Utilisation des courbes individualisées de croissance fœtale

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Utilisation des courbes individualisées de croissance fœtale
Utilisation des courbes
individualisées de croissance
fœtale : intérêt pour la pratique
et la recherche
A. EGO 1, 2, J. ZEITLIN 2, F. GOFFINET 2, 3
(Grenoble, Paris)
Résumé
Identifier de manière pertinente et précoce le retard de croissance intra-utérin
(RCIU) pendant la grossesse est une des voies d’amélioration potentielle dans la prise en
charge de cette pathologie fréquente et responsable d’une morbidité et d’une mortalité
importantes en santé périnatale. La définition du RCIU a évolué ces dernières décennies,
passant du simple poids de naissance à l’utilisation de courbes de poids de naissance selon
l’âge gestationnel, et plus récemment de poids de naissance in utero selon l’âge
gestationnel. En 1992, Jason Gardosi a proposé la construction de courbes individuelles
de poids fœtal ajustées sur la taille et le poids maternels, la parité, l’ethnie et le sexe
1 - CHU Grenoble - Département méthodologie de l’information en santé - Pavillon
Taillefer - BP 217 - 38043 Grenoble cedex
2 - Unité U953 (ex U149) - Recherche épidémiologique en santé périnatale et santé
des femmes et des enfants - INSERM U953 (ex U149) - UPMC Paris 6 - Site Saint
Vincent-de-Paul - 81 avenue Denfert-Rochereau - 75014 Paris
3 - Groupe hospitalier Cochin Broca Hôtel-Dieu - Maternité de Port-Royal - Assistance
Publique-Hôpitaux de Paris - Université Paris Descartes - Sorbonne Paris Cité - 123
boulevard de Port-Royal - 75014 Paris
Correspondance : [email protected]
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fœtal. Les premières validations de cette définition du RCIU, réalisées à partir d’études
rétrospectives, semblent montrer un bénéfice dans l’identification d’enfants à risque.
Un modèle ajusté individuel adapté aux naissances en France, développé selon cette
méthode, a été étudié en 2006. Comme le montrent d’autres modèles adaptés à différents
pays, ce modèle, validé dans un large échantillon multicentrique, montre une amélioration du dépistage de la morbidité liée au faible poids : il distingue les enfants à risque
des enfants constitutionnellement petits, d’état de santé comparable aux enfants eutrophiques.
La diffusion des courbes ajustées individuelles dans les recommandations et dans
la pratique clinique reste rare actuellement. Cependant, elle est probablement imminente
compte tenu de l’intérêt des cliniciens pour ce concept, et de la simplicité des outils
permettant leur utilisation. La mise en œuvre d’études interventionnelles prospectives
évaluant l’impact de l’utilisation de ces courbes sur la santé périnatale serait justifiée,
mais pose des problèmes de faisabilité. D’autres perspectives de recherche peuvent
néanmoins s’envisager. Ces nouvelles références de poids constituent très probablement un
progrès pour un petit groupe de femmes et d’enfants, et sont une opportunité à une
harmonisation de la définition du RCIU dans le domaine clinique comme dans le
domaine de la recherche.
Mots clés : retard de croissance intra-utérin, courbes de poids de naissance,
mortalité périnatale
Déclaration publique d’intérêt
Nous soussignés, Anne Ego, Jennifer Zeitlin, François Goffinet,
déclarons ne pas avoir d’intérêt direct ou indirect (financier ou en
nature) avec un organisme privé, industriel ou commercial en relation
avec le sujet présenté.
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UTILISATION DES COURBES INDIVIDUALISÉES DE CROISSANCE FŒTALE : INTÉRÊT POUR LA PRATIQUE ET LA RECHERCHE
L’impact de la prématurité et du retard de croissance intra-utérin
(RCIU) sur la santé périnatale est connu depuis très longtemps.
Cependant, dans les années 1950-60, l’âge gestationnel à l’accouchement était imprécis ; les larges études étudiant cette relation et les
facteurs associés ont donc utilisé un critère grossier mais précis, le
faible poids de naissance avec souvent comme seuil 2 500 grammes. Il
était bien sûr indispensable de distinguer le faible poids de naissance
de la prématurité et du RCIU. Les premières courbes de poids de
naissance selon l’âge gestationnel à l’accouchement ont été publiées
dans les années soixante, suivies rapidement par de nombreuses
courbes de références dans chaque pays. Ont suivi plus récemment des
courbes de références de poids fœtal in utero. Ces deux types de
courbes ont permis d’identifier les enfants de petit poids pour un âge
gestationnel donné, appelés en France RCIU ou hypotrophie fœtale
par certains, ce défaut de poids étant défini par rapport au poids moyen
pour l’âge gestationnel. Les connaissances sur ce facteur de risque, son
contexte d’apparition et ses conséquences sur la morbimortalité
périnatale, la santé de l’enfant voire même de l’adulte font l’objet d’une
littérature abondante. La question de la définition du RCIU n’est
cependant pas résolue. Ces 20 dernières années, un nouveau concept
selon lequel la norme de poids doit être définie individuellement pour
chaque enfant, selon son potentiel de croissance, est largement débattu.
L’objectif de cette mise au point est de présenter les particularités des
courbes ajustées individuelles de poids fœtal, de faire un état des lieux
sur leur évaluation dans la littérature et sur leur diffusion actuelle. C’est
aussi de discuter les implications liées à leur diffusion dans la pratique
clinique en médecine périnatale ainsi que les perspectives de recherche
dans ce domaine.
I. COURBES AJUSTÉES INDIVIDUELLES DE POIDS FŒTAL :
CONTEXTE ET MÉTHODES
I.1. Contexte de leur apparition
I.1.a. Terminologie autour du faible poids de naissance
Historiquement, le faible poids a longtemps été défini comme un
poids de naissance inférieur à 2 500 g. La publication des premières
courbes de poids de naissance a permis de faire évoluer cette définition
du poids en associant l’âge gestationnel. En France, on a utilisé et on
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utilise encore parfois le terme d’hypotrophie, indépendamment du
caractère pathologique ou non du défaut de poids. Mais ce terme a
progressivement été remplacé par celui de RCIU.
L’observation de la croissance fœtale par échographie a ajouté
deux nouvelles manières de dépister le RCIU cette fois en période
prénatale, d’une part en se rapportant à des courbes de poids fœtal in
utero et d’autre part en estimant le ralentissement de la croissance entre
deux mesures successives. Devant une cassure de la courbe de croissance ou en présence d’arguments en faveur d’une altération du bienêtre fœtal, un nouveau terme a fait son apparition, celui de restriction
de croissance.
Dans le vocabulaire anglo-saxon, il existe une terminologie variée
et précise pour caractériser le faible poids, mais elle semble principalement utilisée au Royaume-Uni où le Collège des gynécologues
obstétriciens distingue clairement :
— LBW pour « Low Birthweight » chez les enfants de faible poids,
— de SGA pour « Small for Gestational Age » chez les enfants
n’atteignant pas un seuil donné de poids pour l’âge gestationnel,
souvent sous le 10e ou le 3e percentile,
— de FGR ou IUGR pour « Fetal » ou « Intra-Uterine Growth
Restriction » lorsqu’il existe une cassure de la croissance et/ou
des arguments en faveur d’un mécanisme pathologique responsable du défaut de croissance [1].
Dans notre pays, le vocabulaire a peu évolué et on fait rarement
la distinction entre ces définitions. Le mot RCIU reste très fréquemment employé quel que soit le contexte lié au faible poids.
Dans l’ensemble de la littérature, l’analyse de la morbidité et de la
mortalité associées au RCIU est réalisée le plus souvent en définissant
le RCIU comme un poids de naissance inférieur au 10e percentile pour
l’âge gestationnel d’une courbe de poids. Certains auteurs préfèrent
avoir une approche quantitative du défaut de poids et utilisent le
birthweight ratio (rapport du poids du fœtus sur le poids moyen
observé pour l’âge gestationnel) ou le z score (rapport de la différence
entre poids du fœtus et poids moyen observé pour l’âge gestationnel
sur la déviation standard).
