TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE MONTPELLIER N°1606104

Transcription

TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE MONTPELLIER N°1606104
NP
TRIBUNAL ADMINISTRATIF
DE MONTPELLIER
N°1606104
___________
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
LDH
M. GARCIA
___________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Mme Marianne Hardy
Juge des référés
___________
Le juge des référés
Ordonnance du 14 décembre 2016
__________
01-04-03
54-035-02-03-02
C
Vu la procédure suivante :
Par une requête enregistrée le 9 décembre 2016, l’association la Ligue française pour la
défense des droits de l’homme et du citoyen (LDH) et M. David Garcia, représentés par Me
Mazas, demandent au juge des référés :
1°) de suspendre l’exécution de la décision du maire de Béziers d’installer une crèche de
la nativité au sein de l’hôtel de ville pour les fêtes de fin d’année 2016 ;
2°) de condamner la commune de Béziers à leur verser une somme de 2 000 euros en
application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
la LDH a intérêt pour agir dès lors que la décision contestée a pour effet
d’affecter le principe de laïcité ; M. Garcia, biterrois, habitant, contribuable et administré
ressortant des services publics hébergés à l’hôtel de ville, a intérêt pour agir dès lors qu’il se sent
atteint et choqué par cette démonstration religieuse ;
la condition d’urgence est remplie puisque la décision contestée porte atteinte
au principe de laïcité et de neutralité des services publics, qu’elle a vocation à recevoir
application jusqu’aux fêtes de fin d’année et que le tribunal ne se sera pas prononcé sur la
requête en excès de pouvoir dans un délai si rapproché ; qu’en outre la décision attaquée est
caractéristique d’une situation susceptible de troubler l’ordre public ;
il existe un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée ; en effet
cette décision méconnaît le principe de laïcité, dès lors qu’elle est installée au sein même de
l’hôtel de ville et qu’aucune circonstance, en dehors des fêtes de fin d’année, ne vient conférer à
cette installation un caractère culturel, artistique ou festif et elle méconnaît également le principe
de non financement des cultes et le principe de neutralité du service public.
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Vu :
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la requête numéro 1606105 par laquelle la LDH et M. Garcia demandent
l’annulation de la décision du maire de Béziers d’installer une crèche de la
nativité au sein de l’hôtel de ville pour les fêtes de fin d’année 2016 ;
les autres pièces du dossier.
Vu le code de justice administrative.
Le président du tribunal a désigné Mme Hardy, vice président, pour statuer sur les
demandes de référé.
1. Considérant que l’association la Ligue française pour la défense des droits de
l’homme et du citoyen (LDH) et M. Garcia demande au juge des référés, sur le fondement de
l’article L. 521-1 du code de justice administrative, d’ordonner la suspension de l’exécution de la
décision du maire de Béziers d’installer une crèche de la nativité au sein de l’hôtel de ville pour
les fêtes de fin d’année 2016 ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :
« Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou
en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension
de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il
est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la
légalité de la décision (...) » ; qu'aux termes de l'article L. 522-1 dudit code : « Le juge des
référés statue au terme d'une procédure contradictoire écrite ou orale. Lorsqu'il lui est demandé
de prononcer les mesures visées aux articles L. 521-1 et L. 521-2, de les modifier ou d'y mettre
fin, il informe sans délai les parties de la date et de l'heure de l'audience publique (...) » ; que
l'article L. 522-3 du même code dispose : « Lorsque la demande ne présente pas un caractère
d'urgence ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la
compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée, le
juge des référés peut la rejeter par une ordonnance motivée sans qu'il y ait lieu d'appliquer les
deux premiers alinéas de l'article L. 522-1 » ; qu’enfin aux termes du premier alinéa de l’article
R. 522-1 dudit code : « La requête visant au prononcé de mesures d’urgence doit (...) justifier de
l’urgence de l’affaire » ;
3. Considérant que l'urgence justifie que soit prononcée la suspension d'un acte
administratif lorsque l'exécution de celui-ci porte atteinte, de manière suffisamment grave et
immédiate, à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre ;
qu'il appartient au juge des référés d'apprécier concrètement, compte tenu des justifications
fournies par le requérant, si les effets de l'acte litigieux sont de nature à caractériser une urgence
justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l'exécution de la décision soit
suspendue ; que l’urgence doit être appréciée objectivement compte tenu de l’ensemble des
circonstances de l’affaire ;
4. Considérant que l’illégalité alléguée de la décision litigieuse, et notamment la
méconnaissance des principes de laïcité, de neutralité du service public et de non financement
des cultes, ne caractérise pas, à elle seule, une situation justifiant que, sans attendre le jugement
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de la requête au fond, l’exécution de la décision soit suspendue ; que la circonstance que le
tribunal ne pourra pas se prononcer sur les conclusions tendant à l’annulation de la décision
contestée avant qu’elle ait produit tous ses effets ne saurait davantage, à elle seule, caractériser
une situation d’urgence au sens des dispositions précitées de l’article L. 521-1 du code de justice
administrative ; que si les requérants invoquent les troubles à l’ordre public que l’installation de
la crèche de la nativité est susceptible d’engendrer sur la commune, les troubles dont ils font état
sont liés à d’autres décisions prises par le maire de Béziers mais sont sans lien direct avec la
décision contestée ; que les requérants ne produisent aucun document de nature à établir que la
présence, depuis plus de 10 jours à la date de la présente ordonnance, de cette crèche de la
nativité dans les locaux de l’hôtel de ville aurait provoqué des troubles à l’ordre public ; qu’enfin
ni la LDH ni M. Garcia n’établissent que la décision contestée porterait à leur situation ou aux
intérêts qu’il défendent une atteinte dont la gravité justifierait sa suspension ; que, dès lors, la
condition d’urgence, qui doit s’apprécier objectivement et globalement, n’est pas remplie ; que,
par suite, l’une des conditions posées par l’article L. 521-1 du code de justice administrative
n’étant pas remplie, il y a lieu de rejeter la requête de la LDH et de M. Garcia selon la procédure
prévue par les dispositions précitées de l’article L. 522-3 du code de justice administrative y
compris les conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice
administrative ;
ORDONNE:
Article 1er : La requête de la Ligue française pour la défense des droits de l’homme et du citoyen
et de M. Garcia est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à l’association la Ligue française pour la défense
des droits de l’homme et du citoyen et à M. David Garcia.
Fait à Montpellier, le 14 décembre 2016.
Le juge des référés
Signé :
M. HARDY
La République mande et ordonne au préfet de l’Hérault en ce qui le concerne et à tous
huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties
privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
Montpellier, le 14 décembre 2016
Le greffier,
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N. PAULET
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