GLISSEMENTS DE TERRAINS : LE RISQUE MAJEUR DE LA

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GLISSEMENTS DE TERRAINS : LE RISQUE MAJEUR DE LA
GLISSEMENTS DE TERRAINS : LE RISQUE MAJEUR DE LA REUNION
M. Guy FONTAINE (Vice-Président du CCEE de La Réunion et membre de la Commission Egalité des
Chances)
Pour mieux approcher le risque glissement de terrain qui est le risque majeur à La Réunion nous nous
appuierons sur un film réalisé par le BRGM Réunion, à Grand Ilet, dans la commune de Salazie Dans
l’intervention précédente était déjà mentionné que c’est là, il y a quelques années, qu’un glissement de
terrain a causé la mort de 63 personnes. On est donc dans une zone très instable et on voit que cette
zone est en instabilité – on peut le dire- à chaque seconde de son quotidien.
Glissement terrain à La Réunion
Projection du film: projet MVTerre 2
mouvements-ter...
www.brgm.fr/.../mvterre-2-detection-suivi-modelisation-
M. Guy FONTAINE (Vice-Président du CCEE de La Réunion et membre de la Commission Egalité des
Chances) – Je pense que c'est très clair et que tout le monde a relevé le côté dramatique de la situation
et aussi toute sa relativité dans le regard des hommes. Je vous rappelle que sur Grand Ilet, on a environ
1 000 habitants. C'est aussi une zone vivante sur le plan économique, il y a une route, on y vient, il y a
du tourisme. C'est donc là un vrai problème : compte tenu du fort degré de risque quoi faire ? Faut-il aller
jusqu’à « vider » Grand Ilet de sa population et ce définitivement ? Vous mesurez là le problème qui se
pose sur cet espace.
Sur cette question du risque glissement de terrain, nous voulions aussi, via un power-point, vous montrer
l’impact sur les infrastructures en prenant notamment l’exemple de la Route du Littoral
.
La Route du Littoral est cette route stratégique sur le plan économique qui relie le Port - là où arrive
véritablement tout ce dont on a besoin et d’où toutes les choses partent vers l’intérieur- à Saint-Denis la
capitale politique, mais également la capitale économique.
Pendant longtemps, le massif montagneux bloquait la liaison le Port/St Denis même si l’on pouvait passer
par « la route de la montagne », mais un trajet compliqué, difficile, dangereux et étroit. D’où l’idée dans
les années 1960 de construire une route du littoral, jusque-là franchi que par le train. La première route
du littoral était à flanc de falaise et y circuler n’était pas sans risque. En témoignent les premiers morts.
Au total entre 1963 et 2008, il y aura 22 morts.
En 1976 devant cet enjeu sécuritaire, on décide véritablement de déplacer la route vers la mer et on
construit la Route du Littoral sur laquelle nous circulons à l’heure actuelle, qui est une route de 2X2 voies.
Elle est donc beaucoup plus loin de la montagne, mais avec un coût bien sûr important, 230 millions de
francs – c'est quand même impressionnant – et une vérité : c’est que malheureusement cela n’arrête pas
les éboulements. 1980, 15000 m3 et 3 morts, 2006, 30000 M3, deux morts, deux blessés graves et
plusieurs mois de fermeture.
Aujourd’hui, compte tenu de cette difficulté et de son importance stratégique, 60000 véhicules y circulent
chaque jour, nous sommes sur un troisième projet qui devrait démarrer en fin d’année 2014. Cela fait
couler beaucoup d’encre entre ceux qui sont pour et ceux qui sont contre et ceux qui s’interrogent. En
gros il s’agit de faire en sorte de reculer encore la route de la falaise en allant sur la mer. Nous sommes
donc sur une route dont une partie sera en viaduc. Il y aura environ 12 km 600 de route, la moitié sera un
viaduc et l’autre moitié sera comme la route actuelle, mais bien entendu beaucoup plus éloignée. Le coût
bien sûr est fort, 1 600 000 000€. Quand on sait que la route des Tamarins nous a coûté beaucoup plus
cher que prévu, on subodore que l’on va tourner autour de 40% à 50% plus cher.
