CEA Bonne gouvernance - Professeur Moustapha Kassé

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CEA Bonne gouvernance - Professeur Moustapha Kassé
L A B O NNE G O UVE RNA NCE E T L A NE CE S S I T E
D’ELABORER DES INDICATEURS DE SUIVI ET
D’EVALUATION
pour la revue des pairs au niveau du NEPAD
Par
Professeur Moustapha KASSE
INTRODUCTION
Les facteurs extra-économiques comme les conflits inter-étatiques, les guerres civiles,
les instabilités politiques, les violations des droits de l’homme accroissent les risques, les
incertitudes et la confiance. Ces variables deviennent alors très déterminantes dans la décision
d’investissement. Des recherches établissent qu’aujourd’hui les investissements publics comme
privés sont contrariés par des problèmes liés au processus démocratique éprouvé, à la
multiplication des guerres civiles, aux conflits ethniques, toutes choses qui font qu’il y a trop de
risques et d’incertitudes pour l’afflux et la rentabilité des investissements. Dans ce contexte, la
gestion de la paix et de la sécurité devient une impérieuse nécessité à la limite des préalables
pour attirer les capitaux privés. Dès lors, si l’on veut redonner confiance aux investisseurs
privés comme publics, il faut impérativement mettre en place des mécanismes de gestion d’un
espace stable et sécurisé assis sur des piliers de bonne gouvernance.
Le premier préalable concernant la gestion des conflits. Sur ce point, le document du
NEPAD note que «l’expérience a montré que la paix, la sécurité, la démocratie, une bonne
gouvernance, le respect des droits de l’homme et une saine gestion économique, sont des
préalables au développement durable. C’est pourquoi, les Chefs d’Etat s’engagent à
promouvoir ces principes individuellement et collectivement, dans leur pays, leur région et
sur le continent ».
Deux déclarations expressives viennent confirmer ce nouvel engagement politique. Il
s’agit d’abord celle du Président Thabo Mbeki qui a déclaré devant le Parlement Sud africain
lors d’un débat sur le NEPAD le 31 octobre 2001 : « nous devons instaurer une culture des
droits de l’homme, lutter contre la corruption et rendre compte de toutes nos actions » et
ensuite celle du Président Olusegun Obajanso qui fait observer lors de la réunion du Comité
de mise en œuvre du NEPAD à Abuja que « en Afrique contemporaine, la vieille accusation
d’ingérence dans les affaires intérieures ne tient plus. Nous devons dialoguer davantage et
organiser davantage des consultations les uns avec les autres sur les questions de paix, de
sécurité, de démocratie, de droits de l’homme ». Pour bien appuyer ces nouvelles orientations,
il a été crée à cette Conférence d’Abuja, un Sous-Comité spécial sur « la paix et la sécurité »
présidé par l’Afrique du Sud et dans lequel siégent l’Algérie, le Gabon, le Mali et l’Ile
Maurice. Sa mission est de prévenir et régler les conflits.
I- LA BONNE GOUVERNANCE COMME PREALABLE A LA
REALISATION DU NEPAD
La bonne gouvernance politique comme économique est le second préalable pour la
réalisation et la réussite du NEPAD.et cela malgré la relative ambiguïté qui entoure le
concept.
1°) La notion de bonne gouvernance.
Depuis les années 90, très peu de concepts n’a suscité autant de discussions et de
controverses, que celui de « Bonne gouvernance». Aujourd’hui, le concept a totalement
investi le champs de l’analyse économique, politique et sociale. Depuis, elle n’a cessé, d’être
évoquée dans les publications des chercheurs, les injonction des bailleurs de fonds ou les
discours des gouvernements. Non seulement, il est présenté comme un critère de bonne
gestion qui ouvre plus facilement l’accès à certaines ressources des Institutions Financières
Internationales(IFI) mais progressivement il est décliné comme un élément d’une probable
conditionnalité dans les relations de partenariat avec presque tous les bailleurs de fonds
Comment expliquer pareil succès ? Pour qu’un concept soit aussi rapidement
popularisé par des milieux aussi divers, il faut qu’il réponde précisément à des préoccupations
centrales du système dont il est issu. On serait donc tenté de croire que l’apparition de la
gouvernance correspond à un changement de paradigme dans la problématique du
développement. Il s’agissait à l’époque, pour les promoteurs des programmes d’ajustement
structurel (PAS), de corriger l’approche « économiciste » de ces programmes et de mettre
davantage l’accent sur l’importance de leur environnement normatif et institutionnel.
