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Bretagne
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AUTOCHROMES 1907-1929
Les mégalithes bretons
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Le mégalithisme en Europe occidentale
Le mégalithisme apparaît au néolithique au Ve millénaire av. J.-C.,
quand les nouveaux agriculteurs-pasteurs se sédentarisent. Ces
monuments sont conçus pour être vus de loin et délimitent le territoire des
différentes communautés villageoises. Ils regroupent deux grands types
architecturaux : les dolmens, ruines de chambres funéraires recouvertes à
l’origine par une colline artificielle en pierre (cairn) et de terre (tumulus), et
les menhirs, monolithes dressés, associés ou non aux dolmens.
Au IVe millénaire av. J.-C., la construction mégalithique se généralise
dans la quasi–totalité de l’Europe occidentale.
À l’âge du bronze vers 1500 avant notre ère, la construction des
mégalithes cesse avec l’adoption de nouvelles pratiques funéraires.
Menhir d’Er Grah, Locmariaquer
Autochrome 9x12, Georges Chevalier, Inv. A 41 098,
Archives de la Planète
© Musée Albert-Kahn
Département des Hauts-de-Seine
Celtes et celtomanie
Menhir Kerscaven, Penmarch
Autochrome 12x9, Georges Chevalier,
Inv. A 21 317, Archives de la Planète
© Musée Albert-Kahn
Département des Hauts-de-Seine
L’interprétation des mégalithes a longtemps été liée à la tradition et à
la mythologie, jusqu’à l’invention de l’archéologie moderne.
Le mot « celte » est un terme employé dans l’Antiquité par les Grecs
pour désigner les populations barbares de l’Europe de l’ouest. Au
XVIIIe siècle, la recherche est dirigée par la linguistique et la période « préhistorique » est assimilée aux temps antédiluviens correspondant à la
chronologie biblique. Le révolutionnaire breton Théophile Malo Corret de
la Tour d’Auvergne (1743-1800) assimile les bretons des mégalithes aux
Celtes dans son ouvrage paru en 1792 et intitulé : Origines gauloises, celles
des plus anciens peuples de l’Europe, puisées dans leur vraie source ou
recherche sur la langue, l’origine et les antiquités des Celto-Bretons de
l’Armorique, pour servir à l’histoire ancienne et moderne de ce peuple et de
celle des Français. Dans ce texte il emploie le mot « dolmen », « table », en
breton : « C’est sur de tels autels que les gaulois au rapport de Diodore de
Sicile, juraient leurs traités, et que les druides sacrifiaient à la divinité,
choisissant le plus souvent les hommes pour victimes. L’énorme pierre qui
couvre ce monument s’appelle en notre langue : dolmen ». Depuis, le
vocabulaire breton est passé dans le français courant pour désigner les
différents mégalithes (dolmen, menhir, cairn...).
La confusion entre néolithique et âge du fer prend de l’ampleur au
XIXe siècle avec l’association du personnage druidique aux mégalithes et se
poursuit encore à travers le célèbre personnage de bandes dessinées
Obélix, le tailleur de menhir à la fois gaulois et breton.
La mode des mégalithes
Le développement du nationalisme et du régionalisme au XIXe siècle correspond à la création de différentes sociétés savantes.
Prouver l’ancienneté d’un peuple ou d’une culture permet d’en accroître le prestige.
Jacques Cambry (1749-1807), commissaire des Sciences et des Arts durant la Période révolutionnaire recense les biens
confisqués dans le Finistère. Il publie par la suite Voyage dans le Finistère et plus tard Monuments celtiques, ou Recherches sur le
culte des pierres, précédées d’une notice sur les Celtes et les Druides, et suivies d’Etymologies celtique en 1805. La même année,
il crée l’Académie celtique, une société savante « celtomane », qui devient la Société Royale des Antiquaires de France en 1814.
