Résidus de médicaments

Transcription

Résidus de médicaments
Résidus de médicaments
D’une manière générale, les traitements physiques et chimiques dégradent de manière
très inégale les médicaments que l’on retrouve ensuite dans les milieux. Les résidus de
médicaments administrés à l’homme ou à l’animal se retrouvent dans les sols et les eaux
de surface, certes en quantité infimes, mais amènent cependant à se poser des questions
quant à leurs conséquences environnementales et sanitaires. La relative récente prise de
conscience et la complexité des interactions que ces faibles quantités peuvent avoir avec
d’autres molécules présentes dans l’environnement rendent difficile l’avancée des
connaissances dans ce domaine. Mais trois projets européens ont permis de faire quelque
peu avancer les recherches. Les résidus de médicaments sont présents à l'état de traces,
certes, mais les conséquences néfastes qu’ils pourraient avoir sur la santé et
l’environnement méritent d’être évaluées.
Origine des résidus de médicaments
Les résidus de médicaments ou autres produits de soins corporels sont présents dans
l’environnement par l’intermédiaire de sources diverses. Certains ont la fâcheuse
habitude de jeter les médicaments inutilisés dans les éviers ou les toilettes, notre
organisme rejette environ 50 à 80% des substances actives des médicaments (cela va
donc dans les eaux usées !!) ou bien encore les animaux d’élevage qui rejettent
également dans les pâturages les médicaments vétérinaires qui se retrouvent donc
inévitablement dans les rivières et les cours d’eaux.
En effet, de nos jours, chaque personne ou animal se voit administré des médicaments
(antibiotiques,
anti-stress,
analgésiques
anti-inflammatoires,
hormones,
antiépileptiques, …) plus ou moins fréquemment, pour prévenir comme pour guérir. Et cette
consommation ne cesse d’augmenter. Une fois ingérées, ces substances sont
partiellement dégradées lors de la digestion, mais de fortes quantités sont encore
présentes dans les excréments et rejetées, directement ou non, dans l’environnement.
Ces substances sont dégradées par divers organismes, mais leur demi-vie (temps
nécessaire pour éliminer la moitié de la quantité de départ) peut atteindre plusieurs
centaines d’années dans le pire des cas. Les médicaments humains se retrouvent dans
les eaux des stations d’épuration, où ils sont plus ou moins bien éliminés. Quant aux
antibiotiques vétérinaires, ils sont directement en contact avec le sol ou s’y retrouvent
par le biais d’épandage. Le ruissellement peut ensuite rapidement amener ces substances
dans les eaux de surface et jusqu’au robinet. Aussi apparaît-il évident et essentiel
d’évaluer le risque lié à la présence de ces molécules, tant pour l’homme que pour les
écosystèmes. C’est dans cet esprit que s’inscrivent les trois projets de recherche
européens Eravmis, Poseïdon et Rempharmawater :
- Eravmis : C’est une étude du comportement et des effets des antibiotiques dans
les eaux usées. Pour en savoir + : www.cranfield.ac.uk/ecochemistry/eravmis
-
Rempharmawater : ce programme travaille sur les techniques d’évaluation et
d’élimination des antibiotiques dans les eaux usées. Pour en savoir + :
www.lyon.cemagref.fr/bea/tox/travaux/rempharma.shtml
-
Poseïdon : c’est un programme d’évaluation des techniques d’élimination des
produits pharmaceutiques et des produits de soin dans les stations d’épuration
des eaux usées et les usines de potabilisation de l’eau destinées à améliorer la
réutilisation indirecte de l’eau potable. Pour en savoir + : www.eu-poseidon.com
Effets sur l’environnement et sur la santé
L’action des substances médicamenteuses sur l’environnement, tout comme sur la santé,
est encore mal connue.
Il est impossible actuellement de connaître les conséquences de ces produits sur les
écosystèmes car les interactions entre médicaments sont trop nombreuses. Et il n’est pas
impossible qu’un résidu de médicament interagisse également avec des pesticides ou
d’autres substances chimiques répandues sur le sol. Mais cela reste encore du domaine
de l’incertitude et il est donc important de s’y intéresser de plus près.
Les essais, quant aux techniques de traitement, réalisés dans le cadre de divers
programmes européens semblent concluants, montrant notamment une baisse sensible
des risques de formation de souches bactériennes résistantes. Cependant, il faudra du
temps avant que ces procédés équipent l’ensemble des stations d’épuration.
