Dossier travail CH13

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Enfin, au-delà de toutes ces explications rationnelles, il est également très important pour une
entreprise étrangère d'apparaître comme suffisamment "locale" aux yeux de ses clients pour ne pas
susciter une hostilité qui pourrait nuire à son développement. Bref, si les multinationales se sont
souvent tournées en priorité ces dernières années vers les pays émergents plutôt que vers les vieux
pays industrialisés pour développer leurs activités, c'est pour une bonne part parce qu'elles
anticipaient que la croissance de leur débouchés y serait nettement plus forte à l'avenir.
Avoir accès à des ressources rares
L'autre motivation qui pousse une entreprise à localiser ses activités à un endroit plutôt qu'à un autre,
c'est l'accès à des ressources rares: du personnel spécialisé qualifié, des laboratoires de recherche,
des réseaux de fournisseurs et de sous-traitants qui connaissent bien telle ou telle activité…
Contrairement à la précédente, cette problématique pousse au contraire au regroupement d'activités
particulières à l'échelle mondiale. Mais pas forcément dans des zones à bas coût de main-d’œuvre.
C'est en effet cette logique qui a poussé à une extraordinaire concentration des entreprises des
technologies de l'information et de la communication dans la Silicon Valley, sur la côte ouest des
Etats-Unis, ou encore au rassemblement de l'essentiel de la finance européenne à Londres. Bien que
ces zones figurent également parmi les plus chères du monde en termes de prix du mètre carré ou de
salaires moyens, y compris pour des tâches peu qualifiées…
C'est aussi ce qui explique la concentration de l'industrie italienne dans le nord-est du pays, bien que
les coûts soient très supérieurs à ceux du Mezzo Giorno, ou encore le succès de l'industrie des biens
d'équipements en Allemagne du Sud ou en Suisse, alors que les salaires y sont beaucoup plus
importants que ceux versés dans la France voisine. Les gains d'efficacité procurés via l'effet de
réseau lié à la concentration des spécialistes font plus que compenser ces surcoûts. Ces
délocalisations vers des zones riches mais dynamiques sont probablement aussi menaçantes pour
nombre d'industries françaises que les délocalisations vers les pays émergents.
Quand les multinationales déstabilisent le Nord
Nous avons développé jusqu'ici les éléments qui relativisent le dumping social lié aux stratégies de
localisations des firmes. Est-ce à dire qu'il s'agirait d'un faux problème Silicon Valley?
Malheureusement non. C'est ce que traduisent en particulier les évolutions rapides des flux
commerciaux ces dernières années. L'industrie automobile, par exemple, très longtemps fournisseuse
d'excédents commerciaux conséquents pour l'économie française, est devenue déficitaire en l'espace
de peu de temps. Par ailleurs, l'essor industriel de la Chine s'est traduit par des excédents
commerciaux de plus en plus énormes: 270 milliards de dollars en 2007. Ils sont l'un des facteurs de
déséquilibre majeur de l'économie mondiale.
Ces déséquilibres croissants sont liés notamment à la mise hors circuit, par les multinationales, d'un
des mécanismes fondamentaux qui permettait jusque-là que le commerce international se développe
dans un monde très inégalitaire sans pour autant déstabiliser les sociétés des pays riches. On
observait en effet traditionnellement une relation étroite entre coût du travail et productivité: les pays
où le coût du travail était bas étaient aussi ceux où sa productivité était faible, parce que les salariés
avaient peu de qualifications, les infrastructures étaient insuffisantes, l'administration corrompue… Et
grosso modo, l'un compensait l'autre.
Mais l'intervention des multinationales a bouleversé cet état de fait: en transférant leur savoir-faire en
matière d'équipement, d'organisation du travail, etc., elles ont fait en sorte qu'une usine roumaine ou
chinoise ait une productivité équivalente à une usine française ou allemande, malgré un coût du travail
cinq ou dix fois plus faible. Voire une productivité supérieure puisque, neuve, elle sera dotée des
derniers perfectionnements de la technologie. Et cela bien que l'environnement extérieur du pays
reste marqué par des faiblesses importantes en termes d'infrastructures, d'efficacité administrative,
etc. Ces multinationales n'hésitant plus à fermer ce type d'usine pour en ouvrir ailleurs si les
conditions en termes de coûts deviennent moins favorables dans le pays en question.
