Fils de la lumière et du soleil De l`Egypte antique à la F... M... Tel est

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Fils de la lumière et du soleil De l`Egypte antique à la F... M... Tel est
Fils de la lumière et du soleil
De l’Egypte antique à la F... M...
Tel est le titre de la planche qu’il m’est donné de vous présenter ce soir.
- Avant-propos :
Je ne voudrais pas que vous pensiez qu’il s’agit d’une fresque historique, qui ne
présenterait aucun intérêt ici, et surtout que je suis la victime d’une Egyptomania,
très à la mode depuis quelques décennies.
Si j’ai voulu faire cette planche, avec l’acceptation de notre V... M..., c’est que la
civilisation égyptienne est une des plus brillantes de l’humanité. Que ce soit dans le
domaine de la pensée, de la religion, de l’architecture et de la vision qu’avaient les
Egyptiens de la mort et de l’éternité, c’est une civilisation qui constitue un des
creusets de la connaissance. Elle a apporté à notre pensée un certain nombre de
symboles, d’idées et de représentation du monde qui figurent, ça et là, dans nos
rituels et que je vais essayer de synthétiser.
- Introduction :
Je vais donc tenter de faire un parallèle entre la religion et la pensée égyptienne et
les thèmes symboliques correspondants que nous pouvons aborder dans ce lieu.
Il faut d’abord préciser que dans la religion des anciens Egyptiens, qui s’est
développée il y a environ 5000 ans pour s’éteindre il y a à peu près 1.500 ans, il y a
au départ deux courants :
1) Les croyances populaires avaient donné naissance à un grand nombre de
divinités, locales pour la plupart.
2) Les prêtres et les rois ont développé une conception religieuse unifiée, en
cherchant à privilégier leur propre dieu qui deviendra l’ancêtre de toutes les autres
divinités C’est ainsi qu’il existe quatre centres religieux principaux : Héliopolis,
Memphis, Hermopolis et Thèbes.
Dans un premier temps, il est donc nécessaire de faire une approche de la
cosmogonie égyptienne qui pourra donner lieu le cas échéant à des
correspondances sur le plan maçonnique.
Dans un deuxième temps, il conviendra de faire un parallèle entre le Temple M... et
le rituel du premier degré avec leur correspondance éventuelle dans le domaine de
la religion et du sacré égyptiens.
Enfin, et c’est peut-être le point le plus important, je vais m’efforcer de rechercher les
traits communs entre l’initiation maçonnique et le voyage des morts dans l’au-delà
égyptien.
I La cosmogonie égyptienne
Il faut préciser d’abord que la cosmogonie, c’est la recherche de la création du
monde, de la connaissance du livre du monde et de ses grands mythes.
Au départ, éclairons deux points :
1) La divinité primordiale en Egypte, quel que soit le centre religieux auquel elle
appartienne ne peut pas s’identifier à ce que nous appelons le Principe. L’Egypte ne
connaît, tout au moins dans les textes, que des démiurges, qu’ils s’appellent Atoum,
Rê, Ptah ou Amon, ce sont des dieux créateurs du monde terrestre et de l’humanité.
Mais tous les dieux, le monde et l’humanité étaient préexistants dans les eaux
primordiales qu’on appelle le « Noun » dans les textes égyptiens. On peut faire ici
une petite comparaison entre cette théorie et la Genèse où il est dit : « Le souffle de
Dieu (ou d’Elohim) planait à la surface des eaux », alors que tout était vide, ténèbres,
désert. Les eaux primordiales sont donc une origine commune à plusieurs
cosmogonies.
2) Dans la Genèse, la création est progressive : création en six jours, alors que pour
l’Egypte tout est déjà créé dans le Noun, mais existe à l’état latent.
3) Prenons comme exemple, la cosmogonie héliopolitaine.
- Le NOUN :
Le Noun est donc un monde aqueux dont les eaux symbolisent la substance
primordiale, mais elles sont destinées à revenir à la fin de tout cycle historique ou
cosmique. On peut ici penser aussi au Déluge de la Bible.
Mais le Noun représente aussi le monde des ténèbres, l’obscurité. Et ouvrir les
ténèbres, c’est l’acte qui permet d’accéder à la vie. C’est donc, à partir du NOUN que
va être déclenché le processus créateur : l’apparition du premier tertre, le BENBEN,
ce que les Egyptiens appelaient « la première place » ou « le premier jour ».
Alors va surgir le démiurge : Atoum.
- ATOUM :
Le NOUN est à l’origine de l’autogenèse du dieu ATOUM qui va devenir le dieucréateur. Il est venu à l’existence par lui-même, de lui-même. Il était jusqu’alors
immergé, en inertie et le NOUN va l’initier à prendre conscience de lui-même et à
inventer la vie.
Au départ, Atoum est le dieu unique, « l’indifférencié ». Plus tard, Rê deviendra une
forme d’Atoum, sa manifestation visible. Il y aura donc une représentation Atoum-Rê,
en fait dieu unique avec deux vocables différents.
- CHOU et
TEFNOUT : Atoum va alors créer deux divinités, mais, comme on l’a dit plus haut,
qui préexistaient déjà, à l’état latent dans le NOUN. Ces deux divinités sont CHOU et
TEFNOUT. Elles représentent traditionnellement, « l’atmosphère » et « l’humidité »,
mais vont très vite être assimilées à la Vie, (c’est CHOU, divinité masculine) et à
l’ordre et l’équilibre, (c’est TEFNOUT, divinité féminine). Celle-ci prendra le nom de
MAÂT qui est l’élément essentiel pour assurer l’ordre cosmique et l’ordre terrestre
dans le royaume d’Egypte.
- MAÂT : MAÂT, c’est l’ordre issu du chaos primordial. C’est une notion extrêmement
importante pour l’Egyptien, car pratiquer la MAÂT, c’est non seulement éviter de
porter atteinte à l’ordre établi et là, c’est le roi ou le Pharaon qui en est responsable,
mais aussi, c’est protéger l’harmonie sociale, instaurer une véritable solidarité entre
les hommes.
