interventions du 30 mars

Transcription

interventions du 30 mars
30 mars 2008 :
INTERVENTIONS DU PREMIER TEMPS
La résurrection est au cœur du
message de Paul. Au chapitre 24
verset 15, ne lit-on pas : " J’ai
cette espérance en Dieu et eux
aussi la partagent qu’il y aura
une résurrection des justes et des
injustes", et "Pourquoi juge-t-on
incroyable parmi nous que Dieu
ressuscite les morts ?" (26,8).
Le Christ ressuscité s’est donné à
voir. Il a parlé à Paul pour qu’il
témoigne de ce qu’il a vu et
entendu. Le premier fruit de la
rencontre entre Jésus et Paul est
sa
conversion : "j’ai
fait
enchaîner et jeter en prison des
hommes et des femmes (22), j’ai
apporté mon suffrage quand on
les mettait à mort".
Le dévoilement du péché de Paul
n’entraîne pas sa condamnation
mais un changement de cap. Il
croyait voir, il réalise son
aveuglement, qu’il va vivre
physiquement, et il recouvre la
vue. Sans cette rencontre que
serait devenu Paul ? Aurait-il
continué
à
répandre
la
condamnation et la mort ?
Notre actualité est pleine de récits
de meurtres, de persécutions,
combats fratricides (en ce
moment entre les chiites d’Irak,
ou entre les palestiniens, entre
tibétains et chinois). Cette
résurrection des justes et des
injustes ne serait-elle pas,
d’abord, le refus des classements
en justes et injustes, puisque notre
justice ne dépend pas de nous
mais de la part que nous avons
eue à la résurrection du Christ,
part que nous recevons, mais dont
nous ne sommes pas les auteurs ?
Le refus du jugement entraîne le
refus de la condamnation, des uns
par les autres, sans pour autant
tout niveler refuser de voir les
différences, voire les oppositions.
Brigitte Donzel
Actes 26, 16-18 : "lève-toi et
tiens-toi sur tes pieds, car si tu
m’as vu, c’est que je te destine à
être l’auxiliaire et le témoin de ce
que tu as vu et de ce que tu verras
quand je t’arracherai à ce peuple
et à ces nations vers lesquels je
t’envoie pour leur ouvrir les
yeux".
Fin de parcours. Nous avons lu ce
récit de l’enfance de l’Eglise,
comme il y a un évangile de
l’enfance : un moment où
s’enracine une existence, où
germe une graine sans que l’on
sache comment et sans que l’on
sache les fruits qu’elle donnera.
Cet après-midi encore il me faut
tenter de retenir une phrase et la
relier à l’actualité puisque notre
conviction est que la bonne
nouvelle s’annonce au présent. Ce
n’est pas facile. Car l’actualité, ce
sont moins ces faits divers dont
nous sommes abreuvés que ce qui
travaille les hommes et les
femmes d’aujourd’hui et que
discerner cela ne va pas de soi.
Que puis-je prétendre voir ou
avoir vu, entendre ou avoir
entendu, qui puisse ouvrir les
yeux des nations ? Je me sens
écrasé par l’ampleur de la tâche.
Et puis m’est offert dans Le
Monde du 28 mars, à l’avantveille
de
notre
rencontre
d’aujourd’hui la carte blanche de
Roger-Pol Droit Ce que peut un
homme seul à propos de l’action
Actes, chapitres 21 à 28
du Père Desbois pour garder la
mémoire de "la Shoah par balles",
l’extermination par les nazis d’un
million et demi de juifs,
assassinés au fusil et à la
mitraillette, à la lisière des
villages, sous les yeux de leurs
voisins terrorisés ou complices.
Le Père Desbois ne fait pas de
grande phrase. Il pense, parle et
agit juste car, comme l’écrivait
Wladimir Jankelevitch, "il ne
s’agit pas d’être sublime, il suffit
d’être fidèle et sérieux" .
Ce que peut un homme seul, c’est
ramer à contre courant, découvrir
de l’insoupçonnable, défaire des
pesanteurs, créer dans le flux du
monde d’infimes bifurcations qui
peuvent, de proche en proche, en
modifier de grandes parties. Il me
semble que Paul n’a rien fait
d’autre que d’être fidèle et
sérieux. Que nous pouvons
sûrement nous aussi nous tenir sur
nos pieds et devenir témoins et
acteurs, comme le Père Desbois,
comme tant d’autres.
En tout cas c’est ce que j’ai
entendu !
Michel Donzel
L’un des soucis constants pour un
dirigeant est celui de maintenir
l’ordre dans son pays. C’est une
idée préoccupante pour le succès
de laquelle un chef n’hésitera pas
à mettre en œuvre de grands
moyens.
On peut se demander quelle est la
nature de cet ordre établi et
entretenu : une économie bien
organisée, avec des rouages bien
huilés, des "savoir-faire" divers et
complémentaires, une activité
bienfaitrice chez les citoyens et
1
une obéissance éclairée et
volontaire aux lois ?
Cette vision tient la plupart du
temps de l’utopie.
