UNE COMPACTIFICATION DES CHAMPS CLASSIFIANT LES

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UNE COMPACTIFICATION DES CHAMPS CLASSIFIANT LES
JOURNAL OF THE
AMERICAN MATHEMATICAL SOCIETY
Volume 11, Number 4, October 1998, Pages 1001–1036
S 0894-0347(98)00272-0
UNE COMPACTIFICATION DES CHAMPS
CLASSIFIANT LES CHTOUCAS DE DRINFELD
LAURENT LAFFORGUE
Sommaire
Introduction
1. Le champ des chtoucas itérés. Algébricité. Lissité. Propreté
a) Le schéma des homomorphismes complets
b) Le champ des pré–chtoucas itérés
c) Description des différentes strates. Le champ des chtoucas itérés
d) Sous–objets. Troncatures
2. Vérification du critère valuatif de propreté
a) ϕ–réseaux itérés dans les ϕ–espaces
b) Chtoucas dégénérés associés aux ϕ–réseaux itérés
c) Transformations des chtoucas dégénérés
d) Critères d’existence de telles transformations
e) Dégénérescence des chtoucas en chtoucas itérés
Bibliographie
Introduction
Etant donnée X une courbe projective lisse géométriquement connexe au–dessus
d’un corps fini Fq , Drinfeld a défini la notion de chtouca de rang r. Leurs champs
classifiants Chtr sont algébriques au sens de Deligne–Mumford, localement de type
fini et lisses de dimension relative 2r − 2 au–dessus de X × X. Mais les composantes connexes de ces champs ne sont pas propres ni même de type fini dès que
r ≥ 2. Quand r = 2, Drinfeld a également construit des compactifications modulaires lisses pour les ouverts de type fini de Cht2 , ce qui constitue l’un des pas de
sa démonstration de la correspondance de Langlands en rang 2 sur les corps de
fonctions.
Dans ce travail, nous proposons une généralisation en rang quelconque de la
construction par Drinfeld de ces compactifications.
Rappelons qu’un chtouca (à droite) de rang r sur un schéma de base S (sur Fq )
consiste en la donnée de
– un fibré E localement libre de rang r sur X × S,
j
t
– une modification (à droite) de E, c’est–à–dire un diagramme E ,−−−−→ E 0 ←−−−−00
E où E 0 , E 00 sont aussi des fibrés localement libres de rang r sur X × S, et j, t sont
Received by the editors June 9, 1997 and, in revised form, March 30, 1998.
1991 Mathematics Subject Classification. Primary 11R58, 11G09, 14G35.
Key words and phrases. Corps de fonctions, champs modulaires de Drinfeld, chtoucas.
c
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des homomorphismes injectifs dont les conoyaux sont supportés par les graphes de
deux morphismes “pôle” et “zéro” de S dans X et inversibles comme OS –Modules,
∼
– un isomorphisme τ E = (IdX × FrobS )∗ E −→ E 00 .
L’idée est d’élargir cette définition en remplaçant dans le dernier point la notion d’isomorphisme par celle plus souple d’“homomorphisme complet”. Les “homomorphismes complets” sont essentiellement les morphismes à valeurs dans le
schéma obtenu en éclatant dans le schéma matriciel Mr \{0} les fermés des homomorphismes de rang ≤ 1, de rang ≤ 2, etc. (voir [5] par exemple). A noter que le
quotient de ce schéma éclaté par l’action de Gm n’est autre que le compactifié de
(PGLr × PGLr )/PGLr à la façon de De Concini et Procesi.
Le champ Chtr classifiant ces nouveaux objets est algébrique au sens de Deligne–
Mumford et localement de type fini sur X × X ; il contient Chtr comme ouvert et
il vérifie la partie d’existence (mais non d’unicité : il n’est pas séparé) du critère
valuatif de propreté. Il se décompose en strates localement fermées Chtrr indexées
par les partitions r = (0 = r0 < r1 < · · · < rk = r) de l’entier r ; chacune classifie
essentiellement les familles de chtoucas de rangs r1 , r2 −r1 , . . . , r −rk−1 telles que le
zéro de chacun soit égal au pôle du suivant ; toute telle strate est donc munie d’un
morphisme lisse sur X × X × X k−1 , où le facteur X k−1 généralise le “dégénérateur”
introduit par Drinfeld quand r = 2 et r = (0 < 1 < 2). C’est aussi pourquoi on
appellera Chtr le champ des chtoucas itérés de rang r.
On sait que le champ Chtr est réunion filtrante des ouverts Chtr,p≤p classifiant
les chtoucas dont le polygone canonique de Harder–Narasimhan est majoré par un
polygone de troncature p : [0, r] → R. Et chaque Chtr,p≤p est réunion disjointe
de champs de type fini. Quand p est assez grand, on définit dans le fourre–tout
Chtr un ouvert Chtr,p≤p dont la trace dans Chtr est égale à Chtr,p≤p et qui est
réunion disjointe de champs propres et lisses (en particulier séparés et de type fini)
sur X × X.
Signalons que l’auteur compte exposer dans un prochain article la construction
de semblables compactifications modulaires pour les chtoucas avec structures de
niveau. Le présent texte donne les démonstrations de résultats annoncés dans une
note aux Comptes Rendus de l’Académie des Sciences de Paris (tome 323, série I,
pp. 491–494). En voici le contenu:
Le paragraphe 1 décrit les étapes successives de la construction du champ Chtr
des chtoucas itérés de rang r, avec ses strates Chtrr et ses ouverts Chtr,p≤p , ainsi
que ses principales propriétés géométriques.
En a) on rappelle la définition du schéma Ωr des “homomorphismes complets”,
sa stratification naturelle et la description modulaire de ses strates Ωrr .
En b) on substitue les “homomorphismes complets” aux isomorphismes dans
les données de définition des chtoucas pour obtenir un nouveau champ C r , dit des
pré–chtoucas itérés de rang r, qui est algébrique au sens d’Artin.
En c) on déduit de la stratification (Ωrr ) de Ωr une stratification (Crr ) de C r . La
description modulaire de chaque strate Ωrr induit une description modulaire de Crr
qui devient particulièrement simple dans un certain ouvert Chtrr de Crr . Les ouverts
Chtrr des Crr proviennent d’un ouvert Chtr de C r , qu’on appelle champ des chtoucas
itérés de rang r ; il est algébrique au sens de Deligne–Mumford.
En d) on définit pour tout polygone de troncature p : [0, r] → R un ouvert
Chtr,p≤p de Chtr dont la trace dans Chtr est égale à Chtr,p≤p . On prouve qu’il est
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COMPACTIFICATION DES CHTOUCAS DE DRINFELD
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lisse de dimension 2r − 2 sur X × X si p est assez grand et que ses composantes
connexes sont de type fini. Afin de montrer que celles–ci sont propres, il suffira
donc de vérifier le critère valuatif de propreté pour Chtr,p≤p .
C’est l’objet du paragraphe 2. On procède à la manière de Drinfeld en rang 2.
On se donne donc Ee un point de Chtr,p≤p à valeurs dans le corps des fractions KA
d’un anneau de valuation discrète A et on cherche à prouver que (quitte à remplacer
A par une extension finie normale) Ee se prolonge de manière unique en un point
de Chtr,p≤p à valeurs dans A. Un tel prolongement va consister en la donnée de
certains diagrammes de fibrés sur X ⊗ A, donnée équivalente à celle d’un réseau M
e
dans la fibre générique V de E.
En a) on introduit certaines premières propriétés que devra vérifier le réseau M
et on montre l’existence de réseaux les vérifiant, appelés “ϕ–réseaux itérés”.
En b) on explicite comment les ϕ–réseaux itérés induisent des diagrammes de
fibrés prolongés sur X ⊗ A, qu’on appelle “chtoucas dégénérés”.
En c) on introduit certaines opérations de transformation des ϕ–réseaux itérés
et on étudie leurs effets sur les chtoucas dégénérés associés.
En d) on donne des conditions suffisantes pour que les opérations de c) soient
possibles.
En e) enfin, on démontre le critère valuatif de propreté comme annoncé. Pour
la partie d’existence, on part d’un ϕ–réseau itéré dont l’existence a été assurée en
a) et on lui fait subir une série de transformations selon les procédés de c) et d);
après un nombre fini de pas, on obtient un ϕ–réseau itéré dont le chtouca dégénéré
associé vérifie toutes les propriétés requises.
Je remercie profondément Gérard Laumon pour sa disponibilité jamais lassée
face à mes question mathématiques et pour son soutien moral constant.
Je tiens à exprimer aussi ma gratitude envers Vladimir Drinfeld dont l’encouragement à chercher des compactifications modulaires lisses fut pour moi décisif.
Enfin, j’adresse mes plus vifs remerciements à Mme Le Bronnec qui a assuré avec
compétence et patience la saisie du manuscrit.
1. Le champ des chtoucas itérés. Algébricité. Lissité. Propreté
a) Le schéma des homomorphismes complets. Ce paragraphe rappelle une
construction connue. On renvoie par exemple à [5] pour une revue générale.
Soit r ≥ 1 un nombre entier.
Soit H r le foncteur qui associe à tout anneau A le module des (u1 , u2 , . . . , ur ;
α1 , α2 , . . . , αr−1 ) ∈ Hom(Ar , Ar ) × Hom(Λ2 Ar , Λ2 Ar ) × · · · × Hom(Λr Ar , Λr Ar ) ×
Ar−1 . Ce foncteur est représentable par un fibré vectoriel libre de rang fini au–
dessus de Spec Z.
Il contient comme sous–schéma localement fermé le schéma Ωr(r) classifiant les
(u1 , u2 , . . . , ur ; α1 , α2 , . . . , αr−1 ) tels que u1 soit un automorphisme, que α1 ,
α2 , . . . , αr−1 soient inversibles et que Λ2 u1 = α1 u2 , Λ3 u1 = α21 α2 u3 , . . . , Λr u1 =
αr−2
· · · αr−1 ur .
αr−1
1
2
Soit Ωr l’adhérence schématique de Ωr(r) dans l’ouvert de H r défini par la condition que u1 , u2 , . . . , ur soient partout non nuls. On voit déjà que Ωr est plat et
de type fini sur Spec Z, de dimension relative r2 + (r − 1) et muni d’un morphisme
(α1 , α2 , . . . , αr−1 ) : Ωr → Ar−1 .
Pour toute partition de r, c’est–à–dire toute famille r = (r1 , . . . , rk ) vérifiant
0 < r1 < · · · < rk = r (et que l’on pourra compléter en posant r0 = 0), soit Ωrr
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le sous–schéma localement fermé de Ωr défini par la condition que chaque αs soit
partout nul si s ∈ r et partout non nul si s ∈
/ r.
Proposition 1. Pour toute partition r = (r1 , . . . , rk ) comme ci–dessus, le schéma
Ωrr représente le foncteur qui à tout anneau A associe l’ensemble des uplets
(v1 , v2 , . . . , vk ; α1 , . . . , αr1 −1 , αr1 +1 , . . . , αr2 −1 , αr2 +1 , . . . )
tels que:
•
•
•
•
les αs , s ∈
/ r, sont des scalaires partout inversibles,
v1 : Ar → Ar est un homomorphisme de rang partout égal à r1 ,
v2 : Ker v1 → Ar / Im v1 est un homomorphisme de rang partout égal à r2 −r1 ,
v3 : Ker v2 → (Ar / Im v1 )/ Im v2 est un homomorphisme de rang partout égal
à r3 − r2 ,
• etc.
A fortiori, le morphisme (α1 , . . . , αr1 −1 , αr1 +1 , . . . , αr2 −1 , αr2 +1 , . . . ) : Ωrr →
est lisse de dimension relative r2 .
Gr−k
m
Démonstration. Soit V le foncteur qui à tout anneau A associe l’ensemble des
v = (v1 , v2 , . . . , vk ) vérifiant les conditions de l’énoncé. Se donner un tel v revient
à choisir successivement:
–
–
–
–
–
un sous–module E1 de E0 = Ar tel que E0 /E1 soit localement libre de rang r1 ,
un homomorphisme v1 : E0 /E1 → Ar partout injectif,
un sous–module E2 de E1 tel que E1 /E2 soit localement libre de rang r2 − r1 ,
un homomorphisme v2 : E1 /E2 → Ar / Im v1 partout injectif,
etc.
Par conséquent, le foncteur V est représentable par un schéma lisse sur Spec Z
de dimension relative
X
[(ri − ri−1 )(r − ri ) + (ri − ri−1 )(r − ri−1 )]
1≤i≤k
= 2r
X
1≤i≤k
(ri − ri−1 ) −
X
2
(ri2 − ri−1
) = r2 .
1≤i≤k
Définissons maintenant un morphisme V × Gr−k
→ H r dont nous montrerons
m
ensuite qu’il se factorise à travers l’immersion localement fermée Ωrr ,→ H r en un
∼
isomorphisme V × Gr−k
−→ Ωrr au–dessus de Gr−k
m
m .
A tout point (v1 , . . . , vk ; α1 , . . . , αr1 −1 , αr1 +1 , . . . , αr2 −1 , αr2 +1 , . . . ) de V ×
à valeurs dans un anneau A, on associe le point
Gr−k
m
(u1 , . . . , ur ; α1 , . . . , αr1 −1 , 0 , αr1 +1 , . . . , αr2 −1 , 0, αr2 +1 , . . . )
où u1 , . . . , ur sont définis de la manière suivante: pour 1 ≤ i ≤ k et ri−1 < s ≤ ri ,
us est égal à
!−1
Y
αs−t
det(v1 ) ⊗ · · · ⊗ det(vi−1 ) ⊗ Λs−ri−1 vi
t
1≤t<s
t6=r1 ,r2 ,... ,ri−1
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COMPACTIFICATION DES CHTOUCAS DE DRINFELD
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où det(v1 ) ⊗ · · · ⊗ det(vi−1 ) ⊗ Λs−ri−1 vi désigne le composé de l’homomorphisme
surjectif canonique
Λs Ar −→ Λr1 (Ar / Ker v1 ) ⊗ Λr2 −r1 (Ker v1 / Ker v2 )
⊗ · · · ⊗ Λs−ri−1 (Ker vi−1 / Ker vi ) ,
du produit tensoriel des isomorphismes induits par v1 , v2 , . . . , vi
Λr1 (Ar / Ker v1 ) −→ Λr1 Im v1 ,
Λr2 −r1 (Ker v1 / Ker v2 ) −→ Λr2 −r1 Im v2 ,
···
Λs−ri−1 (Ker vi−1 / Ker vi ) −→ Λs−ri−1 Im vi
et de l’homomorphisme injectif canonique
Λr1 Im v1 ⊗ Λr2 −r1 Im v2 ⊗ · · · ⊗ Λs−ri−1 Im vi −→ Λs Ar .
→ H r ainsi défini se factorise à travers
Afin de montrer que le morphisme V × Gr−k
m
∼
r
r
−→ Ωrr ,
l’immersion localement fermée Ωr ,→ H en un isomorphisme V × Gr−k
m
il suffit de vérifier que pour tout point de H r à valeurs dans un anneau local
intègre A tel que le point générique de Spec A s’envoie dans Ωr(r) et que les con/ r, inversibles”
ditions “u1 , u2 , . . . , ur non nuls, les αs , s ∈ r, nuls et les αs , s ∈
définissent un sous–schéma fermé non vide Spec A/J de Spec A, alors le morphisme
→
Spec A/J → Ωrr → H r se factorise de manière unique en Spec A/J → V × Gr−k
m
r
r−k
H , et que de plus tout point géométrique de V ×Gm est image d’un tel morphisme
Spec A/J → V × Gr−k
m .
Soit donc (u1 , u2 , . . . , ur ; α1 , . . . , αr−1 ) un tel point de H r à valeurs dans A.
Ainsi a–t–on
!
Y
s−t
s
us , 1 ≤ s ≤ r ,
Λ u1 =
αt
1≤t<s
en le point générique de Spec A. Comme les us sont non nuls en le point fermé
de Spec A, on voit que pour tout s, 1 ≤ s ≤ r, l’idéal de A Q
engendré par les
αs−t
. On en
mineurs d’ordre s de u1 est principal de générateur l’élément
t
1≤t<s
déduit facilement que quitte à composer à droite et à gauche par deux matrices de
GLr (A), u1 est de la forme


1
 α1





α1 α2
0
u1 = 
.