Le concept a été affiné par de nombreuses recherches universitaires et par la pratique
des Institutions internationales et partenaires au développement comme la Banque Mondiale,
le PNUD, l’OCDE, la BAD etc.. Malgré tous ces efforts d’intellection, le concept demeure
encore ambiguë et continue, en conséquence, de susciter beaucoup de débats pas seulement
dans le monde académique mais aussi dans plusieurs secteurs d’opinion de la société civile.
Cette importance appelle un certain nombre de clarifications sur la manière dont ce concepts
opère dans des économies traversées par des crises et qui s’engagent dans des processus très
amples de réformes économiques, politiques et sociales.
Généralement, il désigne à la fois 3 éléments : la nature du régime politique, la
capacité des pouvoirs publics à créer un cadre d’ordre et de stabilité, à formuler et à exécuter
des politiques performantes et la construction d’un environnement propice au développement
économique et social. Ainsi pour la Banque mondiale, la gouvernance se définit comme « la
manière dont le pouvoir est exercé dans la gestion des ressources économiques et sociales
d’un pays, et dans un but de développement. Cette définition fait ressortir les trois axes de la
gouvernance à savoir : la forme du régime politique, la manière dont l’autorité est exercée
dans la gestion d’un pays, et la capacité du gouvernement à déterminer et appliquer les
politiques » Alors que pour le PNUD, il faut entendre par gouvernance, « l’exercice d’une
autorité politique (la formulation de politiques), économique (la prise de décisions à caractère
économique) et administrative (la mise en œuvre de politiques) aux fins de gérer les affaires
d’un pays. Suivant cette définition, la gouvernance repose sur des mécanismes, des processus
et des institutions qui permettent aux citoyens et aux groupes d’exprimer des intérêts de régler
des litiges et d’avoir des droits et obligations ». Le PNUD a de plus, cerné les trois paliers de
gouvernances, à savoir l’Etat qui créée un environnement politique et légal propice ; le secteur
privé qui crée emplois et revenus, et la société civile qui facilite l’interaction politique et
sociale.
Il apparaît alors que la gouvernance renvoie pour certains à une amélioration de la
gestion du secteur public ; une responsabilité économique ; la prédictibilité et l’autorité de la
loi et la transparence dans la gestion des affaires publiques. Pour d’autres, elle signifie «bon
gouvernement» caractérisé par les vertus de responsabilité, de légitimité et de compétence
(Banque Mondiale, 1989 ; ODA, 1993). La gouvernance est également explicitement
rattachée à la démocratie (USAID, 1991). Cependant, pour une autre synthétise la définition
renvoie à la gouvernance en tant qu’exercice de l’autorité politique, économique et
administrative dans la gestion des affaires nationales à tous les niveaux (PNUD, 1997).
Appuyée sur trois concepts clefs : la responsabilité, la décentralisation et la transparence, la
bonne gouvernance a donc consisté dans une sorte de « juridicisation » de l’action publique.
Ainsi compris, la bonne gouvernance intègre toutes les dimensions de l’activité
économique et les mécanismes d’allocation et de répartition des ressources.
Différentes compréhensions du concept de gouvernance
Agence Canadienne de Développement International (ACDI) : l’ACDI utilise les
termes «bon gouvernement» ou «saine gestion des affaires publiques» pour désigner la façon
dont un gouvernement gère les ressources sociales et économiques d’un pays. Le bon
gouvernement (ou la saine gestion des affaires publiques) désigne un exercice du pouvoir, à
divers échelons du gouvernement, qui soit efficace, intègre, équitable, transparent et
comptable de l’action menée.
