83 H Abbaye de la Sainte-Trinité de Caen

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83 H Abbaye de la Sainte-Trinité de Caen
ARCHIVES DEPARTEMENTALES
DE LA SEINE-MARITIME
83 H
Abbaye de la Sainte-Trinité de Caen
Etabli par Delphine Delarbre
Sous la direction de Florent Lenègre, conservateur du patrimoine
et de Vincent Maroteaux, conservateur général du Patrimoine,
directeur des Archives départementales de la Seine Maritime
ROUEN, 2009
Introduction
Statut et mode d’entrée :
Archives publiques entrées à l’occasion des saisies révolutionnaires.
Composition matérielle :
1 article, 0,1 ml
Dates extrêmes : 1216-1789
Contenu du fonds :
Identification du producteur :
Abbaye de la Sainte-Trinité de Caen
Contexte historique :
Fondée par Guillaume le Conquérant et sa femme Mathilde de Flandres, fille de Beaudoin le Pieux, la Trinité se
dresse au sommet de la colline dominant à Caen le confluent de l’Orne et de l’Odon. Les chroniqueurs Milon
Crespin et Odéric Vital expliquent cette fondation par une volonté de faire pénitence. En effet, le mariage entre
Guillaume le Conquérant et sa cousine Mathilde de Flandre, est prohibé par Léon IX pour cause de
consanguinité. En contrepartie du pardon accordé par le Pape Nicolas II, ils fondent à Caen en 1059 deux
abbayes bénédictines : l’abbaye aux Hommes dédiée à Saint Etienne, et l’abbaye aux Dames dédiée à la Trinité.
Cependant, il semble que d’autres raisons aient motivé la création des deux abbatiales : la volonté de créer un
pôle d’urbanisation dans une ville en pleine expansion et celle d’établir de nouveaux centres religieux en BasseNormandie. Il est probable également que le site de chaque abbaye ait été choisi en fonction du plan de
fortifications de Caen, afin de leur donner un rôle d’appoint à l’égard du château.
Les travaux de l’abbaye aux Dames commencèrent en 1062 et furent achevés en 1130. Les travaux du chevet
commencent au XIe siècle, puis furent ajoutés les arcs boutants à l’extérieur pour renforcer l’édifice. Le 18 juin
1066, veille de l’expédition de Guillaume en Angleterre, a eu lieu la dédicace de l’abbatiale de la Trinité encore
en travaux. La fille du couple ducale, la petite Cécile, est alors consacrée à Dieu à l’âge de 5 ans. Elle sera
abbesse quelques décennies plus tard. Le tombeau de la Duchesse Mathilde de Flandres, morte en 1083, se
trouve toujours dans le chœur de l’église. Mathilde en mourant, légua sa couronne, son sceptre, ses ornements
royaux, des vases, des calices, des coupes, des candélabres, des vêtements et autres objets précieux.
Les religieuses de la Trinité semble avoir pendant longtemps mené une vie libre. Eudes Rigaud fait allusion à
plusieurs reprises aux désordres, rites ou coutumes, peu conformes à l’état religieux des moniales de Caen. Le
journal des Visites pastorales d’Eudes Rigaud, fait mention d’une religieuse de la Trinité (Lucie de Crévecoeur)
qui vient demander à l’archevêque, en visite à Saint- Léger-de- Préaux, l’absolution d’une peine portée contre
elle lors de la dernière venue de Rigaud à Caen. L’archevêque consent à lui pardonner ; mais comme pénitence,
elle devra trois fois se soumettre à la discipline devant le chapitre, réciter trois psautiers et jeûner pendant un an
tous les vendredis, au pain et à l’eau la première fois. Et de plus, elle devra donner au monastère tout ce qu’elle
possédait en fraude. Voilà comment Eudes Rigaud entendait que l’on pratiquât la pauvreté et la renonciation à la
pauvreté. Au XIIe, l’abbesse Laurence de Budos redresse spirituellement l’abbaye en obligeant les religieuses à
respecter la règle de Saint-Benoît.
