L`IRM de la prostate préopératoire avant prostatectomie radicale

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L`IRM de la prostate préopératoire avant prostatectomie radicale
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ARTICLE IN PRESS
PUROL-1549; No. of Pages 6
Progrès en urologie (2016) xxx, xxx—xxx
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ARTICLE ORIGINAL
L’IRM de la prostate préopératoire avant
prostatectomie radicale peut-elle prédire
l’extension extracapsulaire et le côté de la
lésion de référence ?
Can preoperative prostate MRI before radical prostatectomy predict
extracapsular extension and the side of the index lesion?
S. Albisinni a,c,∗, A. De Groote a, F. Deneft a,
P. Thoma b, X. Catteau d, T. Roumeguère c,
T. Wildschutz a
a
Département d’urologie, CHU Tivoli, université libre de Bruxelles, Bruxelles, Belgique
Département de radiologie, CHU Tivoli, université libre de Bruxelles, Bruxelles, Belgique
c
Département d’urologie, cliniques universitaires de Bruxelles, hôpital Erasme, université
libre de Bruxelles, route de Lennik 808, 1070 Bruxelles, Belgique
d
Département d’anatomopathologie, CHU Tivoli, université libre de Bruxelles, Bruxelles,
Belgique
b
Reçu le 12 novembre 2015 ; accepté le 18 février 2016
MOTS CLÉS
Cancer de prostate ;
Biopsies ;
IRM ;
Prostatectomie
radicale ;
Extension
extracapsulaire
∗
Résumé
Objectif. — Évaluer le rôle de l’imagerie par résonance magnétique multiparamétrique (IRMmp) en préopératoire chez des patients devant subir une prostatectomie radicale. La précision
de l’IRM-mp pour détecter une extension extracapsulaire (EEC) et l’identification du côté de la
lésion de référence ont été particulièrement analysées.
Méthodes. — Trente-cinq patients consécutifs ayant subi une prostatectomie radicale ont été
analysés rétrospectivement. L’examen comportait des séquences T2, de diffusion, et dynamiques. Le test ␹2 a été effectué pour évaluer une corrélation entre une IRM-mp prédisant une
EEC et une EEC histologique et pour étudier l’association entre le côté de la lésion de référence détectée par IRM-mp et sa localisation histologique. Des modèles de régression logistique
univariée ont été construits pour évaluer les prédicteurs possibles de l’EEC.
Auteur correspondant.
Adresse e-mail : [email protected] (S. Albisinni).
http://dx.doi.org/10.1016/j.purol.2016.02.006
1166-7087/© 2016 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
Pour citer cet article : Albisinni S, et al. L’IRM de la prostate préopératoire avant prostatectomie radicale peut-elle prédire l’extension extracapsulaire et le côté de la lésion de référence ? Prog Urol (2016),
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S. Albisinni et al.
Résultats. — Dix-sept pour cent des hommes ont présenté une EEC lors de l’examen histologique. L’IRM-mp a permis de prédire une EEC histologique avec une valeur prédictive négative
et une spécificité de 93 % et 90 %. La précision globale de l’IRM dans la détection de l’EEC était
de 86 %. L’EEC détectée par IRM a permis de prédire de manière significative une EEC histologique (OR : 17,3, 95 % IC : 2,2—138,2, p = 0,007). Enfin, l’IRM a prédit de manière significative
le côté de la lésion de référence (p = 0,012).
Conclusions. — Dans cette cohorte monocentrique, l’IRM-mp a permis de prédire de manière
significative l’EEC et le côté de la lésion de référence. Des études supplémentaires sont nécessaires pour déterminer quels sont les patients susceptibles de pouvoir bénéficier de l’IRM en
préopératoire.
Niveau de preuve.— 5.
© 2016 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
KEYWORDS
Prostate cancer;
Biopsy;
MRI;
Radical
prostatectomy;
Extracapsular
extension
Summary
Aim. — To evaluate the role of preoperative multi-parametric magnetic resonance imaging
(MP-MRI) in patients undergoing radical prostatectomy. Specifically, the accuracy of MP-MRI
in detecting extracapsular extension (ECE) and individuating the side of the index lesion have
been explored.