I.1.b. Bénéfices du dépistage et de la prise en charge du RCIU :
données scientifiques
L’amélioration d’identification du défaut de croissance n’a d’intérêt
que si le dépistage s’accompagne d’une prise en charge améliorant le
pronostic. Les travaux ayant mesuré le bénéfice lié du dépistage sont
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UTILISATION DES COURBES INDIVIDUALISÉES DE CROISSANCE FŒTALE : INTÉRÊT POUR LA PRATIQUE ET LA RECHERCHE
très rares dans la littérature. Une étude suédoise rétrospective en
population incluant 26 968 nouveau-nés montre que le risque de
morbidité néonatale sévère (définie comme la présence de lésions
neurologiques graves, d’une souffrance fœtale sévère ou du décès
néonatal), après ajustement sur le poids de naissance et l’âge gestationnel, est de 4,1 (IC 95 % ; 2,5-6,8) chez les RCIU non dépistés par
rapport aux RCIU dépistés [2]. Du point de vue de la prise en charge,
on ne dispose pas de traitement curatif permettant de corriger un
défaut de croissance fœtale. Seules des mesures de surveillance peuvent
être mises en œuvre pour décider d’une éventuelle extraction fœtale
qui, justifiée, permettrait d’éviter une aggravation de l’état fœtal in utero
pouvant aller jusqu’au décès. La combinaison biométrie fœtale et
Doppler comparée à la biométrie seule améliore l’identification des
fœtus à risque [3, 4]. Cependant, prédiction n’est pas synonyme de
prévention, et une valeur diagnostique élevée n’entraîne pas forcément
une amélioration de la santé pour ces enfants. Plusieurs essais
randomisés et méta-analyses ont permis de montrer que l’utilisation du
Doppler ombilical dans une population à risque de RCIU diminuait la
mortalité périnatale. Cependant, sa réalisation systématique en population générale n’est pas démontrée et donc non recommandée [5, 6].
De la même manière, les essais randomisés sur l’utilisation de l’échographie systématique en deuxième partie de grossesse n’ont pas mis en
évidence de bénéfice sur l’état de santé des enfants [7]. Ainsi, l’échographie systématique à 7 mois de grossesse recommandée en France
n’est pas une pratique démontrée et même ne fait pas partie des
recommandations dans certains pays. Un travail récent a montré qu’à
l’aide d’un modèle prenant en compte anomalies Doppler et caractéristiques maternelles chez des femmes à bas risque, la valeur prédictive
de survenue d’une prééclampsie était améliorée [8]. Mais il n’est pas
certain que l’utilisation de ces facteurs maternels dans l’évaluation du
risque entraîne un bénéfice.
Dans les essais ayant démontré l’utilité du Doppler ombilical, il est
difficile de savoir quelle prise en charge a entraîné un bénéfice. Il peut
s’agir d’une meilleure appréciation du moment de l’extraction fœtale,
mais on ne connaît pas dans ces études les motifs exacts ayant conduit
à prendre les décisions. C’était l’objectif de l’essai randomisé GRIT de
tester l’expectative (extraction différée) ou l’extraction fœtale immédiate en cas d’anomalies sévères du Doppler ombilical, avec comme
hypothèse qu’une extraction plus précoce en cas de Doppler pathologique entraînait un bénéfice pour les enfants. Les résultats ont montré
qu’il n’existait pas de différence entre les deux groupes sur la mortalité
et morbidité à court terme ainsi que le neurodéveloppement à 2 ans
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d’enfants prématurés présentant une souffrance fœtale chronique [9,
10]. Il est intéressant de noter que si la mortalité périnatale était
comparable, la mortinatalité était plus élevée dans le groupe extraction
différée mais compensée par une mortalité néonatale plus élevée dans
le groupe extraction immédiate.
Ainsi, les données scientifiques de bonne qualité concernant le
type de surveillance et les décisions en cas d’anomalies sont rares. Il
existe des données démontrant l’intérêt d’une surveillance avec
Doppler ombilical dans une population à risque élevé. Mais il n’existe
pas de données démontrant qu’un dépistage du RCIU dans la
population générale entraîne un bénéfice pour les enfants. Les recommandations sont ainsi de faible niveau de preuve, avec des modalités
de surveillance et de prise en charge variables. Ce contexte explique le
nombre important de mises au point récentes dans la littérature sur le
RCIU, son dépistage et sa prise en charge [11-16].
I.1.c. Les courbes de référence classiques remises en question
L’hétérogénéité des résultats mesurant l’association entre RCIU et
morbimortalité périnatale est bien connue. Citons pour exemple le rôle
du RCIU sur la morbidité respiratoire ou neurologique. Les résultats
récents sont désormais plus concordants mais un impact variable du
RCIU a été décrit dans la littérature [17, 18]. Une partie de cette
hétérogénéité résulte des seuils de poids de naissance par courbe qui
peuvent être très variables selon les caractéristiques de la population,
de la période ou de la méthodologie utilisée [19, 20]. L’origine
ethnique, les caractéristiques anthropométriques d’une population, la
parité des femmes, les comportements alimentaires, les caractéristiques
géographiques du lieu de résidence (l’altitude plus particulièrement)
peuvent faire varier le poids moyen des nouveau-nés à terme de
quelques centaines de grammes [21, 22]. La difficulté est que ces
facteurs peuvent avoir une influence sur le poids de naissance par des
mécanismes physiologiques et/ou pathologiques [23-27]. L’étude du
registre des naissances en Norvège de 1967 à 1998 a montré un gain
de poids moyen à 40 semaines de 3,68 ± 0,05 g par an, soit un gain
d’environ 100 g en 30 ans [28]. Parmi les aspects méthodologiques, la
datation de la grossesse [29], la distinction des poids par sexe [30], la
correction des aberrations entre âge gestationnel et poids et le lissage
des courbes [31] sont aussi sources de disparité.
L’utilisation des courbes de poids de naissance est par ailleurs
remise en question aux petits âges gestationnels : les seuils observés
chez les prématurés à l’aide de ces courbes de poids de naissance sont
sous-estimés par rapport au poids des enfants in utero en raison de
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UTILISATION DES COURBES INDIVIDUALISÉES DE CROISSANCE FŒTALE : INTÉRÊT POUR LA PRATIQUE ET LA RECHERCHE
l’association entre la naissance prématurée, qu’elle soit spontanée ou
induite, et le défaut de croissance [32]. L’observation de cet échantillon
biaisé explique l’infléchissement des courbes de poids à la naissance
entre 22 et 32 semaines. La proportion de RCIU identifiée au 10e percentile par une courbe de poids de naissance est nettement inférieure
à celle identifiée par une courbe in utero [30, 33].
Les courbes in utero sont apparues dans les années 80 accompagnant le développement de l’échographie fœtale, mais elles sont aussi
nées d’une remise en question de l’utilisation des courbes de poids de
naissance dans le dépistage du RCIU chez les prématurés [34-36]. Elles
se caractérisent par une allure plus linéaire de la croissance que celle
observée à partir du poids des nouveau-nés et une distribution d’allure
normale du poids fœtal quel que soit l’âge gestationnel [37, 38]. Qui
plus est, le coefficient de variation (rapport écart-type sur moyenne)
semble constant quel que soit l’âge gestationnel et varie de 11 à 13 %
selon les auteurs [33, 37]. La critique à leur égard est liée à
l’imprécision des mesures permettant l’estimation du poids fœtal, la
faiblesse des échantillons et l’enregistrement variable (unique, multiple,
longitudinal) des poids [38, 39].
I.2. Principes et construction des courbes individualisées
Compte tenu des travaux précédemment publiés, Jason Gardosi a
proposé au Royaume-Uni au début des années 1990 une définition de
la croissance fœtale, ajustée sur des paramètres individuels constitutionnels et respectant l’allure de la croissance observée in utero [40].
I.2.a. Principes du modèle
Quatre étapes, chacune s’appuyant sur une hypothèse (en
italiques), peuvent être schématiquement résumées dans la construction
des courbes ajustées individuelles de poids fœtal dans le modèle de
Gardosi [41].
— Étape 1 : chaque individu dispose d’un potentiel de croissance dépendant
de paramètres constitutionnels. Cette étape est réalisée à partir d’un
échantillon représentatif de naissances vivantes à terme et permet
le calcul du poids optimal à terme (40 semaines) après ajustement.
— Étape 2 : la croissance fœtale est d’allure linéaire, comme le suggèrent les
courbes in utero. Pour définir la croissance, Gardosi a repris un
travail réalisé par Hadlock en 1991, décrivant l’évolution du poids
fœtal en fonction de l’âge gestationnel (Log poids fœtal estimé =
0,578 + 0,332 AG - 0,00354 AG2) [37]. Cette formule permet de
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calculer le poids fœtal par jour de gestation de 168 à 294 jours
(soit de 24 à 42 semaines) et de l’exprimer en proportion par
rapport au poids à 40 semaines (soit 19 % à 24 semaines, 54 % à
32 semaines et 100 % à 40 semaines). Ce pourcentage est luimême exprimé en fonction de l’âge gestationnel :
• % poids = 299,1 - 31,85*AG + 1,094*AG2 - 0,01055*AG3
Il permet de faire abstraction des poids observés par Hadlock et
représente l’évolution du poids au 50e percentile par rapport au poids
à terme. Il peut être appliqué au poids optimal à terme calculé après
ajustement (étape 1) pour obtenir les valeurs de poids optimal par jour
de 24 à 41 semaines.