En ce qui concerne les médicaments vétérinaires, la tâche semble moins évidente étant
donné l’étendue des impacts entre sol et eau. Administrés à l’animal, la substance ou le
métabolite est rejeté dans l’environnement directement lorsqu’il s’agit d’animaux
paissant ou indirectement par l’intermédiaire de l’épandage des lisiers voire des boues
urbaines.
Il est donc important de sensibiliser les éleveurs pour qu’ils choisissent avec une grande
précaution les traitements destinés à leur bétail. Mais il faudrait pour cela que le taux de
biodégradabilité soit inscrit sur ces produits !! De plus, il est également important de
créer une filière spécifique de traitement des médicaments vétérinaires inutilisés ou
périmés.
En règle générale, les concentrations détectées dans l'eau se situent entre 20 parties par
milliard (ppm*) et moins d'une partie par billion. Cela représente des quantités infimes
mais les médicaments sont connus pour agir à de très faible dose. Se pose encore alors
la question des interactions possibles entre médicaments et de leur bioaccumulation*.
A titre d’exemple, citons les malformations observées dans le système reproducteur de
poissons qui montrent clairement que ces produits chimiques ne sont pas inoffensifs. Les
risques pour les humains sont peu connus, mais l'on soupçonne la résistance aux
antibiotiques et le dérèglement du système endocrinien (système hormonal).
Faire évoluer nos comportements
Notre santé et notre environnement ne peuvent être préservés que par la prise de
conscience rapide des nouvelles problématiques en matière d’eau et de santé et c’est
d’ailleurs le pilier sur lequel s’appuie le principe de précaution.
D'ailleurs, les malformations observées chez des organismes aquatiques montrent bien
que les résidus de médicaments ou autres produits de soins corporels (shampoings,
savons, …) altèrent déjà l'écosystème dont dépendent tous les êtres vivants. Il faut agir
Agissons donc dès maintenant en améliorant notre comportement et en développant
l’efficacité des techniques de traitement.
Pour cela :
ne jamais jeter les médicaments périmés ou inutilisés dans les réseaux d’eaux
usées (toilettes, éviers) ni dans les poubelles,
rapportez à la pharmacie les médicaments inutilisés ou périmés.
Des questions en suspens
Pour conclure, l’environnement ne se contente pas de réceptionner et de stocker les
substances chimiques générées par l’activité humaine (pesticides, nitrates, métaux, …).
Les sols et l’eau recèlent maintenant des choses auxquelles on n’avait pas pensé : des
résidus de médicaments, arrivés notamment par le biais des urines humaines et des
rejets hospitaliers très concentrés. Quel impact cette curieuse contamination a-t-elle sur
les êtres vivants ? On ne sait pas encore… mais la question mérite qu’on s’y intéresse !!
Doit-on craindre aussi que la consommation sans cesse grandissante de médicaments
n'accentue au fil des ans la contamination de l'environnement ?
Un virage grâce au Grenelle de l’environnement
L’engagement n° 103 du Grenelle de l’environnement concerne la maitrise des
risques liés aux résidus de médicaments dans l’eau. Le comité opérationnel 17 « eau » a
donc proposé l’élaboration d’un plan national d’actions sur 5 ans, concernant les résidus
de substances médicamenteuses dans l’eau. Cette proposition a été reprise dans le Plan
national santé environnement 2 (PNSE2).
C’est l’action 47 du PNSE2 dont vous pouvez consulter le texte exact ici.
Un plan national d’actions de réduction de la présence de résidus médicamenteux dans
les eaux est élaboré par les ministres en charge de la santé et de l’écologie en
concertation avec les institutionnels, chercheurs, professionnels de santé et également
associations de professionnels, d’usagers, de malades et de défense de l’environnement.
Le comité national de pilotage, chargé de l’élaboration et du suivi du futur plan national
sur les résidus de médicaments dans les eaux, a été installé le 23 novembre 2009. FNE y
est représentée. Dès le 23 novembre 2009 un avant-projet de Plan national sur les
résidus de médicaments dans les eaux (PNRM) a été soumis aux membres. FNE a rendu
sa contribution sur le projet de plan le 20 janvier 2010. En 2010, le comité national de
pilotage s’est réuni le 2 juin 2010 et le 12 octobre 2010. L’adoption du plan était
attendue pour la fin 2010 mais de fait cela a été un peu plus long.
