Un dictionnaire européen des produits autorisés

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Un dictionnaire européen des produits autorisés
Industrie Europe
Pharmacovigilance
Un dictionnaire européen
des produits autorisés
Afin de mieux protéger la santé des patients européens, la législation impose aux laboratoires
de soumettre un premier “pool” de données à l’EudraVigilance Medicinal Product Dictionary
(EVMPD) avant le 3 juillet 2012. Le compte à rebours a déjà commencé.
caments : l’EudraVigilance Medicinal
Product Dictionary (EVMPD). La loi
prévoit effectivement que l’EMA établisse et tienne à jour une liste de tous
les médicaments autorisés au sein des
pays de l’Union européenne. Et ce,
quelle que soit la procédure d’enregistrement choisie (procédure nationale, centralisée ou de reconnaissance
mutuelle). Cette base constitue le
point de collecte unique de toutes les
informations de pharmacovigilance
provenant des détenteurs d’AMM et
des autorités compétentes nationales.
Elle doit être consultable par le public
avec « un niveau d’accès approprié ».
DR
Améliorer la détection des
signaux de pharmacovigilance
Olivier
Depardieu,
partner chez
Oxo Pharma :
« La loi impacte
les données sur
les médicaments,
mais aussi les
systèmes et
les processus
de gestion de
l’information. »
I
ls n’ont plus que quatre mois pour
se conformer à la première partie
de la nouvelle réglementation européenne en matière de pharmacovigilance. Celle-ci entrera en vigueur le
3 juillet 2012, sous une forme allégée
par rapport à la version initiale, en
raison d’un fort lobbying des industriels et des fabricants de logiciels.
Quatre mois pour finir de réunir, valider et gérer les données additionnelles
que leur réclame l’European Medicine Agency (EMA), afin d’enrichir
le “dictionnaire” européen des médi-
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pharmaceutiques - mars 2012
Créée en 2004 et hébergée par l’EMA,
la base collige tous les effets indésirables
graves survenus avec des médicaments
en cours d’essai clinique ou autorisés
sur le sol européen. « Il s’agit d’une part
d’assurer le bon fonctionnement de la
base de données existante et de permettre de délivrer à tout patient européen des informations exhaustives sur
les médicaments. D’autre part, nous envisageons qu’à moyen terme (2015 ?), il
n’existe qu’une seule base de données de
pharmacovigilance en Europe, gérée par
l’EMA, et non plus de multiples bases
de données nationales », explique Erick
Gaussens, responsable scientifique de
ProductLife (voir encadré). Mais ce sujet, très politique, est encore largement
controversé.
« Le premier volet de cette loi concerne
la transparence sur les risques éventuels
encourus par les patients lors de l’usage
d’un médicament, poursuit-il. Le second confère l’obligation aux labos de
mettre en œuvre une vigilance accrue
et une anticipation du profil de sécurité des médicaments. Son principal
enjeu : permettre aux autorités de santé
de mieux surveiller les spécialités thérapeutiques sur le marché et faciliter une
détection plus rapide des signaux de
Oxo Pharma et ProductLife unissent leurs forces
C’est précisément pour relever cette problématique complexe qu’Oxo Pharma et ProductLife associent leurs compétences en proposant un programme
en trois phases (diagnostic «EVMPD readiness» d’une semaine, puis phase de
taskforce pour être prêt en juillet 2012 et, enfin, une phase de mise en place
de processus robustes). ProductLife est le spécialiste de la réglementation,
de la gestion de données et de l’outsourcing de certains processus dans les
domaines de la R&D. Oxo est le spécialiste des organisations, du développement de la transversalité R&D-opérations industrielles et de l’accompagnement au changement lors d’évolutions organisationnelles.
DR
L’exemple de GSK
Soizic Courcier, directeur médical
et des affaires réglementaires de GSK
France.
pharmacovigilance. Cette base, en place
depuis 2004, n’était imposée qu’aux
produits autorisés en procédure centralisée jusqu’à l’été dernier, date à laquelle
l’EMA a promu une directive rendant
obligatoire la contribution des laboratoires à ce dictionnaire. »
Quinze rubriques à remplir
Chaque laboratoire doit ainsi concourir à la mise à jour de l’EVMPD selon
un format normalisé et des standards
définis par l’autorité, le format de soumission électronique des informations
sur les médicaments nécessitant bien
entendu une terminologie commune
pour tous les produits et tous les pays.
