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Dossier
Pathologies vasculaires des sportifs
Ces étiologies méconnues
Introduction
1 Microtraumatologie de l’arcade palmaire ou
l’hypothenar hammer syndrom
p.12
p.12
Dr Marc Ferrière (Département de cardiologie, CHRU de Montpellier)
 Endofibrose artérielle induite par l’exercice :
un diagnostic difficile
p.14
Dr Antoine Bruneau, Pr Pierre Abraham (Centre Régional de Médecine du Sport, Service des explorations fonctionnelles, CHU d’Angers)
 Syndrome de loge chronique et sport :
une entité encore mal connue
p.17
Pr Pierre Rochcongar (Unité de biologie et médecine du sport, CHU de Rennes)
4 Le syndrome du défilé thoraco-brachial :
un syndrome rare, parfois trompeur
p.20
Dr Marc Ferrière (Département de cardiologie, CHRU de Montpellier)
11
Cardio&Sport
l
n°26
Dossier
Introduction
L
es artères sont souvent les
méconnues ou les oubliées
du cardiologue. Hypothenar
hammer syndrom, endofibrose
artérielle, syndrome de loge chronique, syndrome de la traversée
thoraco-brachiale… quézaco ?
Allez-vous dire. Pourtant, ce sont

des pathologies dans lesquelles le
système vasculaire est fortement
impliqué directement ou indirectement et qui peuvent limiter sévèrement le sportif dans sa quête de
performance. Il nous a donc paru
intéressant de demander à des experts de chaque sujet de vous pro-
poser le minimum qu’un cardiologue du sport doit connaître dans
le domaine. Alors la prochaine fois
qu’un cycliste vous dira que son
cuissard lui paraît trop serré audelà d’une certaine intensité d’effort vous saurez ce que cela peut
cacher…
Microtraumatologie
de l’arcade palmaire
ou l’hypothenar hammer syndrom
Dr Marc Ferrière (Département de cardiologie, CHRU de Montpellier)
D
et du hockey.
> Diagnostic
Un overuse peut en être la seule cause,
L’âge moyen de survenue est de 40 ans
mais une variante anatomique est
avec une prédominance masculine. Les
souvent présente. La portion, longue
symptômes sont très variables, et peu-
de 2 cm, de l’artère ulnaire quand elle
vent aller de l’absence totale jusqu’à la
franchit le canal de Guyon pour former
gangrène ischémique des doigts ! L’at-
l’arcade palmaire superficielle, avant de
teinte est unilatérale du côté dominant.
pénétrer l’aponévrose palmaire, est une
L’ischémie des doigts se manifeste par
> Physiopathologie
et épidémiologie
zone exposée au traumatisme. Cette ar-
des modifications de leur coloration avec
tère assure le principal apport sanguin
blanchiment ou coloration cyanosée des
Le syndrome est lié à des traumatismes
pour la plupart des doigts. Sa jonction
2e, 3e ou 4e doigts. A l’inverse du phéno-
répétés de la portion palmaire de l’ar-
avec l’artère radiale est de petit calibre et
mène de Raynaud, il n’y a pas de variation
tère ulnaire (ex. artère cubitale). Plus ra-
chez 37 % des sujets, l’arcade ne provient
successive, blanc, bleu puis rouge, de la
rement, la lésion survient après un seul
que de l’artère cubitale et chez 20 % elle
coloration. Le caractère unilatéral s’op-
épisode traumatique plus important et
est incomplète. La portion hypothénar
pose à l’atteinte des connectivites et de la
qui peut être passé inaperçu avec gêne
de la main est utilisée comme un mar-
maladie de Buerger.
fonctionnelle inexpliquée et retard théra-
teau ou comme prise entre le marteau et
Fatigue et douleur surviennent durant
peutique.
