l`AFSA, mars 2013
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l`AFSA, mars 2013
Compte-rendu du colloque de l’AFSA (Association Francophone des Soigneurs Animaliers) 26 au 29 mars 2013, parc du CERZA Par l’équipe d’AVA L'Association Francophone des Soigneurs Animaliers a été créée dans le but de faire évoluer les méthodes de soins et de manipulations des animaux sauvages en captivité. Cette association est un lien entre professionnels travaillant dans les domaines de l'entraînement, des présentations au public, de la recherche, des soins, de la conservation et de l'éducation. http://www.afsanimalier.org/ Le colloque annuel s’est tenu est parc du CERZA, en mars dernier. Trois jours de conférences auxquelles intervenaient des soigneurs, éthologues, vétérinaires ou encore des directeurs de parc. Nous vous résumons quelques unes des conférences qui nous ont particulièrement intéressées. Gestion des cervidés à la Réserve de la Haute-Touche Dr Katia Ortiz, vétérinaire et Patrick Roux, éthologue et gestionnaire de collection à la Réserve de la Haute-Touche (Indre). La reproduction assistée chez les cervidés : La réserve de la Haute-Touche est le seul établissement zoologique de France doté d’un laboratoire de recherche. Elle participe à différents plans de reproduction d’espèce en voie d’extinction. Les cervidés ont une limite de reproduction et de descendance et ont souvent un petit par an et par femelle. Les biotechnologies permettent de dépasser ces limites, d’amplifier le nombre d’individu rare et facilite les programmes de conservation en captivité afin de renforcer la population du milieu sauvage. La famille des cervidés compte 40 espèces dont un tiers sont en voie d’extinction. La Réserve de la Haute-Touche accueille une quinzaine d’espèces. Afin de préserver ces espèces, ils ont mis en place une technique de fécondation in vitro. En période de rut, les mâles sont anesthésiés afin de récolter leurs spermatozoïdes. Les femelles sont capturées à l’aide d’un filet ou rabattues dans des couloirs de contentions. Elles sont ensuite endormies, entravées et entubées pour collecter des ovocytes par endoscopie. Les gamètes se rencontrent et fusionnent in vitro. Des embryons vont commencer à se développer jusqu’au stade de quatre cellules où ils sont réimplantés sur des mères porteuses d'une autre espèce non menacée (par exemple, une biche élaphe peut donner naissance à un faon de cerf Sika du Japon). Le rôle de la recherche est primordial dans la conservation et la sauvegarde des espèces animales. Les programmes de recherches ont pour but de mieux connaître la faune afin de mieux la protéger. Les cervidés en parc : La Réserve de la Haute-Touche est composée de 26 espèces et sous espèces de cerf, qui nous ont été présentées une par une. Le parc est adhérent à l’EAZA (Association Européenne des Zoos et Aquariums) comme 300 établissements zoologiques européens. Ils doivent répondre à un cahier des charges qui les engage à respecter des modalités de gestion pour les espèces qui leur sont confiés. Des animaux sont régulièrement transférés vers d’autres parcs zoologiques européens à titre gratuit, à des fins de reproduction ou de présentation. La réserve participe également à un ensemble de plans d’élevages internationaux pour d’éventuels programmes de réintroduction. Parmi ces plans d’élevages figurent quelques espèces les plus menacées: - le groupe de cerfs d’Eld: les effectifs sauvages sont pratiquement éteints - le cerf du père David: jamais rencontré en liberté - le daim de Mésopotamie: la plus rare des espèces de cervidés. - les chevaux de Prjevalski, jamais domestiqués. En 1960, il ne restait que 12 individus captifs au monde. Un aménagement spécifique est nécessaire pour recevoir toute ces espèces de cervidés. Certains sont en liberté dans le parc, d’autres sont dans de grand enclos arborés. Tous les parcs sont équipés de râtelier à foin, de mangeoire et de point d’eau. Pour varier leur quotidien, les cerfs reçoivent différents items pour les occuper, les nourrir, les faire se dépenser, se gratter, interagir avec des congénères, etc : - des substrats sont ajoutés sur les arbres pour leur permettre de se gratter et éviter qu’ils n’abiment les arbres, - le feuillage est disposé en hauteur, - des tubes de PVC contenant des granulés