Banque Asiatique de Développement : Pour la Banque Asiatique de Développement, la
gouvernance se réfère à l’environnement institutionnel dans lequel les citoyens interagissent
entre eux et avec les agences gouvernementales. Même si les aspects reliés aux politiques sont
importants pour le développement, le concept de bonne gouvernance tel que définie par la
Banque aborde essentiellement les ingrédients reliés à une gestion efficace. La Banque
perçoit la gouvernance comme un synonyme de gestion du développement efficace.
Banque Inter-américaine de Développement : La Banque Inter-américaine de
développement est concernée par les aspects économiques de la gouvernance et la capacité
de mise en œuvre de l’appareil gouvernemental. Ceci implique la modernisation du
gouvernement et le renforcement de la société civile, la transparence, l’équité sociale, la
participation et l’égalité des sexes.
Banque Mondiale : La Banque Mondiale définit la gouvernance comme la manière dont le
pouvoir est exercé dans la gestion des ressources économiques et sociales d’un pays, et dans
un but de développement. Cette définition fait ressortir les trois axes de la gouvernance à
savoir : la forme du régime politique, la manière dont l’autorité est exercée dans la gestion
d’un pays, et la capacité du gouvernement à déterminer et appliquer les politiques.
Comité d’aide au développement de l’Organisation de Coopération et de Développement
Economiques (OCDE – CAD). Le CAD utilise une définition de la gouvernance qui rejoint
celle de la Banque mondiale, et qui désigne «l’exercice du pouvoir politique, ainsi que d’un
contrôle dans le cadre de l’administration des ressources de la société aux fins du
développement économique et social».
Programme des Nations-Unies pour le Développement (PNUD). Pour le PNUD, il
faut entendre par gouvernance, l’exercice d’une autorité politique (la formulation de
politiques), économique (la prise de décisions à caractère économique) et administrative (la
mise en œuvre de politiques) aux fins de gérer les affaires d’un pays. Suivant cette définition,
la gouvernance repose sur des mécanismes, des processus et des institutions qui permettent
aux citoyens et aux groupes d’exprimer des intérêts de régler des litiges et d’avoir des droits
et obligations.
2°) L’importance affirmée de la bonne gouvernance dans la conduite de
la politique économique.
Face à chute de l’espace politique, depuis une dizaine d’années, sous l’instigation des
partenaires au développement et des institutions internationales, des efforts louables ont été
entrepris en Afrique pour mettre en œuvre la bonne gouvernance politique. Ces efforts sont
orientés vers plus de participation, de responsabilité, de décentralisation et de transparence. La
gouvernance économique ne doit pas être en reste car l’environnement économique est
révélatrice d’au moins quatre foyers de distorsions qui dissuadent les IDE :
un environnement économique défavorable accompagné d’une forte
inefficacité des politiques sectorielles et de la structure des incitations
économiques ;
la faible efficacité du capital humain imputable à la crise permanente des
systèmes éducatifs et de formation ;
la détérioration et l’inadéquation des infrastructures de base ;
les coûts contrariants des facteurs techniques.
Il est bien établi que le déclin des IDE en Afrique sub-saharienne procède aussi de
déterminants économiques stricto sensu à côté de facteurs plus diffus tels que les risques, les
incertitudes et la confiance. Ces facteurs économiques qui peuvent freiner les investissements
sont maintenant parfaitement bien connus. Il s’agit des déséquilibres macroéconomiques
persistants, des taux d’inflation élevés, de la surévaluation des monnaies entraînant des taux
de change réels dissuasifs, des politiques de protection inappropriées, des stratégies
commerciales mal conçues et de la mauvaise gestion des affaires publiques.
La capacité de nuisance de ces facteurs justifie l’inscription de la gouvernance
économique à l’ordre du jour des institutions internationales. Elle requiert de l’Etat et de tous
les acteurs politiques, économiques et sociaux de la volonté, du temps et une stabilité
institutionnelle somme toute des éléments indispensables pour créer progressivement un
environnement de gestion économique et social cohérent, adapté, diversifié et prévisible. La
gouvernance économique va alors consister à construire des systèmes, des procédures et des
organisations capables de réguler dans la transparence et l’équité, la production et la
redistribution des richesses économiques ainsi que les ressources nécessaires au
développement de l’ensemble de la société à long terme.