On constate souvent que l’ordre
n’est
là
qu’en
surface.
L’apparente sérénité, l’absence de
mouvement peut cacher bien des
injustices, des frustrations, des
privations et des brimades. Le
citoyen fait l’éloge du "Prince"
mais en réalité la peur le tenaille
et fait de lui un sujet obéissant et
passif et qui subit son destin. De
son côté, le Prince est sujet à cette
même peur : celle de voir
s’installer des idées nouvelles
conduisant à des récriminations et
au soulèvement du peuple. Moins
visible sous les fastes et l’autorité,
elle n’en est pas moins réelle et
dérangeante. Alors le pouvoir en
place va scruter les résistances,
les moindres protestations et
mouvements, au besoin les
rassemblements ; il va interdire la
liberté d’expression parce que
celle-ci serait susceptible de
délivrer un message contraire au
sien, parce qu’elle pourrait
encourager les citoyens à penser
par eux-mêmes ou à réclamer une
meilleure justice en ce qui
concerne leurs droits.
Et pour cela il faut trouver un
"bouc émissaire", un homme qui
va endosser la responsabilité
d’une émeute possible et qu’il
faut à tout prix éliminer, lui et ses
disciples.
Sans enquête, sans preuve, sans
avoir pris conseil, en se basant sur
des rumeurs, on commence par
"désigner" quelqu’un, puis à faire
une interprétation fallacieuse de
ses paroles, enfin à en prédire les
conséquences
funestes
imminentes. Alors la "peur"
s’installe dans le pays, et la
lâcheté. Alors maintenant on est
capable de s’unir… mais de s’unir
contre quelqu’un. Il y a
convergence des idées, pensée
unique; la parole auparavant
libératrice, celle qui ressuscitait
les corps et les âmes, celle qui
installait la fraternité ou la
compassion, qui appelait la
ferveur et la détermination, qui
conduisait chacun vers sa
réalisation la plus haute, est
maintenant la cause de tous les
échecs et désordres. La rumeur
s’accroît, la calomnie enfle et il
est trop tard pour empêcher la
ruée sur le fauteur de troubles.
C’est ce qui arrive à Paul (Actes
21, 28) : "Voici l’homme qui
prêche partout et à tout le monde
contre le peuple, contre la loi et
contre
ce
lieu …"
et
encore (Actes 24, 5) : "Nous
avons trouvé cet homme : c’est
une peste, un homme qui excite
des troubles parmi les Juifs dans
le monde entier, un chef de la
secte des Nazaréens, et qui même
a tenté de profaner le temple…"
Et maintenant, après avoir
traversé des siècles de vindicte
populaire et pleuré les victimes de
tous les complots, nous voici au
Tibet où, selon l’enchaînement
décrit plus haut, le Dalaî- Lama
vient d’être désigné comme
responsable
des
émeutes
sanglantes, lui le non-violent !
Mais juste avant Paul, à Qui
faisons nous référence je vous le
demande, quel est Celui qui,
assumant à l’extrême le destin de
tous les condamnés, encourant le
châtiment suprême, devient la
figure
de
l’"Agneau",
de
l’"Innocent", du Maître de toute
consolation ?
Viviane Eloffe
Actes 18, 9-10 : "Une nuit, dans
une vision, le Seigneur dit à
Paul : sois sans crainte. Continue
de parler, ne te tais pas. Car je
suis avec toi, et personne ne
mettra sur toi la main pour te
faire du mal, parce que j’ai à moi
un peuple nombreux dans cette
ville".
Après un voyage mouvementé,
avec toutes sortes d’aventures et
de tempêtes - de quoi déchaîner
notre imaginaire ! -, Paul arrive
enfin à Rome. Toujours en liberté
surveillée, il invite des notables
juifs à l’écouter et à débattre, mais
"au moment de se séparer ils
n’étaient toujours pas d’accord
entre eux". Paul leur cite alors
Isaïe : "Vous aurez beau entendre,
vous ne comprendrez pas. Vous
aurez beau regarder, vous ne
verrez pas ; car ce peuple a le
cœur endurci" (Actes 28, 26).
Le chemin du dialogue et de la
confiance est décidément bien
long.
Au Vatican, des fils se renouent
pour préparer un Forum à
l’automne prochain, avec cette
fois-ci
des
responsables
musulmans ; mais le baptême
solennel d’un musulman converti,
à Pâques, par le pape en personne,
a été vécu comme une
provocation,
un
geste
triomphaliste, d’autant plus que le
nouveau baptisé, journaliste, ne
ménage pas l’Islam.
Et pourtant, la semaine prochaine
doit avoir lieu, toujours à Rome,
le premier congrès mondial sur "la
miséricorde* divine". Des Juifs,
des musulmans et des bouddhistes
devraient participer à ce congrès.
Heureux les tolérants … et encore
plus les miséricordieux !
Jean et Geneviève Guyon
* miséricorde : la tendresse d’une mère pour
son enfant. En hébreu, la racine "raham"
(utérus) a donné "rahamin" (miséricordieux).
Osée attribue à Dieu "des entrailles qui
frémissent" (Osée 11, 8).
