LA DANSE «KANG» CHEZ LES BAPA DE L`OUEST

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LA DANSE «KANG» CHEZ LES BAPA DE L`OUEST
LA DANSE «KANG» CHEZ LES BAPA DE L’OUEST-CAMEROUN
0. INTRODUCTION
Dans presque tous les villages de l’ouest-Cameroun, il existe une danse initiatique
citoyenne de premier plan.Citons entre autre la «KANG» chez les Bapa et le «NYANNYAN» chez les Bafoussam. C’est une danse et un rite réservé exclusivement aux garçons, aux
hommes. Chez les Bapa, avec la danse «KANG», les filles, les femmes peuvent danser Pendant
le rituel comme pendant la danse, le peuple vit un moment très important de son histoire autant
que les chrétiens le vivent lors du Baptême dans l’Eglise. Nous souhaitons ici vous offrir quelques
informations relatives au «KANG».
I.DEFINITION
«KANG» signifie littéralement la magie. Les pratiques ou les phénomènes extraordinaires ou
incompréhensibles au commun du mortel. C’est un héritage surnaturel et initiatique.Un héritage
qui s’hérite et se transmet.
Dans notre cadre le «KANG» est à la fois un rite et une danse ; il fait du garçon, un véritable
citoyen Bapa. Tant que tu n'es pas encore initié au «KANG», ton identité comme Bapa est
encore partielle; il faut d'abord t'initier au «KANG», pour être donc pleinement Bapa. D'ailleurs
quand un garçon Bapa est malade au point qu'on t’emmène à Bapa pour les soins traditionnels,
la première question du kemsi (guérisseur) est la suivante:est-ce qu'il a été déjà initié
au «KANG»?
Comment et en quoi le «KANG»? Est-il un rite ?
II. LE RITE INITIATIQUE AU «KANG».
Initier chez les Bapa de l’Ouest-Cameroun se dit «TCHOP» ;ainsi initier au «KANG» Se dit en
Bapa «TCHOP KANG».
Dans la préparation, on doit prévoir :
Quelques grands mets de notre tradition et de notre culture Bapa, entre autre : le taro,le
couscous maïs, le haricot, le koki ou kekye ; le met de pistache etc.
Quelques insectes : les criquets, etc.
Quelques animaux aquatiques : mèléléchè(animal qui rend l’eau du marigot propre)
Quelques boissons : le vent blanc etc.
Le «Tchop» : une calebasse contenant une puissante potion à la fois naturelle, surnaturelle
et magique.
LE RITE PROPREMENT DIT :
Il est effectué par des personnes idoines de notre société traditionnelle, des hommes
intègres, sages et modèles:
Chaque candidat se déshabille et reste en slip ;
On lui attache une feuille bananier sur la tête ;
Il vient s’asseoir devant l’initiateur sur un crâne de gorille ;
1- «L’initiateur rejette quelques petits crachats sur chaque petits aliments si haut cités et
en donne au candidat qui croque en petite quantité le rejette à sa gauche et à sa droite
puis en croque enfin et mange.».
2- «L’initiateur prend le liquide du tchop dans sa bouche et souffle à la fois sur le visage
du candidat, sur sa poitrine et dans son dos».
3- «L’initiateur prend chaque aliment ci-haut cités et le frotte sur tous les points
stratégiques du corps du candidat : le front, le nombril, les plantes du pieds, la colonne
vertébrale, les épaules les poignets etc. »
4- «L’initiateur te fait asseoir et lever pendant 09 fois sur le crâne de gorille»
5- «L’initiateur te fait danser en jouant lui-même le rythme du kang avec sa bouche».
N.B :il y a encore bien des choses non mentionnées ici au sujet du rite (à suivre)
III. LES INTERDITS DU «KANG».
QUELQUES CONDITIONS POUR LA PLEINE RÉUSSITE DU RITE
1- Tous les aliments préparatoires au rite dorment au marigot ;
2- Le candidat ne doit pas manger avant le rite ou mieux le matin ;
3- Le candidat ne doit pas se laver le jour du rite ;
4- Le candidat ne doit pas dormir avec une femme le jour du rite.
