L`ARTICLE 23 DE LA CHARTE ET LA GESTION DES ADMISSIONS
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L`ARTICLE 23 DE LA CHARTE ET LA GESTION DES ADMISSIONS
L’ARTICLE 23 DE LA CHARTE ET LA GESTION DES ADMISSIONS À L’ÉCOLE Introduction La gestion des admissions d’enfants d’ayants droit ainsi que la gestion des admissions d’enfants de non ayants droit est un sujet qui vient d’être adressé dans l’arrêt La Commission scolaire francophone du Yukon no. 23 c. Procureure générale du Territoire du Yukon, 2011 YKSC 57 (ci-après « CSFY c. PG Yukon »). Nous allons faire un survol des principes juridiques établis par cet arrêt relatif à la gestion des admissions. Avant de commenter la décision du Yukon, il est utile d’explorer les plaidoiries et les arguments qui furent présentés au tribunal sur la gestion des admissions. De plus, il est important de mettre ce débat dans ses contextes démographiques et historiques. Les plaidoiries Le 18 février 2009, la Commission scolaire francophone du Yukon no 23 (ci-après « CSFY ») a déposé une déclaration contre la Procureure générale du Territoire du Yukon (ci-après « GY ») réclamant la pleine gestion scolaire dans les domaines des immeubles, des finances, du personnel, et des programmes. Elle a aussi demandé la construction d’une école secondaire autonome qui offrirait une équivalence en termes d’espace et de programmation. Le premier jour du procès, soit le 17 mai 2010, le GY a réclamé le pouvoir exclusif de gérer l’admission des enfants d’ayants droit et de non ayants droit. La Déclaration fut donc modifiée pour inclure les paragraphes suivants : 82 A Les articles 5, 6 et 9 du Règlement sur l'instruction en français portent sur l’admissibilité d’un élève à une école française langue première. L’article 5 définit quels parents peuvent être considérés résidents du district scolaire de la CSFY selon les catégories établies à l’article 23 de la Charte. L’article 6 du Règlement stipule que toute personne qui satisfait aux exigences de l’art. 5 doit fournir une déclaration sous serment à la Commission scolaire pour qu’elle soit considérée résidente du district et donc que ses enfants soient admissibles. La formule de la déclaration est en annexe au Règlement. Selon le paragraphe 4 de l’article 6, la CSFY doit fournir « une copie de toute déclaration au ministre, qui tranche quant à l’admissibilité d’un citoyen canadien à être résident du district scolaire 23. Cette décision est sans appel ». (notre soulignement) 82 B Le 17 mai 2010 le ministère de l'Éducation a signalé à la CSFY qu'il exigeait dorénavant l’utilisation de la déclaration sous serment et qu’elle soit déposer auprès du ministre de sorte que le ministre puisse trancher quant à l’admissibilité à l’école française langue première. C’est la première fois que le ministère exige qu’une déclaration soit utilisée et déposée auprès du ministre pour qu’il tranche quant à l’admissibilité. 82 C La demanderesse affirme que ces dispositions du Règlement sur l'instruction en français violent ses droits de gérer et contrôler ses institutions conférées par l’article 23 de la Charte. Elles minent également les efforts de la CSFY de réparer les torts du passé commis à la minorité franco-yukonnaise par 7025048.1 –2– les lois qui interdisaient l’enseignement en français et ensuite l’inaction du gouvernement territorial à faire la mise en œuvre de l’art 23 de la Charte. 82 D Pour exercer ces pouvoirs de gestion la CSFY a adopté une politique d’admission, qui fut amendée en 2009. Le Règlement sur l'instruction en français va à l’encontre de cette politique car il enlève de la CSFY le contrôle des admissions et l’accorde au Ministre. La demanderesse affirme que la prise de contrôle des admissions d’élèves aux écoles de la CSFY par le Ministre viole ces droits conférés par l’art. 23 de la Charte. La CSFY a revendiqué les ordonnances suivantes : g) une déclaration en vertu de l’art. 52 de la Charte que les articles 5, 6 et 9 du Règlement sur l’instruction en français sont inopérantes car elles sont incompatibles avec l’article 23 de la Charte; h) une ordonnance interlocutoire et permanente de suspension des articles 5, 6 et 9 du Règlement sur l’instruction en français en vertu de l’art. 24 de la Charte car elles sont incompatibles avec l’art. 23 de la Charte; et i) Une déclaration que la CSFY a le pouvoir en vertu de l’art. 23 de la Charte d’accorder la permission d’admission à des personnes non mentionnées à l’art. 23 de la Charte. Les contextes démographique et historique de l’éducation au Yukon En 2006 le Yukon avait une population de 30 400 habitants répartis dans 20 communautés, dont 22 200 habitaient Whitehorse (73 %). La population du Yukon représentait 0,1 % de la population du Canada, soit de 31 612 000. En 2009 la population du Yukon comptait 33 300 habitants. La population yukonnaise, dont la première langue apprise et encore comprise est le français, est passée de 1 110 en 1996, à 890 en 2001 et à 1 105 en 2006. En ajoutant ceux qui avaient le français et l’anglais ou une autre langue simultanément, cette catégorie compte 1 225 personnes (1105 + 110 + 10). Quatre-vingt huit pour cent de la population parle seulement l’anglais tandis que 11 % parlent l’anglais et le français. Quatre-vingt quinze pour cent des yukonnais utilisent surtout l’anglais comme langue d’usage à la maison. Cinq cents quarante yukonnais utilisent surtout le français à la maison, soit une augmentation de 30 % depuis 2001. La majorité des 1 225 personnes ayant le français comme première langue apprise habite Whitehorse mais il y en a aussi à Dawson, Carmacks, Haines Junction, Ibex Valley, Marsh Lake, Watson Lake et Yukon, « unorganised ». Il y a approximativement 70 % de mariages exogames parmi la population francoyukonnaise, ce qui fait qu’avec un bas taux de natalité, le nombre d’effectifs scolaires cibles parlant le français dès l’entrée scolaire est faible. 7025048.1 –3– Pour contrer la dénatalité, le Canada, et donc la CSFY, accueille plusieurs immigrants, situation qui est positif mais qui pose aussi des défis et augmente les besoins financiers. Entre 1996 et 2001, le taux d’accroissement de la population immigrée était quatre fois supérieur à celui de la population née au Canada. En 2006 il y avait 3 000 immigrants au Yukon, soit 10 % de la population. Soixante-quinze pour cent des immigrations vivent à Whitehorse. Soixante des 385 immigrants entre 2001-06 parlaient l’anglais et le français. Le profil de 2006 de la population yukonnaise selon l’âge démontre un vieillissement de la population. Les tranches d’âge entre 0 à 14 et 15 à 44 ont diminué tandis que les tranches d’âge entre 45 à 64 et plus de 65 ans ont augmenté, ce qui laisse entrevoir une réduction des effectifs scolaires chez la majorité anglophone. Lorsque le Territoire du Nord-Ouest et la Terre de Rupert furent annexés au Canada en 1870, une des conditions d’annexion qui fut constitutionalisé par le Décret en conseil sur la terre de Rupert et le territoire du Nord-Ouest, le 23 juin 1870, S.R.C. 1970, app. II, no 9 (Texte no. 3 de l’annexe à la Loi constitutionnelle de 1982) était le respect des droits linguistiques. Après la création du Territoire du Yukon en 1898, le droit à l’enseignement en français fut graduellement mis à l’écart, ce qui a mené à l’assimilation des franco-yukonnais. Pour contrer l’assimilation la CSFY doit mettre sur pied des programmes de francisation, de recrutement, de rétention et de communications dans les deux langues officielles. Après l’adoption de la Loi sur les langues officielles du Canada (1969), il y a eu une augmentation de demande d’instruction en français au Yukon. C’est en 1984 que le programme-cadre en français a vu le jour pour 34 élèves au sous-sol de l’école Whitehorse Elementary. En 1985 le gouvernement accorde le nom École Émilie Tremblay (ci-après « ÉÉT ») au programme cadre et en 1988, le programme obtient le statut d’école. En 1990, l’ÉÉT devient une école homogène dans des locaux préfabriqués vétustes. En 1991 le Comité scolaire de l’ÉÉT devient un Conseil scolaire mais sans pouvoir de gestion. Des classes préfabriquées sont ajoutées à l’ÉÉT pour accueillir le niveau secondaire mais sans gymnase et autres installations secondaires disponibles pour les Anglophones. En 1995, alors que l’on procède à la construction de la Garderie du petit cheval blanc, elle est rasée par le feu, victime d’un acte criminel. La Garderie continue à être un outil de francisation et de recrutement pour la CSFY. En 1996, après plusieurs années de lutte pour la gestion scolaire de la part des parents, le gouvernement adopte le Règlement sur le français, la CSFY est crée et la première élection des commissaires a lieu. En 1996, le nouvel édifice abritant l’ÉÉT ouvre ces portes et les locaux abritent aussi temporairement la Garderie du petit cheval blanc qui, en 1997, déménage dans son propre édifice avoisinant. Par 2001, l’ÉÉT accueille 132 élèves sur un nombre potentiel de 415 élèves. Depuis 1999 les parents dont les enfants fréquentent l’ÉÉT revendiquent la pleine gestion scolaire – le respect intégral de l’article 23 de la Charte et des dispositions de la Loi sur l’éducation qui accorde à la CSFY le droit de gérer exclusivement l’instruction en français. Le gouvernement néglige et refuse de l’accorder. 