— Étape 3 : le poids se distribue de façon normale et la déviation standard
(ds), en proportion par rapport à la moyenne (my), est constante. La
déviation standard retenue est celle observée chez la primipare
européenne non fumeuse à 40 semaines de l’échantillon, soit
389 g dans l’échantillon anglais. Ce choix est guidé par le fait
que le modèle est centré sur ces patientes. Le coefficient de
variation (ds/my) correspondant est donc de 11 %. Les 10e et 90e
percentiles correspondant à ± 1,28*ds, les valeurs seuils de poids
correspondent à ± 1,28*11 %, soit ± 14 % du 50e percentile, quel
que soit l’âge gestationnel. Ces valeurs peuvent être exprimées
en proportion par rapport au poids optimal à terme calculé
après ajustement. Ces pourcentages, eux-mêmes exprimés en
fonction de l’âge gestationnel donnent les équations suivantes :
• % poids 10e percentile = 257,2 - 27,39*AG + 0,94084*AG2 0,009073*AG3
• % poids 90e percentile = 340,97 - 36,31*AG + 1,247*AG2 0,01203*AG3
— Étape 4 : d’une part le rôle des paramètres constitutionnels est identique
quel que soit l’âge gestationnel, ce qui signifie que la contribution de
la taille maternelle observée chez l’enfant à terme est semblable
à 28 ou 32 semaines ; d’autre part la croissance est identique quelles
que soient les caractéristiques individuelles, autrement dit l’allure de la
courbe est la même chez les filles et les garçons, chez la
primipare et la multipare…
I.2.b. Ajustement sur les facteurs individuels
Les facteurs associés au poids ainsi que les coefficients qui leur
sont affectés sont recherchés dans un échantillon représentatif de
naissances vivantes, singletons et à terme, par une régression linéaire
multiple pas à pas descendante. Ne sont retenus que les facteurs
associés au poids et dont on peut penser que leur mécanisme est
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UTILISATION DES COURBES INDIVIDUALISÉES DE CROISSANCE FŒTALE : INTÉRÊT POUR LA PRATIQUE ET LA RECHERCHE
physiologique, c’est-à-dire la taille et le poids de la mère en début de
grossesse, sa parité, son ethnie, ainsi que le sexe et l’âge gestationnel
du fœtus. La variable tabac nécessite des commentaires spécifiques : les
femmes fumeuses sont incluses dans l’échantillon malgré le rôle néfaste
du tabac, ceci pour conserver le caractère représentatif de l’échantillon.
Le rôle des différents facteurs est donc estimé en présence du tabac,
mais le calcul du poids optimal à terme ne prend pas en compte
l’impact de ce facteur, c’est-à-dire qu’il est réalisé comme si la mère
était non fumeuse. Cette solution permet de mettre en évidence le
défaut de poids lié au tabac chez les femmes fumeuses.
En France, la population de l’enquête nationale périnatale de 1998
a été utilisée pour construire des courbes individualisées adaptées à notre
population [42, 43]. Pour faciliter la lecture des résultats, les paramètres
sont centrés sur le poids de naissance à 40 semaines (280 jours) d’une
primipare « standard », de taille et poids moyens (162,3 cm et 64,3 kg).
Le poids optimal attendu en grammes du nouveau-né à 40 semaines
s’exprime de la façon suivante :
= 3343,9 + 5,7 * taille maternelle + 8,6 * poids maternel – 0,13 *
(poids maternel)2 + 0,0007 * (poids maternel)3 + 110,3 (si parité 2) ou
+ 124,0 * (si parité 3) ou + 149,2 (si parité 4) ou + 160,6 (si parité 5+)
± 77,8 * sexe (+ 1 garçon, - 1 fille).
Par exemple, par cm de taille de la mère au-delà de 162,3 cm, il
faut ajouter 5,7 g au poids de naissance à 40 semaines. Les coefficients
associés au poids de la mère et à l’âge gestationnel sont de degré 3 en
raison d’un effet non linéaire de ces paramètres sur le poids à terme. Il
faut ajouter pour un garçon 77,8 g à la constante obtenue de 3 343,9 g
et pour une fille, enlever 77,8 g, ce qui correspond à une différence
moyenne entre fille et garçon de 155,5 g.
I.3. Diffusion actuelle
Malgré les nombreuses données publiées sur ces modèles de
croissance ajustée individuelle, l’utilisation en pratique reste rare. Si
plusieurs modèles adaptés à différents pays ainsi que des outils sont
disponibles sur internet, il n’existe pas de recommandations sur leur
emploi, excepté au Royaume-Uni.
I.3.a. Modèles publiés
Actuellement, sept modèles appliquant cette méthode ont été
publiés dans différents pays dont l’Espagne [44], la Nouvelle-Zélande
[45], l’Australie [46], la France [43], l’Europe [30] et les États-Unis [47,
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48]. Les caractéristiques de ces différents modèles sont présentées dans
le tableau 1. Il existe quelques différences concernant les variables
utilisées dans ces modèles. Les modèles français et européen ne tiennent
pas compte de l’origine ethnique, faute de disponibilité de cette
information. Tous les modèles incluent le facteur tabac à l’exception du
Tableau 1 - Résultats des analyses par une régression linéaire multiple des
facteurs associés au poids de naissance à terme (de 37 à 42 semaines) dans
7 échantillons
Tableau 1a - Échantillons français, anglais, et européen (constantes et coefficients sont exprimés en grammes)
Pays (année de publication)
Paramètres
Âge gestationnel (centré
sur 280 jours, soit 40 SA)
AG
AG 2
AG 3
Taille de la mère
taille
taille 2
taille 3
France (2006) [43]*
Royaume-Uni (1995) [41]
Europe (2000)* & [30]
Enquête nationale
périnatale 1998 (n = 11 671)
Échantillon EUROPOP 1994-97
(n = 6 460)
Coefficients et IC 95 %
Échantillon de la maternité
de Nottingham 1987-91
(n = 38 114)
Coefficients et IC 95 %
16,1 [14,7-17,5]
- 0,24 [- 0,41 ; - 0,07]
0,0023 [- 0,0068 ; 0,0114]
20,7 [20,2 ; 21,2]
- 0,21 [- 0,25 ; - 0,17]
- 0,0002 [- 0,0031 ; 0,0028]
(centrée sur 163,7 cm)
5,7 [4,5 ; 7,0]
(centrée sur 162,3 cm)
7,8 [7,4 ; 8,2]
8,8 [7,1 ; 10,4]
(centré sur 64,3 kg)
8,7 [8,5 ; 8,9]
-0,12 [- 0,13 ; - 0,10]
0,0007 [0,0005 ; 0,0010]
7,2 [6,0 ; 8,4]
- 0,14 [- 0,22 ; - 0,05]
0,0014 [0,0003 ; 0,0032]
Poids début de grossesse
(centré sur 60,1 kg)
poids
8,6 [7,8 ; 9,4]
2
poids
- 0,13 [- 0,18 ; - 0,08]
3
0,0007 [- 0,0002 ; 0,0016]
poids
Coefficients et IC 95 %
Parité (centrée sur parité 0)
parité 1
parité 2
parité 3
parité 4 +
110,3 [94,2 ; 126,4]
124,0 [103,1 ; 144,9]
149,2 [115,6 ; 182,8]
160,6 [117,7 ; 203,5]
108,0 [91,7 ; 124,3]
148,6 [135,1 ; 162,1]
149,9 [134,0 ; 165,8]
149,8 [131,2 ; 168,4]
87 [66 ; 108]
148 [117 ; 179]