C'est pourquoi le dumping social des firmes exercé via leurs stratégies de localisation devient bien un
problème croissant pour les pays développés, même si certains éléments évoqués plus haut
relativisent ce risque. Un risque d'autant plus présente que, dans le même temps, les développements
des technologies de l'information et de la communication étendent cette problématique à des secteurs
d'activité de plus en plus nombreux. On l'observe déjà en matière de comptabilité ou avec les centres
d'appels…
Le développement des produits "glocaux"
L'automobile fournit un bon exemple des stratégies mises en oeuvre par les multinationales pour
unifier le marché mondial tout en tenant compte des spécificités locales. Une quinzaine de
constructeurs automobiles (dont sept européens) se partagent la production des 70 millions de
voitures vendues chaque année dans le monde. Pour bénéficier d'économies d'échelle tout en offrant
Partie 3: L’approche structurelle des organisations
CH13 Des structures qui intègrent le changement :
les nouvelles formes d’organisation
Gérard Lécrivain
Document 1 Rester ou délocaliser? G. Duval Alternatives Economiques Hors-série n° 079 décembre 2008
Il n'y a pas que le coût. Les raisons pour lesquelles les entreprises s'implantent à tel endroit plutôt qu'à
tel autre sont diverses. Le jeu des multinationales dans les pays à bas coûts déstabilise cependant les
pays développés.
Les entreprises sont fréquemment accusées de pratiquer des politiques de localisation qui privilégient
les territoires qui leur imposent le moins de contraintes sociales et environnementales. Elles
déstabilisent ainsi les modèles sociaux des pays développés. C'est en effet le cas, mais la recherche
du moindre coût est loin d'être la seule motivation qui pousse une entreprise à s'installer à un endroit
plutôt qu'à un autre.
Etre près du client
Tout d'abord, les entreprises tendent à implanter leurs activités à proximité de leurs clients. Quels que
soient les progrès réalisés en matière de transports et de logistique, ceux-ci restent en effet coûteux et
le seront probablement de plus en plus à l'avenir, sous la pression des difficultés environnementales
que nous rencontrons. Surtout, le principal moyen d'effectuer des transports lointains à des conditions
économiques acceptables est le transport par bateau. Or celui-ci implique de longs délais ainsi que
des phases de transbordement et de traitement administratif aux frontières. Même si le fret maritime
s'est beaucoup développé ces dernières années, suite notamment à la montée en puissance
industrielle de la Chine, ce mode d'approvisionnement reste peu adapté à des métiers où la réactivité
vis-à-vis de la demande du client est centrale. Et ceux-ci sont de plus en plus nombreux. C'est la
raison pour laquelle, par exemple, la chaîne espagnole de vêtements Zara continue de faire fabriquer
l'essentiel de sa gamme en Europe ou dans les zones limitrophes, malgré l'avantage considérable en
termes de coûts dont bénéficie en théorie le textile chinois.
Dans le même ordre d'idée, les équipementiers automobiles implantent de plus en plus souvent de
petites unités à proximité des usines d'assemblage des constructeurs automobiles pour pouvoir les
livrer en justeà- temps. Par ailleurs, une firme aussi symbolique que Coca-Cola n'exporte quasiment
rien depuis les Etats-Unis: ses produits sont toujours embouteillés sur place (1). C'est également le
cas de multinationales, comme McDonald's, qui multiplient les ateliers de production à proximité
immédiate du client final. Les progrès des technologies de l'information et de la communication
permettent aux grandes entreprises multinationales d'organiser une décentralisation croissante de leur
production, sans pour autant cesser de bénéficier des économies d'échelle que leur taille mondiale
permet.
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CH13 Dossier de travail
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des voitures correspondant aux attentes et aux habitudes locales, ils choisissent majoritairement la
stratégie dite "volume et diversité".
Elle a été imaginée dans les années 20-30 par Alfred Sloan, alors patron de General Motors. Il s'agit
de mettre en commun le maximum de pièces "invisibles" comme le châssis, le moteur, la
transmission, dans un sous-ensemble appelé "plate-forme". Laquelle est complétée par des éléments
"visibles", adaptés aux attentes et aux habitudes des consommateurs locaux.
