Sourdigné dans son temps
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Sourdigné dans son temps
Sourdigné dans son temps de « Surdignacus » aux éoliennes 1070 / 2014 18 Août 2014 L’origine de cette maison se trouve dans le livre des archives de l’abbaye de St Florent à « Surdignacus » en 1070 . Ces archives très importantes sont maintenant à Angers . Sourdigné est un nom d’origine celtique sans signification particulière que celui d’un nom d’homme, comme le note Louis Raimbault. C’était un ancien fief fortifié et une Seigneurie qui relevait des puissants seigneurs de Gonnord et de Cernusson, qui eux-mêmes étaient des vassaux des comtes d’Anjou , les Plantagenets,de Foulque le Réchin descendant du redoutable Foulque Néra . Les Comtes d’Anjou étaient alors bien plus puissants que les Rois de France et leur territoire plus étendu. Les Plantagenets, donneront bientôt des rois d’Angleterre , Henri II puis le célèbre Richard Cœur de lion . Les seigneurs de Sourdigné étaient donc des « Levavasseurs » le vassal du vassal . Un seigneur de Sourdigné du nom de Garnier est cité dès 1093, avec le Seigneur de Thouarcé un certain Isambert lors de la dédicace de l’église St Jean à Thouarcé, en présence de l’évêque du Mans nommé Hoël. C’était eux qui avaient offert le terrain pour bâtir cette église ! On ne connaît pas la date de construction de cette bâtisse. C’était sans doute une sorte de motte féodale entourée de douves, toujours existantes. L’entrée du château était autrefois située au nord, on y pénétrait par une poterne suivie de deux couloirs en oblique pour faciliter la défense, cet ouvrage était protégé par une tour. Mais le logis était de petites dimensions puisqu’on y cite seulement « deux grandes pièces au rez-de-chaussée et un vaste grenier pour stoker les récoltes. » Pourquoi un petit château fort à Sourdigné ? Probablement pour se protéger des bandes de Va-nu- pieds ou de Pastoureaux qui, dans une grande misère battaient la campagne au moyen âge.. Sans doute aussi pour marquer avec toute une série de châteaux forts, beaucoup plus importants, le territoire des Plantagenets face aux comtes de Blois leurs ennemis de l’est. Saumur étant la pomme de discorde. . Il ne reste plus rien de ce logis, sauf peut-être la tour très remaniée, les bases des murs et les poutres de la charpente. Les Seigneurs durant tout de moyen âge, pouvaient en dehors de la chasse qui était leur principal loisir, s’ils n’étaient pas trop rustres, lire les fabliaux, le Roman de Renard, ou réciter des poèmes de Ruteboeuf et plus tard ceux de François Villon. Mais c’est à Angers que cela se passait, pas à Sourdigné ! On peut présumer que dès la fin du moyen âge Sourdigné avait perdu tout intérêt de fief fortifié pour devenir un domaine agricole de plus de 300 arpents.* . On possède les noms de tous les propriétaires depuis le début du XVI ieme. Le Premier, un certain Blandin en 1506, n’a pas laissé de trace dans l’histoire locale, mais j’ai retrouvé ses armoiries dans le mémorial d’Hosier. Aux armoiries « d'azur à la bande d'argent acc en chef d'un cerf » Désormais le comté d’Anjou relève des rois de France, c’est François I qui règne alors. Il faut retenir ici que c’est l’époque de Joachim du Bellay qui a une rue à Valanjou, car seigneur de Gonnord sans oublier son voisin célèbre de la « Devinère » François Rabelais ! er En 1539 c’est Jean Guérin qui devient le propriétaire, il est également Seigneur de Thouarcé, c’est donc un personnage assez important qui vit dans une période sombre. La guerre de religion faite rage aux alentours, les Français s’entretuent, l’ Europe s’entretue ! Heureusement il y a dans le royaume une belle figure de tolérance celle de Michel de L’Hôpital ! 