Seydou Keïta, un géant africain de la photo - Magnin-A

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Seydou Keïta, un géant africain de la photo - Magnin-A
Seydou Keïta, un géant africain de la photo
Expositions - Modifié le 08/04/2016 à 15:29 | Publié le 08/04/2016 à 15:29
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À droite, Seydou Keïta par lui-même, en 1959. Et trois portraits réalisés dans les années 1950,
à Bamako. | Seydou Keïta, SKPEAC. Courtesy CAAC, The Piggozi Collection, Genève.
Pascale VERGEREAU.
Dans les années 1950-1960, tout Bamako se pressait chez
ce photographe autodidacte. Ses somptueux portraits en
noir et blanc sont exposés à Paris.
Photographier ses clients devant un mur blanc ? Jamais Seydou Keïta (1921-2001) n'aurait pu
faire ça ! « Ce n'est pas respectueux », jugeait-il. Il les faisait toujours poser devant un fond
en tissu. L'un de ces imprimés batik aux couleurs éclatantes, originaires d'Indonésie, dont
l'industrie s'est développée en Afrique.
Sur ses clichés en noir et blanc, leurs motifs produisent d'époustouflants carambolages
graphiques avec ceux des robes de ses modèles.
« Ce n'était pas volontaire », assure l'artiste, sur une vidéo du Grand Palais, qui expose 238
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de ses photos. Entre 1945 et 1960, époque à laquelle la plupart ont été réalisées, à Bamako
(Mali), les films en noir et blanc étaient introuvables. Le papier était rare et cher. Alors il ne
faisait qu'une seule prise. Son style est lié à une nécessaire économie de moyens. Mais pas
seulement.
« Un œil extraordinaire » « Keïta était doté d'un œil, d'un sens de la composition
extraordinaires », juge Yves Aupetitallot, commissaire de l'exposition. L'homme était un
autodidacte pourtant, apprenti menuisier quand son oncle lui a offert son premier appareil
photo.
Côté technique, « il a bénéficié des conseils de son voisin, le photographe Mountaga
Dembélé ». Côté références visuelles, « il n'a rien dû voir d'autre que des cartes postales
reproduisant des photos coloniales. Ces images représentant les Africains de face, non
pas pour eux-mêmes mais en tant que représentants d'une ethnie… »
L'art de Keïta marque la fin de ces codes odieux. Il a développé la pause de trois-quarts,
sublimé les femmes dans des attitudes d'odalisques. On se bousculait à la porte de son studio,
près de la gare de Bamako. Les jeunes surtout. Il les faisait poser en mettant à leur disposition
son scooter, sa voiture, un transistor ou des vêtements occidentaux. « C'était un marchand,
indéniablement, mais il aimait les gens, voulait les rendre beau. »
En 1963, l'un des plus grands portraitistes du XXe siècle a fermé son studio pour devenir
photographe officiel de la jeune République du Mali, ex-Soudan français. « On ne dispose
d'aucun film de cette période », regrette Yves Aupetitallot.
Ni de la série de photos de clients du magasin Tati de la rue de Rennes, à Paris, qui lui a été
commandée dans les années 1990, après la redécouverte de son travail des années 1950-1960.
Le mystère fait aussi partie de sa magie.
Jusqu'au 11 juillet au Grand Palais, à Paris. Plus d'informations sur le Grand Palais.
http://www.ouest-france.fr/culture/arts/expositions/seydou-keita-un-geant-africain-de-la-photo4149160
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