permettent d’augmenter la durée de la prise alimentaire, - quand cela est possible ils forment des groupes d’espèces mixtes, etc. La nourriture des cervidés est principalement composée de granulés toute l’année, de foin à volonté l’hiver, de fruit, d’écorce d’arbres, de sels minéraux pendant la période de mue des bois et la gestation des femelles. Affections des animaux de zoos: quand les soigneurs font la différence Florence Ollivet-Courtois est vétérinaire consultante pour plus d'une vingtaine d'institutions zoologiques françaises et étrangères. Elle forme également du personnel (GIGN, gendarmerie, zoos, etc) à la capture d'animaux. Le soigneur animalier en parc zoologique est la première personne à pouvoir surveiller et détecter toute anomalie pathologique sur un animal dont il a la charge. Il se doit alors d'être l'observateur d'une situation et de ne surtout pas en faire d'interprétation. Son travail et de repérer les "faits" anormaux (absence de selles, d'urine, couleur et consistance anormale, absence d’appétit, gonflement, amaigrissement, …) et d'en informer le praticien. Celui-ci pourra ainsi les interpréter et faire ressortir un diagnostic. En effet si un soigneur interprète lui-même ses observations, il peut induire en erreur le praticien lors de son diagnostic. Le soigneur animalier est le référent pour le vétérinaire praticien en ce qui concerne la connaissance des individus qu’il a en charge. Il se doit de connaître leurs habitudes, leur état physique et comportemental « normal ». Il se doit également d’être raisonnable pour eux et de ne pas faire d’anthropomorphisme. Le vétérinaire praticien, quant à lui, va pouvoir exploiter la relation particulière qu’a un soigneur animalier avec les animaux dont il s’occupe quotidiennement. A l’heure où les parcs zoologiques et les soigneurs animaliers tentent de se rapprocher de plus en plus des conditions naturelles de vie dans la prise en charge de la faune sauvage qu’ils hébergent, Florence Ollivet-Courtois exploite au maximum les rapports et relations existantes entre l’humain et l’animal sauvage. Cela pour une prise en charge optimale des cas cliniques qu’elle rencontre. Lors de son intervention, elle a évoqué des exemples de cas cliniques qu’elle a rencontré, où la réactivité et l’expertise des soigneurs-animaliers a été déterminante. Vous pouvez retrouver ses anecdotes dans son livre «Un éléphant dans ma salle d’attente, aventure d’une vétérinaire » aux éditions Belin. Gestion d’un programme d’élevage EEP, ESB, ISB : Frédéric Houssaye, responsable conservation au parc du CERZA, coordinateur européen pour les hyènes rayées (ESB), assistant coordinateur européen pour les panthères du Sri Lanka et coordinateur international pour les panthères du Sri Lanka. Une des missions des parcs zoologiques est la participation à la conservation des espèces menacées. Les zoos présentent à leur public des espèces emblématiques de divers milieux et ils peuvent être impliqués dans des programmes de reproduction d’espèces menacées. Ces programmes sont gérés par l’EAZA en Europe (Association européenne des zoos et des aquariums) qui a pour objectif de promouvoir la coopération entre les parcs. - le studbook européen (ESB) contient toutes les informations relatives à toutes les espèces menacées présentes en parc zoologique (naissances, décès, transferts d’un parc, etc). Chaque studbook est spécifique à une espèce et est géré par un seul coordinateur. Il collecte et analyse les données relatives à la population captive et donne des recommandations pour la reproduction et le transfert des animaux aux zoos européens. Le but étant d’avoir suivi sérieux du pedigree de chaque individu et de maintenir la population en bonne santé sur le long terme. Si la population captive doit être suivie de manière plus rigoureuse ou que l’espèce présente un statut plus menacé, le coordinateur peut demander à ce qu’elle soit gérée comme un programme EEP. - EEP (Programme européen pour les espèces en danger), est aussi géré par un coordinateur pour chaque espèce. Le but est de favoriser l’élevage de la population captive, de surveiller son état sur le long terme et donner des conseils aux parcs présentant l’espèce. Pour cela, le coordinateur gère un registre contenant toutes les informations de chaque individu. Il