Donc, MAÂT est une des principales forces nécessaires à la conservation de
l’univers. Elle est fille d’Atoum-Rê et donc obligatoirement liée à toute forme
d’existence. C’est l’équilibre du monde.Grâce à elle chaque chose est à sa place.Elle
incarne la morale universelle.
CHOU, en ce qui le concerne, est le lien entre le créateur et le monde créé. Il sert
d’intermédiaire en propageant son énergie vitale à travers le monde. Mais, pour le
défunt, il est aussi l’échelle entre la terre d’ici bas et le ciel de l’au-delà.CHOU et
TEFNOUT donnent naissance à leur tour, à deux divinités : GEB, c’est la Terre,
divinité masculine et NOUT, le Ciel, divinité féminine.
- GEB et
NOUT : C’est CHOU qui est chargé de la séparation du Ciel et de la terre. Cette
séparation est expliquée au Nouvel Empire comme la conséquence d’une lutte et
d’une punition pour les hommes qui s’étaient révoltés contre les dieux.
Corrélativement, apparaît donc l’idée d’un « âge d’or » qui avait précédé le monde
actuel. C’est en quelque sorte le mythe du Paradis perdu que l’on retrouvera plus
tard chez Hésiode et dans les mythes chrétiens.
- OSIRIS-ISIS
-SETH GEB et NOUT vont avoir quatre enfants : OSIRIS, SETH,
-NEPHTYS ISIS et NEPHTYS. Osiris épousera Isis et SETH épousera Nephtys.
L’ensemble de ces neuf divinités va constituer ce qu’on appelle l’Ennéade.
Pour compléter ce survol de la cosmogonie égyptienne, il convient de parler de trois
mythes essentiels :
- la création de l’humanité
- le mythe de la Lointaine : HATHOR Sekhmet
- le mythe d’Osiris et la notion du mal
A) La création de l’humanité :
Elle est relatée dan les Textes des Sarcophages, eux-mêmes développant les Textes
des Pyramides écrits antérieurement (entre la VIème et la XIIème dynastie, soit entre
– 2350 et – 1790).
Le démiurge, Atoum ou Rê, se sert de son œil pour créer. Cet œil, dans les textes,
est toujours écrit au singulier et il est quelquefois appelé « l’unique ». C’est l’œil
solaire et vous voyez tout de suite la correspondance avec le delta rayonnant. Cet
oeil a la propriété d’avoir une mobilité indépendante et le dieu peut l’envoyer où il
veut. Bien sûr, tout ceci est symbolique et il faut dans ce geste voir la
correspondance avec nos expressions « jeter un coup d’œil » ou « jeter un regard
sur ».
En fait, les Textes des Sarcophages ne donnent pas d’explication particulière au
geste du démiurge. Il a envoyé son œil alors qu’il était en colère et l’absence de cet
œil a provoqué ses larmes. Ce sont ces larmes qui ont créé les hommes. Le texte dit
« Les larmes, c’est ce que j’ai produit à cause de la colère contre moi, les hommes
appartiennent à la cécité qui est derrière moi. »
Par conséquent, la condition humaine est empreinte d’aveuglement. Il y a là une
correspondance évidente avec notre Rite puisque le profane, « plongé dans les
ténèbres », ne recouvre la vue qu’après son initiation.
Mais, pour l’Egyptien, les ténèbres n’ont pas le même sens que dans la pensée
occidentale : il ne s’agit pas d’un obscurcissement de la pensée et de la raison, mais
il s’agit essentiellement de tristesse et de désespoir. Les dieux sont issus d’un
mouvement de joie du créateur, alors qu’une situation de tristesse est à l’origine de
l’humanité.
Ceci dit, l’humanité, en Egypte, n’est pas considérée comme le couronnement de la
création. Il n’y a pas de hiérarchie ou de succession dans les éléments de la
création. Tout était préexistant dans le NOUN, mais il incombe aux hommes de
maintenir le monde et de garantir sa régénération permanente grâce au rituel. Le
R.E.A.A. ne se maintient-il pas aussi grâce au rituel ?
Les rapports entre l’homme et son créateur ont évolué entre le Moyen Empire et le
Nouvel Empire.
Au Moyen Empire (XIème et XIIème dynasties : de – 2060 à – 1790), le démiurge ne
montre aucune sollicitude envers l’homme. Celui-ci est pour lui, un être imparfait et
aveugle, il en reste détaché.
Au Nouvel Empire (XVIIIème a XXème dynasties: de - 1555 à - 1080), les hommes
restent imparfaits et aveugles, mais ils réclament la protection de leur créateur. Et le
démiurge va être à l’écoute de chaque individu et pourvoit à tous ses besoins
matériels et moraux.
Enfin, la notion de fin du monde existe dans les Textes des Sarcophages. Le
démiurge annonce la fin du monde, seuls Osiris et lui survivront et le monde
retournera à l’état de NOUN.
B) Le mythe de la Lointaine :
- 1) Il y a une première version de ce mythe dans le « Livre de la Vache du Ciel »
(car le ciel, NOUN, est souvent représenté comme une vache dont la robe est
constellée d’étoiles, les quatre pattes en constituant les quatre piliers) qui est en
quelque sorte la préfiguration de l’histoire du Déluge :
- Le démiurge est las de l’ingratitude des hommes. Il veut les punir et leur envoie son
œil sous la forme d’Hathor, sa fille. Mais celle-ci est animée d’une rage terrifiante et
sous l’aspect de la déesse lionne Sekhmet, elle décide d’exterminer l’humanité. Rê,
pris peut-être de compassion, envoie Thot pour arrêter le carnage. Celui-ci mêle au
sang des victimes le jus d‘une plante. Le breuvage, ressemblant à de la bière, est bu
par la lionne qui s’enivre et s’endort. Après son sommeil, apaisée, la lionne Sekhmet
retrouve l’apparence d’Hathor et le cycle de l’humanité peut se poursuivre. Mais l’œil
vengeur, revenu pour retrouver sa place auprès du démiurge, trouve sa place
occupée par un autre œil, d’où colère d’Hathor et nouveau conflit. Rê décide alors de
donner à Hathor une nouvelle place, c’est l’Uraeus, le cobra femelle, le troisième œil.
