1606_EE_169_juin2016

Transcription

1606_EE_169_juin2016
14e année - N° 169 - Juin 2016
europ
La lettre des acheteurs européens d’électricité et de gaz
Edito
Sommaire
Analyses ............................... p.2
Acteur du mois :
Schneider Electric .............. p.6
Perspectives :
Le Siaap produit
du bioGNL à Valenton ....... p.7
Réseaux :
Arteria se positionne
sur les objets connectés ...... p.8
Vendeur/acheteur du mois :
Dalkia .............................. p.9
Acheteur du mois :
Ikea ............................... p.10
Le mot du juriste :
L’autoconsommation
de l’électricité d’origine
renouvelable ................... p.11
Flashes ................................p.12
Marchés ..............................p.16
Indicateurs spot
29 avril
31 mai
Var.
Electricité* (€/MWh)
Epex France
25,48
24,27
-1,21
Epex All.
24,21
22,54
-1,67
NBP
28,78
29,94
+1,16
Zeebrugge
27,80
29,36
+1,56
Zeeb. €/MWh
12,19
13,04
+0,85
Gaz* (p/th)
Pétrole
Brent ($/b)
45,29
48,96
+3,67
Gasoil ($/t)
404,00
434,75
+30,75
Fuel Oil ($/t)
200,50
223,00
+22,50
Monnaies
€/$US (1€ =)
1,15
1,11
-0,04
€/£ (1€ =)
0,78
0,77
-0,01
*
Base, day-ahead, moyennes du mois écoulé.
R=révisé p=pence. th=therm. b=baril. t=tonne.
europ
energies
L’impact du prix du
pétrole sur le gaz et
celui du gaz sur l’électricité ont beaucoup diminué en Europe. Néanmoins,
le prix du brut détermine encore largement celui du GNL en Asie. Or,
l’Europe est en arbitrage commercial
constant avec l’Asie pour l’accès au
GNL. Le prix du pétrole reste donc un
déterminant important du secteur énergétique européen.
ragée par des prix modérés), alors que
la production de pétroles coûteux diminue (pour les mêmes raisons). La perspective d’une remontée des prix du
brut devient donc probable. D’autant
plus que l’Arabie Séoudite ne s’oppose
plus à cette hausse, car elle craint que
les coupes claires opérées dans les
investissements de développement de
nouvelles capacités en 2015 et 2016
ne conduisent à une pénurie de pétrole
vers 2019-2020. Si cette pénurie est
forte, la hausse des prix peut devenir
incontrôlable : toute la stratégie de
l’Arabie Séoudite, consistant à éliminer
les pétroles les plus coûteux, serait
alors remise en quespoint
tion.
Un point d’inflexion est apparu ces dernières semaines dans l’évolution de ce
prix. Le cours du Brent a franchi à la
hausse la barre des $50/b, soit
presque le double de
Un
son niveau de fin janvier 2016. Cette ascen- d’inflexion du prix
sion est due à des raiMais Riyad a un allié
du pétrole
sons conjoncturelles,
de poids. En effet, le
comme l’arrêt d’une production d’envipétrole des schistes US, qu’il combat
ron 1 million de b/j de pétrole extrait
par ailleurs, réagit très vite, par nature,
des sables bitumineux au Canada à
à la hausse des prix. En quelques
cause d’incendies de forêt géants dans
semaines, des productions de schistes
l’Alberta, et de la réduction d’environ
arrêtées ou suspendues peuvent revenir
500 000 b/j de la production au
sur le marché et écrêter alors la hausse
Nigeria à cause de violences dans le
des prix. Qui plus est : il suffit de
Delta. Elle peut donc s’arrêter, voire se
quelques jours de prix élevés sur les
transformer en baisse si ces producmarchés à terme pour que des productions reviennent.
teurs de schistes se couvrent sur un an
ou plus, et leur production redevient
Mais le temps est un facteur important
rentable. Ainsi, le prix du pétrole reste
pour le marché. Or, plus on se rapcyclique, mais ses ondes se sont peutproche de la fin de l’année, plus le
être raccourcies. Le moment approche
rééquilibrage entre offre et demande
où l’on pourra vérifier ce nouveau
de pétrole se concrétise, à cause d’une
paradigme.
remontée de la consommation (encouPierre Terzian
est une publication de
Pierre Terzian (directeur), Claire Aïcardi (rédactrice en chef), Andrew Greene, Grégory Heller, Patricia Marcoz, Joël Spaës.
Abonnements – France : €944,42 TTC – Ailleurs : €925. Adresse : 65, rue Desnouettes - 75015 Paris – France – Tél : +33 (0)156085608 – Fax : +33 (0)156085609
europ
energies
- Juin 2016
Analyses
L’achat groupé d’énergie se développe
en France
La libéralisation totale du marché pousse certains professionnels à se rassembler pour obtenir des baisses de prix et des conditions plus
favorables. Les fournisseurs y trouvent aussi
leur compte.
Lancés dans les années 2000 suite à l’ouverture
des marchés à la concurrence, les achats groupés
d’énergie ont pris doucement leur envol en
France. La disparition des tarifs verts et jaunes
des entreprises, effective depuis le 1er janvier dernier, donne un nouvel élan à ce mécanisme, qui
concerne actuellement 10 % des 400 000 sites
« libéralisés ». Dans l’industrie, l’objectif principal, à première vue, est de réduire les dépenses
du poste énergie, à l’image de ce qu’ont fait les
acheteurs publics, qui se sont appropriés très tôt
le mécanisme d’achat groupé. Chez les industriels, les papetiers (groupements GAEL et
GAGN) font figure de pionniers dans ce domaine. Avec l’aide du cabinet ECG Energie
Consulting, ce secteur a commencé, en 2011, à
acheter de l’électricité en se regroupant. En raison de contraintes financières, certains d’entre
eux avaient du mal à accéder à l’offre et le
regroupement a réglé ce problème. Ainsi, la
question du prix n’est pas toujours la première
motivation. « Outre des négociations de prix, les
clients recherchent la mutualisation des engagements de volumes et donc la limitation des risques
de pénalités », note Guillaume Benali, Consultant
Senior chez ECG.
Factures en baisse de 5 à 10 %
Reste que ces professionnels ont bénéficié d’une
optimisation de leurs prix comprise entre 5 et
10 % du prix de l’électron, parfois beaucoup
plus, souligne Guillaume Benali. L’expérience
s’est révélée concluante. Si bien que les papetiers
ont décidé de se regrouper aussi pour l’achat de
gaz — la mutualisation a débuté en 2013.
« Chez eux, le système est bien rôdé. Ce sont de
2
gros consommateurs, qui réalisent de grosses
économies, en valeur absolue. En général, ils ont
leur propre acheteur d’énergies et connaissent
très bien le marché et ses contraintes », soulignet-on chez ECG. Au total, quarante sites papetiers
sont concernés par l’achat en commun d’électricité, (un total de 1700 GWh) et vingt sites font de
même pour le gaz (1800 GWh). Autre exemple
d’un achat groupé réussi : celui réalisé par le
réseau Autéo, qui fédère une centaine d’établissements de tailles très diverses (constructeurs, équipementiers, fournisseurs, etc.) de la filière automobile bretonne. Autéo a créé un groupement
d’achat dédié à l’énergie, qui rassemble
101 points de livraison d’électricité et 52 pour le
gaz. Pour les petits clients, les économies réalisées grâce au regroupement peuvent être substantielles. Les irrigants de l’Allier et de la Nièvre
(une centaine de points de comptage au total) en
savent quelque chose. Lorsqu’ils achetaient de
l’énergie à titre individuel, les fournisseurs leurs
proposaient des offres peu compétitives. Grâce à
la mutualisation, certains ont vu leurs factures
hors taxes baisser jusqu’à 25 %, remarque
Christel Pradillon, consultante chez ECG. D’une
manière générale, le groupement d’achat peut se
révéler particulièrement intéressant pour les petits
consommateurs d’énergie.
Une flexibilité accrue
La question du prix d’achat est donc un facteur
important du développement des achats groupés,
mais l’aspect qualitatif est aussi à prendre en
compte : « Pour un coût symbolique, nous négocions plus de service et des flexibilités contractuelles telles que la possibilité d’acheter de l’énergie en plusieurs fois », souligne Philippe Gay
(Smart Grid Energy). Un constat partagé par Max
Belot, président de Purenergy Associates. Selon
lui, c’est même cela qui décide les consommateurs à recourir à l’achat groupé : « Les clients
accèdent à des mécanismes de marché plus
souples, au paiement par échéances... La question des prix est secondaire, car bien souvent
l’économie réalisée est faible ». Du côté des fournisseurs, les groupements d’achat d’énergie présentent aussi des avantages. « Cela permet
europ
notamment aux opérateurs historiques de récupérer des clients qu’ils avaient perdus en 2015 au
profit de la concurrence », remarque Guillaume
Benali. Quant aux fournisseurs nouveaux entrants
ou peu connus, l’achat groupé leur ouvre les
portes de nombreuses sociétés d’un seul coup et
le coût d’acquisition de ces nouveaux clients est
faible. Chez ECG, on estime que la tendance à
former des groupements d’achats d’énergie va
perdurer en France et pourrait même se renforcer,
à l’image de ce qui se passe au Royaume-Uni, où
la gestion de l’énergie est de plus en plus externalisée. « Nous avons actuellement une douzaine de
pistes potentielles pour de nouveaux groupements
Le tertiaire s’intéresse
à l’autoconsommation d’électricité
D’ici à la fin juin, la France va lancer un appel
d’offres pour expérimenter l’autoconsommation
dans les secteurs industriel, tertiaire et agricole.
