Pierrefonds folie imp”riale

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Pierrefonds folie imp”riale
LES CHÂTEAUX
Viollet le Duc
(Paris 1814 - Lausanne 1879)
Eugène Viollet le Duc était
architecte et théoricien français, il est choisi à l’âge de
vingt-six ans par la Commission des Monuments historiques, proposé par Prospère
Mérimée, pour diriger la restauration de la Madeleine, à
Vezelay (1840-1861).
Jusqu’à sa mort, on lui confiera de nombreux chantiers
dans toute la France. Dans notre région, il aura en
charge le château de Coucy (1856-1864) et celui de
Pierrefonds (à partir de 1858). Ailleurs, il restaurera les
remparts d’Avignon, les fortifications de Carcassonne,
entre de nombreux autres chantiers.
- 1842, il remporte avec Lassus le concours ouvert pour
la restauration de Notre-Dame de Paris et, dès 1845, ils
entreprennent les travaux que Viollet le Duc terminera
seul, Lassus étant mort.
En 1849, il est architecte diocésain pour les cathédrales
de Reims et d’Amiens.
- 1853, il devient inspecteur général des édifices diocésains.
- 1860, il fait partie de la Commission des Monuments
historiques où il exerçait, avec Emile Bœswiliwald, les
fonctions d’inspecteur général.
Lorsqu’il meurt en 1879, il a encore à sa charge d’archi-
Des Carolingiens
à la Folie Impériale…
…Le château
de Pierrefonds
En lisière de la forêt de Compiègne, contre laquelle il
s’appuie au nord-ouest et dominé au sud par un
plateau, Pierrefonds est un village hors du commun,
que l’on pourrait qualifier d’hors du temps. Pourquoi ?
Parce qu’un château le surplombe et pas n’importe
quel château. Une horreur pour certains, un joyau pour
d’autres, une fantaisie ou une forteresse aujourd’hui
sans aucune qualité militaire, il n’en reste pas moins
un témoignage historique important et une des plus
belles pièces du patrimoine de notre région. Certains
l’appellent le château de la Belle au Bois Dormant,
mais la dernière personnalité importante à y avoir élu
domicile fut Napoléon III.
tecte le château de Pierrefonds, Saint-Denis, des
monuments de Toulouse, l’église d’Eu, etc.
difié vers 1400 à l’instigation du
duc Louis d’Orléans qui est aussi
à l’origine, dans le département
de l’Aisne, du château inachevé de
La Ferté-Milon, le château de Pierrefonds est une résidence luxueuse et une
place forte redoutable située sur un éperon rocheux comme un belvédère d’observation privilégié. Auparavant, il y
aurait eu au moins deux châteaux primitifs dont peut-être un vicus romain à la
place duquel fut construite une résidence
des rois carolingiens, le palais du
Chêne.
A partir du XIe siècle, les seigneurs de
Pierrefonds portent le nom des Nivelon.
Nivelon 1 er est connu pour avoir possédé, en 1047, d’immenses richesses
et le pouvoir de Pierrefonds pour avoir
pu, de temps à autre, balancer le pouvoir royal.
Les emplacements exacts de ces précédents édifices sont discutés.
Certains affirment qu’il n’y avait, à l’emplacement actuel, qu’un manoir et que le
château était près de l’église. Viollet le
Duc, de son côté affirmait que le château des Nivelon avait toujours été là où
il se trouve actuellement. Il avait retrouvé
des substructions semblant dater du XIIe
et du XIIIe siècles devant la façade sud
du château actuel et la tradition voudrait
que les châteaux soient toujours reconstruits sur les bases des précédents.
C’est parce que le dernier des Nivelon
meurt sans postérité directe que PhilippeAuguste acquiert le château en 1185.
En 1392, Louis d’Orléans, devenu duc
de Valois (que vient de lui donner son
frère Charles VI), avait décidé la reprise
des hostilités militaires contre Henri IV,
roi d’Angleterre. Le château de Pierrefonds est construit afin de surveiller
la région en ces périodes de troubles
politiques.
En effet, Louis d’Orléans ne s’entend
pas du tout, en ce qui concerne l’admi-
E
Les imposantes murailles du château, avec
leurs chemins de ronde, leurs courtines
(portions de remparts entre les tours)…
nistration du royaume de France, avec
son oncle Philippe II de Bourgogne, ni
avec son frère le roi Charles VI, qui est
fou.
En 1407, Louis est assassiné. Il a eu le
temps de faire reconstruire La FertéMilon, de restaurer Béthisy, Montépiloy,
Coucy et Crespy (Crépy-en-Valois) et
l’on suppose que Pierrefonds était
achevé.
En 1413, le comte de Saint-Pol, partisan
des Bourguignons, officier du roi, fait
capituler Pierrefonds après avoir fait
de même avec Crespy. Il ne rendra le
château au duc Charles d’Orléans (le
poète) qu’après l’avoir brûlé.
Après la défaite d’Azincourt et l’occupation anglaise, Charles d’Orléans s’exile
durant vingt-cinq ans. En 1424, privé de
vivres, la garnison de Pierrefonds ouvre
ses portes aux Anglais.
A son retour, en 1440, il fait réparer les
dégâts. Louis XII (Valois-Orléans) accède
au trône et Pierrefonds entre dans le
domaine royal.
