseille), contrairement au Stade Français.
L’importance de la communication
La communication semble être le principal facteur explicatif de cette différence de
popularité entre les 2 clubs. Les résultats sportifs ne suffisent en effet pas, il faut être capable
de faire rêver les spectateurs, de pouvoir en attirer de nouveaux. Toute la force du Stade
Français réside dans le fait d’avoir su amener au stade des personnes qui ne s’intéressaient pas
auparavant au rugby. Les dirigeants ont su grâce à leur politique de communication et leurs
slogans37 « féminiser » le public venant assister aux rencontres et donc susceptible de
consommer les produits de la marque. A l’inverse, les dirigeants lyonnais, qui n’avait pas
besoin de communiquer pour attirer des spectateurs dans les stades, étant donné la popularité
du football en France, n’ont jamais entrepris d’actions de communication de grande envergure
visant à attirer un public plus large. Le Stade Français l’a fait à la base par nécessité en
quelque sorte, pour drainer une assistance plus importante aux matchs du club. Et cela s’est
avéré payant sur le long terme car le club de rugby francilien a réussi à fidéliser différentes
cibles identifiées.
Cette politique de communication s’est de plus avérée payante dans la mesure où elle a
servi à combler un vide. En effet, le stade Français est le seul club important du nord de la
France. Il y avait donc déjà un public potentiel. Cette politique de communication entreprise
par le club a donc servi à créer une demande auprès du public à laquelle seule l’offre du Stade
Français était susceptible de répondre.
Nous venons donc de voir comment 2 clubs, qui ont connu des trajectoires assez
similaires depuis une dizaine d’années, qui parviennent à obtenir des résultats sportifs
probants et des résultats financiers encore meilleurs peuvent se retrouver dans des situations
37
« Vous êtes nos invitées », relatif à une rencontre du Stade français où les femmes se sont vu offrir l’entrée au
stade.
57
assez différentes. Le Stade Français bénéficie d’une cote de popularité élevée alors que
l’Olympique Lyonnais reste un éternel mal aimé du football Français. C’est là que l’on voit la
prépondérance d’une politique de communication bien étudiée, qui alliée à un contexte
favorable peut être synonyme de succès et de popularité. Car il est important de rappeler que
même si le l’environnement de l’Olympique Lyonnais est beaucoup moins favorable à cause
de l’ancrage historique du PSG et de L’OM dans le championnat Français d’une part et des
dérives du sport professionnel et de la haute compétition d’autre part, le président de
l’Olympique Lyonnais n’est pas un aussi fin communiquant que M. Guazzini. C’est sûrement
pour cela que les cotes de popularités de ces 2 clubs sont si éloignées, bien qu’ils présentent
un bon nombre de points communs.
En conclusion, nous pouvons donc dire que le Stade Français a su miser efficacement
sur le capital sympathie dont il dispose auprès du public. C’est aujourd’hui un club populaire
et plus qu’un club, le Stade Français est à présent une véritable entreprise. Des objectifs
stratégiques sont ainsi fixés par la direction du club, des actions marketing sont régulièrement
entreprises, allant de pair avec la stratégie de communication menée par les dirigeants.
Le club francilien dispose à l’heure actuelle de nombreux points de ventes, d’une
boutique on-line, qui lui permettent de commercialiser plus de 200 produits dérivés. On peut
donc dire que la diversification des activités semble plutôt réussi. Ce succès est avant tout dû
à la volonté des dirigeants de se différencier de la concurrence, d’apporter une image neuve
au rugby, plus populaire, mais aussi plus glamour afin de séduire d’autres publics.
58
Conclusion
Lors de sa reprise par M. Guazzini au début des années 1990, le Stade Français ne disposait
alors que d’une salle des trophées garnie par des « Coupes poussiéreuses », uniques vestiges
d’un passé glorieux, mais qui semblait déjà bien lointain. Il fallait en effet remonter 5
décennies en arrière pour retrouver le nom du club inscrit dans un palmarès. Et c’est donc M.