2
Les
guerres
de religions,
les"guerres saintes", les Jihad, les
croisades ont toujours eu la
préférence des hommes (ou
femmes…) politiques.
La "der de der" était dans notre
imaginaire collectif optimiste, les
affrontements sanglants entre les
catholiques et protestants en
Irlande du Nord, terminés par des
accords entre les deux parties. Les
gens de "bonne volonté" ont
poussé un ouf de soulagement,
mais avant qu’ils aient pu
reprendre leur souffle, les
affrontements ont repris aux
quatre coins du monde, les tueries
des plus en plus sanglantes et de
plus en plus banalisées par leur
aspect quotidien. Aujourd’hui, le
nombre de victimes en Irak, en
Palestine, au Liban, au Tibet, et
j’oublie à dessein l’Afrique…
n’impressionnent plus personne,
et même les présentateurs des
journaux télévisés arrondissent le
nombre des morts ou des blessés à
la dizaine, voire à la centaine
supérieure.
Le moyen le plus sûr de prendre
le pouvoir ou de faire triompher
sa cause (plus ou moins juste aussi juste qu’une guerre peut être
juste …) est devenu l’assassinat,
le plus rentable étant l’assassinatsuicide ou collectif au nom d’une
religion, car là le tueur sera payé
plus tard et dans un autre monde.
En lisant donc les nouvelles du
jour ou en regardant la télévision,
ma pensée revient aux Actes des
Apôtres, chapitre 23, versets 1215, et je me dis qu’en plus de
2000 ans l’homme n’a pas
beaucoup évolué : "Le jour venu,
certains Juifs formèrent un
complot et s’engagèrent par
anathème à ne rien manger ni
boire avant avoir tué Paul. Plus
de
quarante
personnes
participaient à cette conjuration.
Ils allèrent trouver les grands
prêtres et les anciens et leur
dirent : nous nous sommes
engagés par un serment solennel
à ne rien prendre avant d’avoir
tué Paul".
Lucien Hornik
merveilleusement les choses, j’y
ai retrouvé, certes, la tempête et la
mort, mais aussi la foi et
l’espérance. J’ai donc envie de
vous dire : si vous ne deviez lire
qu’un livre dans l’année, lisez le
prix Pulitzer 2008, "La Route de
Mac Carthy". C’est la fin du
monde et l’île promise.
La Manche en hiver lorsque le
vent souffle et qu’il semble que le
jour est définitivement absent est
un superbe lieu de méditation.
C’est là que pensant à notre
rencontre je lisais les Actes des
Apôtres
(27,18-25)
: "Le
lendemain, comme nous étions
toujours violemment secoués par
la tempête, on jetait du fret et, le
troisième jour, de leurs propres
mains les matelots affalèrent le
gréement. Ni le soleil ni les étoiles
ne se montraient depuis plusieurs
jours ; la tempête, d’une violence
peu
commune,
demeurait
dangereuse : tout espoir d’être
sauvés nous échappait désormais.
On n’avait plus rien mangé
depuis longtemps, quand Paul,
debout au milieu d’eux, leur dit :
"vous voyez, mes amis, il aurait
fallu suivre mon conseil, ne pas
quitter la Crète et faire ainsi
économie de ces dommages et de
ces pertes. Mais, à présent, je
vous invite à garder courage : car
aucun d’entre vous n’y laissera la
vie ; seul le bateau sera perdu.
Cette nuit même en effet, un ange
de Dieu, auquel j’appartiens et
que je sers, s’est présenté à moi et
m’a dit : sois sans crainte, Paul ;
il faut que tu comparaisses devant
l’empereur. Dieu t’accorde aussi
la vie de tous tes compagnons de
traversée !"
L’apocalypse a eu lieu. Le monde
(est-ce le monde ?) n’est que
débris noircis couverts d’une
cendre qui ne cesse jamais de
retomber. Un père et son fils (6-7
ans ?) marchent sur ce qu’est
parfois une route, poussant un
caddy chargé d’objets hétéroclites
dont on se demande même
comment ils peuvent assurer un
minimum de survie.
Ce que le père ne lâche pas des
yeux c’est un vieux revolver avec
deux balles. A l’origine il y en
avait trois, de l’une se servit leur
jeune femme et mère.
Ils marchent. Sur leurs gardes
sans arrêt ; regard, écoute : le
monde est retourné à la barbarie,
les quelques survivants sont des
tueurs devenus cannibales. Ils
affrontent le froid éternel, la neige
noire comme la poussière de
charbon,
le
vent
violent,
l’inhumain, mais le père a promis
que de l’autre coté de la montagne
il y avait la mer bleue, le soleil, le
sable chaud …
Alors ils marchent. C’est une
longue odyssée dépouillée à
l’extrême, noyée dans l’attente.
C’est la fin de notre lecture,
l’espoir de soleil devant être
définitivement abandonné, j’ai
ouvert au hasard un autre livre, et
le
hasard
faisant
L’instant vient enfin où le bruit de
la mer traverse l’immobilité de
l’espace, l’enfant ne sait rien de
ce bruit, annonciateur de son rêve.