l’enclume et entraîne une compression
l’effort ou après une succession d’efforts
Il est décrit dans les professions et sports
de cette zone non protégée contre les
rapprochés, ou en fin d’effort, n’altérant
avec chocs fréquents sur cette région
structures osseuses adjacentes. Le trau-
pas l’efficacité sportive d’un geste unique
anatomique comme chez les carrossiers,
matisme de l’intima entraîne une hy-
mais diminuant les performances des
les utilisateurs de marteaux-piqueurs
perplasie avec possible vasospasme, sté-
gestes répétés ou les interrompant. Une
ou dans les sports comme le base-ball,
nose, ou thrombose. Le traumatisme de
maladresse des séries de gestes avec im-
le handball et le volley-ball. Il a été plus
la média entraîne rupture, anévrysme,
pact hypothénarien peut aussi être ob-
sporadiquement décrit lors de la pra-
thrombose et embolies distales digi-
servée.
tique du golf, du tennis, du mountain
tales. Enfin, le traumatisme touche aussi
La recherche d’anomalies au niveau de
bike, de l’haltérophilie, du karaté, du
les nerfs, muscles et articulations situés
l’artère sous-clavière et de l’arche aor-
badminton, de certains types de danses
dans cette zone complétant le syndrome.
tique est indispensable.
écrits par Cohn en 1970 sous
le nom d’hypothenar hammer syndrom, les microtraumatismes vasculaires atteignant l’arcade palmaire profonde constituent
un syndrome rare.
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Le test d’Allen
La positivité du test d’Allen (voir en-
Le patient est assis, les mains posés paumes vers le haut sur les genoux. On comprime
cadré) est un élément important du
simultanément avec les 2 pouces, l’artère radiale et l’artère ulnaire. Après quelques
diagnostic. Cependant si 86 % des mi-
rapides mouvements limités des doigts, la main change de coloration et paraît exsan-
cro-angiopathies de l’arcade palmaire
gue. Si le test est normal, la levée de la compression ulnaire, s’accompagne en moins de
ont un test d’Allen positif, celui-ci est
5 secondes d’un retour à une coloration normale de l’ensemble de la main et des doigts.
rapporté comme anormal chez 22 %
Cela atteste d’une la perméabilité de l’arcade palmaire superficielle En cas de non reco-
des sujets normaux. D’autres tests sont
loration dans ce délai, le test est positif et évoque à une occlusion, une sténose ou un
parfois utiles comme la thermographie,
développement incomplet de l’arcade palmaire superficielle ou de l’artère ulnaire distale.
le test au froid, la pléthysmographie. Le
Doppler peut être intéressant mais il nécessite l’utilisation d’une “sonde crayon”,
bolyse locale a été proposée en fonction
pression nerveuse à effet antalgique,
une bonne expérience de l’opérateur et
de constatations locales particulières.
une résection d’anévrysme ou de zones
une immobilité totale du patient.
L’exposition au froid doit être évitée et le
occluses avec reconstruction anastomo-
L’angioscanner ou l’IRM ont été propo-
port de gants ou d’autres protections est
tique veineuse de l’arcade. Ces gestes
sés pour analyser l’anatomie de l’arcade
conseillé si elles sont autorisées.
sont en règle associés à une sympathec-
palmaire, mais aussi ses rapports avec les
Sous traitement ou après interruption
tomie péri-artérielle. Dans ces formes
structures osseuses, muscles accessoires,
du sport incriminé, l’évolution est en
invalidantes les taux de normalisation
ossifications, éventuelles fractures…
général favorable dans les formes sans
sont bons et parfois une reprise du sport
L’angiographie reste le gold standard.
ischémie permanente ou troubles tro-
incriminé est possible.
Elle peut montrer de manière plus ou
phiques. La reperméation survient en
moins associée, un aspect typique en
quelques semaines et dans la plupart des
tire-bouchon de l’artère ulnaire, des
cas, les patients peuvent poursuivre ou
> Conclusion
anévrysmes, une occlusion, au contact
reprendre le sport. La nécessité d’arrêt
Le plus souvent une ischémie des doigts
osseux, à la sortie du canal de Guyon,
définitif du sport causal est exceptionnel.
a pour origine une maladie générale qu’il
des artères digitales dans le territoire de
De nombreux sportifs avec des signes
faut éliminer. L’origine “sportive”, trauma-
distribution de l’artère ulnaire, et/ou la
frustres poursuivent leur activité sans
tique, ne dit être retenue qu’en deuxième
présence d’embolies distales dans les
traitement : il est nécessaire d’explorer
intention. La prise en charge sera adaptée
artères digitales. Elle élimine aussi une
ces jeunes sportifs pour éliminer une
à chaque cas particulier ; la poursuite de
atteinte de l’arc aortique ou de l’artère
maladie générale ou de l’arc aortique et
l’activité sportive responsable dépend de
sous-clavière.