7025048.1 –4– La situation scolaire majoritaire au Yukon En 2008 il y avait 5 000 élèves répartis dans 14 écoles urbaines et 14 écoles rurales. Au niveau primaire (maternelle à la 7e année) il y avait 2 236 élèves dans les écoles urbaines et 671 dans les écoles rurales. Au niveau secondaire (de la 8e année à la 12e année) il y avait 1 682 élèves dans les écoles urbaines et 422 élèves dans les écoles rurales. Il y a un total 3 918 élèves à Whitehorse et 1 093 dans les écoles rurales. À Whitehorse, les écoles primaires ont de 58 à 410 élèves tandis que les écoles primaires rurales ont de 7 à 126 élèves. À Whitehorse, les écoles secondaires ont de 438 à 579 élèves tandis que les écoles secondaires rurales ont de 1 à 96 élèves. Les trois écoles secondaires anglophones à Whitehorse sont dans des édifices autonomes. Les 13 niveaux secondaires ruraux sont dans des écoles jumelés avec le niveau primaire. Un élève d’une école rurale peut fréquenter une école secondaire urbaine et le gouvernement fourni le transport et le service résidentielle (Gadzoosdaa Student Residence, 36 lits) à Whitehorse. Depuis 1996 les inscriptions scolaires sont en diminution dans les écoles anglophones passant de 6 305 à 5 000 en 2008, soit une réduction de 20 %. Il y a deux écoles d’immersion française au Yukon, soit la Whitehorse Elementary avec 410 élèves et la F.H. Collins Secondary avec 161 élèves. Il n’y a pas d’écoles rurales d’immersion française. Plusieurs des élèves avec le droit d’admission à l’ÉÉT sont dans les écoles d’immersion et les écoles anglophones. Il reste beaucoup de travail à faire pour recruter ces élèves. Onze des 14 écoles à Whitehorse opèrent à une capacité de 33 % à 62 %. Les écoles anglophones de Whitehorse ont la capacité d’accueillir un autre 3 200 élèves. Les écoles rurales opèrent à une capacité de 9 % à 33 % de l’espace disponible. Le GY exerce un contrôle direct sur plus d’éléments en éducation que tous les autres ministères de l’éducation au Canada. La CSFY est la seule commission scolaire au Yukon. C’est à partir du Ministère de l’éducation que le gouvernement gère directement toutes les écoles anglophones avec des conseils scolaires qui exercent un certain pouvoir de consultation. La situation scolaire minoritaire langue française au Yukon Depuis le début, les inscriptions n’ont cessé d’augmenter à l’ÉÉT avec certaines baisses temporaires : 7025048.1 1995 105 1996 113 –5– 1997 110 1998 107 1999 110 2000 113 2001 132 2002 116 2003 120 2004 123 2005 111 2006 145 2007 146 2008 158 2009 170 2010 185 2011 204 La CSFY et l’ÉÉT travaillent étroitement avec la garderie avoisinante car elle assure le recrutement et la francisation ainsi que l’épanouissement et le développement de la communauté franco-yukonnaise. La CSFY offre une pré-maternelle (4 ans) et une maternelle à temps plein à l’ÉÉT. La CSFY veut développer une pré-maternelle (3 ans) pour fins de francisation mais il manque d’espace et de financement pour le faire. Les niveaux préscolaire, primaire et secondaire sont tous dans le même édifice, ce qui fait qu’il manque d’espace pour l’augmentation futur des nombres. Pour des fins de recrutement, de francisation et pour répondre au mandat de l’épanouissement et développement de la communauté franco-yukonnaise, il est nécessaire que le niveau préscolaire demeure dans le même édifice que le primaire. La présence du niveau secondaire dans le même édifice que les niveaux préscolaire et primaire dans une école urbaine nuit au recrutement, à la rétention et au développement complet du niveau secondaire. L’espace alloué au niveau secondaire ne permet pas d’avoir l’espace nécessaire pour l’égalité réelle en termes d’éducation secondaire avec ce qui est offert dans les écoles secondaires anglophones de 7025048.1 –6– Whitehorse. De plus, il n’y a ni les installations physiques, ni les ressources financières et humaines pour offrir un plein éventail de cours secondaires disponible pour la majorité anglophone à Whitehorse. Sans cette égalité réelle, il est impossible de recruter et retenir les élèves, ce qui devient un cercle vicieux en termes de nombres et de financement disponible. Les arguments présentés au tribunal relatifs à la gestion des admissions La CSFY a posé deux questions au tribunal par rapport à la gestion des admissions dont les suivantes : 1. La CSFY a-t-elle le pouvoir de gérer et de contrôler l’admission des ayants droit et les permissions d’admission aux non-ayants droit? 2. La CSFY a-t-elle le pouvoir d’adopter et d’utiliser une politique d’admission pour accorder la permission d’admission, au cas par cas, aux enfants dont les parents n’ont pas de droits d’admission en vertu de l’article 23 de la Charte ? Selon la CSFY, le droit de gestion des admissions aux écoles de la minorité découle de l’article 23 de la Charte. L’établissement par le ministre de la CSFY avec pleins pouvoirs de gestion est un aveu que les nombres sont suffisants pour accorder les pouvoirs à l’échelon supérieur de l’échelle variable décrite dans l’arrêt Mahe. Les décisions sur les admissions d’élèves dont les parents ne sont pas ayants droit influencent certainement la langue et la culture. La CSFY a prétendu que le Règlement sur l’instruction en français adopté par le GY en 1996 affecte de façon négative les préoccupations linguistiques et culturelles légitimes de la minorité. Lorsqu’une commission scolaire de langue minoritaire est établie, la détermination de l’admissibilité à l’instruction devrait être assujettie au pouvoir exclusif de gestion et de contrôle de la minorité sur l’enseignement et les établissements de la minorité linguistique, sous réserve des normes et directives provinciales objectives compatibles avec l’article 23 de la Charte. Autrement, le caractère réparateur et protecteur de l’article 23 de la Charte serait grandement affaibli. Au Yukon, le nombre potentiel d’enfants d’ayants droit se situe autour de 400 sur un total d’élèves d’environ 5 034. Ce pourcentage de 8 % s’agit d’une proportion supérieure à la plupart des juridictions canadiennes et justifie l’échelon supérieur du critère variable. Les admissions sont un pouvoir de gestion et de contrôle qui touchent la langue et la culture. Dans l’arrêt Mahe et les décisions subséquentes, dont Arsenault-Cameron, la Cour suprême du Canada a reconnu, eu égard à l’objet de l’article 23, qu’il revenait aux représentants de la communauté minoritaire officielle de contrôler exclusivement tous les aspects qui avaient un impact direct ou indirect sur la langue et la culture dans l’école. Dans Mahe, la Cour suprême du Canada a reconnu que, même dans un contexte où les nombres n’étaient pas suffisants pour avoir une commission scolaire indépendante, la communauté minoritaire avait le droit à une représentation pro rata garanti au sein 7025048.1 –7– d’une commission scolaire anglophone. Ces représentants de la minorité francophone auraient un pouvoir exclusif sur au moins cinq pouvoirs de gestion, dont les suivants : 1) les dépenses de fonds prévus pour cette instruction et ces établissements; 2) la nomination et la direction des personnes chargées de l'administration de cette instruction et de ces établissements; 3) l'établissement de programmes scolaires; 4) le recrutement et l'affectation du personnel, notamment des professeurs; 5) la conclusion d'accords pour l'enseignement et les services dispensés aux élèves de la minorité linguistique. (Mahe, à la p. 41.) En 2000, la Cour suprême du Canada, dans l’arrêt Arsenault-Cameron, a ajouté un sixième pouvoir exclusif de gestion, dont celui de choisir l’emplacement d’une école lorsqu’une commission scolaire francophone (« CSF ») existe et décide qu’il est nécessaire de construire une école. Le pouvoir ministériel relatif à la construction de l’école et de son emplacement est subordonné au pouvoir décisionnel d’une CSF. L’article 23 est un seuil et non un plafond. Le libellé de l’article 23 ne dit pas que seulement ces trois catégories de citoyens ont le droit d’envoyer leurs enfants à une école de la minorité. À notre avis, l’objet de l’article 23, le caractère réparateur, et les principes d’interprétation de l’article 23 militent en faveur d’une conclusion analogue que le pouvoir de gérer les admissions d’élèves aux écoles de la minorité revient d’abord à la CSFY et non à la majorité ou à l’État car ces admissions touchent directement la langue et la culture. Les deux seules exceptions à ce pouvoir d’une commission scolaire de gérer les admissions qui justifieraient l’intervention de l’État sont : (1) si la langue de la majorité d’une province ou territoire est menacé d’assimilation par la langue de la minorité officielle de cette même province ou territoire, et (2) si l’école minoritaire ne répond plus à son mandat d’école française langue première et l’objet de l’article 23. La Cour suprême du Canada a reconnu la première exception dans les arrêts Solski et Nguyen, tenant compte du cas spécifique du Québec où la langue de la majorité est toujours menacée par l’assimilation dans un contexte nord américain. Dans ce cas particulier, la Cour suprême du Canada reconnait à l’État le droit de limiter l’accès à l’école de la minorité aux ayants droit. Par contre, même dans ce contexte, la Cour suprême du Canada est très exigeante sur l’État lorsque vient le temps d’évaluer la portée de toute disposition législative ou règlementaire qui limite l’accès à l’école de la minorité officielle en vertu de l’article 23 de la Charte. (Voir Solski et Nguyen.) 7025048.1 –8– Si le ministre de l’Éducation du Yukon a un intérêt légitime dans le contenu et les normes qualitatives des programmes d’enseignements relatif à l’instruction minoritaire au Yukon, il peut seulement encadrer les admissions de la CSFY dans la mesure que ces normes et programme viennent appuyer de façon véritable la communauté linguistique minoritaire et l’objet de l’article 23. La province a un intérêt légitime dans le contenu et les normes qualitatives des programmes d’enseignement pour les communautés de langues officielles, et elle peut imposer des programmes dans la mesure où ceux-ci n’affectent pas de façon négative les préoccupations linguistiques et culturelles légitimes de la minorité. La taille des écoles, les établissements, le transport et les regroupements d’élèves peuvent être réglementés, mais tous ces éléments influent sur la langue et la culture et doivent être réglementés en tenant compte de la situation particulière de la minorité et de l’objet de l’art. 23. (notre soulignement) Arsenault-Cameron, précité, au paragr. 53. On ne peut pas s’attendre à ce que les représentants de la majorité comprennent totalement les ramifications et les conséquences des choix faits par la minorité à cet égard. Arsenault-Cameron, précité, au paragr. 