La première abbesse, Mathilde était de très haut lignage. Parmi les moniales entrées en 1066, toutes sont issues
de l’aristocratie normande. Au moyen-âge, le monastère est prospère et assez peuplé. Il se compose en 1250 de
soixante-cinq nonnes lorsqu’Eudes Rigaud s’y rend pour l’une de ses visites épiscopales. Son témoignage nous
montre par ailleurs que le nombre de moniales n’était pas fixé : « nous avons trouvé soixante-cinq nonnes dans
ce monastère, mais, il n’y a pas de statuts fixés en la matière ».
83 H : LA TRINITE DE CAEN
De nombreux différends surviennent avec l’Evêque de Bayeux, sous la direction duquel est l’abbaye. En effet,
l’abbesse est élue par la communauté des moniales puis elle reçoit bénédiction et confirmation de l’évêque. Or,
les abbesses de la Trinité tentent de conforter une ancienne tradition selon laquelle leur abbaye bénéficiait du
privilège d’exemption, c’est à dire qu’elle relevait directement du Saint Siège et que l’évêque de Bayeux n’avait
aucun droit de regard sur le choix des abbesses et le gouvernement du monastère. Mais il semble que l’abbaye
n’ai jamais obtenu ce privilège dont jouissait notamment la Trinité de Fécamp. Seules des exemptions fiscales
avaient étaient accordées par Guillaume le Conquérant. Au XVIIe siècle, les religieuses tenaient à faire respecter
ce qu’elles croyaient être leurs prérogatives. Cela entraîna quelques différents avec l’évêque de Bayeux, parfois
assez pittoresque. Eude Rigaud en fait mention. En 1128 Béatrix, deuxième du nom, est élue abbesse par la
majorité des religieuses, mais son élection est cassée par l’archevêque de Bayeux, qui nomme à sa place Lucie
de Crévecoeur. Béatrix en appela de cette décision à l’archevêque de Rouen, Eude Rigaud, qui annula l’une et
l’autre de ces élections, et nomma abbesse Jeanne Du Châtel, religieuse de Saint- Sauveur d’Evreux. Cette
dernière n’ayant point accepté cette dignité, les élues et les religieuses appelèrent de nouveau au Saint- Siège ; le
pape, après de longs débats, confirma l’élection de Béatrix. Les difficultés commencèrent dès 1650 avec une
série de procès. C’est seulement en 1730 que sera définitivement établi et admis par la communauté le caractère
non exempt de l’abbaye, conforme aux documents du XIe siècle qui nous sont parvenus.
Au XVIIIe siècle, les bâtiments conventuels sont reconstruits sur les plans de Guillaume de la Tremblaye, moinearchitecte de la congrégation de Saint-Maur, chargé également de reconstruire l’abbaye aux Hommes. Les
travaux commencent en 1702, mais sont interrompus en 1737, faute de fonds suffisants. Les travaux reprennent
en 1767, grâce à l’aide du Roi. Mais la Révolution française éclate et le cloître n’a jamais été achevé.
Richement possessionnée en Normandie et en Angleterre, l’abbaye fut prospère jusqu’au XIVe siècle et traversa
sans trop de dommages les temps troublés de la guerre de cent ans. Exposée aux attaques de l’extérieur, elle fut
fortifiée vers 1359 et les religieuses vendirent dans ce but leur argenterie et leurs chasses précieuses. Les
religieuses furent autorisées alors à lever un impôt sur les foires dépendant du monastère, pratique qui devait
ensuite se perpétuer. Un donjon fût bâti au sud de l’église et la forteresse eut son capitaine nommé par le roi. Il
est probable que c’est vers cette époque que furent démolies les flèches de la façade. Les bâtiments servirent de
logement à Henri V d’Angleterre en 1417 et à René d’Anjou, roi de Sicile, en 1450. L’abbaye subit en 1562 le
pillage des protestants qui détruisirent le tombeau de la reine Mathilde. Le XVIIe et le XVIIIe siècles virent
s’effectuer nombre de modifications : l’église fut dotée d’un monumental portail au bras sud du transept (portail
détruit au XIXe siècle), tandis que l’on reconstruisait le couronnement des tours de façade. A partir de 1702
furent édifiés les bâtiments actuels. En 1788, on démolit la voûte de la nef pour la reconstruire en matériaux
légers.
