aucune forme de résiliation n`est édictée par l`article L
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aucune forme de résiliation n`est édictée par l`article L
ACTUASSURANCE – LA REVUE NUMERIQUE EN DROIT DES ASSURANCES Publication n° 18 Novembre Décembre 2010 Cass. 1re civ., 7 octobre 2010, n° pourvoi : 09-16673, Non publié au bulletin Contrat - Aliénation de la chose assurée – Résiliation – Faculté appartenant à l’assuré Exercice - Modalités prévues par l’article L. 113-14 - Autre forme possible - Acceptation de l’assureur Observations : En vertu de l’article L. 121-10 du Code des assurances, en cas d'aliénation d'un bien, l'acquéreur dispose de la faculté de résilier le contrat d'assurance garantissant ledit bien qui doit s'exercer en principe selon les modalités précisées par l'article L. 113-14 du même code. Néanmoins, l'assuré peut résilier son contrat dans une forme autre à la condition d'être acceptée par l'assureur. Si l’article L. 121-10 du Code des assurances prévoit un transfert automatique du contrat d’assurance à l’acquéreur en cas d’aliénation de la chose assurée, et donc une continuité de plein droit du contrat, il réserve également la possibilité à l’assureur comme à l’acquéreur, nouvel assuré, de résilier le contrat d’assurance. Lorsque ce dernier entend exercer sa faculté de résiliation, doit-il respecter un formalisme sous peine de résiliation irrégulière ? L’article L. 121-10 n’édictant aucune forme particulière, il faut alors considérer que l’article L. 113-14 du Code des assurances, visant « tous les cas où l’assuré a la faculté de demander la résiliation », est applicable. Celui-ci prévoit que la résiliation peut être faite « à son choix, soit par une déclaration faite contre récépissé au siège social ou chez le représentant de l’assureur dans la localité, soit par acte extra-judiciaire, soit par lettre recommandée, soit par tout autre moyen indiqué dans la police ». Ainsi, la résiliation dépend de la seule volonté de l’acquéreur mais elle reste formelle, l’acquéreur devant utiliser un des moyens limitativement énumérés pour que cette résiliation unilatérale discrétionnaire soit valable. Ainsi, il a été jugé que l’acquéreur d’un hôtel particulier avait, dans une lettre adressée à l’assureur, clairement exprimé sa volonté de résilier la police concernant cet immeuble sans faire dépendre la prise d’effet de la rédaction d’un avenant, non applicable en l’espèce (Cass. 1re civ., 13 févr. 1979, n° 77-11185). De manière plus générale, les parties n'ont de possibilité de résilier unilatéralement le contrat d'assurance que dans les hypothèses prévues par le Code des assurances (Cass. 1 re civ., 20 févr. 1973, no 71-14.697 : Bull. civ. I, no 62 ; RGAT 1974, p. 223. – Cass. 1re civ., 7 mars 1989, no 87-12.034 : Bull. civ. I, no 106 ; RGAT 1989, p. 526, note H. Margeat et J. Landel). A défaut, y a-t-il une place pour une résiliation bilatérale, qui devrait alors être effectuée dans les conditions du droit commun et non plus dans celles propres au droit des assurances ? La réponse est affirmative sous réserve qu’une telle résiliation ait été acceptée par l’assureur (Cass. 1re civ., 8 févr. 1984, n°83-10906, RGAT 1985, p. 60). 1 Ce sont bien ces solutions qui sont reprises en l’espèce par l’arrêt avec la formule « la résiliation s’exerce en principe selon les modalités précisées par l’article L. 113-14 du même code mais (…) l’assuré peut résilier son contrat dans une autre forme à la condition d’être accepté par l’assureur ». Il est donc nécessaire de caractériser à la fois la volonté de résilier de l’assuré et l’acceptation de l’assureur, celles-ci pouvant être expresses ou tacites. Dans ce dernier cas, elles doivent résulter d’actes non équivoques. Ainsi en est-il lorsque l’assureur crédite le compte de l’assuré d'un avoir au titre de la restitution de la portion de prime correspondant au temps postérieur à la résiliation (Cass. 1re civ., 31 mars 1998, no 96-10.725, RGDA 1998, p. 713, note J. Kullmann). En revanche, le défaut de paiement de primes auquel l’assureur ne réagit pas pendant plusieurs années ne caractérise pas la volonté des parties de mettre fin au contrat (Cass. 1re civ., 23 sept. 2003, no 00-12.781, RGDA 2003, p. 705, note J. Kullman). Pour l’assuré, il avait été jugé que la souscription d’un contrat d’assurance auprès d'un autre assureur