IMPACT ÉCONOMIQUE ET SOCIAL DE LA CRISE FINANCIÈRE ET

Transcription

IMPACT ÉCONOMIQUE ET SOCIAL DE LA CRISE FINANCIÈRE ET
Bureau International du Travail
Bureau Régional de Dakar
RAPPORT
IMPACT ÉCONOMIQUE ET SOCIAL
DE LA CRISE FINANCIÈRE ET
ÉCONOMIQUE :
LES RÈPONSES DES POLITIQUES.
NATIONALES ET SOUS-REGIONALES
Février 2009
1
SOMMAIRE
Liste des tableaux et graphiques
3
Liste des abréviations
4
Introduction
5
I/ Les réformes macroéconomiques et financières : les nouvelles
performances après la Déclaration du Millénaire.
8
II/ La montée des crises énergétique, alimentaire et financière: quels
impacts sur une Afrique en voie de redressement
12
1. La crise énergétique avec la flambée des prix du pétrole a aggravé
les déséquilibres de la balance extérieure dans les pays importateurs
nets de pétrole
13
2. La crise alimentaire a approfondi les déséquilibres
macroéconomiques et contribué à la détérioration de la situation
sociale
15
3. Crise financière, récession et incidences globales
17
III/ Ampleur et profondeur de la crise financière mondiale : Quel impact sur
18
les économies africaines ?
De la crise financière à la récession
18
a)
Aux origines de la crise
18
b)
Les répercutions de la crise financière sur l’économie
réelle
19
2. Les canaux de transmission
21
3. Quelles sont les conséquences au niveau national et régional sur
l’emploi et le social
27
IV/ Les réponses des politiques nationales et sous-régionales : Quelles sont
1.
les mesures prises pour faire face : comprendre pour agir
31
Les solutions déjà prises ou envisagées
32
1.1. Les mesures préconisées par la CEDEAO/UEMOA
32
1.2. Les réactions des Etats
34
1.3. Que préconisent les institutions internationales pour aider les
pays africains à faire face à la crise ?
35
2. Les propositions de types de politiques possibles
39
2.1. Les mesures préventives
39
2.2. Les mesures curatives
42
Conclusion
42
1.
Bibliographie sommaire
46
2
Liste des tableaux et graphiques
Page
Tableau 1 : PIB nominal dans le monde (en milliards de dollars)………………………….5
Tableau 2 : les principaux indicateurs macroéconomiques…………………………………..9
Tableau 3 : Croissance en Afrique entre 1999 et 2005………………………………………..10
Tableau 4 : Evolution des flux financiers vers l’Afrique durant la dernière
décennie : Investissements étrangers directs, flux nets
(en millions de dollars E U)……………………………………………………………10
Tableau 5 : Des prix de l’alimentation plus élevés ont augmenté l’incidence
et la sévérité de la pauvreté…………………………………………………………...15
Tableau 6 : Résultats de l’économie mondiale…………………………………………………..20
Graphique 1 : Les apports en ressources…………………………………………………….……11
Graphique 2 : La croissance économique est destinée à se ralentir en
Afrique de l’Ouest ………………………………………………………………26
3
Liste des abréviations
AGOA : African Growth and Opportunity Act
APD : Aide Publique au Développement
BAD : Banque Africaine de Développement
BCEAO : Banque Centrale des Etas de l’Afrique de l’Ouest
BIT : Bureau International du Travail
CEA : Commission Economique pour l’Afrique
CEDEAO : Communauté Economique et Monétaire de Etats de l’Afrique de l’Ouest
CNUCED : Conférence des Nations Unies pour le Commerce et le Développement
DSRP : Document Stratégique de Réduction de la Pauvreté
FMI : Fonds Monétaire International
IDE : Investissements Directs Etrangers
MCA : Millenium Chalenge Account
NEPAD : Nouveau Partenariat pour le Développement de l’Afrique
OIT : Organisation Internationale du Travail
OCDE : Organisation de Coopération pour le Développement Economique
ONU : Organisation des Nations Unies
OMC : Organisation Internationale du Commerce
OMD : Objectifs du Millénaire pour le Développement
PIB : Produit Intérieur Brut
PMA : Pays les Moins Avancés
PNUD : Programme des Nations Unies pour le Développement
PPTE : Pays Pauvres Très Endettés
UEMOA : Union Economique et Monétaire de Etats de l’Afrique de l’Ouest
4
Introduction
La mondialisation considérée comme un phénomène multiforme soulève
beaucoup de questions quant à ses liens avec les pays sous-développés (PSD) qui
évoluent encore à sa périphérie comme la région ouest africaine :
Offre-t-elle les mêmes chances et les mêmes avantages à tous les
partenaires ou participants?
Quelles sont objectivement ses conséquences directes et indirectes sur les
différents partenaires, singulièrement les plus faibles d’entre eux?1
Pourra-t-elle contribuer positivement à la croissance économique des pays
d’Afrique sub-saharienne, au développement de l’emploi, à l’éradication de
la pauvreté et à la réduction des inégalités ?
Quel sort réserve-t-elle aux acteurs nationaux les plus fragiles et les plus
déficients ?
Va-t-elle harmoniser les structures institutionnelles et les normes et valeurs
propres aux sociétés ?
Est-elle inéluctable ou contournable ?
Ces questions sont déterminantes pour les Pays en développement,
particulièrement ceux au Sud du Sahara qui sont engagés dans un vaste chantier
d’une éradication de la pauvreté à l’horizon temporel 2015 qui correspond à la
réalisation des Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD) du PNUD. Cela
commande la mise en place de stratégies de développement avec des investissements
massifs dont la part la plus importante ne devra provenir que de l’extérieur. La
mondialisation est-elle une chance ou alors un handicap.
Le Produit mondial a connu au cours du siècle une croissance exceptionnelle :
en dollars de 1975, il est passé de 580 milliards en 1900 à 25000 milliards au milieu
des années 90, ce qui représente en moyenne 4500 dollars per capita. Seulement, ce
tableau idyllique est altéré par la succession de crises graves qui sont autant de périls
économiques, financiers et sociaux dont les dernières en date ont été la déroute de
certains Nouveaux Pays Industrialisés d’Asie et d’Amérique Latine souvent proposés
comme modèles de référence pour sortir du sous-développement en une génération.
Ces crises répétées et de plus en plus profondes montrent l’ampleur des risques,
des incertitudes et des dysfonctionnements que les Institutions Financières
Internationales n’ont pu gérer, faute d’instruments adéquats de régulation et de
ressources suffisantes. C’est ce qui est apparu dans le cas de la crise financière
actuelle, celle qui s’est déroulée en Asie et auparavant au Mexique, au Brésil et en
Uruguay.
Tableau 1 : PIB nominal dans le monde (en milliards de dollars)
Économies
Asie de l’Est et
Pacifique
Europe et Asie
Produit Intérieur brut
1990
2004
665 783
2 650 867
1 107 862
1 769 739
2005
3 039 976
2 201 159
Moustapha KASSÉ (2003) : De l’UEMOA au NEPAD : le nouveau régionalisme africain, Éditions
Nouvelles du Sud, 256 p
1
5
Centrale
Amérique Latine
et Caraïbes
Afrique de l’Est et
du Nord
Asie du Sud
Afrique
Subsaharienne
1 101 298
2 021 995
2 460 991
__
547 496
625 311
401 923
298 442
880 212
523 310
1 016 267
621 879
Sources: World Bank Indicators CD Rom 2006, World Bank Indicators 2007.
La participation de l’Afrique à l’économie mondiale a fortement diminué au
cours des cinq dernières décennies aussi bien du point de vue de son PIB, de ses
exportations que des IDE reçus. Selon l’OCDE, la part de l’Afrique dans le PIB
mondial mesuré en parité de pouvoir d’achat entre 1950-2000 a baissé d’un tiers
alors que sa part dans les exportations a été divisée par 3. Il en va de même pour les
investissements directs étrangers.
Pourtant, l’économie mondiale a une forte incidence sur la croissance des
économies africaines. Cela s’explique d’abord par la base de son système productif
composée essentiellement de produits primaires destinés aux marchés extérieurs.
Toutefois, le faible poids économique et l’insertion restreinte dans des réseaux
diversifiés de commercialisation font que sur beaucoup de points les paramètres que
pose la mondialisation ignorent le continent. Ni les investissements croisés, ni les
échanges internationaux sur la base de la croissance de la production mondiale, ni la
globalisation financière, ni les réseaux transnationaux, ni les firmes globales, nulle
part on ne trouve une place significative à l’Afrique. A ces facteurs s’ajoutent d’autres
qui sont endogènes et contribuent à la marginalisation du continent au titre desquels
on peut noter :
l’absence d’infrastructures adéquates de communication ;
l’étroitesse des marchés ;
les incertitudes et risques nés des conflits ;
la mauvaise qualité des administrations publiques.
Les Programmes d’Ajustement Structurel ont tenté, pendant un bon quart de
siècle, d’introduire des réformes ayant pour objectif l’assainissement des économies
en vue de la restauration de leur compétitivité extérieure par la réduction des déficits
budgétaires, une pression sur les salaires, la suppression des subventions, la
privatisation et le dégraissage de la fonction publique. Il était attendu qu’une fois
assainies, les économies devraient amorcer une croissance durable tirée par les IDE
et les exportations. En définitive, on s’aperçoit qu’en fait l’assainissement ne finit
jamais, les IDE se font attendre, la croissance n’est pas durable et la pauvreté est
encore loin d’être éradiquée.
Au demeurant, le continent africain est la région du monde la plus pauvre, sa
production moyenne par habitant à la fin des années 90 est inférieure à ce qu’elle
était en 1960, sa part dans le commerce mondial a reculé (voir figure 2 en annexe).
Au niveau social, la situation est simplement catastrophique avec, selon le PNUD,
250 millions de personnes qui n’ont pas accès aux services de santé, 140 millions
d’analphabètes et 2 millions d’enfants qui meurent chaque année avant leur premier
anniversaire. Le continent s’intègre difficilement dans le concert des nations : en
marge de l’expansion industrielle mondiale, il risque d’être exclu de la révolution
mondiale des technologies de l’information et des télécommunications.
6
Le bilan de 10 années de recherche et de lutte contre la pauvreté est fortement
contrasté. Les actions de lutte contre la misère et la famine ont donné quelques
résultats positifs indéniables avec l’augmentation de la production alimentaire du
système périphérique et le recul de la faim. Toutefois, depuis les années 70, le
nombre de pauvres augmente au même rythme que la population (Kankwenda,
1999).
L’Afrique sub-saharienne compte selon les plus récentes statistiques environ
250 millions de pauvres soit 45% de sa population. Il semble que le rythme de
croissance de la pauvreté est plus rapide que celui de la production et des revenus. Ce
processus est aggravé par une forte et incohérente croissance urbaine et une
démographie galopante deux phénomènes conjugués qui font exploser la demande
sociale. Comme quoi, la main invisible du marché est fortement prédatrice de la
condition sociale.
Le problème de nombreux pays africains et de la sous région tient au fait que,
bien que la croissance économique s’y situe à un niveau qu’ils n’avaient pas connu
jusqu’alors, elle n’a toutefois pas entraîné une forte création d’emplois, en particulier
dans le secteur formel de l’économie. En conséquence, de nombreux africains
continuent à travailler dans le secteur informel ou sont sans emploi, dépendant pour
leur survie du soutien des membres de leur famille (CEA 2005). Depuis les années
90, le taux de chômage en Afrique hors Afrique du Nord s’est maintenu au tour de
10%, accusant qu’une baisse insignifiante pour redescendre à 9,7% en 2006. De
même, le pourcentage de travailleurs pauvres (c'est-à-dire gagnant moins de 2 dollars
par jour) n’a diminué que très lentement, passant de 87,7% en 1996 à 86,2% en 2006.
En comparaison, la diminution a été nettement plus rapide en Afrique du Nord (OIT,
2007). Cela montre que les principaux obstacles que les Africains rencontrent sur le
marché du travail tiennent au manque d’emplois décents dans le secteur formel, au
sous-emploi, en particulier dans les zones rurales, et au nombre de travailleurs
pauvres.
En clair, les indicateurs sociaux montrent que l’Afrique est à l’écart de la
tendance générale vers l’amélioration du bien-être : un être humain sur cinq survit
avec un dollar par jour. Parmi les 49 pays les moins avancés (PMA), recensés par
l'ONU, 13 sont en Asie ou en Amérique et 1 au Proche-Orient (Yémen). Les 35
restants sont en Afrique Sub-saharienne. Plusieurs facteurs sont en cause :
l'inefficacité des politiques publiques en particulier au niveau démographique,
l'instabilité sociale et politique, les ponctions opérées par le remboursement de la
dette, bien sûr, mais aussi le poids des traditions : attribution des terres aux familles
nombreuses, travail des enfants, etc.
C’est dans cette contexture dépressive que la Communauté internationale par
la Déclaration du Millénaire, s’est fixée l’objectif de réduire de moitié la pauvreté
entre 1990 et 2015. Le Secrétaire Général de l’ONU, Kofi Annan, le Secrétaire général
de l’OCDE, Donald Johnson, le Directeur Général du FMI, Horst Köhler, et le
Président de la Banque mondiale, James Wolfensohn avaient solennellement
proclamé que leurs différentes institutions s’emploieraient à faire de cet objectif de
développement le fondement commun de leurs actions et de leurs programmes et la
mesure de leur efficacité.
Au regard de la progression de la pauvreté dans le continent, est-il possible de
sortir d’ici 2015 de la pauvreté comme le souhaite le Programme du millénaire et le
NEPAD ? Si tant est que le lien existe, il faut alors au minimum réaliser un taux de
croissance annuel moyen de 7% ce qui nécessite des investissements colossaux de
7
l’ordre de 65 milliards de dollars pour des pays dont l’épargne intérieure est quasi
inexistante.
I/ Les réformes macroéconomiques et
financières : les nouvelles performances
après la Déclaration du Millénaire.
Par le biais des politiques de délocalisation et d’effort d’investissement en
capital humain, cette croissance s’est transmise à l’Asie. La mondialisation a, par ce
canal, constitué une véritable chance pour les pays du Sud, devenus émergents.
La mondialisation grâce à l’ouverture des frontière et voire même à leur
disparition, a donné l’occasion aux pays émergents de pouvoir vendre et acheter à
travers le monde et de se hisser ainsi sur l’échiquier international. Les pays de l’Asie
du sud-est ont ainsi saisi l’occasion pour investir et se faire une place de plus en plus
grande dans les questions commerciales, économiques et financières internationales.
Ainsi, il ne fait aucun doute que l’internationalisation des échanges que la
globalisation a permis de rendre possible, a constitué un atout très bénéfique pour
tous les pays du monde en général et les pays émergents en particulier.
Pendant quatre années jusqu’à la fin de l’été 2007, l’économie mondiale était
en pleine expansion. Le PIB mondial a progressé d’environ 5 % par an en moyenne,
le taux soutenu le plus élevé depuis le début des années 70 (voir figure 4 en annexe).
Environ trois quarts de cette croissance (mesurée selon la parité de pouvoir d’achat)
s’expliquaient par une expansion diversifiée dans les pays émergents et les pays en
développement.
Jusqu’en 2007, les pays africains ont, dans l’ensemble, enregistré une forte
croissance poursuivant le redressement économique entamé au milieu des années 90.
8
Tableau 2 : les principaux indicateurs macroéconomiques
La situation macro-économique a continué de s’améliorer dans la région
depuis deux décennies grâce à des politiques monétaires et budgétaires prudentes, à
une amélioration des approvisionnements alimentaires, à un accroissement des flux
d’aide publique au développement (APD) et des opérations d’allégement de la dette
ainsi qu’à un relèvement des cours des produits de base. Le rétablissement de la paix
et la stabilité politique dans plusieurs pays ont aussi joué dans un sens favorable.
La balance des opérations courantes a enregistré un excédent de 2,8 milliards
de dollars en 2004, après trois années de déficit. Alors qu’elle affichait un déficit de
0,2% au titre des exportations de biens et de services, la région est passée à un
excédent de 1,2% en 2004, grâce à la hausse des cours du pétrole et des produits de
base.
Les principaux facteurs ayant contribué à l’amélioration de la situation macroéconomique de l’Afrique ont été l’allégement de la dette dans le cadre de l’Initiative
en faveur des pays pauvres très endettés (PPTE) et l’augmentation de l’APD. Les
apports nets d’APD aux pays africains, indispensables pour soutenir leur croissance,
ont atteint le niveau record de 26,3 milliards de dollars en 2003. La tendance à la
baisse observée depuis les années 90 s’est ainsi inversée.