- 2) La deuxième version est presque identique sinon que c’est CHOU et THOT,
celui-ci sous la forme d’un babouin qui persuade la déesse de revenir en Egypte, où
sous la forme de Bastet, la chatte bienfaisante, elle devient la protectrice de tous les
foyers.
Le symbole de ce mythe, c’est la manifestation de la force destructrice qui provoque
la mort, mais qui peut être différée et manifeste ainsi le renouvellement éternel de la
vie.
Ce mythe symbolise aussi le thème de l’inondation du Nil qui revient tous les ans,
venue du Sud, comme la Lointaine, et qui apporte avec le nouvel an, la joie et la
prospérité pour le peuple égyptien.
L’œil solaire est revenu comme l’inondation de son légendaire voyage. C’est le
mythe de l’éternel retour. L’Egypte, comme disait Hérodote, est un « don du Nil »,
mais elle est aussi la fille du Soleil. L’eau et le feu apportent ainsi les ingrédients
nécessaires à la richesse de la terre nourricière, la terre noire, le limon, KHEMET en
égyptien qui est le vrai nom du Double Pays.
Animé par le souffle d’Atoum ou de Ptah (démiurge de Memphis), nous retrouvons ici
les quatre éléments nécessaires à la vie.
- 3) Le mythe d’Osiris :
Osiris, à l’époque où les dieux et les hommes cohabitaient, avait réuni la Haute et la
Basse Egypte et avec son épouse Isis, ils s’appliquaient à rendre les hommes
heureux. Ils leur apprirent à cultiver le sol, leurs donnèrent des lois et une religion. Ils
vivaient dans la Maât.
Il se trouve que Seth, frère d’Isis et d’Osiris, est devenu très jaloux de la popularité
de celui-ci. SETH est la personnification de la violence et du désordre (c’est le dieu
TYPHON des grecs).
Pour se débarrasser de son frère, il fabrique un coffre en bois précieux et lors d’un
banquet, il promet de le donner à celui qui, en s’y allongeant, le trouverait à sa taille.
Bien entendu, le seul à qui pouvait convenir ce coffre était Osiris. Une fois celui-ci
couché à l’intérieur, les complices de SETH clouent le couvercle et le scellent avec
du plomb fondu. Le coffre est ensuite jeté dans le Nil, de là il gagne la mer et il
s’échoue sur les rivages de Byblos au pied d’un tamaris. Cet arbre grandit tellement
qu’il dissimule le corps divin dans ses racines.
Isis, partie à la recherche de son époux, réussit à le retrouver par des voies plus ou
moins surnaturelles, emporte son cercueil en Egypte et le dépose dans les marais du
delta. Mais, une nuit que SETH « chassait avec sa meute au clair de lune », il
découvrit par hasard le corps d’Osiris et le découpa en 14 morceaux qu’il dispersa
partout au fil du Nil.
Isis recherche et trouve, avec l’aide de NEPHTYS et d’ANUBIS, tous les morceaux et
reconstitue le corps à l’exception du phallus qui avait été avalé par le poisson «
oxyrinque » ; ensuite, elle se transforme en oiselle et bat des ailes au-dessus du
corps d’Osiris pour lui rendre le souffle. Puis, elle remplace le membre viril d’Osiris et
descend sur son corps réanimé. HORUS devait être le fruit de cette union post
mortem. Isis incarne donc le principe actif du couple divin. Elle est la fille de Rê, et
comme toutes les filles du Soleil, elle a le pouvoir de donner la vie.
OSIRIS, quant à lui, était une divinité de la culture et de la végétation. Et en cela, il
était en relation étroite avec la fertilité du sol et la crue du Nil. Le démembrement de
son corps rappelle ainsi la dispersion des grains de blé dans la terre où ils vont
pourrir pour mieux renaître.
C’est ANUBIS qui va aider ISIS à reconstituer le corps d’OSIRIS et il va procéder
ensuite à son embaumement. Il deviendra ainsi le créateur de cette pratique.
ISIS, elle, représente la déesse universelle et la grande magicienne. Ce sont les
larmes qu’elle versait sur le corps de son époux défunt qui représentent chaque
année le début de la crue du Nil.
C’est la veuve dont tous les initiés sont les enfants. Dans les Textes des
Sarcophages, HORUS est appelé « le fils de la Veuve ». Nous sommes tous des
Horus.
HORUS avait été protégé par sa mère ISIS dans les marais de CHEMNIS où elle le
tenait caché à l’abri de la violence de son oncle SETH. Il y grandit, nous disent les
Textes, en beauté, en force et en sagesse. Mais le mythe ne s’arrête pas là.
OSIRIS va devenir alors KHENTYMENTIOU, « celui qui est à la tête des
Occidentaux ». Les Occidentaux, ce sont les morts, car ils sont en général enterrés
sur la rive gauche du Nil, vers l’occident, là où le soleil disparaît. C’est ainsi qu’il
devient le dieu des morts, dieu souterrain que nous retrouverons tout à l’heure.
C’est son fils HORUS qui doit lui succéder sur le trône du Double Pays. Mais il est
contesté par SETH et il va engager la lutte avec celui-ci pour venger son père. Cette
lutte aura pour arbitre le tribunal des dieux. Un des épisodes les plus célèbres de
cette lutte est celui où SETH arrache l’œil d’HORUS et le brise. Heureusement,
THOT, le dieu de la connaissance, reconstitue l’organe et rend à HORUS son œil
intact. C’est l’œil OUDJAT (et pour ceux d’entre nous qui ont assisté à la tenue de la
cayenne.
