Le Mexique
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Le Mexique
Géographie Aïe, ¡México Lindo 1! 10B F Le Mexique s’étend sous une triple tension. Trois cordes tirent sur sa géographie pour lui donner une forme. L’une vient du Nord, du puissant voisin, des terres de la frontière, des États-Unis qui exercent autant d’attirance que de répugnance pour les Mexicains. La deuxième corde vient du Sud, du monde hispano-américain auquel le relient l’histoire précolombienne, de la conquête et de la colonisation, une langue, un destin en commun. Et puis une troisième corde, celle qui vient de l’Europe, qui commence avec les conquérants espagnols, mais qui est liée aussi aux voyages des Européens, aux aller-retour et aux longs séjours et à la fascination que le Mexique a éveillée chez eux. Le Mexique se construit et construit sa géographie au carrefour de ces grandes représentations et trouve dans sa gigantesque mégalopole, México District Fédéral (México D. F.), l’épicentre de ses tensions. Les États-Unis du Mexique représentent 3,5 fois la France, mais ne se situent qu’au troisième rang parmi les pays latino-américains, après le Brésil et l’Argentine. Si l’on regarde vers le nord, il fait aussi figure de petit comparé aux États-Unis et au Canada. Avec 1 972 547 km2 et 106 700 000 habitants (première nation hispanophone du globe2), c’est néanmoins un géant (14e rang mondial par superficie) qui étale sa carcasse au nord du continent hispano-américain, dans un mouvement nord-ouest / sud-est (14° et 32° de latitude nord), posé entre l’océan Pacifique et l’Atlantique (avec le golfe du Mexique et la mer des Caraïbes). Il possède trois fuseaux horaires. Le plus important regroupe les centres névralgiques, depuis le Yucatán jusqu’aux confins de la Sierra Madre Occidentale ; le deuxième concerne le Nord-Ouest (Sonora, Sinaloa, Chihuahua, une partie du Nayarit, la Basse-Californie du Sud) ; le dernier, la Basse-Californie du Nord, en accord avec le fuseau horaire nord-américain). Quand on regarde sa forme, on dirait un 1. México lindo y querido, ranchera de Chucho Monje, interprétée par Jorge Negrete : México lindo y querido / si muero lejos de ti / que digan que estoy dormido / y que me traigan aquí (Mexique beau et chéri / si je meurs loin de toi / qu’on dise que je suis en train de dormir / et qu’on me ramène ici). On ne connaît pas exactement l’étymologie du mot « México ». On considère qu’il s’agit d’une voix d’origine Aztèque ou Mexica (náhuatl), qui pourrait signifier « au milieu du lac de la lune », faisant ainsi allusion aux deux ’îlots du lac de Texcoco où fut fondée la capitale de l’Empire, Tenochtitlan (« Mexhico »). 2. La Constitution reconnaît une trentaine de langues indigènes, « langues nationales ». 5 Le Mexique : Conflits, Rêves et Miroirs grand corps avec un seul bras, le droit, posé de manière négligée sur le Pacifique et une partie inférieure qui se rétrécit (à peine 215 km de large à l’isthme de Tehuantepec, entre Salina Cruz et Coatzacoalcos) et finit en queue-de-poisson (87° et 117° de longitude ouest). La taille rétrécie du Sud est déjà une frontière, celle qui sépare (ou unit) le Mexique de l’Amérique centrale. Au même titre que le Rio Bravo sépare une partie du pays des États-Unis. Du point de vue régional, il appartient autant à l’ensemble nordaméricain qu’à l’Amérique centrale. C’est dire l’étendue du territoire... De la frontière nord, Tijuana, à la frontière sud, Tapachula, il faut parcourir plus de 3 000 km ; pour aller de Matamoros, sur la côte Atlantique, à Topolobampo, à l’ouest, 1 200 km (et nous avons encore à parcourir 800 km d’est en ouest à la hauteur de Veracruz...). Coupé