réalise des analyses génétiques et démographiques en planifiant la gestion future de l’espèce. Un des objectifs est de maintenir une diversité génétique importante : plus de 90% sur 100 ans, en favorisant le brassage génétique afin d’éviter la consanguinité et les problèmes qui s’ensuivent. Pour une bonne gestion de la reproduction, les parcs zoologiques procèdent à des échanges de leurs animaux. Le but ultime serait de réintroduire des individus dans la nature afin de renforcer les populations sauvages. A l’échelle mondiale, il existe aussi les studbook internationaux, gérés par le WAZA (Association mondiale des zoos et aquariums). Présentation de zoos.pro Docteur Eric Plouzeau, vétérinaire et fondateur de Biozones Consult. Le site www.zoos.pro est une plateforme qui a pour objectif la valorisation des parcs zoologiques et la gestion d’une billetterie. De plus, un espace communautaire est dédié aux professionnels travaillant en parc zoologique. Venant d’être lancé, ce site est en cours d’élaboration et de nombreuses fiches commencent à voir le jour. - Les parcs zoologiques ont la possibilité de créer leur espace pour communiquer les dernières informations sur leur parc, informer le grand public des derniers évènements et mieux se faire connaitre. - Une rubrique dédiée à leurs espèces sauvages, comprendra près de 2000 fiches et seront rédigées par les professionnels de parcs inscrits sur le site (« ZoOS Community® ») - Les fournisseurs auront leur espace pour afficher leur catalogue. - Les visiteurs pourront avoir une page personnelle pour commenter leurs visites de zoos, leurs souvenirs et échanger leurs impressions. Pour cela, ils doivent avoir acheté leur billet en ligne. - Les professionnels de parcs auront leur page personnelle pour partager leur passion et leurs connaissances du milieu zoologique et zootechnique, échanger leurs expériences et compétences professionnelles, des photos et des vidéos, etc. Comment travailler avec une otarie agressive ? Virginie Roy, entraineur-soigneur à Nausicaä. Les soigneurs et les vétérinaires de Nausicaä ont mis en place une prise en charge de "Training médical" (entrainement médical) pour pouvoir soigner Algon, une otarie agressive, d'une cataracte des deux yeux. L'équipe a mis en place un dispositif sécurisé pour faire les soins: à l'aide d'une plaque de plexiglas trouée, Algon a appris de manière volontaire et à l’aide d’un renforcement positif à placer sa tête sous cette plaque. Ce qui permettait avec facilité de lui appliquer des gouttes dans les yeux. Pour faciliter le travail et le bien être d'Algon, l'équipe de soigneurs et de vétérinaires a pensé à l'opérer et à lui poser un implant sous la paupière pour remplacer les gouttes; cette technique n'a pas fonctionné et les soigneurs ont dû reprendre l'application des gouttes quotidienne. Algon ayant eu de nombreux problèmes de santé (cataracte, abcès dentaire …), il a fallu envisager une grosse intervention chirurgicale. Pour cela, il a été placé dans une cage de contention, de manière volontaire, à l’aide de la méthode positive du médical training et avec l'aide des soigneurs. Cette cage est composée de tuyaux de pompier avec de la mousse pour les barreaux et d'un fond métallique. Malheureusement lors de la fermeture de celle-ci, Algon s'est débattu et s'est fracturé la mâchoire. Le personnel pense qu'il y avait trop de monde présent que Algon ne connaissait pas, ainsi que des personnes non qualifiées sur l'utilisation de cette cage… Ce qui explique l'état de stress de l'animal et le mauvais déroulement de la contention. Algon a tout de même été anesthésié et opéré et tout c'est bien passé. Suite à cette opération Algon a garder une cécité visuelle, il a donc fallu que les soigneurs s'adaptent et qu’ils créent pour cela, un nouveau moyen de travail : target (cible) et cible sonore en l’entrainement à cette technique. Aujourd'hui Algon reste un animal avec qui les soigneurs doivent prendre des précautions et rester vigilant sur son niveau de bien être mais c'est une otarie qui travaille volontairement. Nourrissage sur carcasses Dr François-Pierre Huyghe, vétérinaire et directeur zoologique au CERZA. En parc zoologique, il est fréquent de nourrir certains animaux avec de gros morceaux de viande plus ou moins débités voire avec la proie