Jackpot et fisc, quelques conseils

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Jackpot et fisc, quelques conseils
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LE FAIT DU JOUR
Vendredi 3 février 2006
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285 millions de francs, et
EURO MILLIONS Qui n’a pas rêvé avoir coché le ticket gagnant? Ce soir, des centaines de milliers de
PASCAL GUEX
Ce soir, les Suisses seront des centaines de
milliers à se croiser les doigts en attendant le
tirage de l’Euro Millions. C’est qu’avec un
jackpot estimé à 285 millions de francs (183
millions d’euros), le tirage de ce vendredi 3 février sera le plus gros de l’histoire de ce jeu de
hasard et qu’il a de ce fait contribué à faire miser un maximum de joueurs. Les explications
de José Bessard, directeur de la communication à la Société de la loterie romande. «Il y a
des montants clés qui incitent les non-joueurs
ou joueurs occasionnels à tenter leur chance.
Ce fut le cas lorque la barre des 100 millions a
été franchie. Alors imaginez avec ce jackpot record de près de 300 millions.»
«Ce gain record
va multiplier par
4 ou 5 le montant des mises»
JOSÉ BESSARD
DIRECTEUR COMMUNICATION
LOTERIE ROMANDE
José Bessard estime qu’en atteignant ce nouveau seuil psychologique, l’Euro Millions va
multiplier par 4 ou 5 le montant des mises.
«Habituellement, la Suisse francophone mise
un million et demi de francs par tirage. Mais la
semaine dernière, ce sont près de 7 millions qui
ont été joués pour les seuls cantons romands.»
Sur l’ensemble du territoire suisse, 24 millions
de francs avaient été «investis» sur cet Euro
Millions. C’est moins du quart du montant du
gros chèque jamais distribué en Europe.
C’était le 29 juillet dernier lorsqu’une mère de
famille irlandaise avait raflé d’un coup d’un
seul 115 millions d’euros, ou près de 180 millions de francs si vous préférez.
Dernière semaine
Le nouveau jackpot record mis en jeu ce
vendredi vient donc confirmer l’engouement
extraordinaire que rencontre l’Euro Millions
dans les neuf pays européens qui y participent, à savoir la Suisse bien sûr mais aussi
l’Autriche, la Belgique, l’Espagne, la France, la
Grande-Bretagne, l’Irlande, le Luxembourg et
l’Espagne. «Les organisateurs s’en réjouissent
mais sont également conscients de leurs responsabilités», souligne José Bessard. C’est
pourquoi la question a été examinée de manière approfondie en été 2005. «Afin d’éviter
une croissance démesurée du jackpot, il a été
décidé d’introduire un mécanisme d’attribution au rang inférieur, le «roll-down»». Des règles précises ont ainsi été fixées. Si le jackpot
ne tombe pas après douze semaines de tirage,
il est ainsi automatiquement attribué au prochain rang gagnant. Et s’il n’y a pas de gagnant
en deuxième rang, c’est le troisième rang qui
est pris en compte, etc.
Et ce mécanisme d’attribution au rang inférieur entrera en vigueur à partir du tirage du
10 février prochain. «Sur le plan opérationnel,
cela signifie que le tirage de ce vendredi se déroulera comme les précédents, sans «rolldown». En revanche, si le jackpot ne devait pas
tomber ce soir, le tirage du 10 février deviendrait le premier tirage de l’Euro Millions avec
attribution du jackpot au rang inférieur en cas
de non-gagnant au premier rang.»