« Pythagore », ils ont pu remarquer que le delta rayonnant contenait en son centre
l’œil oudjat. Cet œil devint le symbole de la santé et de la protection et HORUS
acquit ainsi le pouvoir de ranimer son père en lui présentant son œil intact. HORUS
obtint alors gain de cause et fut confirmé par le tribunal des dieux comme roi de
Haute et Basse Egypte. Bien entendu, dans ce mythe, HORUS représente la
Lumière et SETH les Ténèbres. C’est la perpétuelle lutte entre le bien et le mal. Au
départ SETH tue OSIRIS : le mal triomphe du bien. Et pour que le bien triomphe du
mal, il faudra faire appel au tribunal des dieux. Mais la lutte entre Horus et Seth était
indispensable à l’équilibre cosmique.
II Temple – Rituels et symboles
A) Le Temple :
Comme le temple maçonnique, le temple égyptien est orienté. Une seule exception,
tout au moins à ma connaissance, est le Temple d’Edfou dédié à Horus qui est axé
différemment.
Des pylônes d’entrée donnent accès à une cour intérieure « le parvis », accessible à
tous, comme le sera le parvis du Temple de Salomon à Jérusalem. Ce parvis est
limité sur sa face postérieure par un pylône intérieur qui marque la frontière entre le
profane et le sacré et seuls les initiés pouvaient franchir sa porte pour pénétrer dans
l’enceinte divine du Temple.
Vous voyez tout de suite la correspondance avec le Temple maçonnique.
Ensuite, l’initié passe par deux salles dites « hypostyles » et il arrive à la salle des
offrandes où les prêtres préparaient la nourriture et la boisson destinées au dieu.
Puis un vestibule ou pro-naos constituait la salle de purification.
Enfin, on arrive au sanctuaire qui abrite le Naos contenant la statue du dieu. Nous
sommes là dans la partie la plus sacrée du temple qui correspond à l’Orient ou au
Saint des Saints.
Dans un temple égyptien, il faut noter que plus on s’approche du sanctuaire, plus le
plafond est bas et plus les dimensions sont réduites. De même, la lumière est de plus
en plus tamisée, comme si en s’approchant de la lumière spirituelle, on avait de
moins en moins besoin de la lumière naturelle.
De plus, on peut dire que, dans les temples égyptiens, les fresques, les peintures et
les écrits, contiennent les signes et les symboles que se transmettent les initiés à
travers les âges. Voyez la correspondance avec le tableau de loge.
De toutes façons, en Egypte comme chez nous, le temple donne des repères, des
balises, des garde-fous. A nous de les interpréter.
Cependant, il existe, à mon sens, une différence essentielle entre les deux temples.
Notre temple est ouvert sur le monde, il est tourné vers l’homme et représente le
modèle de la construction du temple intérieur pour chacun de nous. Le temple
égyptien est ouvert vers la divinité, vers l’au-delà. L’initié égyptien est soumis aux
dieux. La vie terrestre et ses plaisirs l’intéressent, certes, mais il est toujours
préoccupé par sa vie post mortem.
Le maçon, lui, est libre de choisir sa représentation de l’au-delà, qu’il soit agnostique
ou croyant.
Le temple égyptien est toujours bâti en pierre parce qu’il est conçu pour l’éternité. De
plus, il n’est jamais fini car une architecture achevée est une architecture morte.
Pour nous, la construction n’est, non plus, jamais terminée.
B) Les symboles :
- 1) Le Soleil :
Le Soleil a un rôle primordial dans la religion égyptienne. Que ce soient Atoum, Rê
ou Amon, le démiurge représente le soleil qui règle le cycle cosmique et apporte la
vie sur la terre. Il est facteur d’ordre. C’est lui qui ordonne les trois saisons : Akhet, la
saison de l’inondation, Péret, la saison de l’hiver, Chémou, la saison des moissons.
La F... M... est aussi de rite solaire. On retrouve le soleil dans nombre de ses degrés
et il est assimilé à la lumière.
Il y a une analogie évidente entre notre Orient et les deux yeux de Rê ou d’Horus
représentant le soleil et la lune, et l’uraeus sur le front de Rê qui représente le
troisième œil, celui de la sagesse et également le feu du soleil. Et le soleil comme
l’œil est un instrument de connaissance.
Pour l’Egyptien, il existe trois phases dans la course du soleil.
- Le matin, il est KHEPRI, le dieu scarabée. Il contient l’idée de la naissance, de la
transformation et du devenir. Le scarabée qui sort le matin de son trou, à reculons, et
poussant avec ses pattes postérieures une boule de détritus est assimilé au soleil
levant qui renaît après son passage dans les régions souterraines.
- Au zénith, le soleil se manifeste sous la forme de Rê-Horakhty ; Rê : « le soleil » et
Horakhty : « Horus de l’horizon ». C’est le soleil, dans toute sa luminosité et sa
chaleur. Les forces positives du soleil ont triomphé du chaos qui cherche à s’opposer
au retour de l’astre dans le monde sensible. De plus, le soleil au zénith indique le
midi, le lieu d’où vient l’inondation salvatrice.
- A son déclin, le soleil est évoqué par le dieu Atoum, représenté sous les traits d’un
vieillard appuyé sur une canne. On pense que cette représentation a été à l’origine
du Sphynx questionnant Œdipe.
Atoum ayant été le démiurge, à l’origine du monde, pourquoi l’avoir choisi pour
incarner l’astre moribond ?
Le désir des égyptiens a toujours été de garantir la pérennité des cycles cosmiques.
En choisissant le même dieu pour évoquer le commencement et le soleil déclinant,
on le rend porteur de la promesse de vie du lendemain liée au processus de son
renouvellement.
La perception qu’ont les hommes du soleil, c’est-à-dire son rayonnement, est
personnifiée par une entité féminine, les filles du soleil : HATHOR (ou SEKHMET),
MAÂT ou TEFNOUT.