Methods. — Thirty-five consecutive patients undergoing radical prostatectomy have been
retrospectively analyzed. The MRI exam incorporated T2-weighted imaging, diffusion-weighted
imaging and dynamic contrast enhancement in all patients. ␹2 test was performed to assess
an association between an MP-MRI suggestive of ECE and pathologic ECE; similar tests were
performed to study the association between the MRI-detected side of the index lesion and its
true localization on final pathology. Univariate logistic regression models were constructed to
evaluate possible predictors of ECE, including MP-MRI suspected ECE.
Results. — Seventeen percent (6/35) of men presented ECE on final pathology. MP-MRI was
predictive of pathologic ECE with a negative predictive value and specificity of 93% and 90%,
respectively. Global accuracy of MP-MRI in predicting ECE was 86%. MRI-detected ECE was significantly predictive of pathologic ECE on logistic regression (OR: 17.3, 95% CI: 2.2—138.2,
P = 0.007). Moreover, MRI significantly predicted the side of the index lesion (P = 0.012).
Conclusions. — In this single center cohort, preoperative MP-MRI was significantly predictive of
ECE and side of the index lesion. Further studies are necessary to individuate patients who can
benefit from preoperative MP-MRI.
Level of evidence.— 5.
© 2016 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.
Introduction
Le cancer de la prostate (CaP) est un problème de santé
majeur dans les pays développés : il est le deuxième cancer
le plus répandu et constitue la sixième cause de mortalité par cancer dans le monde [1]. La grande majorité des
patients atteints d’un CaP sont touchés par une maladie
confinée à la glande, pour laquelle un traitement chirurgical peut être curatif. Cependant, une grande partie des
hommes qui subissent une prostatectomie radicale présentent une maladie localement avancée avec une extension
extracapsulaire (EEC) de la tumeur. Dans cette population,
les marges chirurgicales positives et la récidive biochimique
sont plus fréquentes, ce qui a pour conséquence un moins
bon contrôle de la maladie et la nécessité de traitements
complémentaires [2]. Les approches chirurgicales varient
selon l’extension locale du CaP, notamment dans le choix
d’une technique de préservation nerveuse ou d’une excision
large des paquets vasculo-nerveux. Il est crucial pour les urologues de pouvoir prédire de façon fiable la localisation et
l’extension du cancer en préopératoire, afin d’appliquer la
stratégie chirurgicale la plus appropriée à chaque patient.
Bien que des nomogrammes existent pour prédire l’EEC [3],
aucune méthode d’imagerie ne s’est encore avérée suffisamment précise pour détecter l’EEC.
L’évaluation de l’imagerie par résonance magnétique
multiparamétrique (IRM-mp) suscite actuellement de plus
en plus d’intérêt pour la prise en charge du CaP et notamment dans sa capacité à localiser le CaP et à détecter
une EEC. Les résultats varient suivant les études, bien
qu’en règle générale une faible sensibilité et une spécificité élevée dans la détection de l’EEC aient été rapportées,
avec des taux allant de 22 à 82 % pour la sensibilité et
de 61 à 100 % pour la spécificité [4—8]. Si l’IRM-mp est
Pour citer cet article : Albisinni S, et al. L’IRM de la prostate préopératoire avant prostatectomie radicale peut-elle prédire l’extension extracapsulaire et le côté de la lésion de référence ? Prog Urol (2016),
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actuellement recommandée chez les patients à haut risque,
sa place effective en préopératoire n’a toujours pas été
définie [9].
On sait que l’IRM post-biopsie souffre d’artéfacts
majeurs, principalement dus aux hématomes intraprostatiques [9]. Jusqu’à maintenant, notre centre ne disposait
pas d’une infrastructure suffisante (radiologues, disponibilité de l’appareil d’IRM) pour proposer une IRM-mp
pré-biopsie de la prostate de manière systématique à tous
les patients. Pour cette raison, depuis début 2012, nous
avons effectué une IRM-mp 1,5 T de la prostate chez tous les
patients ayant un cancer de la prostate détecté par biopsie,
avant une prostatectomie radicale, avec un délai de quatre
semaines après la biopsie. Ce manuscrit a pour objectif
d’évaluer la possibilité de définir une stratégie préopératoire adaptée dans un cadre clinique quotidien en explorant
en particulier la capacité de l’IRM-mp à détecter les patients
atteints d’une EEC et à localiser correctement le côté du
CaP avant l’intervention chirurgicale, dans les suites rapprochées d’une biopsie.