Le 25 mai, Enerplan, le syndicat des professionnels de l’énergie solaire, a organisé le premier colloque sur l’autoconsommation d’électricité, signe
de l’émergence de ce sujet. La première table
ronde réunissait Franck Charton, délégué général
de Périfem, l’association technique du commerce
Castorama, Brico Dépôt
et l’autoconsommation
Le groupe Kingficher a annoncé, le 4 décembre 2015, un
investissement de 50 millions de livres sterlings dans les énergies renouvelables, avec l’objectif, à terme, que ses magasins
produisent l’énergie dont ils ont besoin. Cette politique est
déclinée par Castorama et Brico Dépôt, les enseignes du groupe en France. Ainsi, le nouveau Brico Dépôt de Dax a été
conçu pour être le plus économe possible en énergie et des
panneaux solaires sont installés. L’électricité produite est autoconsommée. À Antibes, le Castorama construit en octobre
2015 est un bâtiment à énergie positive. Il dispose d’une centrale solaire en autoconsommation.
energies
- Juin 2016
qui naîtront certainement fin 2016 et en 2017 »,
assure Guillaume Benali.
Chez Smart Grid Energy, on estime qu’un « nouveau modèle est en train d’émerger dans ce
domaine, avec une dématérialisation croissante
qui rend l’achat groupé de plus en plus accessible aux petits consommateurs ». En revanche,
Max Belot (Purenergy Associates) est plus prudent. D’après lui, ces dispositifs pourraient décliner à moyen et long terme, « sauf si l’on assistait
à une modification fondamentale du marché, où
la massification deviendrait un élément clé ».
et de la distribution, et Alain Lafforgue, PDG du
centre Leclerc de Langon. Et c’est peut-être là que
réside la plus grande nouveauté : l’intérêt croissant
des professionnels, notamment du secteur de la
grande distribution, pour l’autoconsommation et
non plus seulement pour la vente d’électricité dans
le cadre des tarifs d’obligation d’achat. Franck
Charton énumère quatre facteurs pour expliquer
ce phénomène. Tout d’abord, l’amélioration de la
compétitivité du solaire photovoltaïque, avec des
retours sur investissements de l’ordre de dix à
douze ans aujourd’hui, contre vingt ou 25 ans en
2008. Ensuite, il note que « le marché est plus mûr.
L’autoconsommation était un sujet qui n’était pas
connu auparavant. Certains acteurs, comme Ikea
ou Castorama, se sont lancés sur des projets qui
ne sont plus de simples pilotes », explique-t-il à
EUROP’ENERGIES. L’augmentation du prix global
de l’électricité est aussi un facteur déterminant.
Enfin, le contexte réglementaire pousse les acteurs
de la grande distribution à développer de nouvelles solutions. Ainsi, le projet de décret sur la
rénovation des bâtiments tertiaires de plus de
2000 m2, dont la parution est prévue pour juin,
prévoit notamment l’obligation de réduction de la
consommation d’énergie du parc tertiaire de plus
de 60 % à l’horizon 2050, avec une première
marche de 25 % à l’horizon 2020.
Le 26 mai, Ségolène Royal, la ministre française
en charge de l’Énergie, a indiqué avoir saisi la
Cre sur un cahier des charges pour un appel
3
europ
energies
- Juin 2016
d’offres autoconsommation ciblé sur les secteurs
industriel, tertiaire et agricole, et en particulier les
centres commerciaux. « Ces segments de marché
sont ceux qui présentent la bonne concordance
entre la production et la consommation », avait
précisé Virginie Schwartz, directrice de la direction générale de l’énergie et du climat, au colloque
Enerplan. L’appel d’offres, qui doit être publié d’ici
à la fin juin, porte sur des installations de 100 à
500 kW, pour un volume total de 50 MW, dont
10 MW réservés pour la Corse et l’Outre-mer. Il
vise les différentes filières de production d’électricité (photovoltaïque, petite hydroélectricité, cogénération, etc.). Les lauréats bénéficieront d’une
« valorisation financière à l’électricité autoconsommée ». « Nous attendions cet appel d’offres depuis
longtemps. Nous avons été consultés lors de la
rédaction du cahier des charges, qui nous semble
bien ficelé », se réjouit Richard Loyen, délégué
Ça y est : le GNL US arrive
en Europe
Les premières cargaisons de GNL US arrivant en
Europe jouissent de conditions exceptionnelles.
Le GNL que les États-Unis ont commencé à exporter
le 24 février 2016 à partir du golfe du Mexique a
certainement contribué à la convergence des prix
spot du gaz que l’on observe entre l’Asie et
l’Europe. Cependant, les cargaisons qui sont parties
à ce jour de Sabine Pass, en Louisiane, jouissaient
de conditions favorables exceptionnelles. Il faut
noter d’abord qu’elles ont été commercialisées par
Cheniere Marketing. En effet, les livraisons destinées au premier client de Sabine Pass, BG (qui est
passé depuis peu sous la coupe de Shell), n’ont
commencé que lorsque la phase de démarrage du
premier train de ce terminal a été achevée par son
constructeur, Bechtel, le 31 mai 2016. Le deuxième
client, Gas Natural Fenosa, devrait commencer à
enlever du GNL, à partir du train 2, en septembre
prochain. Or Cheniere, qui était alors dirigé par
son fondateur Charif Souki, a concédé à ses premiers clients des conditions de prix très favorables
en 2011. Ainsi, Shell/BG ne paiera que
4
général d’Enerplan. La valorisation financière prévue consiste « dans une aide par kWh autoconsommé, un complément de rémunération pour l’injection sur dix ans et une pénalité pour éviter une
surconsommation », ajoute-t-il. Ce dispositif complète bien le cadre déjà existant, estime Enerplan.
À savoir, le système d’appels d’offres et de tarifs
d’obligation d’achat pour la production/injection,
d’une part, et l’amortissement exceptionnel bonifié
(140 %) en autoconsommation sans injection introduit par la Loi Macron, d’autre part. Selon l’association, l’appel d’offres « autoconso » va permettre de « mesurer la profondeur du marché
potentiel » et de faire émerger un modèle économique. « Après, il sera possible d’imaginer un système pluriannuel qui donnera de la visibilité aux
acteurs. Nous risquons d’être surpris par le volume
de projets qui vont candidater », indique, optimiste, Richard Loyen.
$2,25/MBtu pour liquéfier du gaz à Sabine Pass et
Gas Natural Fenosa n’en paiera que $2,49/MBtu.
Dès 2012, lorsqu’il a commencé à être courtisé par
les acheteurs potentiels de son futur GNL, Cheniere
a porté à $3,00/MBtu cette rémunération. C’est ce
taux qu’on retrouve dans les contrats signés avec
Kogas et Gail en 2012. Par la suite, la rémunération a été même portée à $3,50/MBtu, mais les
cargaisons payant ce taux ne commenceront à être
chargées à Sabine Pass qu’à l’automne 2018,
lorsque le cinquième train de ce terminal sera mis
en service. Et ce sera le cas aussi au terminal de
Cheniere à Corpus Christi.
Un taux d’affrètement réduit
Autre facteur exceptionnellement favorable dont
bénéficient les cargaisons de GNL qui quittent
actuellement Sabine Pass : le taux d’affrètement des
méthaniers qui est extrêmement réduit, à cause de
l’excédent de l’offre de ces navires sur le marché
international. Sur le marché spot, on loue aujourd’hui des méthaniers de 155 à 165 000 m3 pour
$25 000 ou $30 000/jour ! Il fallait payer
$150 000/j pour cette catégorie de méthaniers il y
a quelques années encore. Grâce à ces taux très
réduits, une rotation maritime complète (A/R) entre
Sabine Pass et Sines (Portugal), où une cargaison
europ
energies
- Juin 2016
p
par Cheniere M
g à partir de Sabine Pass p
Premières exportations de GNL par Cheniere
Marketing
à partir de Sabine Pass : 1er trimestre 2016
trimestre
2016
(en$/MBtu)
$/MBtu)
(en
Date départ
24 février 2016
15 mars 2016
26 mars 2016
28 mars 2016
Volume (m3)
56 445
80 530
92 620
96 035
Destination
Brésil
Inde
Brésil
EAU
Prix Fob
$3,35
$3,77
$3,62
$3,72
Coût de la
liquéfaction*
$1,20
$1,65
$1,50
$1,60
* Calculé par PETROSTRATEGIES sur la base d’un prix HH de $1,90/MBtu majoré de 12 % (chiffres arrondis). Source des
données de base : DOE, Washington.
de GNL US est arrivée fin avril, ne coûte que
$0,30/MBtu, à peine plus cher qu’une rotation
avec le Brésil, moitié moins qu’en Inde
($0,60/MBtu) et trois fois moins qu’avec un port
japonais. Mais il n’est pas impossible que ces taux
d’affrètement augmentent lorsque de nouvelles
capacités de liquéfaction seront mises en service
dans le monde.