128 [80 ; 176]
140 [88 ; 191]
Sexe (+ garçon, - fille)
- 77,8 [- 84,7 ; - 70,8]
- 58,4 [- 62,6 ; - 54,2]
- 66 [- 74 ; - 56]
Tabac (nb de cigarettes/jour)
1-9
10-19
20 +
- 143,9 [- 163,7 ; - 124,2]
- 201,3 [- 227,8 ; - 174,9]
- 286,5 [- 334,1 ; - 238,9]
- 152,5 [- 166,1 ; - 138,9]
- 214,5 [- 229,3 ; - 199,7]
- 246,0 [- 260,7 ; - 231,3]
- 157 [- 188 ; - 125]
- 128 [- 167 ; - 89]
- 182 [- 252 ; - 113]
Origine ethnique
(centré sur une européenne)
Inde - Pakistan
Afrique - Caraïbes
Autres
Constante
- 186,0 [- 202,3 ; - 169,7]
- 127,5 [- 145,8 ; - 109,2]
- 65,2 [- 90,8 ; - 39,6]
3 343,9
3 478,4
3 401,6
* modèle non ajusté sur le facteur ethnie ; ** modèle non ajusté sur le tabac ;
*** modèle ajusté sur tabac oui/non & coefficients liés à l’âge gestationnel non rapportés dans l’article
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UTILISATION DES COURBES INDIVIDUALISÉES DE CROISSANCE FŒTALE : INTÉRÊT POUR LA PRATIQUE ET LA RECHERCHE
modèle néo-zélandais. Les différences des constantes de poids sont
importantes, allant de 3 269,7 g dans le modèle espagnol à 3 530 g dans
le modèle néo-zélandais, et reflètent les caractéristiques moyennes de
Tableau 1b - Échantillons néo-zélandais, australien, espagnol et américain
(constantes et coefficients sont exprimés en grammes)
Pays (année de publication)
Paramètres
Nouvelle-Zélande
(2004) [45]**
Australie (2007) [46]***
États-Unis (2011)
[48]***
Échantillon du registre de Échantillon de la maternité Échantillon de la maternité Échantillon de la maternité
naissances 1993-2000
de Sydney 1999-2003
de Barcelone 2001-05
de Washington 1990-2009
(n = 4 964)
(n = 12 420)
(n = 11 197)
(n = 42 277)
Coefficients et IC 95 %
Coefficients et IC 95 % Coefficients et IC 95 %
Coefficients et IC 95 %
Âge gestationnel (centré
sur 280 jours, soit 40 SA)
AG
19,5 [17,0 ; 22,0]
19,1 [18,1 ; 20,1]
AG 2
- 0,28 [- 0,46 ; - 0,10] - 0,34 [- 0,44 ; - 0,24]
3
AG
0,0006 [- 0,0092 ; 0,0104]
Taille de la mère
taille
taille 2
taille 3
Espagne (2008) [44]
(centrée sur 165 cm)
9,6 [6,7 ; 12,5]
16,7 [15,37 ; 18,0]
18,4 [17,5 ; 19,2]
- 0,39 [- 0,31 ; - 0,46]
- 0,005 [- 0,001 ; - 0,008]
(centrée sur 163 cm)
7,8 [6,6 ; 9,0]
(centrée sur 161 cm) (centrée sur 163 cm)
8,8 [7,1 ; 10,5]
7,4 [6,5 ; 8,2]
- 0,008 [- 0,0158 ; - 0,0002] 0,07 [0,02 ; 0,11]
- 0,004 [- 0,002 ; - 0,005]
Poids début de grossesse
poids
poids 2
poids 3
(centré sur 70 kg)
(centré sur 64 kg)
7,1 [5,9 ; 8,3]
9 [8,2 ; 9,8]
- 0,103 [- 0,15 ; - 0,06] - 0,15 [- 0,19 ; - 0,11]
0,0007 [0,0001 ; 0,0013] 0,001 [0,0004 ; 0,0012]
(centré sur 59 kg) (centré sur 64 kg)
6,9 [5,9 ; 7,9]
8,1 [7,4 ; 8,7]
- 0,12 [- 0,18 ; - 0,06] - 0,12 [- 0,09 ; - 0,14]
0,001 [- 0,0002 ; 0,0022] 0,001 [- 0,000 ; 0,002]
Parité (centrée sur parité 0)
parité 1
parité 2
parité 3
parité 4 +
102 [91,5 ; 112,5]
102 [90,2 ; 113,8]
123 [110,0 ; 136,0]
175 [160,7 ; 189,3]
Sexe (+ garçon, - fille)
- 57,7 [- 69,7 ; - 45,7] - 66,9 [- 81,4 ; - 52,4] - 51,8 [- 66,8 ; - 36,7] - 69,1 [- 76,9 ; - 61,2]
Tabac (nb de cigarettes/jour)
1-9
10-19
20 +
94,8 [77,6 ; 112,0] 97,9 [81,3 ; 114,6]
115,2 [93,8 ; 136,6] 127 [97,4 ; 156,7]
116 [85,8 ; 146,2] 152,3 [103,0 ; 201,6]
99,2 [63,9 ; 134,4]
108,7 [99,4 ; 117,9]
133,5 [122,0 ; 144,9]
149,6 [132,5 ; 166,6]
152,0 [129,0 ; 174,9]
- 206,3 [- 222,6 ; - 190,0] - 124,2 [- 147,1 ; - 101,3] - 214,2 [- 227,0 ; - 201,3]
- 211,3 [- 242,4 ; - 180,3]
- 256,0 [- 305,7 ; - 206,2]
Origine ethnique
(centré sur une européenne)
Inde - Pakistan
Afrique - Caraïbes
Est-Asie
Amérique du Sud
Maroc
Iles Samoa (Polynésie)
Iles Tonga (Polynésie)
Chine
Maori
Moyen Orient
Autres
Constante
- 150 [- 210,8 ; - 89,2]
84 [38,9 ; 129,1]
124 [71,1 ; 176,9]
101 [61,8 ; 140,2]
- 67 [- 112,1 ; - 21,9]
13 [- 24,2 ; 50,2]
3 530
- 162 [- 208,4 ; - 115,5]
- 297,4 [- 428,3 ; - 166,5]
83,3 [47,1 ; 119,5]
95,1 [74,8 ; 115,4]
73,8 [22,3 ; 125,4]
-110 [- 161,7 ; - 58,3]
3 463,6
- 158,0 [- 202,7 ; - 113,2]
- 221,0 [- 231,3 ; - 210,6]
- 87,6 [- 109,5 ; - 65,7]
- 113,9 [- 164,2 ; - 63,5]
3 269,7
3 523,9
* modèle non ajusté sur le facteur ethnie ; ** modèle non ajusté sur le tabac ;
*** modèle ajusté sur tabac oui/non & coefficients liés à l’âge gestationnel non rapportés dans l’article
73
GOFFINET
&
COLL.
taille et poids maternels observées dans ces échantillons respectifs (161 versus
165 cm et 59 versus 70 kg). Les différences d’influence des paramètres
maternels sont par contre modérées entre les 6 modèles, la plupart des
intervalles de confiance des coefficients se recoupant. L’influence de la
taille maternelle varie entre 5,7 [4,5-7,0] et 9,6 [6,7-12,5] g par cm, le
coefficient français est significativement plus faible que celui du
Royaume-Uni, de l’Espagne et de l’échantillon européen. Le gain de
poids fœtal avec le poids maternel varie significativement entre les
modèles australien et espagnol de 6,9 [5,9-7,9] à 9,0 [8,2-9,8] g par kg.
L’augmentation du poids entre le 1er et le 2e enfant varie de 87 [66-108]
à 110,3 [94,2-126,4] g. À partir du 2e enfant, l’augmentation du poids
de naissance est inconstante selon les modèles. Le facteur sexe montre
un gain de poids de 77,8 [70,8-84,7] g dans le modèle français chez le
garçon, valeur significativement supérieure à celle des modèles anglais,
néo-zélandais, espagnol et américain. Ces différents modèles
expliquent environ 20 à 30 % de la variabilité du poids de naissance à
terme (R2 de 23,7 %, 27 % et 30 % dans les modèles espagnol, français
et américain, et néo-zélandais).
L’utilisation de ces coefficients se fait de la manière suivante si on
considère 3 exemples successifs en France :
— pour une femme mesurant 175 cm, pesant 70 kg, attendant son
3e enfant de sexe masculin, le poids attendu à 38 semaines de
cet enfant compte tenu des différents facteurs pris en compte
sera de : âge gestationnel : 16,1 * (280 - 14) - 0,24 * (280 - 14)2
+ 0,0023 * (280 - 14)3 ; taille : + 5,7 (170 - 163,7) ; poids : + 8,6
* (70 - 60,1) - 0,13 * (70 - 60,1)2 + 0,0007 * (70 - 60,1)3 ; parité :
+ 124,0 ; sexe : + 77,8 ; constante : + 3 343,9 ; soit un total de
3 356 g ;
— si cette même patiente, attendait un 1er enfant de sexe féminin,
le poids attendu au même terme serait de 3 106 g ;
— si cette fois, il s’agissait de nouveau d’un 3e enfant de sexe
masculin mais chez une femme mesurant 1,58 et pesant 51 kg,
le poids attendu au même terme serait de 3 146 g.