54. Selon le Dr Rodrigue Landry, expert témoin de la CSFY lors du procès, il est important que les critères et les procédures d’admission aux écoles de la minorité ainsi que l’adhésion à la communauté soient déterminés par la communauté minoritaire, par l’entremise de ses institutions et non par la société dominante. Il est donc important pour une communauté en contexte minoritaire d’avoir le maximum de contrôle sur ses institutions. La position du GY Le GY prétend que le pouvoir de gérer les admissions découle de sa compétence constitutionnelle dans le domaine de l’éducation (en vertu de l’article 92 de la Loi constitutionnelle de 1867 ou de la Loi constitutionnelle de 1871, qui a reconnu au gouvernement fédéral le pouvoir exclusif de gérer tout territoire ne faisant pas partie d’une province). Le gouvernement fédéral a ensuite adopté la Loi sur le Yukon et a délégué au GY son pouvoir de gestion en matière d’éducation dans le territoire. (Voir Loi sur le Yukon, L.C. 2002, c. 7, art. 18). Le GY prétend qu’il occupe le champ de compétence et qu’il lui est loisible de permettre, explicitement ou implicitement, à une commission scolaire d’admettre plus que les trois catégories d’ayants droit. Certaines provinces sont plus généreuses que d’autres, mais le pouvoir appartient aux provinces et aux territoires. Selon la CSFY, le Yukon, en matière de l’éducation, exerce seulement un pouvoir législatif qui lui est délégué par le gouvernement fédéral. Par contre, la CSFY exerce 7025048.1 –9– un pouvoir constitutionnel qui lui est conféré par l’article 23 de la Charte. Il est bien reconnu qu’une disposition constitutionnelle a préséance sur une disposition législative. Les dispositions constitutionnelles et législatives relatives à la gestion des admissions au Yukon À l’article 18 de la Loi sur le Yukon, le gouvernement fédéral délègue des chefs de compétence à l’Assemblée législative du Yukon. Le paragraphe 18(1) dit ceci : 18. (1) The Legislature may make laws in relation to the following classes of subjects in respect of Yukon: (…) 18. (1) La législature a compétence pour légiférer dans les domaines suivants en ce qui touche le Yukon : (…) (o) education, but any law respecting education must provide that (i) a majority of the ratepayers of any part of Yukon may establish any school in that part that they think fit and make the necessary assessment and collection of rates for it, and (ii) the minority of the ratepayers in that part of Yukon, whether Protestant or Roman Catholic, may establish separate schools in that part and, if they do so, are liable only to assessments of the rates that they impose on themselves in respect of those schools; o) l’éducation, à condition que les lois s’y rapportant confèrent toujours le droit : (i) à la majorité des contribuables de toute division du territoire d’y établir les écoles qu’elle juge indiquées et de procéder à la répartition et à la perception des taxes nécessaires à cette fin, (ii) à la minorité des contribuables se trouvant à l’endroit visé au sous-alinéa (i), qu’elle soit protestante ou catholique romaine, d’y établir des écoles séparées, auquel cas les contribuables qui ont établi ces écoles ne sont assujettis qu’aux taxes qu’ils s’imposent eux-mêmes à cet égard et répartissent en conséquence; Il est à noter que la Loi sur le Yukon ne mentionne pas spécifiquement que les pouvoirs qui lui sont conférés par l’alinéa 18(1)o) sont assujettis à l’article 23 de la Charte. Selon nous, cela n’est pas nécessaire car la jurisprudence a reconnu que l’article 23 vient limiter les pouvoirs d’une province et du ministre dans le domaine de l’éducation. (Voir l’arrêt Mahe) Il faut aussi étudier les dispositions de la Loi sur l’éducation relatives à l’admission à une école. L’article premier de cette loi accorde la définition suivante au terme « âge scolaire » : “school-age” means the age of 5 years and 8 months or older and younger than 21 years of age as at September 1; « âge scolaire » 7025048.1 « âge scolaire » S’entend de l’âge d’une personne qui le 1er septembre est âgée d’au moins 5 ans et 8 mois, mais n’a pas atteint l’âge de 21 ans. “school-age” – 10 – Cette définition du terme « âge scolaire » est rattachée à l’article 10 de la Loi, qui lit comme suit : 10 Persons are entitled to receive an educational program appropriate to their needs in accordance with the provisions of this Act (a) who at September 1 in a year are 5 years and 8 months of age or older and younger than 21 years of age; and (b) who are Canadian citizens, lawfully admitted to Canada for temporary or permanent residence, a child of a Canadian citizen, or a child of an individual who is lawfully admitted to Canada for permanent or temporary residence. 10 Toute personne a le droit d’avoir accès, en conformité avec la présente loi, au programme d’études qui correspond à ses besoins, à la condition d’être d’âge scolaire et d’être citoyen canadien, d’être admise légalement au Canada en vue d’une résidence permanente ou temporaire ou d’être l’enfant d’un citoyen canadien ou d’une personne admise légalement au Canada en vue d’une résidence permanente ou temporaire. (notre soulignement) L’article 13 accorde à la CSFY le pouvoir d’accorder l’admission à un enfant de 21 ans ou plus comme suit : 13 The deputy minister or if there is a School Board, the School Board may permit a person who is 21 years of age or older to enrol in an educational program on those terms prescribed by the deputy minister or School Board. 13 Le sous-ministre ou, dans la région où il y a une commission scolaire, la commission scolaire peuvent autoriser une personne âgée de 21 ans ou plus à s’inscrire à un programme d’études selon les modalités qu’ils déterminent. La gestion des admissions est aussi affectée par l’article 33 de la Loi sur l’éducation, qui dit : 33(1) The Minister or a School Board may establish and maintain educational programs for children who have not reached school age. (our underlining) (2) The Minister or a School Board may charge tuition fees for attendance at the program referred to in subsection (1). (…) 33(1) Le ministre ou la commission scolaire peut mettre sur pied un programme d’études destiné aux enfants qui n’ont pas atteint l’âge scolaire. (notre soulignement) (2) Le ministre ou la commission scolaire peut exiger des frais de scolarité à l’égard du programme visé au paragraphe (1). (...) Selon la CSFY, ces dispositions reconnaissent le pouvoir de gestion des admissions qui découlent à la CSFY en vertu de l’article 23 de la Charte. Il y a aussi une incidence sur le droit de gestion des admissions par l’article 34 de la Loi sur l’éducation, qui dit ceci : 7025048.1 – 11 – 34 In accordance with this Act, students attending school are entitled to 34 En conformité avec la présente loi, les élèves qui fréquentent l’école ont le droit : (a) receive a free educational program appropriate to their needs; a) de suivre un programme d’études gratuit conforme à leurs besoins; (b) receive an educational program outlined in an Individualized Education Plan when the student is in need of a special education program; b) de suivre le programme d’études prévu dans un plan d’études individualisé quand ils ont besoin de s’inscrire à un programme d’enseignement à l’enfance en difficulté; (…) (d) be provided with accommodation if they are required to live away from home to receive an educational program; (…) d) d’être logés, s’ils doivent quitter leur domicile pour suivre un programme d’études; (…) (our underlining) (…) (notre soulignement) En d’autres mots, la CSFY a l’obligation de fournir des programmes d’études qui sont conformes aux besoins de sa clientèle, notamment, ses obligations découlant de l’article 23 de la Charte. De plus, la CSFY a l’obligation de fournir un programme d’enseignement à l’enfance en difficulté dont, notamment, des classes ressources pour répondre aux besoins particuliers. Ces dispositions ont donc un impacte sur la gestion des admissions des ayants droit. L’article 56 de la Loi sur l’éducation a une incidence sur le droit de gestion. Cette disposition réitère les dispositions de l’article 23 de la Charte par rapport à qui a droit à l’instruction minoritaire. Il est à noter que le simple fait que l’article 56 répète les dispositions de l’article 23 de la Charte ne fait pas en sorte que le droit d’admission découle de la Loi sur l’éducation. Plutôt, le droit d’admission découle toujours de l’article 23 de la Charte. Le paragraphe 116(1) a une incidence sur la gestion des admissions. L’alinéa 116(1)d) reconnait ce droit à la CSFY : 116(1) A School Board shall 116(1) La commission scolaire : (…) (…) (d) establish policies for the administration, management and operation of its schools, including a student attendance policy; d) établit des principes directeurs applicables à l’administration, à la gestion et au fonctionnement de ses écoles, notamment des principes directeurs en matière d’assiduité des élèves; 7025048.1 – 12 – Cette disposition reconnait l’autorité de la CSFY qui découle de l’article 23 de la Charte de prendre une politique d’admission comme elle l’a fait en 1995, en 2006 et encore en 2010. Non seulement la politique d’admission a-t-elle un fondement constitutionnelle mais la Loi sur l’éducation a reconnu ce pouvoir, à l’alinéa 116(1)d). Conformément à son pouvoir attribué par l’article 23 de la Charte relatif à la gestion des admissions, la CSFY a créé ses politiques d’admission. De l’avis de la CSFY, la Loi sur l’éducation reconnait ce pouvoir conféré à la CSFY. Cette loi encadre l’exercice de ce pouvoir en reconnaissant la prise de règlements administratifs. L’article 143 dit ceci relativement à l’exercice des pouvoirs : 143(1) Unless expressly required to be exercised by bylaw, all powers of a School Board may be exercised either by bylaw or resolution. (2) All powers of a Council shall be exercised by resolution. 