Cela montre bien le dilemme de ces problèmes de glissements de terrain : ils ne sont pas vus par la
population comme un risque imminent et dans le domaine des infrastructures on voit bien les grosses
difficultés et les enjeux tant humains qu’économiques. Vous l’avez vu sur Salazie avec Grand Ilet, mais
on le voit avec Cilaos et sa fameuse route aux 500 virages, à flanc de falaise. On le voit partout. Et la
carte des risques qui a été montrée précédemment témoigne que le risque glissement est bien réel et
important sur la plupart des espaces réunionnais.
Tel notre risque majeur. Il n’est certes pas perçu par la population comme un risque au quotidien, mais
véritablement il est là et c'est certainement le risque avec lequel nous avons le plus de problèmes.
La Route du Littoral à La Réunion
Après la présentation de la réalité risque majeur, il faut se poser: que fait-on par rapport à tous ces
risques ?
Très rapidement on va cheminer à travers un certain nombre de choses qui ont été déjà présentées par
mes collègues des autres CCEE, c'est-à-dire des mesures et outils que vous connaissez.
Donc nous agissons : ce sont les outils de prévention, le PPR, le Dossier Départemental des Risques
Majeurs qui est encore en mise à jour, le Dossier d’Information Communal sur les Risques Majeurs, les
planifications, le Plan Communal de Sauvegarde, le Plan ORSEC. En ce moment nous sommes en train
de mettre à jour un « Plan ORSEC volcans » en tenant compte, pour la première fois véritablement, des
phénomènes hors enclos.
Il y a l’action, mais il y a aussi bien sûr les observatoires. Nous en avons trois très importants :

L’observatoire des risques naturels, c'est le dernier en date, depuis fin 2001 donc un outil
d’évaluation et d’aide à la décision.

L’observatoire volcanologique du Piton de la Fournaise qui est le premier que nous ayons
mis en place et qui est né d’ailleurs juste après la coulée de 1976. Il est dirigé aujourd’hui par
Nicolas VILLENEUVE, un des spécialistes de tout cet espace avec Patrick BACHELERY. A côté
à la Plaine des Cafres, il y a un outil intéressant et qui va se ré-ouvrir, avant c’était le Musée du
Volcan qui va devenir, la Cité du Volcan.

L’observatoire réunionnais de l’air.
Nous avons donc véritablement des observatoires performants qui ont déjà été utilisés puisque les
spécialistes ont beaucoup travaillé notamment lors de la coulée de 2007. D’ailleurs on s’aperçoit que si
on les avait écoutés un peu plus, peut-être que l’on aurait moins paniqué sur certaines journées.
On y discute et on continue à y travailler puisqu’à la Réunion il y a eu les premières Assises Régionales
des Risques Naturels en octobre 2011 avec différents ateliers dont un atelier qui rejoignait les
préoccupations ou les préconisations entendues hier : informer les populations sur les risques, avoir des
programmes pédagogiques, traiter le multimédia, rôle de l’observatoire des risques naturels, avoir une
véritable culture du risque, intégrer des risques induits aux effets dominos dans la culture du risque, etc.
Nous avons donc une logique véritablement régionale qui rejoint la logique nationale.
Puis, nous avons sur le plan pédagogique, des outils qui sont utilisés. Les sites Web, je n’en ai cité que
deux : « BRGM Réunion », « Risques Naturels.RE » sont véritablement truffés d’informations, de bonnes
explications, on a énormément d’aspects pédagogiques. On l’a d’ailleurs vu dans le film du BRGM.
Il y a des travaux pour les élèves. J’ai coordonné, en 2003, avec Nicolas Villeneuve et Jean-Pierre Blanck
un texte-document pour la classe. Vous savez cet outil qui est utilisé notamment dans les collèges et des
lycées – collèges plutôt – et qui était sur les DOM-TOM et les risques majeurs. Il y avait une partie
importante sur la Réunion qui montrait les risques et un exercice à la fin qui était sur le Volcan de la
Soufrière. La question par contre est de savoir si ces outils sont utilisés, qui les utilise, comment cela se
passe ? Sur cette question malheureusement nous n’avons pas beaucoup de retour.
Il y a des formations. Vous prenez les formations en Sciences de la Vie et de la Terre qui véritablement
présentent aux élèves de La Réunion des cas qui sont soit sur le risque de Mahavel (sud de l’île), soit sur
le risque de Salazie. Nous avons véritablement tout le travail qui se fait à ce moment-là.
Il y a une plateforme d’intervention régionale de l’Océan Indien et les ONG s’y intéressent puisque la
Croix Rouge a monté cette plateforme d’intervention avec des travaux sur un projet qui s’appelle « Paré
pas paré » qui est un projet de sensibilisation de la population réunionnaise aux risques de catastrophe
naturelle affectant la Région.