Troisième facteur favorable aux premiers exportateurs de GNL US : le prix très bas du gaz naturel
américain échangé au hub de Henry Hub, qui était
inférieur à $2/MBtu. Les clients de Cheniere Energy
lui paieront le gaz naturel à l’entrée de l’usine de
liquéfaction de Sabine Pass à 115 % du prix HH.
Dernier élément à prendre en compte lorsque les
livraisons contractuelles de Cheniere commenceront : dans tous les contrats de vente de GNL à long
terme conclus par ce groupe, une partie de la rémunération fixe pour liquéfaction qu’il recevra est
indexée sur l’inflation. Or, si l’inflation US était faible
jusqu’ici, ce n’est plus le cas et c’est même l’une des
raisons qui pourraient entraîner la Fed à relever ses
taux de base dans les semaines ou les mois à venir.
L’Europe, un marché naturel
Cela dit, le rapprochement des prix spot du gaz
entre l’Asie et l’Europe est impressionnant. Alors
qu’en décembre 2015 encore, le prix spot du GNL
acheté par les Japonais dépassait de plus de
$2/MBtu le cours affiché sur le NBP britannique,
ces deux prix étaient en mai 2016 quasi égaux,
avec même un léger dépassement du NBP par rapport au Japon (voir tableau). C’est dans ces conditions qu’une première cargaison de GNL US est
arrivée en avril 2016 au Portugal et il y a fort à
parier que ce ne sera pas le dernier méthanier à
partir de Sabine Pass vers les ports européens.
« L’Europe est le marché naturel pour presque
toutes les exportations de GNL US », a récemment
déclaré Meg Gentle, présidente de Cheniere
Marketing.
À partir des données publiées par le département
US de l’Énergie (DOE), on peut évaluer le coût que
cette société a payé au terminal de Sabine Pass
pour la liquéfaction du gaz. En effet, le DOE
indique le prix Fob au départ de Sabine Pass des
premières cargaisons enlevées par Cheniere
Marketing. Il faut en déduire le prix HH auquel le
gaz a été acheté en lui appliquant une majoration
de 12 % pour le combustible de liquéfaction. C’est
ce qui est illustré dans le tableau ci-joint. Rappelons
que le bénéfice réalisé par Cheniere Marketing sur
chaque cargaison est partagé entre lui et la société
du terminal de Sabine Pass, car la composition de
leurs actionnariats respectifs n’est pas identique.
Prix spot
spot du
du gaz
gaz naturel
naturel et du GNL
Prix
(en$/MBtu)
$/MBtu)
(en
États-Unis – Henry Hub
Royaume-Uni – NBP
Japon – Spot
Ecart Japon – NBP
Décembre 2014
3,40
8,45
11,60
+3,15
Décembre 2015
1,95
5,30
7,40
+2,10
Avril 2016
1,90
4,40
4,20
-0,20
Source : PETROSTRATEGIES.
5
europ
energies
- Juin 2016
Acteur du mois
Schneider Electric conseille
les acheteurs d’énergie
Les équipes locales de conseil en énergie s’appuient sur les ressources en expertise du groupe, présent à l’international.
Une gestion dynamique du risque prix
En France, après l’acquisition par Schneider Electric
en 2011 de Summit Energy, puis en 2012 de M&C
Energy Group, deux cabinets de conseil en énergie,
l’équipe France Supply Services (incluse dans la division Energy & Sustainability Services – ESS) du groupe a trouvé son équilibre et son rythme de croisière.
Juliette Medana, qui la dirige, a proposé une rencontre à EUROP’ENERGIES pour parler des besoins
actuels des acheteurs d’énergie et des moyens mis
en œuvre pour y répondre. « Les acheteurs ont beaucoup évolué ces dernières années. De nombreux
groupes multi-sites ont mis en place une gouvernance
centralisée des achats d’énergie et cette tendance se
poursuit. Comme nous l’avons entendu au Forum
EUROP’ENERGIES du 7 avril, ils sont confrontés à
des problématiques de gestion de périmètre, de pilotage des budgets et de contrôle des factures. Mais
des solutions existent et la massification de ces
volumes ouvre des perspectives de déploiement de
stratégies d’achat évolutives », explique Juliette
Medana, qui a démarré en septembre 2015 chez
Schneider Electric, après plusieurs années passées
chez Solvay, côté approvisionnement en énergie.
Côté ingénierie de prix, « beaucoup de contrats permettent de fixer progressivement ou de manière
opportuniste le prix de la commodité au fur et à
mesure qu’on se rapproche de la livraison physique », constate Juliette Medana. Désormais, « des
contrats permettent une gestion dynamique du
risque prix. Pour cela, nous travaillons en étroite collaboration avec les clients pour définir une stratégie
d’achat adaptée à leur profil de risque et à leurs
spécificités. Nous en pilotons l’exécution de manière à accroître la performance en assurant le respect
des objectifs budgétaires », explique-t-elle. Dans
cette perspective, l’équipe française s’appuie sur
l’ensemble du groupe Schneider Electric, soit sur les
1500 personnes qui travaillent dans la division ESS
à travers le monde. La gestion dynamique de
risques dans l’achat d’énergie est une pratique
adoptée par tous types de clients au Royaume-Uni et
dans les pays nordiques. En France, « les fournisseurs y sont de plus en plus ouverts et nous travaillons à faire évoluer les contrats », ajoute Juliette
Medana. Des constats transposables en Belgique,
où le degré de maturité est à peu près équivalent.
ESS propose une plate-forme logicielle
La directrice souligne également l’importance de
l’optimisation règlementaire. En France, entre la
réforme de la CSPE, l’évolution du Turpe, l’évolution
des règles d’obligation de stockage du gaz, la mise
en œuvre (ou pas…) du marché de capacité, « il est
difficile pour les acheteurs de tout suivre, d’évaluer
l’impact de ces nouvelles règles, d’identifier les
leviers d’optimisation et de les anticiper dans les
contrats. Il faut prévoir des clauses pour encadrer
les évolutions et se laisser la possibilité d’optimiser,
challenger ou renégocier », explique Juliette
Medana. La directrice insiste sur les bons rapports
que son équipe entretient avec les fournisseurs, mais
elle garde la volonté d’aider les acheteurs : « Ce qui
est important pour moi, c’est d’être assise à côté des
consommateurs et de les aider à créer de la
valeur », conclut-elle.
Juliette Medana constate une plus grande maturité
des acheteurs d’énergie sur tous les segments.
Schneider Electric accompagne des clients représentant un portefeuille d’environ 30 TWh en France. Il
est constitué de grands industriels « déjà sophistiqués dans leurs achats, qui s’appuient sur Schneider
Electric pour bénéficier de la mutualisation des
moyens et de l’expertise ». À ces clients, le groupe
apporte en outre un éclairage sur l’évolution des
pratiques d’achat appliquées en France et dans
d’autres pays européens. Il accompagne aussi des
clients de taille moyenne et des grands multi-sites.
Enfin, il est très présent auprès des collectivités
locales et des acheteurs publics. En complément des
solutions de services intégrés, ESS propose une
6
plate-forme logicielle composée de modules qui
répondent aux problématiques achat, efficacité
énergétique et développement durable. « Cela permet de regrouper automatiquement toutes les données et d’agir de manière efficace », explique
Juliette Medana.
europ
energies
- Juin 2016
Perspectives
Le Siaap produit du bioGNL
à Valenton
Cryo Pur fait la démonstration de la validité
industrielle de son procédé qui permet d’épurer
du biogaz et de liquéfier du biométhane simultanément.
-90 et -120 °C. « Toutes les conditions sont donc
réunies pour poursuivre le processus, comprimer le
gaz et le refroidir pour le liquéfier », explique Denis
Clodic à EUROP’ENERGIES. Le procédé permet
d’épurer du biogaz et de produire du biométhane
liquide en même temps. Cerise sur le gâteau : le
CO2 récupéré peut trouver aussi une utilisation
industrielle.