143(1) La commission scolaire peut exercer ses pouvoirs par voie de règlement administratif ou de résolution, sauf dans les cas où il est expressément prévu que le seul mode d’exercice possible est le règlement administratif. (2) Le conseil exerce tous ses pouvoirs par voie de résolution. En vertu de son pouvoir de prendre un règlement, le GY a pris le Règlement sur l’instruction en français en 1996. À l’article 2 de ce règlement, on établit la définition du terme « élève admissible » comme suit : "eligible student" means a student whose parent or parents are citizens of Canada who have the right under section 23 of the Charter to have their children educated in the French language and include those students whose parents or siblings would have the right under section 23 if they were citizens of Canada or if the instruction referred to in section 23 was not limited to Canada; « élève admissible » «élève admissible» Élève dont un parent, étant citoyen du Canada, a le droit de faire instruire ses enfants en français en vertu de l'article 23 de la Charte. Sont compris les élèves dont les parents, les frères ou les sœurs auraient ce droit s'ils étaient citoyens canadiens ou si l'instruction visée à l'article 23 ne se bornait pas au Canada; "eligible student" Cette définition a un impacte direct sur la gestion des admissions. Par voie d’un règlement, le GY tente de s’approprier le pouvoir d’élargir les trois catégories d’ayants droit de l’article 2. Le GY tente d’accorder le statut d’ayant droit aux immigrants qui, n’eut été de leur statut de non citoyen, auraient été des ayants droit, et n’eut été du fait que leurs études auraient été fait ailleurs qu’au Canada, auraient été des ayants droit. La CSFY tient à dire qu’elle aussi veut pouvoir accueillir des immigrants. Le problème avec la définition du terme « élève admissible » est que le GY s’attribue le pouvoir d’élargir les trois catégories. En se faisant, il tente de soustraire le pouvoir conféré par l’article 23 de la Charte à la minorité (CSFY) de gérer les admissions. Si ce droit existe, ce que revendique le GY, cela voudrait dire qu’il pourrait aussi élargir les catégories d’ayants droit pour inclure, par exemple, toute personne qui a fréquenté un programme d’immersion pendant un an et qui deviendrait par conséquence, ayant droit. Cela irait, 7025048.1 – 13 – selon nous, à l’encontre des pouvoirs de gestion et contrôle conférés à la CSFY par l’article 23 de la Charte. L’article 6 du Règlement a aussi un impacte direct sur la gestion des admissions. Selon nous, cette disposition n’est pas acceptable. Dans son intégralité, il se lit comme suit : 6.(1) A citizen of Canada who is eligible under section 5 must file a declaration with the School Board in order to become a resident of Education Area #23 6.(2) The declaration referred to in subsection (1) shall be in the form set out in the Appendix to this Regulation. 6.(1) Toute personne qui satisfait aux conditions de l’article 5 doit déposer une déclaration auprès de la commission scolaire pour être considéré résident du district scolaire 23. 6.(2) Cette déclaration est faite suivant la formule paraissant en annexe. Selon nous, le paragraphe 6(2) limite le pouvoir de la CSFY car cette formule, établit par le GY, se limite aux trois catégories de l’article 23 de la Charte. 6.(3) The School Board may require further information respecting eligibility. 6.(3) La commission scolaire peut demander tout renseignement supplémentaire concernant l'admissibilité d'une personne. Selon nous, le paragraphe 6(3) est acceptable. 6.(4) The School Board shall provide the Minister with copies of the declarations and the Minister shall make the final determination on the eligibility of the citizen to be a resident of Education Area #23. (our underlining) 6.(4) La commission scolaire fournit une copie de toute déclaration au ministre, qui tranche quant à l'admissibilité d'un citoyen canadien à être résident du district scolaire 23. Cette décision est sans appel. (notre soulignement) Selon la CSFY, le paragraphe 6(4) est inconstitutionnel car le ministre soustrait de CSFY le droit de gestion des admissions et se l’attribue. Le ministre s’attribue pouvoir de déterminer si une personne est ayant droit en vertu de l’article 23 de Charte et si une personne est accordée le droit d’admission comme immigrant selon définition du terme « élève admissible ». 6.(5) No citizen shall be a resident of Education Area #23 unless the declaration referred to in this section has been filed with the School Board and the citizen has been found by the Minister to be eligible under section 5. 7025048.1 6.(5) Seuls les citoyens canadiens ayant déposé une déclaration auprès de la commission scolaire en application du présent article et les personnes possédant la citoyenneté canadienne déclarées admissibles par le ministre aux termes de l'article la le la la – 14 – 5 sont considérés district scolaire 23. résidents du Le paragraphe 6(5) du Règlement est inconstitutionnel car il limite l’admission aux seules personnes définies à l’article 23 de la Charte. Selon la CSFY, l’article 23 de la Charte lui confère le droit de déterminer si une personne respecte les critères dans les trois catégories de l’article 23. Il lui confère aussi le droit d’accorder une permission d’admission à d’autres catégories de personnes qui répondent à l’objet de l’article 23, soit d’assurer l’épanouissement et la vitalité de la communauté minoritaire francophone et de réparer les torts du passé. Le ministre est contraint par les dispositions de la définition du terme « élève admissible » et du paragraphe 6(5) du Règlement. La politique d’admission de 2010 de la CSFY La politique d’admission de la CSFY est un exercice du pouvoir conféré par l’article 23 de la Charte. C’est ce que stipule explicitement la politique d’admission. Selon la CSFY, les trois catégories à l’article 23 représentent le plancher et non le plafond pour réparer les torts du passé et pour assurer l’épanouissement et la vitalité de la communauté francophone, qui est l’ultime bénéficiaire de l’article 23. La politique reconnait la possibilité d’accorder une permission d’admission à trois catégories de non ayants droit, soit les ancêtres, les immigrants et les Anglophones (francophiles) qui veulent s’intégrer à la communauté francophone. Au Yukon, cette dernière catégorie est limitée à dix pour cent de la population totale de l’école. L’article 23 prévoit la création de nouveaux ayants droit. Il n’est pas nécessaire d’être francophone ou d’être né ayant droit. Par exemple, une personne devient ayant droit en faisant des études primaires ou secondaires en français langue première. La Cour suprême a reconnu ce principe : Comme l’a souligné la Cour dans l’arrêt Solski, le par. 23(2) de la Charte canadienne a pour objet précis de garantir le droit à la continuité de l’instruction dans la langue de la minorité, de préserver l’unité familiale et de favoriser la liberté de circulation et d’établissement à l’intérieur du Canada (par. 30). Bien que l’art. 23 vise la protection et l’épanouissement des deux communautés linguistiques minoritaires francophone et anglophone, les droits accordés par le par. 23(2) s’appliquent indépendamment du fait que les parents ou les enfants admissibles fassent partie de l’une de ces communautés minoritaires, ou parlent l’une de ces langues à la maison, ou même aient une connaissance pratique de la langue de la minorité protégée. Comme notre Cour l’a affirmé dans l’affaire Solski, « [l]es conditions qui doivent être remplies en vertu de l’art. 23 reflètent le fait que les néocanadiens décident notamment d’adopter l’une ou l’autre langue officielle, ou les deux à la fois, en tant que participants au régime linguistique canadien » (par. 31). Le changement de résidence entre deux provinces ne représente pas non plus l’une des conditions d’exercice des droits garantis. Finalement, lorsqu’il renvoie à l’enseignement que l’enfant a reçu ou qu’il reçoit dans un établissement pour déterminer le droit de celui-ci de recevoir l’enseignement dans la langue de la minorité, le texte même du par. 23(2) ne distingue pas entre l’enseignement public ou privé, subventionné ou non. (notre soulignement) Nguyen, précité, au paragr. 27 7025048.1 – 15 – Les ancêtres La politique de 2010 vise essentiellement à faciliter le recrutement des générations de Francophones assimilés au Yukon. Cela s’inscrit dans l’objet de l’article 23 et sa visée réparatrice. Les immigrants Cette catégorie permet aux immigrants d’intégrer à la communauté de langue minoritaire et à ses institutions. Il est important pour l’objet de l’article 23 de viser une égalité des langues officielles du Canada. En limitant l’admission au immigrants francophones, le GY véhicule un message sociétal que l’école francophone n’est pas une école « mainstream » mais plutôt une école d’exception. La conséquence pratique est d’orienter les immigrants qui ne parlent ni l’anglais, ni le français, vers le système scolaire majoritaire. Avec la définition élargie du terme « élève admissible » pour inclure certains immigrants francophones, il est évident que le GY reconnait aussi que les trois catégories d’ayants droit à l’article 23 de la Charte s’agissent d’un plancher et non un plafond. Les francophiles Il est faux de prétendre qu’il faut être un « Francophone » pour inscrire son enfant à une école française langue première. Un parent dont la première langue apprise et encore comprise est le français n’est pas nécessairement un « Francophone ». Sa compréhension de la langue française peut être très minime et il qualifie toujours comme ayant droit. Ce parent peut s’identifier comme Anglophone et avoir aucune connexion avec la communauté minoritaire francophone mais il a toujours le droit d’envoyer son enfant à l’école française langue première. De même, un parent qui a fait ses études primaires en français n’est pas nécessairement considéré francophone. Il peut être un Anglophone qui a fait ses études primaires en français ailleurs au Canada. Il peut être un Francophone qui a fait ses études primaires au Canada mais qui s’identifie toujours comme un Anglophone. Il n’est même pas nécessaire que ce parent qui a fait ses études primaires en français puisse toujours comprendre le français. Normalement, cela serait le cas mais il n’est pas nécessaire pour être reconnu comme ayant droit. Pour qualifier comme ayant droit en vertu de la troisième catégorie au paragraphe 23(2) de la Charte, il est encore évident qu’il n’est pas nécessaire d’être un Francophone. Un parent anglophone peut avoir eu l’occasion d’inscrire un de ses enfants dans une école française langue première en obtenant une permission d’admission dans une autre province canadienne ou au Québec. Il y a plusieurs raisons pour lesquelles un Anglophone voudrait s’intégrer à la communauté francophone. Il a pu étudier dans une école d’immersion, a pu étudier le français à l’université, a pu vivre ou travailler dans un endroit francophone, ou avoir des liens de parenté avec des Francophones. Ultimement, c’est la communauté francophone qui devrait avoir le pouvoir de décider si la famille et la présence de cette enfant dans l’école avance le développement de la communauté. 