Il franchit la dernière dune. La
mer est là, bien là, vaste remous
noir parsemé de carcasses
rouillées, une neige grise tombe
toujours sur une poussière de
cendre, le vent de la mer rend le
froid encore plus intense, si
3
possible. Alors le père se couche,
il est allé au bout, comme si le
rêve n’était pas pour l’enfant mais
pour lui, il sait bien ce qu’il doit
faire : il reste deux balles, mais
c’est trop : "Je n’ai pas le courage
de tenir mon enfant mort dans
mes bras". "Marche, petit, gardetoi, tu sauras. Va !".
L’enfant pleure mais va, il ne
quitte pas le revolver ; c’est alors
que de loin il voit un homme, il
sait qu’il doit se cacher, "c’est un
méchant, sûrement un méchant";
pourtant il n’en peut plus, il
s’assoit. Il ne connaît pas la
résignation : il en est atteint.
- Je n’espérais plus te rattraper, dit
l’homme
- Vous n’allez pas me manger ?,
dit l’enfant
- Te manger ?
- Alors vous n’êtes pas un
méchant ?
- Je ne sais pas, peut-être …
- Avez-vous un petit garçon ?
- Oui, un peu plus grand que toi et
aussi une petite fille de ton âge.
Viens !
Et les Actes des Apôtres conclure
(verset 26) : "Courage donc mes
amis. Je fais confiance à Dieu. Il
en sera comme il a dit, nous
devons échouer sur une île".
Odile Hornik
Méditant cette prédication de
Paul, ses accusateurs, sa défense,
les plans divers pour le tuer, et
pour qu’il en réchappe, les juges
qui se le refilent, je pensais à
certains problèmes actuels : cette
économie capitaliste et ce
mondialisme,
qui
peuvent
éloigner de la justice et de
l’écologie, et ces forces de
religions
fondamentalistes,
sources de tant de conflits (Irak,
Palestine, Tibet, …).
Je pensais plus particulièrement à
Magdi
Allam,
journaliste
musulman, connu par ses écrits
dénonçant la violence de l’Islam
(sans analyser ses valeurs de paix
!) converti et se disant prêt à
accepter le martyre…, baptisé par
Benoît XVI la nuit de Pâques.
Quel exemple pour favoriser un
dialogue inter-religieux ! L’état
d’esprit ne me paraît pas le même
que celui de Paul… "à quand
l’époque, me disait un ami au
sortir de la messe de ce matin, où
les chrétiens ne se considéreront
pas comme supérieurs aux
autres ?"…
En cette dernière séance sur les
Actes des Apôtres, j’ai voulu les
relire en entier. Il y a un grand
nombre de déclarations de foi
(Pierre, Paul, …), la conversion
de Paul, les divisions créées par
les discours et les œuvres des
disciples, enfin les tribulations de
Paul. J’ai remarqué d’une part à
quel point les disciples ont leur
cœur ouvert à Dieu et à
l’acceptation de leurs destins, et
d’autre part que ce qui crée la
haine, c’est épisodiquement
l’argent, mais surtout l’orgueil
atteint, lorsque Paul leur dit
qu’ils ne sont pas capables
d’accueillir la Révélation, mais
les païens oui, haine qui va
jusqu’à une grève de la faim
d’une quarantaine d’entre eux, ou
jusqu’à se déplacer jusqu’aux
lieux de détention de Paul.
Geneviève Jacob
Qu’attendre de nos regards, de
nos images ?
Première
image
présentée
presque comme un fait divers : le
jeune homme défenestré, puis
ressuscité par Paul (Actes 20, 712). Je mets en regard deux
images d’aujourd’hui :
- Ingrid Bettancourt et les appels
pressants pour sa libération, et les
offres
de
contrepartie
du
gouvernement Colombien,
- les membres de l’Arche de Noé
qui,
après
leur
lourde
condamnation au Tchad, se voient
offrir leur grâce par ceux-là même
qui les ont condamnés.
Deuxième image : la saga de
Paul poursuivi par delà les
régions et les mers. Paul que l’on
voit devant ses accusateurs,
discourant avec eux, les regardant
tels qu’ils sont, et se donnant à
voir tel qu’il est : disciple du
Ressuscité, sans rien renier de sa
culture, de son passé.
Paul vulnérable (Ac 20, 22-23).
Paul dans la situation "banale" de
l’être humain, qui sait où il va, où
il veut aller, mais ne sait pas ce
qui lui adviendra, sinon les
souffrances et la mort : "Je vais à
Jérusalem sans savoir ce qui m’y
adviendra, sinon que, de ville en
ville, l’Esprit Saint m’avertit que
chaînes
et
tribulations
m’attendent."
Images
des
hommes
d’aujourd’hui, ballottés par les
évènements
(imprévus
et
catastrophes). Quelle confiance,
quelle fidélité bâtir, au delà de nos
images passagères et fugaces
offertes par les medias ?
Qu’attendre aujourd’hui de nos
regards et des images que nous
donnons à voir ?