1567 c’est un nommé François Bastard qui occupe les lieux, l’époque est encore terrible, c’est toujours la guerre de religion, la Saint Barthélémy toute proche (24 Août 1572) . En 1592, Perrine Goupil la nouvelle propriétaire peut vivre dans la paix retrouvée avec Henri IV. Puis en 1633 c’est Diane Museau ou Diane Du Museau I657 François de Channe ou Chahannay de Launay de Sourdigné (1) nouveau propriétaire laisse son nom dans la mémoire locale pour son goût de la chicane, il a des contentieux avec un Sieur de Sazay pour des histoires de bornage ou de propriété . C’est l’époque qui veut ça, sans doute, car tout près d’ici à St Georges sur Loire, Racine écrit « les Plaideurs » ! J’ai retrouvé le blason de François de Channé il représente, sur un fond d’azur 3 merlettes. La merlette étant le symbole d’une victoire. En 1663, la fille de François de Channé, Marie, Dame de Sourdigné épouse Louis de l’Estoile. Leur fils François de l’Estoile avait très mauvaise réputation. On dit qu’il enterrait près du château les officiers de police qui venaient le sommer de rembourser ses dettes, c’est vraisemblablement une légende, car nous sommes au siècle de Louis XIV, une main forte tient le royaume ! (Mais c’est aussi ne l’oublions pas, le siècle des grands classiques aussi bien en littérature qu’en peinture et en musique.) La fille Françoise épousera Félix de Raccapé, qui était écuyer, seigneur de Chevigné à St Georges sur Loire et capitaine au régiment de Luxembourg. Il meurt à St Georges en 1731. L’on sait qu’il y a une rue qui porte son nom à Chemillé. Ses armoiries représentent, sur un fond couleur sable, 6 rocs d’échiquier couleur argent. 1743 dans un acte de maître Rompillon la maison est ainsi décrite : « Un grand corps de logis à deux chambres basses et deux chambres hautes avec grenier, le tout couvert d’ardoises, entouré de douves et précédé de communs couverts de tuiles et basses cour » c’est quasiment la description de la maison actuelle !* 1762 un Sieur Gautier devient le maître des lieux. En 1775, C’est René l’Espagneil de Rillé qui devient propriétaire de Sourdigné il est également seigneur d’Argonne. Armoiries: « d'azur à trois têtes d'épagneul coupées d'argent. » Nous sommes au siècle des lumières, mais bientôt la révolution gronde et René l’Espagneil de Rillé émigre, la propriété devient ipso facto bien national . Acquise le 8 Messidor an IV (8 juin 1796) par le citoyen JacquesEtienne Loire Lachesnaie pour la somme de 4972 francs or. (A noter que les affaires sérieuses ne se traitaient pas en assignats ! Mais en espèces sonnantes et trébuchantes, l’état vend en or et achète en assignats !) Pendant la révolution, la guerre de vendée ravage toute la région, une colonne infernale commandée par le général Joseph Crouzat passe à Gonnord et met le feu à Sourdigné le 23 janvier 1794. « Joseph Crouzat, le second de Cordellier, part de Brissac-Quincé. Après être passée par Thouarcé, elle gagne Gonnord le 23 janvier met le feu à Sourdigné avant d’atteindre le bourg où 200 personnes sont massacrés. » On voit encore sur certaines poutres les traces de cet incendie. C’est donc un château partiellement incendié que M. Lachesnaie a acheté. Une chapelle dédiée à St Jacques existait également, le temporel en était assuré par la borderie de Sourdigné . Jacques Bazantay de Gonnord en était le responsable. On y a célébré des baptêmes, des actes ont été retrouvés. La chapelle St Jacques et d’autres bâtiments ont été en 1796 acquis par M. Fromageau, un vigneron de Thouarcé Rien à signaler sous l’empire, il faut attendre 1825 , où monsieur Janvier-Lachesnaie conseiller à la cour d’appel d’Angers reconstruit la maison en l’agrandissant quelque peu, les communs sont reconstruits symétiques à l’avant du château. C’est l’actuelle maison simple de style directoire en briques et pierres de schiste. Rien dans son aspect extérieur depuis lors n’a été modifié. Le 11 Août 1829 à Angers, Euphrasie- Henriette Janvier sa fille, épouse monsieur Jacques-Louis Narcisse Courtigné conseiller à la cour royale d’appel d’Angers. On peut penser que durant les 32 ans qu’elle passera à Sourdigné