3
inspirée de la segmentation prostatique en 27 segments [10].
L’EEC a été suspectée à l’IRM en présence d’une extension
extracapsulaire, quand une irrégularité focale a été trouvée sur le périmètre de la capsule prostatique ou quand
un renflement capsulaire important était présent. Un seul
uro-radiologue (PT) avec plus de 5 ans d’expérience dans
le domaine a réalisé tous les examens. Le radiologue avait
accès aux donnés du PSA, du TR et connaissait la présence
de biopsies positives sans précision sur leur localisation lors
de la réalisation de son compte rendu radiologique.
Pour cette étude nous nous sommes basés sur l’évaluation
de ces comptes rendus faits en routine et lus par les deux
urologues amenés à réaliser les prostatectomies radicales
avant la chirurgie, et jugés négatifs ou positifs pour une
éventuelle EEC à la lecture du protocole radiologique en
préopératoire.
Concernant l’analyse anatomopathologique de la pièce
opératoire, les marges de résection chirurgicales sont
tatouées à l’encre de chine. La base et l’apex sont prélevés
dans un premier temps et subdivisé chacun en côté gauche
et côté droit. Des tranches de section sont réalisées depuis
le col vésical vers l’apex, chacun divisé en quatre quadrants.
Matériel et méthodes
Statistiques
Entre janvier 2012 et décembre 2014, 40 hommes ayant
subi une IRM-mp en préopératoire avant une prostatectomie radicale dans notre hôpital régional ont été inclus
pour cette étude rétrospective menée, après accord du
comité d’éthique, conformément aux règles de bonnes pratiques cliniques et aux principes éthiques de la Déclaration
d’Helsinki. Tous ces patients avaient été récemment diagnostiqués avec un cancer de la prostate, détecté après
biopsies transrectales (n = 38) ou après résection transurétrale de la prostate (n = 2). Toutes les biopsies ont été
réalisées selon un schéma standardisé, par guidage échographique endorectal avec un minimum de 12 prélèvements
par patient, à l’exception de 2 patients chez qui les biopsies ont dû être interrompues en raison de douleur après
8 prélèvements. Les patients ont subi une IRM-mp 4 semaines
après les biopsies et 2 à 4 semaines avant l’intervention. Le
PSA a été mesuré avant la biopsie, le toucher rectal (TR) a
été effectué par deux urologues expérimentés (ADG et TW)
et jugé positif si évocateur de cancer. Le volume prostatique
a été estimé lors de l’examen histologique de la pièce opératoire. Pour cette étude monocentrique, toutes les biopsies
et les pièces de prostatectomies ont été analysées par le
même pathologiste. Apres l’exclusion de 5 patients pour
données manquantes, 35 hommes ont pu être analysés.
L’IRM-mp de la prostate a été effectuée sur un système
Philips Ingenia 1,5 T avec antenne de surface. Trois acquisitions ont été réalisées en pondération T2 (sagittale, axiale
oblique et coronale oblique, TR 3400, TE 110, épaisseur de
coupe 3 mm, FOV 250 × 250 mm), une acquisition en imagerie de diffusion (facteurs b 0, 500 et 1000 s/mm2 , épaisseur
de coupe 4 mm) et une acquisition axiale oblique pondérée
T1 fat sat (résolution temporelle 6,7 s, épaisseur de coupe
6 mm, FOV 200 × 200 mm) lors de l’injection intraveineuse
de gadobutrol (0,1 mmol/kg à 2 mL/min). Ces techniques ont
été utilisées pour décrire la localisation de la lésion de référence suspectée, et le cas échéant, la suspicion d’EEC, qui a
été décrite de façon dichotomique (oui ou non). La localisation de la tumeur s’est basée sur une description anatomique
Des statistiques descriptives ont été utilisées pour résumer
les données disponibles. Le test ␹2 a été effectué pour évaluer les liens entre une IRM-mp à prédiction d’EEC et une EEC
histologique. Des tests similaires ont été utilisés pour évaluer les associations entre le score de Gleason biopsique, le
TR et l’EEC histologique. En outre, le ␹2 a été utilisé pour
étudier l’association entre le côté de la tumeur à l’IRM, le
côté de la biopsie et la localisation histologique de la lésion
de référence. Étant donné le faible nombre d’événements
positifs (c’est à dire l’extension extracapsulaire histologique sur la pièce de prostatectomie), seuls des modèles de
régression logistique univariée ont été construits pour évaluer les facteurs prédictifs éventuels de l’EEC. Les variables
testées étaient l’âge (variables continues), le PSA (variables continues, transformées de manière logarithmique en
raison d’une distribution non paramétrique), le TR (variables qualitatives), le score de Gleason biopsique (variables
qualitatives, score de Gleason 6—7 contre 8—10) et l’EEC
détectée par IRM-mp (variables qualitatives). Toutes les analyses statistiques ont été réalisées à l’aide du logiciel Stata
11.1 (StataCorp, College Station, TX).