IV. LA MALADIE HWÏE DU «KANG».
Le«HWÏE» est une maladie qui n’atteint que les garçons Bapanais qui ne ce sont pas encore
initiés au rite du «KANG», s'il reste au milieu d'autres garçons Bapa déjà initiés.
Le«HWÏE» est comparable ou semblable kwashiorkor. Parfois le malade a très froid et tremble,
sanglote. La solution est d’aller immédiatement se faire initier. En quoi le«KANG»est-il est une
danse ?
V.LA DANSE DU «KANG»
Le«KANG» se danse torse nu, avec une tenue traditionnelle (mvè dop) ou le pagne attaché aux
reins du danseur ; on se marque le visage et le corps du «mbeum» ce que les femmes appellent
communément le «kalaba». On tient deux bâtons en mains ou une corne d’animaux présentant
deux branches.
Le rythme de la danse est le suivant : on avance le pied droit quand le pied gauche est en
arrière en faisant deux à trois grands pas; puis on retarde un tout petit peu le pied gauche, puis
on recommence. Après on tourne en demi rond sur soi-même ; ensuite on pose les on pose les
deux bouts des bâtons ou des cornes par terre en secouant les fesses en arrières. De
suite,rapidement on avance à grand pas balançant les deux bras avec les deux bâtons comme
un nageur et le cycle recommence. Le sommet c’est quand on se secoue en même temps ses
épaules et sa poitrine en avançant à petit pas. On danse en zigzag,mieux en dents de scie et non
en ligne droite sous l’acclamation des populations. Etc.
Juste quelques minutes avant l’entrée en procession de la danse du «KANG» il y a ce qu’on
appelle «TCHA’A KANG». C’est les préliminaires, un groupe d’adultes viennent sur la scène, le
podium (Ya’a –KANG) donner un avant-goût de la danse sous l’acclamation des populations.
Dès lors suit l’effectivité de la danse.
VI. LES PERES DE LA DANSE «NYE» A BAPA.
LE«NYE» est une danse de notabilité mieux de noblesse à Bapa. Bapa compte 06quartiers et
dans chaque quartier il y a un grand notable qui est responsable du c’est-à-dire qui est
dépositaire de la danse du «KANG» par sa Majesté le chef Supérieur Bapa.
Le chef lui-même a un siège du «NYE» appelé FE» ;
A DENPA c’est le «NYE-MEKEM WA’ANYE» ;
A LOUG c’est le MEKEM SEBOUDJEUG»
A DJEUWANG c’est le «NYE- MEKEM TAFE» ;
A TOP c’est le «NYE-MEKEM SA’ADEUG»
A DJEUKOUO c’est le «NYE-MEKEM DZESOU» (A vérifier)
A LA’AGOU c’est le «NYE-MEKEM TAWAGANG» (A vérifier)
VII. LE «KOUOBA’A» : UNE DANSE PRELIMINAIRE AU «KANG».
De prime à bord, la danse et le rite du «KANG» pose suscite la question du genre. Rapidement
les filles, les femmes peuvent y voir une injustice. En effet, pourquoi un rite uniquement pour les
garçons, les hommes ? Où sont donc la danse et le rite pour les filles, les femmes ?
Le «KOUOBA’A» est une tentative de réponse. En effet, avant de danser le «KANG», il y a une
entrée en matière, durant environ une à deux heurs de temps : c’est Le«KOUOBA’A». C’est ici
que les femmes font la véritable démonstration et l’étage de leur charme et de leur beauté dans
la rythmique, la gestuelle. C’est un moment qui se prépare minutieusement, les filles, les femmes
se préparent tant en coiffure, en habillement, en chaussure, en parfum. Parfois c’est même des
séances de séduction. Dès lors chacune étale ses talents de danseuses exceptionnelles sous le
regard et les applaudissements des garçons, des hommes. Pendant cette danse à la chefferie,
certains hommes dignes sont attrapés par le danseur de NYE bien masqué pour entrer dans le
camp du "NYE" construit en contrevent et où se joue à la fois le "NYE", le "KOUOBA’A" et le
"KANG". C’est ainsi que le "NYE –FE" s’agrandit.