entière. Ce mode d'alimentation est choisi pour des carnivores sociaux tels que les canidés, les félidés, les oiseaux et les poissons. Cette technique est discutée pour des questions d'ordre pratique, sanitaire, réglementaire et éthique. Les deux directives européennes de 2009 et 2011 autorisent cette méthode avec différentes catégories de sous produits animaux. Au niveau sanitaire, les carcasses viennent généralement d'abattoirs ou d'élevages. Elles se donnent après décongélation. Elles peuvent aussi être issues d’auto-approvisionnement. Dans ce cas, les proies seront obligatoirement inspectées par un vétérinaire afin de détecter toutes traces de plaies, d'abcès ou de lésions évocatrices de maladie. Si elles ne sont pas distribuées directement, elles devront être évidées. L'intérêt de nourrir un groupe avec des carcasses est d’observer des comportements naturels et voir apparaître l'expression de leur hiérarchie (s'il y en a une). Cela peut également aider à l'introduction de nouveaux individus ou à la formation d'un nouveau groupe. De plus cette méthode permet une réelle diversification alimentaire grâce aux poils, os, plumes, abats, viscères... ce qui est bien pour une bonne santé bucco-dentaire entre autre. Le nourrissage sur carcasse a aussi une réelle valeur pédagogique car elle illustre le rôle des carnivores sociaux et peut être expliqué aux visiteurs. La question éthique se pose surtout quant au choix de la proie (domestique, sauvage, espèce en surnombre, mâle en surplus, vieillissement...). Ce type de nourrissage est un outil d'aménagement alimentaire. La notion d'"autoconsomation" est de plus en plus émergente. Communication entre professionnels et scientifiques: exemple du refuge AVA Maud Lefevre, responsable soigneurs, et Brunilde Ract-Madoux éthologue, au refuge AVA. Situé en Haute-Normandie, le refuge AVA (Aide aux Vieux Animaux) est une structure accueillant près de 500 animaux: une soixantaine de daims, plusieurs dizaines de lapins, un peu plus de 50 équidés, une dizaine de bovins, plusieurs milliers de pigeons vivant en liberté, ainsi que 120 chats et 150 chiens. Le refuge a été fondé il y a une vingtaine d’années par Maxime et Jenny Légier. L’association AVA a, quant à elle, été créé en 2003 par le Dr Thierry Bedossa et 4 de ses collaborateurs lorsque ces derniers se sont vu confier la gestion du refuge. La mission d’AVA est de fournir une alternative à l’euthanasie pour les animaux vieillissant présentant des modifications physiologiques et comportementales. Mais également pour les animaux présentant des comportements gênants, qui sont souvent des signes de mal être lorsqu’ils sont hébergés dans un environnement ne répondant pas à leurs besoins. Afin de prendre en charge tous ces animaux, différentes équipes avec des compétences diverses travaillent en collaboration pour veiller à leur santé et à leur bien être. Une équipe de vétérinaires, supervisée par le Dr Bedossa, comprend une dizaine d’autres vétérinaires. Il dirige chaque jour en collaboration, avec l’équipe de soigneurs, la prise en charge des soins et le suivi sanitaire des populations. Grâce à un système de « télémédecine », l’équipe vétérinaire est informée en direct de l’évolution de l’état de santé des animaux, par mails (photos et vidéos) et téléphone. Ils effectuent également chaque semaine une visite sanitaire, qui consiste en un contrôle du bien-être physique et comportemental de chaque individu, mais aussi de l’ensemble de la population. Sur le site, une équipe de supervision est présente en permanence. Kosma Brijattof est le manager général. Fanette Barraya et Maud Lefevre sont responsables du refuge et de la gestion des soigneurs. L’équipe de soigneurs est composée de 11 personnes (ASV et soigneurs animaliers), qui pour la plupart sont titulaires du CETAC. La prise en charge comportementale des chiens est effectuée par nos éducateurs canins. Ils s’occupent chaque jour de l’éducation et la rééducation de nos chiens en utilisant exclusivement les méthodes dites amicales et positives. Enfin l’équipe recherche, Séverine Belkhir, Brunilde Ract Madoux et Anaïs Racca travaillent sur plusieurs thématiques de recherche et collaborent avec des professeurs et chercheurs de plusieurs universités. Elles accueillent chaque année des stagiaires de Master 1. Les