Trouver de nouveaux débouchés
Le Syndicat interdépartemental pour l’assainissement
de l’agglomération parisienne (Siaap) traite les eaux
usées des habitants et des industries d’Île-de-France
dans six usines. L’eau, pour être purifiée, passe par
plusieurs phases de décantation, de traitement biologique et de clarification, avant d’être rejetée dans la
nature. Des boues d’épuration résultent de chacune
de ces étapes. Elles sont récupérées et utilisées pour
produire du biogaz sur les sites de Seine-Aval, de
Valenton et de Grésillons. L’objectif du Siaap est de
valoriser au mieux cette source d’énergie. Le site de
Seine-Aval, à Achères (Yvelines), est autonome à
62 % pour ses besoins en énergie. L’installation, qui
est la plus grande des six usines du Siaap, dispose
notamment de turbines à gaz d’une capacité totale
de 9 MW. Sur celui de Grésillons (Yvelines), une petite cogénération de 3,5 MW permet de produire de
l’électricité dans le cadre d’un contrat d’obligation
d’achat avec EDF. À Valenton (Val-de-Marne), 80 %
du biogaz produit dans les méthaniseurs sont utilisés
pour les besoins de l’installation. Mais les 20 % restants sont torchés.
Séparation physique du méthane
et du CO2 par le froid
En février 2013, le Siaap et Suez (qui exploite le site
de Valenton) ont lancé le projet « BioGNVal », qui a
disposé d’un budget total de 6,6 millions d’euros,
dont 3 millions d’euros d’aide de l’Ademe, sous
forme de subventions et d’avances remboursables.
Ce démonstrateur utilise la technologie développée
par la start-up Cryo Pur, fondée par Denis Clodic en
mai 2015. Le procédé permet la séparation physique du méthane et du CO2 (principale « impureté »
du biogaz) par le froid. Après une première phase
de refroidissement, qui permet de retirer l’eau, et le
retrait du soufre par l’utilisation de charbon actif, le
CO2 est givré à des températures comprises entre
D’un point de vue de l’aménagement du territoire,
cette solution industrielle permet de trouver de nouveaux débouchés à des installations de méthanisation. « Le BioGNL pourrait redonner vie à des projets
qui ne peuvent pas injecter dans le réseau, celui-ci
étant trop éloigné ou déjà saturé. Notre activité de
transport de BioGNL par camion-citerne du site de
production vers les sites de consommation s’apparente d’ailleurs à un réseau virtuel », a expliqué
Karine Vernier, présidente de LNGeneration, la filiale d’Engie dans le GNL porté, à EUROP’ENERGIES.
BioGNVal a testé la filière du GNL carburant.
Actuellement, une tonne par jour de GNL est produite à Valenton à partir des boues de traitement des
eaux usées d’environ 100 000 habitants. Pierre
Coursan, chef de marché biométhane et efficacité
énergétique de Suez, précise que cette production
est suffisante pour alimenter vingt bus ou vingt
camions. Engie, Iveco et Thermo King sont associés
au projet. GNVert, filiale d’Engie spécialisée dans la
distribution de carburants alternatifs, a mené des
tests d’alimentation de moteurs GNL en bioGNL sur
sa station-service de Rungis. Iveco est un constructeur
de camions impliqué dans le développement du
GNL carburant pour le transport de marchandises en
France. Thermo King est un spécialiste des groupes
frigorifiques pour le transport par camions. Il utilise le
CO2 liquide en substitution aux groupes frigorifiques
entraînés par diesel.
Pour transformer cet essai, il faut maintenant mettre
en place le cadre réglementaire adéquat, à savoir
des tarifs d’achat. Selon les experts de BioGNVal,
les coûts de cette filière sont proches de ceux de la
filière de production et d’injection de biométhane
dans les réseaux publics de gaz naturel. En tout cas,
pour Cryo Pur, la réussite de BioGNVal est une belle
carte de visite. La start-up devrait prochainement
signer pour des projets en Italie et au Royaume-Uni.
7
europ
energies
- Juin 2016
Réseaux
Arteria, filiale de RTE, se positionne
sur les objets connectés
Arteria va lancer, à la fin de l’été 2016, des démonstrateurs destinés à accueillir tous les acteurs qui veulent tester en réel le « Web
3.0 ».
« Le réseau électrique doit devenir un
réseau numérique », a indiqué
François Brottes, président de RTE, le
11 mai, lors d’une audition à
l’Assemblée nationale. Message
entendu côté Arteria, sa filiale chargée de valoriser les fibres optiques
excédentaires installées sur les
réseaux de transport d’électricité français et les points hauts aménagés sur
les pylônes. Patrick Larradet, directeur
général d’Arteria, nommé en février
dernier, explique à EUROP’ENERGIES : « Nous sommes convaincus
que la transition numérique est vitale
pour la compétitivité de l’industrie
française et l’émergence de nouveaux
services autour des produits manufacturés. Nous proposons d’accompagner les industriels en mettant à disposition nos infrastructures ».
son réseau. RTE dispose également de
250 000 pylônes répartis sur l’ensemble du territoire. Arteria loue une
partie de ces fibres optiques à des
opérateurs télécom, à des réseaux
publics (comme le réseau universitaire
Renater dans le sud de la France) ou
à des collectivités locales qui se substituent aux opérateurs de téléphonie
pour connecter certaines régions peu
couvertes par les opérateurs privés. Et
sur certains pylônes, des antennes de
téléphonie mobile sont installées.
Arteria veut ouvrir ces infrastructures à
de nouveaux clients. « Nous proposons par exemple aux multi-sites industriels de bénéficier de la fibre optique
pour leur propre usage et la mise en
place d’infrastructures télécoms étendues, dédiées et sécurisées »,
explique Patrick Larradet.
Sur les 100 000 km de lignes opérées
par RTE, 22 000 km sont équipés de
fibres optiques. Elles sont utilisées par
le GRT pour ses besoins de gestion de
Des serveurs informatiques
dans les locaux
Connaissez-vous
PETROSTRATEGIES ?
une publication sœur
d’EUROP’ENERGIES
destinée aux décideurs des
secteurs de l’énergie.
Pour recevoir un exemplaire :
[email protected]
8
Face au développement du Big Data,
Arteria envisage des solutions d’hébergement de serveurs informatiques
dans les locaux ou près des sites RTE.
« Sur ces sites, les ‘data centers’
bénéficient d’une sécurisation électrique maximale, avec des liaisons
télécoms par fibres optiques, et parfois même d’une surveillance et d’un
contrôle de l’accès. Arteria examine
les disponibilités et aménage les
locaux pour livrer des solutions clé en
main », indique le DG. Avantage supplémentaire : autour des postes élec-
triques, le prix du foncier est moins
élevé pour l’installation de gros équipements. « Nous avons déjà développé ces solutions à titre expérimental,
avec déjà un projet d’agrandissement », précise-t-il.
Arteria envisage surtout de se lancer
dans l’Internet des objets. « Nous
sommes au tout début d’une véritable
mutation numérique. Avec l’installation de petits capteurs/émetteurs
reliés à Internet par radio sur un
réseau dédié qu’Arteria va développer en fonds propres, tout sera possible en matière de suivi des espaces,
des services et des ‘process’ industriels autour des lignes RTE », s’enthousiasme Patrick Larradet. Ces derniers mois, les opérateurs télécoms
ont multiplié les annonces de mises en
place de réseaux dédiés à l’Internet
des objets. « Arteria, filiale d’un
monopole public, se positionne stratégiquement sur les zones rurales. De
l’agriculture aux services publics, en
passant par l’industrie, la ruralité
aussi va se numériser », ajoute-t-il. Le
modèle d’affaires est encore confidentiel. Dans un premier temps, la
filiale de RTE va développer des
démonstrateurs, à partir du second
semestre de 2016. « Ces pilotes ont
pour vocation d’accueillir tous les
écosystèmes intéressés par un test en
réel de l’Internet des objets, services
publics, industriels, agriculteurs, startup, etc. Ce seront de véritables ‘incubateurs à ciel ouvert’ ! », précise
Patrick Larradet. « Si les expériences
sont concluantes, nous les déploierons sur l’ensemble du pays. En outre,
en valorisant le patrimoine et le
savoir-faire de RTE sur le volet numérique et télécom, Arteria participe à
son niveau à la maîtrise des tarifs
d’acheminement de l’électricité »,
rappelle le DG d’Arteria.
europ
energies
- Juin 2016
Vendeur/acheteur du mois
Dalkia est à la fois acheteur de gaz
et vendeur d’économies d’énergie
Pour Dalkia, le modèle intégré de fourniture d’énergie
et de prestations de services énergétiques reste valide.
En juillet 2014, EDF a acquis 100 % des activités de
Dalkia en France, qui porte, depuis, l’essentiel de
l’activité du groupe dans les services énergétiques.
La société, qui comptabilise près de 80 ans d’expérience (Dalkia a signé son premier contrat de performance énergétique en 1937 !), est l’un des principaux fournisseurs de services énergétiques dans
l’Hexagone. Elle doit maintenant trouver pleinement
sa place au sein d’EDF. Dalkia a également dû passer le cap de la fin des tarifs réglementés de vente
de gaz naturel et d’électricité, qui a concerné
15 000 de ses sites clients. L’ouverture du marché
de l’énergie a conduit Dalkia à s’adapter. La fin des
tarifs réglementés s’est bien passée dans un contexte
de prix bas sur le marché, mais le cadre réglementaire est en constante évolution. « Nous devons trouver les bonnes solutions contractuelles et former nos
équipes commerciales à expliquer clairement à nos
clients ces nouveaux enjeux », explique Olivier
Conte, responsable achats d’énergie de Dalkia, à
EUROP’ENERGIES. La société met en avant sa triple
compétence (achat d’énergie, fourniture d’énergie et
fourniture de services énergétiques) pour répondre
de la façon la plus performante possible aux besoins
de ses clients, précise Olivier Conte. Mais les clients
ont tendance à remettre en question le modèle d’une
prestation intégrée fourniture-efficacité énergétique.