en deux par le Tropique du Cancer, entrecoupé à l’intérieur par plusieurs systèmes montagneux, situé à une latitude qui, transposée au continent africain, le placerait au niveau du Sahara, le Mexique offre un grand contraste de paysages et de climats, qui vont des déserts sablonneux de Chihuahua au nord, à la forêt tropicale et humide du SudEst au Chiapas. À Chihuahua, la température peut descendre à -20°, alors que dans le désert de Sonora elle atteint les +45°. Le pays semble également marqué par l’étendue de ses frontières. Au Nord, plus de 3 000 km : une frontière d’abord artificielle depuis Tijuana, sur le Pacifique, jusqu’à Ciudad Juárez (El Paso aux ÉtatsUnis), puis une ligne suit les arabesques du Rio Bravo jusqu’à son embouchure dans l’océan Atlantique. Au Sud, presque 1 200 km de frontières avec le Bélize et le Guatemala, pour la plupart artificielles, même si parfois elles suivent les cours des fleuves Suchiate, Usumacinta et Azul. La façade Atlantique s’étend sur 2 800 km et celle du Pacifique sur 7 300 km (avec le golfe de Californie). La péninsule de Basse-Californie, au Nord-Ouest, se prolonge sur 1 200 km, de Tijuana à La Paz, à quelque 200 km des côtes du Pacifique. Des déserts aux forêts 1B Deux grandes chaînes montagneuses encadrent le pays de l’est à l’ouest : la Sierra Madre Orientale et la Sierra Madre Occidentale. La première naît à la frontière entre le Texas et le Mexique, comme une prolongation des Rocheuses, et s’étire sur environ 1 350 km presque jusqu’au golfe du Mexique et les forêts épaisses des basses terres (Tierras calientes, « terres chaudes ») de Veracruz. Elle est prolongée par la Sierra Madre d’Oaxaca. Dans le Golfe, les eaux chaudes (28°) du golfe de Guinée tournent en spirale et provoquent des vents humides qui soufflent sur la plaine côtière. Les pluies tombent et s’en donnent à 6 Géographie cœur joie entre juillet et octobre (saison des pluies). Des averses violentes, des tourbillons, des cyclones, des inondations y sont monnaie courante. Les contrastes climatiques de la région sont saisissants et montrent une végétation variée, qui va des bois de pins, chênes et autres plantations de café sur les flancs des montagnes, aux cultures d’agrumes et de cocotiers dans les basses terres, et le plus traditionnel « milpas » (champs de maïs). À Tabasco, les troupeaux de zébus alternent avec les puits de pétrole, et la culture des fruits dans les plaines fertiles contraste avec l’aridité des zones de montagne du Guerrero et d’Oaxaca. Cette Sierra Madre Orientale a une moyenne de 2 000 m d’altitude, et des sommets à 3 000 m. À l’est de l’isthme de Tehuantepec, dans la Sierra Madre de Chiapas, le volcan Tacaná culmine à 4 117 m. La Sierra Madre Occidentale, quant à elle, se dresse à une cinquantaine de kilomètres de la frontière avec les États-Unis, comme reprenant la route de la Sierra Nevada interrompue par le grand plateau du Colorado aux États-Unis, et se prolonge jusqu’à l'État de Nayarit. Formée de roches volcaniques, elle a une altitude moyenne de 2 250 m et comme sa sœur de l’Est, des sommets qui culminent à 3 000 m. Ce système est prolongé par la Sierra Madre del Sur, qui avance vers les profondeurs de l'État d’Oaxaca. Les courants chauds du Pacifique viennent s’échouer entre Puerto Vallarta (Jalisco) et le golfe de Tehuantepec, après avoir touché la péninsule de Basse-Californie, et sont à l’origine d’une saison de pluies entre juin et octobre. Le matin, les brouillards tropicaux enveloppent la frange côtière et les flancs de montagnes et plongent le paysage dans une atmosphère envoûtante. Ce cumulus de végétation enserre l’isthme de Tehuantepec et atteint