I.3.b. Place dans les recommandations de pratique clinique actuelle
pour le dépistage et le diagnostic de RCIU
En France, des recommandations sur les modalités d’accouchement des enfants de faible poids ont été publiées en 1998 par le
CNGOF (Collège national des gynécologues et obstétriciens français)
(http://www.cngof.asso.fr/D_PAGES/PURPC_04.HTM), mais il n’existait
pas de conclusion sur le choix d’une méthode ou d’une courbe de
référence pour diagnostiquer le RCIU. Les recommandations profes74
UTILISATION DES COURBES INDIVIDUALISÉES DE CROISSANCE FŒTALE : INTÉRÊT POUR LA PRATIQUE ET LA RECHERCHE
sionnelles de la HAS de 2007 sur le suivi et l’orientation des femmes
enceintes en fonction des situations à risque identifiées ne détaillent pas
la prise en charge spécifiquement recommandée en cas de RCIU [49].
Il existe par contre des recommandations aux États-Unis [50] et au
Royaume-Uni [51], publiées respectivement en 2000 et 2002, sur la
prise en charge du RCIU produites par les Collèges des gynécologues
obstétriciens (www.rcog.org.uk et www.acog.org). Les recommandations
américaines sont focalisées sur l’étiologie, le diagnostic et la prise en
charge du RCIU, définis comme une estimation de poids fœtal inférieur au 10e percentile d’une courbe de poids. Les auteurs constatent
que cette définition réunit des enfants de faible poids « bien portants »
comme des enfants n’atteignant pas leur potentiel de croissance en
raison d’une pathologie. Aucune recommandation sur le choix de la
courbe de référence n’est donnée. Selon ce texte, l’intérêt de l’utilisation de courbes tenant compte de l’ethnie et des caractéristiques
géographiques de la population dans un pays est insuffisamment
démontré, et la distinction des situations individuelles est difficile à
mettre en œuvre dans un pays dont la population est hétérogène et
migre fréquemment.
Les recommandations anglaises abordent par contre la question du
choix de la courbe de référence. Leurs préconisations sont la prise en
compte des facteurs physiologiques influençant le poids fœtal.
L’utilisation de courbes ajustées individuelles de référence de hauteur
utérine et de poids fœtal au cours du dépistage est donc privilégiée
[52]. Les niveaux de preuves associés à ces recommandations sont de
niveau II (études contrôlées sans randomisation ou enquêtes quasi
expérimentales) et III (enquêtes non expérimentales) sur une échelle
allant de I à IV.
I.3.c. Comment utiliser en pratique les courbes ajustées
individuelles ?
L’institut périnatal de Birmingham, dirigé par Jason Gardosi, a
développé un site internet très documenté sur lequel 5 modèles adaptés
respectivement à 5 pays différents sont accessibles et les outils de
construction des courbes téléchargeables (www.gestation.net). Le
développement informatique d’applications locales ou accessibles sur
internet ne pose pas de problème technique particulier. L’ajout de
références ajustées individuelles de poids peut aussi s’envisager dans les
dossiers périnatals informatisés ou dans les logiciels installés sur les
appareils d’échographie.
En pratique, la saisie de 4 informations supplémentaires par enfant
est nécessaire : taille, poids en début de grossesse et parité de la mère,
75
GOFFINET
&
COLL.
sexe chez l’enfant. Le respect du choix des parents vis-à-vis de la
connaissance du sexe de leur enfant doit être pris en compte dans
l’édition de compte rendu ou l’impression de courbes. L’accès aux
courbes ajustées individuelles doit probablement être double, par
utilisation d’un logiciel installé sur l’appareil d’échographie de manière
à obtenir un percentile ajusté individuel après avoir procédé de
manière habituelle à l’estimation de poids fœtal. Mais aussi par une
application locale isolée, un site internet ou un module de dossier
médical informatisé de manière à être utilisable en consultation par
exemple. Le recours aux courbes de référence peut avoir lieu en
anténatal comme en postnatal. En échographie, consultation ou
hospitalisation anténatale, le poids fœtal estimé peut être reporté sur la
courbe de croissance attendue pour chaque enfant. En postnatal, les
néonatologistes utilisent habituellement des courbes de poids de
naissance pour prescrire l’alimentation du prématuré, mais rien ne
s’oppose à ce que l’évaluation de la croissance postnatale se fasse au
moyen des courbes ajustées individuelles. Cette évolution serait aussi
l’occasion d’une harmonisation des pratiques souvent hétérogènes,
même au sein d’une même maternité.
II. INTÉRÊT DE L’UTILISATION DES COURBES AJUSTÉES
INDIVIDUELLEMENT : DONNÉES SCIENTIFIQUES
II.1. Principaux travaux publiés
Jusqu’à présent, la majorité des travaux utilisant les courbes
ajustées individuelles sont des études rétrospectives visant à démontrer
que cette définition améliore l’identification d’enfants à risque par
rapport à une définition en population. Ainsi, 9 études analysent spécifiquement l’état de santé des enfants reclassés RCIU ou au contraire
non RCIU, lorsqu’on applique les courbes ajustées individuelles au lieu
d’une courbe en population, que ce soit des courbes de poids de
naissance ou des courbes de poids fœtal in utero [43, 48, 53-59]. Le
tableau 2 synthétise les caractéristiques de ces différentes études.
En dehors de ces principaux articles, d’autres méthodes sont
utilisées pour étudier la pertinence de la définition ajustée individuelle
du faible poids par rapport aux courbes en population, en particulier
des études de qualités diagnostiques des courbes pour prédire des
évènements morbides associés au RCIU [60, 61]. Ces travaux ne se
76
UTILISATION DES COURBES INDIVIDUALISÉES DE CROISSANCE FŒTALE : INTÉRÊT POUR LA PRATIQUE ET LA RECHERCHE
sont pas spécifiquement intéressés aux enfants reclassés, mais évaluent
la valeur prédictive du RCIU en fonction de sa définition pour
identifier la mort fœtale in utero ou le décès néonatal.