Des achats de 22 TWh/an
Dans le cadre de l’ouverture à la concurrence des
marchés de l’énergie, au début des années 2000,
Dalkia a créé une direction des marchés de l’énergie, qui s’est d’abord intéressée au CO2, puis à
l’électricité. En 2008-2009, l’activité d’approvisionnement en gaz naturel a pris de l’ampleur avec la
baisse des prix sur le marché de gros par rapport
aux tarifs réglementés. Une entité pilotée par la
direction des marchés de l’énergie a été créée,
appelée SVD17 (Société Valmy Défense 17).
« SVD17 est notre bras armé dans le négoce pour
approvisionner en énergie nos clients. C’est un outil
au service de Dalkia, qui n’est pas destiné à devenir un fournisseur des consommateurs finals à part
entière. Nous achetons quasi exclusivement pour
alimenter nos sites clients, soit environ 22 TWh/an
de gaz naturel », précise Olivier Conte. Des règles
ont été clairement établies pour que Dalkia ne vienne pas concurrencer EDF fournisseur de gaz naturel. Deux exceptions cependant. D’une part, « nous
répondons à des appels d’offres de prospects qui
attendent que nous fassions nos preuves dans
l’achat d’énergie, avant de nous prendre aussi
comme fournisseur de services énergétiques »,
explique Olivier Conte. D’autre part, « des clients
qui ont des prestations intégrées remettent en cause
ce modèle et demandent un prix molécule, d’un
côté, et un prix performance énergétique, de
l’autre », précise-t-il.
Des solutions très construites
Malgré cette volonté croissante des acheteurs de
séparer fourniture d’énergie et performance énergétique, Dalkia continue de croire dans la plusvalue d’une offre intégrée. Tout d’abord, l’opérateur achète en gros pour ses clients. « Sur les marchés, nous pouvons capter les mêmes opportunités
que les fournisseurs d’énergie purs. En tant que
fournisseur de services, nous avons une bonne compréhension des problématiques des clients industriels », explique Olivier Conte. Selon lui, Dalkia
s’attache « à trouver la solution d’approvisionnement la plus cohérente pour satisfaire les solutions
techniques proposées au client » et donc suivre les
gains de performance énergétique. « Les trente personnes de la direction des marchés travaillent en
étroite collaboration avec les équipes régionales »,
précise-t-il. Le prestataire peut non seulement proposer des solutions originales, notamment pour ses
clients haut-de-portefeuille (livraison aux pegs et
aux PITD ; expédition d’équilibre ; offres sur long
terme, etc.), mais aussi des solutions très
construites, même pour des sites consommant de
petits volumes (à partir de 5 GWh/an). « Nous
sommes motivés par un objectif premier qui est le
gain de contrats de services énergétiques », rappelle Olivier Conte.
9
europ
energies
- Juin 2016
L’acheteur du mois
Ikea consomme l’électricité
qu’il produit
Ikea affirme que sa stratégie de couverture de
sa consommation d’électricité par de la production ENR se révèle judicieuse sur un plan économique.
Depuis plusieurs années déjà, Ikea affiche son ambition :
couvrir 100 % de l’électricité qu’il consomme par de la
production en propre à partir d’énergies renouvelables.
En France, le pari est déjà gagné, selon le rapport RSE du
groupe pour 2015. Le spécialiste de l’ameublement et de
l’aménagement de la maison fait tourner 29 éoliennes et
a installé plus de 20 500 panneaux photovoltaïques. Il a
en parallèle réduit de 11 % sa consommation d’énergie à
fin 2015 par rapport à 2014 et de 27 % par rapport à
2010. « Nous avons plusieurs projets de couverture de
toitures des magasins avec des panneaux photovoltaïques, à Avignon, Tours, Reims, Caen, Rennes. Certains
sites sont même situés dans la partie nord de la France.
Pour Avignon, le projet est de 789 kWc. S’y ajoutent de
plus petits projets, comme à Bayonne, Mulhouse, Orléans
ou Paris Nord », explique Philippe Grimaux, directeur
Facility Management d’Ikea France, à EUROP’ENERGIES.
Fin 2016, un tiers des toits devraient
être couverts de panneaux photovoltaïques
La politique d’Ikea est de couvrir avec des panneaux
solaires systématiquement les toits de ses nouveaux
magasins et de magasins plus anciens au moment de leur
rénovation. Dans l’Hexagone, Ikea compte 33 magasins,
quatre dépôts et deux sites de bureaux. À fin 2016, un
tiers des toits de ces sites devraient être couverts de panneaux photovoltaïques. Dans les deux ans, cette couverture devrait en représenter les deux-tiers. « La capacité
d’accueil des toits est souvent beaucoup plus importante
qu’on ne le croit. Bien sûr, il ne faut pas faire n’importe
quoi, mais souvent, les bureaux d’études prennent des
marges de sécurité très importantes. Sur Montpellier, par
exemple, nous pensions que la charge ne devait pas
dépasser 8 kg/m2. Après une étude plus poussée, il est
apparu que la toiture pouvait supporter plus de 30
kg/m2 », explique Philippe Grimaux. Le directeur Facility
Management insiste néanmoins sur la nécessité de faire
10
une étude de structures et de réfléchir à tous les aspects.
« En termes d’assurance, il est possible que l’installation
de panneaux solaires fasse perdre la garantie décennale », explique-t-il.
Les panneaux photovoltaïques et la production d’électricité demandent aussi du temps en termes de maintenance et
de surveillance. « Il faut nettoyer les panneaux, car quand
ils sont sales, on perd en rentabilité. Les fientes d’oiseaux
ou la poussière risquent de créer des points chauds qui
peuvent endommager les installations », explique Philippe
Grimaux. Il faut également contrôler les onduleurs. Bref,
cette activité, à laquelle s’ajoutent l’achat d’énergie et le
suivi du marché de l’électricité, demande du temps.
L’autoproduction couvre 40 % des besoins
des magasins dans la moitié sud
Signe particulier, Ikea a décidé d’opter pour l’autoconsommation de sa production d’électricité (sauf pour
quelques sites). « Cela nous évite une bonne part des tracasseries administratives et des contraintes techniques
d’intégration au bâti. Les appels d’offres pour obtenir des
garanties d’achat sont de vraies usines à gaz en France »,
indique le directeur Facility Management. L’autoproduction couvre environ 40 % des besoins des magasins dans la moitié sud et 25 à 30 % maximum au nord.
« Avec la hausse du prix tout compris de l’électricité, l’autoconsommation devient intéressante sur un plan économique. En dix ans, Ikea arrive à rentabiliser les installations », détaille Philippe Grimaux. C’est surtout une volonté du groupe : « Tout est autofinancé. Le siège accepte ce
temps de retour relativement long. Mais les panneaux ont
une durée de vie de vingt à trente ans. Il faut savoir se projeter dans l’avenir », estime Philippe Grimaux.
Tout n’est cependant pas idyllique. En effet, le système
actuel permet difficilement de réinjecter la production non
consommée sur le réseau public. L’accueil et le traitement
des dossiers par Enedis (ex-ERDF) semblent aléatoires
selon les antennes régionales. « Dans chaque région,
nous devons tout réexpliquer et prouver notre capacité
d’autofinancement », regrette Philippe Grimaux, qui espère qu’Enedis fera « des efforts de simplification des procédures. Enfin, il pointe « un certain vide juridique, qui limite
aux parties communes l’alimentation à partir d’installations d’autoproduction, dans le cadre d’un réseau fermé
de distribution, tel qu’un centre commercial ».
europ
energies
- Juin 2016
Le mot du juriste
L’autoconsommation de l’électricité d’origine renouvelable
Le mot de Pierre-Adrien Lienhardt, avocat au
barreau de Paris, cabinet Gide Loyrette Nouel.
Le gouvernement a annoncé le lancement, avant l’été,
d’un appel d’offres relatif à l’autoconsommation. La
ministre chargée de l’Énergie a saisi la Cre d’un projet
de cahier des charges concernant les consommateurs
des secteurs industriel, tertiaire et agricole et portant
sur un volume total de 50 MW. Toutes les énergies
renouvelables seront concernées. Il s’agit de la première mise en application de l’arrêté du 24 avril 2016
relatif aux objectifs de développement des énergies
renouvelables, qui avait annoncé des appels d’offres
expérimentaux de soutien à l’autoconsommation avant
le 31 décembre 2016.
Dispositif de soutien encore insuffisant
Cette initiative intervient dans une période où le
nombre de projets photovoltaïques raccordés est le plus
faible depuis 2011. Elle vise à expérimenter un soutien
complémentaire aux dispositifs incitatifs déjà en place.