Qu’attendre par exemple de
l’image forte que serait le boycott
des jeux Olympiques ? Une image
ponctuelle aussitôt oubliée si tout
rentre dans l’ordre ? Un satisfecit
pour
nos
civilisations
occidentales - et la fierté de
pouvoir dire : "nous, on a vu,
nous, on a montré du doigt" ? Ou
encore induire et conforter une
prise
de
conscience
4
"démocratique" du peuple de
Chine ?
N’induirons-nous pas plutôt une
attitude
de
fermeture
et
d’incompréhension - et nous
risquons d’apparaître comme les
éternels "donneurs de leçons" de
l’"impérialisme occidental" ?
Dans les images que nous
promouvons, comment aller vers
un regard de compréhension ? Ce
qui présuppose d’écouter autant
que regarder …
Gérard Jacob
Lorsque je lis les passages retenus
pour aujourd’hui des Actes des
apôtres, je continue à être frappé
par l’intransigeance de la loi juive
et de ses représentants, dont y
compris les apôtres, qui ont fait
partie et intériorisé les préceptes.
On l’avait vu à propos des
aliments et de la circoncision qui
les avait divisés. Ici c’est
beaucoup plus grave puisque il
s’agit de l’arrestation de Paul par
les juifs du temple de Jérusalem,
pour blasphème, hérésie ...
Je suis encore frappé par la
ténacité de la haine de ces juifs,
qui va s’exercer pendant les deux
ans de captivité de Paul à Césarée,
et tenter de profiter du
changement
de
gouverneur
romain pour obtenir enfin sa
condamnation.
Et je voudrais comparer cet
acharnement à celui que subissent
actuellement nos frères chrétiens
dispersés en terres de culture
musulmane : même si des
composantes politiques peuvent
l’expliquer en partie, la loi
religieuse est d’abord invoquée
pour interdire de culte, mettre en
prison, expulser, enlever ou tuer
des familles et des populations
présentes et intégrées dans ces
pays depuis fort longtemps.
Je veux en particulier parler de
l’archevêque
chaldéen
de
Mossoul, Monseigneur Paulos
Rahho, enlevé avec ses gardes du
corps et retrouvé mort et enterré
quinze jours plus tard, alors qu’il
incitait les membres de sa
communauté à ne pas s’exiler au
Kurdistan irakien voisin, irakien
aussi mais moins hostile aux
chrétiens, et prenait bien soin de
se tenir éloigné des querelles
politiques.
Son enlèvement ne faisait
qu’allonger la liste des prêtres
(plus de 20) enlevés en Irak
depuis cinq ans pour des raisons
religieuses autant parfois que de
sordide rançon.
Je veux aussi parler des prêtres
emprisonnés en Algérie au
prétexte d’avoir célébré un culte
alors que la nouvelle loi en
restreint
encore
les
lieux
possibles.
En reprenant le parallèle avec
Paul, on y voit que la
communauté des chrétiens de
Césarée a certainement apporté
son soutien, son réconfort et son
aide à Paul durant sa captivité. En
comparaison, où est l’aide de nos
communautés d’occident, où est
leur, et notre, protestation face à
ces mauvais traitements ?
Certes Régis Debray a réuni tout
un colloque sur le sujet, Pax
Christi a organisé des "Pâques
avec les chrétiens d’Orient" sur
l’initiative de l’évêque de Troyes,
mais
récemment, Jacques
Julliard, dans le Nouvel Obs (un
paradoxe !) s’étonnait de nos
silences d’occidentaux. Dans nos
mentalités "bien élevées", il
semble qu’il soit plus facile de se
mobiliser pour défendre des
membres d’autres communautés
(juives ou musulmanes par
exemple) que de défendre les
nôtres propres !
Comme dit Jacques Julliard,
avons-nous à ce point honte de
nos origines que cette persécution
dont sont victimes les chrétiens
dans une bonne trentaine de pays
dans le monde, nous laisse
indifférents ? Paul, lui, à temps et
à contretemps, devant les juifs,
puis devant les plus hautes
autorités
romaines
locales,
n’arrêtait pas de plaider sa cause,
de se justifier et de témoigner. Et
nous ?
Henri Juilliard
Les derniers chapitres des Actes
sont consacrés à l’arrestation de
Paul, à ses comparutions devant
les autorités juives et romaines et
à son dernier voyage.
A plusieurs reprises dans ces
chapitres Paul s’affirme comme
témoin de Jésus Christ devant les
juifs et les païens, dit sa foi à
Jésus Christ fondée sur ses
rencontres avec Lui. Et le
comportement de Paul est résumé
dans les versets 28,30 et 31 : Paul
"recevait tous ceux qui venaient le
trouver proclamant le Règne de
Dieu et enseignant ce qui
concerne le Seigneur Jésus Christ
avec une entière assurance et
sans entraves".
Qu’en est-il dans le monde
contemporain ?
Combien de chrétiens sont
empêchés de témoigner de leur foi
en Jésus Christ ? Je pense
notamment aux chrétiens d’Irak
condamnés à l’exil et même
martyrs pour certains.