Guazzini, cet ambitieux homme d’affaires qui va tenter le pari de redonner une seconde vie au
club de rugby francilien. Cela ne semblait a priori pas une mince affaire. Plusieurs obstacles
allaient se dresser devant ce projet qui paraissait aux yeux de beaucoup un peu fou.
Le premier obstacle était bien évidemment d’ordre économique. Comment réussir à
développer un club qui dispose de capacités financières assez faibles ? quand on sait que les
budgets annuels des clubs du TOP 14 avoisinent en moyenne les 500 000 euros en 200838, on
comprend très vite qu’en 1993, pour un club de 4ème division, les capacités de financement
sont assez faméliques. C’est pour cela que l’arrivée du président Guazzini va être
fondamentale. Il dispose à l’époque d’une fortune personnelle importante, fruit de ses
activités passées. Il va ainsi consentir des efforts financiers importants afin de recruter des
joueurs et des encadrants à la hauteur de ses ambitions.
Par la suite, avec le succès grandissant du Stade Français sur le plan sportif, les dirigeants
vont réussir à attirer de plus en plus de sponsors. Cette politique de sponsoring s’est avérée
très prolifique puisqu’on sait aujourd’hui que près d’un tiers du budget du club provient de ce
type d’activités39. Ainsi, au fil des années, au fur et à mesure que les sponsors accourraient
pour lier leur image au Stade Français, l’aspect financier est devenu de moins en moins
problématique. Le club réussi aujourd’hui à dégager les capitaux nécessaires à sa survie et à
son développement, de telle sorte qu’à l’heure actuelle, le président n’investit plus ses
ressources propres dans le club comme cela fut le cas au tout début.
De plus, la stratégie marketing mise en place par les dirigeants du club va contribuer à
accroître les recettes réalisées. En effet, un véritable effet de mode semble s’être emparé du
« phénomène Stade Français ». Afin d’en profiter, une large gamme de produits dérivés en
tout genre va être lancée et commercialisée auprès du grand public. Plusieurs d’entre eux vont
connaître un succès assez fulgurant, comme le calendrier des « Dieux du Stade » par exemple,
38
39
F. Calange, « Le rugby business », dans L’Equipe, 11 janvier 2008.
Daniel Rovira, Le Stade Français c’est aussi une entreprise, dans l’entreprises n°260 (octobre 2077), p 64.
59
et leur vente à grande échelle va venir renflouer les caisses du Stade Français. Lors de la
saison 2006-2007, près de 15% du budget du club provenait de ces activités.40 Mais ces
produits phares, plus que la manne financière qu’ils représentent, vont surtout assurer au club
francilien une certaine visibilité sur le plan médiatique, qui va contribuer à en faire un club
plus populaire, aimé du public.
Car le 2ème obstacle qui se dressait sur la route des dirigeants du club était avant tout
d’ordre culturel. Il apparaît en effet difficile de séduire la population francilienne qui est
plutôt tournée vers le monde du football. C’est pour cela qu’une politique de communication a
été mise en place. Celle-ci s’est révélée par ailleurs assez efficace si on considère
qu’aujourd’hui un tiers du budget du club provient des recettes de la billetterie. A titre de
comparaison, en lors de la saison 1993-1994, la plus grosse affluence mesurée au stade Jean
Bouin ne dépassait 250 spectateurs. Or, aujourd’hui, le Stade Français est capable de remplir
un stade d’une capacité de 80 000 personnes en se payant le luxe d’afficher complet plusieurs
semaines avant le match.
C’est par ailleurs la capacité du club à communiquer, à « créer l’évènement » qui va le
rendre si populaire. Plusieurs actions de communication ont ainsi marqué la vie du club et
contribuer à développer sa notoriété. La première a été le lancement du single « I will
survive » qui devait être l’hymne officiel du club pur la saison 1997-1998, et qui est devenu
celui de l’équipe de France de football championne du monde. Ce single s’est ainsi vendu à
plus de 500 000 exemplaires durant l’été 199841. C’est à partir de ce moment précis que le
grand public va commencer à entendre parler du Stade Français et à s’y intéresser.
