Le traitement fiscal peut être sévère

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Le traitement fiscal peut être sévère
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semaine du 24 au 30 juin 2011 - n°499
Le RSI apporte ses précisions
sur la réforme des retraites
u Le Régime social des indépendants
(RSI) vient de publier une circulaire
revenant sur les mesures de la loi portant
Réforme des retraites, notamment
le relèvement des bornes d’âge.
La circulaire commente également
les décrets du 30 décembre 2010 relatifs
au dispositif de retraite anticipée
pour carrière longue et du 31 mai 2011
relatif à l’âge d’attribution d’une pension
de retraite à taux plein fixe.
Circulaire RSI C 2011/017 du 14 juin 2011.
La fraude fiscale et sociale
a coûté 3 milliards d’euros
à l’Etat en 2010
u François Baroin, ministre du Budget,
a présenté, mercredi 22 juin, en Conseil
des ministres, le bilan du dispositif de
coordination de la lutte contre la fraude
mis en place par le gouvernement
depuis le début du quinquennat. Au
total, en 2010, 3,4 milliards d’euros de
fraudes fiscales, sociales et douanières
ont ainsi été détectées, dont 457 millions
d’euros au titre des organismes de
Sécurité sociale (+19 % par rapport
à 2009). Les contrôles fiscaux ont
rapporté 16 milliards d'euros en 2010.
Rapport sur l’évolution de l’économie
et sur les orientations des finances publiques
préparatoire au débat d’orientation
des finances publiques.
Instauration d’une taxe
sur les transactions financières
à l’échelle européenne
u L’Assemblée nationale a adopté
le 14 juin dernier un texte visant
à l’introduction d’une taxe
sur les transactions financières
en Europe. Il est recommandé
au gouvernement de présenter, au plus
tard lors du premier Conseil européen
de l’automne 2011, une proposition
législative visant à introduire une taxe
sur les transactions financières
de 0,05 %. Son assiette reposerait sur
toutes les transactions boursières et non
boursières, titres, obligations, et produits
dérivés, de même que sur toutes les
transactions sur le marché des changes.
Résolution relative à l'introduction
d'une taxe sur les transactions financières
en Europe adoptée par l'Assemblée
nationale le 14 juin 2011.
Les adhérents du Cref
font à leur tour appel
du jugement ayant condamné
les ex-dirigeants du régime
u Dans un communiqué, le Comité
d'information et de défense des
sociétaires (CIDS) de la MRFP annonce
que ses adhérents prennent acte
de la décision, prévisible,
des ex-dirigeants du Cref de faire
appel du jugement rendu le 8 juin
dernier par la 11e chambre du tribunal
correctionnel les ayant condamnés
pour abus de confiance. Les parties
civiles avaient demandé au tribunal un
dédommagement au titre du préjudice
économique. Or, il ne leur a accordé que
1 euro au titre du préjudice moral. Les
adhérents du CIDS indiquent qu’ils font
appel devant les juridictions pénales,
à titre reconventionnel du premier appel
des ex-dirigeants de l’ancienne mutuelle
gérante du régime pour réclamer
l'indemnisation du préjudice économique
qui leur a été refusée en première
instance (L’Agefi Actifs n°498, p. 6).
www.agefiactifs.com
ABANDON D’USUFRUIT
Le traitement fiscal peut être sévère
u Lorsqu'elle se présente, la renonciation unilatérale
à un usufruit fait alors craindre une taxation aux droits
de donation dès lors que le bien est productif de revenus,
ce qui est pratiquement toujours le cas dans l'hypothèse
d'une donation temporaire d’usufruit
L’Agefi Actifs. - Pouvez-vous rappeler l’intérêt que
représente la donation temporaire d’usufruit ?
Xavier Boutiron. - Tout d’abord, cette donation
permet à des parents de financer les études ou
l’installation de leur enfant en lui transférant les
revenus d’un bien déterminé - le loyer d’un appartement par exemple - pendant une durée fixe.
Cette transmission permet ensuite d’optimiser
la fiscalité familiale en faisant sortir 100 % de la
valeur du bien de l’assiette de l’impôt de solidarité sur la fortune. Enfin, l’enfant donataire, sorti
du foyer fiscal, ne devrait pas être imposé sur les
loyers qu’il perçoit s’il s’agit de sa seule source
de revenus. La mise en place d’un tel schéma
doit être réalisée au cas par cas en raison des
nombreuses données à prendre en considération, telles que la prise en compte de la perte
d’une part ou d’une demi-part lorsque l’enfant
sort du foyer fiscal.
Par ailleurs, la donation est taxable au barème afférent à toute transmission à titre gratuit,
l’usufruit s’évaluant à 23 % de la valeur du bien
par tranche de dix ans.
D’un point de vue civil, il n’est pas nécessairement judicieux que cette donation soit
rapportable. Il faut ainsi prévoir expressément
que cette donation est faite hors part.
Quel traitement fiscal appliquer au renoncement du donataire à son usufruit avant la date
fixée dans la donation ?
- En cas d’arrivée du terme, l’usufruit s’éteint
sans formalités ni droits et la pleine propriété
se reconstitue sur la tête du nu-propriétaire.
Il est cependant possible à un usufruitier
de renoncer unilatéralement à son usufruit
avant l’échéance fixée. L’article 621 du Code
civil envisage indirectement cette hypothèse.