Combien de chrétiens n’ont pas
l’assurance de Paul et n’en
continuent pas moins à témoigner
de l’amour pour leurs frères ? Je
pense
en
particulier
aux
confessions bouleversantes de
Mère Teresa qui a vécu pendant
quarante ans dans le doute tout en
5
continuant son œuvre dans les
bidonvilles du Caire comme avant
elle Thérèse de l’enfant Jésus
dans son couvent.
Et si je me livre à l’introspection,
je me demande si et quand j’ai été
témoin, si j’ai su dire ma foi en
Jésus Christ et si j’ai été capable
de le faire avec assurance ?
Alain Lockhart
Paul sait qu’il risque sa vie en
annonçant Jésus-Christ, mais qu’il
a le devoir de le faire comme le
lui demande le Seigneur "Je t’ai
destiné à être serviteur et témoin
de la vision où tu viens de Me voir
ainsi que des visions où Je
t’apparaîtrais encore" (Actes
26,16). Il dit de lui-même
quelques versets plus loin dans le
même chapitre "Fort de la
protection de Dieu jusqu’à ce
jour, je continue donc à rendre
témoignage devant petits et
grands" (Actes 26,22).
Après l’assassinat ces jours-ci de
Mgr. Rahho, archevêque chaldéen
de Mossoul, Mgr. Casmoussa,
archevêque syrien catholique de
cette même ville a le courage de
dire : "En janvier 2005, j’ai moimême été enlevé, puis relâché. Je
relis aujourd’hui mon expérience
à la lumière de ce martyre. Je le
sais, je peux être repris à chaque
instant. Pourtant, il me faut
continuer ma mission, je n’ai pas
le droit de me décourager ! Nous
avons
des
responsabilités
pastorales, nous devons continuer
à témoigner pour encourager le
peuple et lui donner des raisons
de vivre".
Anne-Marie Lockhardt
Actes 22, 24-29 : (à Jérusalem),
Le tribun militaire ordonna de le
faire entrer (Paul) dans la
forteresse et de le fouetter pour le
faire parler, afin de savoir pour
quel motif on criait ainsi contre
lui. Comme on l’attachait avec
des lanières, Paul dit au
centurion qui était là : vous est-il
permis de fouetter un citoyen
romain
qui
n’est
pas
condamné ?... Ceux qui devaient
le faire parler s’éloignèrent, et le
tribun prit peur, comprenant que
c’était bien un citoyen romain
qu’il avait fait lier.
Palestine aujourd’hui : C’est le
même pays sous une autre
occupation avec des occupants
protégés par leur citoyenneté et
des occupés sans droits reconnus
et que l’on peut soumettre à la
torture. Je lis en ce moment le
livre de Sari Nusseibeh qui vient
de paraître “Il était un pays, une
vie en Palestine”. L’auteur,
professeur
à
l’université
palestinienne de Bir Zeit, est très
attaché à la non violence et
s’efforce de la promouvoir.
Le même jour où je relisais le
récit de l’arrestation de Paul dans
les Actes, je lisais ceci dans son
livre : “Les récits sadiques dignes
de l’Archipel du Goulag que mes
étudiants me rapportaient des
interrogatoires me stupéfiaient
plus encore que le reste.
J’entendis parler de chocs
électriques aux organes génitaux,
de bastonnades à coups de
matraques ou d’attaques par des
chiens - lorsque les israéliens ne
secouaient pas les prisonniers par
les revers de leurs vestes jusqu’à
ce qu’ils perdent connaissance…
Ils me décrivirent en détail les
poux, les rats, la nourriture rance,
les murs tachés d’excréments, les
douches glacées… un étudiant me
confia avoir été cloué dans un
cercueil des jours durant.”
Fred Lucas
Actes 28, 25-27.
Avant qu'ils ne se séparent, en
désaccord les uns avec les autres,
Paul eut un seul propos :
Le Souffle saint a bien parlé à vos
pères par Isaïe le prophète, avec
ces mots : "va vers ce peuple et
dis-lui : Vous écouterez de vos
oreilles, vous ne comprendrez
pas. Vous regarderez de vos yeux,
vous ne verrez pas. Car ce peuple
a le coeur endurci. Ils sont
devenus durs d'oreille, ils se sont
bouché les yeux pour ne pas voir
de leurs yeux, ne pas entendre de
leurs oreilles, ne pas comprendre
avec leur coeur, ne pas se tourner
vers Dieu MAIS
JE LES
GUERIRAI!"
En fermant les yeux, je vois Paul
venir vers moi et me dire :" Il me
semble que ton Eglise, comme la
mienne il y a bien longtemps, est
devenue sourde et aveugle". Il a
mille fois raison....
