QUAND LES ADOS PASSENT LES JUGES A LA
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QUAND LES ADOS PASSENT LES JUGES A LA
QUAND LES ADOS PASSENT LES JUGES A LA QUESTION LA PROVENCE Samedi 29/11/2014 à 09H50 _ Justice Marseille Accès au droit Les magistrats (ici à droite, la juge des enfants Paule Dubois), se sont livrés à un échange vérité avec les jeunes. Sous l'oeil du prof (debout), on a parlé stups, alcool et addictions en tout genre. Photo D.T. Jolie initiative du Conseil d'accès au droit, hier, à l'École de la 2e chance C'est une rencontre inhabituelle. D'ordinaire, elle naît dans la douleur du cabinet d'un juge ou lors d'une audience du tribunal pour enfants. Entre chiens et loups. Entre mauvaise humeur et force du droit. Un enfant face à son juge. Mais hier, à l'occasion du 25e anniversaire de la Convention internationale des droits de l'enfant, le Conseil départemental d'accès au droit (CDAD) a eu l'idée de mettre en présence des jeunes et des juges. Idée ingénieuse, qui nous apprendra beaucoup plus que les plus longs discours. Et d'ailleurs, ce qui surprend d'emblée, c'est le silence qui se fait dans l'amphithéâtre de l'École de la deuxième chance, quand les juges prennent la parole. Les élèves les écoutent. Qu'ont-ils à nous dire? Que le droit, comme dit le président du tribunal de grande instance de Marseille Jean-Michel Malatrasi, c'est un peu, c'est surtout "les choses de la vie". Le droit est partout. Dans les moindres recoins de notre existence d'homme civilisé. Sans droit, c'est l'état de nature. La guerre. La loi du plus fort. Celle que connaissent trop ces jeunes. "Quand on connaît ses droits, on est un citoyen. Quand on ne les connaît pas, on est un sujet", aime à résumer le président Malatrasi. Mise en bouche: un film qui traite des addictions et de leurs conséquences: drogue, cigarettes, alcool... Hier, ce n'est heureusement que l'addiction au paquet de bonbons qui dominait. "Pourquoi l'alcool est légal et pas la drogue, alors que l'alcool tue plus que la drogue ?" demande un des jeunes. "C'est vrai qu'on a du retard sur le sujet", lui répond Jean-Pierre Rosenczveig, magistrat et ex-président du tribunal de Bobigny. "Si on donne de la "beuh", mais si c'est pas nous qui l'avons achetée, on peut être poursuivi?", questionne un autre. "Pourquoi la drogue, on n'a pas le droit d'en vendre ?" "En France, l'usage est interdit, même si c'est un copain qui te passe l'herbe", lui explique Paule Dubois, juge des enfants. Le président Rosenczveig reconnaît que la société a ses failles, qu'"elle n'est pas toujours linéaire", qu'il faut parfois composer avec les lobbies, le patrimoine et l'histoire de France. "Pourquoi la drogue, on n'a pas le droit d'en vendre ?" insiste un ado. "Les conséquences ne sont pas les mêmes que l'alcool", observe Paule Dubois. Et l'addition générée est beaucoup plus forte". "Aujourd'hui, le contenu du haschisch est cent fois plus dangereux que si vous fumez une Gauloise", reprend Jean-Pierre Rosenczveig. Un autre élève dit "la peur des représailles". On touche du doigt racket, peur de passer pour ce qu'ils appellent "une balance". "Ils ne savent pas forcément qu'ils peuvent aller déposer plainte", coupe la prof d'histoire-géo du lycée Artaud. "Quand un copain vous fait une révélation, il ne faut pas vous en foutre, explique la juge des enfants. Tout le monde est concerné. Nous sommes tous des citoyens". Me Robin Leccia note que l'avocat est là pour "libérer la parole" quand elle est enkystée. "Vous communiquez tous par Facebook, par réseaux sociaux, mais vous ne parlez pas!" fait remarquer une éducatrice de la PJJ, Émilie Verdier. Et le silence pédagogue est de retour. Denis Trossero