Compte-tenu de la complexité du sujet (diversité des molécules impliquées, méthodes
analytiques à développer, évaluation des dangers et des risques à bâtir, etc.), un groupe
d’appui scientifique (GAS) a également été mis en place afin d’éclairer le comité de
pilotage. Ce groupe constitué à la fois d’experts issus du monde universitaire et des
organismes d’expertises nationaux s’est réuni par trois fois et a rendu ses
recommandations au comité de pilotage.
Le Plan national sur les résidus de médicaments (PNRM) a été rendu public le
30 mai 2011. Vous pouvez accéder au communiqué de presse du ministère, au dossier
de presse et au PRRM lui-même en utilisant le lien suivant :
http://www.developpement-durable.gouv.fr/Un-plan-national-pour-lutter.html
Le Comité qui a été associé à la phase de conception du PNRM continuera à exister avec
comme mission le suivi du plan. FNE continuera à y participer.
La coordination générale du plan est effectuée par les ministères en charge de l’écologie
et de la santé qui seront responsables du suivi de l’avancement du plan ainsi que de son
évaluation. Un tableau de bord sera élaboré et mis en place afin de mesurer
l’avancement de chacune des actions.
Pour en savoir plus.
Améliorer la connaissance et réduire les risques liés aux rejets de
médicaments dans l’environnement
(Décline l’engagement 103 du Grenelle)
Pilote de l’action : MEEDDAT/DEB MSS/DGS
Sur ce point, en lien avec les actions 19 et 30 du plan interministériel d'actions en
cours, le PNSE 2 se réfère à la recommandation du groupe 3 du Grenelle de
l’environnement, qui prévoit de :
Synthétiser les connaissances disponibles et établir, à partir de cette synthèse et
de travaux d’évaluation des risques (par substance), une liste de substances
prioritaires à surveiller et sur lesquelles agir en matière de prévention.
Développer de nouvelles connaissances dans les milieux en utilisant si possible les
espèces sentinelles et les bio marqueurs, en particulier pour les substances
prioritaires,
Comme c’est le cas depuis 2001, continuer l’intégration dans les dossiers établis
pour la demande d’autorisation nationale de mise sur le marché de médicaments
humains, à l’instar de ce qui se fait déjà au niveau européen, de la prise en
compte de l’impact sur l’environnement,
Mettre en place un dispositif performant de récupération des déchets par la filière
(industriels, officinaux et grossistes) financée par une écocontribution incitative
(via la franchise par exemple). Intégrer les parties prenantes dans le dispositif.
Analyser la faisabilité et mettre en place dans les services des établissements de
soins les plus concernés, des mesures de réduction à la source des rejets
médicamenteux et autres produits de santé, afin de limiter leur dispersion dans
l’environnement, s’assurer de l’absence d’impact dangereux des installations de
production,
Dans les zones à risques (par exemple estuaires ou affluent les pollutions et où la
pêche et la conchyliculture sont pratiquées) renforcer la surveillance,
Aider au développement de recherches appliquées dans le domaine du traitement
de l’eau pour sa potabilisation.
Pilote : MSS/DGS Meeddat/DEB/
Partenaires DGPR /DHOS/LEEM / Ineris/ Onema/AFSSA/AFSSAPS/
DGRI/ DGAL
Calendrier : 2012
Indicateurs
de
moyens :
Elaboration
du
Plan
«Résidus
de médicaments dans l’eau »,
disponibilité des études, mise en place du dispositif de récupération
des déchets, renforcement effective de la surveillance dans les
zones à risques, crédits de recherche débloqués sur cette
thématique
Des poissons transsexuels
Le rejet dans l’environnement de substances hormonales, comme la pilule
contraceptive, n’est pas non plus sans conséquences.
Les oestrogènes sont des molécules analogues d’une espèce vertébrée à l’autre.
Une fois ingérées, elles ne sont pas entièrement assimilées par l’organisme et une
partie se retrouve dans les eaux usées, puis dans les milieux aquatiques. Les
poissons sont alors directement en contact avec ces substances. Des études
réalisées par le Cemagref (centre de recherches pour l’ingénierie de l’agriculture
et de l’environnement) montrent des modifications de la reproduction dues à des
altérations de la différenciation sexuelle chez le chevaine. De même, chez la
perche canadienne, les mâles ayant côtoyé des eaux contaminées présentent des
ovocytes dans leurs testicules. En laboratoire, les chercheurs ont également
observé des modifications du comportement lors de l’accouplement, ainsi qu’une
altération de la structure cellulaire des ovaires chez les femelles. La présence de
produits chimiques perturbant le système endocrinien peut donc avoir des impacts
sur les cycles reproductifs des espèces, voire d’autres espèces.