Leur rôle est interchangeable selon les mythes. Mais TEFNOUT est plus
particulièrement assimilée au principe de chaleur qui jaillit du soleil – démiurge au
moment de la création. MAÂT, comme on l’a déjà vu, est l’équilibre divin
représentant le grand ordonnateur du cosmos. SEKHMET est l’incarnation de la
puissance des radiations solaires. Elle a des fonctions destructrices, mais aussi elle
aide le souverain égyptien à maintenir hors d’atteinte des attaques du chaos, le
royaume des deux Terres. HATHOR, enfin, est l’énergie lumineuse de la vie
perpétuellement renouvelée. Déesse de l’amour, elle incarne le modèle par
excellence du principe féminin.
- 2) ATON :
Le paroxysme du culte du soleil fut atteint à la XVIIIème dynastie (de – 1350 à –
1335) pendant la période que certains appellent « l’hérésie amarnienne ». Il s’agit du
règne d’Aménophis IV qui a pris le nom d’AKHENATON qui signifie « celui qui est
agréable à ATON ». Il a fait table rase des divinités traditionnelles de l’EGYPTE en
particulier d’Amon pour introduire le culte monothéiste du dieu solaire incarné par le
disque d’ATON. Celui-ci était déjà vénéré en Egypte sous la forme mineure du dieu
solaire : RÊ-HORAKHTY. Ce disque est représenté avec des rayons protecteurs
terminés par des mains tenant le signe de vie : l’ANKH.
Ces mains et ces rayons sont représentés tournés uniquement vers le pharaon.
Cela signifie qu’Akhenaton n’a nul besoin d’intermédiaires, c’est-à-dire de prêtres
entre le dieu et lui.
Il a ensuite rompu complètement avec Thèbes et son dieu Amon en abandonnant la
capitale et en transférant la cour dans un lieu situé à peu près à mi-chemin entre
Thèbes et Memphis. Il fit construire une ville et en fit sa capitale sous le nom
d’AKHETATON qui signifie « l’horizon du disque ». Ce site est connu aujourd’hui
sous le nom d’El Amarna.
AKHENATON aurait composé lui-même un hymne à ATON qui a une certaine
ressemblance avec le psaume 104 de la Bible. Ce poème résume toute l’éthique du
culte d’Aton et souligne que seul le pharaon peut s’adresser au dieu : « Tu te lèves
en paix à l’horizon du ciel, ô vivant ATON, créateur de la vie… Nul autre que ton fils
AKHENATON ne te connaît. Tu lui as enseigné tes desseins et ta puissance ». Si
l’on voulait résumer la pensée d’AKHENATON en un mot, on pourrait dire : Amour.
Effectivement, le dieu ATON est lumière, joie et amour. Grâce à lui, le cœur des
hommes s’éveille, ils essaient de vivre en harmonie sans se détruire. Ils doivent
pratiquer la tolérance. Vénérer ATON, c’est ne connaître aucune pauvreté spirituelle
ou matérielle.
Alors, tolérance, amour, paix, joie, ne vous semble-t-il pas avoir entendu ces mots
dans ce lieu ?
Une simple réflexion sur ce règne : AKHENATION était un penseur, d’aucuns disent
un philosophe. Mais il est aussi un homme d’action car il a voulu faire passer ses
idées dans la vie de tous les jours. Or ce fut un échec, l’action a échoué. On peut
peut-être rapprocher ce résultat des questions à l’étude des Loges : on nous
demande toujours de savoir comment nous pouvons faire passer notre message
dans le monde profane. Alors AKHENATION s’est-il trompé ? Manquait-il d’une
certaine connaissance ? Sa vision de la lumière était-elle imparfaite ? Je vous laisse,
mes frères, réfléchir sur ce sujet.
- 3) La barque du Soleil :
A l’origine de ce mythe, existe un sentiment de peur. La création est remise en
question tous les jours et rien ne prouve que le soleil va reparaître le lendemain. Or
les prêtres et le pharaon sont là pour assurer l’équilibre cosmique chaque jour. Il a
donc fallu élaborer ce mythe du voyage du soleil entre les douze heures du jour et
les douze heures de la nuit.
Nous avons déjà évoqué plus haut, les trois aspects du soleil dans sa course diurne.
Nous allons maintenant nous intéresser à sa course nocturne. Il s’agit de la « mort »
de la force divine et de sa gestation nocturne, donc mort d’un côté et renaissance
divine de l’autre.
Pendant cette mort symbolique, le soleil effectue un mystérieux voyage nocturne
dans un monde constitué de douze régions ou heures, qu’il doit parcourir entre le
crépuscule et l’aube.
Il effectue son parcours sur une barque conduite des deux rives d’un fleuve par
différents génies et il voyage en compagnie d’un certain nombre de divinités qui le
protègent. Lui-même est figuré dans les replis du serpent MEHEN qui incarne les
forces potentielles de la vie. Au fur et à mesure de ce voyage, le Soleil se régénère.
Au cours des heures, il affronte un grand danger, car le CHAOS sous la forme du
serpent APOPHIS guette la barque divine. C’est la représentation des puissances
hostiles et nuisibles qui tendent à faire revenir le monde créé à l’état informel. Après
douze heures de voyage, le Soleil reprend l’aspect du scarabée KHEPRI et s’envole
pour un nouveau matin. Chaque nuit, il recommencera sa lutte et en sortira
vainqueur pour recréer la vie sur terre.
Ici, il faut bien comprendre que pour les Egyptiens, il s’agit d’une assimilation entre
Rê, dieu diurne et Osiris, dieu nocturne. C’est une interprétation qui peut apporter de
l’eau au moulin de ceux qui voient dans les divinités égyptiennes la marque d’un dieu
unique existant sous diverses manifestations.
C) Le rituel :
Le rituel, en Egypte, est à l’origine de l’ordre qui doit régner sur le Double Pays, à
l’image de l’ordre cosmique. Et le rituel qui vise à maintenir l’ordre fixe les règles du
cheminement initiatique. Il y a des gestes rituels qui sont écrits ou gravés sur les
murs des temples, gestes symboliques qui ne sont qu’évoqués ; à nous de les
interpréter.