Par exemple, avec une plate-forme commune à toutes les Logan, Dacia et Renault offriront des
berlines tricorps dans les pays d'Europe centrale et orientale et des voitures bicorps avec hayon au
Brésil ou en Algérie. Lorsque le produit est bien implanté, la marque lance d'autres modèles, en
espérant qu'ils séduiront d'abord les acheteurs innovants, puis beaucoup d'autres. C'est ainsi qu'elles
construisent un consommateur global, de moins en moins attaché à ses habitudes nationales.
(1) Ses activités sont d'ailleurs sur ce plan nettement plus écologiques que la vente à l'échelle
mondiale d'eaux minérales type Evian ou Perrier, ou encore de Champagne ou de vins de Bordeaux.
Document 3
Document 2
Document 4 L’organisation en projet
Document 5 L’organisation en réseau
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adéquat. D'autant que les coûts de transport ne représentent plus que 1 à 3 % du prix de revient d'un produit
fini.
A ceci s'ajoute bien sûr l'ouverture des marchés et la baisse/ disparition des droits de douanes entre Etats qui
est négociée dans la cadre du GATT puis de l'OMC afin de libéraliser le commerce mondial.
Document 6 Des exemples d’organisation en réseau
LE SYSTEME NIKE : UN STRUCTURE LEGERE, SOUPLE ET HIERARCHISEE
Le système Nike est une structure légère, souple et hiérarchisée qui peut être analysée selon un modèle
centre/ périphérie, au plan organisationnel et territorial.
Si la firme passe de 3 400 emplois directs à 18 000 entre 1986 et 2005 (+ 14 600 sal., x 4,2), elle demeure de
relativement petite taille par rapport à son chiffre d'affaires et à son volume mondial de production. Ce centre
fonctionnel constitue le cœur stratégique (commandement), technique (innovation), économique (société
mère, remontée des profits) et spatial en étant centré sur les Etats-Unis qui ne représentent pourtant au total
que 3 % des emplois mondiaux, directs et surtout indirects, de la firme.
Nike s'entoure en effet d'un très vaste dispositif productif qui mobilise en externe - par un recours
systématique à la sous-traitance – 652 900 salariés en 2004. Cet exemple témoigne bien du fait qu'il n'y a
absolument disparition de l'industrie, de la production matérielle et de la classe ouvrière. Mais ces deux
composantes sont rejetées en périphérie et mobilisées par le centre selon ses besoins.
Emplois directs = 18 000 salariés ; Emplois mondiaux : 652 926 en 2004 (550 000 en 2001)
Rapports emplois USA/ Monde : USA pèse seulement 2,7 % emplois mondiaux
Le tout dessine un très vaste réseau aux articulations mondiales, continentales et nationales de flux internes
et externes à la firme transportant et livrant informations (demande des marchés, choix de nouveaux
produits…), capital et produits matériels.
Document 7 LES FIRMES-RESEAUX DU TEXTILE : NIKE, POUR LE MEILLEUR ET POUR
LE PIRE ?
Extraits - Carroué Laurent- Université Paris VIII
Entreprise apprenante (entreprise organisée comme un système en
apprentissage permanent )
Document 8
Le textile représente 25 millions de salariés dans le monde,
Les coûts de main-d'œuvre représentent 50 à 60 % du coût total de production,
Les délocalisations y sont devenues essentielles dans la nouvelle Division Internationale du Travail pour
fabriquer à bas prix des produits réexportés ensuite vers les pays développés sans s'adresser pour l'essentiel
au marché local. Les délocalisations et le système de marques textiles (cf Nike) vendues assez cher
permettent de dégager des marges bénéficiaires colossales.
Le concept d'entreprise apprenante («learning organization») a acquis ses lettres de noblesse aux Etats-Unis
d'abord, avec la publication, en 1990, du livre de Peter Senge, «The Fifth Discipline». Ce directeur d'un
centre de recherche au MIT (Massachusetts Institute of Technology) y annonçait que l'entreprise de demain
serait apprenante ou ne serait pas.
