2015_05_07_commentaire vf - Orchestre Philharmonique de

Transcription

2015_05_07_commentaire vf - Orchestre Philharmonique de
Jeudi 7 mai 2015 20h30
Ingwiller, Église Catholique
Concert sans entracte
Charlotte Juillard violon soliste et direction
Alexander Somov violoncelle
Sandrine Poncet-Retaillaud piccolo
Antonio Vivaldi (1678-1741)
Concerto pour flûte piccolo, cordes et basse continue en ut majeur RV. 443
Allegro
Largo
Allegro molto
Giuseppe Tartini (1692-1770)
Concerto pour violoncelle et orchestre n°2 en ré majeur
Largo
Allegro assai
Grave
Allegro
Antonio Vivaldi (1678-1741)
Les Quatre Saisons
Le Printemps (Allegro, Largo, Allegro)
L’Été (Allegro con molto, Adagio, Presto)
L’Automne (Allegro, Adagio molto, Allegro)
L’Hiver (Allegro non molto, Largo, Allegro)
12’
12’
40’
Antonio Vivaldi (1678-1741)
Concerto pour flûte piccolo, cordes et basse continue en ut majeur RV. 443
Vivaldi possédait une facilité d’écriture déconcertante. Il se targua de pouvoir
composer un concerto, avec toutes ses parties, plus vite qu'un copiste ne l'eût copié !
En 1711, l'Estro Armonico, un recueil de douze concertos, fut publié à Amsterdam.
Ce recueil lui assura aussitôt une notoriété considérable. Jean-Sébastien Bach luimême avait trouvé les œuvres de celui que l’on surnomma « le prêtre roux » si
intéressantes et novatrices qu’il les arrangea pour orgue ou clavecin.
Vivaldi ne fut pas l’inventeur de la forme concertante reposant sur trois mouvements
(vif – lent – vif). En revanche, il sut parfaitement utiliser certains éléments musicaux
comme le refrain (ritornello). Il fit en sorte que celui-ci passe d’un pupitre à l’autre,
modulant, changeant de clés et variant ainsi à l’infini les couleurs instrumentales.
Une inventivité aussi remarquable qualitativement et quantitativement imposa
rapidement la forme concertante dans toute l’Europe.
Si l’immense majorité des concertos de Vivaldi est dédiée au violon, il en composa
également d’autres pour violoncelle, basson, hautbois et mandoline, mais aucun
pour le clavier.
Ne nous sont parvenus que trois concertos pour flautino. À quel instrument cela
correspondrait-il de nos jours ? À la flûte sopranino, au piccolo ? Le terme « flautino
» est relativement imprécis, suggérant simplement qu’il s’agit d’une petite flûte, la
flûte dite « piccolo » n’étant apparue qu’aux alentours de 1730. Nous disposons de
peu de précisions concernant la date de composition de la pièce. Toutefois, il est
quasi certain qu’elle fut écrite dans les années 1720. On n’en connaît pas davantage
sur les circonstances de sa création.
Ce que l’on sait, en revanche, c’est que Vivaldi, qui composait pour des solistes qui
lui étaient proches, connaissait alors un remarquable interprète : les deux
mouvements rapides de l’œuvre sont en effet d’une écriture virtuose.
Le premier mouvement, Allegro, s’ouvre sur un rythme pulsé et dans une expression
joyeuse. Le soliste double les voix de l’accompagnement. Il montre son habileté dans
les notes très rapides, les sauts d’intervalles périlleux. Le second mouvement, Largo,
s’apparente à un monologue dans lequel la flûte fait preuve de son art du chant.
L’expression y est particulièrement lyrique. Le finale, Allegro molto, est une sorte de
« course-poursuite ». La vélocité est maximale, tout aussi étourdissante qu’élégante,
cherchant assurément à recueillir les suffrages du public.
Giuseppe Tartini (1692-1770)
Concerto pour violoncelle et orchestre n°2 en ré majeur
Giuseppe Tartini aurait dû être prêtre. S’opposant à sa famille, il choisit le droit, à
l’université de Padoue. Il se passionna aussi pour l’escrime – il faillit devenir maître
d’armes - puis décida de se marier en 1710. Mais sa fiancée était sous la protection
de son oncle, l’évêque de Padoue, qui refusa le mariage et poursuivit Tartini de sa
vengeance. Le temps de se faire oublier, le jeune musicien trouva asile au
monastère d’Assise. Là, il reçut l’enseignement du compositeur Tchèque Bohuslav
Matej Cernohorsky (1684-1742). Considéré comme l’un des musiciens tchèques les
plus importants de l’époque baroque, aux côtés de Jan Dismas Zelenka,
Cernohorsky fut particulièrement apprécié des compositeurs italiens qui le
surnommèrent « Il Padre Boeme ». Enfin pardonné par l’évêque, Tartini prit la
direction de l’Orchestre de la basilique Saint-Antoine de Padoue. Après plusieurs
voyages en Europe, il fonda une école de musique à Padoue et rédigea divers
ouvrages théoriques dont un traité consacré à l’ornementation.
Largement influencé tout d’abord par les esthétiques de Corelli et de Vivaldi, Tartini
épura son style vers ce que l’on considère aujourd’hui comme les prémices de
l’écriture classique. Il laissa à la postérité plus de cent trente concertos pour violon,
un nombre impressionnant de pièces de musique de chambre dont la fameuse
Sonate des trilles du Diable, entre autres.