Quinze rubriques, accessibles à tous,
sont à compléter. Elles comprennent
la désignation du médicament, la
DCI, la classe thérapeutique, le titulaire de l’AMM, la personne qualifiée
responsable de la pharmacovigilance,
l’indication(s) thérapeutique(s), les description et caractéristiques de la substance active, des excipients et des
adjuvants, le dosage, la forme pharmaceutique, la voie d’administration, la
description du packaging, la copie électronique du RCP1 et de l’autorisation
d’ouverture du site de la libération, des
conditions de l’AMM, de la notice et de
l’étiquetage. « Les laboratoires doivent
consolider, formater et déclarer plusieurs
centaines d’items pour chacun de leurs
« Depuis la publication de la directive 2010/84/UE, nous nous préparons en
interne à répondre aux exigences de la loi. Un groupe de travail impliquant
les filiales a été mis en place au niveau de l’Europe, explique Soizic Courcier,
directeur médical et des affaires réglementaires de GSK France. Les services
concernés sont surtout les affaires réglementaires et la pharmacovigilance.
En ce qui concerne le portail Web, de nombreuses informations devront être
fournies telles que les détails sur la substance active, le résumé des caractéristiques du produit… L’EMA a récemment publié des informations sur le
format et les données demandées. Compte tenu de leur complexité, l’ensemble des données n’est pas requis dès le 3 juillet 2012. La deuxième vague
devra être mise à disposition fin 2012. Cela laisse un peu plus de temps aux
industriels pour s’organiser et collecter certaines informations. Pour répondre
aux exigences de l’EMA, nous avons toutefois dû faire progresser notre
système d’information sur nos produits pour pouvoir être compatible avec
la base européenne et permettre la soumission électronique dans le format
exigé par l’EMA. En interne, nous accomplissons donc un travail important
de renseignement de notre base. Cette directive a un impact très important
en termes de charge de travail pour nos équipes (affaires réglementaires et
pharmacovigilance). Et nous avons dû nous organiser pour répondre à ces
nouvelles directives tout en assurant le travail habituel. »
produits », souligne Erick Gaussens. Et
surtout, ils doivent mettre en place des
modes de fonctionnement permettant
de maintenir ces informations à jour
tout au long du cycle de vie du produit,
soit quinze à trente ans.
« Le challenge est très important, renchérit Oliver Depardieu, partner chez
Oxo Pharma. Non seulement les laboratoires doivent réunir ces données et les
valider, mais ils doivent aussi développer
une transversalité beaucoup plus importante entre les départements, autour de
la gestion de l’information produit, pour
garantir une mise à jour permanente. »
De nombreux services
impliqués
Vis-à-vis de l’autorité européenne,
l’obligation porte sur le responsable
pharmacovigilance européen du laboratoire (EUQPPV). Or, sur les 269 items,
20 à 30 % sont à fournir par les affaires
réglementaires. Pour les autres, les informations proviennent des départements
développement, supply chain ou des
sites de production… De plus, toute
modification doit être déclarée sous
quinze jours afin d’actualiser la base
en continu. Il est important de noter
que le nouveau contexte réglementaire
accentue significativement le rôle et les
responsabilités de l’EMA, en particulier
en matière de Rapports périodiques actualisés de pharmacovigilance (RPAP).
C’est l’un des documents les plus importants dans la vie d’un médicament,
car il permet de revoir régulièrement son
profil de sécurité.
« L’impact de cette loi concerne non seulement les données elles-mêmes, mais
aussi les systèmes d’information, qui
doivent mieux communiquer entre eux,
et les processus de gestion de l’information, estime Olivier Depardieu. Inévitablement, les organisations vont être
impactées. Le département pharmacovigilance va voir naître de nouveaux
métiers. L’accroissement du besoin en
ressources va amener des démarches de
productivité, voire d’externalisation de
certaines activités. Le délai imposé sur la
transmission d’information à l’autorité
va obliger toutes les fonctions concernées par le produit à mieux communiquer entre elles, et donc à revoir leurs
modes de fonctionnement. » Contrainte
supplémentaire pour les laboratoires,
cette réglementation sera, à terme, une
réelle valeur ajoutée dans le support des
activités de pharmacovigilance, de gestion des risques et dans la stratégie suivie
pour garantir la protection de la santé
publique dans l’UE. n
Brigitte Postel
(1) Résumé des caractéristiques du produit – RCP.
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mars 2012 - pharmaceutiques