chiens sont hébergés dans des enclos extérieurs d’une superficie allant de 100m² à 1500m². Chaque parc contient suffisamment de lieux de couchage, comme des niches, des chalets ou des bâtiments. Ainsi que des abris à ombre, des points d’eau et différents objets à mâchonner. Les chiens sont hébergés pour la plupart en groupe ou en dyade, le plus grand groupe étant constitué de 17 chiens. Mais certains, présentant des comportements agressifs envers leurs congénères ou envers l’humain sont hébergés seuls. Enfin, nous disposons d’un parc de détente qui comporte un parcours d’agility, nous permettant de fournir au chien de la dépense physique et des contacts privilégiés avec l’humain au calme. Il nous permet aussi de présenter les chiens avant de les regrouper dans un même parc. Nous accueillons environ 120 chats répartis dans 3 enclos de plus de 2000 m², agrémentés de végétation. Des niches et sites de nourrissage sont largement répartis dans l’enclos ainsi qu’un grand chalet avec plein de couchages et chauffé l’hiver. La vie en collectivité n’est pas forcément facile pour le chat qui est une espèce solitaire. Mais la taille des enclos leur permet de se regrouper ou de s’espacer selon leur tolérance avec leurs congénères. Un enclos « infirmerie » accueille les chats malades occasionnels ou chroniques à qui nous prodiguons les soins nécessaires. Le tour complet des enclos est réalisé tous les jours pour un suivi quotidien de tous les chats. Chaque journée commence et fini par une réunion, puis les soigneurs partent sur les différents pôles pour le nourrissage, l'entretien des parcs, le nettoyage, la distribution des traitements, la vérification des stocks de nourriture et la surveillance de l’ensemble des populations. Les après-midi sont consacrés aux sorties, aux regroupements, au travail d’éducation, à l’installation d’aménagements et aux soins qui nécessitent plus de temps pour tous les animaux. Nous établissons également une liste de recommandations et de surveillance pour le lendemain, ainsi qu'un compte rendu quotidien envoyé par mail à toutes les équipes. Nous essayons de diffuser au maximum notre travail via notre site internet et facebook. Nous communiquons les actualités mensuelles du refuge, les comptes-rendus sur les regroupements de chiens et le suivi comportemental, ainsi que des articles présentant le travail effectué au refuge. Notre équipe de scientifiques rédige des articles vulgarisés pour le magazine Trente millions d’amis. Nous participons aussi à la rédaction de revues scientifiques en éthologie sur des thèmes variés, destinées aux professionnels du monde canin, mis en ligne sur les sites de l’AVA et de la SFC. Depuis 2007 plusieurs études en éthologie fondamentale et appliquée sont menées à AVA. Les principales thématiques sont l’organisation sociale et spatiale (ex : formation de groupe et coopération chez le chien domestique), la cognition sociale (ex : le comportement du chien face au miroir), la communication inter et intraspécifique ou encore l’aménagement de l’environnement. Mais même avec toutes les études en éthologie possibles, si les soigneurs qui prennent en charge au quotidien les animaux, ne sont pas formés à la détection des signes de mal être, à leur objectivation et aux aménagements de l’environnement, cela ne marche pas de manière optimale. C’est pourquoi nos différentes équipes échanges au quotidien et des présentations scientifiques (revues bibliographiques) ont été mises en place. Les soigneurs savent qu’ils peuvent solliciter les éthologues et les éthologues alertent les soigneurs sur ce qu’ils voient. Il existe peu de connaissances scientifiques sur le chat vivant en collectivité et en captivité. Mais nous savons que le chat domestique est une espèce solitaire et non territoriale. Les études sur les chats libres ou les chats sauvages montrent que les regroupements seraient ressources-dépendants et que la tolérance entre les individus augmente en fonction de l’abondance et de la large répartition de ces ressources. La vie en collectivité est possible selon certains critères : un aménagement de l’environnement avec de l’espace, de nombreux lieux de repos et sites de nourriture, et donner la possibilité aux chats de se tenir à distance de leurs congénères. Par nos études, nous essayons de mieux