Tableau 2 - Synthèse des travaux publiés sur la comparaison entre courbes
ajustées individuelles selon le modèle de Gardosi et courbe de référence en
population dans l’identification d’enfants à risque
Auteur
(par ordre
alphabétique)
Pays
Échantillon
Courbe de
référence en
population
Clausson
et coll., 2001
[53]
Suède
Registre national, 326 377 Courbe de
naissances, singletons sans poids de naismalformations congénitales sance (ajustée
sur le sexe)
De Jong
et coll., 1997
[54]
Pays-Bas
Maternité universitaire
Courbe de
d’Amsterdam : 217 naissances de poids de
mères primipares, hypertendues, naissance en
fumeuses et/ou ≥ 35 ans, et de population
mères multipares avec ATCD de (ajustée sur le
RCIU ou prééclampsie
sexe)
Ego et coll.,
2006 [43]
Figueras
et coll., 2007
[55]
Espagne
Fréquence
du RCIU
Courbe en
population
Courbes ajustées
individuelles
Fréquence des
reclassements
(1) RCIUpop–
nonRCIUaj
(2) nonRCIU
pop–RCIUaj
Association des groupes (1)
et (2) avec la morbidité et
mortalité néonatale
(référence = nonRCIUpopnonRCIUaj)
Indicateur 1
Indicateur 2
OR [IC 95 %] OR [IC 95 %]
Apgar 5 min < 4 :
MFIU
(1) 1,2 [0,8-1,9] (1) 1,2 [0,9-1,5]
(2) 6,1 [5,0-7,5] (2) 2,2 [1,9-2,7]
9,4 %
9,4 %
(1) 2,7 %
(2) 2,7 %
14 %
31 %
(1) 0 %
(2) 17 %
France 5 maternités de niveaux III et IIB, Courbe de
56 606 naissances, singletons, poids in utero
hors IMG, sans malformations (ajustée sur le
congénitales, ≥ 22 semaines
sexe)
13,9 %
14,7 %
(1) 2,7 %
(2) 1,8 %
Décès périnatal
MFIU
(1) 1,4 [0,4-4,6] (1) 1,1 [0,4-2,5]
(2) 4,5 [2,5-8,1] (2) 2,6 [1,6-4,2]
Maternité universitaire de
Courbe de
Barcelone, 13 661 naissances,
poids de
singletons sans malformations naissance (sans
congénitales, ≥ 24 semaines
précision)
11,1 %
13,7 %
(1) 1,5 %
(2) 4,1 %
Décès
périnatal
(1) 1,8 [0,4-7,2]
(2) 3,2 [1,6-6,2]
Courbe de poids
de naissance (non
ajustée sur le sexe)
9,4 %
11,7 %
(1) 1,6 %
(2) 3,8 %
Décès néonatal
MFIU
(1) 1,9 [0,3-13,9] (1) 1,9 [0,3-13,9]
(2) 10,8 [5,6-0,8] (2) 10,8 [5,6-20,8]
McCowan
et coll., 2005
[57]
Maternité universitaire
Courbe de poids
Nouvelle
Zélande d’Auckland, 374 naissances avec de naissance en
suspicion anténatale de RCIU au population
10e percentile (circonférence
(ajustée sur le
abdominale < 10e percentile)
sexe)
81 %
80 %
(1) 8 %
(2) 7 %
Césarienne pour
Doppler
souffrance
ombilical
fœtale :
pathologique
(1) 0,5 [0,2-1,8] (1) 2,8 [0,3-29]
(2) 2,6 [1,3-5,6] (2) 9,8 [1,2-77]
Mongelli
et coll., 1996
[58]
Courbe de
Royaume- Birmingham, 267 naissances à
terme, non transférées, sans poids in utero
Uni
anomalies congénitales, scores (ajustée sur le
d’Apgar et pH normaux à la
sexe)
naissance
34,3 %
26,4 %
(1) 9 %
(2) 2 %
Gardosi et coll., États2009 [56]
Unis
15 maternités, 34 712
naissances singletons
Morbidité
neurologique
(1) 1,6 [0,4-6,5]
(2) 3,2 [1,7-6,1]
Odibo et coll.,
2011 [48]
ÉtatsUnis
Maternité universitaire de Courbe de poids
Washington, 12 456
de naissance
naissances singletons sans (non ajustée sur
malformations congénitales
le sexe)
27,2 %
30,6 %
(1) 1,9 %
(2) 5,5 %
MFIU
(1)
(2) 0,4 [0,1-1,5]
(3) 9,5 [7,2-12,4]
Zhang et coll.,
2008 [59]
Suède
782 303 naissances du
Courbe de poids
registre : singletons sans de naissance en
malformations congénitales population (ajustée sur le sexe)
9,8 %
10,0 %
(1) 2,4 %
(2) 2,6 %
MFIU (ajusté Décès néonatal
sur AG)
(ajusté sur AG)
(1) 1,6 [1,2-2,1] (1) 1,5 [1,0-2,3]
(2) 2,4 [2,1-2,8] (2) 2,1 [1,7-2,6]
Séjour en réanimation
néonatale > 7 jours
(1) 0,8 [0,4-1,6]
(2) 2,1 [1,6-2,8]
MFIU : mort fœtale in utero ; AG : âge gestationnel
(1) RCIUpop-nonRCIUaj : enfants identifiés comme RCIU à l’aide des courbes classiques et reclassés non RCIU avec les courbes individualisées
(2) nonRCIUpop-RCIUaj : enfants reclassés comme RCIU à l’aide des courbes individualisées alors qu’ils étaient classés non RCIU avec les courbes
classiques
77
GOFFINET
&
COLL.
En revanche, il n’existe aucune étude comparative, randomisée ou
non, ayant testé l’impact de l’utilisation de ces courbes individualisées
dans la prise en charge des grossesses à risque ou en population
générale. Ainsi, les niveaux de preuve de la pertinence de l’utilisation
de ces courbes ne pourront pas être élevés.
Les 9 études sélectionnées viennent de différents pays : 2 sont des
enquêtes en population en Suède [53, 59] ; 6 autres sont des enquêtes
réalisées à partir de séries hospitalières de grossesses à bas risque au
Royaume-Uni [58], à haut risque aux Pays-Bas [54], dans un contexte
de suspicion anténatale de RCIU en Nouvelle-Zélande [57], à partir de
maternités universitaires, de niveau III ou dites « de référence » en
Espagne [55], en France [43] et aux États-Unis [48], ou à partir d’un
échantillon multicentrique aux États-Unis [56]. La courbe de référence
en population est variable selon ces études : il s’agit de courbes de
poids de naissance adaptées au pays ou à l’échantillon dans 7 cas [48,
53-57, 59], de courbes de poids in utero dans les 2 autres [43, 58]. Seules
4 d’entre elles ne sont pas ajustées sur le sexe [48, 55-57].
II.2. Conséquences sur la fréquence globale du RCIU et des
reclassements des fœtus
Parmi les 6 publications sur de larges échantillons ou en population, deux retrouvent des proportions comparables de RCIU d’une
courbe de poids de naissance aux courbes ajustées individuelles [53,
59], alors que les autres montrent une augmentation de la proportion
de RCIU de + 0,8 % à + 3,4 % par les courbes ajustées individuelles
[43, 48, 55, 56]. Ce changement de taux s’explique par la fréquence des
enfants nés de mères de caractéristiques anthropométriques éloignées
de la moyenne, ainsi que par le niveau de risque de la population. Ces
variations de taux peuvent être majeures dans les séries hospitalières
[54, 58]. Lorsqu’une courbe de poids de naissance, d’allure sigmoïde,
est utilisée, les reclassements touchent préférentiellement les naissances
prématurées et post-terme [59]. À l’opposé, lorsque la courbe en population est une courbe in utero, les deux références sont « parallèles » et
la répartition des reclassements est indépendante de l’âge gestationnel
[43]. Ces reclassements touchent les enfants de poids « limite », et dans
l’étude française multicentrique, 90,3 % des enfants reclassés, quel que
soit le sens de ce reclassement, avaient un poids de naissance inférieur
au 25e percentile de la courbe de référence en population retenue [43].
L’analyse des caractéristiques des patientes montre que les discordances de diagnostic concernent préférentiellement les enfants des
78
UTILISATION DES COURBES INDIVIDUALISÉES DE CROISSANCE FŒTALE : INTÉRÊT POUR LA PRATIQUE ET LA RECHERCHE
femmes dont les caractéristiques de taille et poids s’éloignent des
valeurs moyennes : les enfants de primipares minces et de petite taille
sont fréquemment reclassés comme eutrophiques, alors que les enfants
de multipares fortes et grandes sont à l’inverse plus souvent considérés
comme des RCIU [43, 48, 56]. La proportion de ces cas est assez
homogène entre les 4 études multicentriques ou en population : le 1er
groupe représenterait 1,6 à 2,7 % des enfants et le 2e 1,8 à 3,8 % des
enfants, soit au total 4,5 à 5,4 % des enfants [43, 53, 56, 59].
Le travail rétrospectif de Figueras et coll. sur 7 645 grossesses
simples dans une maternité universitaire de Barcelone est le seul dans
lequel la suspicion anténatale de RCIU était une donnée disponible
[62]. Cette suspicion s’appuyait sur une référence locale de poids de
naissance et le Doppler ombilical. L’état de santé des enfants y a été
analysé selon la présence d’un RCIU défini rétrospectivement par les
courbes ajustées individuelles. Cette étude apporte deux éléments
intéressants. Le 1er est de montrer que parmi l’ensemble des RCIU
définis par le modèle ajusté individuel (12,6 %), 62 % étaient méconnus
et n’avaient pas bénéficié de surveillance particulière (échographie tous
les 15 jours et Doppler ombilical). Ces enfants ne présentaient pas
d’excès de risque de décès périnatal, mais on constatait chez leurs
mères deux fois plus de prééclampsie, et des taux de césarienne pour
souffrance fœtale et d’Apgar inférieur à 7 à la naissance trois fois plus
fréquents comparés aux non RCIU. Le 2e résultat porte sur l’apport du
Doppler ombilical. Parmi les 38 % restants correspondant à des cas
« concordants », et donc identifiés en période anténatale, 19 % présentaient un faible poids associé à des anomalies du Doppler ombilical et
81 % un faible poids isolé. L’excès de morbidité (Apgar ou pH bas,
césarienne avant travail ou transfert en néonatologie) constaté parmi
ces 2 sous-groupes d’enfants était de l’ordre de 2 et 4. Certains auteurs
ont fait l’hypothèse que la présence d’un Doppler ombilical pathologique permettait de distinguer le faible poids constitutionnel du faible
poids pathologique [63, 64]. Ce dernier résultat semble montrer que
l’absence d’anomalies du Doppler ombilical ne permet pas d’être
rassuré sur le pronostic des enfants.