7025048.1 – 16 – Au Yukon, c’est la CSFY qui est la mieux placée pour déterminer l’engagement réel des parents francophiles et l’impact que certaines admissions pourraient avoir sur l’école francophone. Le Règlement prive la communauté de ce contrôle et substitut une politique d’admission avec une procédure et des critères précis, par une décision ministérielle arbitraire. Le Règlement ne tient aucunement compte des objets de l’article 23 ou de l’intérêt de la communauté minoritaire. Le Règlement sur l’instruction en français existe depuis 1996. Le GY et le ministre n’ont jamais exigé la mise en œuvre des articles 5, 6 et 9 de ce règlement. Le GY était au courant de l’existence et du contenu des politiques d’admission de la CSFY. La politique de facto du GY reconnaissait le pouvoir de la CSFY de gérer les admissions. Au minimum, le GY ne s’est jamais opposé et n’a pas remis en question le pouvoir de la CSFY de gérer les admissions jusqu’au premier jour du procès. Le GY n’a pas pris la position que la politique d’admission menaçait l’objet de l’article 23 de la Charte ou la langue majoritaire au Yukon. Le gouvernement n’a pas allégué que cette politique était mal gérée ou non respectée. Il n’y a eu aucune preuve au procès à l’égard des raisons qui nécessiteraient, ou qui justifieraient que le ministre retire de la CSFY le pouvoir de gérer ses admissions. La pratique des 30 autres conseils scolaires francophones minoritaires du Canada Roger Paul, directeur général de la Fédération nationale des conseils scolaires francophones (ci-après la « FNCSF »), a témoigné et a confirmé que chacun des 31 conseils scolaires francophones a adopté une politique d’admission similaire à celle de la CSFY. D’ailleurs, le pourcentage d’admission de non ayants droits à l’ÉÉT est inférieur à plusieurs autres commissions scolaires francophones au Canada. Chacun des conseils scolaires francophones a une politique concernant l’admission des non ayants droit dans trois catégories générales: ancêtre, immigrant et francophile. Un comité d’admission est la procédure privilégiée pour étudier, cas par cas, si un élève sera accordé une permission d’admission. La FNCSF a recueillit des données de ces membres pour déterminé le pourcentage d’accueil de non ayants droit admis en 2008-2009 et en 2009-2010. Cette cueillette de données démontre qu’il y a un partage de renseignements relatifs à l’accueil de non ayants droit parmi ses 31 conseils membres. La preuve a démontré que le pourcentage de non ayants droit varie selon les régions, les situations particulières de chaque communauté et l’âge des écoles. L’accueil de 8 % de non ayants droit à l’ÉÉT n’est nullement inhabituel. Il y a plusieurs écoles au Canada, et surtout en Ontario, qui dépassent le chiffre de 40 % d’accueil de non ayants droit dans une année. L’absence de jurisprudence sur la gestion des admissions avant l’arrêt CSFY c. PG Yukon Il n’existait aucune jurisprudence directe sur la question à savoir qui a le droit de gérer les admissions à une école de la minorité officielle en vertu de l’article 23 de la Charte. 7025048.1 – 17 – Il y a de la jurisprudence provenant du Québec, dont notamment les arrêts Solski, Gosselin et Nguyen, mais ces arrêts ne sont pas très utiles pour trancher cette question. Dans ces décisions, ce ne sont pas les conseils scolaires de la minorité anglophone qui ont revendiqués le droit de gérer les admissions à ses écoles. Plutôt, tous ces arrêts proviennent de parents de l’extérieur de la minorité officielle anglophone qui voulaient accéder aux écoles anglophones. C’est dans ce contexte que la Cour suprême du Canada a statué qu’un non ayant droit n’avait pas le « choix » d’école sous le régime de l’article 23. Le libre choix d’école avait été enlevé au Québec depuis la Charte de la langue française (Loi 101) et l’article 23 n’avait pas comme objet de rétablir le libre choix d’école à tous citoyens. Solski (Tuteur de) c. Québec (Procureur général), [2005] 1 R.C.S. 201, 2005 CSC 14 (CanLII). Gosselin (Tuteur de) c. Québec (Procureur général), [2005] 1 R.C.S. 238, 2005 CSC 15 (CanLII). Nguyen c. Québec (Éducation, Loisir et Sport), [2009] 3 R.C.S. 208, 2009 CSC 47 (CanLII). La Cour suprême à reconnu que l’objectif général de protection de la langue française au Québec représentait un objectif légitime, au sens de l’arrêt Oakes, eu égard à la situation linguistique et culturelle particulière de la province de Québec. La prétention du défendeur que le GY peut appliquer le même raisonnement que le Québec n’est pas valide car les objectifs de la législation sont directement opposés. Au Québec, les limitations aux droits garantis par l’article 23 sont justifiables car elles cherchent à protéger la survie de la langue française en Amérique du Nord. Voir Ford c. Québec (Procureur général), [1988] 2 R.C.S. 712, 1988 CanLII 19 (C.S.C.) au paragr. 72; Nguyen, précité au paragr. 37 et 38. D’ailleurs, c’est pour cette raison que l’alinéa 23(1)a) de la Charte n’est toujours pas en vigueur au Québec (Voir l’article 59 de la Charte.) L’admission de non ayants droit et la gestion du processus d’admission dans toutes les juridictions du Canada sauf le Québec En étudiant l’admission de non ayants droit et la gestion des admissions de non ayants droit dans les douze juridictions à l’extérieur du Québec on constate que celles-ci peuvent être divisées en cinq catégories : 1) les juridictions qui reconnaissent explicitement la compétence de la CSF d’accorder l’admission à des non ayants droit et de gérer ces admissions; 2) les juridictions qui sont silencieuses relatives à l’admission de non ayants droit et de l’instance qui gère l’admission des non ayants droit; 3) les juridictions qui se sont appropriées le pouvoir relatif à l’admission de non ayants droit et sa gestion; 7025048.1 – 18 – 4) les juridictions qui partagent la gestion des admissions de non ayants droit avec la CSF et une commission scolaire anglophone, et 5) une juridiction qui permet aux non ayants droit de fréquenter l’école minoritaire selon la compétence linguistique de l’enfant mais qui laisse la gestion à la CSF. Les juridictions qui reconnaissent explicitement la compétence de la CSF d’accorder l’admission à des non ayants droit et de gérer ces admissions Ontario À l’article 293 de la Loi sur l’Éducation, l’Ontario reconnait explicitement que le droit de gérer les admissions de non ayants droit relève exclusivement de la CSF. Un non ayant droit fait la demande d’admission à la CSF. Son Comité d’admission composé de la direction d’école, d’un enseignant et d’un employé superviseur de la CSF doit voter majoritairement pour l’admission. La province a aussi adopté le 22 avril 2009 la Politique régissant l’admission à l’école de langue française en Ontario no. 148. Cette politique propose un processus pour normaliser les politiques d’admissions des CSF ontariennes. Elle reconnait aussi que l’article 23 de la Charte ne fait que définir les dispositions minimales à respecter. En adoptant l’article 293, l’Ontario a reconnu l’importance d’élargir les admissions aux écoles de langues française aux non ayants droit et a donc crée un cadre législatif (la mise sur pied d’un comité d’admission) pour permettre aux CSF d’exercer ce droit qui découle de l’article 23 de la Charte. Elle a reconnu le contexte dans lequel une politique d’admission pour les non ayants droit est importante. Depuis trente ans, le profil démo-linguistique de la communauté francophone a connu une transformation importante. Comme le dit la politique « les tendances démographiques telles la dénatalité, l’augmentation de l’immigration, l’exogamie et le renforcement de la prédominance de l’anglais dans le contexte mondial exigent une adaptation de l’école de langue française aux besoins actuels d’une société en mouvement ». Ceci cadre parfaitement avec le concept d’arbre vivant comme principe d’interprétation de la constitution. La politique reconnait la nécessité d’un processus accéléré pour les immigrants francophones, les immigrants qui parlent ni le français, ni l’anglais, et les élèves dont un grand-parent est francophone. La politique reconnait aussi que le français et l’anglais sont les deux langues officielles en Ontario et qu’il faut donc promouvoir l’égalité de ces deux langues. Selon nous, le contexte est le même au Yukon car la Loi sur les Langues font de l’anglais et du français les deux langues officielles avec un statut égal : …l’objet de la Loi sur les langues est d’engager le Yukon au bilinguisme officiel. En plus d’être évident à partir de l’historique de la loi, cet objet est explicite dans l’article premier qui énonce que le Yukon accepte que « le français et l’anglais sont les langues officielles du Canada », fixe comme objet « la réalisation de l’égalité de statut du français et de l’anglais au Yukon » et souhaite « étendre la 7025048.1 – 19 – reconnaissance du français et accroître la prestation des services en français au Yukon ». Kilrich Industries Ltd c. Halotier, 2007 YKCA 12 (CanLII) au paragr. 