3°) Les trois volets essentiels de la bonne gouvernance
Elle va alors se présenter sous 4 volets à partir desquels, il devient possible d’évaluer
les performances de chaque pays ; le volet politique qui concerne la participation au processus
électoral ainsi les procédures qui orientent ces élections, un volet institutionnel relatif à
l’existen,ce te les performances des institutions, un volet économique et un volet social.
Le volet institutionnel constitue aujourd’hui un enjeu important de la recherche et un
volet déterminant de la bonne gouvernance. Comprises comme des ensembles complexes de
normes, de règles et de comportements, les institutions sont conçues pour des fins collectives.
C’est pourquoi, elles sont souvent assimilées à des organisations c’est-à-dire des unités de
coordination ayant des frontières identifiables et fonctionnant de façon relativement continue
en vue d’atteindre des objectifs partagés par les divers acteurs de la vie économique, politique
et sociale. L’Etat et son administration, les marchés et les ONG sont au cœur même du
dispositif institutionnel. Quelles sont leur composition et leurs principales missions
particulièrement dans les réformes économiques et politiques ? Le volet institutionnel
comprend les éléments suivants : la création d’une commission électorale indépendante ;
l’existence d’un médiateur ; l’auditeur général ; la direction des crimes économiques et de la
corruption ; la commission des droits humains ; une autorité indépendante pour les médias ;
l’existence d’une société civile active, etc. Cependant, le simple fait de créer ces institutions
ne suffit pas. Leur fonctionnement réel est essentiel. La raison en est qu’en dépit de la
diversité qui caractérise leurs passés et leurs expériences, les pays africains dans leur
ensemble commencent à accepter l’idée qu’il y a urgence à créer et à renforcer un cadre
institutionnel pour une bonne gouvernance. Les progrès déjà réalisés sous le multipartisme
doivent maintenant être sauvegardés par un tel cadre institutionnel. Au nombre des éléments
clés de ce cadre figurent :
- un système électoral transparent ;
- un pouvoir judiciaire indépendant ;
- un organe anti-corruption indépendant ;
- une commission indépendante des droits de l’homme ;
- des structures d’harmonisation et d’exécution des activités liées aux femmes ;
une société civile forte et active.
En ce qui concerne le volet économique. Sur le fond la gouvernance économique
consiste à construire des systèmes, des procédures et des organisations socialement
acceptables et capables de réguler dans la transparence et l’équité, la production et la
redistribution des richesses économiques, ainsi que les ressources nécessaires au
développement de l’ensemble de la société à long terme. Dés lors, la gouvernance
économique peut se décliner autour de quatre grands domaines, reliés entre eux mais distincts
dans leurs champs respectifs, leurs méthodes et leurs principes généraux de fonctionnement :
Le premier domaine est relatif à la gestion macroéconomique, la bonne
gouvernance est souvent mesurée à l’aune des simples indicateurs de performance
économique à savoir
la gestion des déficits publics internes et externes,
la politique de maîtrise de l’inflation,
la politique monétaire et politique de change,
les politiques sectorielles incitatives aux activités productives,
Le second domaine concerne la création et le développement d’un
environnement favorable aux producteurs. Dans ce sens, les aspects les plus
couramment évoqués par les opérateurs concernent :
le système financier et de crédit,
le régime fiscal applicable aux entreprises,
la législation du travail,
Le troisième domaine interesse la régulation économique pour laquelle trois
éléments semblent devoir être privilégiés pour améliorer la gouvernance économique
globale :
le système financier,
la concurrence,
les moyens comptables et d’audit.
Le quatrième domaine se rapporte à l’édification et le développement d’une
société civile forte et active encouragée par la mise en place d’un cadre institutionnel
ouvert sur le pluralisme, la promotion de la dimension genre, l’indépendance de la
magistrature et d’autres entités telles que les commissions électorales, les organes
chargés des droits de l’homme et les dispositifs anti-corruption. Une société civile
diversifiée et dynamique est indispensable pour demander des comptes aux
gouvernements.