..


.
0
α1 α2 · · · αr−1
Ce qu’on voulait en résulte immédiatement.
La proposition 1 a la conséquence immédiate suivante:
Corollaire 2. Le morphisme (α1 , α2 , . . . , αr ) : Ωr → Ar−1 est lisse de dimension
relative r2 .
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r
Le quotient de Ωr par l’action libre du tore GY
m est l’adhérence schématique de
l’orbite du groupe PGLr × PGLr agissant sur
P(Λs Ar ⊗ Λr−s Ar ) engendrée
0≤s≤r
par le point associé à l’immersion diagonale de Ar dans Ar ⊕ Ar ; il est projectif,
contient (PGLr × PGLr )/PGLr comme ouvert dense et a pour bord un diviseur à
croisements normaux. C’est un cas particulier des compactifications de De Concini
et Procesi.
b) Le champ des pré–chtoucas itérés. On fixe X une courbe projective lisse
géométriquement connexe au–dessus d’un corps fini Fq .
Etant donnés S un schéma sur Fq , E un OX×S –Module localement libre de rang
r et ∞, 0 : S → X deux morphismes, on appelle modification (à droite) de E de
pôle ∞ et de zéro 0 tout diagramme
E
j

/
}}
}}
}
}
}}
>
E0
t
E
0
00
où E , E sont des OX×S –Modules localement libres de rang r, et j, t sont des
homomorphismes OX×S –linéaires injectifs dont les conoyaux sont supportés par les
graphes de ∞, 0 respectivement et sont localement libres de rang 1 sur OS .
D’autre part, dans cette même situation, on notera τ E l’image réciproque de E
par le morphisme IdX × FrobS .
On rappelle qu’un chtouca (à droite) de rang r sur S consiste en la donnée
!
E ,→ E 0
%
et
d’un tel OX×S -Module E, d’une modification (à droite) de celui-ci
E 00
!
E ,→ E 0
∼
τ
00
%
d’un isomorphisme E → E , c’est-à-dire en résumé d’un diagramme
τ
E
soumis à certaines conditions.
Maintenant, posons:
Définition 3. Pour r ≥ 1 un entier et S un schéma sur Fq , on appelle pré–chtouca
itéré (à droite) de rang r sur S la donnée de
– un OX×S –Module E sur X × S localement
! libre de rang r,
E ,→ E 0
%
de E,
– une modification (à droite)
E 00
– des OS –Modules inversibles L1 , L2 , . . . , Lr−1 sur S, munis de sections globales
`1 , `2 , . . . , `r−1 ,
– pour tout s, 1 ≤ s ≤ r, un homomorphisme de OX×S –Modules localement
libres
O ⊗(s−t) us
O ⊗(s−t)
τ
Λs E ⊗
Lt
−−−−→Λs E 00 ⊗
Lt
1≤t<s
qui peut aussi se voir comme
Λs (τ E) ⊗
1≤t<s
O
⊗(q−1)(s−t)
Lt
−−−s−→Λs E 00 ;
u
1≤t<s
ces données étant soumises aux deux conditions suivantes:
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COMPACTIFICATION DES CHTOUCAS DE DRINFELD
1007
(i) Pour un (et donc pour tout) choix de trivialisations de L1 , L2 , . . . , Lr−1 localement sur S et de E, E 00 localement sur X × S, la famille (u1 , u2 , . . . , ur ;
r
, `q−1
, . . . , `q−1
`q−1
1
2
r−1 ) prend ses valeurs dans le sous–schéma localement fermé Ω
de H r .
(ii) Si on identifie E et sa modification E 00 sur l’ouvert de X × S complémentaire
des graphes du pôle et du zéro de cette modification, alors aucun des homomorphismes induits
O ⊗(s−t) us
O ⊗(s−t)
τ
Λs E ⊗
Lt
−−−−→Λs E ⊗
Lt
1≤t<s
1≤t<s
n’est nilpotent au–dessus d’aucun des points géométriques de S.
Remarquons tout de suite:
Lemme 4. La condition (ii) dans la définition 3 est équivalente à ce que génériquement au–dessus de tout point géométrique de S chaque homomorphisme
O ⊗(s−t) us
O ⊗(s−t)
τ
Λs E ⊗
Lt
−−−−→Λs E ⊗
Lt
1≤t<s
1≤t<s
ait son noyau et le transformé par τ de son image en somme directe (autrement dit
que toutes ses puissances aient même rang que lui).
Démonstration. On peut supposer que S est le spectre d’un corps algébriquement
clos. Il est évident que la nouvelle condition ci–dessus entraı̂ne la condition (ii).
Réciproquement, supposons satisfaite ladite condition (ii). Notons r1 , r2 , . . .
ceux des t, 1 ≤ t < r, tels que `t = 0. D’après la proposition 1 du premier
paragraphe, il suffit de vérifier que toutes les puissances de u1 , ur1 +1 , ur2 +1 , . . .
sont de rangs r1 , r2 , r3 , . . . et pour cela que ur1 , ur2 , ur3 , . . . ne sont pas nilpotents,
ce qui est vrai par hypothèse.
Pour tout entier r ≥ 1, on notera C r la catégorie fibrée qui à tout schéma S
sur Fq associe le groupoı̈de C r (S) des pré–chtoucas itérés de rang r sur S. Il est
immédiat que c’est un champ pour la topologie f.p.q.c.
Proposition 5. Pour tout entier r ≥ 1, le champ C r des pré–chtoucas itérés de
rang r est algébrique (au sens d’Artin) et localement de type fini.
Démonstration. La catégorie fibrée qui à tout schéma S sur Fq associe le groupoı̈de
des familles de fibrés inversibles L1 , L2 , . . . , Lr−1 sur S, munis de sections globales
`1 , `2 , . . . , `r−1 , n’est autre que le champ algébrique (A1 /Gm )r−1 .
D’autre part, on sait que la catégorie fibrée qui à tout schéma S sur Fq associe
le groupoı̈de des OX×S –Modules E localement libres de rang r sur X × S est un
champ algébrique localement de type fini.
!
E ,→ E 0
%
est représentable par un morPuis le choix d’une modification
E 00
phisme projectif.
Maintenant, la condition (i) de la définition 1 est localement fermée sur chaque
X × S donc aussi sur chaque S (voir [4], lemme 3 du paragraphe I.2).
Et la condition (ii) est évidemment ouverte sur chaque base S.
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LAURENT LAFFORGUE
c) Description des différentes strates. Le champ des chtoucas itérés.
Fixons une partition r = (r1 , . . . , rk ) de r avec donc 0 < r1 < · · · < rk = r. Pour
tout s ∈ r, on notera s− son prédécesseur dans r − = (r0 = 0, r1 , . . . , rk−1 ) et pour
tout s ∈ r − , on notera s+ son successeur dans r.
Notons Crr le sous–champ algébrique localement fermé de C r défini par les conditions suivantes relatives aux sections `1 , `2 , . . . , `r−1 de L1 , L2 , . . . , Lr−1 :
• les `s , s ∈ r, sont nulles,
/ r, sont partout inversibles.
• les `s , s ∈
Crr pourra être appelé le champ des pré–chtoucas itérés de type r.
!
E ,→ E 0
%
Soit donc
; L1 , . . . , Lr−1 ; `1 , . . . , `r−1 ; u1 , . . . , ur un objet de Crr
E 00
au–dessus d’un schéma S sur Fq . Pour tout s ∈
/ r, le fibré Ls sur S muni de la
section inversible `s peut être identifié au fibré trivial OS muni de la section 1. Ceci
étant dit et d’après la proposition 1 du premier paragraphe, la donnée de la famille
d’homomorphismes u1 , u2 , . . . , ur est équivalente à la donnée de
– une filtration décroissante τ E = E 0 ! · · · ! E s ! · · · ! E r = 0 de τ E par des
OX×S –Modules localement libres, telle que les quotients successifs E s− /E s , s ∈ r,
soient localement libres de rangs s − s− ,
– une filtration croissante 0 = E000
···
Es00
···
Er00 = E 00 de E 00 par des
OX×S –Modules localement libres, telle que les quotients successifs Es00 /Es00− , s ∈ r,
soient localement libres de rangs s − s− ,
– une famille d’isomorphismes, s ∈ r,
E s− /E s ⊗
τ
O
t∈r
t<s
!
Lt
∼
−→
Es00 /Es00−
⊗
O
!
Lt
.
t∈r
t<s
Lemme 6. Avec les notations ci–dessus, les trois conditions suivantes définissent
un sous–champ ouvert Chtrr de Crr , qu’on appellera le champ des chtoucas itérés de
type r:


(i) En notant Es0 = Es00 si s ∈ r − et Er0 = E 0 , tous les quotients E 0 /Es0 sont





 localement libres sur OX×S .
(ii) Pour tout s ∈ r, l’homomorphisme Es0 −→ E 0 /E est surjectif, si bien que



son noyau Es est localement libre sur OX×S , tout comme E0 = 0.



(iii) Pour tout s ∈ r, on a E − + τ E = τ E .
s
s
De plus, il existe un unique sous–champ ouvert Chtr de C r dont la trace dans
chaque strate Crr soit égale à Chtrr .
On appellera Chtr le champ des chtoucas itérés de rang r.
Démonstration. La première assertion est évidente.
La seconde résulte de la première et de ce que toute strate Crr de C r est un ouvert
dans le fermé réunion des Crr0 , r0 ⊇ r. On utilise le fait qu’au–dessus de ce fermé
les E s et Es00 , s ∈ r, se recollent en des OX×S –Modules localement libres.
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COMPACTIFICATION DES CHTOUCAS DE DRINFELD
1009
Supposons maintenant que notre pré–chtouca itéré
E ,→ E 0
%
; L1 , . . . , Lr−1 ; `1 , . . . , `r−1 ; u1 , . . . , ur
E 00
!
est un chtouca itéré de type r et poursuivons la discussion, en usant des notations
déjà introduites.
Notons Ar1 = Er1 ⊆ E et A0r1 = Er0 1 = Er001 . Alors 
le composé τ Ar1 
,→ τ E →
0
Ar1 ,→ Ar1
∼
τ
 = Aer1
E/E r1 −→ Er001 = A0r1 s’intègre dans un diagramme 
%
τ
Ar1
qui définit un chtouca à droite de rang r1 sur S. De plus, on a un isomorphisme
∼
/Ar1 −→ E 0
/E d’où il ressort que ce chtouca a même pôle que la
canonique A0r
1
E ,→ E 0
.
%
modification 
00
E
Puis, pour s ∈ r, s > r1 = 0+ , notons A0s = E s− ∩ τ Es le noyau de l’homomorphisme surjectif E s− ⊕ τ Es → τ E. Et notons As = Es /Es− ∼
= Es0 /Es0 − . On dispose
des deux composés
A0s ,→ τ Es → τ Es /τ Es− = τ As
et
A0s ⊗ τ
O
O O Lt ,→ E s− ⊗ τ
Lt −→ E s− /E s ⊗ τ
Lt
t∈r
t<s
−→ Es00 /Es00− ⊗
O
t∈r
t<s
Lt ,→ As ⊗
O
t∈r
t<s
t∈r
t<s
Lt .
t∈r
t<s
Ils s’intègrent dans un diagramme




As ⊗
A0s ⊗ τ
N
t∈r
t<s
Lt
N
%
,→
τ
As ⊗ τ
t∈r
t<s
Lt
N
t∈r
t<s

Lt

e

 = As
qui définit un chtouca à gauche de rang s − s− au–dessus de S.
Lorsque s = r est le plus grand élément de r, on a un isomorphisme canonique
Ar ⊗
O
t∈r
t<r
Lt
.
O O ∼
A0r ⊗ τ
Lt −→ E 0 /E 00 ⊗
Lt
t∈r
t<r
t∈r
t<r


E ,→ E 0
% .
d’où il ressort que le zéro de Aer se confond avec celui de la modification 
E 00
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1010
LAURENT LAFFORGUE
D’autre part, pour s ∈ r ∩ r − c’est–à–dire 0+ = r1 ≤ s ≤ rk−1 = r− , on a des
isomorphismes canoniques
τ
∼ (E s ⊕ τ Es+ )/(E s ∩ τ Es+ )/(E s ⊕ τ Es )
E/(E s ⊕ τ Es ) =
∼
= (τ Es+ /τ Es )/(E s ∩ τ Es+ ) = τ As+ /A0s+ et
τ
E/(E s ⊕ τ Es ) ∼
= (E s− ⊕ τ Es )/(E s− ∩ τ Es )/(E s ⊕ τ Es )
∼
= (E s− /E s )/(E s− ∩ τ Es )

A0r /τ Ar1 si s = r1 ,
1
N
∼
=
0
As ⊗ 1−τ
t∈r Lt /As
t<s
si s > r1 ,
si bien que le zéro de Aes se confond avec le pôle de Aes+ .
Proposition 7. Soit r = (r1 , . . . , rk ) une partition de l’entier r, avec donc 0 <
r1 < · · · < rk−1 < rk = r.
Soit Chtr la catégorie fibrée qui à tout schéma S sur Fq associe le groupoı̈de des
familles constituées de
– des OS –Modules inversibles sur S au nombre de k − 1 que l’on note Ls , s ∈ r,
s < rk = r,


