Extrême droite

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Extrême droite
Sommaire
| FOCUS |
02 Face
à l’extrême droite
Par Jean Merckaert
Agir
54 La
politique peut-elle
encore faire rêver ?
Avec M. Barnier, C. Lepage et D. Potier
| EN DÉBAT |
Extrême droite
06 L’histoire
ne se répète pas
Par Olivier Dard
11 Les
constantes du vote
Front national
62 « Il
faut repenser
la protection sociale »
Avec Nicolas Duvoux
65 Le
pari de l’innovation
Par François Ernenwein
68 Le
rôle de la société civile
Par Jean-Marie Fardeau
Par Nonna Mayer
73 Les
Écouter
Par Elena Lasida
15 Pourquoi
le FN séduit ?
nuits sont enceintes…
77 Arrêtons
l’humiliation !
Par Olivier Abel
15 Entre plages et bocage,
par Aurore Chaillou
| POURSUITE |
19 Chez les jeunes, par Anne Muxel
21 Les pompiers et la flamme frontiste, par
Charlotte Torretti
24 En banlieue, par Mohamed Mahieddine
26 Parmi les bénévoles et les personnes en
galère, par Jean-Marc Boisselier
Par Jean-Philippe Pierron
84 L’écologie,
lieu d’une
renaissance spirituelle
| LECTURE |
35 La
90 Zoom sur C. Beauchemin,
C. Hamel et P. Simon (dir.)
« Trajectoires et origines.
Enquête sur la diversité des
populations en France » Par
Par Valérie Igounet
Edwin Hatton
92 Instantanés
Comprendre
29 Le
FN est-il républicain ?
Avec Sylvain Crépon
conversion sociale
du FN, mythe ou réalité ?
41 Note
au Premier ministre
Par Henri Lefort
46 Aux
chrétiens tentés
par le FN
| REGARD |
Par G. Catta, B.-M. Duffé, D. Fontaine,
Au fil des pages, un portfolio
indépendant des articles du numéro
A. Nouis, D. Quinio, B. Saintôt, J. Vignon
Encadrés
47 Chez les catholiques, la relative bana-
lisation du vote FN, par Yann Raison du
Cleuziou
76 Une laïcité avec les religions, par
Dominique Fontaine
Photographe invitée : Aurore Chaillou
Couverture : Série « Moins loin, plus de liens »,
France, 2016.
Face à
l’extrême droite
Jean Merckaert est rédacteur en chef de la « Revue Projet ».
L
es idées d’extrême droite ne cessent de progresser, dans
les discours et dans les urnes. En France, le Front national
perce y compris parmi les jeunes, les fonctionnaires, les
femmes, les catholiques, voire chez les enfants d’immigrés,
des catégories de population que l’on croyait, jusqu’ici, plus hermétiques. Le phénomène interroge.
Pour beaucoup, ce vote est délibérément transgressif. Qui n’a
jamais éprouvé de colère devant l’hypocrisie de certains responsables politiques ? Qui ne s’est jamais senti moqué, voire trahi
par le fossé entre les paroles et les actes ? Qui n’a jamais été tenté
par une forme de désespérance quand les majorités successives
semblent impuissantes à proposer un autre cap ? Quand ces
sentiments rencontrent une réalité marquée par l’inquiétude
quant à l’avenir des enfants, la précarisation du travail et des
liens sociaux, la raréfaction des services publics de proximité,
comment s’étonner qu’ils se muent en ressentiment envers des
élites qui semblent sourdes à leurs cris ? Alors on ne vote pas.
Ou, sans même souhaiter sa victoire, on vote FN, en forme de
bras d’honneur.
Chez d’autres, le discours convainc – et ne voir dans leur choix
que l’expression d’un ressenti serait leur faire injure. Le cadre
d’analyse frontiste répond à une soif de comprendre le monde.
Il met des mots intelligibles sur des maux vécus. Faut-il vraiment
s’étonner que prospère un discours qui met en avant la protection
des petites gens, la sauvegarde des services publics, la reconquête
d’un pouvoir d’agir du politique, la défense de repères identitaires
dans un monde qui bouge si vite ?
Le FN a beau jeu d’instrumentaliser ces légitimes préoccupations.
De se prétendre le meilleur défenseur des valeurs républicaines.
REVUE PROJET - N° 354 - OCTOBRE 2016 |2
De faire miroiter le retour illusoire d’une France glorieuse, en prenant soin de taire l’alignement de sa politique étrangère derrière
Poutine. De draper son nationalisme dans les atours sociaux de
l’État-providence pour élargir son audience, tout en cultivant un
poujadisme anti-étatiste pour satisfaire son électorat traditionnel. En France, comme ailleurs en Europe, l’extrême droite est
un leurre, mais les ingrédients qui font son succès sont bien là.
S’il est nécessaire qu’au nom des valeurs humanistes ou évangéliques, des autorités morales et religieuses tracent des lignes
rouges à l’attention des indécis, les condamnations seront vaines
face au SOS lancé par nombre d’électeurs du FN. Car leur revendication première est existentielle. Exister. Être reconnus. Compter
pour la société, et que la société compte sur eux. En témoignent
certains territoires, où des projets économiques, sociaux, sportifs,
culturels ou religieux suscitent des rencontres et contribuent à
souder les habitants, à forger une fierté collective. À éloigner les
sentiments d’humiliation, d’abandon ou d’impuissance.
Mais la réponse à l’extrême droite ne saurait être uniquement
de proximité. La lutte contre le chômage, les inégalités d’accès
aux services publics, la refondation du système de protection
sociale, la crise du monde agricole, les dérives de la finance, le
climat… appellent des réponses politiques nationales ou européennes, voire mondiales. Si tous nos responsables politiques et
les médias qui leur servent de caisse de résonance déployaient
autant d’énergie pour la faim dans le monde, le mal-logement ou
la sortie de l’ère du pétrole que pour une tenue de bain érigée en
menace pour la France, aboutirait-on aux mêmes résultats électoraux ? S’ils nous expliquaient, comme le font certains, le vécu des
Érythréens, des Afghans et des Syriens, plutôt que de représenter
le migrant comme une menace, les réfugiés ne recevraient-ils pas
meilleur accueil dans notre pays ? Si les images en boucle de faits
violents faisaient droit au silence nécessaire à la prise de recul
ou à des initiatives enthousiasmantes, peut-être s’apercevraiton que nos peurs sont largement construites. Et qu’aussi grands
soient les défis, il n’est pas interdit de rêver. Ici réside sans doute
la priorité du politique : être capable, à nouveau, d’imaginer et
de poursuivre un horizon commun.
3| FACE À L’EXTRÊME DROITE

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