Pour capitaliser sur la notoriété grandissante du club, acquise grâce au single « I will
survive », les dirigeants vont décider dans la foulée de mettre en place une 2ème grande action
de communication. En septembre 1998, le Stade Français va en effet réaliser son premier
match en dehors de son stade habituel. M. Guazzini a pour l’occasion décidé de voir les
choses en grand, et c’est le Parc des Princes qui va accueillir la rencontre opposant le club
francilien à l’équipe de Castres. Le public francilien tout entier va être ciblé par cette politique
de communication, bien qu’une cible va pour l’occasion être privilégiée : les femmes. C’est
en effet un des aspects de la stratégie du club : toucher des populations qui ne semblent pas à
priori séduites par le rugby. C’est en ce sens que la politique de communication va s’avérer
prépondérante, car elle va contribuer à modifier l’image de ce sport, pour le rendre plus
40
41
Daniel Rovira, Le Stade Français c’est aussi une entreprise, dans l’entreprises n°260 (octobre 2077), p 64.
Selon l’IFOP.
60
attrayant à des nouvelles franges de spectateurs potentiels. C’est ainsi que va s’opérer une
sorte de « glamourisation du rugby », avec l’utilisation massive de la couleur rose (que cela
soit dans la conception des maillots, dans le logo…), la commercialisation du fameux
calendrier des « Dieux du Stade », qui vont contribuer à séduire une population plus féminine,
ainsi que la population homosexuelle.
C’est donc la grande force de la politique de communication menée par les dirigeants
que d’avoir su séduire des publics nouveaux, pour attirer chaque fois plus de spectateurs au
stade (notamment lors des évènements organisés au Parc des Princes ou au Stade de France).,
en donnant une image différente du rugby, plus moderne, plus innovante. Mais en même
temps, le club a su capter et garder un public de « connaisseurs », en respectant les valeurs
traditionnelles de ce sport.
La politique marketing et la stratégie de communication menée par les dirigeants du
Stade Français ont donc bien servi les intérêts du club. Cela lui a permis de bénéficier d’une
plus grande visibilité médiatique, donc d’une plus grande notoriété auprès du public et
d’attirer bon nombre de sponsors. C’est ainsi que le club a pu se développé tant
économiquement que sportivement et être l’une des associations sportives les plus connues
en France. Une communication originale est par ailleurs bien souvent l’uns des éléments clé
de la réussite d’un projet, que cela soit dans le domaine sportif ou dans d’autres domaines
complètement différents.
Si on considère par exemple l’univers de la musique, on s’aperçoit que le fait de mener
des actions originales peut entraîner un succès certain. Le groupe britannique Radiohead
semble en être la parfaite illustration. En effet, pour le lancement du dernier album du groupe
intitulé « In rainbows », un site a spécialement été créé : Inrainbows.com. Il a été décidé de ne
pas commercialiser immédiatement l’album sous le format traditionnel (le CD). La seule
façon de se procurer cet opus était de le télécharger sur Internet. Le prix à payer était par
ailleurs laissé à la libre appréciation de l’internaute. Pour accompagner le lancement de cet
album, le groupe a multiplié les concerts, les apparitions sur les plateaux de télévisions, afin
de créer un véritable évènement autour du lancement de ce projet assez original. Au final,
cette opération de communication fut un franc succès dans la mesure où pas moins 1.2
millions d’internautes ont acheté l’album sur le site42. Quand on connaît la mauvaise santé
42
Selon www.comscore.com, site de mesure d’audience sur Internet.
61
actuelle de l’industrie du disque, le groupe ne peut que se féliciter du nombre de ventes. Seul
bémol, bien que plus d’un million ait acheté cet opus, le prix payé avoisine en moyenne les
3,2 dollars43. Bien qu’au niveau de la communication l’opération se soit révélée assez efficace
étant donné le buzz qui s’est créé autour de cet évènement, le succès sur le plan économique
est assez relatif étant donné le prix payé par les internautes et les ventes faibles enregistrées
lors de la commercialisation du CD au début de l’année 2008.