L’autoconsommation est permise et encouragée de
longue date. Le décret du 10 mai 2001 prévoyait
depuis l’origine, au sujet de l’obligation d’achat, qu’un
producteur devait céder la totalité de l’électricité produite « en dehors, le cas échéant, de l’électricité qu’il
consomme lui-même ». De même, l’ancien article L.
121-11 du code de l’énergie imposait seulement aux
autoconsommateurs le paiement de la contribution au
service public de l’électricité (CSPE) au-delà de
240 GWh/an consommés (dispositif d’ailleurs maintenu par la loi de finances rectificative pour 2015).
Malgré cela, peu d’installations faisaient le choix de
l’autoconsommation faute d’incitations suffisantes, en y
préférant les tarifs avantageux de l’obligation d’achat.
L’État a alors tenté de compléter son dispositif incitatif.
La loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte (LTECV) a fait de l’autoconsommation un critère de fixation du prix payé aux
producteurs dans le cadre de l’obligation d’achat et du
complément de rémunération (les textes d’application
de ces dispositifs, publiés les 27 et 28 mai 2016, n’ap-
portent cependant pas de précisions sur ce point). Les
autoconsommateurs sont en outre éligibles à l’obtention
de garanties d’origine, qui permettent une valorisation
supplémentaire de l’électricité renouvelable.
Levée progressive des obstacles
C’est toutefois avec difficulté que ces incitations compensent les obstacles auxquels l’autoconsommation se
heurte encore. Le tarif d’utilisation des réseaux publics
d’électricité (Turpe) empêche l’autoconsommation multisites en îlots urbains. Le Turpe fait dépendre le prix
payé du volume injecté sur le réseau, et non de la distance parcourue par l’électricité. Ainsi, hormis le cas
où consommation et production sont localisées sur un
même site, l’autoconsommation (au niveau d’un quartier, par exemple) ne permet pas de réelles économies
sur le coût d’acheminement de l’électricité. Les parlementaires ont invité la Cre à « procéder à la nécessaire
adaptation des règles de tarification au cas particulier
de l’autoconsommation » et ainsi à infléchir le principe
de tarification « timbre-poste ». Souvent mis en cause,
le raccordement des installations a récemment évolué.
Enedis (anciennement ERDF) propose désormais une
convention spécifique à l’autoconsommation destinée
aux installations de faible puissance qui n’injectent pas
d’électricité sur le réseau.
Recours facilité à l’autoconsommation
Le gestionnaire de réseau a également annoncé qu’il
équiperait de compteurs Linky les nouveaux clients
autoconsommateurs à compter du 1er janvier 2017, ce
qui facilitera le comptage croisé des injections et des
soutirages. La publication prochaine d’une ordonnance
relative aux réseaux fermés de distribution, dont le projet a été soumis au Conseil supérieur de l’énergie, pourrait également apporter des solutions à certains porteurs de projets. Ces adaptations, encore récentes, vont
dans le sens d’un recours facilité à l’autoconsommation. Le gouvernement cherche à valoriser encore
davantage ces installations avec l’appel d’offres qui
sera prochainement lancé. Tel sera également l’objet
d’une autre ordonnance prévue par la LTECV dont l’objet sera spécifiquement de sécuriser l’autoconsommation en dehors du mécanisme d’appel d’offres. La
pérennité de l’autoconsommation dépendra des avancées qui seront permises par ce futur texte.
11
europ
energies
- Juin 2016
Flashes
France : plus d’indexation
peg Nord
En France, la Cre a présenté le troisième rapport d’audit sur les tarifs règlementés de gaz naturel. Le régulateur
n’a pas identifié de facteurs susceptibles de faire évoluer le niveau d’indexation sur les prix de marché du
gaz (actuellement de 77,4 %) dans la
formule tarifaire. En revanche, il préconise d’accroître la part d’indexation sur l’indice français peg Nord et
de réduire le nombre d’indices pétroliers au 1er juillet 2016. Cela doit permettre de mieux refléter les conditions
d’approvisionnement d’Engie. La part
de l’indexation peg Nord pourrait
être portée à 20 % environ (contre
11,2 % actuellement). Côté indices
pétroliers, la Cre recommande de ne
conserver que la référence au Brent.
En outre, au titre des coûts hors
approvisionnement, la Cre recommande une baisse de 1,2 % des tarifs
au 1er juillet 2016. Ce mouvement
doit permettre de prendre en compte
l’augmentation des coûts d’infrastructures supportés par Engie (+1,8 %),
compensée par une baisse significative des coûts commerciaux prévisionnels (-3 %).
UE : la garantie d’Epic
n’est pas une aide d’État
Le tribunal de l’Union européenne a
annulé la décision de 2011 de la
Commission européenne qui qualifie
d’aide d’État la garantie implicite illimitée accordée par l’État français à
l’Institut français du pétrole (aujourd’hui IFPEN). En 2006, l’IFP a été
transformé en une personne morale
de droit public, à savoir un établissement public à caractère industriel et
12
commercial (Epic). La CE a déclaré
que ce statut conférait une garantie
illimitée à l’IFP sur l’ensemble de ses
activités et que l’IFP avait tiré un
avantage économique réel dans le
cadre de ses relations avec ses fournisseurs, ses concurrents ne bénéficiant pas d’une telle garantie. Le tribunal a estimé notamment que la CE
n’a pas démontré que, en présence
de cette garantie, « les fournisseurs
de l’IFP sont susceptibles de lui accorder un traitement plus favorable,
notamment en baissant les prix de
leurs produits ou de leurs services et
en exprimant ainsi l’appréciation plus
favorable qu’ils ont de son risque de
défaut ».
R.-U. : services-systèmes
par batteries électriques
Au Royaume-Uni, National Grid a
signé un contrat de quatre ans avec
RES (Renewable Energy System) pour
L’AIE conseille à la Belgique de repousser
sa sortie du nucléaire au-delà de 2025
Prolongez l’usage du nucléaire ! Tel est, en substance, le message adressé par
l’AIE à la Belgique, dans un rapport publié le 19 mai dernier et consacré à ce
pays. Selon l’agence, le calendrier de sortie du nucléaire mis en place par la
Belgique n’est pas réaliste. Il prévoit un arrêt des réacteurs étalé entre 2022 et
2025. Or, l’AIE estime qu’un tel scénario mettrait en péril la sécurité d’approvisionnement de la Belgique, et la priverait d’une source importante d’électricité peu carbonée et abordable. D’où la recommandation suivante : prolonger
la durée de vie de plusieurs réacteurs au-delà de 2025, « si les conditions de
sûreté sont réunies ». Sur les sept unités actuellement en service en Belgique,
quatre (totalisant 4115 MW de puissance nette) atteindront la barre des quarante ans entre 2022 et 2025, et trois autres l’ont déjà dépassée. À ce jour,
l’énergie nucléaire représente environ 50 % de l’électricité produite dans le
pays. D’après l’AIE, la prolongation de la durée de vie des réacteurs serait
bénéfique à moyen terme mais également à long terme. Elle permettrait de
sécuriser l’approvisionnement en électricité tout en réduisant son coût de production. En outre, le coût de la sortie du nucléaire serait amoindri, et la
Belgique se donnerait le temps nécessaire pour investir dans des sources
d’énergie alternatives.
Inquiète sur le front de l’électricité pour la Belgique, l’AIE l’est beaucoup moins
en ce qui concerne le gaz. Selon le rapport, le réseau belge de transport est
« excellent » et il est bien relié aux pays voisins, ce qui assure au pays une certaine sécurité des approvisionnements. Seule ombre au tableau sur ce dossier :
la dépendance importante de la Belgique (à hauteur de 30 %) au gaz peu
calorifique de Groningue (Pays-Bas), un gisement qui est en déclin et ne fournira plus de gaz à partir de 2029. Pour s’adapter à cette nouvelle donne, la
Belgique a commencé à se préparer à l’usage de gaz hautement calorifique.
Toutefois, remarque l’AIE, l’essentiel du travail reste à faire, et un processus
plus flexible et plus rapide est peut-être souhaitable, au cas où la production
de Groningue chuterait plus rapidement que prévu.
europ
France : le gaz de
mine entre en bourse
sur Euronext
La Française de l’énergie a lancé
le 24 mai son introduction en
bourse sur le marché Euronext de
Paris. La société veut augmenter
son capital de 50 millions d’euros,
qui peuvent être portés à M€60.