EN CHIFFRES
Jackpot et fisc, quelques conseils
VINCENT PELLEGRINI
Quels conseils peut-on vous donner sur
le plan fiscal si vous touchez le jackpot
de 285 millions de francs? Nous avons
posé la question à Paul-André Roux, expert fiscal diplômé. Tout d’abord, il faut
savoir que si vous avez validé votre billet
dans un kiosque suisse, votre gain sera
automatiquement soumis à l’impôt anticipé en Suisse. D’entrée, 35% du gain,
soit 100 millions de francs, tomberont
ainsi dans les caisses de la Confédération au titre de ce même impôt anticipé
et ce même si vous ne déclarez pas au
fisc votre gain et que votre anonymat
reste garanti aux yeux de toutes les autorités fiscales. Vous aurez donc nettement avantage à déclarer fiscalement
votre gain et ce pour récupérer l’impôt
anticipé qui est alors remplacé par l’im-
position directe. Car si vous habitez par
exemple dans l’une des neuf communes
du canton (dont Martigny-Combe,
Trient et Finhaut dans le Valais romand)
qui offrent le coefficient d’impôt le plus
avantageux (coefficient de 1), vous paierez au titre de l’impôt sur les gains de loterie au total environ 67 millions de
francs pour la Confédération, le canton
et la commune. Si vous ne déclarez rien,
vous perdrez 100 millions de francs.
Vous avez de toute façon énormément
de chance d’habiter en Valais car notre
canton, avec le Jura, est le meilleur marché de Suisse pour l’imposition des
gains de loterie!
Comme la part communale de l’impôt sur les gains de loterie est calculé selon le coefficient de la commune où
vous résidez le 31 décembre de l’année
fiscale, si vous gagnez le gros lot, vous
avez encore le temps de déplacer d’ici la
fin de cette année votre domicile dans
l’une des communes les plus avantageuses fiscalement (vous pouvez récupérer ainsi plus de 7 millions de francs
selon les cas).
Mais après l’impôt sur le gain de loterie, il reste encore à payer l’impôt sur
le revenu et la fortune... Et là encore le
Valais est très attractif car il bénéficie
d’une ordonnance en faveur des personnes très fortunées (Ordonnance du
22 décembre 2004). Les impôts (cantonal et communal) sur le revenu et la fortune ne peuvent ainsi pas excéder chez
nous 50% du rendement brut de la fortune mais doivent atteindre au moins
50% de l’impôt sur la fortune. Dans ce
cas, l’impôt sur la fortune et le revenu
L’INVITÉ
pour vos 218 millions de francs (fortune
nette après avoir payé l’impôt sur les
gains de loterie dans l’une des communes les plus avantageuse) sera par exemple de 654 000 francs.
Paul-André Roux ajoute: «Il vaut la
peine de faire des placements permettant
d’obtenir des gains en capital sur des actions, gains qui ne sont pas imposables.»
D’un point de vue purement fiscal, pour
payer le moins d’impôts possible, le gagnant de l’Euro Millions aura donc
avantage à éviter de faire des investissements immobiliers (imposition des
gains sur les revenus des immeubles et
de ceux réalisés en cas de revente). Mais
une bonne planification financière requiert la diversification entre immobilier, produits bancaires, assurances, etc.,
précise Paul-André Roux.
285 MILLIONS DE
FRANCS, C’EST AUSSI:
un chapelet de thunes couvrant la distance de Sion à
Stockholm.
13 000 francs à dépenser
par jour (sans les intérêts)
pour une personne ayant une
espérance de vie de 60 ans.
11 400 VW Golf à 25 000
francs, soit de quoi faire un
bouchon de 47 kilomètres sur
l’autoroute.
4500 ans de location d’une
chambre d’hôtel 4 étoiles pour
deux personnes à Cuba.
2850 ans de labeur pour un
Suisse gagnant 100 000
francs par année.
TOUTE LATITUDE
PIERRE-ANDRÉ MILHIT rédacteur du «Peuple valaisan»
ANTOINE GESSSLER
Du géranium à la ronce
L’héroïne du Kosovo
Peut-être même, au départ,
l’homme a suivi un animal pas
trop farouche jusqu’à un endroit tranquille pour passer la
nuit. Tenter la cohabitation
avec une autre espèce pour un
sentiment de sécurité. Et en
même temps, se livrer un peu,
jouer entre la méfiance et la
confiance. Surtout partager les
risques, unir les forces. Le feu à
l’entrée de la caverne tenait de
l’avertissement et du ralliement.