pour prendre des mesures protectives.
l’importance et de l’évolution des symp-
Dans les cas les plus sévères, ischémies
tômes, de la possibilité de protection
digitales significatives, douleur handi-
contre les traumatismes répétés, et parfois
> Traitement
capantes, un traitement chirurgical peut
aussi de la possibilité de reconstruction
Chez le sportif, la rareté des formes sé-
être proposé. Il consiste en une décom-
vasculaire.
n
vères fait qu’il n’y a pas de consensus,
mais des réponses thérapeutiques individuelles adaptées à chaque cas par-
Pour en savoir plus
ticulier. Dans tous les cas l’arrêt d’un
• Ablett CT, Hackett LA, Cohn S. Clin Med Res 2008 ; 6 : 3-8.
tabagisme éventuel même minime est
• Vayssairat M, Debure C, Cormier JM et al. Hypothenar hammer syndrome: seventeen
indispensable.
cases with long term follow-up. J Vasc Surg 1987 ; 5 : 838-43.
Pour la plupart des patients, un traite-
• Marie I, Herve F, Primard E et al. Long term follow up of hypothenar hammer syn-
ment médical associé à une protection
drome: a series of 47 patients. Medicine 2007 ; 86 : 334-43.
locale est suffisant. Les anticalciques et/
• Rtaimate M, Farez E, Lariviere J et al. Aneurysm of thre ulnar artery in a mountain biker: a
ou les médicaments diminuant la visco-
case report and review of the litterature. Chir Main 2002 ; 21 : 362-5.
sité ont été proposés. En cas de thrombi
• Kostianen S, Orava S. Blunt injury of the radial and ulnar arteries in volley ball players.
ou d’embolies, les antiagrégants voire
A report of three cases of the antebracchial-palmar hammer syndrome. Br J Sports Med
transitoirement les anticoagulants ont
1983 ; 17 : 165-6.
été utilisés avec efficacité. Une throm-
13
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Dossier
Pathologies vasculaires des sportifs
Dossier
Pathologies vasculaires des sportifs

Endofibrose
artérielle induite
par l’exercice
Un diagnostic difficile
Dr Antoine Bruneau, Pr Pierre Abraham (Centre Régional de Médecine
du Sport, Service des explorations fonctionnelles, CHU d’Angers)
L’
endofibrose est une pathologie artérielle du sportif
de haut niveau. Elle touche
donc préférentiellement l’homme
jeune sans facteurs de risque cardiovasculaire (1-5) bien que les
femmes puissent en souffrir (6-8). La
plupart des observations rapportées
le sont chez le cycliste, mais les triathlètes, marcheurs (5, 6), marathoniens
(9-11), et footballeurs (12) peuvent
également être atteints.
longueur de 5 à 6 cm (Fig. 1) (3). Les
artères iliaque externe droite, iliaques
communes, fémorales profondes et
quadricipitales peuvent être le siège de
lésions du même type (4). Un allongement et une tendance à la plicature de
l’AIEG sont fréquemment observés (3,
Figure 1 - Coupe histologique d’endo-
16). Un cas d’ischémie aiguë par dissec-
fibrosectomie. Hyperplasie intimale (I).
tion artérielle sur lésion d’endofibrose a
Limitante élastique interne (flèches).