VIII. LE «NYE» : UNE DANSE QUI REGROUPE LE «KANG» ET LE «KOUOBA’A»
LE«NYE» est avant tout un pouvoir que sa Majesté le Chef Supérieur Bapa confie à un grand
notable du Village. En général c’est des notables appelés «MEKEM» repartis dans les 06
quartiers Bapa. C’est un pouvoir de persuasion pour contrôler les populations. Pour éviter le mal,
pour neutraliser les aventuriers de la sorcellerie, du vampirisme etc. LE«MEKEM» dès lors
sélectionne des personnes idoines de son quartier autour de lui pour fonder ou organiser
son«NYE». Ils construisent à l’entrée de sa concession un enclos sous l’arbre pour abriter le
clan du «NYE». Il construit également un grand podium pour la danse. A chaque saison ou
année du LE«MEKEM» doit regrouper son équipe, les nourrir et procéder l’ouverture de la
danse. Le «NYE» regroupe à la fois LE «KANG» ET LE«KOUOBA’A».
IX. LE DEVOIR DES BAPANAIS ET BAPANAISES VIS-A-VIS DU
Chaque parent Bapa a ce devoir en conscience de faire initier tous ses enfants garçons
au«KANG», dès l'âge de 05 ans. A chaque période ou année de «KANG», tous les enfants non
initiés doivent se retrouver au village pour se faire initier. Les grands parents responsables
prennent toujours la peine d’interpeller leur progéniture de la ville de retourner au village Bapa
pendant l’année du «KANG» afin les petits fils soient initiés. Nous les jeunes, nous devons le
rappeler à nos parents de nous faire initier. Nous devons avoir l’amour de notre village. Faire
deux ans sans aller à Bapa dans mon village natal est comme un manque de ressourcement. Au
moins une fois par an, pendant les grandes vacances, le jeune de se rendre à Bapa.
X. DEUX ANNEES CHEZ LES BAPA DE L’OUEST-CAMEROUN
On distingue 02 années : l’année du ñkañ qui est celle de la réserve verbale, d’interdiction de
commérages inutiles, de chantages de tous ordres. C’est l’année de l’observation et de la
méditation personnelle sur la marche des choses dans le village ; c’est le temps du recul, de la
prise de distance par rapport aux évènements de la société afin de mieux le juger.
Nous dirions volontiers que c’est la période de l’épokalisation du jugement, de sa
suspension. Ne danse le ñkañ que des initiés ; revêtus d’uniformes traditionnels, ces danseurs
sollicitent une année d’abondance et de fécondité pour les femmes comme pour la terre.
Alors le ñgùŋ ñkañ c’est l’année sacrée pour le jugement, c’est l’année du journal parlé.
L’autre année c’est le ñgùŋ njá'an ;
Le nja'an c’est une danse du journal satirique, une danse enchantant, en insultant les gens.
Le ñgùŋ nja'an n’est pas l’année du verbiage ou de la verbomanie,mais celle de la mise à jour,
du dévoilement des réflexions sur les hommes politiques et sur les affaires du pays.
0. CONCLUSION
Le «KANG» est à la fois un rite et une danse mystique mais citoyenne qui confirme la véritable
identité du fils Bapa. La fille Bapa autour du «KANG» danse le«KOUOBA’A». A
Bafoussam, le «NYAN-NYAN»se danse parfois torse nu jusqu’au slip, ils se mettent à la fois le
kalaba,du charbon, de la boue etc. Nous avons énoncé seulement les grands axes, la recherche
est à poursuivre. Certaines informations à compléter et peut à rectifier. C’est à vous et pour vous
les jeunes, que nous avons fais ce petit travail de recherche. A vous les jeunes, à vous l’avenir
de Bapa.
PAR JOSEPH TEFANG, L’ANIMATEUR