Ar1 ,→ A0r1
 de rang r1 au–dessus de S et
%
– un chtouca à droite Aer1 = 
τ
Ar1
k − 1 chtoucas à gauche de rangs respectifs s − s− , s ∈ r, s > r1 , qu’on écrit sous
la forme
N 

As ⊗
Lt


t∈r


t<s


%
Aes = 
,

 0 τ N τ
τ N
As ⊗
,→ As ⊗
Lt
Lt 
t∈r
t<s
t∈r
t<s
– des isomorphismes de OX×S –Modules
∼
As ⊗1−τ
A0r1 /τ Ar1 −→ τ Ar2 /A0r2 et
O ∼
Lt /A0s −→ τ As+ /A0s+ , s ∈ r , r1 < s < r .
t∈r
t<s
Alors:
(i) La catégorie fibrée Chtr est un champ algébrique au sens de Deligne–Mumford,
séparé et muni d’un morphisme naturel
Chtr −→ X × X × X k−1
qui est localement de type fini et lisse de dimension relative 2r − 2k.
(ii) La discussion qui précède l’énoncé de la présente proposition définit un morphisme naturel
Chtrr −→ Chtr
qui est fini, surjectif et radiciel.
(iii) Il existe une constante µ ≥ 0 telle que le morphisme
Chtrr −→ Chtr
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COMPACTIFICATION DES CHTOUCAS DE DRINFELD
1011
devienne une gerbe (dont le groupe de structure est plat, fini et radiciel) au–dessus
de l’ouvert de Chtr défini par les conditions
µ− (Aes ) ≥ µ + µ+ (Aes+ ) , s ∈ r , s < r .
(Pour E un fibré non nul sur une courbe projective lisse, on note µ(E) =
deg(E)/rg(E) et µ+ (E) le maximum [resp. µ− (E) le minimum] des µ(F ) quand
F décrit l’ensemble des fibrés non nuls qui sont sous-objets [resp. objets quotients]
de E.)
En particulier, au–dessus de cet ouvert, Chtrr est lisse sur X × X × X k−1 de
dimension relative 2r − 2k.
Remarque. C’est en pensant aux énoncés (ii) et (iii) qu’on a baptisé Chtrr champ
des chtoucas itérés de type r.
Démonstration de la proposition 7. (i) On sait que le champ Chtr1 des chtoucas à
droite de rang r1 et les champs r2 −r1 Cht, . . . ,rk −rk−1 Cht des chtoucas à gauche de
rangs r2 − r1 , . . . , rk − rk−1 sont algébriques au sens de Deligne–Mumford, séparés,
localement de type fini et lisses de dimensions relatives
2r1 − 2, 2(r2 − r1 ) − 2, . . . , 2(rk − rk−1 ) − 2
au–dessus de X × X.
Par conséquent, le champ
Chtr1 ×X
r2 −r1
Cht ×X · · · ×X
rk −rk−1
Cht
est lui–même algébrique au sens de Deligne–Mumford, séparé, localement de type
fini et lisse de dimension relative 2r − 2k au–dessus de X × X × X k−1 .
On en déduit le résultat annoncé.
(ii) On considère un objet de Chtr au–dessus d’un schéma S sur Fq , comme
précisé dans l’énoncé de la proposition.
On cherche à décrire la fibre au–dessus de cet objet du morphisme Chtrr → Chtr .
Et d’après la discussion qui précède l’énoncé du lemme 6, un objet de Chtrr est