ne démontrait pas l'intention de l'acquéreur de ne pas poursuivre le contrat d'assurance transmis (Cass. 1re civ., 18 oct. 1983 : RGAT 1984, p. 196, note A. Besson). Or, en l’espèce, la souscription d’un nouveau contrat est considérée comme démontrant cette volonté, la Cour prenant le soin de relever que ce contrat est souscrit auprès du même assureur mais à des conditions différentes. Est-ce à dire que si les acquéreurs avaient souhaité maintenir le précédent contrat, ils n’en auraient pas conclu un autre à des conditions différentes ? Pas tout à fait quand même, car on peut toujours souscrire plusieurs contrats d’assurance auprès de plusieurs assureurs et cumuler les indemnités tant que le principe indemnitaire est respecté (le régime légal de contribution entre assureurs trouvant également à s’appliquer, v. C. assur., art. L. 121-4). Mais ce ne pouvait être le cas en l’espèce car cette nouvelle souscription avait eu lieu auprès du même assureur. Cet élément est fondamental car il est de nature à renforcer la conviction selon laquelle les acquéreurs n’entendaient pas poursuivre le précédent contrat. Le même raisonnement est d’ailleurs tenu pour caractériser l’acceptation par l’assureur : la conclusion de ce nouveau contrat avec les mêmes parties que l’ancien (les acquéreurs) mais à des conditions différentes démontre la volonté de l’assureur de ne pas poursuivre l’ancien. N’aurait-il pas été plus simple de modifier le contrat existant ? A l’évidence oui : pourquoi reconclure un contrat alors qu’il en existe un ayant le même objet et entre les mêmes parties ? Simplement, parce qu’en réalité, cette situation traduit la dichotomie existant entre le droit et la pratique. L’article L. 121-10 du Code des assurances est méconnu des assurés, qui lors de la vente de leur bien, ont l’habitude de résilier le contrat d’assurance le concernant (ce qui avait été le cas en l’espèce). Même si juridiquement, cette résiliation ne produit aucun effet car provenant de l'aliénateur, l’acquéreur pense devoir conclure un nouveau contrat d’assurance. Ce n’est qu’à l’occasion d’un sinistre, proche du temps de l’aliénation, que le conseil de l’acquéreur va généralement penser à invoquer l’article L. 121-10 du Code des assurances afin que ses clients puissent bénéficier d’un complément de garantie. Resurgit alors la question « faut-il abroger l’article L. 121-10 du Code des assurances » (en ce sens P. Vaillier, Resp. civ. et assur. 2000, chron. 26), qui pose aujourd’hui plus de problèmes qu’il n’en résout ? En effet, conçu à l’origine pour éviter une situation de non assurance, il devient aujourd’hui source de contentieux afin que puisse être admis un cumul d’assurance. Ne répondant plus à une réalité économique, le texte pourrait être repensé comme aménageant une situation de transition entre le contrat de l’ancien propriétaire et celui du nouveau. Telle est d’ailleurs la solution choisie par la loi belge qui, au lieu de prévoir la continuité de plein droit du contrat, organise sa cessation de plein droit tout en organisant une procédure de relais entre les deux 2 contrats. Ainsi, l’art. 57 de la loi belge sur le contrat d’assurance dispose qu’ « en cas de cessation entre vifs d’un immeuble, l’assurance prend fin de plein droit trois mois après la date de passation de l’acte authentique. Jusqu’à expiration du délai visé à l’alinéa 1, la garantie accordée au cédant est acquise au cessionnaire, sauf si ce dernier bénéficie d’une garantie résultant d’un autre contrat ». A. Astegiano-La Rizza L’arrêt : Attendu, selon l'arrêt attaqué (Riom, 8 juin 2009), que le 12 janvier 2005 M. et Mme X... ont acquis de M. Y... une maison avec jardin qui était assurée par la société Assurance générale de France, aux droits de laquelle est venue la société Allianz (l'assureur) ; que M. et Mme X... ont souscrit auprès du même assureur un nouveau contrat ; qu'à la suite de l'incendie survenu dans la nuit du 2 au 3 mai 2005, une expertise amiable a fixé le montant total des dommages en valeur à neuf à la somme de 1 579 506 euros et vétusté déduite à celle de 1 022 125 euros ; que M. et Mme X... n'ayant pu parvenir à un accord avec leur assureur sur l'indemnisation définitive, ils l'ont assigné en paiement et ont demandé à bénéficier de la garantie résultant des contrats souscrits par leur vendeur et par eux-mêmes ; Sur le premier moyen du pourvoi principal, pris en ses deux premières branches : Attendu que M. et Mme X... font grief à l'arrêt de juger qu'ils ne peuvent se prévaloir que du seul contrat n°... qu'ils ont eux-mêmes souscrit, alors, selon le moyen : 1° / que selon l'article L. 121-10 du code des assurances, en cas d'aliénation de la chose assurée, l'assurance continue de plein droit au profit de l'acquéreur ; que, selon l'article L. 113-14 du même code, dans tous les cas où l'assuré a la faculté de demander la résiliation, il peut le faire, à son choix, soit par déclaration faite contre récépissé au siège social ou chez le représentant de l'assureur, soit par acte extrajudiciaire, soit par lettre recommandée, soit par tout autre moyen indiqué dans la police ; que cette énumération est limitative ; qu'en statuant comme elle l'a fait alors que l'assurance incendie contractée par les vendeurs auprès de l'assureur avait continué de plein droit au profit des époux X... sans constater que ceux-ci auraient manifesté envers cet assureur leur volonté de résilier le contrat en usant de l'une des modalités prévues par l'article L. 113-14 du code des assurances, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de ce texte, ensemble l'article L. 121-10 du même code ; 2° / qu'en statuant par les motifs sus reproduits impropres à caractériser de manière non équivoque tant la volonté des acquéreurs de résilier le contrat que la volonté de l'assureur de l'accepter, la cour d'appel a en toute hypothèse privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 113-14 du code des assurances ; Mais attendu que l'arrêt retient que M. et Mme X... prétendent bénéficier outre de la garantie résultant du contrat qu'ils avaient eux-mêmes souscrit le 20 janvier 2005, de celle résultant du contrat antérieurement souscrit par leur vendeur et résilié par ce dernier le 18 janvier 2005 ; qu'ils se prévalent à cet effet des dispositions de l'article L. 121-10 du code des assurances ; qu'en vertu de ce texte, en cas d'aliénation d'un bien, l'acquéreur dispose de la faculté de résilier le contrat d'assurance garantissant ledit bien, à défaut de quoi le contrat continue de s'appliquer, à charge pour l'acquéreur d'exécuter toutes les obligations dont le vendeur était tenu envers l'assureur ; que la faculté de demander la résiliation s'exerce en principe selon les modalités précisées par l'article L. 113-14 du même code mais que l'assuré peut résilier son contrat dans une forme autre à la condition d'être acceptée par l'assureur ; que M. et Mme X... ont souscrit eux-mêmes après leur acquisition un nouveau contrat d'assurance garantissant le bien acquis dans des conditions différentes de celles prévues par le contrat qui garantissait le vendeur ; que la souscription de ce nouveau contrat le 20 janvier 2005 témoigne suffisamment à la fois de la volonté des acquéreurs, d'une part, de ne pas poursuivre l'ancien contrat, d'autre part, de l'acceptation de l'assureur qui était le même ; 3 Que de ces constatations et énonciations l'arrêt a pu déduire l'accord des parties pour résilier le contrat souscrit par le vendeur ; D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ; Sur le pourvoi incident de l'assureur, tel que reproduit en annexe : Attendu que l'assureur fait grief à l'arrêt de confirmer le jugement fixant l'indemnité due à M. et Mme X... à la suite de l'incendie de leur immeuble, à la somme totale de 728 336, 24 euros ; Mais attendu que sous le couvert du grief non fondé de défaut de base légale le moyen ne tend qu'à remettre en discussion devant la Cour de cassation la valeur et la portée des éléments de preuve soumis au débat devant la cour d'appel qui a pu retenir qu'il ne pouvait être reproché à l'assuré de n'avoir pas reconstruit dans le délai prévu au contrat, s'agissant d'une reconstruction onéreuse pour la mise en oeuvre de laquelle l'assuré se devait de disposer des financements nécessaires que l'assureur a tardé à fournir puisqu'il reconnaît lui-même qu'il n'a formulé une offre transactionnelle que le 13 décembre 2006, soit près de deux ans après le sinistre ; D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ; Et attendu que les autres branches du premier moyen et le second moyen ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi principal ; PAR CES MOTIFS : REJETTE les pourvois ; 4