Ces rituels sont également évoqués dans l’architecture du temple égyptien. Il suffit
d’entrer dans le temple de Karnak et d’avancer progressivement depuis les premiers
pylônes, en passant par la salle hypostyle jusqu’au Naos où était la statue du dieu
Amon, le « caché ». Ce cheminement faisait l’objet d’un rituel qui permettait, comme
pour nos temples, de mener l’initié vers son intériorité et sa démarche sur la Voie
Royale.
Pour l’initié égyptien, le temple est la demeure du dieu et il représente aussi le cœur
de l’homme, temple intérieur, donc. Ainsi, grâce au rituel, pouvait-il peut-être
entendre battre son propre cœur au rythme du cœur divin.
Le rituel, comme pour nous, permet d’abord de passer du profane au sacré et
ensuite tend à assurer l’ordre intérieur de chacun de nous pour mieux assurer l’ordre
extérieur.
D) Symbolisme des Pyramides et obélisques :
Avant de passer à la dernière partie de cette planche, je voudrais dire quelques mots
du symbolisme des Pyramides et des obélisques.
- 1) Les Pyramides :
Elles sont des tombeaux qui apparaissent dans l’histoire de l’Egypte à partir de la
IIIème dynastie, notamment avec la pyramide à degrés de Djeser (- 2670 à – 2649) à
Saqquarah construite par l’architecte et vizir Imothep.
Les pyramides sont des lieux destinés à l’esprit et des constructions faites pour «
l’éternité ».
Demeure des rois après leur mort, elles constituent un édifice dont le sommet s’élève
vers le ciel et qui va permettre au roi défunt de s’élever vers son destin céleste. En
effet, le monarque va quitter le monde des vivants pour rejoindre, selon les uns le
Soleil, son père cosmique, selon les autres, les étoiles où il prendra place dans la
voûte nocturne. De toutes façons, il va se fondre dans le grand cycle cosmique pour
y rejoindre les puissances divines.
Autour de la pyramide, il y avait de longues fosses destinées aux barques du soleil,
car symboliquement le roi était censé refaire le voyage de Rê dans la barque solaire.
On a d’ailleurs trouvé en 1954, à la base de la pyramide de Cheops, sous des dalles
de pierre, deux barques de ce type.
Les pyramides délimitent les quatre points cardinaux : les radiations du soleil sont
conçues comme un faisceau triangulaire de rayons. Et si on projette ce triangle
lumineux vers les quatre points cardinaux, on obtient l’image d’une pyramide.
A noter que dans la Vallée des Rois que les Egyptiens appelaient : « La grande
campagne » ou « La grande prairie » (Ta sekhet aât), la colline qui surplombe
l’ensemble a l’aspect d’une pyramide naturelle.
- 2) Les obélisques :
Ils représentent l’axis mundi, intermédiaires entre le ciel et la terre. Par sa pointe,
l’obélisque capte l’énergie cosmique et par sa base, il canalise l’énergie tellurique.
Mais il représente aussi pour l’Egyptien le tertre primordial, le Benben qui s’est élevé
au-dessus du NOUN et qui constitue l’origine du monde. C’est sur ce tertre
qu’ATOUM transformé en oiseau BENOU (le héron cendré qui deviendra plus tard le
Phenix) va créer la lumière et la vie. On a pu dire que les obélisques étaient les
gardiens de pierre du monde invisible.
III Le voyage des morts en Egypte
et l’initiation M...
A) Notions sur la mort dans l’antiquité égyptienne :
L’Egyptien vit avec l’idée de la mort et il s’y prépare, mais une idée essentielle le
hante toute sa vie : c’est que son corps demeure intact à son décès. Dans le cas
contraire sa mort deviendrait définitive et lui interdirait l’entrée du voyage vers Osiris.
D’où l’importance de l’embaumement et des bandelettes pour empêcher que le corps
ne se désunisse.
Il y a donc continuité entre la vie et la mort. Celle-ci n’est qu’un seuil pour entrer dans
l’à-venir. L’Egyptien pense que le temps est circulaire et qu’il va retrouver dans le
champ des Roseaux (l’Orient Eternel pour nous) sa famille, sa vie et même son
travail passé.
Dans le monde occidental souvent la mort est rejetée, on feint de l’ignorer. Elle
engendre le malaise et l’angoisse. On essaye de l’occulter et on vit comme si
l’existence présente devait être éternelle.
C’est tout le contraire pour l’Egyptien qui place la mort au centre de ses réflexions
parce qu’elle s’inscrit logiquement dans un temps cyclique. Il se sent un être
responsable qui s’intègre dans les lois et cycles qui régissent l’Univers.
Or que nous apprend-on ici ? Qu’il existe un plan du G...A...D...L...U... qui régit les
lois cosmiques et que, par notre réflexion, notre connaissance de nous-mêmes et
notre assimilation à l’édifice du monde terrestre, nous devons arriver à nous intégrer
dans le monde cosmique.
La principale préoccupation du Pharaon dès son avènement est de construire deux
monuments :
- 1) Son « château de millions d’années »
- 2) Son tombeau
- Qu’est-ce que le « château de millions d’années » ?
C’est un édifice, d’abord, qui est un lieu de culte funéraire. Disons tout de suite que
ce n’est pas un tombeau, c’est un temple, un lieu de régénération. Il est lié à l’idée de
la permanence du principe monarchique, et aux phénomènes dont dépend la survie
du pays, le soleil ou encore le retour de l’inondation. Donc, dans ce lieu on
représente la puissance quasiment divine du souverain et la prospérité du pays.
Les trois « châteaux de millions d’années » les plus connus sont le Ramesseum,
édifié par Ramsès II sur la rive gauche du Nil dans la région thébaine, le château de
Ramsès III à Médinet Habou dans la même région et surtout le château de millions
d’années d’HATSEPSOUT à Deir el Bahari également dans la même région.