De nombreux sièges seront imposés à
la place forte, dont un en 1591, mené
par Henri IV, auquel il résistera.
Au début du XVIIe siècle, vers 1617,
Louis XIII désire en finir avec les conspirations aristocratiques. Alors qu’il a survécu aux vicissitudes de la guerre de
Cent Ans, le château est en effet aux
mains du gouverneur Antoine d’Estrées,
marquis de Cœuvres, qui s’oppose au
roi, se rangeant aux côtés du prince de
Condé. Pierrefonds est assiégé par
l’artillerie de Charles de Valois et
15 000 hommes. Louis XIII le fait démanteler, on enlève la toiture et on renverse
les fortifications. Il sera ensuite pillé par
les villageois.
Ruines romantiques
Pendant deux siècles, à partir de ce
moment, le château est abandonné.
DE NOTRE REGION
Dès le XVIIe siècle, les artistes viennent
immortaliser les ruines romantiques.
La Révolution française verra sa vente
comme bien national.
En 1810, Napoléon 1 er ordonne son
rachat par l’Etat.
En 1832, Louis-Philippe marie sa fille
avec le roi des Belges Léopold 1er à
Pierrefonds et célèbre la noce avec un
grand banquet dans les ruines.
En 1848, le château est inscrit sur la
liste des Monuments historiques dont
s’occupe Prospère Mérimée.
Napoléon III, qui est déjà venu à Pierrefonds en 1850, décidera en 1857 de
confier les travaux de restauration du
donjon à l’architecte Viollet le Duc.
Quatre ans plus tard, il lui confie la
reconstruction complète de l’édifice.
En 1858, les travaux commencent par
le colmatage des tours et des murailles
éventrées, la reconstruction des logis
dévastés et par la création d’un décor,
d’un mobilier pour le couple impérial et
la cour. Le concept de ruines pittoresques est abandonné pour celui de
résidence impériale pour devenir, dans
les faits, une folie romantique et
impériale.
Viollet le Duc, partant des techniques
moyennageuses dont il s’inspire sans
les reprendre servilement, reconstruit
le château en créant une architecture
originale.
En 1866, le gros-œuvre est terminé. On
y installe une collection d’armes et
d’armures (aujourd’hui aux Invalides, à
Paris) qui seront évacuées en 1870.
Ils ne s’arrêteront qu’à la guerre contre
la Prusse en 1870.
La reconstruction n’est pas terminée
mais s’avère laborieuse. L’Empire est
tombé et Pierrefonds n’est donc plus
résidence impériale.
Viollet le Duc meurt en 1879, laissant
les travaux à son gendre, l’architecte
Ouradou, qui achève la chapelle et la
salle de garde. Le décor intérieur reste
inachevé. L’architecte Lisch, en 1885,
termine la restauration.
Aujourd’hui, le château appartient à la
Caisse Nationale des Monuments Nationaux (CNMN : www.monum.fr), il
accueille des expositions temporaires et
des milliers de touristes tous les ans.
Petit avant-goût
Si vous n’avez pas encore mis les pieds
à Pierrefonds et donc, si vous n’avez pas
encore succombé au charme de l’immense bâtisse guerrière tout droit sortie
de contes de fées et de l’imaginaire de
Viollet le Duc, voici une petite idée des
lieux qui, nous l’espérons, vous attirera
vers Pierrefonds.
L’extérieur du château, ses murs épais
semblant invincibles, peut encore rappeler la forteresse de Louis d’Orléans
mais pas l’intérieur où le décor est
purement imaginaire. On trouve même,
dans la cour, entre Louis d’Orléans et
son épouse Valentine Visconti, au trumeau du portail, Viollet le Duc lui-même
représentant Saint-Jacques le Majeur !
Dans la chambre de l’impératrice, par
exemple, au-dessus de celle de son
impérial mari, voûtée et de forme octogonale, on trouve des lambris sculptés
et un superbe manteau de cheminée.
Le donjon dévoile l’avant-gardisme
(peut-être involontaire) de Viollet le Duc
qui annonce le modern style (style 1900)
avec ses figures ou animaux fantastiques sculptés dans les lambris.
La salle des Preux, celle des gardes
avec sa belle cheminée et ses étranges
balcons, sa belle cheminée aux armes
de Louis d’Orléans et quelques fragments remarquables, vestiges d’un
passé réel, vous entraîneront dans une
féerie, largement teintée d’histoire, qui
ne manquera pas de vous séduire.
Sources : Centre des Monuments Nationaux. Quid édition 2000.
Sur internet : • http://napoléontrois.free.fr • www.médiatheque-patrimoine.culture.gouv.fr • Plaquettes et panneaux sur place.
Le grand corps de logis allongé faisant
face à la chapelle et au donjon qui, à
Pierrefonds, est adossé à la façade.
Le château des mille et uns contes de fée
surplombant le village aux modestes, mais
belles habitations. Toute une atmosphère…
Sur la façade principale, les “fioritures”
dues à Viollet le Duc. Quelques éléments
ne sont que de pseudo défenses.
Le perron d’angle aux rampes portant
d’étranges animaux, la statue équestre
de Louis d’Orléans (bronze) de Fremiet.