Pendant la Révolution française, les religieuses furent chassées de l’abbaye en 1791. devenu bien national,
l’abbaye reste provisoirement désaffectée et les clefs sont remises au secrétaire du District de Caen. En octobre
1792, les meubles sont vendus et une partie de l’église sert de magasin de fourrage, l’autre d’atelier
d’habillement pour les troupes. En 1809, l’abbaye devint dépôt de mendicité jusqu’en 1818. En 1820, elle devint
l’Hôtel-Dieu de Caen, puis l’hospice saint Louis en 1908. Les religieuses reviennent en 1820 mais aux
Bénédictines succède une congrégation de religieuses Augustines. Elles y restèrent jusqu’en 1980. En 1865
l’église de l’abbaye devint église paroissiale du quartier et fut profondément restaurée. Au XVIIIe siècle, le voûte
a été démolie pour être reconstruite. Au XIXe siècle, le façade et les tours ont été reconstruites intégralement. En
juin 1944, pendant le débarquement allié et la bataille de Caen, l’église et l’abbaye furent relativement épargnées
par les bombardements, alors que la ville fut en grande partie détruite. Une dernière restauration de l’intérieur de
l’église intervint entre 1990 et 1993.
Les possessions de l’abbaye étaient assez étendues ; parmi ses domaines normands citons Ouistreham, les
domaines de Calix, de Vaucelles, de Chauffour, du Fresne-Camilly, les églises et les dîmes de Falaise et de
Guibray, la terre, l’église et les moulins de Foulbec, la moitié des dîmes des six paroisses de Jersey, de celles de
Bénouvilles et de Carpiquet … et d’importantes terres réparties entre divers villages. Au Moyen-Age, les
possessions anglaises de la Trinité de Caen , comprenaient à l’origine les manoirs de Felsted en Essex, Tarrant
Launceston en Dorset, Minchinhampton, Avening et Pinbury dans le Gloucestershire. Horstead, dans le Norfolk,
fut donné par le roi Guillaume le Roux et Tilshead s’y ajouta en 1131 environ.
Liste des abbesses de l’abbaye de la Sainte- Trinité faite à partir des documents complémentaires :
Mathilde de Normandie (1026-1074)
Cécile de Normandie et d’Angleterre (1074-1127)
Isabelle de Blois (1127-1128)
Béatrix de Hugueville (1128-1141)
Denise d’Echauffour (1141-1160)
Jeanne de Coulonces (1160-1181)
83 H : LA TRINITE DE CAEN
Mathilde d’Evreux (1181-1198)
Isabelle d’Yvetot (1198 – 1202)
Adèle de Thibouville (1202-1215 ou 1217)
Jeanne II (1217-1223)
Isabelle de Crèvecoeur (1230-1237)
Julienne de Saint-Cellerin (-1256)
Julienne II (1256-1262)
Béatrix de Cambremer ( ?-1289)
Aimée de Gournay (1289-1293)
Nicole de Chambly (1293-1329)
Nicole de Tollevast (1329-1336)
Georgette de Moley (1336-1376)
Marie de Lorme (1376-1401)
Marie de Varignières (1401-1407)
Marguerite de Thieuville ( ?-1407)
Mathilde de Varignières (1407-1417 ou 1414)
Nicolle de Rupallay (1418-1426)
Marie de Survie (1426-1434)
Marguerite de Thieuville (1434-1441)
Blanche d’Auberville (1441-1470)
Catherine Le Vicomte (1470-1482)
Agnès de Thieuville (1482-1491)
Renée de Bourbon (1492-1505)
Isabeau de Bourbon (1505-1531)
Catherine d’Albret (1531-1532)
Marguerite Le Valois (1532-1539)
Louise Le Mailly (1532 ou 1539-1554)
Anne de Montmorency (1554-1588)
Jacqueline de Saussay ( ?)
Madeleine de Montmorency (1588-1598)
Laurence de Budos (1598-1650)
Marie- Eléonore de Rohan (1650-1664)
Marguerite- Henriette Gouffier de Rouannes (1164-1673)
Anne-Madeleine de Cochefilet de Vaudes (1678-1698)
Gabriele-Françoise de Froulay de Tessé (1698-1720)
Françoise de Froulay de Tessé (1720-1729)
Marie-Anne de Scaglia de Verrue (1729-1745)
Cécile-Geneviève-Emilie de Belzunce de Castelmoron (1745-1787)
Marie-Aimée-Jacqueline le Doulcet de Pontécoulant (1787-1792)
Structure et constitution :
Le fonds de l’abbaye est conservé aux Archives du Calvados. Il ne s’agit ici que d’une liasse, concernant des
biens appartenant à l’abbaye de la Sainte Trinité de Caen dans la paroisse d’Hénouville.