Sur les risques volcaniques il y a une difficulté supplémentaire c'est qu’en gros pour le Piton de la
Fournaise souvent on nous dit, « ce n'est pas une menace pour la population ». C'est donc quelque chose
qui est formidable, c’est un spectacle à tel point que même lorsque, sur le plan pédagogique, le Parc
National de la Réunion lance un projet de valorisation de ce que l’on appelle « la route des laves » il y a
l’idée que c'est une invitation aux spectacles. Difficile après de dire que c'est un risque majeur qui est un
véritable danger lorsque des messages de ce type sont véhiculés. Il y a donc – c'est clair – une nécessité,
vous l’avez dit, nous vous rejoignons là-dessus, il faut absolument une culture du risque. On l’a dit à
l’époque, on continue et Julie MORIN notamment qui est une jeune doctorante qui a fait sa thèse en 2012
– une thèse où elle fait la comparaison des problèmes de gestion de risques entre le Karthala et celui de
La Réunion, thèse très intéressante où elle étudie comment cela s’est passé, comment les populations
réagissent – dit bien « qu’il faut analyser les vulnérabilités et les capacités des sociétés pour comprendre,
anticiper les réponses qu’elle déploie face aux risques volcaniques ».
Nous, au niveau de notre Commission, nous avons réfléchi un peu sur : quels seraient les principes à
retenir ?
On pense d’abord, comme vous, qu’il faut aborder toutes ces questions dans le cadre d’une approche
globale : réchauffement climatique, développement durable, coopération régionale. Il faut :
 Avoir des retours d’expérience dans la gestion de crise.
 Prendre en compte le contexte culturel local, les représentations du risque par les populations
locales et leur évolution.
 Former, informer des acteurs sur le contexte local pour pallier ce que l’on appelle, ce que vous
appelez aussi les pertes de connaissance ; les gens partent, il y a des mutations, des résultats,
ceux qui arrivent ne sont peut-être pas de nouveau formés.
 Faire des médias, un partenaire et véritablement la notion de partenariat est primordiale, puisque
l’on voit que souvent les médias sont intéressants, mais en même temps ils amplifient. Pour la
coulée de 2007, les médias ont joué le rôle d’informer, mais en même temps ils ont poussé
parfois aussi un peu à la panique parce qu’ils donnaient des informations assez contradictoires,
puisqu’ils prenaient des informations dans un groupe qui ne disait pas la même chose que dans
l’autre groupe.
 Amplifier l’information aux populations avec des actions grand public, des campagnes de
sensibilisation.
En ce qui concerne la culture du risque, nous pensons que l’éducation à l’environnement et au
développement durable est une approche essentielle et sur laquelle le Conseil de la Culture de
l’Education et de l’Environnement de La Réunion souhaite avancer. Nous avons fait l’année dernière
encore un forum EDD. Nous pensons que c'est par cette éducation que l’on peut arriver véritablement à
faire passer aussi le message de la culture du risque dans un principe qui est : pour faire de l’éducation
à l’environnement et au développement durable, il faut faire avec les gens.
On en arrive à la question qui devrait – on l’a évoquée hier – être dans cette logique : quel (s) rôles (s)
pour les Conseils de la culture de l’éducation et de l’environnement ? Je pense qu’effectivement nous
avons les mots, nous avons les sigles « culture et environnement », mais cela ne suffit pas. Nous
avançons, mais je pense qu’il faut peut-être avoir une action…nous avons un rôle à jouer, à nous de
déterminer lequel. Je vous remercie de votre attention.
Juste pour dévoiler avec qui nous avons travaillé. Nous avons beaucoup travaillé avec Wilfrid BERTILE
qui est mon collègue, Professeur de Géographie et aussi Maire, ancien Député de la Réunion, ancien
Secrétaire Général de la COI, qui a géré la crise volcanique sur son terrain.
Le groupe de travail du CCEE s’est appuyé sur des travaux du BRGM Réunion, de Wilfrid BERTILE (dans
un ouvrage sur l’éruption de 2007) et également sur la thèse de Julie MORIN qui est importante pour
ceux qui s’intéressent aux risques volcaniques, il faut la lire. Je crois que c'est intéressant parce que l’on
voit véritablement la démarche à faire.