Rencontres

Transcription

Rencontres
Les VIIIes Rencontres d’orthophonie
Anne-Christine Dupont et Sylvia Topouzkhanian, membres du Comité directeur de l’Unadréo
Le mois de décembre
devient le mois des
rencontres annuelles
organisées par l’Unadreo,
la FNO et Ortho Edition.
Cette année, le thème
présenté était le suivant : « les
approches thérapeutiques en
orthophonie : évaluation de
la prise en charge ».
Les 11 et 12 décembre
2008, aux Diaconesses,
nous fûmes nombreux à nous
retrouver autour de l’édition
de la deuxième version des
« approches thérapeutiques »,
dont les 4 volumes ont été
remis en guise d’actes aux
congressistes.
Cette année encore, du fait du
succès de ces Rencontres, toutes
les demandes d’inscription n’ont
pu être honorées et nous nous
en excusons auprès de ceux et
celles qui n’ont pu écouter les
allocutions brillantes de ces 2
jours. Voici néanmoins un court
résumé.
Monique Touzin et Christine Maeder
Le jeudi matin, Christine Maeder,
modératrice, a introduit le thème des
pathologies du langage écrit.
deux questions pratiques ont émergé en fin
d’intervention.
La prise en charge intensive quotidienne sur
quelques mois avec des fenêtres thérapeutiques
plus ou moins longues est-elle à prôner et à
généraliser dès que nous diagnostiquons une
DL- DO massive et sévère ?
Quant aux outils informatiques (correcteur
d’orthographe, dictée vocale et autres outils
de médiation), quand les proposer ? Comment
permettre leur mise en place tout en ne les
considérant que comme des aides ? En effet,
sans connaissance de la langue écrite dans
toutes ses composantes, ces aides ne sont pas
efficaces autant qu’elles pourraient l’être.
Peggy
ggy Gatignol
g
L’après-midi, placée sous la présidence de
Peggy Gatignol, était axée sur les pathologies
ORL.
J
Joffrey
y Trauchessec et Annie Dumont
Emmanuelle Lederlé
Emmanuelle Lederlé nous a rappelé que la
rééducation orthophonique du langage écrit ne
peut mettre de côté la relation duelle entretenue
entre le patient et le rééducateur mais surtout
entre ce même patient et son langage écrit ainsi
que le langage écrit de son entourage. Tout
au long de la prise en charge, ces interactions
évolueront et nécessiteront une adaptation
constante des uns et des autres.
Les pathologies du langage écrit font également
partie du tableau des maladies génétiques rares,
soit de façon intrinsèque soit en sont une des
conséquences. Isabelle Eyoum nous a rappelé
que leur prise en charge, multiple et complexe,
doit être la plus précoce possible.
Monique Touzin nous a relaté le suivi
longitudinal d’une enfant dyslexique/
dysorthographique sévère qu’elle a reçue
au sein de l’unité de l’hôpital Robert Debré
à Paris où elle exerce. Les progrès manifestes
de cette enfant n’ont fait que renforcer notre
conviction de la validité et de l’efficacité
de la prise en charge orthophonique et
L’enfant sourd et sa prise en charge ont été
évoqués successivement par Annie Dumont
et Elisabeth Manteau. L’une nous a fait part
des nouveaux défis que la surdité néonatale
met en exergue : dépistage à la maternité,
implantation cochléaire, prise en charge dès
les premiers jours de vie. E. Manteau nous
a ensuite présenté des cas de rééducation/
éducation bilingue (langue orale et LSF), en
relatant les dires de ses patients, suivis de
manière longitudinale et ayant fait le choix
du bilinguisme.
Elisabeth Manteau
Joana Revis a montré que les recherches sur
la posture lors de l’émission vocale ont eu des
retombées sur la rééducation des dysphonies.
Ses vidéos ont été très explicites et certains
des intervenants ultérieurs ont même avoué
avoir été encore plus attentifs à la façon dont
Isabelle Eyoum et Thierry Rousseau
page 10
L’Orthophoniste N°285 - Janvier 2009
M
Michèle
Puech et
Virginie Woisard,
V
poursuivent àToulo
ouse, depuis pluJoana Revis
sieurs années, un
si
travail de recherche clinique sur la prise
en charge des troubles de la déglutition.