Résultats
Les caractéristiques générales de la cohorte sont illustrées
dans le Tableau 1. Globalement, 17 % (6/35) des hommes
présentaient une EEC sur l’examen anatomopathologique
final. Cinq de ces patients avaient un score de Gleason de
8, tandis qu’un patient présentait un cancer avec un score
de Gleason de 7 (3 + 4). Tenant compte de la classification
de risque de d’Amico [11], 3 hommes sur 6 (50 %) avaient
un profil de risque intermédiaire et 3/6 (50 %) un profil de
risque élevé. Parmi ces 6 patients présentant une EEC pathologique, 5/6 avait une atteinte multifocale avec ≥ 2 zones
d’EEC, et une longueur médiane d’EEC de 12 mm. Le seul
patient présentant une zone d’EEC focale unique avait une
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S. Albisinni et al.
Tableau 1
Caractéristiques générales de la cohorte.
Âge (années)
Médiane (IIQ)
Moyenne ± ÉT
IMC (kg/m2 )
Médiane (IIQ)
Moyenne ± ÉT
PSA (ng/mL)
Médiane (IIQ)
Moyenne ± écart-type
TR
Négatif
Positif
Poids prostatique (g)
Médiane (IIQ)
Moyenne ± écart-type
Score de Gleason biopsique
6
7
8
Score de Gleason pathologique
6
7
8
pT
2a
2b
2c
3a
3b
27,3 (25,1—31,2)
28,3 ± 4,5
IRM
Pas d’EEC
EEC
Pas d’EEC
EEC
26
3
2
4
␹2 = 9,86 ; p = 0,002.
9,46 (6,2—12)
10,9 ± 8,2
25
10
Tableau 4
44 (38—58)
50 ± 19
IRM
Droite
Gauche
Bilatéral
Droite
Gauche
Bilatéral
6
1
2
1
11
1
3
3
2
Prédiction du côté principal de la lésion.
Histologie
24
9
2
␹2 = 12,82 ; p = 0,012.
11
12
12
Tableau 5 Côté principal de la lésion selon la biopsie
et l’analyse histologique de la pièce opératoire.
1
1
27
3
3
Histologie
Résultats d’IRM-mp.
Localisation de la tumeur principale
Pas de tumeur visualisée
Droite
Gauche
Bilatérale
EEC
Négative
Positive
Hématome
Non
Oui
IRM et EEC histologique.
Histologie
60 (60—67)
63 ± 5
longueur d’EEC de 4 mm, ce qui le place dans le domaine
des EEC étendues (≥ 3 mm). Nous avons observé un risque
de sous-stadification important après biopsies. Treize sur
24 patients (54 %) ayant un score de Gleason de 6 sur les
biopsies ont ensuite été reconsidérés avec un score de Gleason de 7 (8 sur 13, 46 %) et un Gleason de 8 (5 sur 13, 38 %)
sur la pièce opératoire. Cinq patients sur 9 (55,5 %) ayant
un score de Gleason après biopsies de 7, ont été requalifiés avec un score de Gleason de 8 sur le compte rendu
anatomopathologique final.
Le Tableau 2 illustre les résultats obtenus avec l’IRMmp. Elle a permis de prédire une EEC histologique avec
une valeur prédictive négative et une spécificité respectives
Tableau 2
Tableau 3
5
10
15
5
28 (80 %)
7 (20 %)
16 (46 %)
19 (54 %)
Biopsie
Droite
Gauche
Bilatéral
Droite
Gauche
Bilatéral
3
2
5
2
5
5
4
4
4
␹2 = 1,86 ; p = 0,76.
de 93 % et 90 %. La valeur prédictive positive et la sensibilité étaient par contre respectivement de 57 % et 67 %.
