Bodrum, Turquie 2 septembre 2015

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Bodrum, Turquie 2 septembre 2015
JEUDI 3 septembre 2015 / Edition Hainaut / Quotidien / No 204 / 1,50 € / 02 225 55 55
BLONDEL (UCL) : « UNIVERSITÉ, HAUTE ÉCOLE : À CHACUN SON RÔLE ! » P. 6
GROUPE MYTHIQUE
Téléphone
de retour
presque
au complet
Le kot étudiant
a bien changé
P. 33
VINCENT KOMPANY
« On doit
prouver
notre valeur
sur la durée »
P. 25 À 27
Bodrum, Turquie
2 septembre 2015
GABRIEL RINGLET
« Le débat
pluraliste
sur l’euthanasie
régresse »
P. 22
FESTIVAL
La Mostra
de Venise
s’adapte pour
rester au sommet
© EPA.
Cette photo d’un enfant syrien mort sur une plage des côtes turques
va-t-elle réveiller les consciences européennes sur le sort des réfugiés ?
e cliché a fait le tour du monde.
Sur les réseaux sociaux, beaucoup voient derrière cette image
dramatique un réel espoir. Celui de voir
un grand mouvement de solidarité se
créer en faveur des réfugiés qui arrivent
en Europe. Cet enfant décédé, qui gît
sur une plage turque, en dit plus que
toutes les statistiques sur la réalité des
voyages et des risques pris par les réfugiés syriens, irakiens et autres pour rallier le continent européen. « Depuis des
mois, on nous parle de la tragédie de
ceux qui tentent de rallier l’Europe sur
des embarcations de fortune. Il y a là,
dans la durée, une habituation, une
forme de désensibilisation – l’information est désincarnée : il n’y a pas véritablement d’images », analyse François
C
Heinderyckx, professeur de sociologie
des médias à l’ULB.
Désormais, les réfugiés qui arrivent
en Europe ont donc un visage, celui de
ce petit garçon. Selon les premières informations révélées par les médias
turcs, il s’agirait d’un Syrien âgé d’à
peine trois ans. Il s’appellerait Aylan
Kurdi et viendrait de la ville de Kobané.
Si c’est sa photo qui retient l’attention, il
n’était pas seul sur le bateau qui aurait
dû l’emmener sur l’île de Kos, en Grèce.
Au total, 23 personnes étaient réparties
sur deux bateaux différents qui ont chaviré en tentant de relier la péninsule de
Akyarlar en Turquie à la Grèce. A
l’heure de boucler cette édition, le bilan
faisait état de douze morts dont cinq enfants. D’après la presse turque, le grand
frère d’Aylan, Ghalib (5 ans) fait aussi
partie des victimes.
Cette histoire n’est qu’une parmi tant
d’autres. Le nombre de migrants et de
réfugiés qui arrivent en Europe augmente chaque jour. Ce mercredi, ils
étaient près de 4.500 à rejoindre le port
athénien du Pirée et plus de 3.000 à
avoir été secourus au large des côtes libyennes. La Grèce a d’ailleurs décidé
d’améliorer la prise en charge des migrants et des réfugiés, puis s’est engagée
à « accélérer » leur enregistrement et
leur identification. C’est là une des demandes de ses partenaires européens
pour mieux gérer leur dispersion dans
l’Union européenne. ■
P. 31
EN BELGIQUE
« La pire crise humanitaire
depuis 40-45 »
C’est aujourd’hui que le « Centre fédéral
migration » (ou « Myria ») fait son entrée
sur la scène publique belge. L’institution
devra veiller au respect des droits fondamentaux des étrangers, renseigner les
pouvoirs publics sur la nature et l’ampleur
des flux migratoires, et lutter contre le
trafic des êtres humains. Son directeur, le
philosophe François De Smet accorde au
Soir une interview. Il critique l’action gouvernementale et rappelle que « nous
sommes face à la pire crise humanitaire
depuis la Seconde Guerre mondiale ».