Elles se sont attachées à étudier les effets comparatifs d’une prise en charge «
classique » (exercices de rééducation) et
d’une stimulation électrique neuromusculaire. Les résultats de cette étude n’ont
pas montré de façon tranchée la supériorité, en terme d’efficacité, d’une prise en
charge sur l’autre.
Jean Marc Kremer
L’intervention de Jean Marc Kremer
rapportait un suivi longitudinal, en
collaboration avec le Dr Poivret et une
équipe pluridisciplinaire, de 50 patients
ayant bénéficié d’implant phonatoire suite
à une laryngectomie totale. L’orthophoniste
assure dans ce cas-là non seulement la
rééducation dans ses aspects « techniques »
spécifiques de réhabilitation vocale
prothétique, mais inclut également
une large part de réhabilitation sociopsychologique.
visage. Les résultats obtenus sont étonnants,
de même que le bien-être de Pascal qui dit
« être né une seconde fois le 21 janvier
2005 ». Cependant Frédéric Martin n’a pas
omis de nous faire part des difficultés, des
écueils et des risques encourus.
Virginie
g e Woisard
o sa d
Pour ceux qui pouvaient douter de la
nécessité de mettre en place la recherche
en orthophonie et d’être ainsi en phase
avec les avancées médicales, pour ceux
qui pensaient que le master et le niveau
de connaissances qui en découle est
une utopie, cette dernière intervention
résolument tournée vers l’avenir a contredit
leurs présupposés.
La matinée de vendredi a été consacrée aux
pathologies d’origine neurologique, avec
comme modérateur Franck Medina.
Isabelle Gaudryy
Véronique Rolland
Gilles Leloup
p et Frédéric Martin
Nous avons clôturé cette belle journée
par une expérience unique, qui prouve la
diversité de notre art et sa valeur. Frédéric
Martin, photos et vidéos à l’appui, nous
a relaté la greffe du visage de Pascal et la
rééducation orthophonique indispensable
pour mobiliser les muscles implantés sur son
Le fait qu’un programme de rééducation
spécifique à chaque patient, basé sur
l’analyse précise des troubles présents, puisse
influencer favorablement la récupération
post-lésionnelle a été démontré par Peggy
Gatignol. Sa communication a abordé la
récupération et l’intérêt d’une rééducation
orthophonique intensive (5 à 6 heures
par semaine) concernant les aphasiques
sévères d’étiologies différentes. Le résultat
des « programmes/entraînements » de
rééducation pour des aphasiques sévères
chroniques est positif et encourageant dans
cette expérience. Certes, l’organisation
pourrait paraître complexe de prime abord,
mais l’intérêt d’une telle action est bien réel
pour les personnes aphasiques sévères.
Quant à la délicate question de l’arrêt de
la prise en charge, elle est tributaire de la
personne aphasique, de son entourage
familial, des différents soignants… Une
fenêtre thérapeutique peut toujours être
envisagée, de même qu’une prise en
charge groupale prenant le relais ou une
orientation vers une association.
Véronique Rolland a présenté la dysarthrie
parkinsonienne, la plus étudiée et également
la seule à bénéficier à ce jour d’un protocole
déterminé de prise en charge, nommé
LSVT (Lee Silvermann Voice Treatment).
Les études pilotes réalisées prouvent
l’efficacité sur l’intelligibilité des patients,
à court et moyen terme et ce, quelle que
soit la sévérité de la dysarthrie. Il s’agit
néanmoins de favoriser les prises en charge
intensives précoces, dès le diagnostic de la
maladie de Parkinson et les premiers signes
d’hypophonie, même si celle-ci n’est pas
gênante à ce stade du fait de la relative
intelligibilité des patients. Les résultats n’en
seront que plus efficients par la suite.