C'est aujourd’hui la Société des Antiquaire de France dont le siège est situé au Louvre. Gustave Flaubert, dans son célèbre Par
les champs et par les grèves, rédigé après son voyage en Bretagne de 1847, témoigne des débats passionnés autour des
mégalithes :
« L’amas de toutes ces gentillesses constitue ce qu’on appelle l’ARCHEOLOGIE CELTIQUE […] Pour en revenir aux pierres de
Carnac (ou plutôt pour les quitter), que si l’on me demande, après tant d’opinions, quelle est la mienne, j’en émettrai une,
irréfutable, irréfragable, irrésistible, une opinion qui ferait reculer les tentes de M. de la Sauvagère et pâlir l’Égyptien Penhoët, qui
casserait le zodiaque de Cambry et hacherait le serpent python en mille morceaux. Cette opinion la voici : les pierres de Carnac
sont des grosses pierres ! »
Les fouilles se multiplient pour fournir des objets spectaculaires qui pourront être vus au musée. Le terme « mégalithe » entre
dans la langue française suite au Congrès des préhistoriens de 1867 à Paris. Les sites deviennent des lieux touristiques, d’abord
pour les « antiquaires » (collectionneur d’antiquités), puis pour les premiers touristes voyageant en train. Photographiés et
restaurés, ces monuments se métamorphosent en « principales curiosités » vantées par les guides. Le tourisme entraîne par la
même occasion le développement de l’édition de cartes postales. Entre 1900 et 1926, pas moins de 1 200 cartes postales sont
consacrées aux mégalithes bretons.
Dolmen de Mané-Kerioned
L’ensemble mégalithique du Mané Kerioned comprend
trois dolmens à couloir surmontant les restes d’un grand
cairn, entourés par quatre menhirs qui délimitent le site.
Les termes bretons Mané-Kerioned signifient « butte aux
lutins ». Cette butte artificielle d’environ 40 m de
diamètre est ce qui subsiste du cairn. Le dolmen de
l’ouest est le plus visible, car il est bien dégagé du cairn.
Il est disposé en parallèle à celui de l’est, moins visible,
mais plus important par ses dimensions et son décor
intérieur. Tous deux possèdent une chambre funéraire de
plan trapézoïdal située au bout d’un couloir et dont
l’accès est orienté au sud. Ils entourent un dolmen
central, sans doute antérieur, car son accès orienté à l’est
est interrompu par le dolmen de l’est. Plus petit, il
possède une chambre funéraire de plan quadrangulaire.
L’ensemble mégalithique du Mané-Kerioned a fait l’objet
de plusieurs campagnes de fouilles entre 1866 et 1901
avant d’être restauré en 1921.
Dolmen ouest de Mané-Kerioned, route d’Auray à Carnac,
Morbihan, 14 juin 1920
Autochrome 9x12, Georges Chevalier, Inv. A 21829,
Archives de la Planète
© Musée Albert-Kahn - Département des Hauts-de-Seine
Lexique
Allée-couverte
Galerie funéraire avec entrée axiale, à
chambre longue de largeur constante,
précédée d’un vestibule court et
appartenant au groupe tardif (3e millénaire).
Cairn
Masse monumentale recouvrant une tombe
essentiellement constituée de pierres. Le
même mot donnera aussi naissance au nom
du site : Carnac.
Celtomanie
Mouvement né au XVIIIe siècle, qui se
développe avec le romantisme et qui
considère les Celtes et leur langue comme
les plus anciens au monde. Dans ce courant
intellectuel, les mégalithes sont attribués
aux Celtes et désignés par des mots
empruntés aux langues celtiques modernes,
dont le breton.
Dolmen
Étymologiquement « table de pierre » en
breton, ce terme désigne aujourd’hui un
groupe de sépultures, pourvues d’un
dispositif d’accès direct à la chambre
sépulcrale.
Dolmen à couloir
Type de tombes dont la chambre funéraire
est précédée par un long couloir.
Menhir
Étymologiquement « pierre longue » en
breton, ce terme s'est imposé à l'usage pour
désigner un monolithe dressé. Lorsque la
pierre est travaillée, on emploie le terme de «
stèle ».
Tertre
Nom donné à la masse monumentale
recouvrant une tombe lorsqu'elle est
essentiellement constituée de terre.
Tumulus
Terme latin qui implique l'idée de fermeture
de la tombe. Il est employé lorsque le
mausolée condamne l'accès aux sépultures
qu'il recouvre.

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