Une communication originale peut donc contribué au succès d’un projet mais le cas du
Stade Français nous démontre que cela ne suffit pas.
Mais un facteur très important se doit d’être relevé dans le succès du club :
l’importance de son président M. Guazzini. La personnalité du dirigeant, son caractère
visionnaire peut bien souvent s’avérer primordiale dans le succès d’un projet. Quand il
reprend le club, il affiche clairement ses ambitions, qui peuvent paraître bien prétentieuses
compte tenu de la situation du club en 1992. Comment peut il prétendre réussir à faire
remonter parmi l’élite un club qui se trouve dans les profondeurs du classement de la 4ème
division nationale ? Peu de gens croyaient en ce projet, mais le président lui y croyait et a
réussi à mener à bien sa mission. C’est tout d’abord grâce à son expérience des affaires
acquises au sein du groupe NRJ qu’il a pu développé ce projet audacieux. Ces qualités de
communiquant ont également été un atout indéniable dans la réussite du club Français. Mais
c’est aussi et peut être surtout son caractère visionnaire qui semble avoir été prépondérant. Il a
su déceler dans ce club un potentiel qu’il a lui-même exploité.
L’importance du président, d’un homme fort à la tête d’une entreprise est une
constante que l’on peut retrouver dans d’autres exemples. Toutes proportions gardées, le cas
du site www.amazon.com semble être un bon exemple. C’est une entreprise qui est pour ainsi
dire parti de rien, mais qui avait à sa tête un président ambitieux, visionnaire, qui a su déceler
des potentialités inexploitées. Jeff Bezos avait compris dès 1995 que l’outil Internet offrait
des possibilités assez exceptionnelles en terme de commerce. Il décide alors de créer un site
dédié à la commercialisation de livres. Il a commencé seul en 1995 et 12 ans plus tard « la
plus grande bibliothèque du monde » (surnom donné a Amazon) employe plus de 12 000
personnes. C’est donc comme pour le cas du Stade Français le caractère visionnaire d’une
personne qui a permis le développement d’une entreprise.
43
Selon www.comscore.com, site de mesure d’audience sur Internet.
62
En procédant par analogie avec d’autres domaines que celui du sport, en se rend
compte que les recettes du succès sont souvent les mêmes et qu’elles peuvent s’appliquer quel
que soit le domaine d’activité dans lequel on se trouve. Ici, 2 aspects du modèle de réussite
Stade Français semblent particulièrement importants. Le premier est l’élaboration d’un
politique de communication efficace, si possible originale afin de séduire une large partie du
public. Cela peut comme nous l’avons vu se révéler intéressant dans d’autre secteurs tels que
l’univers musical. Quand le marché est « saturé », ce qui est le cas dans l’industrie de la
musique et dans le marché du sport, le meilleur moyen de réussir est de se différencier. Pour
que le public soit informé des différences que l’offre d’une entreprise propose par rapport à
une autre, il faut communiquer le plus possibles sur ces facteurs différenciants.
Ensuite, il est important de noter qu’une stratégie d’entreprise, aussi bonne soit elle ne
saurait être couronnée efficace si elle n’est pas mise en œuvre et orientée par des leaders, des
visionnaires. Le caractère du chef d’entreprise, sa capacité à faire adhérer à un projet se révèle
parfois tout aussi prépondérant que la stratégie en elle-même. Il n’est pas certain que si
quelqu’un d’autre avait repris le Stade Français en élaborant un projet similaire aurait réussi
de la même façon. Il en va de même pur le cas de l’Olympique Lyonnais que nous avons déjà
évoqué. Mais cela est aussi vrai dans d’autres domaines. Si on considère le commerce
électronique ou l’informatique Jeff Bezos et Bill Gates ne sont que 2 exemples parmi tant
d’autres de chefs d’entreprises visionnaires ayant réussi à se constituer un empire en étant
parti de rien.