(Source Environnement Magazine, Novembre 2003)
Pour en savoir + :
L’eau polluée par les médicaments
http://www.aci-multimedia.net/bio/eau_polluee.htm
Des médicaments dans l’eau potable, une exposition chronique à des substances
chimiques dans l’eau potable : un danger potentiel pour la santé. - janvier 2003
http://www.cwhn.ca/network-reseau/6-23f/6-23pg6.html
La présence de médicaments dans l'eau : y a-t-il danger pour la santé publique ? octobre 2004
http://www.whp-apsf.ca/fr/documents/pharmWaterFR.html
Résidus de médicaments dans l'eau: des molécules à surveiller ? des risques à évaluer ?
1er octobre 2008
http://www.eau-seine-normandie.fr/index.php?id=5936
Résidus de médicament dans les eaux destinées à la consommation humaine : volet
« méthodologie générale d’évaluation de l’exposition de l’Homme aux résidus de
médicaments via l’eau destinée à la consommation humaine. Juin 2010
http://www.afssa.fr/Documents/EAUX-Ra-MedicamentsEauxMethodo.pdf
Synthèse des résultats de campagnes d’analyses de résidus de médicaments dans les
eaux effectuées par les DRASS dans 3 bassins pilotes. Novembre 2009
http://www.afssa.fr/Documents/EAUX-Ra-MedicamentsEauxAnalyses.pdf
Hiérarchisation des résidus de médicaments d’intérêt pour l’analyse des ressources et des
eaux traitées.
http://www.afssa.fr/Documents/EAUX-Ra-MedicamentsEaux.pdf
Des molécules issues des médicaments humains et vétérinaires (antibiotiques,
antidépresseurs, bêtabloquants, contraceptifs…) peuvent atteindre les milieux
aquatiques. Et, une récente étude réalisée par l’ANSES montre qu’un quart des
échantillons d’eau testés contiennent des traces de ces médicaments. C’est bien ce qui
légitime l’existence du Plan national sur les résidus de médicaments dans l’eau.
http://www.enviro2b.com/2011/05/31/encore-trop-de-residus-medicamenteux-dans-les-eaux/
http://www.actu-environnement.com/ae/news/plan-national-residus-medicaments-eau-12668.php4
http://www.actualites-news-environnement.com/26640-Lancement-plan-national-residus-medicamentseau.html
Un médecin normand a présenté une étude inquiétante sur les résidus médicamenteux
présents dans l'eau, à la sortie des stations d’épuration. Pas moins de 36 molécules
médicamenteuses ont été retrouvées par l’équipe du CHU de Rouen.
http://www.enviro2b.com/2010/09/13/pollution-%E2%80%93-36-residus-de-medicaments-dansl%E2%80%99eau/
Composés pharmaceutiques dans les eaux de surface.
Bulletin de veille scientifique de l’Anses n° 14
http://www.anses.fr/ET/DocumentsET/Anses_bulletin_veille_scientifique_14_BVS_14_web.pdf
P 22 et suivantes
Une petite vidéo sur la pollution de l'eau par les médicaments :
http://www.science.gouv.fr/fr/telesciences/bdd/res/3880/ma-poubelle-est-un-tresor/
Des résidus de médicaments dans les eaux françaises
http://www.anses.fr/PMEC007801.htm
Article en ligne du Ministère de la Santé :
http://www.sante.gouv.fr/campagne-nationale-d-analyse-des-residus-de-medicaments-dans-l-eau-desresultats-conformes-aux-attentes.html
Il a fait l’objet de nombreuses reprises presse ; en voici quelques unes :
http://www.romandie.com/infos/news2/110210191222.mov78m1e.asp
http://www.enviro2b.com/2011/02/11/analyse-des-residus-de-medicaments-dans-leau-premiers-resultats
http://www.enviro2b.com/2011/02/17/un-quart-de-l%E2%80%99eau-potable-contiendrait-des-residusmedicamenteux/
http://www.actu-environnement.com/ae/news/campagne-prelevement-eau-anses-resultats-residusmedicaments-eau-11937.php4
http://www.destinationsante.com/Peu-de-residus-de-medicaments-dans-les-eaux-francaises.html
http://www.newspress.fr/Communique_FR_237691_4449.aspx