E ,→ E 0
, d’une famille de fibrés inversibles
%
constitué d’une modification 
E 00
Ls , s ∈ r, s < r, de filtrations τ E = E 0 ! · · · ! E s ! · · · ! E r = 0, 0 =
···
Es00
···
Er00 = E 00 , 0 = E00
···
Es0
···
Er0 = E 0 et
E000
0
0
0 = E0
···
Es
···
Er = E telles que Es /Es = E /E, ∀s ∈ r, et Es0 = Es00 ,
−
∀s ∈ r , et d’une famille d’isomorphismes
!
!
O
τ O
∼
00
00
E s− /E s ⊗
Lt −→ Es /Es− ⊗
Lt .
t∈r
t<s
t∈r
t<s
Tout d’abord, il existe une unique façon de reconstituer τ E muni de ses deux
filtrations τ E = E 0 ! · · · ! E s ! · · · ! E r = 0 et 0 = τ E0 · · · τ Es · · · τ Er =
τ
E à partir de l’objet considéré de Chtr . Pour le voir, commençons par écrire la
somme directe
!!
M
O
0
τ
1−τ
⊕ τ Ar .
As ⊕ As ⊗
Lt
A = Ar1 ⊕
s∈r
r1 <s<r
t∈r
t<s
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1012
LAURENT LAFFORGUE
Il y a deux plongements naturels a et a0 de la somme directe
L
s∈r
r1 <s<r
A0s dans A.
Ils s’obtiennent en faisant la somme directe de tous les homomorphismes de pôles
ou bien de zéros dans les diagrammes Aes , s ∈ r, r1 < s < r. D’autre part, il y a
deux homomorphismes surjectifs naturels a et a0 de A dans la somme directe de
quotients
!!
.
M
M
O
τ
As ⊗1−τ
A0s ∼
Lt
As /A0s .
A0r1 /τ Ar1 ⊕
=
s∈r
r1 <s<r
s∈r
r1 <s
t∈r
t<s
Alors on a τ E = Ker(a0 − a)/ Im(a0 − a).
Puis on cherche à construire E muni de la filtration 0 = E0 · · · Es · · ·
Er = E, connaissant déjà τ E et les quotients successifs Es /Es− = As , s ∈ r.
r −r
En notant VecrX1 , VecrX2 −r1 , . . . , VecXk k−1 les champs classifiant les fibrés localement libres de rangs r1 , r2 − r1 , . . . , rk − rk−1 sur X et VecrX le champ classifiant les
fibrés de rang r sur X qui sont munis d’une filtration dont les quotients successifs
sont des fibrés localement libres de rangs r1 , r2 − r1 , . . . , rk − rk−1 , le problème de
construire cet E est représenté par une fibre du morphisme
r −rk−1
VecrX −→ (VecrX1 × · · · × VecXk
) ×(Vecr1 ×···×Vecrk −rk−1 ) VecrX
X
X
qui se déduit du carré commutatif
Frob
VecrX
/
r −rk−1
VecrX1 × · · · × VecXk
Frob
VecrX
/
r −rk−1
VecrX1 × · · · × VecXk
.
Ce problème est donc représenté par un morphisme fini, surjectif et radiciel.
Enfin, connaissant E, on a
O E 00 = Ker[E 0 → Ar → Ar /A0r ⊗τ −1
Lt ],
E 0 = (E ⊕ A0r1 )/Ar1 ,
t∈r
t<r
et toutes les autres données qui entrent dans la composition des chtoucas itérés de
type r se construisent d’une et d’une seule façon.
(iii) En effet, si µ− (As ) ≥ µ + µ+ (As+ ), s ∈ r, s < r, et si la constante µ est
assez grande, il y a une unique possibilité
L pour E muni d’une filtration de quotients
As .
successifs les As , s ∈ r, à savoir E =
s∈r
Ceci joint à la démonstration de (ii) prouve le résultat annoncé.
d) Sous–objets. Troncatures. Soient K un corps contenant Fq , S le spectre
de K, r un entier positif, r = (r1 , . . . , rk ) une partition de r, avec donc 0 < r1 <
E ,→ E 0
%
; L1 , . . . , Lr−1 ; `1 , . . . , `r−1 ; u1 , u2 , . . . , ur = Ee un
· · · < rk = r et
E 00
chtouca itéré de type r au–dessus de S.
/ r, muni de la section inversible `s peut être
Comme on a déjà dit, chaque Ls , s ∈
identifié au fibré trivial OS muni de la section 1. D’autre part, pour tout s ∈ r,
s < r, la section `s est nulle et on peut toujours choisir une trivialisation Ls ∼
= OS
de Ls .
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COMPACTIFICATION DES CHTOUCAS DE DRINFELD
1013
Ceci étant posé, la donnée de la famille d’homomorphismes u1 , u2 , . . . , ur est
équivalente à celle de
– une filtration décroissante τ E = E 0 ! · · · ! E s ! · · · ! E r = 0 de τ E par des
sous–fibrés maximaux,
···
Es00
···
Er00 = E 00 de E 00 par des
– une filtration croissante 0 = E000
sous–fibrés maximaux induisant des filtrations semblables 0 = E00
···
Es0
0
0
0
· · · Er = E et 0 = E0 · · · Es · · · Er = E de E et E,
– une famille d’isomorphismes
∼
E s− /E s −→ Es00 /Es00− , s ∈ r .
Définition 8. Avec les notations ci–dessus, on appellera sous–objet d’un chtouca
itéré Ee de type r au–dessus du spectre S d’un corps K contenant Fq tout couple
(A, A0 ) constitué de deux sous–fibrés A et A0 de E et E 0 ayant même rang et tels
que le plongement E ,→ E 0 envoie A dans A0 et que chaque plongement E s− /E s ,→
Es0 /Es0 − , s ∈ r, envoie τ A ∩ E s− /τ A ∩ E s dans A0 ∩ Es0 /A0 ∩ Es0 − .
Un tel sous–objet sera dit bon si A et A0 sont maximaux et s’il existe a ∈ r tel
que
E a−
A ⊆ Ea ,
Ea0 −
A0 ⊆ Ea0 .
Un bon sous–objet sera dit de type I si a = r1 = 0+ ou bien si a > r1 = 0+ et
deg(τ A ∩ E a− ) < deg(A/Ea− ), c’est-à-dire si τ A + E a− = τ E.
Il sera dit de type II si a > r1 = 0+ et deg(τ A ∩ E a− ) = deg(A/Ea− ), c’est-à-dire
si τ A + E a− τ E.
Proposition 9. Soit p : [0, r] → R+ un polygone.
Il existe dans le champ algébrique Chtrr des chtoucas itérés de type r un unique
tel que pour tout point géométrique Ee de Chtrr à valeurs dans le
ouvert Chtr,p≤p
r
spectre S d’un corps K contenant Fq , ce point est dans l’ouvert Chtr,p≤p
si et
r
seulement si:
(i) Pour tout s ∈ r, on a
s
p(s) − 1 < deg Es − deg E ≤ p(s) .
r
0
e on a
(ii) Pour tout bon sous–objet (A, A ) de E,
rg A
deg E ≤ p(rg A)
deg A −
r
si (A, A0 ) est de type I, et
rg A
deg E ≤ p(rg A) − 1
deg A −
r
si (A, A0 ) est de type II.
De plus, si L est un fibré inversible sur X de degré non nul, le quotient
Chtr,p≤p
/LZ est de type fini au–dessus de X × X × X k−1 .
r
Démonstration. C’est une conséquence immédiate de la proposition 7 (ii) du paragraphe précédent et de ce qu’on sait à propos des champs de chtoucas.
Rappelons qu’étant donnée µ ≥ 0 une constante, un polygone p : [0, r] → R est
dit µ–grand s’il vérifie les inégalités
[p(r0 ) − p(r0 − 1)] − [p(r0 + 1) − p(r0 )] ≥ µ ,
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1 ≤ r0 < r .
1014
LAURENT LAFFORGUE
Et dire qu’une propriété est vraie “pour tout polygone assez grand” signifie qu’il
existe une constante µ telle que la propriété soit vraie pour tout polygone qui soit
µ–grand.
Lemme 10. Soit p : [0, r] → R+ un polygone qui soit 2–grand. Soit Ee un chtouca
itéré de type r au–dessus du spectre S d’un corps K contenant Fq .
On suppose que Ee vérifie la propriété (i) de la proposition 9.
Alors la propriété (ii) de ladite proposition est équivalente à ce que tout sous–
objet (A, A0 ) de Ee satisfasse d’une part
deg A −
rg A
deg E ≤ p(rg A)
r
et d’autre part, pour tout s ∈ r vérifiant τ A ∩ E s 6= 0,
deg(τ Es ∩ τ A) + deg(E s ∩ τ A) −
rg A
deg E ≤ p(rg A) − 1 .
r
Démonstration. On remarque immédiatement que l’assertion (ii) de la proposition 9
appliquée à un bon sous–objet (A, A0 ) de Ee est équivalente à l’assertion ci–dessus
appliquée à ce même bon sous–objet.
La seule chose à vérifier est donc que dans l’hypothèse où l’assertion ci–dessus
est satisfaite par tous les bons sous–objets, elle l’est par tous les sous–objets.
e Pour tout s ∈ r, notons As
Ainsi, considérons un sous–objet (A, A0 ) de E.
0
et As les images réciproques par les projections Es → Es /Es− et Es0 → Es0 /Es0 −
des sous–fibrés maximaux de Es /Es− et Es0 /Es0 − engendrés par A ∩ Es /A ∩ Es− et
A0 ∩ Es0 /A0 ∩ Es0 − . Chaque paire (As , A0s ) définit un bon sous–objet de Ee et on a
X
rg A =
(rg As − rg Es− ),
s∈r
deg A ≤
X
(deg As − deg Es− ),
s∈r
d’où l’inégalité
deg A −
X
rgAs
rgEs−
rgA
deg E ≤
deg E) − (deg Es− −
deg E)].
[(deg As −
r
r
r
s∈r
Notant u le plus grand élément de r tel que pour tout s ≤ u dans r, on ait rgAs =
rgEs et donc même As = Es , le terme de droite s’écrit encore
rgAu
deg E)
r
X
rgAs
rgEs−
+
deg E) − (deg Es− −
deg E)].
[(deg As −
r
r
s∈r,s>u
(deg Au −
rgAs >rgEs−
D’après les hypothèses, il est majoré par
X
(p(rgAs ) − p(rgEs− ) + 1)
p(rgAu ) +
s∈r,s>u
rgAs >rgEs−
et à plus forte raison par p(rgA) puisque le polygone p est 2-grand.
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COMPACTIFICATION DES CHTOUCAS DE DRINFELD
1015
D’autre part, on a pour tout s ∈ r
X
deg(Es ∩ A) ≤
(deg At − deg Et− ),
t∈r
t≤s
deg(E s ∩ τ A) ≤ deg(E s ∩ τ As+ ) +
X
(deg At − deg Et− ) ,
t∈r
t>s+
d’où on déduit de la même façon
deg(τ Es + τ A) + deg(E s ∩ τ A) −
rgA
deg E ≤ p(rgA) − 1 .
r
Corollaire 11. Soit p : [0, r] → R+ un polygone qui soit 2–grand. Alors il existe
dans le champ algébrique Chtr des chtoucas itérés de rang r un unique ouvert
Chtr,p≤p dont la trace dans chaque strate Chtrr soit égale à Chtr,p≤p
.
r
De plus, si L est un fibré inversible sur X de degré non nul, le quotient
Chtr,p≤p /LZ est de type fini sur X × X. Il est lisse de dimension relative 2r − 2 si
p est assez grand.
Démonstration. Compte tenu de la proposition 9, on a seulement à prouver que si
Ee est un chtouca itéré de type r au–dessus d’un corps qui se spécialise en un chtouca
itéré Fe de type plus fin au–dessus d’un corps résiduel et si Fe vérifie les propriétés
de la proposition 9, alors Ee les vérifie également.
Or les E s , Es , Es0 , Es00 , s ∈ r, se spécialisent en les F s , Fs , Fs0 , Fs00 et d’autre part
tout bon sous–objet de Ee se spécialise en un sous–objet de Fe.
On conclut d’après le lemme 10.
Quant à la lissité dès lors que p est assez grand, elle résulte de la proposition 7 (iii)
du paragraphe précédent.
Enonçons:
Théorème 12. Soient p : [0, r] → R+ un polygone qui soit 2–grand et L un fibré
inversible sur X de degré non nul.
Alors le champ Chtr,p≤p /LZ est propre (et en particulier séparé) au–dessus
de X × X.
Démonstration. On sait déjà que ce champ est de type fini. Il suffit donc de vérifier
le critère valuatif de propreté, ce qui fait l’objet des paragraphes suivants.
2. Vérification du critère valuatif de propreté
Pour la démonstration, nous allons nous inspirer de celle de Drinfeld en rang 2
(voir le paragraphe 3 de [3]).
a) ϕ–réseaux itérés dans les ϕ–espaces. Etant donné A un anneau de valuation
discrète contenant Fq , on notera KA le corps des fractions de A, κA son corps
résiduel, πA un élément uniformisant et degA sa valuation.
On notera aussi AX l’anneau local du schéma X ⊗ A en le point générique de la
fibre spéciale X ⊗ κA . Ainsi AX est un anneau de valuation discrète dont πA est
également élément uniformisant. Si F désigne le corps des fonctions de la courbe
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1016
LAURENT LAFFORGUE
X, on voit que le corps des fractions de AX s’identifie au corps des fractions de
F ⊗ KA et le corps résiduel de AX au corps des fractions de F ⊗ κA .
On notera encore τ les endomorphismes de AX , KAX ou de leurs complétés
d
AX , KAd
induits par le produit tensoriel IdF ⊗ FrobA . On remarque que pour tout
X
], on a degAX (τ (a)) = q degAX (a) [resp. degAd
(τ (a)) =
scalaire a ∈ KAX [resp. KAd
X
X
(a)].
q degAd
X
Considérons (V, ϕ) un ϕ–espace de dimension r sur KAX c’est–à–dire la donnée
d’un espace vectoriel V de dimension r sur KAX et d’un isomorphisme τ ∗ V =
∼
τ
V −→ V ou, ce qui revient au même, d’une application τ –linéaire ϕ : V → V telle
que l’image de ϕ engendre V (voir [2], paragraphe 2).
Rappelons qu’un réseau de V [resp. de Vb = V ⊗KAX KAd
] est un sous–module
X
d
b
de type fini sur AX [resp. AX ] qui engendre V [resp. V ] comme espace vectoriel;
un tel réseau est nécessairement libre de rang r comme module. On remarque que
d
l’application M 7−→ M ⊗AX A
X définit une bijection de l’ensemble des réseaux de
V sur l’ensemble des réseaux de Vb .
Nous allons introduire une notion de “ϕ-réseau itéré” qui généralise celle de ϕréseau définie par Drinfeld dans le cas du rang r = 2 (voir le paragraphe 3 de
[3]):
Définition 1. Soient A un anneau de valuation discrète contenant Fq , (V, ϕ) un
ϕ–espace de dimension r sur KAX et u : τ V → V l’isomorphisme associé.
On appellera ϕ–réseau itéré dans V (relativement à une famille d’entiers d1 ,
d2 , . . . , dr−1 ≥ 0) tout réseau M de V tel que, si on note
−(q−1)
Y
d (s−t)
us =
πAt
Λs u , 1 ≤ s ≤ r ,
1≤t<s
les deux propriétés suivantes sont vérifiées :
(i) Pour n’importe quel choix de base de M sur AX , le point (u1 , u2 , . . . , ur ;
d
(q−1)
d1 (q−1)
πA
, . . . , πAr−1
) de Ωr(r) (KAX ) se prolonge en un point de Ωr (AX ).
(ii) Pour tout s, 1 ≤ s ≤ r, la réduction modulo πA de l’homomorphisme
Y −d (s−t)
τ Y −dt (s−t) s us :
πA
Λ M −→
πA t
Λs M
1≤t<s
1≤t<s
est telle que son noyau et le transformé par τ de son image soient en somme directe
(autrement dit, que toutes ses puissances aient le même rang non nul).
Bien sûr, on appellera type d’un tel ϕ–réseau itéré M relativement à une famille
d’entiers d1 , d2 , . . . , dr−1 ≥ 0 la partition r = (r1 , . . . , rk ) telle que rk = r et, pour
1 ≤ s < r,
s ∈ r ⇐⇒ ds ≥ 1 .
Un ϕ–réseau itéré de type (r) c’est–à–dire tel que la famille associée d1 , . . . , dr−1
soit nulle sera aussi appelé simplement un ϕ–réseau.
D’autre part, on dispose en un sens évident de la notion de ϕ–espace (de diet, dans un tel ϕ–espace, de celles de ϕ–réseau itéré et de
mension finie) sur KAd
X
ϕ–réseau. On note que si (V, ϕ) est un ϕ–espace sur KAX , Vb = V ⊗KA K d est
X
AX
d
un ϕ–espace et l’application M 7−→ M ⊗AX A
X est une bijection de l’ensemble des
ϕ–réseaux itérés [resp. des ϕ–réseaux] de V sur l’ensemble de ceux de Vb .
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COMPACTIFICATION DES CHTOUCAS DE DRINFELD
1017
c un ϕ–réseau itéré de type r =
Considérons (Vb , ϕ) un ϕ–espace sur KAd
et M
X
(r1 , . . . , rk ) dans Vb relativement à une famille d1 , d2 , . . . , dr−1 ≥ 0. Posons
\
n c
cr1 =
cr1 ⊗ d K d ,
d
M
Vbr1 = M
A
X ϕ (M ) ,
AX
AX
n≥1
cr2 =
M
\
n −dr1 c c
cr2 ⊗ d K d ,
d
A
M /Mr1 ) , Vbr2 /Vbr1 = M
X ϕ (πA
AX
AX
n≥1
etc.
c une filtration croissante O = Vb0 Vbr1 Vbr2 · · · Vbr =
Ainsi on associe à M
k
b
b
V de V par des ϕ–espaces, telle que chaque quotient Vbs /Vbs− , s ∈ r, soit muni d’un
cs .
ϕ–réseau M
Proposition 2. Soient A un anneau de valuation discrète contenant Fq et (Vb , ϕ)
.
un ϕ–espace sur KAd
X
Alors:
(i) Il existe dans Vb au plus un ϕ–réseau.
Vbr1
···
Vbrk = Vb est une filtration
(ii) Plus généralement, si 0 = Vb0
b
de V par des ϕ–espaces et si d1 , d2 , . . . , dr−1 est une famille d’entiers telle que
