La police municipale d`Abbeville pourrait être armée
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La police municipale d`Abbeville pourrait être armée
PICARDIE MARITIME 8 CRÉCY-EN-PONTHIEU Les défis d’Immo Ouest SECOURS Le transporteur a grandi en peu de temps, dans un secteur d’activité ultra concurrentiel. Page 13 COURRIER PICARD MERCREDI 21 JANVIER 2015 Danger pour les casernes EU Les centres de première intervention des pompiers de Béthencourt et Miannay sont menacés. Page 14 Un break au Rayon de soleil La ludothèque propose un rendez-vous mensuel pour permettre aux adultes d’échanger entre eux. Page 17 SÉCURITÉ La police municipale d’Abbeville pourrait être armée Lors d’une rencontre avec les délégués CFTC de la police municipale, le maire, Nicolas Dumont, s’est dit ouvert à une réflexion sur l’armement des agents. I ci, nous avons été très touchés par ce meurtre. Nous l’avons vécu dans l’émotion. » Comme bon nombre de ses collègues en France, Luc Hénot, chef du poste d’Abbeville depuis 2009, a été choqué par la mort de Clarissa Jean-Philippe, jeune policière municipale de Montrouge, tuée dans l’exercice de ses fonctions par un terroriste le jeudi 8 janvier, en région parisienne. « Nous sommes solidaires, souligne Luc Hénot. J’ai demandé une minute de silence pour elle, et le maire est venu avec nous. Nous avons apprécié. » Tout comme l’hommage rendu à la jeune femme, associée aux deux policiers nationaux : « Ils ont eu droit aux mêmes honneurs, on a senti qu’il n’y avait pas de différence. » Mais cet événement tragique a rappelé les risques encourus par les policiers municipaux, et relancé le débat sur leur armement, au ministère de l’Intérieur et à l’Association des maires de France. Comme l’avait fait le décès d’Aurélie Fouquet, victime d’une fusillade avec des malfaiteurs en mai 2010, à Villiers-sur-Marne. Dans la Somme, l’initiative en revient au syndicat CFTC des agents de la fonction publique territoriale, qui a interpellé les élus d’Amiens et d’Abbeville. « Échange constructif » Luc Hénot, policier municipal depuis 1995, est justement délégué CFTC. Il avait sollicité à ce titre un rendez-vous avec le maire d’Abbeville, Nicolas Dumont (PS). Ils se sont rencontrés vendredi 16 janvier, pour aborder « la mise à niveau des moyens de protection et de défense des agents ». Si ses collègues amiénois ont quasiment reçu « un non catégorique » sur ce sujet, Luc Hénot se félicite, au contraire, d’avoir eu « un échange franc et constructif » avec l’édile abbevillois, conscient de l’évolution de la situation. Les missions de la police municipale se sont aussi étendues, MLO0108. En coopération avec la police nationale « Je suis favorable à ce que la loi précise les choses au niveau national », indique Nicolas Dumont. Ce qui ne devrait toutefois pas être le cas. « Je souhaite que les choses évoluent. Mais la sécurité reste de la compétence de l’État, même si les collectivités ont un rôle à jouer. » Il note au passage qu’existe à Abbeville « une convention de coordination avec la police nationale », ciblant les mission de chacun. « Cette coopération est exemplaire. » Un policier municipal et un ASVP en patrouille dans le centre-ville, hier. Tous deux portent un gilet pare-balles et pare-lame. avec une présence accrue en ville, pour « contribuer à la sécurité, la tranquillité, la salubrité publique » : « Nous sommes agents de police judiciaire adjoints. » Les douze policiers municipaux et les quatre agents de surveillance de la voie publique (ASVP) sont déjà équipés de « gilets pare-balles et pare-lames », qu’ils portent désormais à chaque sortie. Ces policiers sont aussi dotés de bombes lacrymogènes et de bâtons de défense (tonfa), dont le maniement nécessite formation et autorisation. Reste la question de l’armement. Nicolas Dumont « n’est pas opposé à la dotation d’une arme de catégorie B », c’est-à-dire un revolver. Toutefois, dans un premier temps, il juge préférable le pistolet à impulsion électrique, le Taser. Sont aussi à l’ordre du jour les matériels de communication, de géolocalisation ou d’alerte agression. « Pour nous, c’est important, in- siste le chef de service. Nous sommes des agents de police, amenés à intervenir sur la voie publique. On fait du contrôle routier, on nous appelle pour du tapage nocturne, des problèmes de voisinage, on ne sait pas sur qui on peut tomber. On doit avoir les moyens de se défendre, et de défendre les citoyens. La société a évolué, la peur de l’uniforme ne joue plus. » Un agent y voit surtout un moyen de dissuasion, de faire réfléchir un agresseur potentiel. Luc Débat à Amiens, pas en zone rurale Le débat sur l’armement existe aussi à Amiens, mais en Picardie maritime, il n’est pas envisagé en dehors d’Abbeville. À Rue par exemple, « nous n’avons pas eu de demande, précise le maire, Richard Renard. En milieu rural, la situation est un peu différente. » Même si les missions du policier municipal sont vastes : « Faire respecter les arrêtés, le stationnement, la circulation, assurer la surveillance du marché, les entrées et sorties d’école… » À Eu, le maire, Yves Derrien (divers droite), explique que les trois policiers municipaux seront équipés de bombes lacrymogènes, mais le projet est ancien. « Notre mission essentielle est de faire de la prévention aux abords des écoles, par exemple. » Au Tréport, « il n’y a pas de débat. Ici, ce n’est pas la même chose. », note le 1e adjoint, Laurent Jacques (PC). Les six agents sont déjà équipés de gilets pare-balles et de bâtons de défense, et n’iront pas au-delà. « Ils ont un travail de proximité. Après, on a la gendarmerie. » À Mers, le maire Emmanuel Macquet (UMP) n’en « sent pas la nécessité ». La commune emploie deux ASVP, équivalents de « ce que fut le garde-champêtre ». Le maintien de l’ordre est assuré par la gendarmerie, « très vite sur place et plus qualifiée ». Hénot reconnaît toutefois : « Il faut être réaliste. Face à des armes de guerre, ils (ses collègues de Montrouge, ndlr) n’ont rien pu faire. » Le responsable insiste surtout sur la formation, indispensable pour pouvoir détenir une arme. « Nous sommes encadrés par des textes réglementaires. Il faut une période de prise en main de deux semaines. Et le moniteur peut ne pas donner l’attestation. Ensuite, il y a obligation de suivre une formation continue. Il faut tirer au moins deux à trois fois par an, entre 30 et 50 cartouches. » Et Luc Hénot d’ajouter : « A tout moment, on peut vous retirer votre arme. » Les agents sont également soumis à un « code de déontologie ». Cependant, les policiers municipaux ne seront pas armés du jour au lendemain. Nicolas Dumont et les délégués syndicaux veulent se donner le temps de la réflexion, « sans céder à l’émotion ni nier les réalités ». Le maire d’Abbeville veut aussi connaître les coûts du matériel, de la formation, de la maintenance. « Ensuite, ce débat mérite d’être mené avec l’ensemble des agents, puis l’ensemble des élus. » XAVIER TOGNI