Quelques évènements récents le
prouvent : courant 2007 a eu lieu
à Paris, à l'initiative de l'Oeuvre
d'Orient, un colloque sur les
chrétiens d'Orient, grave sujet qui
nous interpelle tous, y compris la
"hiérarchie". Les évêques de
France y avaient été invités. Ils
n'ont pas jugé utile de se déplacer
... En ce début 2008 une grande
opération œcuménique "Pâques
avec les chrétiens d'Irak" est
lancée. Le 12 Février, l'écrivain
Jean d' Ormesson lit, à l'église
Saint-Eustache, un appel à la
solidarité. Le dimanche des
Rameaux, toujours à SaintEustache a lieu une messe
télévisée pour et avec les
chrétiens d'Irak. Les paroisses et
les communautés chrétiennes sont
invitées à vivre les célébrations de
la semaine sainte dans une
communion avec leurs frères
chrétiens d'Irak.
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Silence radio du côté de
l'archevêché de Paris ...
Dans notre doyenné, depuis 10
ans, nous avons célébré le
Vendredi Saint avec nos frères
protestants. Il se trouve que
depuis deux ans, le doyenné s'est
agrandi de trois paroisses dont
l'adhésion à l'œcuménisme est
loin de faire l'unanimité. En
janvier pourtant, à l'occasion de la
semaine de l'unité des chrétiens,
une célébration œcuménique a eu
lieu dans une de ces paroisses,
très belle célébration, public
nombreux, remerciements émus
du curé du lieu. Mais pour le
Vendredi Saint, chacun restera
chez soi ... Évidemment, la
décision a été prise entre "curés"
sans concertation, ni avec le
groupe œcuménique, ni avec les
conseils pastoraux. A une
paroissienne qui lui a écrit,
l'évêque a répondu qu'il y avait eu
en janvier dans le diocèse 18
célébrations oecuméniques et que
ça
suffisait !
Le
groupe
oecuménique a demandé aux
curés de le rencontrer ; pour
l'instant pas de réponse à cette
demande ...
Comment rester optimiste? Il me
semble entendre Paul murmurer :
"la dernière phrase d' Isaïe ne
contient-elle pas une note
d'espérance?
JE
LES
GUERIRAI..." C'est vrai.
Alors basta! l'ambiance morose.
En avant! Tous ensemble nous
pouvons changer le monde.
Gaby Lucas
Y a-t-il quelque chose de changé
dans le monde oriental depuis
près de vingt siècles ? Le petit
noyau des "chrétiens d’Irak" ne
fait-il pas penser aux premières
communautés "chrétiennes" de
Syrie ?
"Les tensions communautaires à
Kirkouk s'intensifient de jour en
jour. Dans cette ville pétrolière du
nord de l'Irak où Kurdes, Arabes
sunnites et chiites, Turkmènes se
divisent sous la pression des
extrémistes, les 12 000 chrétiens
semblent perdus et oubliés. Tous
les habitants sont victimes
d'attentats
et
d'enlèvements.
Cependant, comme les groupes
terroristes sont islamistes, les
chrétiens sont la cible de tous.
Plus de 50 % ont déjà quitté la
ville."
"Nous avons confiance en Dieu",
affirme Mgr Georges Casmoussa,
archevêque syrien-catholique de
Mossoul, nous nous efforçons de
faire entendre sur cette terre la
parole du Christ, depuis
le
Ier siècle. … Nous ne céderons
pas à ceux qui nous terrorisent et
qui nous chassent." (reportage de
Laurent Larcher, envoyé spécial
de la Fédération Française de la
Presse Catholique, accompagnant
la délégation catholique française
à la rencontre des chrétiens
d’Irak).
"Dans le débat qui divise
aujourd'hui les chrétiens irakiens faut-il partir ou rester ? Mgr Rahho, prêtre ordonné en
1965, avait, lui, choisi de rester.
Non seulement pour ne pas céder
aux pressions des terroristes mais
aussi pour maintenir la présence
de l'Église. Pour ne pas
abandonner, enfin, les chrétiens
demeurés sur place. Choix
exigeant : la moitié des chrétiens
de Mossoul ont à ce jour quitté la
ville et, depuis 2003, plus de 20
prêtres ont été enlevés.
Lors de leur rencontre du
13 février,
Mgr Rahho avait
ensuite conduit Mgr Stenger
devant une tombe, dans la
sacristie de l'église de Karemles,
celle du P. Rajhid Ganni, enlevé à
Mossoul et égorgé en juin 2007 :
"Il est mort en martyr" avait dit
Mgr Rahho à Mgr Stenger. C'est
pour notre communauté une
grande perte mais aussi un grand
témoignage. Abuna Rajhidnous
encourage à rester sur cette terre
chrétienne depuis le Ier siècle de
notre ère".
Bouleversé par l'annonce de sa
mort, Mgr Stenger pouvait donc
confier : "En disant ces paroles, je
sentais que Mgr Rahho parlait
également de lui... qu'il était prêt à
offrir sa vie pour ses convictions,
pour sa foi." (Laurent Larcher, La
Croix, 14 mars 2008).
De même, imaginons-nous à
Jérusalem à notre époque : un
homme, un peu exalté ("j’étais
fanatique pour Dieu", Actes 22, 3,
"j’étais tellement enragé contre
eux que je les poursuivais jusque
dans les villes hors des frontières"
(Actes 26, 11), comme peuvent
l’être les Juifs intégristes, mais
bon orateur, tient à tout prix à
convaincre ses voisins musulmans
de la vérité de sa religion : il tente
de gravir les marches qui montent
au temple ; les gardes l’arrêtent.