Si la performance macro-économique s’est nettement améliorée en Afrique
depuis le milieu des années 90, cette amélioration semble avoir eu peu d’incidence
sur le chômage. La croissance annuelle moyenne du PIB s’est régulièrement accélérée
pour passer de moins de 3% en 1998 à 5% ces dernières années.
9
Tableau 3 : Croissance en Afrique entre 1999 et 2005
Source : Banque mondiale, 2006
Même si les pays africains restent fortement tributaires de l’aide publique, il
est encourageant de noter qu’ils attirent davantage de capitaux privés. En effet, le
montant des flux nets de capitaux privés a augmenté, alors que celui des flux nets
d’aide publique a diminué et est devenu négatif ces dernières années. Les flux nets de
capitaux privés ont augmenté, passant d’une moyenne de 6,8 milliards de dollars
pendant la période 1998-2002 à 17 milliards de dollars en 2005 (voir figure 1 en
annexe), alors que les flux nets d’aide publique ont diminué, passant d’un apport net
de 1,2 milliard de dollars à des sorties nettes de 9,5 milliards de dollars.
Tableau 4 : Evolution des flux financiers vers l’Afrique durant la dernière
décennie :Investissements étrangers directs, flux nets (en millions de
dollars E U)
Avant Monterrey
Après Monterrey
(1998 – 2001)
(2002 – 2005)
Afrique du Sud
2573
2119
Algérie
612
916
Angola
Nigéria
Cote d’Ivoire
1652
1097
303
1331
1942
232
Sénégal
Mali
80
54
65
159
Mauritanie
Togo
Burkina Faso
33
45
11
113
37
19
Source : Indicateurs sur le développement dans le monde, 2007
Toutefois, il convient de noter que les flux nets de capitaux privés sont
inégalement répartis sur le continent, la part la plus importante revenant aux pays
pétroliers. Au cours de la période 2002-2004, l’Angola, la Guinée équatoriale le
Nigéria et le Tchad ont reçu au total 39% de l’ensemble des investissements directs
étrangers (IDE) destinés au continent. Le secteur pétrolier a reçu à lui seul plus de
90% des IDE en Angola (CNUCED 2005).
La dernière décennie a été marquée par une évolution encourageante des
engagements de la communauté internationale à l’appui des efforts de
10
développement national et régional en Afrique. On peut citer à cet égard l’examen
mondial des Objectifs du Millénaire pour le développement par l’Assemblée générale
des Nations Unies, le rapport de la Commission pour l’Afrique dirigée par le Premier
Ministre britannique, Tony Blair, et la réunion du G8 sur le financement du
développement de l’Afrique. Ces efforts doivent être appuyés par des stratégies
permettant d’améliorer l’efficacité de l’aide et de mieux cibler la lutte contre la
pauvreté dans les programmes de développement nationaux.
Graphique 1 : Les apports de ressources
Source : CEA, Rapport Economique sur l’Afrique, 2005
Le montant des envois de fonds enregistrés à destination de l’Afrique est passé
de 5,9 milliards de dollars en 1980 à 14,9 milliards en 2003, dont plus des deux tiers
sont allés à l’Afrique du Nord (FMI 2005). Dans certains pays, ces envois sont
importants par rapport au produit intérieur brut (PIB) ou à d’autres flux financiers. À
titre d’illustration, sur la période allant de 1980 à 2003, ils ont été supérieurs à 5% du
revenu national brut en Égypte, en Gambie, au Lesotho, au Maroc et au Swaziland,
(Banque mondiale). Au Cap-Vert, les envois de fonds des travailleurs ont représenté
près de huit fois le volume des apports d’investissements directs étrangers sur la
même période.
Pour l’ensemble du continent, ces envois ont représenté 2,5% du revenu
national brut en 2003, mais contrairement à ce que l’on observe dans d’autres
régions, ce ratio n’a pas considérablement augmenté ces 25 dernières années. En
réalité, les envois de fonds des travailleurs sont plus importants que ne l’indiquent les
chiffres, car des montants considérables sont transférés de manière informelle, sans
être comptabilisés.
Les envois de fonds des travailleurs sont une forme de capitaux étrangers très
performants, du fait de leur relative stabilité. Envoyés aux destinataires finaux, les
fonds ne risquent pas d’être détournés, comme l’aide publique au développement.
Leur évolution est pleine d’incertitude comme on le verra plus loin.
11
II/ La montée des crises énergétique,
alimentaire et financière: quels impacts sur
une Afrique en voie de redressement
Au début du millénaire, par rapport aux années 90, la situation africaine a
énormément bougé sur le plan économique, politique et social et cela quelque soit
l’angle d’analyse. Bien entendu, il faut préciser que le Continent est extrêmement
hétérogène. En conséquence, certains pays s’en sortent facilement, d’autres moins
bien et certains ne s’en tirent pas du tout. Ces contrastes la macroanalyse les occulte
mais la réalité commande d’en tenir grand compte. En effet entre 2000 et 2007, on
peut noter les tendances positives qui suivent :
1)
La situation macroéconomique s’est notablement améliorée. Les
indicateurs caractéristiques le montrent : retour de la croissance, meilleure maîtrise
des déséquilibres et de l’inflation, amélioration des avoirs extérieurs. A l’évidence, les
Pays Producteurs de Pétrole ont fortement contribué à cette situation suite à la
flambée des prix des hydrocarbures. Le plus remarquable est surtout la forte
dynamique de la croissance au taux assez élevé de (5,8%), légèrement supérieur à
celui de 2006 (5,7%). Les déterminants de cette croissance sont principalement liés à
des facteurs externes : la forte demande mondiale et des cours élevés des produits de
base, l’afflux des IDE, l’accroissement des surplus pétroliers, l’allégement de la dette
et la progression des exportations de produits. D’autres facteurs plus institutionnels
ont contribué à animer la croissance des économies africaines : l’amélioration de la
gestion macroéconomique et le recul de la conflictualité politique et des guerres.
2)
Les contraintes de la mondialisation bien que restant fortes, se
desserrent progressivement avec l’amélioration des cours des matières premières
d’origine agricole, minérale et énergétique, base des recettes extérieures et
budgétaires. Dans le même temps l’annulation de la dette PPTE a augmenté les
capacités de financement du développement surtout a niveau social.
3)
Les Technologies de l'information et de la communication bien que
constituant un risque de dépendance se présente comme une énorme opportunité
pour les systèmes productifs et financiers. Malgré le grand écart du fossé numérique,
le continent tire grand profit de l’économie du savoir.
4)
L'Afrique est beaucoup moins déconnectée du temps mondial avec la
modification de ses réseaux d’alliance et de coopération. La meilleure illustration est
le retour de la Chine Populaire sur le Continent ainsi que de nouveaux partenaires des
pays émergents qui renouvellent complètement les principes de la coopération.
5)
L’espace politique s’améliore avec l’avènement de systèmes plus
démocratiques ainsi que l’alternance politique et la promotion des principes de
Bonne gouvernance. Les évolutions en RDC, au Sénégal et au Bénin sont
symptomatiques de grandes mutations
6)
La conflictualité africaine recule avec l’apaisement de beaucoup de
foyers de tension : en Afrique Centrale et Australe comme (RDC, Angola, Ouganda,
Somalie, Soudan) et en Afrique de l’Ouest (Libéria, Sierra Léone, Côte d’Ivoire, Togo).
D’importantes initiatives pour la Paix et la sécurité sont prises
7)
L’intégration régionale progresse avec la consolidation de l’Union
Africaine et des cinq Organisations régionales d’intégration au niveau des cinq
régions que sont : l’Afrique du Nord, l’Afrique de l’Ouest, l’Afrique Centrale, l’Afrique
de l’Est et l’Afrique Australe. Le NEPAD est l’acte fondateur qui fixe les grandes
12
priorités du Continent. Il fixe les règles de Bonne Gouvernance politique et
économique. L’idée d’un Gouvernement continental fait son chemin.
8) Manifestation de nouveaux partenariats : les Accords de Cotonou
de l’UE, le Plan d’Action en faveur de l’Afrique suite à la rencontre du G8 de
Kananaskis, le Rapport de la Commission Blair, le Plan d’Action de Beijing, la TICAD,
la coopération afro-indienne, les OMD, les DSRP, l’AGOA, le MCA. Beaucoup de
plans qui traduisent une volonté politique même si les résultats restent encore bien
faibles.
9) Le mécanisme de surveillance réciproque est mis en place et il
suppose que les politiques de chaque État puissent être soumises au contrôle par les
pairs (African Peer Review Mechanism).
Au demeurant, même si la croissance économique, la pauvreté et la qualité de
vie ne sont pas automatiquement liées, elles vont souvent de pair. Dans ce sens, pour
atteindre les OMD, consistant à réduire de moitié la grande pauvreté d’ici 2015, si
toutefois les termes de l’échange de l’Afrique ne se détériorent, il faudra une
croissance d’au moins 7% par et une plus juste répartition des revenus.
C’est pour ce faire, que les États ont continué d’initier des réformes en
collaboration avec les bailleurs de fonds bilatéraux et multilatéraux. Celles-ci
consistent principalement à assainir la gestion macroéconomique, à renforcer les
systèmes de gestion des dépenses et à renforcer les politiques de diversification des
exportations qui permettront d’atténuer l’impact des chocs exogènes.
Ces efforts seront sérieusement remis en cause par trois crises successives
provenant des dérèglements du système de la mondialisation. Quels sont les défis que
posent aux États africains ces chocs externes qui, du reste, n’ont pas été anticipés.
1. La crise énergétique avec la flambée des prix du pétrole a
aggravé les déséquilibres de la balance extérieure dans les
pays importateurs nets de pétrole
La configuration de la planète en fonction des dotations pétrolières laisse
apparaître 4 groupes qui ont des perceptions et des intérêts différents de l’enjeu du
pétrole dans les relations internationales :
les pays riches, riches en pétrole comme les États-Unis et la Russie.
les pays riches et pauvres en pétrole comme l’Europe et le Japon.
les pays riches en pétrole et non encore industrialisés comme les pays du
Moyen-Orient et du Golfe, et de quelques producteurs africains.
les pays pauvres et pauvres en pétrole comme la plupart des pays africains.
Cette configuration établit que le pétrole est une variable stratégique en tant
qu’instrument d’allocation des ressources financières à l’échelle mondiale
(superprofits des majors du pétrole par exemple pour Exxon/Mobil 490 milliards de
francs, BP/Amoco/ Arco plus de 167 milliards de francs, Total/Petrofina/Elf 80
milliards de francs) et accroissement des réserves des pays producteurs et comme
facteur de régulation de la compétition mondiale (par le biais des surcharges des
coûts de production) dans les échanges internationaux. Pour les pays pauvres, le
pétrole est l’un des facteurs de déséquilibres macroéconomiques graves qui ont
conduit à l’endettement massif. Toutes ces raisons expliquent que cette matière
première extrêmement sensible n'a jamais été laissée uniquement aux forces du
marché. Au contraire, les États interviennent directement ou indirectement pour
13
exiger ou imposer une gestion concertée des stocks restants. Voilà pourquoi beaucoup
d’auteurs le considèrent comme un bien public international.
En définitive, le pétrole est à l’origine des trois crises qui secouent
actuellement le système mondialisé: la première crise est le réchauffement climatique
qui est à la base des perturbations comme la sécheresse, les inondations et d’autres
catastrophes naturelles dues aux émissions des gaz à effet de serre, la deuxième crise
est celle liée à la recomposition de l’espace du Moyen-Orient, source principale
d’approvisionnement pétrolier des pays industrialisés et la troisième crise est celle de
la dette des pays en développement victimes de l'augmentation des prix du pétrole.
Ces pays sont condamnés à continuer d’emprunter au Fonds Monétaire International
(FMI) et à la Banque Mondiale pour faire face à leurs déséquilibres externes.
À cela s’ajoute les fortes inégalités dans l’accès aux ressources pétrolières qui
se traduisent dans le fait que les ¾ de la production mondiale sont consommés par
les ¼ de la population, soit o,8 Tonne Équivalent Pétrole par habitant pour les PVD
et 4,7 TEP pour les pays industrialisés. Malgré ces faiblesses relatives des
consommations énergétiques, les factures pétrolières deviennent insoutenables pour
les PVD particulièrement les non producteurs.
Au regard de la flambée des prix du pétrole, il n’est guère superflu de
s’interroger sur les perdants et les gagnants du marché. Les producteurs africains
sont au nombre de 12 dont les plus importants sont : le Nigéria avec 3,5% de la
production mondiale et des revenus annuels moyens de 52 milliards de dollars, la
Lybie avec 2,1% et 34 milliards, l’Algérie avec 2,2% et 46 milliards, l’Angola avec
1,6% et 25 milliards, le Gabon et le Congo Brazza 0,3% et respectivement 4,70
milliards et 5,8. L’Afrique pétrolière ne perçoit pas moins de 200 milliards de dollars
de recettes annuelles moyennes. Sans nul doute pour les pays déficitaires, il est
connu qu’ils doivent faire face à un accroissement insoutenable de la facture
pétrolière qui risque de compromettre leur processus de croissance et les pousse à
rentrer dans un cycle infernal d'endettement international. Mais, parallèlement, les
pays producteurs à leur tour connaissent bien souvent un certain nombre d'effets
pervers connus sous l'expression de « syndrome hollandais ».
L’excédent de la balance des opérations courantes de l’Afrique a été ramené de
5% du PIB en 2006 à 1,7% en 2007 en raison de l’aggravation des déficits de la
balance de ces opérations dans les pays importateurs de pétrole (qui sont passés de 4,4% du PIB en 2006 à –5% en 2007). Du fait des coûts de transport élevés et de la
faible compétitivité internationale, les déficits de la balance des opérations courantes
restent plus importants dans les pays africains sans littoral que dans les autres pays
du continent, mais ces déficits diminuent grâce à des apports d’aide accrus
(notamment sous forme d’allégement).
En définitive, la question énergétique doit être replacée au cœur des dispositifs
de coopération et d’intégration. Ce cadre devrait permettre une exploitation efficiente
de toutes les potentialités pour répondre aux besoins des Etats quelle que soit leur
dotation factorielle. Les expériences en cours doivent être approfondies et
élargies comme par exemple le Pool Energétique d’Afrique Australe (SAPP) même si
elle traverse quelques difficultés et celle d’Afrique de l’Ouest (la West African Power
Pool) de la CEDEAO. L’indépendance énergétique du Continent passera par de tels
mécanismes de coproduction et de solidarité.
Les pouvoirs publics doivent déterminer les objectifs, le calendrier, les moyens
octroyés pour atteindre les résultats escomptés et agir dans trois directions :
l’encouragement de la recherche et de la formation des scientifiques, des
ingénieurs et des techniciens
14
la promotion des productions par des investissements, par des incitations
financières intéressantes (suppression des droits de douane pour le
matériel importé, facilités pour les entreprises, les administrations)
la motivation des particuliers candidats à la consommation des énergies
renouvelables.
2. La crise alimentaire a approfondi les déséquilibres
macroéconomiques et contribué à la détérioration de la
situation sociale
Dans le second semestre de 2007, les consommateurs du monde ont assisté à
l’augmentation drastique et brutale des prix des denrées alimentaires de base (voir
figure 3 en annexe) entraînant de graves difficultés particulièrement au niveau des
populations les plus pauvres de la planète.
Tableau 5 : Des prix de l’alimentation plus élevés ont augmenté l’incidence et la
sévérité de la pauvreté.