été rapporté chez un cycliste d’une quarantaine d’années (17). Les mécanismes
calculé au décours immédiat (1 minute)
étiopathogéniques évoqués sont la pli-
d’un test d’effort triangulaire symptôme-
cature répétée de l’AIEG en position
limité (9, 19, 20). Au décours du test, il est
de flexion de hanche (position d’effort
indispensable que les mesures de pression
> Signes cliniques
sur un vélo) et les contraintes hémody-
soient faites aux quatre membres de façon
Les plaintes les plus spécifiques sont une
namiques répétées lors d’effort à haut
simultanée (21). La chute des IPS après un
douleur paralysante et/ou une sensation
débit cardiaque conduisant à un stress
simple test de Ruffier-Dickson est nette-
de gonflement de la cuisse (impression
pariétal localisé (1-3, 18).
ment moins sensible et le test maximal sur
de “grosse cuisse” ou de cuissard trop
cycloergomètre doit être préféré (22). Les
serré), se propageant au reste du membre
valeurs à retenir comme critère de norma-
inférieur lors d’efforts quasi maximaux
> Diagnostic
lité restent sujettes à discussion. Si une va-
(côtes, sprint, poursuite, contre la
Devant des signes fonctionnels évo-
leur de 0,65 présente un bon compromis
montre) (3, 5, 13, 14) obligeant l’athlète à
cateurs la présomption diagnostique
sensibilité/spécificité, un IPS inférieur à
diminuer voire stopper son effort.
est renforcée par l’apparition ou l’am-
0,5 a sans doute une valeur prédictive po-
Cette claudication intermittente d’ef-
plification d’un souffle auscultatoire
sitive presque parfaite.
fort résulte d’un infiltrat sténosant
en fosse iliaque sur le trajet de l’AIE
sous-endothélial de l’intima pauci-cel-
(parfois présent au repos et retrouvé
L’échographie
lulaire avec une distribution variable
en flexion de hanche) (3). Mais le dia-
Elle retrouve un épaississement pa-
en collagène et fibres élastiques (15),
gnostic est affirmé sur les données des
riétal (Fig. 2), l’hyperéchogénicité de
parfois avec atteinte de la média et plus
examens complémentaires.
la paroi artérielle décrite initialement
exceptionnellement de l’adventice (7)
(23) nous semble devoir être remise en
prédominant sur l’artère iliaque ex-
L’index de pression systolique
cause car la plupart des lésions appa-
terne gauche (AIEG). La lésion se situe
En premier lieu, une chute de l’index de
raissent iso voire hypoéchogènes. Une
à environ 2 cm de sa naissance sur une
pression systolique cheville/bras (IPS) (3)
rectitude du segment artériel anormal
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Figure 2 - Echographie d‘artère iliaque externe gauche. Epaississement
Figure 3 - Artériographie avec rétrécissement localisé du
intimal hyperéchogène caractéristique d’une lésion d‘endofibrose.
calibre artériel de l’iliaque externe gauche.
et un rétrécissement modéré du dia-
des bourgeonnements de l’intima sur les
mètre du segment proximal ou médial
sutures vasculaires sont parfois observés.
de l’artère iliaque atteinte sont parfois
Le taux de réinterventions iliaques serait
observés (23). L’écho-Doppler couleur
de l’ordre de 5 %.
réalisé hanche fléchie peut montrer des
pics de vitesse systolique élevés en resinuosités artérielles (16).
> Prévalence de l’endofibrose
La mesure des IPS post-effort maximal et
L’endofibrose est actuellement certaine-
l’écho-Doppler restent les examens non
ment sous-estimée (26, 27). Sa prévalence
Figure 4 - Artériographie réalisée en flexion
invasifs utiles au diagnostic (23, 24).
dans la population sportive reste totale-
de hanche gauche. Plicature artérielle de
ment inconnue. Cela tient sans doute à
l’iliaque externe gauche.
gard des lésions intravasculaires et des
L’artériographie
la fois de la méconnaissance de cette af-
Pratiquée sous incidences et positions
fection par les praticiens et des difficultés
de seconde entraînant par la suite un jet
multiples (Fig. 3 et 4), elle peut montrer
techniques inhérentes à son diagnostic
sanguin intra-artériel. Il génère une véri-
une sténose longue modérée associée
(27). Pourtant des discussions informelles
table agression hémodynamique au niveau
parfois à un allongement artériel (3, 5,
avec des entraîneurs d’équipes cyclistes
de l’intima laquelle répond à ce trauma-
15). Elle reste un argument diagnostique
de haut niveau font état d’une prévalence
tisme en synthétisant un tissu réactionnel
fort et nécessaire en pré-interventionnel.
qui pourrait être aussi élevée que 30 %.
similaire à une hyperplasie myo-intimale.
