Colas (site de Saint Etienne)
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Colas (site de Saint Etienne)
Le développement durable facteur d’innovation Le cas de COLAS (site de Saint-Étienne) Comment le développement durable peut faire évoluer le cœur de métier d’une entreprise ? La démarche de COLAS Saint-Étienne - Les faits, par l’entreprise elle-même La démarche a été engagée par le PDG du groupe il y a dix ans. Son ambition était de trouver des solutions et des matériaux alternatifs pour trois raisons : − une raison écologique : la volonté de fabriquer des produits renouvelables ; − une raison financière avec la volonté d'être indépendant par rapport au bitume, compte-tenu de la hausse du prix du pétrole ; − une raison commerciale : l'utilisation de nouveaux produits permet de « décrocher des marchés ». « C'est une véritable démarche commerciale ». Colas en quelques mots L'organisation... 1ère entreprise de travaux publics routiers à l'échelle mondiale Société Anonyme au chiffre d'affaires de 12,8 milliards d'euros Plus de 70 000 salariés 6 filiales : SCREGE, SACER, SMAC, SPAC, AXIMOB, COLAS RAIL L'agence de Saint-Étienne est chargée des travaux routiers en Loire et HauteLoire ainsi que de l'entretien des voiries de la Ville de Saint-Étienne et de SaintÉtienne Métropole. La stratégie de l'organisation... Une démarche d'entreprise orientée développement durable appliquée à son cœur de métier. La perception du développement durable par la personne rencontrée… «On ne peut pas être indifférent à nos ressources, même si notre vision est presque bureaucratique, car on ne manque de rien. On n'a pas d'autre choix pour réfléchir comment économiser Le développement responsable se mettra en place réellement le jour où celui-ci deviendra rentable pour les entreprises et le gouvernement. » Personne référente... Rencontrée le 14 mai 2009 Monsieur Patrice Leroy, responsable du service Développement Durable à l'agence de Terrenoire Tél: 04 77 95 83 18 – Mail: [email protected] En même temps, selon le responsable du Service Développement Durable, l’entreprise souffre d’une mauvaise image de par son cœur de métier, la route, assimilée par le grand public à une source majeure de pollution et de nuisance. Ainsi, le cœur de métier de l'entreprise (lié à la route, les camions, le pétrole) étant peu compatible avec les perceptions classiques du développement durable, il n’y avait rien d’évident pour Colas à s’investir en la matière, si ce n’est en le considérant comme une source d’innovation pour ses produits et ses services. Parallèlement, l’entreprise met en oeuvre des opérations de mécénat et de communication. Les objectifs définis par Colas ont été renforcés par les exigences fixées dans le cadre d’une convention conclue en mars 2009 entre le MEEDDAT1, la Fédération Nationale des Travaux Publics et l’Union des Syndicats de l’Industrie Routière Française (réutilisation de 60% des matériaux bitumeux issus de la déconstruction routière à l’horizon 2012) ; réemploi ou valorisation de 100% des matériaux géologiques naturels excavés sur les chantiers à l’horizon 2020 ; fabrication d’enrobés moins émetteurs de gaz à effet de serre dans toute chaîne de fabrication…. Pour atteindre ces objectifs et mettre en œuvre des actions de développement durable, Colas s’est appuyé sur trois leviers de performance : - ses collaborateurs avec le lancement de campagnes de sensibilisation en relation avec les métiers des salariés, - la recherche et l’innovation, - le développement de supports techniques telle qu’une plateforme de recyclage (construite en Haute Qualité Environnementale) et deux centrales d’enrobage au Puy en Velay et à Sainte-Sigolène (Haute-Loire). Les actions conduites ont ainsi porté principalement sur : - la création d'un éco-logiciel de mesure des impacts des projets routiers : il permet de calculer les consommations énergétiques générées par la construction des routes, depuis la raffinerie jusqu'à la pause du bitume. L'objectif est de mettre en évidence ces consommations énergétiques afin que les matériaux traditionnels existants soient remplacés par des matériaux recyclés, plus économes en gaz à effet de serre et moins polluants ; - l'utilisation de nouveaux matériaux : Colas utilise un liant 100 % végétal dans ses enrobés (le « végécolle »). Des études sont menées pour développer des liants nécessitant