Avant
Variation
Région
Pourcentage
Ecart de
Pourcentage
Ecart de
au sein de la
revenu
de pauvres
revenu
population
au sein de la
population
(pourcentage)
(point de pourcentage)
Population urbaine
Asie de l’Est et région du Pacifique
Europe et Asie centrale
Amérique latine et Caraïbes
Moyen-Orient et Afrique du Nord
Asie du Sud
Afrique subsaharienne
13,2
2,5
3,7
2,7
32,3
34,1
20,3
8,7
37,6
17,8
25,0
38,1
6,3
0,0
0,1
2,4
2,0
1,7
2,7
0,2
-0,7
5,7
0,5
0,3
Pays en développement
15,3
27,1
2,9
0,5
Population rurale
Asie de l’Est et région du Pacifique
Europe et Asie centrale
Amérique latine et Caraïbes
Moyen-Orient et Afrique du Nord
Asie du Sud
Afrique subsaharienne
31,9
8,2
18,5
15,4
43,3
54,9
23,2
6,6
43,9
22,9
24,0
41,5
4,9
0,0
0,1
0,7
0,8
0,3
0,7
0,0
0,1
0,9
0,3
0,0
Pays en développement
37,1
28,2
2,1
0,1
Source : Banque mondiale
En un an, le prix du blé a doublé et celui du maïs a augmenté de 50% alors
même que la production n’est pas en crise. En effet, les statistiques montrent que la
récolte de céréales n’a jamais été aussi abondante qu’en 2007. La flambée des prix
des produits alimentaires s’est traduite par de violentes manifestations dans
plusieurs pays du monde : Égypte, Cameroun, Sénégal, Burkina Faso, Côte d’Ivoire,
15
Éthiopie, Madagascar, Indonésie et en Haïti. Selon la Banque mondiale, le prix du blé
a augmenté de l’ordre de 181% à l’échelle mondiale en février sur une période de 36
mois tandis que la hausse mondiale des prix alimentaires était estimée en moyenne à
83% sur la même période. Or, une étude interne de l’ONU qui s’appuie sur des
données du Fonds international de développement agricole (FIDA), l’augmentation
de 1% du prix des denrées de base contribue à plonger 16 millions de personnes
supplémentaires dans l’insécurité alimentaire. Il s’en suit que 1,2 milliards d’être
humain pourraient avoir chroniquement faim d’ici 2025; soit 600 000 millions de
plus que les prévisions précédentes.
Cette crise alimentaire véritable déferlante mondiale tire son origine de la
conjonction de plusieurs facteurs liés notamment à l’accroissement rapide de la
demande, aux restrictions de l’offre et à l’intrusion de la spéculation financière.
Le premier facteur déséquilibrant est le rapide accroissement de la demande
céréalière suite à l’explosion démographique, à l’urbanisation accélérée et à
l’augmentation des revenus. Si la demande de biens alimentaires des pays
industrialisés tend à se stabiliser du fait du ralentissement démographique et d’une
saturation de la consommation pour certains produits (pain, lait frais, fruits et
légumes), en revanche celle émanant des pays émergents d’Asie, d’Amérique Latine et
des Centres urbains africains augmente rapidement. Concernant l’Afrique, la ville
avec un taux de croissance supérieur à 8%. Elle fait exploser la demande alimentaire
et se comporte comme agent de propagation du modèle de consommation fondé sur
les biens importés.
Le second facteur de pressions du marché alimentaire mondial provient aussi
des restrictions constatées au niveau de l’offre. La plupart des pays exportateurs de
céréales sur le marché mondial comme l’Australie, les USA, l’Ukraine, la Russie ont
connu des sécheresses importantes ces dernières années. Le phénomène est plus
marquant encore pour ce qui concerne le riz. Alors qu’au niveau mondial la demande
reste soutenue, la production ne suit pas le rythme pour un potentiel commercial qui
représente 5 à 6% de la production mondiale dans lequel l’Asie (Thaïlande, Vietnam,
Inde, Chine, ...) se taille la part du lion avec 90 % de la production et 70 % des
exportations. Pour certaines céréales, les effets de substitutions de production
peuvent faire baisser l’offre : c’est le cas du biocarburant. En effet, leur essor conduit
à substituer l’usage de surfaces/productions à des fins de satisfaction de la
consommation humaine à celle destinée à un usage énergétique. Selon le PAM, pas
moins de 100 millions de tonnes de céréales sont utilisées chaque année pour la
fabrication d’éthanol ou de biodiesel. Ainsi aux USA, le cours du maïs suit de plus en
plus celui du pétrole.
Le dernier facteur de la surchauffe des marchés réside dans l’envahissement
des capitaux spéculatifs dans la production et les échanges de l’alimentation.
L’essentiel de la production et de la distribution sont le fait de quelques
multinationales très puissantes qui font d’énormes profits en introduisant des
distorsions dans le fonctionnement des marchés. Ainsi, les réserves alimentaires ont
été privatisées et sont maintenant gérées par les multinationales de l’alimentation qui
se préoccupent plus de spéculation que de protection des producteurs et des
consommateurs.
Par ailleurs, la hausse du coût du fret impose aux importateurs des surcoûts
additionnels même si la baisse du dollar atténue quel que peu la hausse du prix du
baril du pétrole. L’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture
(FAO) estimait que les pays les plus pauvres verraient leur facture céréalière
s’accroître de près de 10%.
16
La crise alimentaire ouvre une grande opportunité pour élaborer une stratégie
de recentrage du développement agricole autour de l’objectif de sécurité alimentaire
et d’accroissement des revenus monétaires des agriculteurs. Celle-ci suppose : la
définition et la protection de filières de productions locales, la vitalisation de l’espace
économique rural à partir de la résolution de la question foncière, et de la
disponibilité des facteurs modernes de production adaptés (semences, engrais, outils
et matériels biologiques), l’appui aux structures paysannes, la mise en place d’une
autre logique technologique, la mise en fonctionnement d’un crédit agricole efficient,
la délimitation d’un cadre de commercialisation. Seuls des prix aux producteurs
stables et élevés sur la longue période peuvent permettre une auto accumulation et
une orientation des surplus vers des investissements agricoles de productivité.
En conclusion, ces deux chocs sévères et totalement inattendus ont accentué le
déficit budgétaire de la plupart des Etats africains et augmenté leur endettement
interne et externe.
3. Crise financière, récession et incidences globales
Bien que beaucoup d’attention ait été concentrée sur les problèmes du marché
immobilier aux USA (Sub-prime ) comme étant le phénomène déclencheur de la crise
en cours, il est important de reconnaître que l’origine est le fait de l’interaction d’au
moins trois facteurs :
L’accumulation sans précédent des réserves externes dans les pays à
surplus (surtout la Chine et le Moyen Orient) conjuguée à un énorme
déficit fiscal et des déficits du compte courant aux USA. En effet, un excès
d’épargne dans un certain nombre de pays en développement a contribué à
financer une consommation excessive dans les pays les plus riches du
monde.
La mise en œuvre de politiques monétaires expansionnistes dans les pays
de l’OCDE a généré des taux d’intérêt bas qui ont contribué à créer une
bulle sur le marché de l’immobilier qui s’est vaporisé dans la suite.
L’innovation financière dans les pays développés sous formes de crédits
immobiliers sécurisés, a étendu l’effet de levier et des instruments dérivés
très faiblement régulés qui ont dangereusement exposé certaines
institutions financières.
L'un des buts principaux de la finance de marché a été de sortir de l'habitat
réglementaire imposé aux banques. Les banques d'investissements, les hedge funds,
les compagnies d'assurances ainsi ont profité des mailles de la régulation pour
accroître le volant de leurs opérations. Quant aux banques commerciales telle la
Société Générale de Paris, elles ont créé des départements d’investissement logés
hors bilan pour s'affranchir (légalement) de la réglementation. C’est ce qui a facilité la
contagion du système financier dans son ensemble et la transmission du choc lié à la
crise financière au secteur réel.
Il convient de remarquer, que, la crise économique et financière évolue au jour
le jour si bien que l’évaluation de son impact n’est pas encore aisée. De fait,
l'évaluation des effets de la crise financière et économique internationale sur les
économies africaines exige des systèmes statistiques qui permettent d'adopter des
politiques visant à minimiser l'impact de la stagnation mondiale. Le secteur social où
les effets de la crise se font sentir très lourdement, nous ne disposons pas encore
d'informations statistiques sur l’emploi formel et non formel, le profil de la pauvreté
urbaine et rurale, les systèmes de protection sociale, les conditions de vie des
17
citoyens… etc. Le rapport utilise le peu d’informations disponibles. L’effort de
comprendre l’impact de la crise nécessite une observation permanente et un
ajustement continu de l’analyse en fonction de l’évolution de la situation. Les données
qui sont aujourd’hui disponibles restent relatives à des petites séries chronologiques
qui certes, peuvent être utilisées pour une analyse sur données de panel mais ne
permettent pas par exemple une modélisation VAR ou ECM (basée sur séries
temporelles) pour mettre en exergue les fonctions de réponse pour les différents pays
de la sous-région.
III/ Ampleur et profondeur de la crise
financière mondiale : Quel impact sur les
économies africaines ?
Dans cette partie, nous avons isolé cette dernière crise à cause de son ampleur
et de sa profondeur au point que beaucoup de secteurs d’opinion n’hésitent plus à y
voir une véritable crise systémique. Trois dimensions semblent largement corroborer
cette vision (D.Plihon) :
la première s’exprime dans la crise idéologique et intellectuelle consistant à
la remise en cause des fondamentaux du référentiel néolibéral : la croyance
que les marchés tendent vers l’équilibre et que les déviations par rapport à
ce dernier est aléatoire
la seconde dimension est propre à la finance internationale devenue un
méga marché de l’argent
la troisième dimension est le caractère mondial de la crise.
Dans cette section, nous abordons d’abord la crise financière et ses répercussions sur
l’économie réelle. Ensuite, nous décrivons les canaux de transmission de cette crise.
Enfin, nous analysons ses différentes conséquences à l’échelle des économies et de la
région ouest-africaine.
1. De la crise financière à la récession
Les importantes innovations financières survenues dans les années 80 ont
grandement facilité le phénomène de titrisation2 et rendu moins compact la frontière
entre la sphère financière et réelle. Dans cette sous-section, nous faisons la genèse de
la crise financière et analysons sa transmission au reste du système financier et
l’économie réelle.
a) Aux origines de la crise
L’environnement dérégulé de la finance a fortement contribué à l’expansion du
marché des prêts hypothécaires qui est passé de 200 milliards de dollars US en 2002
à 640 milliards de dollars US en 2006, soit une croissance de 220% en 4 ans. Les
prêts immobiliers accordés à des personnes dont la côte de crédit était insuffisante
Technique financière qui consiste classiquement à transférer à des investisseurs des actifs financiers
tels que des créances (par exemple des factures émises non soldées, ou des prêts en cours), en
transformant ces créances en titres financiers émis sur le marché des capitaux.
2
18
aux Usa ont ainsi créé une bulle immobilière qui entretenait une bulle de crédit. Tant
que le prix de l’immobilier augmentait, l’opération de prêt hypothécaire était rentable
puisqu’en cas de difficulté, le remboursement s’effectuait par une vente de
l’immeuble. Pour que ce système soit pérenne, il faut que deux conditions soient
remplies : les taux d’intérêt doivent rester relativement stables et le bien immobilier
doit s’apprécier régulièrement (son prix doit être croissant).
Hélas, de 2004 à 2006, la Fed a augmenté son taux directeur de 1% à 5,25%.
Les prix de l’immobilier ont également commencé à chuter dans plusieurs Etats des
Usa à partir de 2006. Du coup, il s’est produit un retournement du marché de
l’immobilier. Les emprunteurs se sont retrouvés à devoir faire face à des mensualités
qui augmentaient (puisque le taux accordés sur les prêts étaient indexés sur le taux
de la Fed) alors que le prix de leur bien immobilier baissait. Les plus fragiles étaient
incapables de faire face à leurs remboursements. Tant qu’ils ne sont pas nombreux, ce
défaut de paiement peut être géré par leurs créanciers (les établissements de prêts).
Mais lorsque le défaut de paiement concerne un très grand nombre, ces
établissements de prêts se retrouvent dans une situation difficile. En août 2007, un
million de défauts de paiement étaient recensés.
Avec la baisse du marché de l’immobilier américain, la valeur des habitations
était devenue inférieure à celle du crédit qu’elles devaient garantir. Les
établissements de crédit se retrouvèrent sans moyen rapide de redresser leur bilan,
puisque vendre les immeubles mis en hypothèque ne suffisait pas. De plus, ces ventes
avaient pour effet de faire gonfler l’offre de biens immobiliers par rapport à la
demande et d’accélérer la chute de leurs prix.
L’insolvabilité des débiteurs et la chute des prix de l’immobilier ont conduit à
la faillite de plusieurs entreprises de prêts hypothécaires à risques (« subprimes »)
financées par les banques d’investissement (les fleurons de Wall-Street) qui y étaient
parfois actionnaires. Il s’en est suivi un effet de contagion sur le système bancaire.
Après plusieurs provisions effectuées, ces banques ont dû se résoudre à des pertes
qui, selon un rapport du FMI, étaient estimées à 945 milliards de dollars en avril
2008. Comme en 1929, l'éclatement d'une bulle de crédit a des conséquences sur le
secteur réel.
b) Les répercutions de la crise financière sur l’économie réelle
Face à la contagion du système, les banques sont devenues plus sélectives. Un
phénomène de « credit crunch »3 qui installe les économies dans une situation de
pénurie, voire de rationnement du crédit, s’est manifesté. De plus, les banques ne se
font plus confiance, de peur de prêter à des consoeurs qui détiennent, dans leur bilan,
des valeurs « toxiques » - ou proches - qui les exposeraient elles aussi. En
conséquence, le marché interbancaire fonctionne au ralenti. Quant aux épargnants,
ils essaient de limiter leur exposition au risque ou de rediriger leurs fonds vers des
valeurs refuges telles que l’or en attendant des jours meilleurs.
Le resserrement du marché du crédit et le retournement de la conjoncture ont
conduit les entreprises à différer leur décision d’investissement. Certaines d’entre
elles se sont retrouvées dans des difficultés d’où des ajustements opérés par le biais
de la variable travail. Les suppressions d’emplois ne se comptent plus. Citigroup aux
Usa a déjà procédé au licenciement de 52 000 employés. Peugeot Citroën en France
3
Terme anglo-saxon qui traduit un resserrement du crédit
19
s’est séparé de 3550 salariés, Isuzu au Japon : 1400, Acelor Mittal en France : 1400,
Boeing aux Usa : 800, General Motors aux Usa : 258 et la série noire ne semble pas
s’estomper.
Rien qu’au courant du mois de novembre 2008, l'économie américaine avait
détruit 533 000 emplois. Cette situation ne s'était pas produite depuis trente-quatre
ans. Dans la même période, les statistiques créditent la France d’une envolée du
chômage (+ 64 000 personnes supplémentaires sur un mois). Quant à l’Espagne, elle
devrait perdre selon les prévisions 900 000 emplois dans le bâtiment d'ici à 2010 (Le
Monde, 2009).
Par conséquent, les rémunérations sont tirées vers le bas, en raison de
l'augmentation du chômage. Face au chômage et au resserrement du marché du
crédit, le pouvoir d’achat des ménages baisse conduisant à une diminution de leur
consommation.
En conséquence, après les stigmates laissés par les chocs liés à la hausse des
prix du pétrole et des matières premières, les économies des pays développés sont
entrées en récession4. Aux Usa, le taux de croissance attendu en 2008 et 2009 est
respectivement de 1,6% et 0,1% (FMI, 2008). Même si l’épicentre du phénomène se
situe aux Usa, en réalité, le choc ébranle toute l’économie mondiale. La plupart des
régions entrent en récession. Dans la zone euro, le taux de croissance estimée à 1,3%
en 2008 devrait se situer aux alentours de 0,2% en 2009. Dans le groupe des pays
émergents et en développement, le taux de croissance devrait passer de 6,9% en 2008
à 6,1% en 2009. Même les moteurs de la croissance dans cette catégorie de pays (la
Chine et l’Inde) ne sont pas épargnés. Selon les projections, cette croissance se
situerait respectivement à 9,7% et 9,3% pour la Chine et à 7,9% et 6,9% pour l’Inde
(FMI, 2008). Dans le cas de la Chine, la contraction de l’activité dans la province de
Canton dans le sud-est du pays qui fut la figure de proue de l'extraordinaire décollage
de la Chine et qui symbolise sa réussite, constitue une illustration manifeste des effets
de la crise. Dans cette province qui représente un tiers des exportations de la Chine,
un huitième de ses recettes fiscales et 25 % des investissements étrangers, plus de 3
000 PME de l'industrie du jouet, la plupart des sous-traitants, y ont cessé leurs
activités entre janvier et juillet 2008 (Le Monde, novembre 2008).
L’économie africaine devrait enregistrer, à contrario, une progression de sa
croissance qui devrait passer de 4,5% en 2008 à 6% en 2009. Toutefois, cette
évolution masque des disparités. En effet, selon les projections, la croissance
baisserait dans la région ouest africaine. Elle se situerait à 5,1% en 2008 et 4,7% en
2009.
Tableau 6 : Résultats de l’économie mondiale
Variation annuelle (%)
Résultats
Projections
2006
2007
2008
2009
Monde
Pays développés
Pays en
développement
5.1
3.0
7.9
9.9
5.0
2.6
8.0
10.0
3.9
1.5
6.9
8.4
3.0
0.5
6.1
7.7
Une récession économique est une diminution passagère de la production. Aux Etats-Unis, la récession est
définie de manière officieuse par une diminution du PIB pendant deux trimestres consécutifs. Elle est à distinguer
des termes « ralentissement économique » où la croissance du PIB diminue mais reste positive (l’économie
continue de croître mais plus lentement) ou « dépression » où la baisse du PIB est durable et le cycle économique
ne se redresse pas naturellement.
