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Sports
La Gruyère No 81 / Jeudi 12 juillet 2012 / www.lagruyere.ch
Le phénomène Marta
débarque à Châtel
FOOTBALL. Châtel-Saint-Denis
accueille samedi quatre équipes
nationales féminines.
UNE STAR. Parmi elles: le Brésil
et son numéro dix Marta.
À NE PAS MANQUER. Les spectateurs auront l’occasion de voir
à l’œuvre l’une des meilleures
joueuses du monde.
VALENTIN CASTELLA
Il y a eu Pelé dans les années soixante, puis
le Pelé blanc avec Zico vingt ans plus tard.
Depuis 2005, le Brésil peut compter sur la
«Pelé en jupon», une joueuse qui semble
évoluer sur une autre planète. Il s’agit de
Marta Vieira da Silva, plus communément
appelée Marta. Celle qui a été nommée
cinq fois meilleure joueuse FIFA entre 2006
et 2010 fera une halte samedi à ChâtelSaint-Denis. Actuellement en stage de préparation pour les jeux Olympiques de
Londres à Crans-Montana, la formation
sud-américaine rencontrera la Colombie
à 19 h.
Sans aucun doute, le spectacle sera au
rendez-vous. Car Marta est un phénomène.
Agée de 26 ans, la native de Dois Riachos
a inscrit la bagatelle de 80 buts en 72 sélections. De quoi faire pâlir de jalousie ses
idoles que sont Ronaldinho et Rivaldo.
La Suède pour commencer
Son succès, la Brésilienne l’a construit
loin de son pays. Après avoir effectué
ses débuts dans le club de Vasco de
Gama, c’est en Suède que sa renommée est devenue mondiale. Avec le
club d’Umea, elle a remporté la Ligue
des champions en 2004. Une centaine
de buts et cinq ans plus tard, elle a rejoint
les Etats-Unis. L’attrait d’un nouveau défi
et un salaire annuel de 500 000 dollars (un
record) l’ont convaincue de tenter Los Angeles. Elle a ensuite rejoint le FC Gold
Pride en 2010, avant d’évoluer à New York
en 2011. Aujourd’hui, la Brésilienne joue
en Suède dans le club du Tyresö FF.
Partout où le numéro 10 est passé, elle
a connu le succès: «Marta? C’est la classe,
explique la Vaudoise Noémie Beney (27
ans), ancienne joueuse professionnelle en
Allemagne. Dans le maniement de la balle,
elle figure un cran au-dessus. Elle possède
la technique et la vitesse d’exécution des
garçons.»
Membre du cadre A de l’équipe nationale, la gardienne bulloise Gaëlle Thalmann
complète: «Sa rapidité et sa puissance
font d’elle une joueuse hors du commun.»
Décisive sur le terrain, elle est également
très importante dans les vestiaires, comme
le confirme l’entraîneur brésilien Jorge
Barcellos: «On peut remercier Dieu de
pouvoir compter sur une telle joueuse,
sourit-il. Nous connaissons son importance
et nous faisons tout pour qu’elle se sente
à l’aise dans l’équipe.»
Meilleure marqueuse de tous les championnats auxquels elle a participé, l’attaquante n’a pourtant pas encore connu la
consécration en équipe nationale. Elle a
bien remporté les jeux Panaméricains en
2007. Mais elle reste sur un échec en finale
de la Coupe du monde 2007 et sur deux revers en finale des jeux Olympiques, à
Athènes (2004) et Pékin (2008).
En cas de succès à Londres, Marta
aura l’occasion d’asseoir davantage sa
popularité. Elle-même le dit en déclarant
sur le site du CIO à propos du football
féminin: «Le niveau ne cesse de s’améliorer. De plus en plus de personnes s’en rendent compte à
chaque Coupe du monde ou durant
les Jeux. Sinon, nous ne faisons
pas le poids en termes de
retransmissions télévisées.»
a défendu les couleurs de l’équipe nationale
à 47 reprises. Plus jeune, elle a eu quelques
problèmes de comportement. Maintenant,
elle semble avoir mûri. Mais elle rechigne
toujours à accomplir son travail défensif.
Ce n’est pas le meilleur exemple à suivre
au niveau collectif.»
Une attitude qui dérange aussi Gaëlle
Thalmann: «C’est une superbe joueuse.
Mais elle est parfois agressive et auteure
de gestes revanchards. Si je devais la comparer à un footballeur, je dirais qu’elle ressemble davantage à Ronaldo qu’à Messi.»