l’Atlantique. Ils enveloppent les ruines précolombiennes de Palenque et les sites archéologiques du Chiapas. Entre les Sierras, s’étale le grand plateau du Mexique Central, à plus de 1 000 m, dans un versant ascendant vers le Sud, traversé par l’axe néo-volcanique (19e-20e degré de latitude nord) qui naît au sud du Rio Bravo. Cet axe caracole jusqu’à l'État de Colima, puis tourne vers l’est en direction de Veracruz. Nous trouvons dans ce système les sommets les plus élevés du pays : l’Iztaccíhuatl (5 286 m), le Popocatépetl (5 452 m), le Pico d’Orizaba ou Citlaltépetl (5 747 m), et plus d’une soixantaine de volcans, souvent entourés de forêts. Les deux Sierras estompent les airs humides en provenance du Pacifique et de l’Atlantique et sont à l’origine d’un climat semi-désertique. Ce plateau central est aussi emboîté par des cloisons intérieures qui créent des bassins d’altitude à Toluca, Puebla ou México. Les airs humides du Pacifique trouvent des couloirs pour s’infiltrer jusqu’au cœur du pays et y apporter, pendant l’été, la pluie bénéfique pour les 7 Le Mexique : Conflits, Rêves et Miroirs cultures et la végétation (635 mm de précipitations, alors qu’au nord du plateau la moyenne est d’à peine 254 mm). Les hivers secs ont encouragé les cultures ramenées par les colons espagnols, comme le blé et l’orge, avec celles plus traditionnelles du maïs et de la pomme de terre. Les deux principales villes du pays, México (2 250 m) et Guadalajara (1 567 m), se situent dans cette région. La circulation entre les bassins est favorisée par la structure en plate-forme du relief, malgré un système de communications déficitaire. Cet ensemble est soumis à des tremblements de terre et à des éruptions volcaniques extrêmement violents. En 1943, le volcan Paricutín (Michoacán) émergea dans un champs de maïs pour atteindre les 2 808 m et engloutir sous les laves le village de Parangaricutiro et provoquer un exode de milliers de personnes. Il s’agit du plus jeune volcan du monde. La présence du Tropique du Cancer est trompeuse. Certains disent que grosso modo le Mexique – dont la moyenne de température annuelle est de 19° – a trois divisions climatiques et une multitude de sous-divisions. Au nord du Tropique, il y a une zone plutôt tempérée (sous-tropical humide) ; plus au nord encore (et dans la BasseCalifornie aussi), de vastes contrées désertiques, éloignées de l’influence des deux océans, parsemées de poches fertiles (les oasis de Sinaloa-Sonora, les aires de Torreón y Ciudad Juárez) (désertique) ; au sud, au Chiapas et dans la péninsule du Yucatán qui fait pendant à la Basse-Californie, une zone plus chaude (de 15,6° à 40°) et au fort taux d’humidité (tropical)... La végétation de ces régions désertiques, parfois à quelques centaines de kilomètres des régions tropicales, alternent les cactus, les buissons épineux (le matorral), les nopals, les graminées jaunâtres. L’été est torride ; les pluies sont rarissimes ; les hivers frais, châtiés par les vents du Nord, les nortes. Et dans les zones de transition vers des climats plus favorables à la culture, on retrouve les premiers yuccas et agaves (qui servent à la fabrication de la tequila ; la ville de Tequila se trouve dans l'État de Jalisco). Parmi les facteurs qui bouleversent les données climatiques, il faut retenir les courants. En effet, les eaux chaudes et les vents qui s’enfoncent dans le centre du Mexique ramènent le climat tropical plus au nord du Tropique, mais en même temps les passages d’air froid venus du nord, après être rentrés en collision avec ces masses d’air chaud, se faufilent vers le sud et provoquent des gelées et des vents glacés jusqu’à Veracruz. 8