4
20
Variation annuelle (%)
Résultats
2006
2007
2008
Projections
2009
Asie
5.5
5.6
4.6
Amérique Latine &
les Caraïbes
5.7
5.8
4.5
Afrique
6.6
6.9
5.6
Afrique
5.1
5.6
5.1
subsaharienne Afrique de
l’Ouest
Source : FMI (2008) Perspectives économiques mondiales, Octobre
3.2
6.0
6.3
4.7
FMI (2008) Perspectives économiques régionales : Afrique subsaharienne, Octobre
Base de données de la CEDEAO
Même si le système financier de la région ouest africaine est faiblement
connecté au système financier mondial, les effets de la crise financière pourraient se
faire ressentir dans la région. Déjà, les prévisions du FMI tablent sur une contraction
de l’activité économique entre 2008 et 2009. Par quels mécanismes pourraient se
transmettre les effets de cette crise financière sur les économies africaines, en
particulier les pays les moins avancés ?
Selon l’économiste en chef de la Région Afrique de la Banque mondiale, Shanta
Devarajan, la crise financière mondiale et la récession qui s’ensuit auront un triple
impact sur l’Afrique. « Premièrement, le ralentissement des apports de capitaux
privés pénalisera les économies qui comptaient sur ces ressources pour financer des
investissements dont ils ont grand besoin, en particulier dans l’infrastructure. Le
Ghana et le Kenya ont déjà reporté l’émission d’obligations souveraines d’une valeur
d’environ 800 millions de dollars », explique-t-il. « Deuxièmement, les prix des
produits de base baissent, ce qui nuit aux exportateurs mais profite aux importateurs
». « Troisièmement », ajoute-t-il, « il est probable que les envois de fonds des
travailleurs à l’étranger qui, en Afrique, sont de l’ordre de 15 milliards de dollars par
an, ainsi que l’aide étrangère marqueront un repli ».
Dans ce Rapport, nous avons pris la position méthodologique plus adéquate
d’analyser l’impact par le biais des canaux de transmission qui sont les prix, les IDE,
les exportations, les transferts des migrants, l’APD, la bourse, les barrières tarifaires
et non tarifaires et l’aide humanitaire. Ces canaux sont des facteurs déterminants de
la croissance économique qui donne les marges de manœuvre pour mener à bien
toute politique sociale.
2. Les canaux de transmission
Si la récession s’installe dans les pays avancés, quelques canaux peuvent être
évoqués qui pourraient faciliter la transmission du choc sur nos fragiles économies :
les prix, les investissements directs étrangers, les exportations, les transferts des
migrants, l’aide publique au développement, la bourse, les barrières non-tarifaires,
l’aide humanitaire.
2.1. Canal des prix
La récession qui s’installe dans les économies développées aura une
conséquence sur l’évolution des prix. Elle se traduira par un ralentissement de
21
l’inflation c’est-à-dire une désinflation. Et il est fort à craindre, si la crise persiste,
qu’elle ne se traduise par une diminution générale et durable des prix, autrement dit
une déflation.
2.2. Canal des Investissements directs étrangers (IDE)
Une récession peut conduire généralement à une révision, voire à un report
des décisions d’investissements. En conséquence ; le portefeuille et l’investissement
direct étranger vont dramatiquement baisser dans beaucoup de pays car les
investisseurs se méfient des marchés jugés trop risqués.
De plus, dans les économies développées, la bourse est, par excellence, le
marché où les demandeurs de capitaux s’approvisionnent en fonds prêtables aux fins
d’investissements. En conséquence, la contraction de l’activité dans les pays
développés, conjuguée à la période de turbulence traversée par la bourse mondiale,
pourrait donner un coup d’arrêt aux flux d’Ide captés par les pays de la région et,
parfois, provoquer leur report.
Et ce retrait du capital étranger dans beaucoup de pays en développement
pourrait provenir d’une baisse drastique de leurs taux de change. Les Sociétés et les
gouvernements possédant des dettes substantielles en monnaie étrangère pourraient
connaître une contraction. Le Dalassi Gambien a perdu 20.7% de sa valeur par
rapport au dollar américain entre Juillet et Décembre 2008. Le franc CFA a perdu
9.8% de sa valeur, la Ruppee Seychelloise 50.8%, le Kwaca Zambien 30.2% de sa
valeur par rapport au dollar au cours de la même période.
2.3. Canal des exportations
Une contraction de l’activité économique dans les pays développés se traduira
par une baisse de leurs importations en provenance des pays de la région (demande
en pétrole, en minéraux, en produits de base agricoles, demande touristique, etc.) et à
une baisse des recettes d’exportations de ces derniers. Quand on sait qu’en moyenne,
près du tiers des exportations du Sénégal ont pour destination l’Ue, les secteurs
tournés vers l’exportation pourraient être pénalisés.
De plus, bien qu’étant un poste des exportations, le tourisme mérite une
attention particulière. En effet, il est aujourd’hui un des secteurs dominants de
l’activité économique mondiale. Selon les estimations du Conseil mondial du voyage
et du tourisme (WTTC), plus de 8% de l’ensemble des emplois dans le monde
dépendent du secteur des voyages et du tourisme, qui devrait, selon les projections,
créer plus de 3,5 millions d’emplois dans les 10 années à venir. Déjà que l’Afrique
n’est pas encore parvenue à exploiter pleinement son potentiel touristique (la part du
continent africain représentait 21,6 milliards de dollars sur les 678 milliards de
dollars provenant du tourisme dans le monde en 2005, selon l’OMT), la récession des
économies développées et la baisse des revenus pourraient faire déchoir le flux de
touristes. En outre, la chute des indices boursiers viendra amplifier le phénomène en
raison de la forte corrélation entre la demande du bien loisir et les revenus tirés par
les ménages occidentaux de leurs placements en bourse.
Pourtant, ce secteur connaissait un essor relatif ces dernières années. En 2005,
neuf pays africains ont accueilli plus d’un million de touristes venus de l’étranger,
contre sept pays en 2004, dont le Nigéria en Afrique de l’Ouest avec 1.01 millions
d’entrées et des recettes allant jusqu’à 7,3 milliards de dollar pour l’Afrique du Sud.
Ainsi, il est clair que l’activité touristique concours grandement à la création
d’emplois et la réduction de la pauvreté.
22
Bien que tous les observateurs soient unanimes pour avancer que le tourisme
continuera à bien se comporter encore pour un certain temps, il n'est pas écarté la
possibilité et la crainte de voir cette crise se répercuter durement sur le secteur.
2.4. Canal des transferts des migrants
Lorsqu’une récession s’installe, les entreprises s’ajustent généralement par le
biais du facteur travail. Des licenciements sont opérés qui se traduisent par une
remontée du chômage; ce qui pourrait provoquer des pertes massives d’emplois chez
les travailleurs migrants. De même, les migrants non employés et spécialisés dans la
vente à la sauvette devront également s’attendre à une chute de leur chiffre d’affaires
en raison de la baisse du pouvoir d’achat des ménages occidentaux, consécutive à la
récession. Au total, la baisse des revenus des travailleurs étrangers se traduira par
une diminution de leurs envois de fonds vers leur pays. Ces transferts étaient estimés
à 27,8 milliards de dollars Us en 2007 (UEMOA, 2009).
Au demeurant, les centaines de milliers de travailleurs africains qui ont émigré
en Europe et en Amérique du Nord risquent de perdre leur emploi et contraints de
rentrer chez eux. Cela pourrait créer des tensions sociales particulièrement pour leurs
régions d’origine pour lesquelles, ils étaient les seuls pourvoyeurs de fonds sociaux et
d’investissements5. Et les transferts financiers, une importante source de devises,
pour les pays, pourraient brutalement sombrer dans un ralentissement prolongé.
C’est pourquoi, le déclin des transferts par les migrants dans les pays riches affectés
par la récession constitue une préoccupation majeure pour certains pays comme par
exemple l’Ethiopie, le Sénégal, le Cap vert, le Mali.
2.5. Canal de l’Aide publique au développement (APD)
Selon Kemal Dervis, un ancien administrateur du PNUD, l’APD est évaluée à
100 milliards de dollars par an. Or pour éviter l’effondrement de leur système
financier, les pays avancés devront y injecter provisoirement l’équivalent de 862
milliards de dollars, soit respectivement 700 milliards pour les Etats-Unis et 162
milliards pour l’Ue (Le Monde, 2008). Ils devront, par conséquent, opérer des
ajustements pour faire face aux tensions de leurs finances publiques. Dès lors,
beaucoup de pays s’attendent à ce que l’aide en provenance des pays riches diminue à
mesure que les gouvernements évalueront leurs priorités fiscales durant la récession.
Ceci pourrait particulièrement avoir des répercussions pour l’Afrique.
Il est alors fort à craindre que l’ampleur de crise financière n’hypothèque la
promesse faite par les pays développés (G8) à l’Afrique, en 2005 à Glenneagles en
Ecosse de lui octroyer 25 milliards de dollars de plus par an. La réduction de l’aide
monétaire, à savoir l’assistance officielle au développement aura des incidences
budgétaires significatives pour certains Etats.
Les évaluations encore approximatives de l’OCDE et surtout de son CAD
indiquent que la crise financière va réduire l'aide publique de 30%. L’APD globale
accordée par l’ensemble des bailleurs en 2007 s’élevait à 117,6 milliards de dollars,
l’Union européenne et ses 27 États-membres, qui ont versé la moitié de ce montant
global, sont de loin les principaux contributeurs. En raison d’une tendance à la baisse,
leur APD a néanmoins chuté à 46,1 milliards d’euros (59,4 milliards de dollars) soit
5
Les constructions sociales dans les villages et les fonds qui permettent aux africains de l’étranger de
payer des produits et services pour leur famille restée au pays (Ecoles, dispensaires, petite hydraulique rurale,
constructions familiales et communautaires…) comme les commandes sur Mbuzi ya Jamii ( la chèvre pour la
famille) seront en nette diminution .
23
0,38 pour cent de leur revenu national brut (RNB) en 2007, contre 47,7 milliards
d’euros (61,4 milliards de dollars), soit 0,41 pour cent du RNB, en 2006.
2.6. Canal de la bourse
Devant la baisse de l’APD, les Etats en pénurie de ressources devront recourir
à une de leur source de financement la plus usuelle ces dernières années : la bourse
via l’émission de titres d’Etat (obligations, bons du Trésor). Or pour une grande
partie de sociétés cotées, le chiffre d’affaires dépend des exportations. Face à la chute
de ces dernières, elles devront se résoudre alors à annoncer une baisse de leurs
bénéfices ; ce qui conduit à une réduction de la demande des titres émis par ces
sociétés et un possible mouvement à la baisse des indices boursiers dans la région.
Dans la période allant du 15 septembre au 30 novembre, l’indice BRVM 10 qui
regroupe les 10 titrés les plus capitalisés a baissé de 24,5%. Quant à l’indice BRVM
composite qui regroupe l’ensemble des titres, il a régressé de 22%. Ces baisses sont
plus importantes que celle des places de Casablanca (-2%) et de Accra (-11%). Dans la
même période, le CAC 40 à Paris et le Dow Jones ont chuté respectivement de 10% et
23%.
Les titres qui ont subi qui ont subi les plus fortes baisses sont ceux de sociétés
relativement tournés vers le marché extérieur, en particulier ceux du secteur agroindustriel. Il s’agit de SAHP, PALM CI et de SOGB dont les titres ont subi des baisses
respectives de 42,2%, 37,5% et 30,6%. Le ralentissement des activités de la bourse est
attendu par Conseil régional de l’épargne publique et des marchés financiers
(CREPMF) pour l’année 2009 puisque ce dernier prévoit dans son projet de budget
de cette année une réduction des redevances de contrôle de l’ordre de 15,1%
(UEMOA, 2009).
En conséquence, même déconnectées des places financières internationales,
les bourses régionales pourraient, par ce canal indirect, faire ressentir les effets de la
crise aux économies africaines. En effet, face à la contraction l’activité des marchés
boursiers de la région, il sera plus difficile qu’auparavant pour les Etats en pénurie de
ressources, en particulier ceux de l’espace UEMOA, de lever les fonds escomptés sur
le marché financier (BRVM) en raison de son moindre attrait sur les épargnants et
investisseurs institutionnels.
2.7. Canal des barrières tarifaires et non-tarifaires
Les périodes de récession sont souvent marquées par un repli protectionniste
des économies en crise. Le début de l’année 2009 est ainsi marqué par un regain de la
guerre commerciale que se livre les économies avancées et émergentes. On relève
qu’à la plainte de la France sur le bœuf aux hormones déposées à l’Organisation
mondiale du commerce (OMC) contre les Usa et le Canada s’ajoute celle que le même
pays a servi aux Usa qui viennent de tripler au cours de la deuxième semaine de
janvier 2009 les droits de douanes sur le fromage roquefort en réaction à la position
de la France. Également, l’administration américaine sortante a porté plainte dans la
première semaine de janvier 2009 à l’OMC contre la Chine qu’elle accuse de
soutenir indûment l’exportation de ses produits de marques.
Quant à la Chine, elle a demandé à l’OMC d’ouvrir une enquête sur des taxes
imposées aux Etats-Unis sur plusieurs types de produits chinois importés dont les
tuyaux en acier et les pneus. Des craintes sont également exprimées quant aux
velléités de la nouvelle administration d’utiliser l’environnement et les normes
24
sociales comme paravent à des mesures non-tarifaires au moment où les Etats-Unis
s’enfoncent dans la récession. (Passerelles, 2009).
Du point de vue des économies en développement, il est fort à craindre qu’en
dépit des règles de l’Omc, les pays développés tentent de soutenir leurs producteurs,
en particulier leurs agriculteurs, en usant de barrières tarifaires et non-tarifaires ; ce
qui aura des effets négatifs sur les exportations de la région, traditionnellement
assises sur les produits de base. Déjà, alors que la promesse de suppression des
subventions internes à l’origine des distorsions dans les échanges, en particulier sur
coton, était entérinée au sortir de la conférence de Hong kong en 2005, cette mesure
a été ajournée (Passerelles, 2009). Or dans la région ouest africaine, le secteur
agricole occupe un poids relativement important dans la formation du PIB (40% en
moyenne dans la période 2002-2007).
En conséquence, des velléités de protections ou le recours à des instruments
tels le soutien à la production et/ou les subventions aux prix au producteur dans les
pays développés pourraient avoir des conséquences néfastes sur le secteur agricole de
la région et affecter la croissance à l’échelle de la région.
2.8. Canal de l’aide humanitaire
La récession conduira à une révision à la baisse par les gouvernements
occidentaux de leur budget alloué à l’aide humanitaire. Elle aura des répercussions
négatives sur la collecte de dons pour l’Afrique, continent le plus affecté par la
pauvreté et les conflits. Par exemple, l’Islande pays frappé de plein fouet par la crise a
dû solliciter un concours du Fmi. Le don d’un euro par habitant traditionnellement
fait à la Croix-Rouge y a pratiquement disparu.
En conclusion, toutes les analyses et les quelques études disponibles semblent
montrer que la croissance économique de l'Afrique devrait reculer de manière
substantielle comme conséquence de la crise financière mondiale, face à la
conjugaison de tous ces effets soulignés plus haut. Cette évolution du ralentissement
de la croissance est bien mise en évidence par le tableau qui suit.
25
Graphique 2 : La croissance économique est destinée à se ralentir en Afrique
de l’Ouest
La crise financière, estimée par l’ONU comme la pire depuis les années 30, pourrait
s'aggraver, entraînant la ruine de la plupart des Etats africains dépendant des
exportations des produits d’origine agricole et minière pour stimuler leur croissance
économique, nourrir les populations et créer des emplois.
Ces différents canaux mettent en exergue les mécanismes potentiels de
transmission des effets de la crise aux pays de la région. Toutefois, s’ils permettent de
les expliciter, ils ne renseignent pas sur les incidences économique et sociale
attendues du choc sur les économies de l’espace ouest africain.
Par ailleurs, il importe que les Etats et les organisations internationales
mettent en place des moyens puissants et robustes de diagnostic pour évaluer de
façon exhaustive l’impact véritable de la crise actuelle à la fois sur l’économie réelle et
sur le secteur social. Dans ce sens, les réflexions devraient s’orienter vers l’élaboration
d’un modèle à correction d’erreur appliqué sur des données de panel, pour les pays de
la CEDEAO6 par exemple. A partir de cet outil, il est possible d’évaluer, en s’appuyant
sur les données historiques, l’impact de différents canaux de transmission
(exportations, transferts des migrants, taux d’inflation, aide publique au
développement) sur le niveau d’activité (PIB).