Quant au volet social, il intègre le développement de la santé, de l’éducation
et de l’habitat. trois facteurs constituant des éléments pertinents d’appréciation du
développement humain et surtout de la nouvelle dimension de la pauvreté.
.
Il existe effectivement une forte corrélation entre le niveau de ces indicateurs
économiques et la bonne gouvernance. Toutefois, il ne faut pas perdre de vue que le défi
majeur est de réaliser un équilibre entre les stratégies visant un développement de «bas en
haut» (capable d’ améliorer les conditions de vie et de travail des défavorisés) et les stratégies
de croissance économique forte. Ainsi, au niveau de la gestion macroéconomique, la bonne
gouvernance requiert la mise en place de mécanismes régulateurs, des règles, des dispositions
législatives et réglementaires et des mécanismes de contrôle qui garantissent :
- des processus transparents, démocratiques et décentralisés d’évaluation des
besoins dans les différents secteurs et espaces décentralisés par les composantes de
la société ;
- des processus décisionnels contrôlables ;
- l’établissement de priorités en faveur de secteurs porteurs d’externalités positives
pour les producteurs et les entreprises ;
- la création ou la rentabilisation d’infrastructures de base nécessaires au
développement local ou national ;
- l’élaboration d’une politique sociale qui d’une part assure l’ équité à la fois en
faveur des régions et des populations les plus démunies et d’autre part contribue à
l’amélioration de la cohésion sociale par la promotion de la solidarité, de la santé,
de l’éducation et de la communication ;
- la préservation de la sécurité publique.
La réalisation des ces objectifs appelle la mise en place d’organisations de
concertation sociale, faute de quoi, les différentes décisions peuvent être frappées de
contestation et de soupçons d’arbitraires nuisibles au fonctionnement des institutions. De
même, la création et le développement d’un environnement favorable aux producteurs est
évoqué comme un facteur de bonne gouvernance économique. Dans ce cadre les domaines les
plus souvent évoqués par les acteurs du secteur privé concerne le système de crédit, le régime
fiscal et la législation du travail.
La prise en charge des problèmes de gouvernance économique impose aux Etats et à
tous les acteurs politiques, économiques et sociaux , de la volonté et une stabilité
institutionnelle minimale qui constituent les conditions nécessaires pour créer
progressivement un environnement de gestion économique et sociale cohérent, adapté,
diversifié et prévisible. Cela implique le développement rapide des capacités d’élaboration de
politiques et de stratégies cohérentes, à court, moyen et long terme, combinant l’action de
l’Etat au marché et visant à mobiliser sans conflits sociaux majeurs les ressources internes et
externes en vue du développement.
Tous ces développements ont permis de mesurer l’extême complexité de la
gouvernance qui devrait permettre de mobiliser toutes les ressources matérielles et humaines
de façon efficiente et appropriée afin de libérer toutes les énergies et les forces vives, les
compétences, les talents, l’entreprise et l’esprit d’entreprise des populations. Ainsi la bonne
gouvernance devient alors l’utilisation efficiente et démocratique de l’Etat pour la gestion de
la société dans ses différents aspects politiques, économiques et sociaux.
Comment mesurer avec précision
II- L’ELABORATION D’INDICATEURS DU TABLEAU DE BORD
DE LA BONNE GOUVERNANCE.
La bonne gouvernance prend aujourd’hui une grande importance pour tous les acteurs
internes comme externes impliqués dans le jeu politique et économique. En la considérant
comme l’art de gouverner, au sens large du terme, c’est-à-dire de gérer les ressources au
meilleur des intérêts de la population et de la société, au sein d’un Etat de droit qui encourage
le débat public et privilégie la négociation et le co,nsensus sur la conduite autoritaire des
affaires publiques, il serait souhaitable d’élaborer un indice du bon gouvernement qui, dans
cette mesure, doit être le plus large possible et se rapporter à l’ensemble de ses composantes.
Dans cette direction, l’Association des Economistes d’Afrique de l’Ouest réunie en
Conférence les 22, 23 et 24 1999 à Abidjan avait recommandé l’élaboration d’une « batterie
d’indicateurs quantitatifs et qualitatifs pour affiner l’observation de l’état d’avancement de la
gouvernance dans les différentes sphères économiques, politiques, sociales, juridictionnelles
et institutionnelles ».