/ r ⇒ ds = 0, il existe dans Vb au plus un ϕ–
s ∈ r = (r1 , . . . , rk ) ⇒ ds ≥ 1 et s ∈
réseau itéré relativement à d1 , . . . , dr−1 dont la filtration de Vb associée soit égale
à (Vbs )s∈r .
(iii) Dans la situation de (ii), supposons que chaque quotient Vbs /Vbs− , s ∈ r,
admette un ϕ–réseau. Alors, si les ds , s ∈ r, sont assez grands, le problème posé
en (ii) admet une solution.
Démonstration. (i) En effet, un tel ϕ–réseau est nécessairement l’ensemble des v ∈
n
d
Vb tels que le sous–module engendré sur A
X par les ϕ (v), n ≥ 1, soit de type fini.
c et N
b deux tels ϕ–réseaux itérés. On sait déjà d’après (i) que pour
(ii) Soient M
c ∩ Vbs /M
c ∩ Vbs− = N
b ∩ Vbs /N
b ∩ Vbs− .
tout s ∈ r, on a M
Montrons par récurrence descendante sur les s ∈ r que
c/M
c ∩ Vbs− = N
b /N
b ∩ Vbs− .
M
b /N
b ∩ Vbs , considérons m ∈ M
c/M
c∩ Vbs− et
c/M
c∩ Vbs = N
Supposant que l’on sait déjà M
c/M
c ∩ Vbs =
b /N
b ∩ Vbs− deux éléments de Vb /Vbs− qui ont même réduction dans M
n∈N
b
b
b
b
b
b
b
sous–module
N/N ∩ Vs ⊆ V /Vs . Alors l’élément m − n ∈ Vs /Vs− esttel que le
Q −dt d
ϕ soit de type
π
engendré sur AX par ses transformés par les puissances de
t∈r
t<s
A
c∩Vbs /M
c∩Vbs− = N
b ∩Vbs /N
b ∩Vbs− .
fini. Par conséquent, m−n est comme voulu dans M
c
b
b
(iii) Pour tout s ∈ r, soit Ms le ϕ–réseau de Vs /Vs− . On peut toujours le relever
d
c0 ⊆ Vbs libre de même rang sur A
en un module M
X.
s
c0
c = P Q π dt M
Il est clair que si les ds , s ∈ r, sont assez grands, le réseau M
s
A
s∈r t∈r
t<s
répond à la question posée.
Nous allons maintenant montrer que, quitte à étendre la base, il existe des ϕ–
réseaux itérés dans n’importe quel ϕ–espace.
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1018
LAURENT LAFFORGUE
Lemme 3 (Drinfeld). Soient A un anneau de valuation discrète contenant Fq et
(Vb , ϕ) un ϕ–espace sur KAd
.
X
Alors, quitte à remplacer A par une extension finie totalement ramifiée, il exc stabilisé par ϕ et tel que l’endomorphisme induit ϕ :
iste dans Vb un réseau M
c→M
c/πA M
c ne soit pas nilpotent.
c/πA M
M
Démonstration. On prétend qu’il existe sur Vb une valuation degϕ telle que
degϕ (ϕ(v)) = q degϕ (v), ∀v ∈ Vb .
En effet, il suffit pour s’en convaincre de partir d’une valuation quelconque deg
sur V et de remarquer qu’il existe une constante C > 0 telle que pour tout v ∈ Vb
on ait
| deg(ϕ(v)) − q deg(v)| ≤ C
si bien qu’on peut définir
degϕ (v) = lim q −n deg(ϕn (v)) .
n7→+∞
Comme le corps KAd
est complet, il existe des réels c1 , c2 , . . . , cr et une base
X
b
v1 , . . . , vr de V tels que pour tout v ∈ Vb de coordonnées a1 , a2 , . . . , ar , on ait
(ai )} .
degϕ (v) = min {ci + degAd
X
1≤i≤r
Comme d’autre part degϕ (ϕ(vj )) = q degϕ (vj ), 1 ≤ j ≤ r, on voit que si (aij )
désigne la matrice de ϕ dans la base considérée, on a
q cj = min {ci + degAd
(aij )} ,
X
1≤i≤r
1 ≤ j ≤ r.
(aij ) étant des entiers, il résulte de ces relations que c1 , c2 , . . . , cr sont
Les degAd
X
des rationnels. Et si e ≥ 1 désigne un de leurs dénominateurs communs, on obtient
que degϕ prend ses valeurs dans 1e Z.
1/e
Puis, quitte à remplacer A par A[πA ], on peut supposer que la valuation degϕ
atteint la valeur 0.
c = {v ∈ Vb , degϕ (v) ≥ 0} répond à la question posée.
Alors le réseau M
Proposition 4. Soient A un anneau de valuation discrète contenant Fq et (V, ϕ)
[resp. (Vb , ϕ)] un ϕ–espace sur KAX [resp. KAd
].
X
Alors, quitte à remplacer A par une extension finie totalement ramifiée, il existe
dans V [resp. Vb ] un ϕ–réseau itéré.
.
Démonstration. Il suffit de considérer le cas d’un ϕ–espace (Vb , ϕ) sur KAd
X
b
b1
D’après le lemme 3 et quitte à étendre la base A, il existe dans V un réseau N
T d n b
c
stable par ϕ et tel que Mr1 =
AX ϕ (N1 ) soit un module libre de rang r1 ≥ 1
n≥1
d
c
b
c
sur A
KAd
.
X . Alors Mr1 est un ϕ–réseau de Vr1 = Mr1 ⊗A
d
X
X
Puis en recommençant ce processus autant de fois que nécessaire, on construit
dans Vb une filtration croissante par des ϕ–espaces Vbs , s ∈ r, telle que chaque
quotient Vbs /Vbs− admette un ϕ–réseau. On conclut d’après la proposition 2 (iii).
Terminons ce paragraphe en introduisant quelques notations et notions nouvelles
dont nous aurons besoin.
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COMPACTIFICATION DES CHTOUCAS DE DRINFELD
1019
Considérons A un anneau de valuation discrète contenant Fq , (V, ϕ) un ϕ–espace
de dimension r sur KAX , M un ϕ–réseau itéré de type r = (r1 , . . . , rk ) dans V et
b
c = M ⊗ AX A
d
.
M
X le ϕ–réseau itéré correspondant dans V = V ⊗KAX KA
d
X
c
M
M
c
c
b
On notera V
= M/πA M = M /πA M = V . C’est un espace vectoriel de
dimension r sur le corps résiduel κAX . D’après la définition 1 du présent paragraphe
combinée à la proposition 1 du paragraphe 1a, on dispose
VrM
···
VsM
···
– dans V M d’une filtration croissante 0 = V0M
1
M
M
M
Vr = V par des sous–espaces vectoriels Vs , s ∈ r, de dimension s,
M
M
– dans τ V M d’une filtration décroissante τ V M = V 0 ! · · · ! V s ! · · · !
M
M
V r = 0 par des sous–espaces vectoriels V s , s ∈ r, de codimension s,
– pour tout s, s ∈ r, d’un isomorphisme
M
M
∼
V s− /V s −→ VsM /VsM
− .
De plus, la condition (ii) de la définition 1 est équivalente à ce que, pour tout s ∈ r,
M
V s et τ VsM soient en somme directe dans τ V M .
···
Vbs (M )
···
Vbr (M ) = Vb est la
On remarque que si 0 = Vb0 (M )
filtration de Vb par des ϕ–espaces Vbs (M ), s ∈ r, de dimension s, canoniquement
associée au ϕ–réseau itéré M , alors pour tout s ∈ r, on a
VsM = M ∩ Vbs (M )/πA (M ∩ Vbs (M )) .
c de Vb est
Lemme 5. Dans la situation ci–dessus, disons qu’un sous–ϕ–espace W
compatible avec la filtration (Vbs (M ))s∈r de Vb canoniquement associée au ϕ–réseau
c ⊆ Vbs (M ).
itéré M s’il existe un s ∈ r tel que Vbs− (M ) W
M
c/πA M
c sera dit bon s’il existe un
D’autre part, un sous–espace W de V = M
M
M ∼
s ∈ r tel que VsM
W ⊆ VsM et que l’isomorphisme V s− /V s −→ VsM /VsM
−
− induise
∼
M
un isomorphisme V s− ∩ τ W −→ W/VsM
− .
Alors l’application
c
c 7−→ W
cM
c∩W
c /πA (M
c∩W
c)
W
=M
induit une bijection de l’ensemble des sous–ϕ–espaces compatibles de Vb sur l’ensemble des bons sous–espaces de V M .
Démonstration. Soit (d1 , . . . , dr−1 ) la suite d’entiers relativement à laquelle M est
un ϕ–réseau itéré.
c/πA M
c avec donc V M
Considérons W un bon sous–espace de V M = M
W ⊆
s−
M
d
b
Vs pour un certain s ∈ r. Choisissons un A
–module
de
type
fini
N
tel
que
X
b
b
c
b
c
b
b
N ⊆ M , N ⊇ M ∩ Vs− (M ) et N /πA N = W .
c /Vbs− (M )
c l’unique sous–espace de Vb qui contienne Vbs− (M ) et tel que W
Soit W
par l’intersection
soit engendré sur KAd
X
Y
n
\
−dt
b /M
c ∩ Vbs− (M )) .
d
ϕ (N
πA
A
X
n≥1
t∈r
t<s
c est l’unique antécédent de W par l’application considérée.
Alors W
Proposition 6. Soient A un anneau de valuation discrète contenant Fq , (V, ϕ) un
ϕ–espace de dimension r sur KAX , M un ϕ–réseau itéré dans V relativement à
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1020
LAURENT LAFFORGUE
c un sous–ϕ–espace de Vb compatible
une famille d’entiers d1 , d2 , . . . , dr−1 ≥ 0 et W
b
avec la filtration (Vs (M ))s∈r canoniquement associée à M .
c
cM
c,
Alors, W
désignant le bon sous–espace de V M = M/πA M correspondant à W
c
0
M cM
M = Ker[M → V /W ] est un ϕ–réseau itéré dans V .
Il l’est relativement à la famille (d1 , . . . , dr0 −1 , dr0 + 1, dr0 +1 , . . . , dr−1 ) où r0
c sur K d .
désigne la dimension de W
AX
Enfin, la filtration de Vb associée à M 0 est égale à la réunion de celle (Vbs (M ))s∈r
c.
associée à M et de l’élément W
Dans la situation de la proposition 6, on dira que M 0 est le transformé de M
c
c ou W
cM
par W
. On pourra dire aussi que M est le transformé réciproque de M 0
c
par W .
c
c = dim W
cM
Notant r0 la réunion de r et de l’élément r0 = dim W
, la filtration
0
0
c
M0
M
0
0
∼
cM
croissante canonique (Vs )s∈r0 de V
= M /πA M est telle que VrM
,
= W
0
0
0
0
c
M
M
0
M
M
M cM
0
Vs
= Vs pour s < r et Vs /Vr0 = Vs /W
pour s > r , et la filtra0
M0
M0
c
τ
M
cM
est telle que V 0 = τ (V M /W
),
tion décroissante canonique (V )s∈r0 de V
M0
Vs
s
M0
M0
c
r
c M ∩ V s pour s < r0 .
= V s pour s > r0 et V s /V r0 = τ W
M
M
b) Chtoucas dégénérés associés aux ϕ–réseaux itérés. Nous allons nous
servir du lemme suivant:
Lemme 7. Soit A un anneau de valuation discrète contenant Fq . Alors le foncteur
qui à tout OX⊗A –Module localement libre sur X ⊗A associe d’une part sa restriction
à la fibre générique X ⊗ KA et d’autre part sa fibre au–dessus de Spec AX est
une équivalence de catégories, c’est–à–dire admet un foncteur quasi–inverse qu’on
notera (E, M ) 7−→ E(M ).
E
,→ E 0
de rang r ≥ 1 au–
Dans tout ce qui suit, on fixera un chtouca τ
E = E 00 %
dessus du point générique Spec KA d’un anneau de valuation discrète A contenant
Fq . Sa fibre générique est un ϕ–espace V de dimension r sur KAX .
D’après le lemme 7 ci–dessus et la définition 1 du paragraphe 2a, on peut associer
à tout ϕ–réseau itéré M de V
libre de rang r,
– un OX⊗A –ModuleE(M ) localement E(M ) ,→ E 0 (M )
de celui–ci,
– une modification
E 00 (M ) %
– une famille d’homomorphismes
τ
Λs E(M ) −→ Λs E 00 (M ) ,
1 ≤ s ≤ r.
L’ensemble de ces données pourra être appelé le chtouca dégénéré induit par M .
Les restrictions E M = E(M )/πA E(M ), E 0M = E 0 (M )/πA E 0 (M ) et E 00M =
E 00 (M )/πA E 00 (M ) à la fibre spéciale X ⊗ κA sont des fibrés (localement libres)
de rang r dont les fibres génériques s’identifient à V M = M/πA M .
Si r = (r1 , . . . , rk ) désigne le type du ϕ–réseau itéré M , les filtrations 0 = V0M
M
M
M
VrM
· · · VsM
· · · VrM = V M et τ V M = V 0 ! · · · ! V s ! · · · ! V r = 0
1
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COMPACTIFICATION DES CHTOUCAS DE DRINFELD
1021
induisent des filtrations
0 = E0M
ErM1
0 = E00M
Er0M
1
0 = E000M
Er00M
1
M
···
EsM
···
Es0M
···
···
M
ErM = E M ,
···
Es00M
Er0M = E 0M ,
···
M
Er00M = E 00M
M
et τ E M = E 0 ! E r1 ! · · · ! E s ! · · · ! E r = 0
de E M , E 0M , E 00M et τ E M par des sous–fibrés maximaux.
De plus on dispose, pour tout s ∈ r, d’un isomorphisme au–dessus d’un ouvert
non vide de X ⊗ κA
M
M
∼
E s− /E s −→ Es00M /Es00M
− .
M
On sait enfin que pour tout s ∈ r, E s et τ EsM sont d’intersection nulle dans τ E M
M
et que le quotient τ E M /(E s ⊕ τ EsM ) est de torsion.
Proposition 8. Soit M un ϕ–réseau itéré de type r = (r1 , . . . , rk ) dans V .
M
(i) Pour tout s ∈ r, le quotient τ E M /(E s ⊕ τ EsM ) est de dimension 0 ou 1 sur κA .
(ii) Il est équivalent de demander que pour tout s ∈ r ∩ r − = (r1 , . . . , rk−1 ) le
M
quotient τ E M /(E s ⊕ τ EsM ) soit de dimension 1 sur κA ou bien que soient vérifiées
les conditions suivantes:
M
M
• pour tout s ∈ r, l’homomorphisme E s− /E s → Es00M /Es00M
est partout bien
−
défini et inversible sur X ⊗ κA ,
• pour tout s ∈ r, Es0M /EsM est de dimension 1 sur κA ,
• pour tout s ∈ r − , Es00M = Es0M ,
lesquelles impliquent que le chtouca dégénéré induit par M soit un pré-chtouca itéré
de rang r sur Spec A dont la restriction au-dessus de Spec κA soit de type r.
Démonstration. Il suffit de remarquer d’une part que pour tout s ∈ r ∪ r − les
quotients Es0M /EsM et Es0M /Es00M qui se plongent respectivement dans E 0M /E M et
E 0M /E 00M sont de dimension 0 ou 1 sur κA et d’autre part que pour tout s ∈ r on
a des plongements partout bien définis sur X ⊗ κA entre fibrés de même rang
M
det(τ E M /E s− ) ,→ det(Es00M
− ),
M
M
M
00M
det(τ E M /E s− ) ⊗ E s− /E s ,→ det(Es00M
/Es00M
− ) ⊗ Es
− .
On conclut par des considérations de degrés.
Rappelons que dans le lemme 5 du paragraphe 2a, on a fait correspondre de
c de Vb compatible avec la filtration
manière biunivoque à tout sous–ϕ–espace W
c
cM
b
(Vs (M ))s∈r canoniquement associée au ϕ–réseau itéré M un bon sous–espace W
M
de V = M/πA M .
Comme V M s’identifie aux fibres génériques des fibrés E M , E 0M et E 00M sur
0M
00M
X ⊗ κA , on peut considérer les sous–fibrés maximaux E M
c , EW
c et EW
c engendrés
W
c
M
M
c . Ils sont tels que pour un certain s ∈ r, on ait E −
par W
E M ⊆ EsM ,
s
c
W
0M
00M
Es0M
E 0M
et Es00M
E 00M
. Les sous–fibrés de E M , E 0M et E 00M qui
−
−
c ⊆ Es
c ⊆ Es
W
W
s’obtiennent de cette façon seront appelés les bons sous–objets.
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1022
LAURENT LAFFORGUE
Proposition 9. Soient M et M 0 deux ϕ–réseaux itérés dans V .
cw )w∈w une filtration croissante de Vb qui raffine les deux filtrations
Et soit (W
canoniquement associées à M et M 0 .
M
M0
M0
Soient alors (E M
c = Ew )w∈w et (E c = Ew )w∈w les deux filtrations corresponWw
Ww
0
dantes de E M et E M par des bons sous–objets.
0
(i) Si deg EwM = deg EwM , ∀w ∈ w, on a des isomorphismes canoniques EwM /EwM−
0
0
∼
= EwM /EwM− , w ∈ w.
0
0
(ii) S’il existe w0 ∈ w ∩ w − tel que deg EwM0 > deg EwM0 et deg EwM = deg EwM ,
∀w ∈ w, w 6= w0 , on a des isomorphismes canoniques
0
0
EwM /EwM− ∼
= EwM /EwM− , w ∈ w , w 6= w0 , w0+ ,
et des plongements canoniques
0
0
0
0
EwM0 /EwM− ,→ EwM0 /EwM− , EwM+ /EwM0 ,→ EwM+ /EwM0 .
0
0
0
00
0
d
+ πA
M0
est un réseau dans V . La fibre
Démonstration. Pour tout d ∈ Z, M = M
au–dessus de X ⊗ κA du fibré E(M 00 ) localement libre sur X ⊗ A induit par M 00
00
cw )w∈w de Vb induit sur lui une
est un fibré localement libre E M . La filtration (W
00
M
filtration croissante (Ew )w∈w par des sous–fibrés maximaux.
d
M 0 ⊆ M 00 induisent pour tout w ∈ w deux homoLes inclusions M ⊆ M 00 , πA
morphismes entre fibrés de même rang
00
00
0
0
00
00
EwM /EwM− −→ EwM /EwM− , EwM /EwM− −→ EwM /EwM−
dont l’un au moins est un plongement. Et pour tout w1 ∈ w, il existe une unique
façon d’avoir choisi d — qu’on dit alors adapté à w1 — de telle sorte que les deux
homomorphismes correspondants soient des plongements.
Dans le cas (i), on voit donc que pour tout w
00
00
0
0
deg EwM /EwM− ≥ deg EwM /EwM− = deg EwM /EwM−
00
0
et en fait il y a nécessairement égalité puisque deg E M = deg E M = deg E M .
Lorsque d est adapté à w1 , les plongements
00
00
0
0
00
00
EwM1 /EwM− ,→ EwM1 /EwM− , EwM1 /EwM− ,→ EwM1 /EwM−
1
1
1
1
