Family Values

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Family Values
Dans les années 50, on ne pouvait échapper au fait
d'avoir des enfants. Le baby-boom était en route, et, comme
le montrent les photos de Jack De Lorme, la progéniture
était partout. En 1955, sur une population d'environ seize
millions, le Canada comptait plus d'un million et demi de
personnes âgées de 15 à 19 ans. À Calgary, entre 1951 et
1961, le nombre d'enfants de moins de 19 ans passa
d'environ 29 p. cent du total des habitants à près de 39
p. cent. Ajouté à la croissance de Calgary, le seul nombre
de jeunes avait de quoi impressionner. Un enfant des années
50 se rappelle que "ce qui faisait le plus plaisir, c'était de
jouer avec toute une bande de copains. On habitait toujours
dans un quartier où il y avait une ribambelle d'enfants".
L'explosion démographique mit énormément de pression sur
les ressources du système éducatif. Une femme qui grandit à
Calgary se souvient:
"Je me rappelle que, quand je suis arrivée pour la rentrée
scolaire, on était tellement nombreux qu'ils ne savaient
quoi faire. On nous a renvoyés à la maison jusqu'à ce qu'ils
trouvent à embaucher plus de maîtresses et installent
d'autres classes. On est restés chez nous quelques jours,
le temps qu'ils reprennent la situation en main."
Le lancement du premier Spoutnik par l'Union soviétique
rendit encore plus impératif un investissement massif dans
l'éducation, vu qu'en Amérique du Nord, les politiciens
craignaient de se laisser distancer par les communistes dans
les domaines de la science et de l'ingénierie. Non seulement on
construisit plus d'écoles, mais l'enseignement lui-même devint
un emploi mieux rémunéré et plus professionnel. L'expansion
du système éducatif allait constituer l'assise de la prospérité à
venir.
L'Albertan présentait nombre de photos d'enfants prises à
diverses occasions. Certaines étaient simplement d'ordre
sentimental - surtout à Noël ou à Pâques, quand De
Lorme réalisait des portraits pour faire vendre le journal.
D'autres étaient simplement une raison de célébrer toute cette
multitude d'enfants et le plaisir intense de les élever à l'époque.
Quant aux jeunes défavorisés, on ne les oubliait pas. Le nouvel
Hôpital pour enfants était un lieu très prisé où l'on prenait des
photos, tandis que les clubs philanthropiques parrainaient
souvent des visites au zoo ou au cirque pour les résidents des
orphelinats - qui existaient toujours à l'époque. Dans l'ensemble,
on se préoccupait énormément du bien-être des enfants.
© 2004 glenbow
Comme il fallait s'y attendre dans cette ambiance de petite ville qui
régnait à Calgary, les sports destinés aux jeunes recevaient une
bonne dose d'attention dans la presse écrite. Les journaux
couvraient l'athlétisme au niveau de l'école secondaire deuxième
cycle et même premier cycle, et les champions de tournois de
badminton, de volley-ball ou de matches de football étaient sûrs
de voir leur portrait dans la page sportive. Le "sport" qui
représente le mieux les années 50, c'est-à-dire la course de
caisses à savon, était immensément populaire. La course annuelle
dans la rue Victoria sur la colline Cemetary (devenue Macleod Trail)
attirait de nombreux spectateurs, et les garçons s'y prenaient des
semaines à l'avance pour fignoler leurs voitures de course maison.
En général, l'Albertan ne montrait dans ses pages que des
adolescents en train de participer à des activités saines comme le
sport - ce qui peut surprendre étant donné la préoccupation
croissante, voire le débat douloureux concernant les teenagers
dans les années 50. De toutes les photos prises par De Lorme
sur une période de trois ans, seule une traitait d'une polémique
relative aux jeunes, soit le port du blue-jean à l'école. Peut-être
que les modes affolantes des teenagers et le cynisme de La
Fureur de vivre ne touchèrent pas Calgary; peut-être aussi que
les éditeurs du journal croyaient que les articles sur Elvis,
les zazous, les cheveux en pointe sur la nuque et les caresses
illicites encourageraient tout simplement les jeunes à
suivre le mauvais exemple.
© 2004 glenbow

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