On l’a compris, les spectateurs
présents samedi à ChâtelSaint-Denis auront l’occasion de voir à l’œuvre
une star, dans tous les
sens du terme. Un phénomène qui n’a qu’une seule
envie: se voir paré d’or à
Londres. ■
Par sa rapidité, sa puissance et sa technique, Marta impressionne. Un clic
sur internet suffit à
comprendre l’ampleur de son talent.
Une classe qui lui a
permis de mettre
en exergue le
football féminin: «C’est
réjouissant de
pouvoir compter
sur des filles qui sont
devenues des stars.
Le football féminin fait
parler de lui et les jeunes
peuvent s’identifier à de
telles joueuses», reprend
Gaëlle Thalmann, qui va évoluer,
la saison prochaine, en première division italienne sous les couleurs
de l’Asd Torres (lire ci-contre).
Plus Ronaldo que Messi
Ambassadrice de bonne
volonté du Programme des
Nations Unies pour le développement, elle lutte également
contre la pauvreté qu’elle a
connue lors de son enfance dans
les quartiers de Dois Riachos. Mais
la Brésilienne n’est pas aussi irréprochable que cela. «Elle est une star et elle
le sait très bien, sourit Noémie Beney, qui
En 72 sélections avec
l’équipe du Brésil, Marta a
inscrit…80 buts.
«Les JO aussi importants
que la Coupe du monde»
Marta, comment se déroule ce camp d’entraînement à CransMontana?
Tout va très bien. Nous sommes venues ici pour nous acclimater
à la météo, différente du Brésil. Même si, personnellement, j’y
suis déjà habituée en évoluant en Suède. Le cadre est magnifique. En voyant toutes ces montagnes, j’ai dit aux filles que nous
étions encore plus près de Dieu (rires).
Que représentent les jeux Olympiques et quelles seront vos ambitions à Londres?
Pour moi, les JO sont aussi importants que la Coupe du monde.
Et à chaque fois qu’une équipe brésilienne de football se présente à un tournoi, c’est pour le gagner. Nous avons déjà récolté
plusieurs médailles d’argent. Nous voulons repartir avec l’or.
Est-ce difficile pour une femme de se faire une place dans l’univers
du football brésilien?
Bien sûr, le football féminin n’est pas aussi populaire que celui
des hommes. Mais cela progresse beaucoup et nous remarquons que nous avons de plus en plus de supporters.
Justement, vous êtes la star de l’équipe. On vous compare même à
Pelé. Comment gérez-vous toute cette pression?
C’est un honneur d’être comparée à un tel joueur. Personnellement,
je n’aime pas dire que je suis la meilleure du monde. Je préfère
que ce soit les autres qui vantent mes qualités. Je cherche juste
à jouer, sans forcément attirer toute la lumière sur moi.
Quels sont vos meilleurs souvenirs jusque-là?
La première fois que nous avons remporté la médaille de bronze
aux Jeux. Ma première nomination en tant que meilleure joueuse
FIFA reste également un grand moment, tout comme cette rencontre que j’ai disputée au stade Maracana devant 70 000 spectateurs. VAC
«On espère 1500
spectateurs samedi»
CHÂTEL-SAINT-DENIS.
Le club local souhaite
promouvoir le foot féminin avec les deux rencontres internationales
organisées samedi.
KARINE ALLEMANN
Accueillir les stars du foot est
presque une habitude, maintenant, pour le FC Châtel-SaintDenis. Après la médiatique
équipe de France lors de l’Euro
2008, puis la confidentialité du
Paraguay avant la Coupe du
monde 2010, le stade du Lussy
verra s’affronter quatre équipes
nationales féminines en pleine
préparation des jeux Olympiques: le Brésil, qui compte
dans ses rangs la meilleure
joueuse du monde Marta (lire
ci-contre), la Colombie, le Canada
et la Nouvelle-Zélande.
Comment le club châtelois
a-t-il été contacté? «Par les responsables de la société Matchworld, basée à Pully, qui organisent des camps d’entraînement
et des matches amicaux en
Suisse, explique le président
Raymond Bezençon. C’est déjà
avec eux que nous avions eu
contact pour la France et le Paraguay. En avril dernier, ils nous
ont proposé d’accueillir des rencontres de la Matchworld women Cup, qu’ils ont créée en
2011.»
Ce tournoi international réunissant les quatre équipes mentionnées plus haut se déroule
en effet samedi au Lussy et
mardi prochain à Savièse. «A
chaque fois, les Vaudois mettent
sur pied le tournoi avec des
équipes qui s’entraînent en
Suisse avant une grande compétition, reprend Raymond Bezençon. Après la Coupe du
monde féminine, l’année dernière, cette fois il s’agit de préparer les Jeux.»
