Risques et opportunités d`investissement dans le nouvel Eldorado
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Risques et opportunités d`investissement dans le nouvel Eldorado
Risques et opportunités d'investissement dans le nouvel Eldorado brésilien Luis Wielewicki 14 janvier 2011 Durant la crise financière de 2008, les investisseurs se sont demandé si la dynamique de croissance des économies émergentes – et plus particulièrement des BRIC (Brésil, Russie, Inde, Chine) – allait s’inverser. Les évènements passés laissaient présager qu’un déclin de l’activité économique aux Etats-Unis et une contraction massive de la liquidité dans les pays développés auraient des conséquences néfastes pour les investisseurs exposés aux marchés émergents. Il n’en a rien été. La crise a pris cette fois-ci un visage positif dans les BRIC et plus particulièrement au Brésil. Ce changement s’explique par le fait que le financement de la croissance économique ne repose plus uniquement sur des flux de capitaux externes, bien que le pays attire encore des volumes d'investissement importants, et ce malgré la hausse récente de la taxe affectant les flux étrangers investis sur la dette en devise locale. La plupart de ces flux de capitaux servent à financer d’importants projets d’infrastructures et à alimenter le marché brésilien des capitaux, le plus important d'Amérique latine. Une manière d'exposer un portefeuille au marché brésilien consiste à investir en obligations souveraines et corporates libellées en dollars. De nombreuses entreprises brésiliennes sont devenues des acteurs incontournables de leur secteur à l'international et leur envergure se reflète dans les pondérations de l’indice JP Morgan Corporate Emerging Market Bond (CEMBI). Dans le secteur pétrolier, Petrobras se situe désormais au deuxième rang mondial en termes de capitalisation boursière tandis que Vale est devenu la deuxième compagnie minière dans le monde. Même si les rendements des obligations corporates ont diminué dans tous les BRIC, les valorisations restent relativement attractives, le rendement de l’indice JP Morgan CEMBI Broad offrant encore, à 6 %, une prime par rapport à celui de l’indice Barclays Credit Index. L'exposition à la dette souveraine peut se faire en dollar comme en devise. Même si les émissions du Brésil appartiennent désormais à la catégorie investissement, elles continuent d’offrir des rendements relativement intéressants, laissant de la marge pour une plus grande compression. L’indice géographiquement diversifié JP Morgan GBI affichait un rendement moyen de 6,25 % à fin septembre, un niveau trois fois supérieur au rendement d’émissions de maturité équivalente dans les pays développés. « Historiquement, les taux d’intérêt plus élevés sur les marchés émergents étaient perçus comme une compensation à l’affaiblissement de la devise locale. Dans les conditions actuelles, lune appréciation des devises émergentes face au dollar semble plus probable. De fait, les investisseurs peuvent à la fois bénéficier de taux d’intérêts plus élevés et d’une appréciation de la devise », indique Curtis Mewbourne, directeur chez Pimco. Les rendements nominaux et réels des bons du trésor à 10 ans libellés en real ressortent encore à 12 % et 7 %. Abondance de liquidité La chute des rendements obligataires dans les pays développés alimente la dynamique d'investissement en direction des pays émergents et du Brésil en particulier. « La liquidité, qui est abondante au niveau mondial, doit bien trouver un point de chute », note Edwin Gutierrez, qui gère pour le compte d'Aberdeen AM un actif de 6 milliards d'euros investis dans les pays émergents. « Les flux entrants au Brésil résultent en partie d’un consensus entre investisseurs à la recherche de rendement. Le nouveau programme d'assouplissement quantitatif de la Réserve Fédérale devrait prolonger le mouvement ». Les autres facteurs de soutien au real reposent sur le niveau du taux directeur de la banque centrale (le taux Selic), qui affiche un écart de 10,75 % par rapport au taux directeur américain, la croissance des réserves en devise du pays ainsi que sur une croissance économique bien supérieure à celles constatées en Europe, aux Etats-Unis ou en moyenne dans le monde. Le Brésil a composé dans le passé avec une inflation galopante et des dévaluations monétaires . Arminio Fraga, qui a dirigé la banque centrale de 1999 à 2002, a contribué à réduire ces risques en imposant une cible d’inflation qui sert toujours de référence