qui sont entre fibrés de même rang et même degré sont nécessairement des isomorphismes. On conclut en choisissant d successivement adapté à chaque w1 ∈ w.
Dans le cas (ii), on a
00
00
0
0
0
0
deg EwM /EwM− ≥ deg EwM /EwM− = deg EwM /EwM− , ∀w 6= w0 , w0+ ,
00
00
00
0
00
deg EwM0 /EwM− ≥ deg EwM0 /EwM− ,
0
deg EwM+ /EwM0 ≥ deg EwM+ /EwM0 .
0
0
00
00
Lorsque d est choisi adapté à w1 = w0 , on a aussi deg EwM0 /EwM− ≥ deg EwM0 /EwM−
00
0
00
0
00
00
donc EwM0 /EwM− ,→ EwM0 /EwM− est un isomorphisme ainsi que EwM+ /EwM0 ,→ EwM+ /EwM0 .
0
0
00
0
0
00
0
0
Et lorsque d est choisi adapté à w1 = w0+ , on a aussi deg EwM+ /EwM0 ≥ deg EwM+ /EwM0
0
0
00
00
0
0
0
0
00
00
donc EwM+ /EwM0 ,→ EwM+ /EwM0 est un isomorphisme ainsi que EwM0 /EwM− ,→ EwM0 /EwM− .
0
0
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0
0
COMPACTIFICATION DES CHTOUCAS DE DRINFELD
1023
Il résulte enfin de ce qu’on vient de voir dans ces deux cas que lorsque d est choisi
00
00
adapté à w1 6= w0 , w0+ , on a toujours ou bien deg EwM0 /EwM− ≥ deg EwM0 /EwM− >
0
0
00
00
0
0
0
0
deg EwM0 /EwM− ou bien deg EwM+ /EwM0 ≥ deg EwM+ /EwM0 > deg EwM+ /EwM0 .
0
0
On conclut alors comme dans la partie (i).
0
0
c) Transformations des chtoucas dégénérés. Dans ce paragraphe, nous allons
introduire certaines opérations de transformations des ϕ-réseaux itérés en regardant
leurs effets sur les chtoucas dégénérés associés, opérations que nous emploierons
dans la construction finale au paragraphe 2e.
Commençons par citer le lemme suivant:
Lemme 10 (Langton). Soient A un anneau de valuation discrète contenant Fq , E
un fibré localement libre sur X ⊗ KA , V sa fibre générique, M un réseau dans V ,
W un sous–espace vectoriel de V M = M/πA M et M 0 le réseau Ker[M → V M /W ].
Soient E(M ) et E(M 0 ) les fibré localement libres sur X ⊗ A induits par M et
0
M
M0
et EW
M 0 , E M et E M leurs restrictions au–dessus de X ⊗ κA , EW
0 les sous–fibrés
0
maximaux de E M et E M engendrés par W et W 0 = Ker[M 0 /πA M 0 → W ].
Alors on a les suites exactes canoniques
0
0
M
M
M
−→ EW
−→ 0,
0 −→ EW
0 −→ E
0
M
M
−→ E M −→ EW
0 −→ EW
0 −→ 0.
E
,→ E 0
de
τ
E = E 00 %
rang r ≥ 1 au–dessus du point générique Spec KA d’un anneau de valuation discrète
A contenant Fq . La fibre générique est un ϕ–espace V de dimension r sur KAX .
Du lemme 10 on déduit:
Comme dans le paragraphe précédent, on fixe un chtouca
cw )w∈w une filtration de
Proposition 11. Soient M un ϕ–réseau itéré dans V , (W
Vb par des sous–ϕ–espaces qui raffine la filtration canoniquement associée à M et
w0 un élément de w ∩ w− .
cw0 (qui donc figure dans
(i) Soit M 1 le ϕ–réseau itéré transformé de M par W
1
M
b
le
la filtration de V canoniquement associée à M ). Alors, en notant EwM0 = EW
c
bon sous–objet de E
M
w0
cw0 , on a les suites exactes canoniques
induit par W
M1
1
0 −→ E w0 −→ τ E M −→ τ EwM0 −→ 0,
0 −→ τ EwM0 −→
τ
M1
E M −→ E w0 −→ 0.
1
1
De plus, on a un plongement canonique EwM0 ,→ EwM0 et le quotient EwM0 /EwM0 est de
dimension 0 ou 1 sur κA .
(ii) Plus généralement, soit M , M 1 , M 2 , . . . , M m = M 0 une suite finie de transcw0 , telle que EwM = EwM 1 = · · · = EwM m−1 . Alors on a
formés successifs de M par W
0
0
0
des suites exactes canoniques
M0
0
0 −→ E w0 −→ τ E M −→ τ EwM0 −→ 0,
0 −→ τ EwM0 −→
τ
M0
E M −→ E w0 −→ 0
0
0
ainsi qu’un plongement canonique EwM0 ,→ EwM0 dont le conoyau EwM0 /EwM0 est de
dimension 0 ou 1 sur κA .
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1024
LAURENT LAFFORGUE
Démonstration. (i) Ces deux suites exactes ne sont autres que celles du lemme 10
1
dans le cas particulier que nous envisageons. De même, le plongement EwM0 ,→ EwM0
1
est induit par la première suite exacte du lemme 10. Enfin, le quotient τ EwM0 /τ EwM0
1
M1
1
s’identifie à τ E M /(E w0 ⊕ τ EwM0 ); il est de dimension 0 ou 1 sur κA d’après la
proposition 8 (i) du paragraphe 2b.
(ii) En effet, on a d’après (i) les deux suites exactes
M0
0
m−1
0 −→ E w0 −→ τ E M −→ τ EwM0
0 −→ τ EwM0 −→
τ
E M −→
M
−→ 0,
1
E w0 −→ 0
et des isomorphismes canoniques
m−1
m−2
= EwM0
EwM0
M1
1
1
M2
1
= · · · = EwM0 = EwM0 ,
E w0 = τ E M /τ EwM0 = E w0 = · · · = τ E M
m−1
m−1
/τ EwM0
M0
= E w0 .
Quant à la seconde assertion, elle se déduit immédiatement de celle de la partie (i).
Dans la situation de la proposition 11 (ii), on dira que M 0 est le transformé
cw0 quand EwM /EwM 0 est de dimension 1 ou — ce qui revient au
strict de M par W
0
0
0
M0
0
même — quand τ E M /(E w0 ⊕ τ EwM0 ) est de dimension 1. Et M sera alors appelé
cw0 .
un transformé réciproque strict de M 0 par W
cw0
Toujours dans cette situation, on dira que M est un modifié de M 0 par W
M0
M
lorsque le plongement Ew0 ,→ Ew0 est un isomorphisme. Et M sera appelé le
cw0 (il en existe au plus un) si de plus
modifié maximal de M 0 par W
c
• ou bien Ww0 ne figure pas dans la filtration de Vb canoniquement associée au
ϕ–réseau itéré M ,
τ M
cw0 figure dans cette filtration et le quotient τ E M /(E M
• ou bien W
w0 ⊕ Ew0 ) est de
dimension 1 (ce qui revient à dire, au cas où M admettrait un transformé réciproque
cw0 , que M serait le transformé strict de celui–ci).
par W
cw )w∈w une filtration de Vb
Enfin, étant donnés M un ϕ–réseau itéré dans V , (W
raffinant celle associée à M et w0 un élément de w ∩ w − , on dira qu’un ϕ–réseau
cw , w ≥ w0 , s’il existe un élément
itéré M 0 est le modifié maximal de M par les W
w
w1 ≥ w0 dans w et une suite (M )w0 ≤w≤w1 de ϕ–réseaux itérés tels que:
• On a M w0 = M et pour tout w, w0 ≤ w < w1 , M w+ est le modifié maximal
cw et W
cw ne figure pas dans la filtration de Vb associée à M w+ .
de M w par W
cw1 ,
• Ou bien w1 = r, ou bien w1 < r et M 0 est le modifié maximal de M w1 par W
0
0
M
cw1 figure dans la filtration de Vb associée à M 0 et le quotient τ E M /(E w ⊕ τ EwM 0 )
W
1
1
est de dimension 1.
Nous allons déduire de la proposition 11:
cw )w∈w une filtration de
Proposition 12. Soient M un ϕ–réseau itéré dans V et (W
b
V par des sous–ϕ–espaces qui est la réunion de la filtration canoniquement associée
cw0 , w0 ∈ w ∩ w − .
à M et d’un élément W
M
M
τ M
On suppose que pour tout w > w0 dans w− , on a E w ⊕ τ EwM
E et E w +
τ M
Ew + = τ E M .
cw0 .
On suppose d’autre part que M admet un transformé strict M 1 par W
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COMPACTIFICATION DES CHTOUCAS DE DRINFELD
1
1025
1
Si le conoyau du plongement canonique E M /EwM+ ,→ E M /EwM+ est nul, on pose
0
0
M 2 = M 1.
Si au contraire ce conoyau est de dimension 1 sur κA , on suppose que M 1 admet
c +.
un transformé réciproque M 2 par W
w0
cw ,
Enfin, on suppose que M 2 admet un modifié maximal M 3 = M 0 par les W
w ≥ w0+ .
Alors le chtouca dégénéré induit par M 0 vérifie:
0
(i) Pour tout w ≥ w0+ dans w − , on a l’égalité deg EwM = deg EwM et un isomor0
0
phisme canonique EwM+ /EwM ∼
= EwM+ /EwM .
+
cw figure dans la filtration de Vb associée
(ii) Pour tout w ≥ w0 dans w− tel que W
à M 0 , on a des isomorphismes canoniques
0
0
0
E M /EwM ∼
= E M /EwM ,
M
M
Ew ∼
= Ew ,
avec donc
M0
E w ⊕ τ EwM
0
τ
M0
0
EM ,
0
0
E w + τ EwM+ = τ E M .
(iii) On dispose de plongements canoniques
0
0
EwM+ /EwM0 ,→ EwM+ /EwM0
0
et
0
0
EwM0 ,→ EwM0
dont les conoyaux sont de même dimension 0 ou 1.
0
Lorsque ces conoyaux sont de dimension 1, soit deg EwM0 = deg EwM0 − 1, on a de
M0
0
plus E w0 ⊕ τ EwM0
τ
M0
0
0
0
E M , E w0 + τ EwM+ = τ E M .
0
Démonstration. Montrons d’abord qu’il y a un isomorphisme canonique E M /EwM+ ∼
=
2
0
2
E M /EwM+ .
0
1
1
C’est évident si le plongement E M /EwM+ ,→ E M /EwM+ est un isomorphisme
0
0
puisqu’alors on a posé M 2 = M 1 .
Dans le cas contraire, il suffit de prouver que le plongement
τ
1
1
1
2
2
1
M
M
M
E M /τ EwM+ ∼
= E w0+ ,→ E w0 /E w0 ∩ τ EwM+ ∼
= τ E M /τ EwM+
0
0
0
est un isomorphisme. Or on a
M1
M1
1
1
E w0+ ⊕ τ EwM+ ⊆ E w0 + τ EwM+
0
τ
0
EM
1
1
1
1
1
M
M
M
donc la première inclusion est une égalité et on obtient E w0+ ∼
= E w0 /E w0 ∩ τ EwM+ ,
M1
1
0
1
puisque le quotient τ E M /(E w0+ ⊕ τ EwM+ ) est de dimension 1 au plus.
0
D’autre part, on dispose du plongement composé
1
1
2
2
EwM+ /EwM0 ,→ EwM+ /EwM0 ,→ EwM+ /EwM0
0
0
0
ainsi que du plongement
2
EwM0 ,→ EwM0
induit par l’inclusion M 2 ⊆ M .
Comparons maintenant les chtoucas dégénérés induits par M 2 et par sa modcw , w ≥ w+ . Par construction, il existe
ification maximale M 0 = M 3 par les W
0
+
+
cw ne figure pas dans la filtration
w1 ≥ w0 dans w tel que, pour w0 ≤ w < w1 , W
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1026
LAURENT LAFFORGUE
cw y figure. Et on a des isomorphismes
de Vb associée à M 0 et que, pour w ≥ w1 , W
canoniques
2
0
EwM+ ∼
= EwM+ ,
0
0
2
2
0
0
EwM+ /EwM ∼
= EwM+ /EwM , w0+ ≤ w < w1 ,
2
2
0
0
E M /EwM1 ∼
= E M /EwM1 .
Ainsi (i) est démontré. D’autre part (ii) est vide si w1 = r. Sinon, par définition
de la modification maximale M 0 de M 2 , le conoyau de
0
0
0
M
E w1 ,→ τ E M /τ EwM1 ∼
= τ E M /τ EwM1
est de dimension 1 sur κA .
D’où un isomorphisme
0
M
M
E w1 ∼
= E w1
et a fortiori, pour tout w ≥ w1 dans w − ,
0
0
0
M
M
M
Ew ∼
= E w , E w ⊕ τ EwM
M0
0
0
0
E M , E w + τ EwM+ = τ E M ,
τ
ce qui démontre (ii).
1
Par ailleurs, le conoyau du plongement EwM0 ,→ EwM0 est de dimension 1 et celui
1
2
0
du plongement EwM0 ,→ EwM0 = EwM0 est de dimension 0 ou 1, ce qui achève de
prouver la première assertion de (iii).
0
Voyons enfin ce qu’on peut déduire de l’hypothèse deg EwM0 = deg EwM0 − 1 équiva1
2
0
lente à EwM0 = EwM0 = EwM0 .
M1
1
D’après la relation E w0 ⊕ τ EwM0
τ
M0
0
on a E w0 ⊕ τ EwM0
1
M
1
τ
M1
1
1
E M et le plongement
M2
2
0
M0
E M /E w0 ,→ τ E M /E w0 ,→ τ E M /E w0 ,
τ
0
E M . Et on note au passage que les quotients non nuls
1
M0
0
0
E M /(E w0 ⊕ τ EwM0 ) et τ E M /(E w0 ⊕ τ EwM0 ) étant de même dimension 1, on a
2
0
M1
M2
M0
τ M1
E /E w0 ∼
= τ E M /E w0 ∼
= τ E M /E w0 .
Afin de montrer la relation
τ
M0
0
0
E w0 + τ EwM+ = τ E M ,
0
M2
2
2
il suffit donc de montrer E w0 + τ EwM0 = τ E M .
1
1
Dans le cas où M 2 = M 1 , cela résulte de ce qu’alors τ E M /τ EwM+ ∼
= τ E M /τ EwM+
0
1
0
M
et E w0 ∼
= τ E M /τ EwM0 . Dans le cas contraire, il s’agit de vérifier que le plongement
M2
M2
2
2
2
E w0 /E w0 ∩ τ EwM+ ,→ τ E M /τ EwM+ est un isomorphisme, ce qui résulte de l’égalité
0
0
des degrés de ces deux fibrés, laquelle est conséquence de
1
2
2
1
1
1
2
2
2
M
M
M
M
M
M
deg E w0 = deg E w0 , E w0 ∩ τ EwM+ ∼
= E w0 /E w0+ , τ E M /τ EwM+ ∼
= E w0+ .
0
Ceci termine la démonstration de (iii).
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0
COMPACTIFICATION DES CHTOUCAS DE DRINFELD
1027
Dans la situation de la proposition 12, on dira que M 0 est le transformé de M
cw , w ≥ w0 .
par les W
cw )w∈w une filPlus généralement, étant donnés M un ϕ–réseau itéré de V , (W
tration de Vb raffinant celle (Vbs (M ))s∈r associée à M et w0 un élément de w ∩ w− ,
cw , w ≥ w0 , le transformé de M (s’il existe)
on appellera transformé de M par les W
b
c
par Ww0 et les Vs (M ), s > w0 .
Puis, s’il existe une suite M , M 1 , M 2 , . . . , M m = M 0 de transformés successifs
cw , w ≥ w0 , telle que
de M par les W
1
m−1
deg EwM0 = deg EwM0 = · · · = deg EwM0
0
= deg EwM0 + 1 ,
cw , w ≥ w0 .
on dira que M 0 est le transformé strict de M par les W
cw )w∈w la filtration de Vb
Proposition 13. Soient M un ϕ–réseau itéré dans V , (W
canoniquement associée à M et w0 un élément de w ∩ w− .
On suppose que pour tout w ≥ w0+ dans w − , on a
M
E w ⊕ τ EwM
EM
τ
M
E w + τ EwM+ = τ E M .
et
cw0 et que
On suppose d’autre part que M admet un modifié maximal M 1 par W
1
2
c
M admet un transformé réciproque M par Ww0 .
2
2
Si le conoyau du plongement canonique E M /EwM+ ,→ E M /EwM+ est nul, on pose
0
0
M 0 = M 2.
Si au contraire ce conoyau est de dimension 1 sur κA , on note M 0 le transformé
c +.
de M 2 par W
w0
Alors le chtouca dégénéré induit par M 0 vérifie:
(i) Pour tout w ≥ w0+ dans w − , on a des isomorphismes canoniques
0
0
0
E M /EwM ∼
= E M /EwM ,
M
M
Ew ∼
= Ew
avec donc
M0
E w ⊕ τ EwM
0
τ
M0
0
EM ,
0
0
E w + τ EwM+ = τ E M .
(ii) On dispose de plongements canoniques
0
0
EwM+ /EwM0 ,→ EwM+ /EwM0
0
0
EwM0 ,→ EwM0
et
0
dont les conoyaux sont de même dimension 0 ou 1.
1
2
2
2
Démonstration. On a des plongements canoniques EwM0 = EwM0 ,→ EwM0 , E M /EwM0
1
1
M
2
M
1
M
,→ E M /EwM0 = E M /EwM0 et E w0 ,→ E w0 ,→ E w0 .
Comme le quotient
τ
E
M1
M1
/(E w0+
⊕
τ
1
EwM+ )
0
τ
M
E M /(E w0+ ⊕ τ EwM+ ) est de dimension 1 et les quotients
et E
τ
M2
M1
M2
/(E w0+
0
2
⊕ EwM+ ) sont de dimension 1 au plus, on
τ
0
M
M2
2
M
voit que nécessairement E w0+ = E w0+ et même E w0+ = E w0+ si deg EwM+ = deg EwM+ .
0
0
Ceci démontre ce qu’on voulait dans le cas M 0 = M 2 .
2
Dans le cas contraire où deg EwM+ = deg EwM+ + 1, l’inclusion M 1 ⊂ M 0 induit
1
0
0
0
1
1
0
0
M
des plongements EwM0 = EwM0 ,→ EwM0 , E M /EwM+ = E M /EwM+ ,→ E M /EwM+ et E w0+ =
0
0
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0
1028
LAURENT LAFFORGUE
M1
M0
M
M0
M0
2
2
M
E w0+ ,→ E w0+ . Or on a deg E w0+ = deg τ E M /τ EwM+ = deg E w0+ donc les plongements
0
0
0
E w0+ ,→ E w0+ et E M /EwM+ ,→ E M /EwM+ sont des isomorphismes.
0
0
Enfin, on dispose du plongement composé
0
0
2
2
1
1
EwM+ /EwM0 ,→ EwM+ /EwM0 ∼
= EwM+ /EwM0 ∼
= EwM+ /EwM0 ,
0
0
0
0
ce qui termine la démonstration.
Dans la situation de la proposition 13, on dira que M 0 est le transformé réciproque
cw , w ≥ w0 .
de M par les W
cw )w∈w une filtraPlus généralement, étant donnés M un ϕ–réseau itéré de V , (W
b
b
tion de V raffinant celle (Vs (M ))s∈r associée à M et w0 un élément de w∩w − ∩r, on
cw , w ≥ w0 , le transformé réciproque
appellera transformé réciproque de M par les W
de M (s’il existe) par les Vbs (M ), s ≥ w0 .
Puis, s’il existe une suite M , M 1 , M 2 , . . . , M m = M 0 de transformés réciproques
cw , w ≥ w0 , telle que
successifs de M par les W
1
m−1
deg EwM0 = deg EwM0 = · · · = deg EwM0
0
= deg EwM0 − 1 ,
cw , w ≥ w0 .
on dira que M 0 est le transformé réciproque strict de M par les W
d) Critères d’existence de telles transformations.
Comme
dans les para