Le concept d'entreprise apprenante affirme que le travail doit offrir par lui-même la possibilité d'un
apprentissage permanent. Le travail opérationnel doit se mêler et s'intégrer à l'apprentissage. Une entreprise
sera donc apprenante quand toute son organisation tendra à proposer à ses membres des opportunités
d'expérimentation et une palette d'activités correspondant à la diversité de leurs aptitudes. L’autre idée
nouvelle liée au concept d'entreprise apprenante tient à la notion d'apprentissage à plusieurs, pas seulement
les uns à côté des autres, mais en complémentarité les uns des autres, par l'échange des connaissances, des
savoir-faire, des expériences et par leur fertilisation croisée. Seul cet échange garantit en effet la montée en
compétence des collaborateurs. Il se conçoit en interne, mais également avec les fournisseurs, les clients, les
entreprises partenaires...
Au-delà de l'aspect formateur, la finalité de l'entreprise apprenante est de développer l'adaptabilité, la
réactivité et l'employabilité (la capacité à s'adapter à différents métiers) de ses collaborateurs. Mais, attention
: pour devenir apprenante, l'entreprise doit déjà avoir fait évoluer ses modes de management. Difficile
d'imaginer partager et échanger le savoir dans des entreprises hiérarchisées, cloisonnées, constituées en une
mosaïque de pouvoirs.
Seules celles qui ont adopté une structure plus horizontale que verticale peuvent prétendre devenir de
véritables «learning organizations». L’encadrement, surtout intermédiaire, ne doit pas non plus assimiler le
partage du savoir à une perte de pouvoir. Une évolution culturelle s'impose : il faut redéfinir la notion même
de manager en insistant sur le rôle pédagogique du «chef». En intégrant, par exemple, dans les processus
d'évaluation de l'encadrement sa capacité à faire progresser les membres de l'équipe. L’organisation
apprenante implique enfin un climat de confiance : les salariés doivent pouvoir apprendre et échanger, sans
arrière-pensées ni complexes, sans craindre qu'un autre s'approprie leurs idées ou sans s'épuiser pour les faire
entendre à leur hiérarchie.
Concept voisin : Apprentissage organisationnel : souvent employé comme synonyme d’entreprise
apprenante, il n'en constitue pourtant qu'une des facettes. L’entreprise apprenante se décline sur trois niveaux
l'individu, l'équipe et l'organisation. L'apprentissage organisationnel caractérise donc la capacité de
l'entreprise à favoriser en son sein l'apprentissage permanent.
Dans cette nouvelle DIT, le taylorisme de masse n'est pas du tout dépassé. Jamais la production de masse
fordiste n'a été historiquement aussi puissante dans le monde en valeur et en volumes de production. Mais
elle s'est largement déplacée géographiquement vers les pays à bas salaires.
UNE INNOVATION MAJEURE : « UNE ENTREPRISE SANS USINE »
La réussite de Nike se fonde sur une importante nouveauté stratégique qui constitue alors une véritable
innovation managériale et productive : sous-traiter dès le départ complètement la fabrication matérielle
concrète à l'échelle nationale puis peu à peu mondiale. Ce processus d'externalisation juridique, économique,
sociale, technique et géographique débouche sur l'apparition de la 1ère véritable firme- réseau sans usines.
Depuis cette organisation se diffuse dans les décennies 1980 et 1990 à l'ensemble des grandes firmes du
textile- habillement comme Reebook, Sara Lee, Levi Strauss, Warnaco ou Benetton.
Ce modèle est ensuite repris dans les années 1990/ 2000 par les centrales d'achat des transnationales de la
distribution de masse.
Ainsi, l'allemand Quelle, qui réalise la moitié de son chiffre d'affaires dans le textile dans les années 1990,
achète les deux tiers de ses produits hors d'Europe, tout particulièrement en Asie (Hong Kong, Chine,
Philippines, Vietnam) et en Afrique (Maghreb, Madagascar et Ile Maurice) grâce à 25 bureaux d'achats
répartis dans le monde et qui mettent en compétition l'ensemble des pays du Sud. En France, les centrales
d'achat des grands groupes de la distribution (Auchan, Carrefour…) font de même.
Mais ce modèle ne tombe pas du ciel. Il n'est rendu possible que grâce à deux mutations majeures.
La révolution des transports (télécommunications et informations, transports maritimes et frets par porteconteneurs) dont les coûts baissent considérablement et dont la rapidité et l'efficience s'améliorent
sensiblement. En fait, il ne peut exister de firmes-réseaux sans usines sans un réseau mondial de transport
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