Tartini a composé deux concertos pour violoncelle, instrument auquel on offrit
rarement la place de soliste au XVIIIe siècle. On ne connaît pas la date exacte de la
composition du Concerto en ré majeur. Il est en quatre mouvements. Le premier,
Largo, s’ouvre par une ample et solennelle introduction mettant en valeur les deux
cors avant que le violoncelle n’entre. L’orchestre dépasse son rôle de simple
accompagnateur. L’Allegro assai est tout aussi majestueux, offrant à nouveau un bel
écrin sonore au soliste, qui réalise une cadence particulièrement belle et difficile. La
déclamation du troisième mouvement, Grave, offre l’expression d’un chant d’une
grande noblesse, composé de phrases amples et développées de manière de plus
en plus raffinée. À ce climat immobile succède une véritable fête princière. Les
sonneries des cors, la dynamique puissante des cordes imposent un finale
énergique. Dans cet Allegro, le violoncelle « danse » jusque dans sa nouvelle
cadence particulièrement volubile. Pourtant, elle s’achève dans un murmure avant
que l’orchestre ne conclue la partition.
Antonio Vivaldi (1678-1741)
Les Quatre Saisons
Les quatre concertos pour violon principal, orchestre à cordes et continuo
introduisent le recueil Il cimento dell’armonia e dell’invenzione (La confrontation entre
l’harmonie et l’invention). Ces opus (op.8 n°1 à 4, RV. 269, 315, 293, 297) ont ceci
de particulier qu'ils concilient les données descriptives d'un texte et la souplesse de
chaque variation rythmique. Un texte ? En effet, un sonnet en italien présente de
manière poétique les caractéristiques de chaque saison, renvoyant aux parties
correspondantes de la musique. Le sonnet serait de la main de Vivaldi, qui y ajoute
quelques clés pour les interprètes.
Chaque instrument possède ainsi son “caractère” propre, par exemple le violon
suggérant un berger endormi alors que l'alto évoque l'aboiement d'un chien. Les
ornithologues reconnaîtront peut-être au passage le coucou, la tourterelle, le
chardonneret, cités dans Le Printemps…
Datée des années 1718-1720, l’œuvre connut un succès presque immédiat. Peutêtre parce qu’elle se plaçait d’emblée dans l’évocation du quotidien des campagnes
de la Vénétie, loin des palais. Le Printemps (Allegro, Largo, Allegro) tout
particulièrement, séduisit le Concert spirituel et le public parisien l’entendit à
plusieurs reprises.
L’expérimentation sonore prévaut dans cette partition qui contribua grandement à
développer la technique du violon. L’Été (Allegro con molto, Adagio, Presto) nous
entraîne dans divers paysages, entrecoupés d’orages et de nuées d’insectes qui
envahissent la campagne. L’Automne (Allegro, Adagio molto, Allegro) suggère le
temps de la chasse avec des cordes qui imitent les sonneries des cors. Puis, nous
assistons aux festivités liées à la moisson. L’Hiver (Allegro non molto, Largo,
Allegro), si génialement bruitiste, associe les jeux de cette période et le calme, volets
clos.
Ce chef-d’œuvre de Vivaldi a gardé son pouvoir de fascination. Comment expliquer
que cette musique « avant-gardiste » ait sombré dans l'oubli durant deux siècles
pour ne réapparaître que dans les années 1930 ?
Traduction du texte de l’édition originale
• Le Printemps (en mi majeur)
1/ Scène printanière – chant des oiseaux – source qui coule – foudre et tonnerre
viennent en couvrant le ciel d’un manteau noir – de nouveau les oiseaux chantent.
2/ Murmure des arbres et des plantes, un chien hurle et le petit berger dort.
3/ Danse pastorale au son des instruments de musique.
• L’Été (en sol mineur)
1/ Sous la chaleur, l’homme languit, le troupeau aussi et les arbres brûlent – on
entend le chant du coucou - puis la tourterelle chante dans le jardin – un doux zéphyr
souffle – mais le vent du nord entame une bataille avec son voisin – bourrasque – le
paysan se lamente des effets de la bourrasque et des caprices du destin –
bourrasque.
2/ Tout le monde se repose mais le tonnerre qui gronde effraie mouches et
moucherons.
3/ Le tonnerre arrive – le ciel envoie la foudre et la grêle coupe les épis.
• L’Automne (en fa majeur)
1/ Chant des paysans pour fêter la récolte – un ivrogne est là – quelques ivrognes se
querellent – l’ivrogne s’endort.
2/ Pendant le bal, les ivrognes dorment.
3/ La chasse – les chasseurs partent avec les cors, fusils et chiens – l’animal
sauvage s’enfuit – coups de fusils – aboiements – l’animal en s’enfuyant meurt.
• L’Hiver (en fa mineur)
1/ Tremblement glacé parmi les neiges froides – vent horrible – on court en battant
les pieds à cause du froid – les dents claquent – battements de pieds.
2/ Passent les jours heureux auprès du feu, tandis que la pluie mouille tout au
dehors.
3/ Sur la glace, on marche doucement et avec précaution, mais certains glissent et
tombent à terre – on court vite – la glace se casse et se fend – vent de sirocco – le
sirocco et tous les vents sont en guerre – l’hiver se termine et apporte la joie.
Discographie
Antonio Vivaldi
Concerto pour flûte piccolo
Dan Laurin (flûte), Drottingholm Baroque Ensemble (Bis Records)
Giuseppe Tartini
Concerto pour violoncelle et orchestre n°2 en ré majeur
• Mstislav Rostropovitch (violoncelle), Collegium Musicum de Zurich, direction Paul
Sacher (Deutsche Grammophon)
• Roel Dieltiens (violoncelle), Ensemble 415, direction Chiara Bancini (Harmonia
Mundi)
Antonio Vivaldi
Les Quatre Saisons
• Giuliano Carmignola (violon), Orchestre baroque de Venise, direction Andrea
Marcon (Sony)
• Amandine Beyer (violon), Gli Incogniti (Zig Zag Territoires)
• La Petite Bande, Sigiswald Kuijken (Accent)