Globalement, la précision de l’IRM-mp dans la détection de
l’EEC était de 86 %. Il est important de souligner le nombre
élevé d’hématomes prostatiques signalés dans 54 % des cas
(19/35), après un intervalle de 4 semaines entre la biopsie
et l’examen d’imagerie.
L’EEC détectée par IRM-mp était associée de façon significative à l’EEC histologique (␹2 = 9,86 ; p = 0,002) (Tableau 3),
contrairement au TR (p = 0,78) ou au score de Gleason biopsique (p = 0,11). De plus, dans les modèles de régression
logistique univariée testés, seule l’EEC détectée par IRM-mp
a permis de prédire de manière significative une EEC histologique (OR : 17,3, 95 % IC : 2,2—138,2, p = 0,007). L’âge
(p = 0,44), le TR (p = 0,73), le PSA (p = 0,46) et le score de
Gleason biopsique (p = 0,21) ne représentaient pas des facteurs prédictifs d’EEC histologique.
L’IRM-mp a prédit de manière significative le côté de la
lésion de référence (Tableau 4) (p = 0,012), alors que le côté
de la lésion retrouvée après biopsies n’était pas associé avec
le côté de la lésion de référence retrouvée sur la pièce opératoire (Tableau 5). Il faut néanmoins souligner que 77 %
(27/35) des cancers étaient multifocaux.
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L’IRM de la prostate préopératoire avant prostatectomie radicale
Discussion
La stadification clinique du cancer de la prostate reste
aujourd’hui un défi en uro-oncologie. La prise de décision
thérapeutique adaptée au patient dépend pourtant fortement de cette stadification. À ce jour, aucune technique
(biomarqueurs, biopsies ou imagerie) n’est capable de définir avec certitude le stade du cancer avant un traitement
à visée curative. Dans ce contexte, l’IRM-mp représente
un outil intéressant pour l’urologue. Plusieurs études ont
analysé ses performances dans la stadification clinique du
CaP [12—17]. Les résultats varient selon l’expérience du
lecteur, du type d’IRM et de l’utilisation ou non d’une
antenne endorectale. Les recommandations actuelles préconisent la réalisation d’une IRM-mp pour les patients à
haut risque [9]. Dans cette étude réalisée avec une petite
cohorte, nous avons évalué un scénario clinique dans les
conditions réelles d’un hôpital de soins régional, et nous
avons étudié l’utilité d’une IRM-mp en préopératoire avant
prostatectomie radicale chez tous les patients retenus pour
cette approche chirurgicale. L’IRM-mp devrait être réalisée idéalement avant la biopsie, afin d’éviter des artéfacts
liés aux hématomes post-biopsiques, événements fréquents
comme le démontre notre série. Cependant, dans un bon
nombre d’institutions l’accès à l’IRM étant limité, elle
est réalisée dès l’obtention de la preuve histologique de
cancer.
Nous rapportons des taux de sensibilité et de spécificité
d’IRM-mp pour mettre en évidence une EEC de respectivement 67 % et 90 %, avec une précision globale de 86 %
et ce malgré la présence d’hématome intraprostatiques.
Ces résultats sont comparables à d’autres données publiées
avec l’utilisation des appareils d’1,5 T. Futterer et al. ont
rapporté une sensibilité de 57 % avec une spécificité de
96 % et une précision globale de 80 % pour la détection de
l’EEC lors de l’utilisation d’une antenne endorectale chez
81 patients consécutifs ayant eu une IRM-mp 1,5 T en préopératoire [6].
Ogura et al. [4] ont testé une IRM-mp 1,5 T en préopératoire chez 38 hommes japonais consécutifs avant de subir
une chirurgie radicale. La sensibilité de l’EEC a été évaluée
à 59 %, la spécificité à 88 % et la précision à 72 % [18]. De
manière similaire, de Vendin et al. ont examiné rétrospectivement 215 hommes opérés d’une prostatectomie radicale
qui avaient bénéficié d’une IRM-mp 1,5 T en préopératoire
[19]. Malgré une spécificité de 96 % et une valeur diagnostique de 79 % pour l’EEC, l’examen ne s’est pas démontré
supérieur aux nomogrammes de Partin et Kattan.