Cette société est spécialisée dans
la production de gaz contenu
dans le charbon des anciens bassins houillers français. Elle a certifié ses premières réserves de gaz
de charbon dans le bassin lorrain
et prépare la construction de sa
première plate-forme de production dans la région, qui devrait
entrer en production dans les
18 prochains mois. Elle table sur
quinze puits en activité à cet horizon et une production de 700 millions de m3 sur douze ans. Dans le
même temps, elle compte continuer à faire croître la taille de ses
réserves. En outre, la Française de
l’énergie est en cours d’acquisition de Gazonor, qui détient un
portefeuille d’exploitation du gaz
de mine dans le Nord-Pas-deCalais. Elle compte augmenter la
production de gaz de houille dans
cette région et d’améliorer le taux
de marge opérationnelle, notamment en rendant cette production
admissible au tarif d’achat. Dès
2017, la Française de l’énergie
pourrait équiper trois de ses sites
de captage avec des unités de
production d’électricité. La société
souhaite à terme se développer au
niveau européen à proximité de
ses implantations actuelles, notamment en Allemagne et en
Belgique.
la fourniture par RES d’une capacité
de 20 MW de régulation de fréquen-
energies
- Juin 2016
France : onze fournisseurs ont répondu
à l’appel d’offres du Sigeif
En France, le Sigeif a attribué son sixième appel d’offres pour l’achat de
gaz naturel dans le cadre d’un groupement. Celui-ci porte sur 3 TWh/an
(plus de 10 700 sites), sur trois ans et répond aux besoins de 565 collectivités publiques d’Ile-de-France. Onze fournisseurs ont participé à la
consultation. Les lots 1 et 3 (offices HLM, conseil régional, collèges, universités, etc. ; 1365 sites ; 1,3 TWh/an) ont été attribués à Save ; le
lot 2 (les plus petits sites ; 7900 sites ; 515 GWh/an) a été attribué à
Direct Energie ; les lots 4 et 5 (communes, EPCI, hôpitaux, Ehpad, piscines ; 1520 sites ; 1,1 TWh/an) ont été attribués à Eni ; et le lot 6 (hôpital de Nanterre ; 41 GWh/an ; un site) a été attribué à Gas Natural.
Les contrats démarrent au 1er juillet 2016. Le lot 2 bénéficie d’un prix
ferme, alors que pour les autres lots, les prix sont indexés sur le peg
Nord. « Cette année, nous avons étalé l’attribution des marchés sur trois
jours, ce qui a donné un peu de visibilité aux candidats et a permis à
ceux qui n’avaient pas obtenu de lot le premier jour, d’améliorer leur
offre pour obtenir les autres lots », explique Jean-Michel Philip, DG
adjoint du Sigeif, à EUROP’ENERGIES. Les lots 1 et 3 ont été attribués
le premier jour, avec une durée de validité de l’offre de 24 h ; le lot 2
le deuxième jour, avec une durée de validité de l’offre de 3 heures ; et
le reste des lots a été attribué le troisième jour, avec une offre d’une validité de 24h. En outre, pendant la durée du contrat, une option prévoit
que les fournisseurs puissent proposer une part de biométhane.
ce à l’aide d’une installation de batteries électriques. Ce système permettra
à National Grid de disposer d’un service-système avec un temps de réponse inférieur à la seconde. Il devrait
être opérationnel dans 18 mois.
France : ERDF devient
Enedis
ERDF, la filiale de distribution d’électricité d’EDF, devient Enedis. Le nouveau nom du GRD a été officiellement
annoncé le 31 mai 2016. Dans sa
délibération du 23 juin 2015, la Cre
avait considéré que les mesures
prises jusqu’alors par le groupe pour
limiter la confusion entre ERDF et EDF
« ne constitu[ai]ent pas une réponse à
la hauteur des enjeux ». Le comité de
règlement des différends et des sanctions de la Cre (Cordis), saisi par le
président du régulateur, avait adressé
une lettre de mise en demeure à l’entreprise, lui demandant des modifications substantielles. Voilà qui est fait.
Entreprises : RWE veut
doubler son « trading »
RWE mise sur le développement de
ses activités de « trading », a indiqué
le groupe allemand le 2 mai. Il vise
une croissance significative du négoce avec les grands consommateurs en
Europe, qu’il compte doubler à
13
europ
energies
- Juin 2016
moyen terme. Cette activité est portée
par RWE Supply & Trading (RWEST),
l’un des trois piliers de la nouvelle
stratégie du groupe, avec la production conventionnelle d’électricité et la
nouvelle filiale RWE International SE
(pour les renouvelables, les réseaux et
les ventes aux clients finals), explique
RWE. « Le ‘trading’ de l’énergie est
une activité très intéressante pour
nous, avec un potentiel de croissance », a indiqué Bernhard Günther,
CFO de RWE et RWE International. À
ce jour, RWEST est présent dans la
majorité des places de négoce et
emploie autour de 1300 personnes
dans quarante pays. Les activités de
RWEST sont appelées à se développer en-dehors de l’Europe, et notamment en Asie. Le portefeuille de la
société couvre également le négoce
du gaz naturel.
France : mieux séparer
TRV et offre de marché
Dans sa délibération du 17 mai
2016, la Cre a approuvé les principes
de dissociation comptable entre activités de fourniture régulées et en offre
de marché proposés par Engie, à
condition que l’opérateur historique y
Un nouveau fournisseur d’électricité en France :
Energies Libres
Dans la liste des gagnants de l’appel d’offres organisé par la Cre pour assurer la continuité de la fourniture d’électricité aux clients concernés par la fin
des TRV, on remarque qu’aux côtés d’EDF, d’Engie et de Direct Energie, une
société dénommée « Energies Libres » a remporté une quarantaine de lots.
Il s’agit essentiellement de lots de sites en C4 (BT supérieur à 36 kVA en
contrat unique) et de quelques lots de sites en C3 (HTA, contrat unique, profilé). Mais qui est Energies Libres ? « Energies Libres est un nouveau fournisseur d’électricité, actif partout en France. Les statuts de la société ont été
enregistrés en décembre 2014. Nous avons livré nos premiers MWh le
1er janvier 2016. Nous nous adressons aux clients qui étaient auparavant
aux tarifs réglementés jaunes et verts », explique Tristan de Vasselot, directeur général d’Energies Libres, à EUROP’ENERGIES. La société est une filiale
de Quadran, un producteur indépendant d’électricité verte, qui l’a créé dans
la perspective de la fin des tarifs d’obligation d’achat en France. « Nous
avons vocation à accueillir d’autres partenaires, et pas seulement des producteurs d’énergie. L’objectif est d’arriver à une taille critique. La concurrence est importante dans la fourniture d’électricité. Elle se joue entre autres sur
l’optimisation des coûts d’opération», précise Tristan de Vasselot. Energies
Libres propose une offre 100 % verte et une offre classique. Côté prix,
« notre stratégie est d’être toujours bien placé, au prix le plus juste », indique
le DG. Energies Libres fait des offres à prix fixes et horo-saisonnalisés. Quels
sont ses objectifs et ses perspectives ? « Nous voulons atteindre le cap des
10 000 clients le plus vite possible », explique Tristan de Vasselot. Il veut
également accompagner la promotion de l’électricité verte et apporter de
nouvelles offres aux clients, dans le cadre des possibilités qui seront offertes
par le déploiement de compteurs évolués.
14
Suisse :
report de l’ouverture
complète du marché
de l’électricité
En Suisse, le 4 mai, le Conseil
fédéral a décidé de reporter sine
die l’ouverture complète du marché de l’électricité. Début 2016,
Doris Leuthard, conseillère fédérale en charge de l’Energie,
avait déjà indiqué qu’il n’y avait
pas urgence à ouvrir le marché
suisse. Cette décision est justifiée
par les résultats d’une consultation publique, menée entre le
8 octobre 2014 et le 22 janvier
2015. Si la majorité des participants s’est prononcée en faveur
de l’ouverture, elle y a aussi mis
des conditions, notamment un
accord sur l’électricité avec
l’Union européenne, une coordination avec la stratégie énergétique 2050 et la révision de la loi
sur l’approvisionnement électrique (LaPEl). Le Conseil fédéral
a chargé le Detec d’examiner
régulièrement quelle est la date
indiquée pour l’ouverture complète du marché. En Suisse,
depuis 2009, les clients consommant plus de 100 MWh/an peuvent choisir leur fournisseur. Il
était prévu que cette possibilité
soit ouverte à tous les clients à
compter de 2018.
apporte des améliorations substantielles. Par exemple, le régulateur
demande que les coûts de promotion
et de commercialisation de ventes ne
soient pas du tout imputés à l’activité
de fourniture aux tarifs réglementés.
Engie avait été épinglé par la Cre en
mai 2015 (rapport de la Cre du
13 mai 2015 sur les TRV de gaz naturel), puis par l’Autorité de la concur-
europ
rence en mai 2016 (décision du 2 mai
2016), parce qu’il affectait aux tarifs
règlementés une partie des coûts de
développement commercial destinés à
promouvoir les offres de marché.
tié de ses activités de distribution de
gaz naturel, a-t-il annoncé, le 18 mai,
à l’occasion de la présentation de ses
résultats du premier trimestre 2016.
Les fruits de cette cession pourraient
être utilisés pour rémunérer les actionnaires de SSE ou pour financer le programme d’investissement du groupe.
SSE a annoncé un plan de 6 milliards
de livres sterling (G€7,83) sur les
quatre prochaines années, comprenant le renouvellement et le développement de son réseau d’électricité,
des investissements dans les renouvelables et, potentiellement, la construction de nouvelles centrales au gaz à
Keadby, dans le Lincolnshire, et à
Seabank 3, près de Bristol.