On parle de phénomène de “jet-lésion”.
L’hypothèse mécanique est basée sur le
fait que lors des mouvements de flexion/
L’angioplastie percutanée par dilatation
> Hypothèses
physiopathologiques
au ballonnet, même si elle améliore la
Les
physiopathologiques
existe une déformation physiologique
symptomatologie à court terme n’est pas
conduisant à l’endofibrose restent des hy-
de la portion mobile de l’artère iliaque
recommandée (10, 25). Un stent endo-
pothèses (1-3, 18). Ces hypothèses étiopa-
externe. Il apparaît alors une flexuosité
luminal est parfois placé (8) sans que les
thogéniques les plus anciennes proposées
de l’axe iliaque externe, voire même une
résultats à long terme ne soient encore
dans la littérature sont hémodynamique,
plicature. Lorsque les mouvements de
évalués. La chirurgie de référence est
mécanique, anatomique (1-3, 16, 18).
flexion/extension sont répétés quotidien-
l’endofibrosectomie avec ou sans angio-
La première avance que l’hyper-débit san-
nement au fil des entraînements et avec
plastie d’élargissement par patch veineux
guin et l’hyper-pression artérielle qui exis-
une grande amplitude, l’artère s’allonge
saphène associée dans certains cas à un
tent lors de l’effort, produisent un stress
et présente progressivement un aspect de
raccourcissement de l’AIE. Elle permet le
artériel pariétal considérable accentué dans
courbure ce qui accentue ce phénomène.
retour à un niveau de compétition anté-
les courbures de l’artère et majoré en cas
C’est la théorie dite du “haubanage”. Ces
rieur en quelques mois dans la plupart des
de courbure artérielle prononcée. Au maxi-
grandes courbures expliquent l’appari-
cas (3-5, 14). Quelques récidives de lésions
mum cette plicature artérielle peut inter-
tion de forces de cisaillement sur la pa-
d’endofibrose jouxtant la zone opérée ou
rompre le flux sanguin artériel une fraction
roi artérielle, qui sont accentuées par les
> Traitement
mécanismes
15
extension de la cuisse sur le bassin, il
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Dossier
Pathologies vasculaires des sportifs
Dossier
Pathologies vasculaires des sportifs
fortes contraintes hémodynamiques gé-
Chez les sportifs plus âgés (40 à 50 ans)
mateuses modérées (banales dans cette
nérées lors de l’effort.
les claudications vasculaires d’effort
tranche d’âge) mais révélées précoce-
Enfin l’hypothèse anatomique est fon-
maximal sont sans doute fréquentes et
ment du fait de l’activité sportive des
dée sur l’existence d’une, deux voire trois
sous diagnostiquées. Dans ce cas elles
sujets.
branches collatérales, issues du muscle
sont en rapport avec des lésions athéro-
n
psoas et naissant à 2 ou 3 cm de l’origine
de l’AIE (1, 2) La présence de ces collatérales, nettement plus développées chez
les cyclistes qui présentent une hypertrophie du muscle psoas particulièrement
sollicité lors du pédalage, fixe le premier
segment de l’AIE sur le muscle psoas
lors de la flexion de la cuisse sur le bassin. La portion mobile et la flexuosité de
l’AIE seront d’autant plus réduites. Cette
disposition anatomique accentue les
phénomènes de plicature sur la courte
portion mobile de l’AIE. Par ailleurs, l’AIE
peut être repliée et compressée au cours
des mouvements de pédalage à cause de
l’hypertrophie du muscle psoas.
Conceptuellement, l’endofibrose peut
être envisagée comme un remodelage
artériel inadéquat (4). Dans des maladies vasculaires plus répandues comme
l’athérosclérose, de nombreuses études
se sont déjà intéressées au phénomène de
remodelage vasculaire et aux processus
sous-jacents (shear stress, pressure stress).
Plusieurs facteurs à l’origine d’un remodelage vasculaire inadéquat ont été identifiés (homocystéïnurie, stress oxydatif,
fonction endothéliale, surentraînement).
Ils pourraient être tout à fait impliqués
dans la genèse de l’endofibrose.