II.3. Limites méthodologiques des données disponibles
Malgré de nombreuses analyses sur l’amélioration potentielle de
l’état de santé périnatale, il est difficile de conclure pour plusieurs
raisons.
79
GOFFINET
&
COLL.
La nature rétrospective des travaux limite l’interprétation des
résultats. Des données plus détaillées sur le contenu de la surveillance
prénatale et des pratiques dont ont pu bénéficier les enfants seraient
nécessaires pour mieux interpréter les résultats :
— si un excès de risque est constaté chez les « nouveaux cas » de
RCIU, on ne peut pas affirmer que ces enfants correspondaient
réellement à des RCIU non diagnostiqués, et que la morbimortalité constatée pourrait être évitée. Inversement, l’état de
santé rassurant des enfants de faible poids constitutionnel est
peut-être le fait d’une surveillance accrue, et on ne peut pas
affirmer qu’il est légitime de réduire le suivi des mères concernées ;
— le classement des enfants à partir du poids de naissance ne
reflète pas forcément le classement qui pourrait être réalisé en
cours de grossesse sur l’estimation de poids fœtal ;
— l’apport de l’utilisation des courbes ajustées individuelles devrait
être interprété en tenant compte des autres arguments utilisés
par le clinicien pour apprécier le bien-être fœtal (évolution de la
croissance, Doppler, rythme cardiaque fœtal) et porter une
conclusion clinique en faveur ou non d’une suspicion de RCIU.
Par ailleurs, l’extrapolation des résultats publiés est d’autant plus
difficile que les courbes de croissance utilisées en France sont hétérogènes, et que les pratiques actuelles de dépistage et de surveillance de
la croissance fœtale sont mal connues.
Finalement, seule une étude comparative, au mieux randomisée,
comparant l’utilisation des courbes individualisées à l’utilisation des
courbes habituelles permettrait de conclure sur les bénéfices et inconvénients. Cette étude n’existe pas actuellement.
Au total, les données montrent que le groupe des RCIU reclassés
(identifiés eutrophes avec les courbes habituelles) grâce à l’utilisation
des courbes individualisées est exposé à une augmentation importante
du risque de morbidité et mortalité périnatale. Même si le risque
associé est probablement intermédiaire par rapport à celui observé
dans le groupe des RCIU communs aux deux définitions, la prise en
compte de ce groupe de fœtus permettrait une meilleure estimation des
risques périnatals liés au RCIU en général. Par ailleurs, la surveillance
de certains enfants de faible poids constitutionnel pourrait être allégée
sans nuire à leur santé. Cependant, il n’existe pas de données comparatives pour conclure au bénéfice en termes de santé périnatale de
l’utilisation des courbes individualisées.
80
UTILISATION DES COURBES INDIVIDUALISÉES DE CROISSANCE FŒTALE : INTÉRÊT POUR LA PRATIQUE ET LA RECHERCHE
II.4. Un bénéfice potentiel discuté…
II.4.a. Remise en question de la pertinence du modèle ajusté
individuel
Récemment sont apparues dans la littérature des discussions
méthodologiques sur la conception du modèle, notamment sur les
paramètres d’ajustement dans l’ensemble de la population comme la
taille ou la parité chez la mère [65-67]. En effet, le principe est de tenir
en compte des facteurs modifiant physiologiquement la croissance. Or
la petite taille maternelle peut être liée à un contexte de malnutrition
par exemple, de même les primipares sont plus fréquemment exposées
aux pathologies vasculaires comme la prééclampsie. Dès lors, considérer comme « normal » le faible poids des enfants de ces femmes peut
conduire à méconnaître d’authentiques RCIU. L’étude multicentrique
française n’a pas mis en évidence de bénéfice à exclure la parité du
modèle, bien que cette simplification permette effectivement d’identifier de nouveaux cas chez des primipares présentant souvent une
pathologie vasculaire [65]. La critique adressée au modèle par
Hutcheon et Platt est de dire que le rôle des caractéristiques maternelles (taille, poids, parité) est marginal par rapport au sexe et à l’âge
gestationnel, et que l’ajustement sur ces facteurs améliore très faiblement la prédiction de la morbimortalité associée au RCIU [67].
La même équipe a publié dans le Lancet en 2011 une large étude
internationale montrant une morbimortalité comparable chez les
RCIU, qu’ils soient identifiés par une courbe avec ou sans ajustement
individuel [68]. Les auteurs concluent à l’inutilité d’ajuster individuellement les références de poids, l’essentiel étant de disposer d’une
référence adaptée à la population d’un pays. Cet article a suscité
plusieurs commentaires [69, 70]. Effectivement, dans cette étude
comme dans les précédentes, parmi l’ensemble des RCIU identifiés par
le modèle ajusté ou une autre référence, environ les ¾ sont classés
RCIU quelle que soit la référence, et le contraste lié aux RCIU
discordants est difficile ou impossible à mettre en évidence si on
s’intéresse globalement à l’ensemble des RCIU sans isoler les enfants
reclassés [71].
II.4.b. Une méthodologie d’évaluation du bénéfice de l’ajustement
individuel de la référence de poids parfois inadaptée
L’impact de l’ajustement individuel ne peut être apprécié correctement que si les 2 modèles de croissance, autrement dit l’allure de la
courbe en population et celle des courbes ajustées individuelles, sont
identiques. Le modèle de Gardosi s’appuie sur la croissance in utero des
81
GOFFINET
&
COLL.
enfants décrite par Hadlock. Si le même modèle de croissance est
retenu pour la courbe en population, la seule différence entre les
références de poids correspond bien aux effets de l’ajustement individuel [43]. Lorsque la courbe de référence en population est une courbe
de poids de naissance, les seuils de poids varient du fait de l’allure
sigmoïde de ces courbes par rapport à l’allure plus linéaire des courbes
in utero [59].
Les reclassements concernent une faible proportion de nouveaunés puisque ce taux est par exemple d’environ 5 % au 10e percentile,
et ils touchent les enfants dont le poids est proche de ce seuil. On peut
considérer qu’il s’agit d’un groupe intermédiaire en termes de morbimortalité, entre les eutrophes et les RCIU classés avec les deux
méthodes. Par conséquent, les RCIU identifiés par une courbe lambda
ou par le modèle ajusté individuel sont en grande majorité les mêmes
enfants, et leur morbidité est fréquemment non statistiquement
différente. La proportion des reclassés malgré leur excès de morbidité
ne permet pas de mettre en évidence une augmentation des risques
présentés par les enfants RCIU en général.
Enfin, adopter la méthodologie des études diagnostiques en
utilisant la définition du RCIU comme test de dépistage de mortinatalité ou de décès néonatal manque de pertinence. Il a été reproché
aux courbes ajustées individuelles, qui ont certes une meilleure sensibilité, d’avoir une moins bonne valeur prédictive de décès périnatal
que les courbes de poids en population. Cet argument, bien que statistiquement correct, n’a qu’un faible intérêt en clinique. Le caractère
prédictif du RCIU sur le décès reste faible et présente peu d’intérêt
quelle que soit la courbe utilisée.
Le débat en cours dans la littérature sur l’intérêt de l’utilisation des
courbes ajustées individuelles de poids fœtal reste ouvert, comme en
témoignent une controverse [72-74] ainsi que 2 revues de la littérature
en 2010 et 2011 [71, 75]. Mais en l’état actuel des connaissances, cette
discussion ne progresse pas en l’absence d’études prospectives interventionnelles.
82
UTILISATION DES COURBES INDIVIDUALISÉES DE CROISSANCE FŒTALE : INTÉRÊT POUR LA PRATIQUE ET LA RECHERCHE
III. IMPLICATIONS POUR LA PRATIQUE CLINIQUE ET
DANS LE DOMAINE DE LA RECHERCHE
III.1. En pratique clinique
En gardant à l’esprit qu’il n’existe pas de preuves scientifiques à ce
jour, l’adoption des courbes ajustées individuelles devrait améliorer
l’adéquation entre l’intensité de la surveillance de la croissance fœtale
et le niveau de risque présenté par l’enfant, par une meilleure distinction entre faibles poids constitutionnels et pathologiques. On peut
rapprocher l’apport de cette méthode avec l’apport en cas de suspicion
de RCIU en anténatal, du Doppler ombilical ou de la vitesse de
croissance fœtale lorsqu’elle est disponible. En cas de résultat normal,
ces éléments permettent au clinicien de « classer » (jusqu’à la prochaine
évaluation) comme non pathologique les mensurations de ce « petit »
fœtus.