E
,→ E 0
 de rang r ≥ 1 au–
%
graphes précédents, on fixe un chtouca 
τ
00
E=E
dessus du point générique Spec KA d’un anneau de valuation discrète A contenant
Fq . Sa fibre générique est un ϕ–espace V de dimension r sur KAX .


E ,→ E 0

%
Proposition 14. Soit p : [0, r] → R+ un polygone tel que le chtouca 
τ
E
au–dessus de Spec KA soit dans l’ouvert Chtr,p≤p de Chtr .
cw )w∈w une filtration de Vb raffinant celle
Soient M un ϕ–réseau itéré dans V , (W
associée à M et w0 un élément de w ∩ w − .
M
cw0 vérifie
de E M induit par W
On suppose que le bon sous–objet EwM0 = EW
c
w0
l’inégalité
w0
deg E M > p(w0 ) .
r
cw0 .
Alors M admet un transformé strict par W
deg EwM0 −
Démonstration. Supposons que ce ne soit pas le cas.
Alors la suite M , M 1 , M 2 , . . . , M m , . . . des transformés successifs de M par
cw0 doit vérifier
W
1
2
m
EwM0 = EwM0 = EwM0 = · · · = EwM0 = · · · .
Pour tout m ≥ 1, l’inclusion M m ⊂ M induit un plongement E(M m ) ,→ E(M )
m
entre fibrés localement libres sur X ⊗ A, et il résulte de l’égalité EwM0 = EwM0 que le
quotient B m = E(M )/E(M m ) est un fibré localement libre de rang r −w0 au–dessus
m
A.
de X ⊗ A/πA
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COMPACTIFICATION DES CHTOUCAS DE DRINFELD
0
1029
0
m m
On en déduit que, pour m0 ≥ m ≥ 1, B m = B m /πA
B si bien que le système
m
projectif des B définit un quotient B de E(M ) sur le complété formel de X ⊗ A le
long de X ⊗ κA et donc aussi sur X ⊗ A.
Le noyau A = Ker[E(M ) → B] est un fibré localement libre sur X ⊗ A dont la
fibre spéciale s’identifie à EwM0 . Sa fibre sur X ⊗ KA est un bon sous–objet de E qui
a même rang w0 et même degré que EwM0 . Il y a contradiction.
cw )w∈w une filtration de Vb par des sous–ϕ–espaces, w0
Proposition 15. Soient (W
un élément de w ∩ w − et µ ≥ 0 une constante.
Alors, quitte à remplacer l’anneau de valuation discrète A par une extension finie
non ramifiée ne dépendant que de ces données, la propriété suivante est vérifiée:
Pour tout ϕ–réseau itéré M dans V tel que
cw )w∈w et comprend
• la filtration de Vb associée à M est contenue dans (W
c
l’élément Ww0 ,
cw0 ,
• M n’admet pas de transformé réciproque par W
on a l’inégalité suivante entre pentes minimales et maximales
M
µ− (E w0 ) + µ ≤ max µ+ (EwM /EwM− ) .
w∈w
w≤w0
Démonstration. Pour tout w < w0 dans w − , l’homomorphisme
Λ1+w τ E(M ) −→ Λ1+w E 00 (M )
induit par quotient un homomorphisme bien défini
q
A
Λ1+w τ E M −→ Λ1+w E 00 (M ) ⊗A A/πA
qui se factorise à travers l’homomorphisme surjectif
M
M
Λ1+w τ E M −→ det(τ E M /E w ) ⊗ E w
si bien que par restriction on obtient une flèche
M
M
q
A.
det(τ E M /E w ) ⊗ E w0 −→ Λ1+w E 00 (M ) ⊗A A/πA
cw0 , il faut
Comme par hypothèse M n’admet pas de transformé réciproque par W
que l’un au moins de ces homomorphismes soit non nul. Autrement dit, il existe
w < w0 dans w − et e ∈ N, 1 ≤ e ≤ q, pour lesquels on dispose maintenant d’un
homomorphisme bien défini et non nul
M
M
e−1
e
det(τ E M /E w ) ⊗ E w0 −→ Λ1+w E 00 (M ) ⊗A πA
A/πA
A∼
= Λ1+w E 00M
dont on remarque que l’image A00 est nécessairement contenue dans le sous–fibré
det(Ew00M ) ⊗ E 00M /Ew00M de Λ1+w E 0M .
Soit A le fibré intersection de A00 avec det(EwM ) ⊗ E M /EwM dans det(Ew0M ) ⊗
0M
E /Ew0M . Ainsi on a
M
M
deg(τ E M /E w ) + µ− (E w0 ) ≤ µ− (A00 ) ≤ µ− (A) + 1 .
D’autre part, il résulte encore de nos hypothèses que le fibré A intersection de
M
A avec det(τ EwM ) ⊗ E w0 a un rang strictement inférieur à celui de τA avec donc
µ− (A) = µ− (τA) ≤ µ− (τA/A).
τ
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1030
LAURENT LAFFORGUE
Or d’après le lemme 16 ci–dessous et quitte à avoir remplacé A par une extension
finie non ramifiée, il existe dans X un sous–schéma fermé fini I dont on a pu choisir
le degré arbitrairement grand et tel que l’homomorphisme
M
M
det(τ E M /E w ) ⊗ E w0 → Λ1+w E 00 (M ) ⊗A A/π q A
s’annule modulo I, si bien que le plongement
M
A/A ,→ det(τ EwM ) ⊗ τ E M /(τ EwM ⊕ E w0 )
τ
est lui-même nul modulo I.
On en déduit
µ− (τA/A) + deg I ≤ deg(τ EwM ) + 1 + µ− (τ EwM0 /τ EwM )
M
≤ deg(τ E M /E w ) + 1 + µ− (EwM0 /EwM ) ,
ce qui termine la démonstration si deg I ≥ µ + 2.
cw )w∈w une filtration de Vb par des sous–ϕ–espaces.
Lemme 16. Soit (W
Soit {M } la famille de tous les ϕ–réseaux itérés M de V relativement à une
M
b
famille d’entiers dM
1 , . . . , dr−1 ≥ 0 tels que la filtration de V associée soit contenue
cw )w∈w .
dans (W
Soit enfin I ,→ X un sous–schéma
fermé
 fini évitant les prolongements à Spec A

E ,→ E 0
.
%
des zéro et pôle du chtouca 
τ
E
Considérons les propriétés suivantes portant sur les ϕ–réseaux itérés M dans
{M }:
(1) Aucun des homomorphismes induits
us : Λs τ (E(M ) ⊗ OI ) −→ Λs (E(M ) ⊗ OI ) ,
1 ≤ s ≤ r,
n’est nilpotent, même après réduction modulo πA .
(2) Il existe une famille d’homomorphismes
vs : Λs (E(M ) ⊗ OI ) −→ Λs (Ar ⊗ OI ) ,
1 ≤ s ≤ r,
telle que, pour tout s, vs = vs ◦ us et que, pour n’importe quel choix de base de
τ
dM
dM
E(M ) ⊗ OI sur l’anneau A ⊗ OI , la famille (v1 , v2 , . . . , vr ; πA1 , . . . , πAr−1 ) soit
élément de Ωr (A ⊗ OI ).
Alors:
(i) La propriété (2) entraı̂ne la propriété (1).
D’autre part, si un seul des ϕ–réseaux itérés dans {M } vérifie la propriété
(1) [resp. (2)], il en est de même de tous les autres.
(ii) Quitte à remplacer A par une extension finie non ramifiée, la propriété (1)
entraı̂ne la propriété (2).
Démonstration. (i) La première assertion est évidente.
Pour ce qui est de la seconde, on remarque que si M , M 0 sont deux ϕ–réseaux
cw alors M
itérés dans {M } tels que M 0 soit le transformé de M par l’un des W
0
vérifie la propriété (1) [resp. (2)] si et seulement si M la vérifie. Or si M , M 0 sont
maintenant deux éléments quelconques de {M }, on peut construire deux suites M ,
0
M 1 , M 2 , . . . , M m et M 0 , M 01 , M 02 , . . . , M 0m de transformés successifs de M et M 0
0
cw telles que M m et M 0m soient des ϕ-réseaux itérés relativement à une
par des W
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1031
même suite d’entiers d1 , d2 , . . . , dr−1 ≥ 0 et donc coı̈ncident d’après la proposition
2 (ii) du paragraphe 2a. La conclusion s’en déduit.
(ii) D’après (i) il suffit de vérifier l’assertion pour un élément fixé M de {M }
vérifiant l’assertion (1).
Pour tout s ≥ 2, on doit avoir