L’Orthophoniste N°285 - Janvier 2009
La communication originale d’Isabelle
Gaudry sur la rééducation des troubles
neurovisuels et le cas particulier des
hémianopsies latérales homonymes a
engendré beaucoup de questionnements
parmi le public. En effet, l’orthophoniste
serait le soignant le plus désigné pour
prendre en charge la rééducation du
champ visuel hémianopsique, après
lésion centrale unilatérale (et non
l’orthoptiste, comme on pourrait
l’imaginer).
page 11
Unadréo
ils « posaient » leur
co
orps pour projeter
leeur voix !…
Nathalie Joyeux a présenté
quant à elle une expérience
d’évaluation des pratiques.
Un premier cas montre que la
prise en charge de la mémoire
de travail est efficace en terme
d’amélioration des résultats aux
tests et en terme d’amélioration
des difficultés quotidiennes. Un
second cas montre les limites de
la prise en charge telles qu’elles
sont décrites par ailleurs dans la
littérature.
Catherine Thibault
Nathalyy Joyeux
J y
La matinée s’est achevée par les résultats
d’une étude évaluant l’efficacité de la
thérapie écosystémique. Présentée par
Thierry Rousseau, elle portait sur la
GECCO, grille d’évaluation des capacités
de communication des patients atteints
de la maladie d’Alzheimer. Les résultats
de l’étude, à 6 mois, ont mis en lumière
une amélioration significative des capacités
communicatives résiduelles d’une part
(versus une chute des capacités pour le
groupe témoin) et une chute du MMS moins
importante que le groupe témoin d’autre
part. Par ailleurs, la thérapie écosystémique
consiste également en des interventions
auprès de l’entourage et ceux-ci estiment
que la rééducation orthophonique agit non
seulement sur les capacités de compréhension
et de communication de leur proche mais
également sur son comportement. Par ailleurs,
ils disent ressentir eux-mêmes moins de
culpabilité.
L’après-midi, consacrée aux troubles du langage
oral, était modérée par Sylvia Topouzkhanian.
Celle-ci fut entamée par Catherine Thibault sur
le thème de l’insuffisance vélaire et les troubles
d’articulation. Après un rappel biologique sur les
oralités, elle nous a rappelé que les anomalies de
déglutition, succion, ventilation et articulation ne
doivent jamais être considérées isolément et elle
a souligné l’importance qu’elles jouent également
dans la posture/verticalité.
page 12
Gilles Leloup a évoqué la rééducation de
la déglutition en nous présentant quelques
principes généraux et les troubles associés
découlant des postures dysfonctionnelles.
Le but de la rééducation n’étant pas de
rétablir une pseudo « normalité » mais que
le geste soit au final fonctionnel ; la langue
devenant un partenaire de la rééducation
et non un muscle à corriger.
Françoise
a ço se Coquet
Françoise Coquett a ensuite abordé, au travers
du cas d’Ilan, la rééducation de la parole et
du langage suite à l’établissement d’un profil
sémiotique et d’un projet thérapeutique. Les
réflexions qui s’en dégagent sont celles en
lien avec le seuil de la pathologie (écart à la
norme), la méthodologie de prise en charge
et les outils d’évaluation (spécificité, finesse
et sensibilité).
Anne-Marie Simon a présenté différentes
définitions du bégaiement prenant en compte
la souffrance du sujet et non uniquement
la sévérité des troubles (cf. « Syndrome de
la parole bégayée » de l’ISA : International
Stuttering Association et définition de l’APB :
Association Parole-Bégaiement). Chaque
histoire est singulière, de même que le
chemin, unique, de chaque patient.
Anne-Marie Simon
Pour finir, Nicole Denni-Krichel a terminé
par une présentation pleine d’espoir sur les
patients atteints de troubles envahissants
du développement, en pointant l’intérêt de
l’évaluation, mettant ainsi en lumière les
plus petits progrès des patients suivis. Un
DVD va paraître prochainement à ce propos.
Reste à travailler sur un outil standardisé,
indispensable.
Dominique
q Puech
Comme vous l’avez compris, ces journées
ont été très riches en enseignement et en
rencontres. Nous vous donnons rendez-vous
dès à présent pour les IXes Rencontres, les
10 et 11 Décembre 2009, aux Diaconesses
à Paris, pour traiter du thème suivant : « La
voix dans tous ses maux ».
@
Internet
Plus d’informations sur le site
www.unadreo.org
L’Orthophoniste N°285 - Janvier 2009