C’est même un droit pour l’usufruitier de
« déguerpir », selon le terme employé par certains auteurs.Cette situation s’impose donc au
nu-propriétaire.
Fiscalement, ce retour de l’usufruit au
donateur n’est pas taxé. Il est simplement
enregistré aux droits fixes de 125 euros. Cependant, si l’administration rapporte la preu-
xavier
boutiron,
notaire,
Etude Cheuvreux
ve que cette renonciation s’analyse comme
une transmission à titre gratuit, c'est-à-dire
comme une nouvelle donation, elle taxera
l’opération. Je conseille ainsi de ne régler
les droits fixes de 125 euros que dans l’hypothèse où le bien donné en usufruit est une
charge pour le donataire usufruitier, tel un
bien qu’il faut entretenir et qui ne rapporte
pas de revenus.
L’abandon d’un usufruit temporaire est-il fréquemment rencontré en pratique ?
- A ma connaissance, c’est peu fréquent. Une
telle extinction anticipée peut se rencontrer en
cas de cession du bien ou pour des motifs fiscaux. En revanche, cette situation se rencontre
davantage en cas d’usufruit viager, le même
traitement fiscal étant alors appliqué. n
Propos recueillis par Valentine Clément
Retraite chapeau
La perte de rémunération différée
peut entraîner des dommages et intérêts
La perte d’une chance de pouvoir bénéficier un jour de l’avantage
de retraite applicable dans l’entreprise, en cas de licenciement abusif,
constitue un préjudice qui doit être réparé
M
oins de deux ans après son embauche, le directeur général d’un groupe
bancaire est licencié pour insuffisances dans l’accomplissement de ses fonctions. Le
conseil des prud'hommes condamne l’employeur
à verser à l’ex-dirigeant des dommages et intérêts
pour rupture abusive du contrat de travail mais le
déboute de ses autres demandes.
Refusée en appel… En appel, l’intéressé soutient,
entre autres, que son « licenciement injustifié lui a
fait perdre la chance de bénéficier du régime de retraite
complémentaire des cadres de direction auquel il était
affilié et qui constitue une 'retraite chapeau' ayant
la nature d’une rémunération différée ». La cour
refuse l’indemnisation en précisant que « la retraite complémentaire servie aux cadres dirigeants de
la fédération [du groupe bancaire] lors de leur départ
en retraite après 15 années de services résulte de l’engagement unilatéral de celle-ci et de son financement
exclusif des cotisations. (…). [L’ex-dirigeant] ayant une
ancienneté de moins de deux ans ne saurait prétendre
avoir perdu, du fait de son licenciement, la chance de
bénéficier de cet avantage différé ».
… la demande de réparation est accordée en cassation. Devant la Cour de cassation, l’intéressé
tente, notamment, de faire valoir que la perte
des droits acquis dans le régime en question
du fait de l’employeur doit donner lieu à une
indemnisation du salarié correspondant à son
temps de présence dans l’entreprise et que la
retraite chapeau constitue une rémunération
différée acquise et restant due après la rupture
du contrat de travail. Cette argumentation est
rejetée par la Cour qui rappelle que la cour d’appel a bien fait ressortir que le régime de retraite
en cause, à prestations définies, a pour objet de
procurer à une catégorie de salariés, sous condition de présence dans l’entreprise jusqu’à l’âge
de la retraite, le versement d’un complément
de pension « qui ne peut être individualisé qu’au
moment de son règlement ».
En revanche, la Haute juridiction estime
que la cour d’appel, en écartant la demande de
dommages-intérêts pour perte d’une rémunération différée, a violé les articles 1134 et 1147 du
Code civil, « la perte d’une chance de pouvoir bénéficier un jour de l’avantage de retraite applicable
dans l’entreprise » constituant, selon la Chambre
sociale de la Cour de cassation, « un préjudice
qui doit être réparé » (1). La Cour de cassation
casse partiellement la décision et renvoie les
parties devant la cour d'appel.
La jurisprudence s’affine. Pour le délégué général du Syndicat des courtiers d’assurances
et de réassurances d’Ile-de-France (Sycarif),
Chantal de Truchis, « cet arrêt a le mérite d’indiquer clairement la nature des droits issus d’un
régime chapeau mettant en œuvre un régime de
retraite à prestations définies et à droits aléatoires. Il consolide l’analyse fiscale et la spécificité
du régime social des cotisations de ces contrats
qui se différencient fondamentalement de ceux
à cotisations définies générant des droits acquis.
Il semble par ailleurs s’inscrire dans un courant
où la notion de réparation de perte d’une chance
prend une importance significative ».
« Comment s’évaluera la perte de chance et sur
quelle base ? », s’interroge Franck Wismer du
cabinet Fromont, Briens. « Les suites de cet arrêt
seront intéressantes, notamment pour les litiges faisant l’objet de transactions », poursuit l’avocat. De
son côté, David Rigaud, associé de Rigaud Avocats, souligne qu’il s’agit « d’un arrêt important
dans la mesure où il n’y avait pas jusqu’à présent
de jurisprudence claire sur cette notion de perte de
chance en matière d’avantages liés à un contrat de
retraite supplémentaire. Celle-ci s’inscrit d’ailleurs
dans le courant jurisprudentiel en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse applicable pour
les levées de stocks-options ». n
Jean-Charles Naimi
(1) Cass.soc du 31 mai 2011, n°09-71350 09-71504.