France : Linky chez les
auto-consommateurs
En France, ERDF a indiqué, le
13 mai, aux acteurs des énergies
renouvelables que le compteur communicant Linky serait mis à disposition
des auto-consommateurs d’électricité
à partir de janvier 2017. Ce compteur permet de mesurer à la fois l’électricité soutirée du réseau et injectée
sur le réseau. Cela permettra aux
clients auto-consommateurs d’éviter
les frais d’installation d’un deuxième
compteur.
France : construction de
Val de Saône autorisée
L’arrêté du 22 avril 2016 autorise
GRTgaz à mener les travaux qui
devraient permettre la décongestion
de la liaison gazière entre le nord et
le sud de la France (JO du 18 mai
2016). Le gestionnaire du réseau de
transport est autorisé à construire et à
exploiter une nouvelle canalisation,
dite « Val de Saône », entre Etrez
(Ain), Palleau (Saône-et-Loire) et
Voisines (Haute-Marne), une nouvelle
interconnexion et le renforcement de
la station de compression d’Etrez. Le
coût de ce projet est estimé à un peu
moins de 750 millions d’euros. Il
devrait être mis en service d’ici à la
fin 2018.
Le prix moyen du gaz importé par
l’Allemagne a chuté de 32,1 % au
premier trimestre 2016 en euros et de
33,4 % en dollars US. Il est ainsi
tombé de $268,2/1000 m3 en janvier-mars 2015 à $178,5/1000 m3
au premier trimestre 2016. C’est ce
SSE, le deuxième plus grand fournisseur d’énergie au Royaume-Uni, envisage de vendre entre un tiers et la moi-
- Juin 2016
qui ressort des statistiques publiées
par le Bafa. L’Allemagne a accru de
3,4 % ses importations de gaz, en les
portant à 27,5 Gm3 au cours des trois
premiers mois de 2016. Fait notable :
le Bafa ne publie plus la décomposition par pays d’origine des volumes
de gaz importés par l’Allemagne.
Allemagne : le prix du
gaz importé a chuté
R.-U. : SSE vendra une
part de sa distribution
energies
Taux de conversion usuels
1 kWh
1 GJ
1 therm
1 MBtu
1 m3 de gaz
1 bep
1 tep
1 tec
1
0,0036
0,0342
0,0034
0,0949
0,00059
0,00008
0,000125
1 gigajoule (GJ)
277,5
1
9,5
0,95
26,3
0,1634
0,022
0,03467
1 therm
29,27
0,10545
1
0,1
2,78
0,0172
0,0023
0,00365
1 million de Btu (MBtu)
292,7
1,054
10
1
27,8
0,172
0,0232
0,0365
1 mètre cube de gaz (m3)
10,54
0,038
0,36
0,036
1
0,0064
0,00087
0,00136
1 baril équivalent pétrole (bep)
1 700
6,12
58,14
5,814
155,5
1
0,135
0,637
1 tonne équivalent pétrole (tep)
12 602
45,37
431
43,1
1 153
7,4
1
1,573
1 tonne équivalent charbon (tec)
8 012
28,84
274
27,4
733
1,57
0,6357
1
1 kilowatt heure (kWh)
15
europ
energies
- Juin 2016
Les marchés
Le début du mois de mai a été placé sous
le signe d’une forte production des
renouvelables allemands : le 8 mai les
énergies renouvelables — solaire et
éolien — ont représenté 80 % de la pro-
!/MWh
mars-16
avr-16
mai-16
M/M-1 %
Moyenne mensuelle des day ahead (base) européens sur les trois derniers mois
EPEX All
NORDPOOL
OMEL
EPEX France
GME
TGE
EPEX Suisse
24,29
21,91
27,78
27,08
35,22
34,20
29,19
24,21
22,12
24,11
25,48
31,99
36,87
25,26
22,54
23,21
25,76
24,27
34,78
35,46
23,67
-6,91
4,89
6,87
-4,76
8,73
-3,82
-6,27
Belpex
27,11
25,43
25,37
-0,23
APX
27,19
2,92
Moyenne Day-Ahead 2016 et écarts par rapport à EPEX France pour le mois sous revue
EPEX All
NORDPOOL
OMEL
EPEX France
GME
TGE
EPEX Suisse
22,54
23,21
25,76
24,27
34,78
35,46
23,67
-1,73
-1,07
1,49
0,00
10,51
11,19
-0,60
Belpex
25,37
1,10
APX
41,53
27,13
-0,03
Moyenne Day-Ahead 2015 et 2016 et écarts par rapport à EPEX France (janvier au mois en cours)
EPEX All
NORDPOOL
OMEL
EPEX France
GME
TGE
EPEX Suisse
30,25
26,38
45,61
40,13
50,03
35,93
40,36
24,45
23,46
28,38
27,16
37,12
35,49
31,67
-2,72
-3,70
1,21
0,00
9,96
8,33
4,50
Belpex
45,03
27,24
0,08
!/MWh
Moyenne 2015
Moyenne 2016
Moyenne - EPEX Fr
duction totale à 12h et les prix ont été
négatifs. En fin de mois, la France a enregistré des mouvements de grève qui ont
réduit
la
production
nucléaire.
Finalement, on a assisté à une forte
convergence des prix en dessous de
30 euros/MWh, sauf la Pologne et
l’Italie, qui se sont marginalement couvert
Gaz : une hausse des
prix à contre-saison
Le mois de mai 2016 a été marqué par
deux quinzaines diamétralement opposées. La première a connu des températures supérieures aux normales, la
deuxième, au contraire, une fraîcheur
anormale. Du côté de l’offre, la
Norvège a réduit ses livraisons, alors
que la Russie a augmenté les siennes.
La production européenne a diminué,
surtout au Royaume-Uni. En moyenne,
le prix day-ahead du gaz a légèrement
augmenté à 13,04 €/MWh à
16
Le mois de mai a été caractérisé par un
fort rebond des prix des énergies fossiles
dans le sillage du pétrole. La présence
accrue d’exécution de couvertures automatiques des besoins pour 2017 de certains grands consommateurs a accéléré
le mouvement. Ces couvertures ont porté
également sur les années 2018 à 2020,
entraînant des tensions sur l’ensemble de
la courbe à terme. De plus, les discussions actuelles autour d’une taxe carbone
élevée en France pour permettre une
réduction des émissions de gaz à effet de
serre ne sont pas soutenues par nombre
de pays européens qui utilisent le charbon comme combustible majeur
(Allemagne, Pologne).
APX
26,13
25,32
27,19
7,39
!/MWh
2016
Moyenne-EPEX Fr
avec les prix basés sur ceux du gaz naturel (prix supérieurs à 30 euros/MWh).
Prix Prix
à terme
fourniture
en (OTC
base– mai
(OTC2016
- mai–2016
- en €/MWh)
à termepour
pour fourniture
en base
en €/MWh)
France (EPD)
Plus bas Plus haut
Allemagne (EEX)
Clôture
Plus bas Plus haut
Clôture
Juillet 2016
22,98
25,92
25,92
23,38
25,59
25,51
T3 2016
24,10
27,10
27,10
23,97
26,54
26,54
Cal-17
29,11
31,26
31,26
24,05
26,29
26,29
!/MWh
mars-16
avr-16
mai-16
!/MWh
2015
2016
Gaz: Moyennes mensuelles des day ahead
PEG Nord
PEGSud/TRS
Zeebrugge
TTF
NBP
Henry Hub
NCG
12,62
12,91
12,47
12,29 12,94
5,29
12,89
12,25
12,32
12,19
12,12 12,62
5,77
12,20
13,10
13,61
13,04
13,02 13,30
5,83
13,06
Gaz: Moyennes des day ahead (janvier au dernier mois)
PEG Nord
PEGSud/TRS
Zeebrugge
TTF
NBP
Henry Hub
NCG
21,72
22,19
21,30
21,34 21,65
8,66
21,47
12,98
13,29
12,81
12,75 13,26
6,00
13,03
PEG Nord = France; Zeebrugge = Belgique; TTF = Pays - Bas; NBP = Royaume-Uni;
HH = Henry Hub = USA; NCG = Allemagne; PSV=Italie
Zeebrugge en mai 2016, comparé à
12,19 €/MWh en avril 2016. Il affi-
PSV
14,04
13,76
15,06
PSV
23,70
14,44
chait 20,65 €/MWh en mai 2015.
Une chute de 37 % en un an.
Avertissement
Les informations contenues dans ce document sont basées sur des sources considérées
comme fiables. EUROP’ENERGIES ne saurait être tenu pour responsable de l’usage que
le lecteur ferait de ces informations.
Commission paritaire N° 1116I81764. Dir. de la publication : Pierre Terzian.
Mensuel. Photocopie interdite. Copyright © 2016 PETROSTRATEGIES SA. E-mail : [email protected]
ISSN 1634-6548
Electricité : tensions sur
la courbe à terme

Documents pareils