La
foule,
composée
de
musulmans pèlerins, ameutée
comme à chaque fois qu’il y a une
arrestation,
crient :
"voici
l’homme qui prêche partout
contre le peuple, contre la Loi et
contre le Lieu Saint. Maintenant il
est venu profaner le Lieu Saint
…" (Actes 21, 28).
Il n’est pas question, à proprement
parler, de racisme dans les
derniers chapitres des Actes, mais,
à coup sûr, d’intransigeance et de
non acceptation de la différence :
les païens sont considérés comme
des ennemis par les Juifs, ce qui
entraîne l’arrestation de Paul : "Le
Seigneur m’a dit : Pars, je
t’envoie au loin, vers les païens !
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Jusqu’à cette phrase, on avait
écouté Paul. Mais alors ils se
mirent à crier : Débarrassez le
monde de cet individu, il n’a pas
le droit de vivre !" (Actes 22, 2122).
Mais, lors de la belle matinée de
Pâques, une lumière "a jailli du
tombeau" en écoutant l’émission
Kriss Crumble à midi : L'UNE
JUIVE
L'AUTRE
ARABE,
Isabelle Wekstein-Steg, avocate
d'affaires, et Souad Belhaddad,
journaliste écrivain, en plus
d'exercer leurs professions, vont
depuis deux ans dans les collèges
et lycées de banlieue mettre les
jeunes face à leur propres
contradictions et combattre leurs
préjugés en jouant sur les
stéréotypes. Ainsi découvrent-ils
qu'ils peuvent être à la fois
victimes du racisme, et auteurs !
Enseignants
et
élèves
en
redemandent au point qu'elles
créent une association "LE
VERBE ET LA LOI" avec l'idée
de
faire
des
émules.
([email protected]).
Thérèse Masson
J’écoute une émission à la radio ;
les tabous : la sexualité et le
handicap mental, comment faire
l’accompagnement à la vie
affective
et
sexuelle
des
handicapés mentaux vivant en
institution.
Une belle histoire est racontée.
C’est le médecin directeur du
foyer de vie lillois "Altitude",
José Pagerie, qui raconte l’histoire
de Louis, 45 ans, enfant placé,
adolescent fugueur, séjournant en
institution
et
en
hôpital
psychiatrique en alternance, avant
d’arriver au foyer d’Halluin pour
apprendre à vivre seul, en
appartement. Il s’échappe de
temps en temps, vient à Paris, se
clochardise. Incapable de faire le
chemin de retour, quand il est au
bout du rouleau, il montre
l’adresse du foyer qu’il a dans son
porte clé.
Après un long travail, le directeur
arrive à lui faire dire pourquoi il
part : il veut voir les femmes, il
veut aller chez "les femmes
bordel", comme il dit. Le
directeur décide de l’accompagner
personnellement, ils vont à Paris,
trouvent des femmes, mais il se
fait rejeter à plusieurs reprises du
fait de son apparence, de son
langage, du peu d’argent qu’il a.
Le directeur insiste.
Et une fois, ça marche, une
femme s’adresse à Louis
directement et pas au directeur.
Elle lui demande comment il
s’appelle, il répond, la transaction
se fait avec le médecin directeur
qui est chargé de dire de combien
d’argent dispose Louis pour payer
et Louis et la femme repartent
ensemble. Le directeur attend
dans un bistrot à coté, il avoue
qu’il a eu peur pour Louis
"comme si c’était son enfant qu’il
amenait pour la première fois à la
maternelle". Ils reviennent 40
minutes après, la main dans la
main. La femme dit que comme
maîtresse elle peut assurer que ça
s’est bien passé. Louis est content
et dira plus tard : Tu vois,
maintenant je suis un grand, un
adulte !
Depuis 5 ans, Louis va voir cette
femme, qui n’est plus un "femme
bordel", qui est devenue sa
femme, Louis ne s’échappe plus,
il reste très discret au sein du
foyer sur ses voyages à Paris. Le
médecin directeur dit : "Il faut
aller au bout des choses. A 40 ans
un homme est formaté, mais il
peut avoir une autre vie, s’il a la
force de se relever. C’est cette
femme, qui l’a fait grandir, en
s’adressant à lui directement et en
lui demandant son prénom, elle
lui a rappelé sa condition, sa
vocation humaine à se tenir
debout".
Dans le troisième récit sur la
vocation de Paul, chapitre 26,
verset 16, il n’est plus question de
"lumière aveuglante" ni de perte
et recouvrement de la vue, comme
dans les deux récits antérieurs.
L’emphase est mis sur la mission,
mais avant de la lui confier, le
Seigneur donne un ordre, très
fort, à Paul : "Mais relève-toi et
tiens-toi debout", conditions
indispensables, se tenir debout
dans la dignité, être éveillé pour
accomplir la mission qui va lui
être confiée, aller ouvrir les yeux
et les oreilles des peuples des
nations.
Maria-Elvira Pecqueur
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