cette femme généreuse et amie des pauvres aura eu tout le temps de lire Chateaubriand et son « Génie du Christianisme » et qu’elle aura pleuré avec les « Misérables» qui paraissent en feuilletons, Victor Hugo étant toujours à Guernesey. Elle lègue, juste avant de mourir en 1867 par testament tous ses biens à la commune de Gonnord pour que Sourdigné devienne un hospice : L’hospice de « la Sainte Famille » Jusqu’en 1927 Sourdigné est maison de retraite avant d’être transférée à Gonnord pour des raisons de commodité. La commune vend alors par lots le domaine. Mon père achète en 1935 Sourdigné et six hectares y attenant . Mes parents y passent leur retraite de 1961 à 1984 1992 Je deviens propriétaire de Sourdigné. 2011 établissement d’un parc de 6 éoliennes très silencieuses à 1,5 kms au sud de Sourdigné ! Enfin la boucle est bouclée : « de Surdignacus aux Eoliennes » ! ●●●●●●●● L’Hospice Madame de Courtigné s’occupait déjà beaucoup des pauvres mais, à la fin de sa vie, elle décide de consacrer une partie de sa fortune à la création d’un hospice à Sourdigné (1863). Il doit accueillir 12 pensionnaires : 6 hommes et 6 femmes, répartis par communes : 6 pour Gonnord, 2 pour Joué-Etiau, Thouarcé et Machelles. Les hommes occupent la salle St Emmanuel et les femmes la salle Ste Marie. 5 religieuses venues de Ste Marie de la Forêt sont chargées de cet hospice et un aumônier doit y résider (ce qui ne semble pas avoir été le cas). L’inauguration a lieu le 3 octobre 1871. L’établissement sera actif jusqu’en 1928, date où il sera transféré à l’hôpital de Gonnord. Parmi les pensionnaires, un certain Banchereau dit « la Bique », il avait fait la guerre de Crimée, ce qui lui conférait un certain prestige, il passait son temps dans le petit bois à tailler des cannes et à fabriquer des pipes ! Je possède tous les noms des religieuses de Sainte Marie la Forêt ayant servi à Sourdigné . Sortons de l’oubli ces dévouées religieuses : Sr. Marie Stéphanie née Marie Thomas 1842 Sr. St Gatien, de 1893 à1896 Sr. Marie Félicien, de1895 à 1896 Sr. Marie-Julie, de 1899 à 1903 Sr. Marie Mathias née Louise Lebeaupin 13 octobre 1866 Sr. Marie Stéphanie en 1902 Sr. Marie Mathias 1902 Sr. Marie-Fulgence, de1903 à 1904 Sr. Marie-Eudoxie en 1906 Sr. Saint François 1904 Sr. Clotilde de Jésus 1913 Sr. Emmanuel de Jésus en 1920 ( ma mère a connu et s’est liée d’amitié avec cette religieuse alors en retraite à Saint Martin la Forêt ) Sur la tombe de Madame de Courtigné dans le cimetière de Gonnord on peut lire cette épitaphe : « Elle fut l’amie des pauvres et fonda l’hospice de Sourdigné. Priez pour elle ». Compléments sur le testament Le 20 novembre 1863, Madame de Courtigné lègue à l’hôpice de Gonnord la nue-propriété de Sourdigné et de 6 fermes voisines et confie l’usufruit aux Religieuses qui viendraient y soigner 12 vieillards. Elle ajoute d’autres clauses pour l’école de Gonnord, pour un dispensaire…et aussi « L’hôpital de Gonnord devra prendre soin de mes animaux … et s’il se trouvait parmi eux des chevaux, défense expresse de les faire travailler. Ils seront nourris de très bons fourrages et de 6 litres d’avoine par jour, tenus dans la plus grande propreté et soignés par un vétérinaire…Jamais on ne devra les faire abattre. » Elle ajoute enfin « qu’elle défend de faire la moindre dépense à son sujet autrement que 300 francs pour sa sépulture et moins si c’est possible et 3 francs pour la croix en fer qui surmontera sa tombe. Lui élever un tombeau serait enfreindre ses dernières volontés et pour toutes prières, une messe basse lors de la sépulture. » Une rue de Gonnord porte le nom de Madame de Courtigné ! Il semble qu’il n’y ait pas eu d’aumônier résidant ; c’est le clergé de Gonnord qui allait y dire la messe. * A propos de la Chapelle La chapelle actuelle a été aménagée pour la maison de retraite dans l’aile nord des dépendances vers 1868-1869. Une autre chapelle devait exister dans