actuellement. Depuis, l’inflation a suivi une trajectoire descendante pour atteindre 4,6 % à l’été 2010, un niveau proche de la cible fixée par la banque centrale à 4,5 %. Malgré tout, le niveau de l’inflation a atteint un plus haut de six ans en 2010 (5,91 %). En parallèle, l’administration de Lula a réussi à mettre en œuvre des réformes macroéconomiques qui ont permis d’abaisser l’endettement externe du pays et d’améliorer le profil de maturité de la dette. Le taux Selic a été ramené de 25 % au moment de sa prise de fonction en 2003 à 11 % actuellement. Plus récemment, la banque centrale a réduit ses soutiens au secteur bancaire en remontant les exigences de réserves obligatoires des banques sur leur niveau d’avant crise. A l’inverse de ce qui s’est passé dans les années 80 et 90, les flux de capitaux ont contribué à la croissance des réserves de changes à 260 milliards d’euros. Les grandes banques internationales renforcent par exemple leur exposition au Brésil. En octobre 2010, JP Morgan’s Highbridge AM a finalisé l’acquisition de Gavea Investimentos, un fonds alternatif dirigé par Arminio Fraga qui investit six milliards de dollars sur les pays émergents. Le Brésil va investir massivement dans de nouvelles infrastructures avant d’accueillir la coupe du monde de football (2014) et les jeux olympiques (2016). La plupart des investissements étrangers dans les infrastructures brésiliennes proviennent de Chine, le principal pays étranger à investir dans le pays. Les dirigeants politiques sont restés particulièrement attentifs aux volumes des flux d’investissements directs étrangers et aux flux de portefeuille. Pour Veronica Lares, chef économiste chez EDC Economics, il y aurait des risques de formation d’une bulle sur la valorisation des actifs. Face à l’importance des flux entrants, susceptible de dégrader les comptes courants et d’accélérer l’appréciation d’une monnaie qui s’est déjà renchérie de 37 % depuis début 2009, le Brésil a augmenté pour la deuxième fois d’affilée en octobre 2010 la taxe appliquée aux achats de dette par les investisseurs étrangers. « En rendant la dette moins attractive, la mesure contribue à orienter les investissements vers les actions brésiliennes cotées sur les marchés locaux », indique Luis Wielewicki, associé de Motta, Fernandez, Rocha, un cabinet d'avocats spécialisé dans le capital investissement et les infrastructures. « En revanche, la taxe peut affecter la performance de certaines structures de capital investissement ». Une conséquence inattendue de cette taxe pourrait se traduire par le développement d’un marché obligataire offshore. Le gouvernement brésilien vient toutefois de ramener la taxe de 6 % à 2 % pour les investissements étrangers dans les fonds de capital-investissement et sur une partie des placements boursiers. Une mesure à l'étude pour réduire l’appréciation du real consisterait à relever la limite de 3 % qui affecte l’exposition des fonds de pension brésiliens aux actifs étrangers. La résolution 3792 propose de relever cette limite à 10 %. En cas d'adoption, les fonds de pension locaux pourront financer des projets d'infrastructures via des structures offshores, à condition toutefois d'accepter d'y jouer un rôle de limited partner moins actif. Une éventuelle remontée des plafonds d'investissements dans des fonds étrangers ne signifie pas pour autant que les investisseurs institutionnels brésiliens réorienteront leurs portefeuilles. La part élevée des actifs domestiques dans les portefeuilles des fonds de pension brésiliens leur ont permis de surperformer leurs homologues des pays développés pendant et après la crise financière de 2008. Le principe de diversification des risques, qui pourrait inciter les institutionnels brésiliens à ouvrir plus largement leurs portefeuilles aux actifs étrangers, risque de manquer de persuasion face à l’encrage des pratiques. Une étude réalisée en 2009 par Raphael Braga Silva, Roberto Moreno Moreira et Luiz Felipe Jacques Motta analyse l’impact sur la performance des fonds de pension brésilien que génèrerait l’introduction d’actifs internationaux. L’étude prend en compte la résolution 3456 de 2007 qui permet aux fonds de pension brésilien d’allouer jusqu’à 3 % de leurs actifs en fonds alternatifs internationaux. « Les investissements dans ces classes d’actifs ne déplacent pas significativement la frontière efficiente des fonds de pension », conclut l’étude. « Les résultats ne varient pas significativement que le plafond soit fixé à 3 % comme à 20 % ».