- Le tombeau :
Mais l’autre préoccupation du roi était son tombeau. Le tout était conçu pour vivre au
rythme de l’univers. D’ailleurs, chaque partie du corps du souverain était dédiée à un
dieu.
Au chapitre 42 du Livre des morts on peut lire : « Il n’y a pas une seule partie de mon
corps qui ne soit liée à un dieu. » Le corps est donc la projection du cosmos en
l’homme. Peut-être pouvons-nous y voir la parcelle de divinité qui existe en chacun
de nous et que nous nous efforçons de libérer en dégrossissant la pierre brute.
Et puis, dans la chapelle qui précède le caveau funéraire proprement dit, il y a des
inscriptions qui s’adressent à tous ceux qui viennent visiter le mort ou se recueillir sur
sa dépouille. C’est ce qu’on nomme : « L’appel aux vivants ». Parce que le mort doit
demeurer présent dans la mémoire des hommes. Les textes interpellent le visiteur.
Ils l’invitent à les lire et à prononcer quelques mots en faveur de l’occupant de la
tombe.
Il y a des formules à réciter, l’évocation du nom du défunt pour rappeler ce qu’il a
vécu, et rétablir les liens qui ont été dénoués lors du trépas. Il s’agit d’un lien de
solidarité entre les morts et les vivants. Et en revanche, celui qui est disparu
témoignera auprès des dieux de la sollicitude de celui qui l’aura un moment sauvé de
l’oubli.
L’idée principale est qu’il existe un lien entre le mort et les vivants.
Je pense que ceci nous remémore la chaîne universelle, incorporant tous ceux qui
sont passés à l’Orient Eternel.
Donc, après la mort, le pharaon ou le simple mortel va devenir un Osiris.
Mais il faut là préciser quelques notions qui sont spécifiques de l’Egypte antique. Il
s’agit de trois symboles qui sont : le kâ, le bâ et l’jb.
B) Le kâ, le bâ et l’jb :
- 1) Qu’est-ce que le kâ :
Le kâ, c’est le double de la personnalité ; il est créé par KHNOUM, le divin potier en
même temps que l’embryon. Ceci est valable aussi bien pour le pharaon que pour
l’Egyptien du peuple. C’est en fait une part immatérielle de l’homme. Mais le kâ a une
existence indépendante.On est tenté de parler de double car il suit l’évolution
terrestre de son alter ego. Les dieux eux-mêmes possèdent un kâ. Il représente
l’énergie vitale. A la mort, le kâ se sépare du corps, mais c’est grâce à lui que le
défunt survit après son trépas. Sa personnalité se concentre sur ce support invisible.
L’expression égyptienne qui désigne le mot mourir est celle-ci : « passer à son kâ ».
- 2) Qu’est-ce que le bâ ? :
Le bâ est un élément essentiellement mobile. Il est représenté par un oiseau à tête
humaine et cette tête représente le défunt. Il permet à celui-ci de voyager dans la vie
courante pendant le jour.
Ceci présume que le défunt souhaite aller et venir entre le monde des morts et celui
des vivants en passant la nuit dans l’univers souterrain et le jour sur la terre, voire
dans le ciel.
Certains auteurs ont voulu traduire le bâ par l’âme. Mais je pense que c’est inexact
car la notion d’âme est chrétienne ou platonicienne recouvre d’autres acceptions que
le bâ égyptien. On pourrait plutôt considérer celui-ci comme la conscience du défunt.
Ce bâ va donc pouvoir veiller sur ceux qui sont chers au défunt, mais aussi se
venger de ceux qui lui ont fait du mal.
- 3) Qu’est-ce que l’jb ? :
En égyptien, c’est le mot cœur, l’organe principal de l’homme, celui dont proviennent
toutes les facultés y compris la pensée. Il est très difficile de traduire ce mot, car il
correspond aussi au moi profond. C’est ce qu’on pourrait appeler la conscience.
C) Le voyage des morts en Egypte et l’initiation M... :
- 1) Le point de départ :
C’est la mise au tombeau qui va mener le défunt à l’initiation post mortem.
Pour nous, le point de départ, c’est l’initiation au degré d’apprenti.
Ensuite, l’un et l’autre vont avoir à parcourir des voyages et des épreuves.
Rappelons que l’Egyptien doit aborder ces voyages et ces épreuves avec un corps
intact, référence au mythe d’Osiris.
- 2) L’embaumement et le Livre des morts :
Après sa mort, l’Egyptien était embaumé et la période rituelle pour ce travail était de
70 jours. Là encore, le modèle est l’embaumement d’Osiris. Mais c’est aussi la
période de 70 jours pendant laquelle certaines étoiles disparaissent du ciel Egypte. Il
s’agit en particulier de l’étoile SOTHIS (celle qu’on appelle
SIRIUS)
dont
la
réapparition annonçait l’arrivée de la crue du Nil et donc la régénération de l’Egypte,
saluée comme le retour à la vie d’Osiris.
Tout s’enchaîne donc, la renaissance du mort après l’embaumement, le retour à la
vie d’Osiris et la régénération de l’Egypte par le retour de la crue du Nil. C’est un peu
le mythe de l’éternel retour.
Les voyages et les épreuves du futur initié sont relatés dans ce qu’il convient
d’appeler le Livre des Morts.
Deux mots sur ce livre : il a la particularité de ne pas être un livre et de ne pas parler
de la mort.
C’est une appellation du 19ème siècle. La meilleure traduction qu’on pourrait donner
pour parler des papyrus constituant ce recueil est : « Le livre pour sortir le jour »qui
rappelle donc la notion de bâ.
Il s’agit d’un ensemble de papyrus découverts dans différents tombeaux de la
XVIIIème dynastie. Les égyptologues ont adopté une classification d’après un
exemplaire de référence qui est le papyrus de Turin.