En conséquence, la pratique pourrait être moins interventionnelle
et iatrogène pour les fœtus RCIU reclassés eutrophes (« faux positifs »),
et diminuer chez ces couples mère enfant le nombre d’échographies,
de consultations, d’hospitalisations, de situations de stress ou d’extractions injustifiées. À l’opposé, les fœtus reclassés RCIU (faux négatifs
lorsqu’on utilise les méthodes habituelles) pourraient être mieux
surveillés et cela pourrait conduire à améliorer leur santé par une
meilleure identification d’évènements potentiellement évitables.
Parallèlement, des données commencent à être publiées sur
l’utilisation de cette méthode dans le dépistage de la macrosomie,
laissant penser que les courbes ajustées individuelles permettraient
également de mieux distinguer la macrosomie de l’excès de poids
constitutionnel [76, 77]. Cette 1re publication a comparé le seuil arbitraire de 4 000 g au 90e percentile d’une courbe de poids de naissance
en population et du modèle ajusté individuel. Les auteurs constatent
effectivement que parmi les gros poids, il semble pertinent de retenir
un seuil individuel de macrosomie puisqu’on constate une morbidité
obstétricale accrue (dystocie des épaules, déchirures grades 3 et 4,
césarienne pour disproportion fœto-pelvienne) chez les faux négatifs,
alors qu’il n’y a pas d’excès de risque chez les faux positifs.
Le bénéfice de l’utilisation des courbes ajustées individuelles sur le
devenir à moyen et long termes n’est pas documenté actuellement. De
même des travaux en néonatologie pourraient s’envisager. La définition
ajustée individuelle du RCIU pourrait retentir sur la prise en charge
83
GOFFINET
&
COLL.
nutritionnelle des RCIU, et la surveillance de la croissance staturopondérale en particulier chez le prématuré.
III.2. Implications pour la recherche et perspectives
III.2.a. Étude interventionnelle : intérêt et faisabilité
Il est probable que même en l’absence d’évaluation correcte de
l’utilisation de ces courbes, elles diffuseront dans les pratiques dans les
mois et années à venir, compte tenu de leur caractère innovant et
intellectuellement séduisant. En l’absence de maîtrise de cette diffusion,
la mesure de leur impact sera alors impossible.
En cas d’étude interventionnelle, le critère de jugement le plus
pertinent pourrait être la mortinatalité, les RCIU méconnus étant
largement incriminés dans la survenue de mort fœtale in utero au 3e trimestre [78]. L’importance de cet axe de recherche est soulignée dans
l’une des 6 revues de littérature 2011 du Lancet sur la mortinatalité. Cet
article, consacré aux perspectives de diminution de la mortinatalité
dans les pays développés, retient dans le « top ten » des priorités de
recherche l’évaluation du « rôle de la surveillance de la croissance
fœtale par les courbes ajustées individuelles sur la détection des
anomalies de la croissance fœtale, la réduction de la mortinatalité, de
la mortalité néonatale et infantile » [79].
L’objectif d’une étude interventionnelle serait de montrer que
l’introduction des courbes ajustées individuelles permet une amélioration de l’état de santé néonatal, idéalement jugé sur le décès et/ou les
conséquences à moyen terme chez les enfants. L’impact du changement
de références de poids devrait être mesuré en introduisant les courbes
individualisées dans la pratique sans que le clinicien soit influencé par
la notion de reclassement d’une courbe à l’autre. Les résultats parmi les
enfants classés de manière discordante ne seraient donc plus estimés
mais le jugement se ferait sur l’ensemble de la population soumise au
dépistage. Compte tenu de la puissance nécessaire pour montrer un
bénéfice, un essai randomisé individuel visant à montrer une diminution de la mortinatalité nécessiterait la réalisation d’un essai en population incluant quasiment l’ensemble des naissances françaises pendant
un an, ce qui est difficilement envisageable. Cette estimation est liée au
faible nombre d’enfants impactés par l’intervention et à la rareté de
l’évènement.
Dans la mesure où les courbes ajustées individuelles reclassent
essentiellement les enfants de poids « intermédiaire », cibler d’emblée
dans un essai randomisé les enfants de faible poids pourrait être une
84
UTILISATION DES COURBES INDIVIDUALISÉES DE CROISSANCE FŒTALE : INTÉRÊT POUR LA PRATIQUE ET LA RECHERCHE
alternative permettant de réduire le nombre de sujets. Le faible poids,
défini de manière homogène comme un poids inférieur au 25e percentile d’une courbe en population, par exemple lors de l’échographie du
2e trimestre, pourrait être retenu comme critère d’inclusion. Deux
inconvénients peuvent être soulignés : celui de réduire la population
d’étude en manquant une partie (probablement 10 %) des enfants
reclassés, et celui de ne mesurer l’état de santé que de ces enfants. Ces
résultats partiels ne permettraient pas de mesurer l’impact des courbes
ajustées individuelles en population.
Du point de vue des critères de jugement, l’adoption d’un critère
composite de morbimortalité plutôt que la mortinatalité seule ne
permet pas d’obtenir un meilleur contraste. Malgré des taux d’évènements plus élevés, la diminution relative attendue est plus faible avec
un critère composite qu’avec la mortinatalité en raison du caractère
multifactoriel expliquant la morbidité néonatale, écueil moins grand
lorsque l’on choisit la mortinatalité qui est l’issue potentiellement
évitable en cas d’identification, puis de meilleure prise en charge d’un
RCIU. Par analogie, les essais randomisés comparant deux groupes
avec et sans Doppler ombilical ont montré une réduction de moitié de
la mortinatalité en cas d’introduction du Doppler ombilical sans différence sur la morbidité néonatale.
L’alternative d’énoncer une hypothèse sur une modification de
pratiques (nombre d’échographies, hospitalisations, déclenchement,
césariennes…) pose d’autres problèmes. Le 1er est la méconnaissance
des pratiques actuelles de dépistage et de surveillance des RCIU en
fonction des critères anténataux de bien-être fœtal. Le 2e est que
l’augmentation des interventions chez les faux négatifs, associée à
l’inverse à une diminution chez les faux positifs, devrait aboutir à des
taux d’extractions par exemple très proches entre les deux bras. La
différence attendue est probablement qualitative - extraction adaptée à
la gravité de l’enfant par exemple - plutôt que quantitative, mais
comment montrer que ces interventions s’adressent à des enfants plus
à risque, alors que justement, on espère réduire la fréquence des
évènements parmi eux ? Cette notion de risque anténatal, pour être
applicable aux deux groupes intervention et contrôle, devrait être
définie indépendamment de la notion de RCIU.
III.2.b. Autres perspectives et implications pour la recherche
Des études d’observation à type d’enquêtes de pratiques permettraient de décrire les conséquences en termes de prise en charge en cas
d’utilisation des courbes individualisées ; il serait cependant nécessaire
de les comparer à des groupes avec pratiques habituelles à l’aide
85
GOFFINET
&
COLL.
d’études ici-ailleurs ou avant-après. Si ce type de modèle est adopté, il
sera nécessaire de réaliser des comparaisons des modèles dans le temps
et entre pays, et d’en faire des mises à jour.
Un meilleur classement des enfants de petits poids permettrait
probablement d’être plus pertinent dans l’étude des mécanismes, des
facteurs de risque ou de devenir des enfants avec RCIU. Ces études
pourraient être menées dans le domaine de l’anatomopathologie du
placenta, de la biologie, ou encore des facteurs environnementaux.
L’utilisation de ces modèles dans le dépistage de la macrosomie
nécessite des études mises en place spécifiquement pour répondre à
cette question car les problématiques, les décisions et les critères de
jugements sont très différents. Enfin, une extension du concept à la
biométrie fœtale, dès la datation, pourrait être proposée et étudiée.
CONCLUSION
La diffusion des courbes ajustées individuelles dans les recommandations et dans la pratique clinique reste rare actuellement.
Cependant, elle est probablement imminente compte tenu de l’intérêt
des cliniciens pour ce concept, et de la simplicité des outils permettant
leur utilisation. La mise en œuvre d’études interventionnelles prospectives évaluant l’impact de l’utilisation de ces courbes sur la santé
périnatale serait justifiée, mais pose des problèmes de faisabilité.
D’autres perspectives de recherche peuvent néanmoins s’envisager. Ces
nouvelles références de poids constituent très probablement un progrès
pour un petit groupe de femmes et d’enfants, et sont une opportunité
à une harmonisation de la définition du RCIU dans le domaine
clinique comme dans le domaine de la recherche.
86
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