Le Brésil, la Colombie, le Canada et la Nouvelle-Zélande sont
actuellement en stage entre Anzère et Crans-Montana. Les organisateurs châtelois n’auront
donc qu’à accueillir les deux
rencontres. «Nous espérons que
cela servira de promotion au
foot féminin, en plein essor. Et
puis, cela coïncide avec le
dixième anniversaire de la création de notre équipe féminine.»
Pour l’événement, le club a
dû réunir un budget d’environ
20 000 francs. «Il est quasiment
couvert grâce aux ballons de
match et aux panneaux publicitaires. Des sociétés nous ont
aussi acheté des billets VIP pour
leurs clients et d’autres ont
fourni des contre-prestations.
Le stade a accueilli 3000 personnes pour l’équipe de France.
On a donc de la marge pour samedi. S’il fait beau, nous espérons environ 1500 personnes.
Le prix des billets très bas (10
francs) et la gratuité pour les
enfants de moins de 16 ans devraient attirer bon nombre d’intéressés.»
Le club compte-il sur des retombées financières? «Le bénéfice des buvettes sera partagé
avec les organisateurs. Mais,
dans le pire des scénarios
concernant la météo, l’opération
sera de toute façon blanche,
pas déficitaire.»
Au niveau des infrastructures, seule une petite tribune
de 300 places assises a été montée, ainsi que quelques barrières
pour canaliser l’entrée des
joueuses sur le terrain. «Nous
avons aussi dû prévoir de quoi
installer quatre caméras en hauteur et quatre autres autour du
terrain, précise le Châtelois.
Plusieurs chaînes comme ESPN,
FOX ou Eurosport auraient
acheté les droits de retransmission. Cela ferait, selon un article
paru dans Le Matin, 280 millions
de téléspectateurs potentiels.»
La pelouse du Lussy a logiquement fait peau neuve ces jours
pour accueillir ces dames.
Hier soir, le Brésil a souhaité
disputer un match amical en
toute confidentialité. Le club
châtelois en a profité pour entraîner ses juniors F à entrer sur
le terrain avec les joueuses et
les juniors D à porter le drapeau
des équipes pour les hymnes
nationaux. Samedi, 70 bénévoles
seront sur place.
Le Brésil et son cuisinier
Au fait, les équipes ont-elles
des demandes particulières?
«Non. Elles arriveront en car, se
changeront dans les vestiaires
de la nouvelle halle triple à côté
du stade et repartiront après
les matches. Seule l’équipe du
Brésil a demandé à manger sur
place, dans la salle de gym. Son
cuisinier officiel est donc en
contact avec un traiteur de Châtel pour le menu.»
Si l’expérience est belle samedi, et tout porte à croire
qu’elle le sera, Raymond Bezençon verrait bien le stade du
Lussy et le FC Châtel poursuive
leur rôle d’hôte pour invités de
marque. «Dans les discussions
avec Matchworld, j’ai dit que
j’espérais que la collaboration
se poursuivra que nous pourrons accueillir de tels matches
tous les deux ans. Et ainsi pérenniser le tournoi chez nous.
Mais cela ne dépendra pas que
de nous.»
Et puis, si voir un tel niveau
de foot pratiqué par des femmes
pouvait susciter quelques vocations auprès des jeunes filles
de la région, le président n’en
serait que plus heureux. ■
PROGRAMME
Stade du Lussy, à Châtel-Saint-Denis
Nouvelle-Zélande - Canada
sa 16 h
Colombie - Brésil
sa 19 h
Gaëlle Thalmann en Italie
Gaëlle Thalmann change d’horizon. En effet, la gardienne bulloise a
signé hier un contrat avec le club de l'Asd Torres, qui se situe en Sardaigne. Après Potsdam (2008-2009), Hambourg (2009-2010), Grasshopper Zurich (2010-2011) et Leipzig (2011-2012), la Gruérienne
(14 sélections en équipe de Suisse) découvrira une nouvelle destination et un nouveau championnat. Elle évoluera en première division
italienne dans un club classé 6e au coefficient UEFA et qualifié pour la
Ligue des champions. Elle explique son choix: «La saison dernière ne
s’est pas bien déroulée. La coach qui m’avait fait venir en Allemagne
a rapidement été licenciée. Puis, je n’ai plus eu ma chance. De plus, je
me suis blessée. Finalement, je n’ai plus rejoué.» Quel est le niveau du
championnat italien? «Je ne connais pas vraiment ce championnat.
Mais il est de qualité. Il est meilleur qu’en Suisse, c’est certain, et
peut-être plus technique que l’allemand.» VAC