Y −(s−t)dM (q−1)
t
 Λs u 1 ,
us = 
πA

vs = 
1≤t<s
Y
1≤t<s

−(s−t)dM
t 
πA
Λs v1
.
Il s’agit donc de déterminer v1 en fonction de u1 .
Or M = E(M ) ⊗ OI est un module libre de rang r sur l’anneau A ⊗ OI . Il est
muni d’une filtration 0 = M0 · · · Mw · · · Mr = M respectée par u1 et
telle que
• chaque Mw /Mw− , w ∈ w, est libre de rang w − w− sur
l’anneau A ⊗ OI ,
Q −dM
t (q−1)
u1 induit un isomorπA
• pour tout w ∈ w, l’homomorphisme
t≤w −
phisme de (Mw /Mw− ) sur Mw /Mw− .
τ
Quitte à remplacer A par une extension finie non ramifiée, on peut donc choisir
pour chaque Mw /Mw− une base {ms , w− + 1 ≤ s ≤ w} dont tous les vecteurs
vérifient la relation
Y
dM (q−1)
u1 (τ ms ) =
πAt
ms ,
t≤w −
puis relever chaque ms en un élément ms ∈ Mw vérifiant
Y
dM (q−1)
ms .
πAt
u1 (τ ms ) =
t≤w −
Alors l’isomorphisme v1 de M = E(M ) ⊗ OI sur Ar ⊗ OI qui envoie la base
{m1 , m2 , . . . , mr } sur la base canonique de Ar ⊗ OI répond à la question posée.
De la proposition 15 du présent paragraphe combinée avec la proposition 11 du
paragraphe précédent, on déduit:
cw )w∈w une filtration de Vb
Corollaire 17. Soient M un ϕ–réseau itéré dans V , (W
raffinant celle associée à M et w0 un élément de w ∩ w − .
Alors, quitte à remplacer l’anneau de valuation discrète A par une extension finie
non ramifiée:
cw0 dans sa filtracw0 qui ne compte pas W
(i) Ou bien M admet un modifié par W
b
cw0 .
tion de V associée, ou bien M admet un transformé réciproque strict par W
c
(ii) A fortiori M admet un modifié maximal par Ww0 et il admet un modifié
cw , w ≥ w0 .
maximal par les W
Puis on obtient:
cw )w∈w une filtration de Vb
Corollaire 18. Soient M un ϕ-réseau itéré dans V , (W
raffinant celle associée à M et w0 un élément de w ∩ w − .
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1032
LAURENT LAFFORGUE
On suppose que les hypothèses de la proposition 14 sont vérifiées et que pour
cw figure dans la filtration associée à M , on ait
tout w > w0 dans w − tel que W
M
M
τ M
τ M
τ M
E w ⊕ Ew
E et E w + Ew+ = τ E M .
Alors, quitte à remplacer l’anneau de valuation discrète A par une extension finie
cw , w ≥ w0 .
non ramifiée, M admet un transformé strict par les W
Démonstration. D’après le corollaire 17 et la proposition 14 du présent paragraphe
combinés avec la proposition 12 du précédent paragraphe et quitte à remplacer A
par une extension finie non ramifiée, M = M 0 admet un transformé M 1 par les
cw , w ≥ w0 ; si M 1 est un transformé strict, on a terminé et sinon il vérifie les
W
cw , w ≥ w0 .
mêmes propriétés que M si bien qu’il admet un transformé M 2 par les W
En répétant cette opération autant de fois que nécessaire, on finit nécessairement
cw , w ≥ w0 . En effet, si ce n’était le
par obtenir un transformé strict de M par les W
cas, on aurait construit une suite infinie de ϕ-réseaux itérés (M m )m≥0 relativement
m
m
M m+1
à des suites d’entiers dM
, . . . , dM
≤
1
r−1 ≥ 0 telles que pour tout m on ait ds
X
X
m+1
m
m
M
M
,
∀s
≥
w,
et
d
<
d
;
c’est
impossible.
dM
s
s
s
s≥w
s≥w
De même, par combinaison avec la proposition 13 du précédent paragraphe, on
obtient:
cw )w∈w une filtration de Vb
Corollaire 19. Soient M un ϕ–réseau itéré dans V , (W
raffinant celle associée à M et w0 un élément de w ∩ w − .
On suppose que pour toute extension finie non ramifiée A0 de A et pour tout
ϕ–réseau itéré M 0 de V ⊗KAX KA0X dont la filtration de Vb ⊗KAc KAb0 associée soit
X
X
cw ⊗K K b0 )w∈w , cette filtration comprenne l’élément W
cw0 ⊗K
contenue dans (W
c
A
X
AX
KAb0 . On suppose aussi que pour tout w > w0 dans w
X
M
−
c
A
X
cw figure dans la
tel que W
M
filtration associée à M , on ait E w ⊕ τ EwM τ E M et E w + τ EwM+ = τ E M .
Alors, quitte à remplacer A par une extension finie non ramifiée, M admet un
cw , w ≥ w0 .
transformé réciproque strict par les W
e) Dégénérescence des chtoucas en chtoucas itérés. Nous allons démontrer
dans ce paragraphe:
E
,→ E 0
Théorème 20. Soit τ
un chtouca de rang r ≥ 1 au–dessus du
E = E 00 %
point générique Spec KA d’un anneau de valuation discrète A contenant Fq . Soit
V sa fibre générique.
Soit p : [O, r] → R+ un polygone qui est 2–grand et tel que le morphisme Spec KA
−→ Chtr correspondant au chtouca considéré se factorise à travers l’ouvert Chtr,p≤p .
Alors:
(i) Quitte à remplacer A par une extension finie, il existe dans V un ϕ–réseau
itéré M dont le chtouca dégénéré associé soit un chtouca itéré et même définisse
un objet de Chtr,p≤p (Spec A).
(ii) Si M et M 0 sont deux ϕ–réseaux itérés de V définissant chacun un objet de
Chtr,p≤p (Spec A), on a nécessairement M = M 0 .
Démonstration du théorème 20 (i). Tout d’abord et quitte à remplacer A par une
extension finie, on sait d’après la proposition 4 du paragraphe 2a qu’existe dans V
un ϕ–réseau itéré M .
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1033
On peut supposer que le type r = (r1 , . . . , rk ) de M est maximal pour l’ordre
lexicographique. Autrement dit, pour toute extension finie A0 de A et pour tout
ϕ–réseau itéré M 0 de V ⊗KAX KA0X , le type r0 = (r10 , . . . , rk0 0 ) de M 0 vérifie
r10 ≤ r1 ,
r20 ≤ r2 si r10 = r1 ,
r30 ≤ r3 si r20 = r2 , r10 = r1 ,
etc.
Notons (Vbs )s∈r la filtration de Vb associée à M .
D’autre part, pour tout entier r0 , 0 ≤ r0 ≤ r, notons d(r0 ) ∈ Z l’unique entier tel
que
r0
p(r0 ) − 1 < d(r0 ) − deg E ≤ p(r0 ) .
r
Nous allons maintenant procéder à une construction par étapes, sans plus préciser
qu’à chaque pas on remplace A par une extension finie.
Il existe dans V un ϕ–réseau itéré M 0 tel que
• la filtration de Vb associée à M 0 n’est autre que (Vbs )s∈r ,
• le chtouca dégénéré induit par M 0 est un chtouca itéré,
0
• pour tout s ∈ r ∩ r − , deg EsM = d(s) + 1.
Cela résulte du lemme suivant:
cw )w∈w la filtration de Vb associée
Lemme 21. Soient N un ϕ–réseau itéré de V , (W
et w0 un élément de w tels que
cw , w < w0 } et {Vbs , s < w0 } se confondent,
• les deux sous–familles {W
• pour tout w ≥ w0 dans w ∩ w − , on a
deg EwN = d(w) ,
τ
N
EwN ⊕ E w
τ
EN
et
τ
N
EwN+ + E w = τ E N .
Alors il existe un ϕ–réseau itéré N 0 de V tel que
• la filtration de Vb associée à N 0 contient (Vbs )s<w0 et elle est contenue dans
cw )w∈w ,
(W
• le chtouca dégénéré induit par N 0 est un chtouca itéré,
• pour tout élément w de w, on a
0
deg EwN = d(w) + 1
si w < w0 ,
0
deg EwN
si w ≥ w0 .
= d(w)
Démonstration du lemme 21. On construit une suite de ϕ–réseaux itérés N = Nw0 ,
Nw0 − , Nw− , . . . dans V de la manière suivante:
0
0
Si w < w0 et Nw+ est déjà construit, on remplace celui–ci par son transformé
cw0 , w0 ≥ w, puis on recommence autant de fois que
réciproque strict par les W
N0
nécessaire jusqu’à obtenir un ϕ–réseau itéré Nw0 vérifiant deg Ew w > d(w) + 1. Une
telle construction est possible d’après le corollaire 19 du paragraphe 2d.
cw0 , w0 ≥ w, et on recomPuis on remplace Nw0 par son transformé strict par les W
mence autant de fois que nécessaire jusqu’à obtenir un ϕ–réseau itéré Nw vérifiant
deg EwNw = d(w) + 1. C’est possible d’après le corollaire 18 du paragraphe 2d.
Il résulte des propositions 13 et 12 du paragraphe 2c que N 0 = N0+ répond à la
question posée.
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1034
LAURENT LAFFORGUE
Suite de la démonstration du théorème 20 (i). Partant du ϕ–réseau itéré M 0 , nous
allons construire maintenant une suite finie de ϕ–réseaux itérés M n et d’éléments
wn ∈ {1, 2, . . . , r} tels que:
c n )w∈wn désigne la filtration de Vb associée à M n , on a wn ∈ w n et
• Si (W
w
n
c
{Ww , w < wn } = {Vbs , s < wn }.
• Le chtouca dégénéré induit par M n est un chtouca itéré.
• Pour tout élément w de w n , on a
n
si w < wn ,
n
si w ≥ wn .
deg EwM = d(w) + 1
deg EwM = d(w)
n
• Pour tout bon sous–objet A de E M vérifiant EwM
w ≥ wn , on a
n
A
n
EwM+ avec w ∈ w n ,
deg A ≤ d(rg A) ,
et même
deg A < d(rg A)
si
τ
Mn
A + Ew
τ
n
EM .
Le passage du couple (M n , wn ) au couple (M n+1 , wn+1 ) se fait de la manière suivante:
n
On choisit un bon sous–objet A de E M vérifiant
n
EwMn− ⊆ A
n
EwMn
et
deg A > d(rg A)
et qui soit de rang maximal wn+1 parmi ceux satisfaisant ces propriétés. (Il n’est
n
n
EwMn ,
pas nécessaire de se préoccuper des sous-objets A vérifiant EwMn− ⊆ A
Mn
n
τ M
A + E w n−
E
et deg A = d(rgA) car dans nos transformations leur degré
va diminuer automatiquement.) Ce bon sous–objet A correspond à un sous–ϕ–
c nn+1 de Vb compatible avec la filtration (W
cwn )w∈wn . On construit alors le
espace W
w
cwn , w ≥ wn+1 , et on recommence autant de fois que
transformé strict de M n par les W
0n+1
nécessaire jusqu’à obtenir un ϕ–réseau itéré M 0n+1 vérifiant deg EwMn+1 = d(wn+1 ).
Puis on applique à M 0n+1 et wn+1 la construction du lemme 21, d’où un nouveau
ϕ–réseau itéré M n+1 .
Il résulte de la proposition 12 du paragraphe 2c et de la proposition 9 (ii) du
paragraphe 2b que la suite des (M n , wn ) vérifie bien les propriétés annoncées.
La suite des wn est strictement décroissante, donc la construction s’arrête au
bout d’un nombre fini m de pas et on voit que le ϕ–réseau itéré M m répond à la
question posée.
τ
Afin de démontrer la partie (ii) du théorème 20, on a besoin du lemme évident:
Lemme 22. Soient M et M 0 deux ϕ–réseaux itérés de V relativement à des familles
d’entiers d1 , d2 , . . . , dr−1 ≥ 0 et d01 , d02 , . . . , d0r−1 ≥ 0, de types r = (r1 , . . . , rk ) et
r0 = (r10 , . . . , rk0 0 ).
Alors le réseau M 00 = M +M 0 est lui–même un ϕ–réseau itéré de V , relativement
à une famille d’entiers d001 , d002 , . . . , d00r−1 ≥ 0 et d’un type r 00 = (r100 , . . . , rk0000 ).
De plus, si (Vbs )s∈r , (Vbs0 )s∈r0 et (Vbs00 )s∈r00 désignent les filtrations de Vb canoniquement associées à M , M 0 et M 00 et si pour tout entier d, on note sd , s0d et s00d les
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COMPACTIFICATION DES CHTOUCAS DE DRINFELD
1035
plus grands éléments de r, r 0 et r00 respectivement tels que
X
X
X
ds ≤ d ,
d0s ≤ d ,
d00s ≤ d ,
s∈r 0
s<s0d
s∈r
s<sd
s∈r00
s<s00
d
on a Vbs0000 = Vbsd + Vbs00 .
d
d
Démonstration du théorème 20 (ii). Soient donc M et M 0 deux ϕ–réseaux itérés
de V définissant chacun un objet de Chtr,p≤p (Spec A).
On se sert des notations du lemme 22 et particulièrement du ϕ–réseau itéré
M 00 = M + M 0 .
Afin de prouver que M = M 0 , il suffit de démontrer que les deux homomor00
0
00
phismes E M → E M , E M → E M induits par les inclusions M ⊆ M 00 , M 0 ⊆ M 00 ,
sont des isomorphismes ou, ce qui revient au même, qu’ils sont injectifs.
00
Montrons par exemple que l’homomorphisme E M → E M est injectif.
Pour tout entier d, on dispose de deux homomorphismes induits EsMd /EsM− →
00
00
0
0
00
00
00
00
d
EsM00 /EsM00− et EsM0 /EsM0− → EsM00 /EsM00− dont les images engendrent EsM00 /EsM00− en le
d
d
d
d
d
d
d
d
point générique de X ⊗ κA .
00
00
00
00
M
/EsM− le noyau de EsMd /EsM− → EsM00 /EsM00− , EtM
Notons EtM
00 /E 00− le sous–fibré
d
s
00
d
d
d
00
d
0
0
d
d
M
maximal de EsM00 /EsM00− engendré par son image et EtM
0 /E 0− le noyau du composé
s
0
0
d
00
d
00
00
d
00
d
EsM0 /EsM0− → EsM00 /EsM00− → EsM00 /EtM
00 .
d
d
d
d
d
d
Ainsi on dispose de plongements
00
00
M
EsMd /EtM
,→ EtM
00 /E 00−
d
s
d
d
0
0
00
et EsM0d /EtM
,→ EsM00d /EtM
0
00
d
d
00
qui sont des isomorphismes en le point générique de X ⊗ κA , avec donc sd − td =
et s0d − t0d = s00d − t00d .
t00d − s00−
d
Pour tout entier r0 , 0 ≤ r0 ≤ r, notons à nouveau d(r0 ) l’unique entier vérifiant
l’encadrement
p(r0 ) − 1 < d(r0 ) −
r0
deg E ≤ p(r0 ) .
r
Comme M et M 0 définissent des objets de Chtr,p≤p (Spec A), on a pour tout
entier d
0
0
≤ d(td ) , deg EsM0d = d(s0d ) , deg EtM
≤ d(t0d ) ,
deg EsMd = d(sd ) , deg EtM
0
d
d
d’où on tire
00
00
00−
M
00
deg EtM
00 /E 00− ≥ d(sd ) − d(td ) ≥ d(td ) − d(s
d ),
s
d
d
00
00
≥ d(s0d ) − d(t0d ) ≥ d(s00d ) − d(t00d )
deg EsM00d /EtM
00
d
puisque le polygone p est 2–grand et que, d’après le lemme 22 on a nécessairement
et s0d ≤ s00d . De plus, la première [resp. la seconde] inégalité est stricte si
td ≤ s00−
d
00−
[resp. si s0d − t0d = s00d − t00d > 0 et s0d < s00d ]. Or
sd − td = t00d − s00−
d > 0 et td < sd
on a
X
X
00
00
00
deg EsM /EsM− = deg E M = deg E = d(r) =
d(s) − d(s− ) ,
s∈r00
s∈r00
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1036
LAURENT LAFFORGUE
d’où on voit que pour tout entier d:
0
deg EtM
= d(s0d ) ,
0
d
deg EtM
= d(td ) ,
d
00
00
deg EsM00− = d(s00−
d ),
00
deg EtM
= d(t00d ) ,
00
d
d
deg EsM00d = d(s00d ) ,
et
00−
00
sd − td = t00d − s00−
d > 0 =⇒ td = sd , sd = td ,
s0d − t0d = s00d − t00d > 0
=⇒ s0d = s00d , t0d = t00d .
00
Raisonnant par l’absurde, supposons que l’homomorphisme E M → E M ne soit
00
pas injectif. D’après le lemme 22, EsM0 → EsM00 est automatiquement injectif et
0
donc il existe alors un entier d ≥ 1 tel que EsMd−1 → EsM00
EsMd /EsM−
d
Ainsi
M
00
00
→ EsM00 /EsM00− ne
d
d
EtM
on a EsM−
d
d
le soit pas, avec ainsi
s−
d
00
d−1
soit injectif mais que
< td ≤ sd et s−
e = te si e < d.
⊆ EsMd avec deg EtM
= d(td ) d’où nécessairement τ EtM
+
d
d
E s−
= τ E M et
d
M
/τ EtM
∩ E s−
) = deg(EsM− ) + 1 = d(s−
deg(τ EtM
d )+1.
d
d
d
d
00
Mais d’autre part, on a s−
d = sd−1 = td−1 et on dispose de la suite de plongements
suivants entre fibrés de même rang
τ
M
00
EsMd−1 = τ EsM− ,→ τ EtM
/τ EtM
∩ E s−
,→ τ EtM
.
00
d
d
d
d−1
d
00
) = d(t00d−1 ) = d(s−
Comme deg(τ EtM
00
d ), il y a contradiction.
d−1
Ceci termine la démonstration.
Remarque de conclusion. Le théorème 12 du paragraphe 1d résulte du critère valuatif tel qu’énoncé dans le théorème 20 du présent paragraphe: cela se voit en faisant
une récurrence sur le rang r et employant la proposition 7 du paragraphe 1c.
Bibliographie
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3. V.G. Drinfeld, Cohomology of compactified manifolds of F –sheaves of rank 2, Journal of
Soviet Mathematics 46, 1989. MR 89b:11050
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Société Mathématique de France, 1997. CMP 98:07
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of Mathematics 101, 1975. MR 51:510
URA D0752 du CNRS, Université de Paris–Sud, Mathématiques, bât. 425, 91405 Orsay
Cedex, France
E-mail address: [email protected]
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