Présentation de l’instrument de recherche :
Le pré-classement pièce à pièce à été fait au XIXe siècle et il s’est agi d’adapter les normes archivistiques
actuelles à la faible importance matérielle de ce fonds.
Intérêt historique :
Ce petit fonds (1 article) ne nous permet pas de connaître l’organisation et la vie du monastère des Bénédictines
de la Sainte-Trinité de Caen. Mais il apporte des renseignements sur les possessions de l’abbaye et la gestion des
terres dans la paroisse d’Hénouville du XIIIe au XVIIIe siècle.
83 H : LA TRINITE DE CAEN
Conditions de communication :
Libre.
Les documents peuvent être photographiés sans flash. La provenance et la cote doivent figurer sur toute
publication.
Bibliographie :
BAYLE M., L’abbaye aux Dames, La Trinité de Caen, Rouen : C.R.D.P., 1979.
BHN 528/6
« Note sur les possessions de l’abbaye de la Trinité de Caen aux îles normandes », dans Annales de Normandie,
n°3, juillet 1987.
RH 19/35
RUPRICH-ROBERT V., L’église Sainte Trinité (ancienne abbaye aux dames) et l’église Saint-Etienne (ancienne
abbaye aux hommes) à Caen, 1864
BHN 282
ANDRIEU-GUITRANCOURT, Pierre, L’archevêque Eudes Rigaud et la vie de l’église au XIIIe siècle, d’après le
Regestrum visitationum, 1938
BHB 72
LAVACRY S., L’archevêque Eudes Rigaud et les abbayes et prieures normands, mémoire de maîtrise préparé
sous la direction de Mr Sadourny, 2 V, 1998
F 1218/1-2
Regestrum visitationum archiepiscopi rothomagensis, Journal des visites pastorales d’Eude Rigaud, archevêque
de Rouen.
BHE 17
Sources complémentaires :
Série G
G 803 Significations et réitérations de grades sur l’archevêché de Rouen. – Patrice Fannin, du diocèse
d’Ardaugh en Irlande, naturalisé français, chapelain titulaire de la chapelle de Saint-Laurent en l’abbaye de la
Trinité de Caen, et de celle de Saint-Jacques en la paroisse de Saint-Georges d’Aunay, professeur septenaire et
docteur en théologie de l’université de Caen.
G 1816 Collation de la cure de la Sainte-Trinité de Hénouville, à Eustache Beton et à Pierre de Campaignolles,
par Mgr d’Amboise.
G 2068 Informations prises, au prieuré de Notre-Dame des Anges dit de Bellefont, à Rouen, par Antoine
Gaulde, vicaire général, au sujet de Léonor de Bellefont, ancienne religieuse de la Sainte-Trinité de Caen, âgée
de 45 ans, depuis 29 ans religieuse, fille de Bernardin de Bellefont, gouverneur de Caen et de Valognes, et de
Jeanne Auxépaules, nommée à l’abbaye de Montivilliers.
G. 8885 Bail par Mme Cécile-Geneviève-Emélie de Belsunce de Castel-Moron, abbesse de l’abbaye royale de la
Sainte-Trinité de Caen, de la grosse dime de cette paroisse, 1776.
Série Q
1 QP 75 : Correspondance au sujet des biens et des droits ayant appartenu à diverses communautés religieuses
dont la Sainte-Trinité de Caen (QP 1436).
Archives Départementales du Calvados Série H. Abbayes de femmes dont la Trinité de Caen
83 H : LA TRINITE DE CAEN
Répertoire numérique
GESTION DOMANIALE
83 H 1
Inventaire des titres.
1792
83 H 2
Paroisses de Hénouville, Vernon, Gaillon, Lisieux, Saint Wandrille. – Tous
droits, gestion : bail à vie.
1270
83 H 3
Paroisse de Hénouville – Tous droits, gestion : baux, baux de dîmes, (15681756) ; actes de cautionnement (1496-1598). Titre de propriété (1216).
1216- 1756

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