À défaut de données suffisantes, l’étude de cas pourrait être restreinte à un panel constitué de
l’ensemble UEMOA
6
26
A titre illustratif, ce modèle pourrait se présenter comme suit :
ln pibt   0  1 ln pibt 1   2 (apd / pib )   3 (ide / pib ) t 1   4 inf   5 (invtot / pib ) t 1
  6 ( X / pib ) t   7 (TRM / pib ) t
où pibt : représente la variable dépendante mesurée par le niveau du PIB à la période
t.
Les variables explicatives retenues sont constituées de :
pibt 1 : mesurée par le PIB de la période t-1,
apdUE / pib : mesurée par l’aide publique de la période t rapporté au PIB,
(ide / pib) t 1 : mesurée l’investissement direct étranger de la période t-1 rapporté au
pib,
(invtot / pib) t 1 : mesurée le taux d’investissement global du pays de la période t,
inf : Inflation de la période t,
( X / pib )t : mesurée par le rapport entre les exportations de la période t et le pib,
(TRM / pib)t : mesuré par le rapport entre les transferts des migrants et le pib à la
période;
 0 représente la constante du modèle.
La construction de ce modèle devrait permettre de dégager les effets à court terme de
certaines variables dans l'analyse de séries chronologiques 7.
3. Quelles sont les conséquences au niveau national et
régional sur l’emploi et le social
Compte tenu du faible niveau d’intégration du système financier de la
CEDEAO dans le système financier mondial, on peut préjuger qu’il n’y aura pas
d’impact direct sur les économies des pays de la CEDEAO (BAD, 2008). Toutefois, à
l’échelle de la région et des États, la transmission de façon indirecte des effets de la
crise financière mondiale au secteur réel s’opérera d’une façon ou d’une autre ; ce qui
aura un effet négatif sur la croissance et les équilibres internes des pays membres de
la CEDEAO. Selon les canaux de transmission par lesquels pourraient transiter
l’impact du choc, les conséquences de la crise peuvent s’analyser d’abord aux niveaux
macroéconomique, ensuite sectoriel et enfin microéconomique.
La crise économique globale s’est fait moins sentir sur le secteur financier que
sur les prix des biens, en particulier le carburant et les denrées alimentaires.
La montée subite des prix, consécutive à la crise pétrolière, a mené à une
augmentation du prix de l'engrais (fait à partir du pétrole) et à un coût plus élevé
pour le transport. L'effet global sur des prix de denrées alimentaires internationaux
était dramatique. Entre 2006 et 2008 :
Le prix mondial du riz a augmenté 217%
7
Pour plus d’informations, se référer à la note technique (Annexe 1)
27
Le blé : 125%
Le maïs : 125%
Le soja : 107%
Cependant pour les exportations, un pays comme le Ghana a tiré bénéfice des cours
élevés de matières premières et de l’accroissement des IDE et des transferts privés.
Par exemple en 2008, le prix d'une tonne de cacao était 2072,5 $US, ce qui constitue
presque le double des 1094 $US de 2000 ; En 2008, le prix d'une once d'or était
858,8 $US, contre 280 $US en 2000.
Quant au Nigéria, les effets sur l’économie globale se ressentent surtout :
Aux investissements directs étrangers et mouvements de capitaux : au cours des
dernières années, il y a eu amélioration considérable des investissements directs
étrangers. En 2003 ils s’élevaient à 3 milliards de $, doublant en 2005 pour
atteindre 6 milliards de $. En septembre 2008, ils ont même grimpé jusqu'à 8,5
milliards de $. Les flux vont principalement dans le secteur pétrolier (avec une
création très limitée d'emplois !) plutôt que la fabrication. La possibilité de
réduction de la part du Nigeria dans les flux globaux de capitaux est réelle. Ceci du
fait que plus de 90% des IDE reçus vont au secteur des hydrocarbures et
proviennent principalement des Etats-Unis et d'Europe. On s'attend à une baisse
des flux financiers en 2009 si la crise financière ne s’atténue pas.
Aux investissements de portefeuille : les performances sur le marché financier se
sont effondrées sur le marché boursier en 2008. Les 303 actions ordinaires
énumérées sur la bourse des valeurs nigérienne se sont dépréciées de 42% entre
Mars et Décembre 2008.
A cela s’ajoute l’apparition de cercles vicieux sur le bilan des banques avec
l'augmentation des créances irrécouvrables et la diminution de la rentabilité.
Par la suite, la désinflation ou la déflation consécutive à la crise financière (le
prix du pétrole est passé de 147$ environ à 34$ le baril) et la récession qui s’installe,
si elle se précise, a un effet, à priori, positif pour les pays africains importateurs de
produits en provenance des économies avancées. Au plan macroéconomique, la
réduction de la pression inflationniste pourrait rapprocher la plupart des économies
de leur objectif de stabilité des prix. Au niveau sectoriel, les secteurs d’importsubstitution traditionnellement tournés vers le marché domestique pourraient pâtir
de la concurrence des produits importés devenus plus bon marché. Au plan
microéconomique, les producteurs pourraient bénéficier d’une baisse du coût des
intrants. Chez les ménages, après la forte poussée des prix consécutive au récent choc
céréalier, la diminution de facture des importations d’origine agro-alimentaire
pourrait alléger le budget de consommation.
Toutefois, la crise financière et son corollaire, la récession pourrait conduire au
gel ou au report des flux d’IDE. La progression du PIB dans les économies de la
région tel que attendue par les projections du FMI en sera alors affectée. Au plan
macroéconomique, l’assiette fiscale va se contracter; ce qui aura des implications
négatives sur les finances publiques mais également sur la balance des paiements.
A titre d’illustration, dans l’espace UEMOA, le déficit budgétaire devrait
s’aggraver passant d’un niveau de 5,5% en 2008 à 5,8% en 2009. Par ailleurs, avec la
contraction de liquidité à l’échelle mondiale induite par la crise, les flux d’IDE en
28
direction de l’Afrique ont connu un net frein. Les investissements de portefeuille en
Afrique sont passés de 15,7 milliards de dollars en 2007 à 5,9 milliards de dollars en
2008 (UEMOA, 2009).
Au plan sectoriel, les secteurs de prédilection des IDE (exploitation de
ressources naturelles, services, etc.) pourraient en souffrir. Dans des pays comme le
Libéria, c’est la sécurité alimentaire qui risque d’être fragilisée d’autant plus que
l'aide financière qui la conditionne peut chuter car les pays donateurs feront face à
des contraintes budgétaires dues à la récession économique, à la baisse des recettes
fiscales et au changement de l'attitude publique envers l'aide au développement. A
cela s’ajoute la réduction possible des transferts de la diaspora car ces derniers faisant
face à leur propre fardeau financier et budgétaire au niveau de leur ménage privé. Le
Libéria souffre aussi des contreperformances du commerce - particulièrement en ce
qui concerne les exportations. La Banque Mondiale estime que des cours des matières
premières non pétroliers vont baisser globalement de 20% en 2009. Il faut souligner
que le Libéria a été très affecté par les prix élevés de denrées alimentaires. En 2007, le
Libéria a produit seulement environ 40% de ses besoins en riz, l’aliment de base, et
dépend donc fortement des importations de céréales. Depuis décembre 2007, les prix
du riz au Libéria ont augmenté au moins de 50%. Il est évident que la montée
incessante des prix des denrées alimentaires aggraveront et approfondiront la
pauvreté, la vulnérabilité, l'insécurité alimentaire et la malnutrition dans ce pays qui
se remet à peine de longues années de conflit. Les fermiers libériens sont confrontés
à une multitude de contraintes relatives à la disponibilité, à l'accès, et au coût élevé
des semences, de l’engrais, des outils, du matériel de lutte contre les parasites et
autres, provocant des pertes élevées.
Les effets attendus au plan microéconomique sont un accroissement du niveau
de sous-emploi. En conséquence, les prévisions alarmistes du Bureau International
du Travail (BIT) et de l'Organisation de Coopération et de Développement
Economiques (OCDE) n’épargneraient pas la région où une contraction de l’activité
est attendue en 2009.
Ces deux institutions estimaient qu’en octobre 2008, la crise risquait
d'accroître de 20 à 25 millions dans le monde, le nombre de personnes sans travail
d'ici à 2010 (Le Monde, 2009). Une baisse du PIB conduira à un ralentissement dans
la distribution des revenus de facteurs dans les économies de la région ; ce qui aurait
un effet sur le rythme d’accroissement du revenu moyen des ménages dans la région.
Au Ghana, des tensions sociales se faisaient sentir avant même la survenue de
la crise. Tandis qu'il n'y a aucune donnée (mensuelle) régulière sur le marché du
travail, les statistiques disponibles suggèrent déjà un phénomène « de croissance
sans emploi » au cours de la période de la stabilité et de la forte croissance. En
revanche, l'industrie manufacturière, qui a un plus grand potentiel en matière de
création d’emplois, a chuté de 2,3% en 2007, une année où beaucoup d'entreprises se
sont rétrécies ou se sont effondrées en raison de la crise énergétique. En effet, la plus
récente enquête au Ghana (2005) a montré que l'emploi dans l'industrie
manufacturière est passé de 11,7% en 1999 à 11,3% en 2005. Cette situation est
susceptible d’empirer face à la crise.
Au Nigeria par contre, les effets de la crise financière combinés au climat
économique défavorable ont commencé à affecter durement le marché du travail,
occasionnant la contraction de nombreuses sociétés et des licenciements. L'industrie
est la plus touchée. Les secteurs les plus frappés sont les produits pétrochimiques,
textiles, les véhicules, les fabricants de câbles et de pneus. Cependant, les indicateurs
29
du marché du travail pour 2008 ne sont pas encore disponibles, aucun chiffre
définitif sur l'emploi/chômage n’a encore été avancé.
Par ailleurs, à moins que la demande intérieure, par le biais, par exemple,
d’une politique soutenue de grands travaux de l’Etat ne prenne le relais, le reflux de la
demande mondiale, en particulier de celle de produits offerts sur le marché
international par les exportateurs de la région pourrait déteindre sur la croissance
des économies de la région. Cette baisse des exportations aura des effets
macroéconomiques. Elle affectera négativement la balance des paiements et les
finances publiques via le rétrécissement de l’assiette fiscale. Au plan sectoriel,
l’activité des branches tournées vers le marché extérieur baissera. Au niveau
microéconomique, les ménages abrités par ces secteurs verraient leur revenu nominal
baisser, toutes choses restant égales par ailleurs.
Quant aux envois de fonds des migrants africains, leur baisse aura également
des implications macroéconomiques. Elle contribuera à réduire la demande globale et
à refréner, en particulier, la consommation en logements des ménages. Au plan
sectoriel, le secteur des BTP serait le plus touché. Au niveau microéconomique, il
convient de relever que ces transferts jouent un véritable rôle «d’amortisseur social».
A titre d’illustration, dans un pays comme le Sénégal où 47,46% des ménages sont
confinés dans la pauvreté (selon l’enquête sur les ménages de 2001), la baisse de cette
source de revenu pourrait basculer certaines catégories de ménages en-dessous de la
ligne de pauvreté.
Également, compte tenu du fait que le budget de la plupart des économies de
la région est très tributaire de l’appui budgétaire, les conséquences de la réduction de
l’APD pourrait se faire ressentir sur plusieurs plans. Au niveau macroéconomique, la
réduction de l’APD pourrait accentuer la pression sur les finances publiques des pays
de la région et réduire la marge de manœuvre de l’Etat. Au plan sectoriel, les efforts
d’ajustement pourraient conduire à une allocation des ressources au détriment des
secteurs sociaux.
Au plan microéconomique, la baisse des investissements et des dépenses de
fonctionnement dans ces secteurs sociaux aurait un impact négatif sur les ménages.
En conséquence, la baisse de l’APD pourrait avoir des incidences sur la poursuite des
objectifs des OMD dont un des objectifs est de diviser par deux la pauvreté de ses
populations d’ici à 2015.
Par ailleurs, dans les économies fortement dépendant de l’APD et ne
bénéficiant pas de rente tirée par l’exploitation des ressources naturelles, les niveaux
de réserves face au retournement de la conjoncture sont traditionnellement faibles.
Du coup, pour celles d’entre elles qui font face à une dette intérieure importante, les
entreprises pourraient également pâtir du tarissement de l’aide en raison des risques
d’amoncellement de ces arriérés de paiements de l’Etat.
Les mêmes conséquences attendues sur l’Etat et les ménages dans le cas du
canal de l’APD pourraient transparaître également dans le scénario d’un impact qui
passerait par le canal de la bourse.
De même, il convient de noter que la contribution de l’agriculture dans la
formation du PIB de la région est très significative (40%). Le retour des réflexes
protectionnistes chez les pays affectés par la crise contribuera à pérenniser un
commerce déloyal entre les producteurs de la région, traditionnellement offreurs de
produits de base et les agriculteurs des pays du Nord et pourrait différer la conclusion
d’un accord autour de la question des subventions à l’OMC.
Il aura, à coup sûr, des impacts négatifs sur les indicateurs macroéconomiques
de la région. La croissance sera négativement affectée, de même que les finances
30
publiques et la balance des paiements. Au plan sectoriel, les secteurs de l’agriculture,
de l’élevage et de la pêche seront touchés dans leurs exportations. Les ménages
ruraux qui constituent le gros de l’offre de travail dans ces branches en seraient les
plus affectés. Compte tenu de la contribution relativement importante des ruraux à la
pauvreté globale, le niveau de ce dernier pourrait augmenter ; ce qui va amoindrir les
efforts de lutte contre ce phénomène.
Sur un autre plan, la réduction possible de l’aide humanitaire pourrait
conduire l’Etat à se substituer aux organisations caritatives pour faire face à ses
fonctions régaliennes dans le cas, par exemple, de la gestion de catastrophes
naturelles, de fourniture de filets de sécurité, etc. Cette situation aurait alors des
incidences sur les finances publiques. A priori, la substitution de sources de
financement de l’aide humanitaire ne s’effectue pas dans les mêmes ampleurs. Les
effets sectoriels qui pourraient en découler ne sont pas, à priori, facilement
décelables. En revanche, la révision à la baisse du budget de certaines organisations
caritatives aura des conséquences désastreuses sur les principaux bénéficiaires c’està-dire les pauvres généralement localisés en milieu rural.
Au total, même si la baisse des prix attendu dans les pays développés peut
profiter aux économies de la région, il n’est pas évident qu’elle puisse contrebalancer
l’impact négatif de cette crise sur le PIB, l’emploi, l’évolution du revenu moyen dans
la région ouest africaine et, en définitive, la pauvreté.
Du point de vue des économies de la région, quelques enseignements peuvent
être tirés de cette crise financière qui s’étend à la sphère réelle de l’économie. D’une
part, la crise financière tout comme l’a été la crise céréalière révèle une vulnérabilité
des économies oust africaines face aux chocs qui nous viennent de l’extérieur8. Cette
vulnérabilité est expliquée en partie par la trop grande dépendance vis-à-vis de l’aide
et des marchés occidentaux. Mais elle s’explique grandement aussi par la faiblesse de
la croissance des économies et la fragilité de leurs fondements. D’autre part, elle met
à nu un vide récurent en terme de dispositifs d’anticipation des chocs externes.
IV/ Les réponses des politiques nationales et
sous-régionales : Quelles sont les mesures
prises pour faire face : comprendre pour agir
La crise financière internationale actuelle est née aux Etats-Unis. Mais ses
retombées socio-économiques négatives ne se limitent pas aux seules frontières des
Etats-Unis. En effet, la crise n’épargne aucun pays puisqu’il est établi aujourd’hui que
toutes les économies du monde sont touchées, même si les effets varient selon les
pays en fonction de leur degré d’implication dans le système financier international.
Mais les effets de la crise devront affectés avec plus d’acuité les plus pauvres, compte
tenu de leur fragilité et leur vulnérabilité.
De la même manière, les réponses apportées ou à apporter varient suivant les
différents pays qu’il s’agisse des Américains, des Européens, des Asiatiques ou encore
Afin d’évaluer l’impact des différents canaux de transmission du choc (exportations, transferts des
migrants, taux d’inflation, aide publique au développement) sur le niveau d’activité (PIB), un modèle à
correction d’erreur, sur des données historiques, pourrait être appliqué à un panel constitué des pays
de la CEDEAO.