48. À notre avis, l’Ontario reconnait que le droit de gérer l’admission des non ayants droit découle de l’article 23 de la Charte. Ce que fait l’Ontario en adoptant l’article 293 dans la Loi sur l’Éducation c’est de créer un cadre législatif dans lequel ce droit de gestion peut être exercé. Il va de même lorsque l’Ontario adopte une politique sur l’admission des non ayants droit. Elle ne s’accapare pas du droit de gestion. Plutôt, elle fournit un cadre dans lequel l’admission des non ayants droit doit se faire par les CSF pour assurer l’inclusion tournée vers le futur, l’uniformité, l’équité, la transparence, le recrutement, et l’admission accélérée d’immigrants francophones et des générations assimilées. Comme l’a dit le Juge Dickson dans l’arrêt Mahe, la province a la responsabilité de mettre sur pied un régime législatif pour permettre aux parents d’exercer leurs droits qui découlent de l’article 23. Celui-ci crée un droit positif qui ne peut s’exercer que si la province créé le régime législatif nécessaire : En effet, l'art. 23 confère à un groupe un droit qui impose au gouvernement des obligations positives de changer ou de créer d'importantes structures institutionnelles. Mahe, précité, au paragr. 37 (CanLII). En Ontario, la création d’un comité d’admission dans la Loi sur l’Éducation n’est pas équivalente à l’exercice du droit de gérer les admissions. Plutôt cela revient à la création d’un mécanisme par lequel le droit peut être exercé par la CSF. Le principe est le même alors que chaque gouvernement qui a inclus dans sa loi sur l’éducation des dispositions pour établir des commissions scolaires de la minorité. La source du pouvoir de gestion demeure toujours l’article 23 de la Charte. Il en va de même pour le droit de gestion des admissions des non ayants droit. Manitoba La Loi sur l’Éducation reconnait que le pouvoir de gérer l’admission des non ayants droit relève exclusivement de la CSFD. Au paragraphe 21.15(5), on dit que la CSFD peut admettre tout autre enfant qui n’est pas un ayant droit. Au paragraphe 21.16, il est prévu que la CSFD peut constituer un comité d’admission afin que celui-ci étudie l’admission d’enfants et lui fasse des recommandations. Le Manitoba encadre moins l’exercice de ce pouvoir de gestion que l’Ontario. Il n’y a aucune obligation d’avoir un comité d’admission. Il reconnait aussi que la décision finale revient à la CSFD et non au comité d’admission, si elle le met sur pied. 7025048.1 – 20 – Les juridictions qui sont silencieuses relativement à l’admission de non ayants droit et de l’instance qui gère ceux-ci Nouvelle-Écosse La définition de « Eligible Parent » à la Loi sur l’Éducation renvoi aux trois catégories d’ayants droit à l’article 23 de la Charte. L’article 12 énonce qu’un enfant d’un Eligible Parent a le droit d’obtenir de l’éducation en français langue première. La Loi et les règlements scolaires sont silencieux au sujet d’accueillir des non ayants droit et à qui revient le pouvoir d’en faire la gestion. La politique d’admission de la CSF permet l’accueille de non ayants droit et c’est la CSF qui gère cette politique d’admission de non ayants droit. À notre avis, la Nouvelle-Écosse demeure silencieuse dans ce domaine. Elle ne limite pas l’admission de non ayants droit et elle ne créé pas de cadre législatif pour faciliter ou empêcher la gestion d’admission de non ayants droit. Alberta La School Act créée un cadre législatif pour la mise sur pied de commissions scolaires francophones. La loi accorde généralement à une CSF tous les mêmes pouvoirs de gestion qu’une commission scolaire anglophone. L’article 10 reconnait à tout ayant droit en vertu de l’article 23 le droit à une éducation en français langue première. La loi est silencieuse par rapport à l’accueil de non ayants droit et à qui revient la gestion d’admission de ceux-ci. Il n’y a aucun règlement sur ce sujet. Par contre, le gouvernement de l’Alberta a officiellement adopté une politique relative à l’instruction en français langue première. Le document s’intitule : Affirmer l’éducation française langue première : fondements et orientations, Copyright 2001, la Couronne du chef de l’Alberta. La partie suivante démontre l’appui du gouvernement de l’Alberta à ce que les CSF accueillent et gère l’admission des non ayants droit : http://education.alberta.ca/media/524841/cadrefr.pdf Autres catégories possibles de clientèle de l’éducation en français langue première, p. 15. Dans l’esprit de l’article 23 de la Charte, qui est d’assurer la vitalité des communautés francophones en milieu minoritaire, et conformément à sa visée réparatrice, une autorité scolaire francophone pourrait, de façon compatible avec la mission de l’éducation en français langue première, admettre dans ses écoles des élèves provenant d’autres catégories de parents. Par exemple, bien qu’elles ne bénéficient pas directement de la protection de la Charte, les catégories suivantes d’élèves pourraient être admises dans les écoles françaises langue première : (1) les enfants de parents dont les origines francophones les disposent à faire réintégrer l’identité et la culture françaises chez leurs enfants; et (2) les enfants de parents qui désirent maintenir la compétence linguistique et l’identité et l’appartenance culturelle française chez leurs enfants (les enfants 7025048.1 – 21 – d’un parent francophone qui est un immigrant et résident permanent du Canada, par exemple). En effet, les cinq CSF en Alberta ont adopté une politique d’admission pour accueillir des non ayants droit. À notre avis, l’Alberta reconnait aux CSF le droit de gestion d’admission des non ayants droit en demeurant silencieux à ce sujet dans sa loi. Terre-Neuve et Labrador La Schools Act créée une commission scolaire francophone provinciale et lui accorde tous les pouvoirs normalement attribués à une telle entité. À l’article 9, elle reconnait le droit d’un parent défini selon les trois catégories de l’article 23 de la Charte de faire instruire son enfant dans une école de la minorité. La loi est silencieuse par rapport à l’admission de non ayants droit et la gestion de celleci. La CSF a adopté une politique d’admission qui lui autorise d’accorder l’admission à des non ayants droit. Pour les Anglophones, elle requiert la double permission, soit celle de la CSFP et celle du conseil scolaire anglophone de la région. Elle accueille aussi les enfants de parents dont ni le français, ni l’anglais sont les langues premières. Elle accueille aussi les enfants dont un grand-parent parle le français. Nunavut La Loi sur l’éducation fournie une définition d’ayant droit en faisant référence aux trois catégories de citoyens à l’article 23 de la Charte. Elle créé une CSF qui a la compétence sur tout le territoire de fournir l’éducation française langue première aux enfants d’ayants droit. La loi est silencieuse par rapport à l’admission de non ayants droit et la gestion de celle-ci. La CSF a adopté une politique pour accorder l’admission à des non ayants droit. Elle accorde l’admission à un élève dont un grand-parent a étudié dans une école francophone. Elle peut aussi accorder l’admission à un enfant canadien non ayant droit au niveau de la maternelle s’il a fait un programme de francisation de 10 mois et à tout autre niveau s’il a complété deux ans de francisation ou d’immersion. Pour cette catégorie, la politique impose un maximum de cinq non ayants droit par année dont deux en francisation, deux en maternelle et possiblement deux aux niveaux plus élevés. Il n’y a pas de limite pour la catégorie de grand-parent. La politique créé un comité d’admission qui prend la décision relative à l’admission des non ayants droit. Il y a un droit d’appel à la CSF À notre avis, les dispositions législatives au Nunavut sont silencieuses par rapport à l’accueil des non ayants droit et la gestion de celle-ci. La CSF reconnait son droit de gestion dans ce domaine en adoptant une politique d’admission. Au Nunavut, la Loi n’impose aucune entrave à cet exercice de pouvoir qui découle de l’article 23. 7025048.1 – 22 – Les juridictions qui se sont appropriées le pouvoir relatif à l’admission de non ayants droit et la gestion de celle-ci Territoires du Nord-Ouest La Loi sur l’éducation est silencieuse par rapport à l’admission de non ayants droit et qui peut gérer cette admission. Il en est de même dans les Règlements. Un avis juridique du ministre de l’Éducation de 1999 reconnaissait ce pouvoir aux parents ayants droit. La CSF TNO, créé en 2001, a adopté une politique d’admission pour accorder l’admission à trois catégories de non ayants droit, soit les immigrants, les ancêtres et les Anglophones. Le 7 juillet 2008 le ministre de l’Éducation a émis une directive pour soustraire ce pouvoir de la CSF TNO et de se l’approprier suite au dépôt d’un recours judiciaire pour faire agrandir l’École Boréale à Hay River. La directive donne au ministre une discrétion absolue d’accorder l’admission à des non ayants droit. Selon nous, cette directive est inconstitutionnelle et la décision à cet égard fut prise en délibérée en janvier 2011. Yukon La Loi sur l’Éducation du Yukon reconnait les droits accordés à l’article 23 de la Charte. Il existe aussi un règlement, soit le Règlement sur le français, qui élargi la définition d’ayant droit à l’article 23 en l’attribuant à toute personne non ayant droit qui rencontrerait les exigences de l’article 23 si elle avait le statut de citoyen canadien. En général, cela accorde le statut d’ayant droit aux immigrants avec une connexion à la francophonie. La CSF est donc obligée de les accueillir. L’article 6 du Règlement requiert que le parent dépose une déclaration sous serment à la CSFY attestant qu’il est ayant droit. La CSFY doit ensuite déposer la déclaration auprès du ministre qui prend la décision au sujet de l’admissibilité de l’enfant du parent ayant droit. Sa décision est sans appel (voir art 5, 6 et 9 du Règlement). Le Règlement stipule que seuls les enfants déclarés admissibles (par le ministre) ont droit de recevoir de l’éducation en français langue première. Cette disposition ne reconnait aucun droit à la CSF d’accueillir des non ayants droit selon son choix et de gérer l’admission de ceux-ci. C’est la juridiction la plus limitative de toutes les douze juridictions à cet égard. Premièrement, c’est le Règlement qui étend le statut d’ayant droits aux immigrants avec un lien à la francophonie. C’est