Déjà l’idée de géranium
pour faire joli et repousser les
nuisibles.
Cueilleur migrant suivant
les récoltes, l’homme se fit peu
à peu berger itinérant suivant
les pâturages. Plus tard, il se
posa en architecte, bâtissant
son abri en torchis, en pisé, en
terre crue, puis cuite. Le pas-
sage d’entrée et de sortie soulignait le danger. Le métier de
serrurier s’imposa pour des siècles. Bientôt le digicode et la
carte à puce.
Enfin se construisit la ville,
avec ses portes majestueuses et
ses gardes.
Le nomade, le voyageur,
l’étranger ont amené les épices,
la soie, le savoir-faire.
De temps à autre, il fallait
bien accueillir, secourir, soigner l’égaré, le refoulé, la victime. Au coin du potager,
l’herbe à couture et la camomille.
Mais l’herbe est plus verte
dans le pré voisin, la pierre plus
dure et l’eau plus claire.
Sont arrivées les campagnes d’extension, de colonisation, d’annexion, de conquête.
Et les cortèges de blessés, d’af-
famés, d’exclus qui cherchent
refuge. L’empereur inventa le
droit de la guerre, l’humaniste
le droit de l’asile. La fleur de lys,
le chrysanthème. Le myosotis,
aussi.
A l’intérieur de la cité, poussent de nouveaux barbares. Ils
sont riches, ils sont blancs, ils
font la loi. Assis sur leur or, ils
ne partagent plus, ni le pansement ni la couche, ni la soupe
ni le sourire. Ils n’aiment pas
qu’en mon jardin, s’épanouit le
sureau, rempart contres les
mauvais esprits. Ils ont décrété
que chaque allée de fleurs, chaque plate-bande de ce pays
soient entourées de chardons,
d’orties et de ronces.
Prenez vos serpes et vos sarcloirs. Désherbez. Signez le référendum contre la loi sur
l’asile.
Quel point commun existe entre Micheline
Calmy-Rey et Hani Ramadan? Tous deux
utilisent les pages «courriers» du quotidien
français «Le Monde» pour exprimer leurs
convictions.
Le procédé venant du ministre suisse
des Affaires étrangères a de quoi surprendre. La conseillère fédérale profite des colonnes de notre confrère hexagonal pour
lancer un vibrant plaidoyer en faveur de
l’indépendance du Kosovo.
Voilà une manière bien légère de traiter
les affaires extérieures de la Confédération
helvétique. Que Mme Calmy-Rey souhaite
s’exprimer en France, soit. Or elle occupe
une charge gouvernementale. Une position suffisamment importante pour que
l’élue socialiste soit en situation d’accorder
une interview officielle à un journaliste
éventuellement intéressé par ses états
d’âme. Mais prendre sa plus belle plume
pour donner son opinion comme n’importe quel pékin étalant ses avis plus ou
moins autorisés, voilà une démarche stu-
péfiante. Et surtout qui arrive au mauvais
moment. Le décès du président du Kosovo,
Ibrahim Rugova, a retardé les discussions
entre Pristina et Belgrade. Car même sous
administration des Nations Unies, le Kosovo reste légalement une province de Serbie. Des négociations serrées auront lieu
pour déterminer l’avenir de la région. Les
Serbes estiment que le Kosovo constitue le
berceau de leur nation. Les Albanais de
souche entendent profiter des dividendes
d’une guerre que leurs bandes armées ont
provoquée et que l’OTAN a gagnée pour
eux.
En jetant sa neutralité aux orties, la
Suisse a perdu cette crédibilité qui lui permettrait d’accroître la portée de ses bons
offices dans les Balkans. Sans doute l’article du «Monde» s’explique par la présence
de plus de 200 000 Kosovars en Suisse. Ces
étrangers qui demeurent pour la plupart
des réfugiés qui devront partir et regagner
leur pays une fois celui-ci devenu un Etat
indépendant.