Avec la revue des pairs adoptée par les décideurs politiques du NEPAD, la création
d’un indice composite présente beaucoup d’avantages. Il pourrait fixer un cadre général par
rapport auquel la comparaison serait facilitée, et cela dans le sens d’une saine émulation au
service de la bonne gestion et au bénéfice des populations.
Cela est d’autant plus indispensable que beaucoup d’opérateurs travaillent à la mise en
place d’observatoires de la bonne gouvernance. L’une des recommandations de la Conférence
d’Abidjan des Economistes était relative « à la nécessité de créer un Observatoire de la Bonne
gouvernance qui serait une autorité morale indépendante des pouvoirs publics. Il devrait
contribuer à la définition des principes qui doivent guider les gouvernements. Il s’appuierait
sur un plan de charge intégrant les indicateurs qui vérifient l’état d’avancement de la
traduction des principes dans les faits. Cette initiative a été soutenue par la Banque Africaine
de Développement qui a structuré un groupe de travail sur la question dont les travaux sont
assez avancés.
Ce travail appelle la mobilisation d’un volume important d’informations sur les
différentes composantes de la gouvernance, sur ses différents voles. Ce qui nécessite un cadre
opératoire de recensement et de traitement des données. Par ailleurs, en voulant faire de la
bonne gouvernance une conditionnalité incontestable de bonne gestion par les Etats,
il est important de disposer d’un instrument fiable et incontestable de mesure
capable d’exprimer toutes ses dimensions économiques et politiques.
Il est assez fréquent que des institutions partenaires disposent de données
contradictoires pour les mêmes indicateurs que le pays hôte. Des divergences apparaissent
également au sein du même pays pour certains indicateurs quant à leur mode de calcul selon
la source de l’information. Dans ce contexte, il devient indispensable de disposer d’une
méthode commune de collecte, d’analyse et de diffusion des données.
1°) Les objectifs
L’objectif majeur est d’amener les pouvoirs publics à harmoniser leurs méthodes de
collecte, d’analyse et de diffusion des données (économiques, sociales et politiques) au regard
de la rapidité des moyens de calcul automatique qui a profondément modifié ces dernières
années les conceptions traditionnelles de la statistique qui, pour l’essentiel, se fondaient sur de
petits échantillons décrits par une ou deux variables seulement. Il est désormais possible
d’analyser de grandes masses de données multidimensionnelles grâce à des algorithmes
impraticables sans ordinateurs.
3°) Méthodologie
Les méthodes de l’analyse des données se sont révélées d’une grande efficacité
utilisées par un nombre croissant de praticiens (administration, homme politique, chercheurs,
économistes et juristes...) dans des domaines variés allant de l’économie au social en passant
par le politique et le juridique.
La gamme des méthodes d’analyse exploratoire pourra être utilisée aussi bien dans la
gestion des données économiques, sociales que politiques.
Le fichier électoral, source de polémique constitue une des applications privilégiées. Il s’agira
pour la population électorale de disposer d’informations démographiques et sociales qui
seront mises à jour par le fichier du ministère de la justice ( cas d’incapacité juridique).
Par ailleurs, le développement des nouvelles technologies doit être mis à profit pour pouvoir
disposer en temps réel des résultats des consultations. Nous proposons également dans le
cadre de cette étude une méthode rapide et fiable de collecte et d’analyse des données
électorales en temps réel.
En conclusion
Au terme de cette analyse, il me semble nécessaire de lancer une grande étude sur ces
questions relatives à l’élaboration d’indicateurs de suivi et d’évaluation de la bonne
gouvernance. et une méthodologie de collecte et d’analyse des données sur la base
d’indicateurs développés et adoptés au niveau des Etats.
Ces indicateurs peuvent être d’ordre politique (confection d’un fichier électorale,
gestion du scrutin pour assurer la transparence), économique (évaluation d’indicateurs
macroéconomiques …) La méthode consensuelle sera adoptée par chaque Etat membre de
façon à permettre des comparaisons internationales.