P. 2 À 4 NOTRE DOSSIER
CONSOMMATION
Le bio se décline
sous toutes
les formes
L’ÉDITO
CHRISTOPHE BERTI
RÉDACTEUR EN CHEF
IMMIGRATION :
LE SILENCE
EST UN POISON
ne mer bleu azur, une plage,
un enfant couché pour
U
l’éternité, le nez dans l’eau et le
sable, un policier impuissant qui
prend le petit corps mort dans
ses bras. Les images venues de
36
5 413635 005404
Bodrum, en Turquie, ont bouleversé le monde ce mercredi. Ce
n’est, malheureusement, qu’un
drame de plus dans le dossier
des migrants qui tourne à la
tragédie depuis des semaines.
Mais dans ce flot d’images, de
reportages, de témoignages, de
murs qui se dressent, de bateaux
qui coulent, de files qui s’allongent, de familles qui
marchent, en grappes, vers une
Europe qui hésite entre l’accueil
et le rejet, la photo de cet enfant
sans vie nous est arrivée comme
une gifle, comme un seau d’eau
glacée, nous faisant oublier, d’un
coup sec, la banalisation des
malheurs et le côté désincarné
d’une crise où l’on parle de
chiffres, où l’on montre des
cartes et où on finit par s’habi-
MARCHÉS
MÉTÉO
MOTS CROISÉS
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24
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tuer à tous les drames.
Ce petit Syrien mort sur une
plage turque est devenu, en un
instant, un symbole. Celui d’un
peuple abandonné à son triste
sort. Celui d’une crise que plus
personne ne semble maîtriser.
Celui d’un effroi qui fait écho au
La politique, c’est
le courage. Pas les slogans.
Et encore moins le silence
silence coupable des politiques,
sauf les populistes. Celui,
espérons-le, du drame de trop,
du drame qui réveille enfin les
consciences.
Ajoutons-le tout de suite : il n’y a
jamais, sur aucun sujet et certainement pas sur la crise des
migrants, de réponse facile à des
SUDOKU
BANDE DESSINÉE
BON À DÉCOUPER
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problèmes complexes. Nous
pensons même qu’il n’y a pas de
solution à court terme à cette
crise. Car il ne s’agit pas ici d’opposer la compassion naïve à un
cynisme froid. Dans le débat que
nous vivons, nous avons simplement quelques certitudes : aucun
mur, aussi haut soit-il, n’arrêtera
des peuples qui cherchent un
avenir meilleur. Aucun pays, non
plus, ne peut accueillir toute la
misère du monde. Et aucun pays
ne peut régler, seul, un dossier
aussi large et complexe. Les
questions et même les craintes
des peuples européens face à ce
phénomène de migration sont
légitimes. Mais ce n’est pas en
laissant le champ médiatique à
quelques extrémistes pour ne
pas froisser leur électorat que les
PETITES ANNONCES
NÉCROLOGIE
RÉGION
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mandataires publics résoudront
quoi que ce soit. Nous attendons
d’eux qu’ils prennent leurs responsabilités, qu’ils affrontent les
difficultés, qu’ils nous rassurent,
qu’ils montrent la voie à suivre,
le cap, la direction. La politique,
pour nous, c’est le courage, pas
les slogans et encore moins le
silence. Quel politique de premier plan, en Belgique, sort de ce
silence assourdissant et coupable ? A part Bart De Wever et
ses solutions simplistes, aucun.
Nous l’avons déjà écrit, nous
l’écrirons encore : chacun, face à
cette crise majeure, doit prendre
ses responsabilités.
Prendre les nôtres, c’est faire
notre métier : informer, expliquer, décrypter, dénoncer. Et, ce
matin, publier cette photo.
TÉLÉVISION
LOTERIE
PETITE GAZETTE
34-35
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P. 20 & 21
lesoir.be
Dès 20 h 30, suivez
en direct commenté
la rencontre entre
la Belgique et
la Bosnie pour
les qualifications
de l’Euro 2016.
La Belgique doit-elle
modifier sa gestion
politique
de la crise migratoire?
On en parle
avec Pascal Martin.
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