l’aile sud mais il n’en reste plus aucune trace, pourtant on trouve des actes de baptême avec comme lieu de référence Sourdigné et c’est la petite borderie derriere le château qui assurait le temporel de la chapelle et c’est un certain jacques Bazantay qui qui en était le responsable. Cette borderie fut vendue comme bien national le 5 octobre 1791 à André Fromageau vigneron à Thouarcé. La chapelle de la maison de retraite fut mise en service en 1871 mais étaitelle ornée comme le voulait le testament de Madame Courtigné, des manteaux de velours et de soie, des robes et des challes de la donatrice ? Nous n’en savons rien ! Une messe était dite les jeudis et dimanches pour les religieuses et quelques pensionnaires à laquelle les agriculteurs des environs pouvaient aussi assister. Mais à certaines périodes, en l’absence de prêtre, « c’est en carriole,une tapissière noire attelée à un vieux cheval conduite par un pensionnaire encore valide que les religieuses et quelques pensionnaires se rendaient à la la messe de 9 heures des dimanches et jours fériés et aux vêpres à l’église paroissiale de Gonnord » comme le précise l’abbé Defaye dans son livre « Si Gonnord m’était conté » La messe était également célébrée à la chapelle de Sourdigné à l’occasion des Rogations et cela jusque dans les années 1950 Voir photo de la chapelle en 1950 La chapelle actuelle n’a plus grand-chose à voir avec celle de 1870, car dans les années 1970 elle a été désaffectée et quelques statues et ornements sacerdotaux ont été remis par mon père à la paroisse de Gonnord Dans cette chapelle reconstituée dans les années 1980 et qui nécessiterait une sérieuse restauration il faut signaler une belle table de communion en fer forgé, signée et datant du XVIII ième Un statue de Sainte Anne avec la vierge enfant, une autre de la Vierge écrasant le démon, une autre du baptême de Jésus par St Jean baptiste , des chapes ,des chasubles et différents ornements sacerdotaux ; Il faut signaler un original vitrail : exécuté par le père de Jocelyn Mercier graveur, représentant la vierge tenant dans ses mains le donateur vitrail moderne style 1920. Vierge de Pitié. L’autel et le grand Christ proviennent de l’abbaye de Timadeuc dans le Morbihan ●●●●●●●●●●●●●●● . - Dictionnaire Historique de M . Celestin Port - (1) L. F la Bessière. Notions de géographie générale - Maine et loire - Arch. de M-et-L - Arc. Comm. de Gonnord - Notes de M. Raimbault Louis (histoire du canton de Thouarcé ) - Notes de François Gruget, prêtre de la paroisse de Gonnord - Arch. communauté Sainte Marie la Forêt. Angers -Si Gonnord m’était conté de A. Defaye ………………………………………………………………………………….. * Ces archives sont maintenant à Angers. * Louis Raimbault. Itinéraire historique d’Angers à Niort. * Marie thérese Morlet le signale également dans un ouvrage sur les « Noms de personnes dans l’ancienne Gaule du VI au XII ieme » . * Agrippa d’Aubigné, dont le berceau familiale est le château d’Aubigné sur Layon que vous connaissez tous, était l’ami intime du roi Henri IV, puis ils se sont brouillés. Mais il est amusant de savoir que leurs deux petits enfants Louis XIV et Madame Françoise d’Aubigné veuve Scarron se sont mariés, elle est plus connue sous le nom de Madame de Maintenon ! * Le blason montre 3 merlettes sur un fond d’azur. La merlette représente une armée vaincue, donc une merlette par victoire. * (1) Armorial général de l’Anjou de Joseph Denais. Parti d’Or et d’Azur au Lion de l’un en l’autre, armé, l’ampassé et couronné de Gueules. Le lion Léopardé Dumesnil, armorial mss p.13Audouys,mss.994 P ; 48- mss 439 * Ancienne mesure agraire qui valait cent perches , de 20 à 50 ares. * Accompagnés du seigneur de Passavant et celui de Chanzay . * Une famille de Rillé faisait le commerce de canne à sucre depuis Haïti . * En 1900, Mgr Rumeau, lors de sa visite pastorale à Gonnord, s’arrête à Sourdigné ! Carte Cassini Cadastre Napoléonien de Sourdigné