8
31
des Africains. Et la contribution des institutions financières internationales telles que
la BM, le FMI, la BAD, le BIT….etc. est aussi attendue.
Globalement, les mesures de politiques économiques pour atténuer l’impact
pourraient prendre en considération les points qui suivent :
Les pays seront affectés différemment par les canaux indiqués ci-dessus.
Mettre au point une typologie de pays permettrait une hétérogénéité de
réponse pour faire face à des besoins spécifiques.
Au sein des économies nationales, certaines personnes seront plus
exposées aux effets que d’autres et des mesures spécifiques seront
nécessaires.
Dans les pays affectés par la crise, il faudra absolument une extension des formes
de protection sociale pour minimiser l’impact sur les pauvres. Un choc externe de
cette nature aura des effets différents et par conséquent nécessitera des réponses
différentes des politiques mises en œuvre pour par exemple combattre la sécheresse,
les désastres naturelles etc. L’expérience de la crise asiatique de 1997/1998 peut
servir de leçon quant aux mesures à prendre :
Protéger les dépenses pro-pauvres (pas seulement la santé et l’éducation
mais aussi l’infrastructure)
S’inspirer de l’expérience des autres pays comment cibler la protection
sociale (subsides en alimentation peuvent aider les pauvres mais sont
souvent mal ciblés et partant trop chères, les transferts non conditionnels
en cash peuvent être plus rapides à mettre en place que les transferts
conditionnels, etc.)
La stabilité macroéconomique est également importante pour les pauvres.
Les politiques pour maintenir la stabilité des prix et les niveaux d’emploi
sont cruciales. La mise en œuvre des politiques de protection sociale
dépendront de la manière avec laquelle la crise affectera l’aide.
En nous intéressant sous-région Afrique de l’Ouest, nous ciblons les pays
membres de la CEDEAO. Notre préoccupation ici est alors de savoir, dans un premier
temps, quels types de mesures ont-ils déjà prises pour faire face aux effets de cette
crise et, dans un second temps, ouvrir des pistes de propositions de types de politique
possible à mener.
1. Les solutions déjà prises ou envisagées
Contrairement aux pays développés et émergents, ceux en développement
d’Afrique en général et de la CEDEAO/UEMOA en particulier, n’ont pas réagi avec la
même ampleur, rapidité et rigueur.
En effet, alors que les effets de cette crise font peser les risques d’une
dégradation socio-militaro politique aux conséquences incalculables, jamais la
résistance n’a semblé aussi faible, voire inexistante.
Nous passons en revue les différentes réactions à ce jour dans cet espace
économique.
1.1. Les mesures préconisées par la CEDEAO/UEMOA
La crise financière et économique actuelle, compte tenu des ses effets
probables sur les économies africaines, a amené les 15 pays membres de la CEDEAO
32
et les 8 de l’UEMOA à mettre en place des dispositifs de réponses appropriées. Ces
mesures sont les suivantes :
Du coté de la CEDEAO, en prenant conscience des effets à moyen et long
termes de la crise sur les économies des Etats membres, le sommet des Chefs d’Etat
et de Gouvernement réuni à Abuja le 19 décembre 2008, a appelé les 15 Etats
membres à "renforcer la gestion et les réformes structurelles de leurs économies".
Aussi, un plan d’action préconisant des investissements massifs dans les
infrastructures (énergies, routes, transports…) a été adopté sans plus, c'est-à-dire
sans dire comment l’exécuter.
Par ailleurs, la commission de la CEDEAO s’est fait siennes les résolutions des
Ministres des Finances et des Gouverneurs des Banques Centrales d’Afrique
relatives :
au renforcement des stratégies de gestion des réserves afin de minimiser
les pertes en période de crise financière ;
à l’amélioration des structures de gouvernance et l’obligation de rendre
compte ;
à l’intensification des efforts afin de promouvoir l’intégration régionale ;
à la mobilisation effective des recettes intérieures et le renforcement des
marchés africains des capitaux pour permettre une plus forte mobilisation
de l’épargne intérieure et de l’intégration financière ;
à la conclusion rapide et heureuse du cycle de négociation de Doha à la
lumière des conséquences de la crise financière sur le commerce ;
enfin, à la réforme en profondeur des Institutions de Bretton-woods.
Au niveau de l’UEMOA, contrairement à la crise alimentaire, les réponses de
l’union pour faire face à la crise financière, sont encore attendues. La Commission de
l’UEMOA, en plus de la mise en place au sein de la sous-région d’un Comité de veille
chargé de regarder les canaux de transmission et éviter ainsi ses effets de la crise,
envisage cinq (5) solutions possibles à savoir :
renforcement de l’assainissement du cadre macroéconomique ;
renforcement de la coordination des politiques économiques dans l’union ;
renforcement de la mobilisation des ressources intérieures pour financer le
développement ;
accélération des réformes structurelles nécessaires ;
enfin, renforcement de la surveillance des marchés monétaires et
financiers.
Selon le Président de la Commission de l’UEMOA9, « le principal risque
aujourd’hui n’est pas que les économies de l’union s’installent dans la récession, mais
de connaître une inflation élevée, susceptible de perdurer ». Cette déclaration non
seulement tire la sonnette d’alarme, mais aussi doit inviter à une réflexion sur le type
d’actions et de politiques qu’il convient de mettre en place dans la sous région.
On peut, dès lors, comprendre pourquoi la BCEAO a relevé son taux directeur
de base qui est passé de 4,25% à 4,75%, alors que tous les banquiers centraux
baissent leur taux et injectent de la liquidité dans l’économie.
9
UEMOA, « Impacts de la crise financière internationale sur les économies de l’UEMOA, janvier 09, p18.
33
1.2. Les réactions des Etats
Si les plans de sauvetage à la crise financière ont été en Amérique, en Asie et en
Europe spontanées, rapide et directes, en Afrique les réponses et réactions sont
timides sinon inexistantes.
Cette attitude attentiste des autorités africaines en général et celles de l’Afrique
de l’ouest, en particulier, s’expliquent par le fait qu’à court terme, le système bancaire
de la CEDEAO et de l’UEMOA est encore à l’abri des effets directs de la crise. La
préoccupation de l’heure semble être la situation de la persistance de la tension
inflationniste dans la sous région.
En effet, dans la sous région, les Etats s’attèlent prioritairement dans un premier
temps à combattre les effets des deux premières crises (alimentaires et énergétiques).
Dans cette lancé, plusieurs actions ont été entreprises :
Une multitude de mesures économiques sont prises pour assurer
l’approvisionnement régulier du riz : des droits d'importation sur le riz, le
blé, le maïs jaune et des légumes (l'achat et la réexportation de ces articles
sont déclarées « actes criminelles » au Ghana ; le Libéria a suspendu aussi
bien la taxe à la consommation de 2,10$ sur un sac 50KG de riz que celle
sur les équipements, les matériaux agricoles afin d'encourager une plus
grande production. En 2007, le gouvernement du Libéria a développé une
stratégie nationale en vue de réaliser la sécurité alimentaire. En outre,
plusieurs gouvernements se sont engagés dans des négociations bilatérales
avec d'autres gouvernements pour fixer un tarif forfaitaire pour le riz.
Des programmes pour la protection sociale ont vu le jour un peu partout.
Au Ghana, cela a commencé en mars 2008 par des transferts directs
d'argent comptant aux ménages pauvres identifiés sous l'approbation du
LEAP (Livelihood Empowerment Against Poverty). Les autres initiatives de
lutte contre la pauvreté et le chômage ont été principalement la
densification des microcrédits et des prêts à court terme, des travaux
d'infrastructures à forte intensité de main d'œuvre pour relancer l’emploi.
La subvention de l'électricité et du carburant pour soulager les
consommateurs.
La seule réaction spectaculaire notée à ce jour dans la sous région provient du
Nigeria qui, anticipant sur les effets probables de la crise, a injecté 100 milliards de
Nairas (l’équivalent d’un milliard de Dollars américains) dans son système financier.
De plus, ce pays, qui a une connexion relativement forte avec le reste du monde à
cause du pétrole et l’importance des produits cotés en bourse, n’a pas tardé à prendre
des mesures préventives. Ainsi, le gouvernement nigérian a constitué dès le 16
Janvier 2009 la Direction Présidentiel sur la crise économique globale, en plus de
l'équipe consultative présidentielle sur le marché financier qui fonctionne depuis août
2008 pour délibérer sur des mesures à prendre afin de renverser la tendance
baissière du marché financier nigérian.
La SEC (Securities and Exchange Commission) et la Bourse des Valeurs
Nigériane(NSE) ont pris concrètement les mesures suivantes :
Tous les opérateurs du marché financier ont réduit des honoraires de 50% ;
La réglementation commerciale est passée en revue par NSE ;
34
Une limite maximale de 1% est imposée pour les fluctuations
quotidiennes des prix.
La Banque Centrale du Nigéria (BCN) a réagi en :
Assouplissant la contrainte de réserve obligatoires en espèces de 4% à 2% ;
Réduisant le coefficient de liquidité de 40% à 30%
En Côte-d’Ivoire, en dehors du Gouvernement, une table ronde a été organisée
par des experts Ivoiriens et dont l’objectif est de faire prendre consciences de l’impact
de la crise financière sur l’économie ivoirienne et élaborer des propositions propres à
la C.I à l’effet d’en juguler les méfaits.
Il ressort des discussions de cette table ronde que la voie de solution à la crise
reste, pour la C.I et pour tous les pays de la sous région de la CEDEAO, celle de
l’intégration régionale. «A cette crise, il n'existe pas de réponse nationale. Il y a plutôt
une réponse collective», a affirmé Charles Konan Banny, ajoutant que la crise
financière avec sa propagation au niveau de l'économie réelle soulève beaucoup
d'incertitudes notamment chez les agents économiques.
Les autres mesures préconisées par la table ronde vont de la restauration du
climat de confiance des agents économiques, pourvoyeurs d’emplois et de
développement à la refonte totale du système économique à travers la transformation
des matières premières, l'approfondissement du système bancaire avec, en point de
mire le financement des investissements, l'accroissement de la productivité agricole
et surtout la réforme du système d'éducation et de la formation.
Au Burkina Faso, les députés ont interpellé le gouvernement sur la question.
Mais le Ministre de l’Economie et des Finances qui a représenté le Gouvernement
s’est contenté d’explications sur l’origine de la crise et de ses conséquences sur
l’économie. Mais des solutions, rien n’est encore envisagé pour le moment afin de
faire face aux conséquences de la crise.
Comme on le voit, de l’UEMOA à la CEDEAO, les dispositifs de riposte à la
crise tardent à se mettre en place. Les effets de la crise n’étant pas pour maintenant,
les politiques et autres mesures de riposte peuvent donc attendre.
Si les réactions face à la crise dans les pays africains de la CEDEAO sont encore
attendues, celles des institutions internationales se mettent en place.
1.3. Que préconisent les institutions internationales pour aider les pays
africains à faire face à la crise ?
La crise financière internationale inscrira les Etats africains parmi ses
victimes. Mais d’ici là, auront-ils les moyens d’y faire face ou simplement d’en
atténuer les effets ?
Conscientes de l’ampleur de cette crise et des faibles capacités des Etats à y
faire face, les institutions internationales (BM, FMI, BAD,…) se sont mobilisées pour
leur apporter le soutien nécessaire.
1.3.1. Quelles solutions pour la Banque Mondiale ?
Selon la Banque Mondiale, la crise financière est désormais une crise
économique globale qui ne tardera pas à devenir une crise de l'emploi. A cet effet,
tout en appelant les gouvernements à tenir leurs engagements concernant
35
l’augmentation de l’aide aux populations les plus vulnérables, elle a mis en place les
mécanismes de financement suivants :
Le Groupe de la Banque mondiale (BM) pourrait augmenter de
manière importante son soutien financier aux pays en
développement ;
La BIRD pourrait prendre de nouveaux engagements pouvant
atteindre 100 milliards de dollars pour les trois prochaines années.
Cette année, le volume des prêts pourrait pratiquement tripler pour
dépasser 35 milliards de dollars, contre 13,5 milliards de dollars
l’année dernière, afin de répondre aux besoins accrus des pays en
développement partenaires ;
Un nouveau mécanisme, d’un montant de 2 milliards de dollars, vise
à aider rapidement les pays les plus pauvres à surmonter les effets
de la crise financière. Il est destiné à renforcer les filets de
protection, l’infrastructure, l’éducation et la santé. Il permettra
d’accélérer le processus d’approbation et de faire bénéficier aux 78
pays les plus pauvres d’une aide de 2 milliards de dollars, prélevée
sur l’enveloppe de 42 milliards de dollars de l’IDA ;
Par le biais du lancement ou de l’expansion de quatre initiatives de
l’IFC, la BM renforcera son soutien au secteur privé en :
Garantissant les flux commerciaux : l’IFC prévoit de doubler le
montant de son Programme de financement du commerce mondial pour le
porter de 1,5 milliard de dollars à 3 milliards de dollars et de mobiliser des
fonds provenant d'autres sources ;
Renforçant les systèmes bancaires affaiblis par la crise : l’IFC a
l’intention de lancer un fonds de participation mondiale pour recapitaliser
les banques en difficulté. L’IFC compte investir un milliard de dollars sur
trois ans, montant auquel devraient s’ajouter au moins 2 milliards de
dollars fournis par d’autres investisseurs (le Japon s’engage à fournir
2 milliards de dollars) ;
Soutenant le financement des infrastructures : l’IFC compte
investir au moins 300 millions de dollars sur trois ans et mobiliser au
moins 1,5 milliard de dollars auprès d’autres sources ;
Adaptant les services-conseil de l'IFC : l’IFC a entrepris de réorienter
ses programmes de services-conseil actuels pour leur permettre d'aider ses
clients à traverser la crise actuelle. Selon les estimations de l’IFC, le besoin
de financement pour les trois prochaines années est d’au moins 40 millions
de dollars ;
proposant à travers l’Agence multilatérale de garantie des
investissements (MIGA), des garanties aux banques étrangères, pour
injecter sur ces marchés les liquidités dont ils ont tant besoin. L’appui que
la MIGA prévoit de fournir pour des projets de ce type en Ukraine et en
Russie devrait conforter la confiance dans le système financier de ces pays.
Des garanties similaires devraient être accordées en Europe de l’Est et en
Afrique.
36
1.3.2 Les mesures de riposte du FMI
Comme la BM, le FMI a annoncé des mesures d’ordre général en faveur de
tous les pays du monde touchés ou appelés à être touchés par la crise financière.
Les propositions du FMI portent sur les contours d’une relance budgétaire
mondiale à savoir que :
i)
la chute de la demande appelle une relance budgétaire substantielle,
ii)
la relance doit privilégier les dépenses et les allègements fiscaux ciblés,
i)iii) entreprendre une action concertée et collective en raison de la
dimension internationale de la crise.
Spécifiquement pour les pays les plus démunis d’Afrique, d’Amérique du sud
et d’Asie, voire même des pays riches, le FMI entend mettre en œuvre ce que M.
Dominique Strauss-Kahn appelle « la conditionnalité sociale ». Il s’agit pour le FMI
d’aider les pays à établir ou à maintenir les dispositifs sociaux destinés aux catégories
de population pour lesquelles un programme du FMI pourrait causer du tort.
L’une de priorités du FMI dans les tous prochains mois est de fournir son aide
aux pays émergents et en développement frappés par la crise, à des conditions
adaptées pour répondre à une double priorité : affronter la crise et protéger les
couches les plus vulnérables de la population.
Cette priorité s’est traduite par la mise en place d’une nouvelle facilité de
liquidité à court terme (FLC). Elle vise à aider les pays dont les fondamentaux et les
politiques intérieures étaient solides à faire face aux manques de liquidités à court
terme.
1.3.3. Les propositions de la BAD
La BAD, en s’intéressant aux conséquences socio-économiques de la crise
financière, s’est investit à mettre en place quelques mesures pouvant aider les pays
africains à moins subir ces effets.