De toute évidence, ces taux sont variables d’une étude
à l’autre et dépendent de l’expertise du radiologue, du
délai de réalisation de l’examen radiologique après la biopsie, des protocoles d’étude et de l’équipement en station
IRM. Il est nécessaire de souligner l’importance d’un uroradiologue expert dans le domaine dédié à la lecture des
IRM-mp dans l’aide à la prise de décision thérapeutique
adaptée à chaque patient. Ceci peut être conforté par
d’autres études aux résultats discordants avec ceux que nous
rapportons. Ainsi, Albert et al. ont analysé de manière prospective 158 patients ayant subi une prostatectomie radicale,
parmi lesquels 122 avaient passé une IRM-mp après les biopsies prostatiques [20]. Dans leur étude, l’IRM a montré une
exactitude de seulement 64,6 %, attribuée selon les auteurs
5
au manque d’expérience de leurs radiologues dans la lecture
des IRM-mp prostatiques.
La faible sensibilité de l’IRM-mp pour identifier une
EEC est due au caractère microscopique de certaines EEC.
De fait, la sensibilité augmente proportionnellement à la
taille de l’EEC [12]. Bien que la détection de l’EEC semble
s’améliorer avec l’IRM-mp 3 T [14], la nature microscopique
d’une telle extension cancéreuse restera probablement difficile à visualiser avec une IRM conventionnelle. Cependant
dans cette cohorte, l’EEC détectée par IRM-mp a permis de
prédire de façon significative une EEC histologique, contrairement au PSA et au score de Gleason obtenus sur les
biopsies. Le score de Gleason n’était probablement pas un
facteur prédictif significatif dans notre série, en raison du
taux élevé de sous-stadification après biopsies dans notre
hôpital. En conséquence, nos résultats ne sont peut-être
pas applicables à d’autres réalités. L’IRM-mp a également
permis de prédire de façon significative le côté de la lésion
de référence, ce qui peut avoir un impact sur la décision
d’effectuer ou non une procédure de préservation vasculonerveuse uni- ou bilatérale. Ces résultats confirment que
l’IRM-mp réalisée en préopératoire a toute son importance
car elle donne des renseignements précieux au chirurgien afin d’adapter l’information apportée au patient d’une
part, et sa stratégie opératoire d’autre part. Dans cette
série, il convient de rappeler que 50 % des patients présentant une EEC histologique avaient des profils de risque
intermédiaire selon d’Amico. Il n’existe à ce jour aucun
consensus sur la question de savoir si l’imagerie préopératoire de la prostate est nécessaire pour ces profils de
risque [9,21].
Cette étude présente bien entendu ses limites. Il s’agit
d’une étude monocentrique avec un faible nombre de cas et
de ce fait un nombre limité de patients présentant un profil
de maladie à haut risque. À ce titre, les analyses statistiques
manquent de fondement et aucune conclusion basée sur des
preuves ne peut être déduite. La sous-stadification élevée
du score de Gleason après biopsies dans notre population
peut être responsable de l’absence du caractère prédictif
des biopsies pour une EEC, contrairement à d’autres études
[17,18]. Cela renforce toute la valeur de l’IRM-mp réalisée par un radiologue expert. La réalisation de l’IRM-mp
4 semaines après les biopsies, pour des questions logistiques,
entraîne un risque de modification de la lecture des images
potentiellement suspectes liées aux hématomes prostatiques pouvant être encore présents. Malgré ses limitations,
cette évaluation de nos pratiques a permis de mettre en évidence l’intérêt de l’IRM-mp de la prostate en préopératoire
avec la prédiction significative du côté de la lésion de référence et l’EEC, donnant ainsi des informations précieuses au
chirurgien [1].
Conclusions
L’IRM-mp, réalisée après biopsies de la prostate et avant
chirurgie, a été capable de prédire de façon significative
l’extension extracapsulaire et le côté de la lésion de référence. D’autres études sont nécessaires pour définir la place
de cet examen en préopératoire et identifier les patients les
plus susceptibles de bénéficier de toutes les informations
qu’il peut fournir.
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S. Albisinni et al.
Déclaration de liens d’intérêts
Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts.
Références
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Pour citer cet article : Albisinni S, et al. L’IRM de la prostate préopératoire avant prostatectomie radicale peut-elle prédire l’extension extracapsulaire et le côté de la lésion de référence ? Prog Urol (2016),
http://dx.doi.org/10.1016/j.purol.2016.02.006