Ce livre donne une succession de formules destinées à aider le mort à passer les
épreuves qui l’attendent. Selon le degré de fortune des décédés et de leur famille,
les scribes écrivaient des textes plus ou moins complets.
- 3) L’ouverture de la bouche et des yeux :
La cérémonie essentielle, au début du rituel, c’est l’ouverture de la bouche et des
yeux. Elle reproduit les gestes des sculpteurs et des tailleurs de pierre pour
l’animation des statues divines afin qu’elles deviennent un point de contact entre les
hommes et les forces invisibles qui régissent le monde. Le prêtre, à l’aide de
l’herminette, effleure la bouche et les yeux de la momie. Ce geste est accompli à
deux reprises pour évoquer la Haute et la Basse Egypte.
Le défunt retrouve ainsi l’usage de ses sens. Mais il n’est encore qu’« éveillé » et
non complètement régénéré.
L’ouverture
des
yeux
nous
la
connaissons
au
moment
de
l’initiation et l’ouverture de la bouche lui permet de prononcer quelques lettres .
Le Livre des morts vient à l’aide de l’Egyptien en lui fournissant comme la « formule
pour ne pas mourir à nouveau dans le monde des morts ». Et puis, pour que le bâ
puisse sortir le jour on lui donne quelques recettes et quelques conseils : « Tu
sortiras dehors chaque matin et tu t’en retourneras chaque soir ».
- 4) Les voyages et les épreuves :
Il va maintenant falloir avancer sur la route qui mène vers la Lumière et vers le Soleil.
Mais là de nombreuses embûches vont se présenter et pour pour l’Egyptien comme
pour le Maçon.
Au cours de ses voyages, l’Egyptien doit avoir la connaissance des êtres et des
lieux, il doit connaître le nom des génies et des dieux qu’il va rencontrer derrière
chaque porte, car connaître le nom d’un dieu, c’est déjà avoir un certain pouvoir sur
lui. Mais c’est aussi un mot de passe qui permet l’ouverture de la porte.
Le franchissement des portes rappelle aussi le passage par la barque solaire des
douze régions de la nuit.
Pour aider l’Egyptien à franchir ces portes, il est aussi aidé par un guide qui n’est
autre qu’Anubis qui l’accompagne dans ses épreuves. Anubis, c’est donc le maître
des cérémonies, le psychopompe qui guide le candidat ou le néophyte pour
l’empêcher de chuter ou de s’égarer. Il est le guide du passage entre le visible et
l’invisible. A la fin de ses voyages, avant de passer la porte qui s’ouvre sur le
Tribunal d’Osiris, le défunt doit également citer tous les noms du roi du domaine des
morts : Osiris.
En quelque sorte, on demande au candidat aux champs des Roseaux de bien
connaître son rituel.
En plus des portes, le mort rencontre des cours d’eau, impossibles à franchir sans
barque. Il lui faut convaincre le passeur de l’emmener sur l’autre rive, mais il connaît
le nocher et il l’appelle par son nom. Tout s’arrange, quoique ensuite il ait à franchir
un mur de feu. Mes FF... apprentis, cela ne vous rappelle-t-il rien?
- 5) Le tribunal d’Osiris :
Enfin, il arrive, toujours conduit par Anubis, devant le tribunal d’Osiris. Là se trouvent
42 dieux, assesseurs d’Osiris et le défunt doit prononcer pour eux un certain nombre
de formules. Et il doit, en plus, faire une confession négative, c’est-à-dire qu’il
énumère tous les péchés qu’il n’a pas commis, en gros toutes les formes d’atteinte à
l’ordre moral, social et religieux.
Il plaide donc non coupable et il est alors mis à l’épreuve de la pesée du cœur. Celuici est posé sur l’un des plateaux d’une balance manœuvrée par Anubis et Horus, et
contrôlée par Thot qui tient lieu de greffier. Sur l’autre plateau, la déesse Maât qui
représente ici la justice et la vérité, pose sa plume. Si le mort a menti, la balance
penchera et le monstre, « la grande avaleuse des morts » qui a une tête de
crocodile, un arrière-train d’hippopotame et un buste de lion, est là pour l’avaler.
Dans le cas contraire, et on ne retrouve que cette alternative dans les textes, le mort
est acquitté par Osiris qui préside le Tribunal, assisté d’Isis et de Nephtys. Il est
reconnu « juste de voix » et devient à son tour un Osiris. Il peut alors gagner sur la
barque de Rê, le champ des Roseaux où il vivra éternellement.
Chez nous, il n’y a évidemment pas de pesée du cœur ni de tribunal, mais le futur
initié accomplit le rituel devant les frères assemblés et s’engage pour l’avenir ayant
été reconnu digne d’être initié, il est reçu par le Vénérable Maître qui préside
l’Assemblée.
CONCLUSION
En conclusion, la civilisation égyptienne est le véhicule d’une tradition comme l’ont
été les civilisations de Sumer, d’Assyrie, de Perse, des Hébreux et plus tard de la
Grèce et de Rome, pour ne parler que du monde méditerranéen antique. Chacune
de ces traditions représente un maillon du fil de la Tradition primordiale qui perdure à
travers les âges et les peuples, venue du fond des âges, « in illo tempore ».
Il n’est donc pas étonnant qu’on retrouve en M... qui, aux dires de René Guénon,
représente avec le Compagnonnage, les deux seuls véhicules actuels de la
Tradition, des éléments repris de cette filière égyptienne, adaptés, bien sûr, à notre
temps et à nos mœurs. « Rassembler ce qui est épars est bien la vocation du M... ».
Il ne s’agit pas d’imiter la tradition de l’Egypte antique, mais de s’imprégner de
l’enrichissement que peut apporter cette civilisation ancienne en n’oubliant pas que
c’est avec « les lumières du passé » que l’on peut dans le présent forger l’avenir.
Les sensibilités, les approches, les mœurs sont différentes, mais l’idée de fond est
toujours la même, c’est de trouver le moyen d’accéder à la Connaissance pour ceux
qui le désirent vraiment.
Bernard V