comprendre le comportement du chat en collectivité et le mode de vie captif pour aménager au mieux nos enclos. Et nous pourrons donner des recommandations aux refuges SPA qui n’ont pas la possibilité de faire des études scientifiques. Ci-dessous quelques exemples de prise en charge impliquant notre approche pluridisciplinaire : 1/ Une vétérinaire a réalisé sa thèse sur la répartition spatiale d’une population de chats captifs. Elle a montré que les chats avaient tendance à se disperser dans l’enclos en été et à se regrouper autour et dans le chalet principal chauffé, en hiver. A l’issue de l’étude, de nombreuses niches et lieux de nourrissage ont été ajoutés et répartis dans l’enclos. Les observations de terrain l’année suivante ont montré que le nombre d’affections respiratoires des chats avait diminué (diminution du stress, système immunitaire plus résistant). 2/ Une seconde étude tout juste terminée par Brunilde RM, confirme que les chats utilisent toutes les niches et tous les lieux de nourrissage de l’enclos. Ils utilisent bien les litières extérieures, mises en place pour réduire le nombre de déjections près des chalets. Les chats ont tendance à se répartir dans le temps et dans l’espace, leurs comportements varient en fonction des saisons et ils exploitent la surface totale de l’enclos. Cela nous montre que l’enclos est bien aménagé puisque tout est utilisé et qu’il n’y a pas ou peu de compétition pour les ressources entre les chats. Les soigneurs adaptent le mode de nourrissage, les soins et l’entretien en fonction des saisons. (ex : en hiver, jusqu’à 25 chats peuvent se regrouper dans le chalet chauffé. Avec cette densité élevée de chats, les soigneurs doivent donc adapter la gestion de la nourriture et l’entretien). 3/ Une autre étude a permis de mettre en évidence qu’il y avait une organisation spatiale des comportements dans un enclos hébergeant une dizaine de chiens. Une zone qui ne comportait pas d’abris était préférentiellement utilisée pour le repos. A l’issue de cette étude, les soigneurs ont ajouté des niches dans cette partie de l’enclos qui ont très vite été utilisées par les chiens. 4/ Nous avons également testé l’utilisation d’une balle distributrice de nourriture par les chiens hébergés seuls. Pour certains, il s’agit d’un réel enrichissement, pour d’autres d’un stimulus aversif, d’où l’importance d’effectuer des observations comportementales. Nous avons émis des recommandations et des conseils quant aux distributions de cette balle. Aujourd’hui les soigneurs les distribuent régulièrement et savent apprécier si elles constituent un enrichissement ou non. Récemment un programme Kibble Nibble a été mis en place par Laura, notre éducateur canin. Elle a longuement discuté avec les éthologues sur les résultats de l’étude scientifique pour pouvoir ajuster ses recommandations. L’intérêt des observations faites précédemment a permis de déceler différents profils comportementaux des chiens. Certains réagissent très positivement, d’autres nettement moins. Ils peuvent avoir des réactions de peur, de frustration (ex : Conan qui se léchait les pattes de manière compulsive), etc. Ce genre de comportements peuvent passer inaperçus si nous ne prenons pas suffisamment le temps d’observer le chien et sont néfastes à l’animal. Les soigneurs distribuent les kibble l’après midi, passent un peu de temps avec le chien et reviennent observer en fin de journée si le chien interagit bien avec la kibble. La plupart de nos chiens sont des chiens de compagnie, les interactions et les contacts réguliers et positifs avec l’humain constituent un des meilleurs aménagements possibles. Il en est de même pour la dépense mentale (ex : résoudre un problème) et physique (ex : promenade). Mais répondre aux besoins de nos chiens dangereux est parfois plus compliqué. En effet, les contacts et la dépense physique sont très difficiles, voire impossible pour certains qui présentent de grands risques d’agression et pour qui l'humain est un stimulus aversif. Il nous faut donc trouver un juste milieu entre les besoins du chien et notre sécurité. Nous mettons donc en place des exercices de « shapping » au grillage. Cette technique implique l’utilisation du clicker. Par exemple, en récompensant des comportements locomoteurs simples, nous amenons le chien