Bien que l’exemple du stade Français puisse être présenté à de nombreux égards
comme un modèle de réussite, on peut toutefois se demandé si le fait de démocratiser, de
vouloir donner une image différente du rugby ne peut pas à terme nuire à ce sport ?
Beaucoup dénoncent en effet la stratégie que mène M. Guazzini dans la gestion de son
club. Les puristes lui reprochent notamment de dénaturer le rugby, pour le rendre plus
attrayant vis-à-vis d’un public essentiellement urbain. « Les valeurs du terroir » prônées par le
rugby traditionnel n’étant pas en adéquation avec celles du public francilien, les dirigeants ont
dû jouer avec les codes du rugby pour le rendre plus populaire. Beaucoup de joueurs, dont
l’ancien capitaine du Stade Français Vincent Moscato s’insurge notamment contre la
publication des dernières éditions du calendrier des Dieux du Stade, où les joueurs
63
apparaissent de plus en plus dénudés d’année en année. L’image donnée par ce calendrier est
selon lui en « totale contradiction avec l’image du rugby tel qu’il devrait être »44
De plus la gestion entreprenariale du club constitue un pas de plus vers la
professionnalisation excessive d’un sport qui se veut à la base amateur. Cette
professionnalisation peut à terme nuire au monde du rugby. Tout d’abord, on constate que
depuis la semi professionnalisation des 2 premières divisions nationales, un fossé tend à se
creuser entre le rugby amateur et le rugby professionnel. Cette professionnalisation devait être
à la base une « excroissance de la bonne santé du rugby amateur »45. Mais la réalité s’est
révélée tout autre. Les exigences du monde professionnel, que cela soit en terme de structures
financières, d’infrastructures font qu’il est aujourd’hui beaucoup plus compliqué pour un club
amateur d’accéder à l’élite. Si les règles du jeu telles qu’elles sont posées à l’heure actuelle
par la Fédération Française de Rugby eurent été les mêmes à l’époque où le Stade Français
était en 4ème division, son accession à l’élite aurait sûrement été beaucoup plus problématique.
Cette tendance à la professionnalisation s’inscrit d’ailleurs dans une tendance
mondiale, qui pourrait bien à terme nuire au rugby. C’est en partie ce que dénonce G. Lecocq
dans une étude intitulée « Lorsque le rugby professionnel tente de se mondialiser, le rugby
terroir va-t-il disparaître ? » parue dans un ouvrage de P. Bouchet et C. Sobry46. Il y évoque
les dérives d’une professionnalisation à outrance, sous l’impact du phénomène de
globalisation des échanges. Alors qu’à la base les équipes de rugby étaient constituées de
joueurs provenant de la province du club, le rugby tend à perdre cet aspect terroir,
traditionnel. Les joueurs sont aujourd’hui considérés comme de simples marchandises, soumis
aux lois du marché comme d’autres biens classiques. Ce sont donc les clubs les plus riches qui
parviennent à attirer les meilleurs joueurs et à glaner les titres. Cela contribue donc une fois de
plus à dénaturer le rugby. De plus, ne risque t-on pas de voir avec cette professionnalisation à
outrance apparaître les mêmes fléaux que dans les autres sports, tels que la violence dans les
stades, le dopage, la corruption ?
44
Propos recueillis en interview pour le journal L’Equipe du 11 juin 2007.
G. Lecocq, Marketing et management du sport : du local au global, Paris, Presses Universitaires du
Septentrion, 2004.
46
P. Bouchet et C. Sobry, Marketing et management du sport : du local au global, Paris, Presses Universitaires
du Septentrion, 2004.
45
64
On peut donc légitimement se demander si il ne serait pas nécessaire à ce sport d’introduire
plus d’organismes de contrôle afin de constituer de véritables gardes fous et éviter les dérives
de la professionnalisation ?
Car sinon, les aspects qui faisaient du rugby un sport si singulier et si particulier
risquent de disparaître, et le public pourrait ne plus se reconnaître dans les valeurs véhiculés
par ce rugby « trop professionnalisé » et donc s’en détourner au profit d’une nouvelle
pratique.
