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#REPÈRES ET TENDANCES "CONJONCTURESS
" DOSSIER
# LIVRES ET IDÉES
« Guerre et paix
au XXe siècle »
BERNARD CAZES
I
l va de soi que les articles figurant dans cette section résultent d’une rencontre largement aléatoire entre deux
auteurs : celui du livre et celui de la recension. Aucune main
invisible – pas plus que visible d’ailleurs – ne garantit que l’ensemble desdits articles fera apparaître un pattern1 qui fasse sens.
À défaut, essayons de formuler quelques vues générales que
peut inspirer la lecture de la « récolte » du n° 55.
cante, qu’il n’en est rien, et avance l’idée quelque peu sacrilège
que l’atrocité des conflits n’est que le reflet lointain de la
démocratisation du pouvoir. Mais à lire les commentaires de
Dominique David consacrés au nouveau livre de Colin Gray, il
n’y a pas de raison d’espérer la divine surprise d’une disparition des guerres : la seule surprise résidera dans les formes
qu’elles prendront !
De l’article de Patrick Chamorel, rédigé avant les élections
américaines, on doit dire que si même Kevin Philips a jugé bon,
quelques mois auparavant, de prendre pour cible les forces
politiques républicaines qu’il avait pourtant tellement contribué à faire émerger dans son best-seller de 1960, a fortiori, la
coupe était probablement pleine chez beaucoup d’électeurs
des blue States…
Avec le papier de Christian Morrisson, on aborde un terrain
hautement controversé, celui de l’efficacité de l’aide au développement. Il en fait ressortir le caractère extraordinairement
contrasté des situations : globalement, sur la période 19501900, les pays aidés moins que la moyenne ont eu le même
taux de croissance que ceux qui l'ont été plus que la moyenne.
On constate en même temps des cas de réussite tout à fait
remarquables au niveau du terrain. D’où la proposition d’introduire davantage de mises en concurrence, et d’aider les microexpériences qui réussissent en coupant les crédits alloués aux
autres.
Comme il est (encore) politiquement incorrect de mettre sur
le même plan les deux idéologies tératogènes du XXe siècle,
nazisme et stalinisme, on se bornera à rapprocher deux articles les concernant : d’une part Stéphane Courtois, sur la très
brève période où le pouvoir soviétique se contentait, si l’on
peut dire, d’exiler les intellectuels mal pensants tels que le philosophe Nicolas Berdiaev ou Pitirim Sorokin, futur directeur
du département de sociologie de Harvard, et d’autre part
Pierre Ayçoberry, sur le fonctionnement de la machine de
guerre nazie, analyse dont on n’ose pas espérer qu’elle pourrait amener le président Ahmadinejad à réviser sa vision finalement très post-moderne de l’Holocauste comme
construction sociale.
Avec le XXe siècle, le monde a-t-il vraiment été saisi d’une
ivresse de carnage ? C’est ce qu’affirme l’historien Niall
Ferguson. Pierre Béhar soutient, de façon à mon avis convain-
1. Mot intraduisible, que « patron » ne rend malheureusement pas.
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Sociétal N° 55
!
1er trimestre 2007
P.S. Il n’est pas d’usage ici de commenter des œuvres de fiction, mais je me permettrai une exception pour vous
conseiller la lecture d’un curieux roman policier, A Death in
Vienna, de Frank Tallis (Grove Press), histoire d’un meurtre en
lieu clos qui se déroule à Vienne en 1913, et où l’on voit un
certain docteur Freud refuser de s’intéresser à l’enquête car
une seule chose lui semble importante : faire provision d’histoires juives pour un futur livre sur Le Mot d’esprit dans ses
rapports avec l’inconscient.