des températures moins élevées pour leur fabrication et utilisant des produits recyclés (exemple: les enrobés 3 E + R) ; - la gestion des déchets et leur traitement : depuis trois à quatre ans, Colas a développé massivement des 1 Ministère de l’Ecologie, de l’Environnement, et du Développement Durable et de l’Aménagement du Territoire Le développement durable facteur d’innovation Le cas de COLAS (site de Saint-Étienne) plates-formes de recyclage des déchets de chantier. Ceux-ci y sont envoyés pour être traités (broyage) et réutilisés dans la fabrication de nouveaux enrobés ; - l'organisation d'actions à destination des populations fragilisées dans le monde : construction de puits et de crèches pour les populations des pays défavorisés (Bénin, Mayotte, Djibouti...). Aujourd'hui, les démarches engagées bénéficient très largement aux clients du secteur public et en particulier aux collectivités locales, qui utilisent les nouveaux procédés de développement durable de Colas (le végécolle). Aujourd’hui, pour le responsable Développement durable de Colas Saint-Etienne, il semble trop tôt pour mesurer les effets positifs ou négatifs des actions menées. Ce constat est renforcé par les principales difficultés soulevées. Les difficultés en interne : - une difficile prise de conscience des salariés de l’intérêt et de l’utilité du développement durable. « Aujourd'hui, faire du développement durable ne vient pas directement à l'esprit des salariés, mais c'est plutôt le souci d'aller vite et de faire avancer le chantier. Il faut tous les jours le cœur à l'ouvrage ». - la R&D : à ce jour elle n’a pas permis à Colas de développer de nouveaux types d’enrobés plus écologiques. « On est encore loin techniquement, notamment pour le recyclage ». Les difficultés en externe : - le code des marchés publics, qui ne permet pas de vérifier la conformité des mesures des impacts environnementaux et économiques calculées pour des matériaux plus écologiques. - les maîtres d’ouvrage qui ne sont pas non plus équipés pour cela. Ces difficultés montrent que l’entreprise a un temps d’avance par rapport à la législation et ses clients maîtres d’ouvrage. La démarche de COLAS Saint-Étienne - L’avis du CIRIDD, d’Épures et de TemiS La démarche de l’entreprise Colas a consisté à réinterroger sa développement durable. stratégie d’entreprise au regard du Colas a intégré le développement durable principalement via l’innovation technologique. Elle a bien compris que le développement durable est un élément de l’intelligence économique et qu’il peut être un levier d’innovation technologique, un moyen d’identifier de nouvelles attentes du marché, et un levier de la performance et de la compétitivité. Son expérience montre que l’entreprise a un temps d’avance dans le domaine technique et qu’elle se trouve confrontée à certains blocages liés à la relation clients fournisseurs, aux marchés publics, à la législation. En revanche, le développement durable ne fait pas partie à ce jour de la culture de l’entreprise de par les difficultés internes rencontrées (difficulté à mobiliser les salariés) et de par les termes utilisés par le responsable du service Développement Durable pour décrire la démarche (« intérêt » et « utilité » du développement durable). Le développement durable est considéré comme un outil et non une finalité. Il ne semble pas avoir été intégré comme un vecteur de l’innovation sociale. Au final, l’approche stratégique pour intégrer le développement durable n’a pas remis complètement en cause le cœur de métier de Colas et n’a pas permis non plus à ce jour d’atteindre ses objectifs, notamment en termes d’image. En effet, le fait que l’entreprise lance des opérations de communication qui ne sont pas en relation avec le cœur de métier (ex : stand à la foire de St-Étienne pour une association sénégalaise et malgache, sponsoring d’une athlète malvoyante,…) n’a pas suffisamment permis d’améliorer totalement son image, à ce jour. Parallèlement, l’entreprise est encore confrontée à beaucoup d’incertitudes quant à l’avenir et au devenir des nouveaux produits et services proposés (l’éco-logiciel qui, pour l’instant, ne permet pas de se démarquer par rapport aux concurrents, notamment du fait du Code des marchés publics, ou le liant végétal, en considérant l’éco-bilan global en terme de production agricole intensive, de consommation d’eau, etc.)