le Règlement qui accorde le pouvoir au ministre de décider si une personne respecte les exigences d’ayant droit. Le Règlement retire de la CSFY tout pouvoir de gestion d’admission, tant pour les ayants droit que pour les non ayants droit. Malgré ce règlement de 1996 lors de l’établissement de la CSFY, le gouvernement ne l’a jamais mis en vigueur. La CSFY a adopté une politique d’admission qui autorisait l’admission de non ayants droit dans trois catégories, soit les ancêtres, les immigrants (y inclus ceux avec un lien à la francophonie) et les Anglophones. Pour cette dernière catégorie il y avait une limite de 10 % de la population totale de l’école. De plus, c’était la CSFY qui décidait si une personne se qualifiait comme ayant droit. Le CSFY n’exigeait pas la signature de déclaration assermentée et ne fournissait aucune 7025048.1 – 23 – documentation au ministre. En pratique c’était la CSFY qui gérait exclusivement l’admission d’ayants droit et de non ayants droit. Le ministre n’a jamais exigé le respect des articles 6 et 9 du Règlement. Tout ceci a changé lors du premier jour du procès le 17 mai 2010. Une lettre fut envoyée à la CSFY exigeant le respect intégral du Règlement et demandant le dépôt auprès du ministre de toutes les déclarations assermentées au plus tard le 10 juin 2010. Les parties se sont entendues que cette exigence soit mise en vielleuse en attendant la décision du tribunal relative à la constitutionnalité de cette disposition. Cette décision fut rendue le 26 juillet 2011. Les juridictions qui partagent la gestion des admissions de non ayants droit avec la CSF ou une commission scolaire anglophone Colombie-Britannique La School Act accorde une autonomie plus limitée à la CSF par rapport à la gestion d’admissions de non ayants droit. La loi reconnait à la CSF le pouvoir de gérer seulement l’admission d’immigrants qui se qualifieraient à l’article 23 s’ils étaient citoyens canadiens. (art. 166.24(3)). Contrairement au Yukon, la CSF n’est pas obligée par la loi d’accepter ces immigrants, donc, il lui revient de prendre ces décisions et de gérer l’admission de ces non ayants droit. Elle le fait par voie d’une politique d’admission. La loi interdit à la CSF d’offrir de l’éducation à d’autres catégories d’élèves. À notre avis, cette juridiction limite le pouvoir de gestion d’admission des non ayants droit qui devrait revenir à la CSF. Saskatchewan Un « enfant d’un adulte minoritaire francophone » a le droit à l’instruction en français langue première. L’adulte minoritaire francophone est défini par rapport aux trois catégories à l’article 23 de la Charte. L’article 144 autorise la CSF de gérer l’admission des non ayants droit sans limitation. La CSF doit aussi obtenir le consentement de la commission scolaire anglophone à laquelle l’élève appartient. La CSF a obtenu un avis juridique à l’effet que cette limitation était inconstitutionnelle et donc accueil des non ayants droit sans obtenir la permission de la commission scolaire anglophone. La CSF a adopté une politique à cet égard, comme il lui est permis de faire à l’article 86(b) de la Loi sur l’Éducation. À notre avis, la Saskatchewan, par l’article 144, reconnait à la CSF le pouvoir de gérer l’admission de non ayants droit mais elle a tout de même mis sur pied un cadre législatif qui limite l’exercice de ce droit. Pour cette raison, nous sommes d’avis que la Saskatchewan essaie de limiter ce pouvoir en encadrant la façon dont la CSF pourrait exercer cette gestion. Selon nous, une délégation d’autorité à une commission scolaire anglophone qui pourrait limiter le plein exercice de ce droit est inconstitutionnelle. Île-du-Prince-Édouard Un parent admissible d’envoyer son enfant à une école de la minorité francophone est défini par rapport aux trois catégories de l’article 23 de la Charte. C’est la CSF provinciale qui gère l’éducation française langue première. 7025048.1 – 24 – Un règlement reconnait le pouvoir de la CSF d’accueillir des non ayants droit. L’article 10, par contre, tente de limiter ce droit de la même façon que l’a fait la Saskatchewan. L’élève non ayant droit doit recevoir une double permission, celle de la CSF et celle de son conseil scolaire anglophone. À notre avis, cette délégation de pouvoir à un conseil scolaire anglophone est inconstitutionnelle. Elle n’avance pas l’objet de l’article 23, soit d’assurer l’épanouissement de la communauté minoritaire francophone et de réparer les torts du passé. Le cadre législatif qui permet l’exercice du pouvoir d’admettre des non ayants droit par la CSF est inconstitutionnel. La loi ne créée pas un cadre législatif qui facilite l’exercice du droit d’admission de non ayants droit mais plutôt lui créée des embûches. Une juridiction qui permet aux non ayants droit de fréquenter l’école minoritaire selon la compétence linguistique de l’enfant mais qui en laisse la gestion à la CSF Nouveau-Brunswick Cette juridiction établie un cadre législatif qui permet le choix d’école selon la compétence linguistique de l’élève. Premièrement, l’élève doit obtenir un permis d’entrée du directeur général de la commission scolaire. L’élève doit fréquenter l’école française s’il parle que le français et l’école anglaise s’il parle que l’anglais. L’élève qui parle les deux peut choisir l’école anglaise ou française. L’enfant qui parle ni le français, ni l’anglais peut choisir l’école anglaise ou française. L’enfant d’un ayant droit peut fréquenter l’école française même s’il ne parle pas le français. Si le directeur général a des doutes quant aux compétences linguistiques de l’élève, il doit lui faire passer un test linguistique établi par le ministre. La question du droit d’admission de non ayants droit est réglée dans la loi. Les non ayants droit sont admis à l’école française sans la nécessité d’obtenir la permission de la CSF ou du gouvernement. Par contre, il revient au directeur général de la CSF de déterminer la compétence linguistique de l’élève. C’est seulement s’il a des doutes qu’il doit faire passer à l’élève une épreuve fixée par le ministre. À notre avis, le NouveauBrunswick est une juridiction où il y a un partage de la compétence de gestion d’admission des non ayants droit. En conclusion, le Yukon est la juridiction la plus limitative en termes d’admission de non ayants droit et en termes de reconnaissance du pouvoir de la CSFY de gérer les admissions des ayants droit et des non ayants droit. Analyse de la décision La Commission scolaire francophone du Yukon no. 23 c. Procureure générale du Yukon, 2011, YKSC 57 relatif au droit de gestion des admissions Le tribunal a considéré les arguments de la CSFY et du GY pour conclure qu’effectivement, l’article 23 de la Charte accordait le droit de gestion des admissions à la CSFY. Le juge a analysé les arguments de la façon suivante : [738] La CSFY soutient que le droit de gestion des admissions aux écoles de la minorité découle de l’art. 23 de la Charte. Elle prétend que le pouvoir d’admettre ou non un enfant est relié à la langue et la culture. La Cour suprême dans les 7025048.1 – 25 – arrêts Mahe et Arsenault-Cameron énonce clairement qu’il revient à la communauté minoritaire, soit à la CSFY, de contrôler les aspects de gestion ayant un impact direct ou indirect sur la langue et la culture dans l’école. [739] Le GY prétend que le pouvoir de gérer les admissions découle de sa compétence constitutionnelle dans le domaine de l’éducation. Le droit de gestion de la CSFY en vertu de l’art. 23 ne déplace pas la compétence législative du GY en ce qui a trait à la langue d’instruction offerte aux non ayants droit sur son territoire. Enfin, le GY soutient que le manque d’espace à EET découle du fait que la CSFY a admis des non ayants droit. Après avoir étudié la preuve et les dispositions législatives pertinentes, le juge prend note du fait que la CSFY a géré l’admission d’ayants droit et de non ayants droit de 1996 jusqu’au 17 mai 2010, sans objection de la part du GY et vraisemblablement, à l’encontre du règlement d’admission établi par le GY. Le juge prend note de la politique d’admission de la CSFY de janvier 2010 qui permet l’admission de trois catégories de non ayants droit et du processus à suivre relatif à celle-ci. Il souligne que la CSFY reconnaît que ce pouvoir d’admettre des non ayants droit est assujetti aux conditions suivantes : 1. que cette admission fait avancer l’enseignement du français langue première ainsi que l’épanouissement et le développement de la communauté minoritaire; et 2. que cette admission ne menace pas la survie de la langue majoritaire territoriale. La cour accepte la preuve du Dr Rodrigue Landry, qui a dit au paragraphe 114 de son rapport d’expert ce qui suit : [753] « À mon avis, le gouvernement aurait intérêt à favoriser une définition élargie des enfants d’ayants droit s’il veut vraiment exercer une approche « pluraliste » et appuyer le développement de la communauté francophone. » Le Dr Landry a souligné le grand nombre d’immigrants francophones au Yukon, pour lesquels le trilinguisme serait une possibilité. Il a cité à titre d’exemple l’immigration vivant au Canada qui n’a pas encore la citoyenneté canadienne. Selon une interprétation restreinte de l’art. 23, un immigrant de la France ne pourrait inscrire ses enfants à l’école francophone. Par défaut, tous les immigrants, peu importe leur langue, se trouveraient dans les systèmes scolaires non francophones. Le Dr Landry à fait remarquer que plusieurs commissions scolaires à travers le Canada accueille (sic) des ancêtres, c’est-à-dire dont les grands-parents n’avaient pas fréquenté une école francophone, faute d’une telle école. 