A cet effet, la BAD, lors d’un sommet des Ministres de l’Economie et des
Finances et les Gouverneurs des Banques Centrales, propose aux Pays Membres
Régionaux (PMR), (entre autres) :
de continuer de consolider les réformes économiques en vue de renforcer
leur capacité de résistance aux crises externes naissantes;
de procéder à l’établissement d’un ordre de succession adéquat des
mesures de libéralisation des échanges et du secteur financier dans
l’optique d’une intégration équilibrée dans l’économie mondiale ;
de reconnaître l’importance de poursuivre les réformes de manière
coordonnée aux plans régional et continental ;
de revoir le niveau de couverture des réserves de manière à ce que les
réserves détenues aident les pays à atténuer les effets du retrait rapide des
investisseurs étrangers ;
d’engager des réformes en vue d’améliorer l’efficacité dans la mobilisation
des ressources internes au moyen d’instruments financiers et budgétaires ;
d’engager des réformes du secteur financier de nature à renforcer la
concurrence, tout en veillant à l’application effective de mécanismes
permettant de réduire au minimum le recours aux emprunts en devises
risqués ;
de réviser les niveaux de capital minimum imposés aux banques ;
37
de renforcer la réglementation du segment non bancaire du secteur
financier ;
d’accélérer la réforme des pensions pour débloquer les financements à
moyen et long terme ;
d’envisager la fourniture de garanties souveraines pour rétablir la confiance
des investisseurs ;
de concevoir une stratégie de sauvetage des banques en difficulté, qui
prendra en compte la nature des ressources (consultants spécialisés,
comptables, avocats) nécessaires, et l’identification de l’organisation
chargée de l’émission des obligations d’urgence ;
de faire face à l’urgence de réduire la dépendance vis-à-vis des produits
primaires ; en d’autres termes, accélérer la transformation de la structure
des économies afin de favoriser une structure de production et
d’exportation plus diversifiée ;
d’adopter des stratégies mieux adaptées pour la gestion des ressources
naturelles et l’utilisation prudente des recettes d’exportation en vue
d’améliorer la diversification et la capacité de résistance aux perturbations
externes ;
d’envisager la mise en place de structures supranationales chargées de
réglementer l’activité bancaire transfrontalière.
Pour sa part, la BAD :
dans un contexte où les crédits tarissent, peut aider les pays à accéder à des
financements à long terme, en particulier pour les infrastructures
économiques à caractère essentiel. Lorsque la liquidité du secteur bancaire
sera restaurée, la Banque pourra aider les pays à accéder à des
financements provenant d’autres sources en offrant des garanties à cet effet
;
tout en assumant ces rôles anticycliques, intensifiera sa collaboration avec
les autres partenaires au développement, en particulier les IFD régionales,
pour assurer une intervention directe plus efficace et rationnelle sur le
continent ;
doit s’appuyer sur le projet « Mettre la finance au service de l’Afrique » afin
d’encourager les banques à plus de transparence et à une meilleure
communication sur leurs activités ;
peut aider les PMR à soutenir les banques commerciales et les banques de
développement en augmentant les lignes de crédits et en offrant au secteur
financier d’autres formes de soutiens destinés à renforcer la liquidité et le
capital risque. Ces aides seront ciblées sur des objectifs de développement
clairement définis tout en assurant une gestion prudente du risque
institutionnel ;
doit intensifier son rôle de financement et de conseil qui consiste à aider les
pays à maîtriser les recettes pouvant provenir des ressources naturelles, et
à utiliser ses ressources de façon prudente en vue d’instaurer une
croissance durable ;
1.3.4. Les recommandations de l’OIT
Dans sa déclaration relative à la crise financière et économique mondiale
actuelle, le Conseil d’Administration de l’OIT préconise six mesures suivantes,
comme pistes de réponses nationales et internationales à la crise et dont les objectifs
38
visent à protéger les personnes, à soutenir la productivité des entreprises et à
préserver l’emploi.
Ces mesures sont :
1. garantir les crédits nécessaires pour la consommation, le commerce et
l’investissement et enfin stimuler la demande. Ceci à travers :
la dépense et l’investissement public ;
des mesures budgétaires et salariales pour stimuler la demande intérieure ;
des politiques propices à la viabilité financière
2. protéger les personnes les plus exposées. Comme mesures, l’OIT propose :
d’élargir la protection sociale et les prestations de chômage
d’offrir des possibilités supplémentaires de formation et de reconversion
professionnelle ;
renforcer les services de placement
développer des programmes d’urgence pour l’emploi ainsi que des systèmes
de protection sociale ciblés ;
la révision des conditions de crédits accordés aux propriétaires
immobiliers.
3. soutenir les entreprises productives, rentables et durables. Pour cela, les
mesures spéciales suivantes sont envisagées :
augmenter les investissements consacrés à des infrastructures conçues
pour les petites entreprises et coopératives ;
recourir à « l’initiative emplois verts » de l’OIT.
4. la réaffirmation de la déclaration de l’OIT relative aux principes et droits
fondamentaux au travail et son suivi.
5. l’étroite collaboration de l’OIT et de ses mandants tripartites avec le
système multilatéral. Mais aussi, le dialogue social permanent et la pratique du
tripartisme entre les Gouvernements et les organisations représentatives de
travailleurs et d’employeurs au plan national et international.
6. enfin, maintenir l’aide au développement au moins à son niveau actuel et
accorder des lignes de crédits et une aide supplémentaires aux pays à faible revenu.
2. Les propositions de types de politiques possibles
Les retombées négatives de la crise financière et de ses effets sont directement
et en dernier ressort la destruction de l’emploi, l’aggravation du phénomène de la
pauvreté, la baisse de revenu et l’effondrement des prestations des services sociaux de
base (l’éducation, la santé, le logement, l’alimentation…). L’enjeu est de taille
lorsqu’on sait que derrière un emploi, il y’a un travailleur et une famille. Un emploi
perdu, c’est, particulièrement en Afrique, une dizaine de vie qui est en danger.
Comment les pays à faible revenu comme ceux de la Cédéao et de l’Uémoa
peuvent-ils les éviter ? Quels types de mesures peuvent-ils prendre pour préserver ces
acquis sociaux ?
2.1.
Les mesures préventives
Il ressort de toutes les analyses de l’impact de la crise financière qu’à court
terme, les Etats de la CEDEAO/UEMOA sont à l’abri de la tempête financière
39
internationale. Cette garantie, n’est cependant pas de mise à moyen et long terme (les
analystes s’accordent à dire que les effets seront plus indirects que directs mais peuton préjuger qu’ils se feront sentir à moyen et long terme et non à court terme ?)
Aussi, les Etats en question, pendant qu’il est encore temps, doivent déjà prendre les
dispositions pour éviter les effets de la crise sinon en atténuer le choc.
Comme mesures préventives, les Etats doivent :
assainir le cadre macroéconomique (règlements des arriérés de paiements
dus par l’État qui asphyxient davantage les PME et PMI grande utilisatrice
de main d’œuvre que les grandes entreprises, stabilisation des prix par une
plus grande concurrence dans la distribution afin que les effets de la baisse
des prix des produits importés se transmettent effectivement au
consommateurs, contrôle des niveaux de déficits budgétaires, etc.);
maintenir le train de réformes pour s’assurer d’un cadre propice à même de
permettre de capter les flux de capitaux qui quitte les places boursières
pour chercher refuge et de tirer bénéfice d’une reprise de la croissance une
fois la récession endiguée dans les pays avancés;
diversifier le commerce extérieur (construire les conditions d’une
réorientation des ventes extérieures vers les marchés des pays émergents,
principal espoir de croissance de l’économie mondiale face à la récession
qui s’installe chez notre partenaire traditionnel qu’est l’Union
Européenne);
augmenter le volume d’investissement public dans les secteurs qui abritent
les ménages les plus vulnérables (agriculture, pêche, santé et éducation).
En plus de ces mesures et face à des perspectives assez inquiétantes de la crise,
il convient de rappeler, pour mémoire, les propositions formulées lors de l’atelier sur
« la dimension sociale de la mondialisation »10. La quintessence reste encore
pertinente et d’une profonde actualité. En effet, il était proposé deux types d’actions :
1. Nécessité d’élaborer des politiques réalistes et efficaces de l’emploi
Pour ce faire, son argumentaire s’articule autour des 5 éléments
constitutifs suivant :
La mise en place de nouveaux cadres de concertations permanentes entre
tous les partenaires sociaux en vue de tendre vers la réalisation d’un
véritable consensus social, condition de base de toute politique de lutte
contre le chômage et de sortie de crise.
L’adaptation, sur la base du consensus précédemment réalisé, de
l’ensemble du dispositif législatif et réglementaire en matière de travail et
de politique d’emploi au nouvel environnement de crise afin d’en atténuer
et de déconcentrer les effets sociaux négatifs ; cette démarche devrait de
surcroît faciliter et accélérer l’adaptation de l’appareil productif national
aux contraintes extérieures, notamment dans l’aspect concurrentiel.
L’élaboration de mesures vigoureuses de promotion des PME (Petites et
Moyennes Entreprises) généralement reconnues comme étant de grandes
pourvoyeuses d’emplois. Pour cela, il importera aux pouvoirs publics de
lever toutes les rigidités et d’alléger les procédures administratives de
création des PME, de prendre certaines dispositions fiscales incitatrices à
leur égard, de faciliter dans la mesure du possible leur accès aux
institutions financières réputées méfiantes à leur endroit.
10
Professeur Moustapha KASSE, La dimension sociale de la mondialisation.
40
L’exploitation et l’adaptation de certaines mesures en cours d’application
notamment dans les pays développés comme i) le développement du
système de préretraite. Si les employeurs ont jugé le système très coûteux
pour eux, à l’expérience, il ressort des statistiques officielles que des
licenciements pour un effectif équivalent auraient coûté encore plus chers.
De plus, l’impact psychologique et social a été très favorable contrairement
à ce qu’auraient représenté des licenciements brutaux et massifs, ii) le
travail à temps partiel, iii) la réduction du temps de travail et la flexibilité
de l’emploi sous des formes concertées. Dès que la loi assouplit les
dispositions en vigueur, la porte est ouverte à toutes les combinaisons
possibles de partage du travail qui améliore d’ailleurs la productivité et
réduit l’absentéisme. Ainsi, selon la spécificité de la branche d’activité et les
contraintes particulières liées à l’exploitation, plusieurs entreprises en
France, en Belgique ou encore en Allemagne ont déjà mis en œuvre avec
des succès variables une nouvelle organisation de travail fondé sur ce
principe. La journée normale de travail est ainsi sectionnée et le personnel
se répartit en plusieurs équipes roulantes. La productivité a augmenté, la
production aussi et certaines entreprises ont même pu embaucher des
travailleurs supplémentaires, iv) le développement de systèmes nouveaux
comme les travaux d’utilité collective (TUC) en France et qui sont ouverts
aux jeunes de 16 à 25 ans sans emploi et qui ne suivent pas une formation ;
2. La nécessité de promouvoir à grande échelle et par des politiques
appropriées le secteur informel et la Toute Petite Entreprise (TPE).
Toutes les études montrent aujourd’hui le rôle de premier plan que joue le
secteur informel dans les économies africaines aussi bien dans la production de la
valeur ajoutée que la création d’emplois. « Faute d’alternatives de développement
impulsé par les pouvoirs publics, un nombre sans cesse croissant de citadins africains
trouvent dans leurs propres initiatives et leur ingéniosité les moyens de s’affirmer et
de survivre »11.
Déjà, dans beaucoup de pays, le secteur contribue pour plus de 50% au PIB et
peut fournir jusqu’à plus de 60% des revenus. Dans l’avenir, selon certaines
statistiques, le secteur devrait fournir 93% des nouveaux emplois dans les villes alors
que, présentement, presque deux personnes sur trois en vivent.
Pour ce faire, il faut que les pouvoirs publics lui accordent sa place dans la
stratégie de développement pour en faire le levier de la croissance.
Dans cette direction, P.ENGELHARD observe avec justesse «qu’il sera difficile
de sortir de la pauvreté aussi longtemps qu’on aura pas assimilé un fait essentiel : une
grande partie de la production du continent africain émane des petites entreprises
familiales urbaines et des petites exploitations rurales dont l’efficience économique,
cependant, est souvent très faibles, en dépit de performances parfois étonnantes »12.
L’Etat doit alors aider ces entreprises à devenir plus efficiente en accroissant
leur productivité du travail par la formation, la disposition d’un outillage et
l’ouverture de crédits fonctionnels c’est-à-dire en leur créant un environnement
incitatif et approprié.
Le secteur informel est même entrain de se constituer en économie mondiale.
D’abord, ses acteurs contribuent à la réalisation effective des processus d’intégration
régionale avec un dynamisme déconcertant par édictions de propres règles de
11
12
C. Maldonado, Ngauufryau et al : L’économie informelle en Afrique francophone, Edit. BIT 2001
P. Engelhard : L’Afrique miroir du monde, Edit. Arlea, 1998 p.63.
41
circulation et d’échange de biens et de la monnaie : flux commerciaux, taux de change
parallèles. Ensuite, les acteurs établissent des réseaux de plus en plus denses qui
essaiment en Europe, en Amérique et en Asie.
2.2.
Les mesures curatives
1)
Les conséquences de la tourmente financière actuelle sur les pays
africains sont attendues à moyen et long terme. Même si certains effets de cette crise
peuvent être évités ou atténués, il n’en demeure pas moins que les impacts réels
devraient se manifester et créer de multiples tensions sociales. Cette situation appelle
la mise en place de politiques macroéconomiques plus pertinentes où les aspirations
à la sécurité devraient se conjuguer aux exigences de l'équité et de la solidarité. Il
faudrait en conséquence un redéploiement des moyens et une nouvelle allocation des
ressources vers le secteur primaire, laissé en déshérence depuis des décennies, à
développer encore davantage les infrastructures et les équipements collectifs et à
renforcer les ressources humaines à travers l’investissement dans la formation,
l’éducation et la santé. Ces politiques doivent viser l’atteinte des "Objectifs du
Millénaire pour le Développement" adoptés en 2000 par les Nations unies destinés à
combattre la faim et la misère.
Dans le nouveau contexte, l’Etat doit prendre de nouvelles fonctions
économiques et financières pour relancer la croissance, en vue de faire face aux
nouveaux risques sociaux. Partout dans le monde riche comme pauvre, un nouveau
message à l’action publique émerge : les Etats jouant pour les grandes firmes
économiques comme financières un rôle de prêteurs en dernier ressort, ils se doivent
pour être équitables de jouer aussi le rôle d’employeurs en dernier ressort.
Pour y faire face, plusieurs types de traitement peuvent être préconisés :
1. politique de grands travaux afin de contrebalancer la baisse de la demande
extérieure par un accroissement de la demande intérieure;
2. relance des travaux d’intérêt collectif afin d’offrir une rémunération voire
un pouvoir d’achat aux ménages les plus vulnérables;
3. institution de mécanismes permettant aux agents déflatés des entreprises
publiques ou privées de bénéficier d’un crédit de reconversion et même aux chômeurs
(ayant déjà travaillé) de disposer d’indemnités de licenciement pour créer de
nouvelles PME.
Conclusion : L’ampleur et la profondeur
des conséquences sociales de la crise
économique et financière placent l’OIT
au cœur des nouveaux risques sociaux.
La conjugaison de trois crises énergétique, alimentaire et financière dans le
monde et en Afrique est à la base d’une crise sociale d’une rare gravité qui risque
d’ébranler sérieusement les fondements mêmes des ordres politiques: aggravation du
couple chômage et pauvreté, élargissement des inégalités et délitement des
42
protections sociales modernes comme traditionnelles. La crise financière s’étant
transmutée en une crise économique, elle ne tardera pas à devenir un problème social
sans mesure. En s’appuyant sur les prévisions du FMI de novembre 2008, le taux de
chômage mondial passerait de 5,7 pour cent en 2007 à 6,1 pour cent en 2009, ce qui
se traduirait par une hausse du nombre de chômeurs de 18 millions par rapport à
2007. Cette situation est d’autant plus problématique que le BIT, dans son rapport
annuel sur les tendances mondial de l’emploi, estime que 1,4 milliard de travailleurs
vivront sous le seuil de pauvreté, c'est-à-dire avec moins de 2 dollars par jour. Il est
donc fort à craindre du sort des couches sociales défavorisées, mais aussi celui des
femmes.