65
ANNEXES
Annexe n°1
66
67
Annexe n°2
Annexe 3
La fréquentation de spectacles sportifs selon les professions
CSP du chef de famille
Sont allés au cours des 12 derniers mois à un
spectacle sportif payant (en %)
Agriculteurs
24
Artisans, commerçants, chefs d’entreprise
25
Cadres et professions supérieures
32
Professions intermédiaires
36
Employés
28
Ouvriers qualifiés
31
Ouvriers non qualifiés
26
Retraités
12
Autres inactifs
18
Ensemble
25
Source : Donnat, Ministère de la Culture et de la Communication, 2002
68
Annexe 4
Fréquentation de spectacles sportifs selon l’âge (en %)
Age
Taux de fréquentation de spectacles sportifs
15-19 ans
40
20-24 ans
33
25-39 ans
26
40-59 ans
24
60 ans et plus
13
Ensemble
25
Source : Donnat, Ministère de la Culture et de la Communication, 2002
Annexe 5
Les téléphones portable Stade Français
69
Bibliographie
Ouvrages :
•
Michel Desbordes, Fabien Ohl et Gary Tribou, Marketing du sport, Paris, aux éditions
Economica, 2001, 513p
•
Jean Marc Décaudin, La communication Marketing, Paris, aux éditions Economica,
2003, 371p
•
Patrick Bouchet et Claude Sobry, Management et marketing du sport : du local au
global, aux éditions Presses Universitaires du Septentrion, 2005, 341p
•
Gary Tribou, Sponsoring sportif, Paris, aux éditions Economica, 2004
•
Patrick Bouchet et Charles Pigeassou, Management du sport : actualités,
développements et orientations de la recherche, Montpellier, aux éditions Afraps,
2000
•
Gary Tribou et Bernard Augé, Management du sport : marketing et gestion des clubs
sportifs, Paris, aux éditions Dunod, 2003
•
P. Bouchet et C. Sobry, Marketing et management du sport : du local au global, Paris,
Presses Universitaires du Septentrion, 2004
•
P. Chantelat, La professionnalisation des organisations sportives. Nouveaux enjeux,
nouveaux débats, Paris, L’Harmattan, 2001
•
Source : Alain Ferrand, Luigino Torrigiani, Andreu Camps i Povill, Sport et
Sponsoring, Paris, INSEP publications 2006
•
P. Mingnot et P. Truchot, Les pratiques sportives des Français, Paris, Insep, 2002
•
F. Ohl, Sociologie du sport, perspectives internationales et mondialisation, Paris,
PUF, 2006
•
B. Halba, Economie du sport, Paris, Economica, 1997
•
M. Desbordes, Stratégie des entreprises dans le sport, Paris, Economica, 2004
•
A. Loret, Concevoir le sport pour un nouveau siècle, Grenoble, PUS, 2004
70
Articles :
•
Laurence Girard, Grâce à son marketing offensif et innovant, Max Guazzini
redessine le territoire du rugby, Le Monde, 15 octobre 2003, p23
•
Eric Collier, Le Stade Français –CASG propose du grand spectacle, Le Monde, 9
septembre 1998, p22
•
Daniel Rovira, Le Stade Français, c’est aussi une entreprise, L’Entreprise, Octobre
2007, p64-66
•
Thierry Lardinoit, Gary Tribou, Frédéric Palonimo, Jean Paul-Louis Minquet,
Franck Pons, André Richelieu, Grégory Katz-Bénichou, Jean Noël Kapferer,
Dossier : la gestion du sport, La Revue Française de gestion, mai/juin 2004, p126201
•
Debenedetti S., L’expérience de visite des lieux de loisirs : le rôle central des
compagnons, Recherche Applications en Marketing, 2003, 18, 4, 71-87
Liens Internet :
•
http://www.blogg.org/blog
•
www.stade.fr
•
www.sportsstratégies.fr
71

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