7025048.1 – 26 – La cour a aussi souligné la preuve du président de la CSFY, André Bourcier, qui a témoigné de l’importance d’admettre des non ayants droit vu la petite communauté au Yukon, le taux élevé d’immigration, le milieu pluraliste ainsi que la relation entre la catégorie d’ancêtres et l’aspect réparateur. La cour a aussi tenu compte du fait que toutes les 31 commissions scolaires francophones minoritaires au Canada accordent l’admission aux non ayants droit. Suite à cette analyse de la preuve et des arguments, la cour a conclut ainsi : [758] Il n’existe pas de jurisprudence portant directement sur le droit de gérer les admissions dans une école de la minorité sous l’art. 23 de la Charte. Un survol de ce qui se passe dans les autres provinces et territoires au Canada révèle qu’il n’y a pas d’approche uniforme. Par exemple, l’Ontario et le Manitoba reconnaissent explicitement la compétence qu’a une commission scolaire francophone de gérer l’admission des non ayants droit. Au Nouveau-Brunswick, la gestion des non ayants droit est faite par la commission scolaire francophone. Toutefois, la province permet l’admission de non ayants droit selon la compétence linguistique de l’enfant. Certaines provinces, telles la ColombieBritannique, la Saskatchewan et l’Île du Prince-Édouard, partagent la gestion des non ayants droit avec les commissions scolaires francophones. Certaines juridictions sont silencieuses relative à l’admission des non ayants droit et la gestion d’admission (à savoir la Nouvelle-Écosse, l Terre-Neuve, l’Alberta et le Nunavut). En effet, seules deux juridictions, soit les Territoires du Nord-Ouest et le Yukon, se sont appropriés le pouvoir relatif à l’admission et à la gestion des non ayants droit. [759] Il va sans dire que l’art. 92 de la Constitution du Canada prévoit que le territoire du Yukon a la compétence sur l’éducation. Cependant, l’art. 23, en conférant des droits dans le domaine de l’éducation, modifie certaines des obligations des provinces/territoires. Il s’ensuit que les pouvoirs sont accordés à la CSFY par le GY en raison de l’art. 23. En accordant des pouvoirs à la communauté minoritaire, tels qu’exigés par l’art. 23, les provinces et territoires reconnaissent la préséance de l’art. 23. La Cour suprême du Canada dans l’arrêt Arsenault-Cameron a ajouté un sixième pouvoir exclusif de gestion, soit le pouvoir qu’a une commission scolaire francophone de choisir l’emplacement d’une école. La Cour souligne ainsi que le pouvoir ministériel, même dans un domaine de compétence exclusive comme l’éducation, peut être subordonné au pouvoir décisionnel de la commission scolaire francophone. Le GY a explicitement reconnu ce principe. Le préambule de la Loi sur l’éducation se lit somme suit : « Attendu : Que les droits et les privilèges dont jouissent les minorités et que garantie la loi, doivent être respectés. » Le paragraphe 185(c) prévoit que le GY peut, par règlement, « régir toute question nécessaire à la mise en œuvre des droits des francophones visés par la présente loi et l’Article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés. » En réalité, le GY a conféré à la CSFY l’obligation de gérer l’instruction en français au Yukon. L’article 10 du Règlement prévoit comme suit : « La commission scolaire du district 23 a compétence sur l’instruction en français au Yukon en en assure la gestion en conformité avec la présente loi et ses règlements. » (notre soulignement) [760] La question s’impose, à savoir si le règlement du GY quant aux admissions est conforme à l’art. 23. La Cour suprême du Canada, dans les arrêts Mahe et Arsenault-Cameron, à statué que la gestion et le contrôle en ce 7025048.1 – 27 – qui concerne la langue et la culture dans l’école, appartiennent à la communauté minoritaire officielle. Selon la Cour, la détermination de l’admissibilité des enfants aura une influence sur la langue et la culture. Il va sans dire qu’un ayant droit a le droit, en vertu de l’art. 23, d’exiger l’admission à l’école francophone. L’article 23 énumère trois catégories de citoyens ayant le droit d’envoyer leurs enfants à une école de la minorité. Cela ne veut pas dire que ces trois catégories sont exhaustives. La Cour suprême du Canada, dans l’arrêt Solski, a reconnu que l’on doit interpréter l’art. 23 de façon large. En effet, la Cour a statué que l’art. 23 s’applique à des membres des communautés culturelles qui ne sont ni francophones, ni anglophones. (notre soulignement) [761] D’une manière similaire, la Cour d’appel de l’Ontario dans l’arrêt Abbey a déterminé que l’admission des enfants de non ayants droit a eu pour effet de rendre leurs frères et sœurs des ayants droit en vertu de l’art. 23(2). La Cour s’est fiée sur les propos du Juge Dickson dans l’arrêt Mahe pour dire que les parents visés par l’art. 23 ne font pas nécessairement partie du groupe linguistique minoritaire. La Cour a souligné que plus il y aura de personnes qui pourront parler couramment les deux langues officielles du Canada, plus il sera facile pour les minorités linguistiques de s’épanouir au sein de la collectivité. [762] Je juge que reviennent à la CSFY le contrôle et la gestion en ce qui concerne l’admission des ayants droit et non ayants droit. Cette décision est conforme aux propos de la Cour suprême dans l’arrêt Arsenault-Cameron, dont les par. 43 et 44 se lisent comme suit : 43 …Lorsqu’une commission de la minorité linguistique a été établie en vue de satisfaire à l’art. 23, il revient à la commission, parce qu’elle représente la communauté de la minorité linguistique officielle, de décider ce qui est le plus approprié d’un point de vue culturel et linguistique. Le rôle principal du ministre est de mettre en place des structures institutionnelles et des politiques et des règlements qui répondent à la dynamique linguistique particulière à la province… 44 Lorsque le ministre exerce son pouvoir discrétionnaire pour refuser une proposition conformément au Règlement, ce pouvoir est restreint par le caractère réparateur de l’art. 23, les besoins particuliers de la communauté linguistique minoritaire et le droit exclusif des représentants de la minorité de gérer l’enseignement et les établissements d’enseignement de la minorité… (notre soulignement) La cour a accepté l’argument que la gestion des admissions par la CSFY n’est pas un droit absolu. Elle a reconnu que le GY peut s’ingérer dans ce pouvoir d’admission dans deux cas : [763] Le pouvoir de gestion des admissions par une commission scolaire francophone n’est pas sans limite. La province ou le territoire a le droit de s’ingérer dans deux situations, la première étant la situation où la langue de la majorité du territoire est menacée d’assimilation par la langue de la minorité officielle de ce territoire (Solski et Nguyen), et la deuxième étant la situation où 7025048.1 – 28 – l’école minoritaire ne répond pas à son mandat découlant de l’art. 23 de la Charte. [764] Pour toutes les raisons énumérées ci-dessus, je juge que la CSFY a le droit de contrôle et de gestion en ce qui concerne les admissions, et par conséquent est inconstitutionnel tout règlement en vertu de la Loi sur l’éducation limitant ce droit. [765] Le GY soutient que la CSFY n’a aucune autorité d’admettre des non ayants droit, en partie parce que ces admissions pourraient nuire aux ayants droit. Cet argument est sans mérite. Le GY prétend que seul un enfant ayant droit en raison d’une des trois catégories prévues à l’art. 23 peut fréquenter l’école de la minorité francophone. Pourtant, le GY a élargi les trois catégories en ajoutant les immigrations dans la définition d’élèves admissibles sous l’art. 5 du règlement… La cour a rejeté l’argument du GY que l’admission de non ayants droit augmenterait les dépenses pour le GY et que donc, cela n’est pas un droit constitutionnel qui revient à la CSFY : [765] … En d’autres mots, une augmentation du nombre d’étudiants à ÉÉT va augmenter les dépenses pour le GY. Il est vrai que le nombre d’étudiants peut affecter les coûts et les besoins d’ÉÉT en tant que personnel et infrastructure. Cependant, le GY est responsable de l’éducation de tous les enfants au Yukon peu importe s’ils fréquentent l’école francophone ou anglophone. Je rejette la position du GY, vu qu’elle n’est pas fondée sur la proposition que la politique d’admission de la CSFY menace la réalisation de l’objet de l’art. 23 ou la langue majoritaire anglophone au Yukon. De plus, le GY n’a pas soulevé des problèmes au niveau de la gestion ni du respect de la politique d’admission. Il n’y avait aucune preuve justifiant l’enlèvement du pouvoir de la CSFY de gérer les admissions. Conclusion L’arrêt CSFY c. PG Yukon est le premier à reconnaître à une commission scolaire de la minorité le droit de gérer les admissions d’ayants droit et de non ayants droit. Selon la cour, ce droit existe en vertu de l’article 23 de la Charte. La gestion des admissions a un impacte direct sur la langue et la culture dans l’école et donc, il revient à une commission scolaire francophone de les gérer. La cour a conclut que les trois catégories d’ayants droit à l’article 23 s’agissent d’un seuil et non un plafond. Elle a constaté que les 31 commissions scolaires francophones minoritaires au Canada accueillent déjà des non ayants droit et que les 12 juridictions au Canada adoptent des approches différentes mais reconnaissent généralement le droit d’accueillir des non ayants droit. La cour a donc déclaré inconstitutionnelles les dispositions du Règlement qui accordent au ministre le droit de gérer les admissions L’arrêt CSFY c. PG Yukon est présentement en appel. Il faudra suivre ce dossier pour voir si les instances d’appel vont reconnaitre au conseil scolaire francophone ce pouvoir de gestion des admissions. 7025048.1 – 29 – De plus, la Commission scolaire francophone des T. N.-O. (ci-après « CSF TNO ») est en attente de deux décisions touchant directement le pouvoir d’admission de non ayants droit. Par exemple, dans l’affaire de l’École Boréale à Hay River, la preuve a établit que la CSF TNO accueille 38 % de non ayants droit dans une communauté de 3 600 habitants où l’école a ouvert ses portes en 1998. Ces trois arrêts provenant du Yukon et des T. N.-O. pourraient établir la jurisprudence nécessaire pour étayer le fait que l’article 23 garanti aux commissions scolaires francophones le droit de gérer les admissions. Fait ce 21 octobre 2011 Roger J.F. Lepage Miller Thomson s.r.l. 700 – 2103, 11e Avenue Regina (Saskatchewan) S4P 4G1 Tél. : 306-347-8300 Téléc. : 306-347-8350 Courriel : [email protected] 7025048.1