Présentation détaillée des séminaires de l`EHESS 2016-2017

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Présentation détaillée des séminaires de l`EHESS 2016-2017
Consommations et prohibitions de
drogues : approche transversale
Séminaire EHESS, année 2016-2017
Lieux, horaires et dates :
Séance exceptionnelle d’ouverture, le mardi 11 octobre 2016, de 14h à 17h, salle Lombard, 96 bd.
Raspail, 75006 Paris
Puis le deuxième jeudi du mois = 10 novembre, 8 décembre 2016 ; 12 janvier, 9 février, 9 mars, 13
avril, 11 mai, 8 juin 2017. De 17h à 20h : amphithéâtre de l’EHESS, 105 bd. Raspail, 75006 Paris
Organisateurs :
Mariana Broglia de Moura, anthropologue, doctorante à l’EHESS
Anne Coppel, sociologue
Michel Kokoreff, sociologue, professeur des Universités à Paris 8
Bertrand Lebeau, médecin, membre de SOS Addictions
Julia Monge, anthropologue, doctorante à l’EHESS
Fabrice Olivet, directeur de l’Auto Support des Usagers de Drogues (ASUD)
Alessandro Stella, historien, directeur de recherche au CNRS
Après une première année consacrée aux prohibitions des drogues, nous ouvrons plus large
le spectre de l’analyse, nous interrogeant sur les consommations, les ressorts de la prise de drogues,
ses usages au cours des siècles et des espaces.
Ce séminaire se veut avant tout un lieu de réflexion et de recherche collective, visant la
synergie des sciences humaines et sociales avec le savoir accumulé par les usagers de drogues et les
professionnels de la santé. Une approche transversale innovante, dans sa méthodologie et ses
contenus, mixant à la fois les disciplines, les compétences théoriques et les savoirs pratiques. Nous
souhaitons que cette mise en commun de connaissances et d’analyses d’expériences puisse servir à
une meilleure appréciation tant de la phénoménologie des usages des drogues que des politiques
publiques qui les encadrent.
Nous abordons la question des drogues sous plusieurs aspects : sanitaires, juridiques,
économiques, géopolitiques, bien sûr, mais aussi culturels, historiques, anthropologiques,
sociologiques, psychanalytiques. Pour nous donner les moyens d’une compréhension plus
approfondie de la « question drogue », trop souvent traitée à l’arrivée et non en amont, il s’agit de
mettre en relief les conséquences induites par la législation prohibitionniste, la répression de masse
des trafiquants et des consommateurs et la prise en charge sanitaire des addictions. En effet, les
problèmes sanitaires liés aux conduites addictives, qu’il s’agisse d’alcool, de tabac, de médicaments
(benzodiazépines), ou de drogues illicites, ne représentent qu’une partie de la question. Dans la
consommation de drogues, les motivations anthropologiques, sociologiques, culturelles et
psychiques sont primordiales. À travers l’histoire et les espaces, l’usage des drogues se décline en
fonctions thérapeutiques, mystiques et/ou religieuses, mais aussi hédonistes. Bien entendu, les
drogues peuvent avoir des conséquences délétères pour les individus et les collectivités, et c’est
comme cela que les gouvernements nationaux et l’ONU depuis cent ans ont traité la question. Mais
les drogues ont été aussi, au cours du temps et des civilisations, employées comme solution à des
problèmes de nature médicale, psychique, sociale. C’est là le défi théorique, social et politique posé
par la question des drogues.
Nous parlons de drogues, employant le terme courant et populaire désignant les
psychotropes, à savoir des substances psychoactives qui ont un impact sur les perceptions, les sens,
les neurotransmetteurs. Si certaines drogues, illicites comme l’héroïne ou licites comme l’alcool et
les benzodiazépines, ont un fort potentiel d’addiction, assimiler tous les usages de drogues illégales
au concept d’addiction apparaît fort réductif et parfois impropre. L’addictologie, née de la confluence
de l’intervention médicale en toxicomanie et en alcoolisme, a élargi ensuite son spectre d’action au
tabac, au sexe, à l’adrénaline, aux jeux vidéo, de hasard et d’argent. En toute logique, le pas suivant
est d’y inclure l’addiction au sucre, un « fléau » sanitaire majeur à un niveau planétaire. Or, s’il est
certain que l’addiction au sucre sous toutes ses formes peut constituer une pathologie grave pour le
consommateur, et avoir des conséquences préjudiciables pour lui et pour la santé publique (et les
caisses de sécurité sociale …), cela ne fait pas du sucre un psychotrope. Pour une meilleure analyse et
appréciation de phénomènes divers, il convient ne pas faire de confusion entre drogues
psychotropes, substances addictives et conduites addictives. Les clefs des « portes de la perception »
ne sont pas les mêmes que celles des portes de la relaxation, et le recours à une substance ou à une
autre pour lutter contre la dépression, la souffrance, la peur, semble s’inscrire dans le destin de
l’humanité.
L’apport des sciences humaines et sociales, et nous considérons que les « sciences du corps »
en font partie intégrante, apparaît dès lors indispensable pour comprendre les processus à l’œuvre
dans les conduites d’usage de drogues, et par conséquent envisager les politiques publiques les plus
appropriées en matière de régulation de la production, du commerce et de la consommation des
drogues.