Pour l’Afrique en général et la région oust-africaine, tous les canaux de
transmissions identifiés conduisent au bout à la même conjecture et conclusion : la
crise financière menace de réduire à néant les progrès appréciables accomplis
pendant des dizaines d’années dans le cadre de réformes de politiques économiques
visant à faire de l’Afrique une destination plus attrayante pour les capitaux privés et
elle va entraîner une dépréciation rapide des monnaies et de fortes chutes des cours
boursiers, les investisseurs étrangers liquidant une grande partie des avoirs qu’ils
détenaient sous forme de valeurs mobilières et de parts de capital. Nombre de pays
de la sous-région verront leurs économies fragilisées et encore plus vulnérables, avec
une croissance plus faible, des taux de change et des marchés boursiers instables, une
hausse des niveaux de pauvreté et de chômage, un affaiblissement des systèmes de
santé et d’éducation, une mauvaise qualité des services sociaux de base et en définitif
des difficultés plus grandes pour réaliser les Objectifs du Millénaire pour le
Développement
Cette situation dont tout indique qu’elle s’inscrit dans la durée place l’OIT au
centre des nouvelles préoccupations d’analyse et de recherche de réponses
appropriées. En effet, avec l’augmentation du nombre de chômeurs de 18 à 51
millions de personnes en 2009 à travers le monde, le renforcement des conditions
difficiles de travail (les travailleurs en situation d’emploi vulnérable pouvant
atteindre 53% de la population active possédant en emploi), le creusement des
inégalités, la montée de la pauvreté de masse en Afrique et dans le monde, le regain
des exclusions et des précarités de tous ordres, l’OIT par sa structure tripartite et son
expertise sur les questions relatives au marché du travail, à la protection sociale et au
dialogue social est placée de facto au cœur des dispositifs de compréhension et de
recherche de solutions de sortie de crise.
En d’autres termes, la crise financière et économique donne de nouvelles
prérogatives à l’institution qui a accumulé déjà beaucoup d’expérience et de savoirfaire durant toutes ces années de lutte contre le sous-emploi. Elle relance aussi la
problématique de l’emploi décent et la place des femmes dans le milieu du travail.
Son rôle consistera ainsi, en plus des énormes défis existants déjà quant à l’atteinte
des OMD, à désormais servir de baromètre et de régulateur social en analysant les
répercussions réelles de ce phénomène sur l’Afrique et à adopter des stratégies
d’accompagnement des politiques gouvernementales et des mesures relatives au
refinancement des économies africaines notamment :
les politiques d’emploi, surtout le combat contre le travail précaire ;
le renforcement des capacités productives dans les secteurs
manufacturiers ;
le soutien des petites et moyennes entreprises ;
l’accroissement des investissements directs étrangers ;
la recherche de la sécurité alimentaire ;
43
et enfin, instaurer le dialogue social au niveau de l’entreprise, du secteur
d’activité et de chaque pays, comme il le recommande d’ailleurs.
Cela replace justement le BIT au cœur de la question du développement,
surtout en Afrique subsaharienne où se trouve quasiment les pays les plus pauvres du
monde. Cette crise donne de nouvelles prérogatives à l’institution qui a accumulé déjà
beaucoup d’expérience et de savoir-faire durant toutes ces années de lutte contre le
sous-emploi. Elle relance aussi la problématique de l’emploi décent et la place des
femmes dans le milieu du travail. Son rôle consistera ainsi, en plus des énormes défis
existants déjà quant à l’atteinte des OMD, à désormais servir de baromètre et de
régulateur social en analysant les répercussions réelles de ce phénomène sur l’Afrique
et à adopter des stratégies d’accompagnement des politiques gouvernementaux et des
mesures relatives au refinancement des économies africaines notamment :
les politiques d’emploi, surtout le combat contre le travail précaire ;
le renforcement des capacités productives dans les secteurs
manufacturiers ;
le soutien des petites et moyennes entreprises ;
l’accroissement des investissements directs étrangers ;
la recherche de la sécurité alimentaire ;
et enfin, instaurer le dialogue social au niveau de l’entreprise, du secteur
d’activité et de chaque pays, comme il le recommande d’ailleurs.
De plus, il est impérieux que les Etats et la communauté internationale s’y
prennent maintenant pour prévenir et atténuer les effets de cette crise sur les
économies africaines en général et de celles d’Afrique de l’ouest en particulier ; car les
économistes s’arrêtent souvent à l’aspect économique et sous-estiment totalement les
ramifications sociales. Pour ce faire, nous recommandons vivement :
1. De mener en toute urgence, une étude complète et détaillée pour évaluer
avec certitude (et non présumer) les canaux de transmission de la crise sur
l’économie réelle et quantifier plus précisément les conséquences sur le marché du
travail. Cela s’impose d’autant plus que la crise financière risque d’augmenter de 20
millions le nombre de chômeurs, selon le BIT. Les personnes les plus affectées
seraient, sans conteste, les plus "vulnérables", le nombre de "travailleurs pauvres qui
sont localisés pour la majorité en Afrique subsaharienne ;
2. Le regroupement et la consolidation des entreprises, des petites industries
et unités de production en consortium pour prévenir d’éventuelles faillites et des
pertes d’emplois ;
3. La création d’un comité de veille au niveau sous-régional et au niveau des
Etats ;
4. L’organisation d’un sommet social quadripartite (gouvernements,
patronats, syndicats et ONGs) pour une vaste concertation sur ce qui est et sur ce
qu’il faut faire.
En outre, la crise est encore une fois l’occasion de réaffirmer la nécessité d’un
véritable partenariat entre les divers pays de la sous-région, mais aussi entre l’Afrique
et la communauté internationale, comme le soutient le NEPAD. Il faut qu’elle gagne
la confiance que la communauté internationale est prête à lui donner et devenir un
nouveau pôle d’investissement. Face à la tendance à la baisse des flux internationaux
de capitaux, il est urgent de renforcer l'attractivité des économies en combattant la
corruption et en prônant la stabilité politique.
Aussi, l’issue à cette crise dépendra fortement de la capacité d’anticipation des
pays de la sous région et des décisions prises suite a un diagnostique adéquat. Dans
les pays affectés par la crise, il faudra absolument une extension des formes de
44
protection sociale pour minimiser l’impact sur les pauvres. Un choc externe de cette
nature aura des effets différents et par conséquent nécessitera des réponses
différentes des politiques mises en œuvre pour par exemple combattre la sécheresse,
les désastres naturels etc. L’expérience de la crise asiatique de 1997/1998 peut servir
de leçon quant aux mesures à prendre :
Protéger les dépenses pro-pauvres (santé, éducation et infrastructure)
et l’emploi déjà fragile en association avec les organisations
spécialisées ;
S’inspirer de l’expérience des autres pays sur la manière de cibler la
protection sociale (les subsides en alimentation peuvent aider les
pauvres mais sont souvent mal ciblés et partant trop chères : les
transferts non conditionnels en cash peuvent être plus rapides à mettre
en place que les ceux conditionnels, etc.)
En définitive, la stabilité macroéconomique est également importante. Les
politiques pour maintenir la stabilité des prix et les niveaux d’emploi au niveau global
sont cruciales. La mise en œuvre des politiques de protection sociale dépendra de la
manière avec laquelle la crise affectera l’aide.
Face à cette crise économique et financière d’une rare gravité la réponse doit
être à la fois mondiale et concertée pour relancer la croissance et mieux réguler les
marchés financiers. Les multiples dimensions de la crise appellent une collaboration
plus étroite entre les Organisations Internationales que sont la Banque mondiale, le
FMI, l’OMC, l’OIT, le PNUD et l’OCDE qui s’occupent chacun dans son domaine de
compétence des différents dossiers de la crise mondiale. De leur aptitude à coopérer
et à parler d’une même voix sur ces questions dépendra la recherche de solutions
efficaces et leur mise en œuvre.
45
Bibliographie sommaire
1) BAD (2008), « The Current Financial Crisis: Impact on African
Economies”, Ministerial Conference on the Financial Crisis, Briefing
note 1, BAD/UNECA
2) BAD (2009) : Briefing Note 1 : The current financial crisis : Impact on
African Economies, November 12, Ministerial Conference on the
Financial Crisis
3) BIT (2008), « Les inégalités à l’épreuve de la mondialisation » ;
Rapport sur le travail dans le monde
4) CEDEAO (2008), « Réponse régionale a la crise économique et
financière », Rapport annuel de la commission de la Cedeao
5) FMI (2008). « Perspectives économiques mondiales »
6) FMI
(2008)
Perspectives
économiques
régionales :
Afrique
subsaharienne, Octobre
7) ILO, 2009, Global Employment Trends
8) IMF, 2009, World Economic Outlook
9) KASSE, Moustapha « les politiques sociales
en Afrique face a la
mondialisation. », Consultation Régionale sur la Dimension sociale de
la mondialisation, à ARUSHA du 6 au 7 Février 2003
10) Le Monde (2008). « En Chine, des milliers d'entreprises ferment dans
la région de Canton », novembre
11) Le Monde (2009). Une onde de choc qui accentue la fracture sociale,
janvier ; Le Monde (2008). "La crise sera beaucoup plus grave pour les
pauvres", octobre
12) Passerelles (2009), « Synthèse », Vol. 10 No. 1, 15 décembre, 2009
13) UEMOA (2009), « Impact de la crise financière internationale sur les
économies de Uemoa ». mimeo
14) UNECA, 2008
15) World Bank, 2009, Global Economic Prospect
16) World Bank, 2008, Outlook for remittance flows 2008-2010
46
47
Annexes 1 : Modèle à correction d’erreur
appliqué à des données de panels
Un modèle à correction d’erreur pourrait être appliqué à un panel constitué des pays
de la CEDEAO13. A partir de cet outil, il est possible d’évaluer, en s’appuyant sur les
données historiques, l’impact de différents canaux de transmission (exportations,
transferts des migrants, taux d’inflation, aide publique au développement) sur le
niveau d’activité (pib). L’équation du modèle, exprimée sous une forme semilogarithmique, est donnée par :
ln pibt   0   1 ln pibt 1   2 (apd / pib )   3 (ide / pib ) t 1   4 inf   5 (invtot / pib ) t 1
  6 ( X / pib ) t   7 (TRM / pib ) t
où pibt : représente la variable dépendante mesurée par le niveau du PIB à la période
t.
Les variables explicatives retenues sont constituées de :
pibt 1 : mesurée par le PIB de la période t-1,
apdUE / pib : mesurée par l’aide publique de la période t rapporté au pib,
(ide / pib) t 1 : mesurée l’investissement direct étranger de la période t-1 rapporté au
pib,
(invtot / pib) t 1 : mesurée le taux d’investissement global du pays de la période t,
inf : Inflation de la période t,
( X / pib )t : mesurée par le rapport entre les exportations de la période t et le pib,
(TRM / pib)t : mesuré par le rapport entre les transferts des migrants et le pib à la
période;
 0 représente la constante du modèle.
Ce modèle s'articule théoriquement autour de deux modèles. Le premier, qui
s'applique au long terme et le second au court terme. La construction d’un modèle à
correction d'erreur (ECM) permet de dégager les effets à court terme de certaines
variables dans l'analyse de séries chronologiques. Toutefois, la condition de
cointégration doit être satisfaite. Celle-ci dépend de l'ordre d'intégration des
différentes séries. Il convient, par conséquent, de commencer par tester l'ordre
d'intégration des séries chronologiques. L'équation de long terme correspond à
l'équation de cointégration.
L'équation augmentée de Dickey-Fuller permet de tester le degré d'intégration des
séries, elle peut s'écrire de la façon suivante :
Yt  Yt 1    t  (  1)Yt 1    i 1Yt 1
i 1
À défaut de données suffisantes, l’étude de cas pourrait être restreint à un panel constitué de
l’ensemble Uemoa
13
48
L'hypothèse nulle revient à tester conjointement   0 et   1. Si l'hypothèse est
vraie, on ne rejette pas la racine unitaire. Le nombre de différence à droite dépend de
l'autocorrélation des erreurs. Des différences sont ajoutées tant que la statistique de
Durbin-Watson n'est pas proche de 2. Les résultats du test de racine unitaire devront
permettre de s’assurer que les séries sont bien "stationnaires".
Le test de cointégration établi par Engle et Granger (1987) s'effectue sur une
équation qui a la forme suivante :
Z t  Yt  X t  
Le principe qui se cache derrière l'idée de la cointégration est le suivant :
considérons la variable dépendante Y et la variable indépendante X et supposant
qu'elles suivent une marche aléatoire de même degré d'intégration. On peut
raisonnablement s'attendre à ce qu'elles évoluent ensemble à long terme, de telle
sorte qu'une combinaison linéaire des deux variables est stationnaire.
49
Annexe 2 : Modélisation des effets de la crise financière sur le marché du
travail par un model VAR structurel
Afin de prendre en compte les effets réciproques entre les différentes variables
macroéconomiques affectées par la crise, une modélisation de type VAR peut être
adoptée et devrait permettre alors d’analyser l’interaction entre les variables PIB,
emploi, IDE, APD, transferts des migrants, exportations, niveau des prix.
Comme les équations de régression simple ignorent l’effet d’interdépendance, le
modèle VAR semble être alors la meilleure approche pour suivre et étudier une telle
interaction entre ces variables macroéconomiques.
L’analyse par le modèle VAR présente les avantages suivants :
Il permet d’une part d’identifier les chocs structurels suite à la
décomposition de Choleski et d’autre part d’examiner les effets des chocs
structurels des autres variables macroéconomiques sur la croissance
économique.
Il autorise la décomposition de l’effet des chocs structurels sur le
marché du travail pour distinguer les chocs sur la croissance économique et
les autres chocs.
Les chocs structurels sur les autres variables seront identifiés par la décomposition de
Choleski. Les fonctions de réaction aux impulsions nous permettent de déceler
comment les variables macroéconomiques réagissent face aux chocs de croissance.
Ces fonctions tracent la trajectoire des ajustements dans le temps de chaque variable
en réponse aux différents chocs. En effet, les résultats de cette analyse dépendent
considérablement de la stratégie d’identification choisie.
Soit donc, le système suivant des équations qui représentent la structure de
l’économie :
A0 Zt = A (L) Zt + Ut
Avec Zt le vecteur composant des variables économiques,
A0 est la matrice des multiplicateurs d’impact, L est l’opérateur du retard.
On configure ainsi le modèle VAR suivant avec un modèle de 7 variables.
50
Mise en forme : Puces et numéros
Zt = (VTt, Yt, APDt, IDEt, Xt, TRt, Пt)
Avec VT la variable du marché du travail,
Y le PIB par tête,
APD l’Aide publique au Développement,
IDE l’Investissement Direct étranger,
Xt les exportations
TR les transferts des migrants,
П le taux d’inflation.
Le tableau de décomposition de la variance pourra nous éclairer sur la transmission
des chocs sur le marché du travail. Il est sous la forme :
Période
VTt
Yt
APDt
IDEt
Xt
TRt
Пt
6
λ6
α6
β6
γ6
σ6
‫ד‬6
δ6
12
λ12
α12
β12
γ12
σ12
‫ד‬12
δ12
24
λ24
α24
β24
γ24
σ24
‫ד‬24
δ24
36
λ 36
α 36
β 36
γ 36
σ 36
‫ד‬36
δ 36
Ainsi, pour un horizon de 12 mois (1 an) on aura :
λ12 VTt = α12 Yt + β12 APDt + γ12 IDEt + σ12 Xt + ‫ד‬12 TRt + δ12 Пt
Pour un horizon de 24 mois (2 ans) :
λ24 VTt = α24 Yt + β24 APDt + γ24 IDEt + σ24 Xt + ‫ד‬24 TRt + δ24 Пt
De la même manière, pour un horizon de 36 mois (3 ans) :
Λ36 VTt = α36 Yt + β36 APDt + γ36 IDEt + σ36 Xt + ‫ד‬36 TRt + δ36 Пt
Annexe 3 : Quelques graphiques
51
Tableau 1 : Perspectives de l’économie mondiale : aperçu des projections
Source : FMI, 2008
Tableau 2 : Croissance dans l’UEMOA
Taux de croissance
Pays
Bénin
Burkina Faso
Côte d’Ivoire
Guinée Bissau
Mali
Niger
Sénégal
Togo
UEMOA
Taux de
croissance en
2007 (%)
Prévisions initiales
de croissance à fin
2008 (%)
Prévisions révisées
de croissance à fin
2008 (%)
Projections de
croissance à fin 2009
(%)
4,6
3,6
1,5
2,7
4,3
3,3
4,8
1,9
3,3
5,5
4,5
2,9
3,0
6,4
4,4
5,3
2,7
4,4
5,3
4,5
2,9
3,1
4,7
5,9
3,9
0,8
3,9
6,1
5,5
4,3
3,2
5,1
4,5
5,2
3,3
4,9
Source : UEMOA, 2009
52
Figure 1 : Evolution des flux financiers vers l’Afrique durant la dernière
décennie.
Figure 2 : Part de l’Afrique dans le commerce mondial de marchandises
de 1989 à 1999.
5
4
Exports
3
Imports
2
1
0
89
90
91
92
93
94
95
96
97
98
99
Source : OMC, Statistiques du commerce international 2000
Figure 3 :
53
Source : Bulletin du FMI, Volume 37 n° 12, Décembre 2008.
Figure 4 : Indicateurs mondiaux de croissance
Source : FMI, 2008
54