à produire un comportement plus complexe. Cette technique induit donc une dépense mentale et est accompagnée d’interactions positives, puisque les comportements sont spontanés et aucune contrainte n’est utilisée. Nous utilisons aussi le medical training dont l’objectif est de pouvoir faire les soins en toute sécurité et par la même occasion de modifier la valence de l’humain pour ces chiens. Nous présentons les chiens avant de les grouper en parc. Educateurs canins, soigneurs et éthologues sont présents lors de ces rencontres qui se font en longes ou en libres selon les chiens. La constitution des groupes se fait en fonction de la tolérance d’un individu à ses congénères, de ses capacités de communication et d’ajustement, de son tempérament et de son histoire de vie en prenant en compte la taille, le poids et la puissance des chiens. Nous laissons les chiens interagir librement sans intervenir sauf en cas de dangerosité extrême. Ce qui veut donc dire que nous les laissons parfois entrer en conflit, car cela nous permet de connaître les contextes pouvant le générer et aussi les capacités d’ajustement et de communication des chiens. Lorsque les groupements sont effectués, nous donnons des recommandations aux soigneurs pour la gestion du nourrissage et des périodes d’excitation. Les comportements agressifs et affiliatifs nous sont rapportés, ainsi que leur contexte d’apparition. Pour les chats, une prise en charge particulière des nouveaux arrivants est mise en place. Leur santé et état général sont bien surveillés. Nous vérifions leur bonne adaptation dans cet environnement tout nouveau pour eux. Si ça n’est pas le cas, nous essayons de les placer en famille d’accueil rapidement ou de les faire adopter. Pour certains, ce nouvel environnement est bénéfique, par exemple, des comportements jugés gênants par les propriétaires (agressivité, malpropreté) à la maison disparaissent lorsque le chat peut mieux exprimer son répertoire comportemental (comportements naturels) dans un environnement qui parait mieux lui convenir. Pour tous nos animaux, nous demandons à ce que chaque changement de comportement nous soit signalé, car ils peuvent traduire d’un problème de santé ou de mal être. En conclusion, notre équipe possède des compétences variées que nous mettons tous en commun pour la gestion de notre population canine/féline. Pour que l’éthologue puisse fournir des conseils et des recommandations adaptés, il lui faut avant tout comprendre le fonctionnement de la structure et les difficultés du terrain. Les soigneurs ont quant à eux besoin d’être le plus objectif possible dans leur prise en charge et dans la détection des modifications comportementales. Présentation de Kalaweit Chanee, fondateur de Kalaweit. Aurélien Brulé, dit « Chanee », a toujours été un grand passionné de primates. Il passe 5 ans de sa jeunesse à observer, le mercredi après-midi, les gibbons à mains blanches d'un parc zoologique. A 16 ans, il publie un livre sur cette espèce afin d'aider à améliorer les conditions de vie des gibbons en captivité. Grâce à cet ouvrage il est repéré par Muriel Robin qui l'aide à faire un premier séjour en Thaïlande à ses 18 ans. Le confortant dans son objectif de venir en aide aux gibbons, il crée l'association "Kalaweit" qui signifie « gibbon » en indonésien. En 1999, il signe un protocole d'accord avec le gouvernement indonésien incluant : - la réhabilitation des gibbons prisés par les populations et les braconniers comme animaux de compagnie ; l'information ; - la sensibilisation et l'éducation des populations locales ; - la protection des forêts sur l'île Bornéo. Depuis, Kalaweit ne cesse de s'agrandir et d'accueillir de nouveaux individus (singes, félins, reptiles...). Chanee continue de lutter tous les jours pour la sauvegarde du milieu naturel contre les grandes multinationales, le gouvernement, les braconniers, les mentalités... Aujourd'hui Kalaweit, c'est plus de 280 gibbons, 32000 hectares de forêts protégées, 48 employés locaux, une radio "Kalaweit FM" à Bornéo et 1 coordinatrice en France. Mais encore beaucoup de travail reste à faire pour atteindre leur objectif. Malgré la notoriété acquise depuis des années, Chanee reste quelqu’un de très simple et de très accessible. L’entendre parler et le rencontrer ne laisse pas indifférent…