> Conclusion
L’endofibrose reste un diagnostic difficile même au sein d’équipes expérimentées. Il s’agit d’une claudication
vasculaire typique, mais n’apparaissant
que lorsque le débit intra-vasculaire est
élevé en raison du caractère modéré des
sténoses artérielles concernées. Cette
pathologie du sportif de haut niveau
touche les sportifs d’endurance dans la
majorité des cas avant l’âge de 30 ans.
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c
Syndrome de
loge chronique
et sport
Une entité encore mal connue
Pr Pierre Rochcongar (Unité de biologie et médecine du sport, CHU de Rennes)
L
> Epidémiologie
et physiopathologie
soient totalement épargnées.
Toutes les loges musculaires peuvent
La physiopathologie de ces syndromes
être concernées. Toutefois, les locali-
est encore à ce jour discutée. L’hypo-
sations les plus fréquentes concernent
thèse la plus souvent avancée est celle
les loges antérolatérales de jambe, la
de l’inadéquation entre le contenant
loge antérieure de l’avant-bras et, à
(la loge et l’aponévrose) et le contenu
un moindre degré, la loge profonde de
(le muscle lui-même). Les muscles sont
jambe. D’autres cas plus anecdotiques
en effet susceptibles de s’hypertrophier
ont été décrits au niveau de la main, de
grâce à l’exercice musculaire lui-même,
la voûte plantaire, des muscles para-
associé ou non à des programmes de
vertébraux ou des muscles de la cuisse.
musculation. On peut rapprocher de
Le type de pratique sportive est fonda-
ce tableau, l’existence d’un muscle
mental à rechercher. La course à pied
surnuméraire. Par ailleurs, et de façon
ou la marche intensive prolongée sont
physiologique, l’exercice musculaire
responsables des syndromes de loges
entraîne une augmentation transitoire
de jambes. La pratique de sports col-
de l’eau intracellulaire et donc une aug-
lectifs peut être aussi révélatrice mais
mentation du volume et des pressions
le plus souvent encore bien supportée
dans la loge. Toutefois, des travaux de
alors que les footings sont déjà impos-
recherche doivent être poursuivis pour
sibles. Ceci s’explique par le caractère
mieux comprendre ces mécanismes
intermittent de ces exercices. Les sports
et progresser dans la prévention, voire
> Introduction
comme le cyclisme ou la natation ne
aussi pour proposer d’autres thérapeu-
Les syndromes de loges chroniques, à
sont pas responsables de ce syndrome.
tiques adaptées.
l’inverse des syndromes de loges aigus,
Au niveau des membres supérieurs, on
sont avant tout révélés par la pratique
retrouve comme étiologie principale la
sportive. Ils surviennent chez des su-
moto tout terrain et la planche à voile. A
> Diagnostic
jets ayant déjà une pratique ancienne
un degré moindre, ces syndromes peu-
Il est avant tout clinique. Le diagnostic
et régulière. Le diagnostic évoqué clini-
vent être retrouvés chez les spécialistes
doit être systématiquement évoqué de-
quement doit être confirmé par la me-
de musculation et de sports nautiques
vant un tableau de douleurs localisées
sure des pressions intramusculaires,
comme l’aviron et le canoë-kayak.
(décrites le plus souvent sous l’aspect
dans les circonstances d’apparition de
Il s’agit d’une pathologie de l’adulte
de tension dans la loge), très souvent
la douleur, et conduit le plus souvent à
jeune, et elle concerne avant tout les
symétriques, déclenchées par un exer-
une prise en charge chirurgicale.
hommes, sans toutefois que les femmes
cice d’intensité donnée et apparaissant
es syndromes de loges
chroniques doivent faire
partie des hypothèses diagnostiques systématiquement
évoquées devant toute douleur
localisée, révélée par l’exercice
physique. Le type de sport, la
notion de douleurs symétriques
disparaissant en quelques minutes à l’arrêt de l’exercice et
réapparaissant à l’effort, la
constatation de hernies musculaires, doivent faire envisager
le diagnostic, confirmé par la
mesure des pressions intramusculaires. Le seul traitement à
ce jour efficace, en dehors de
la suppression du geste nocif
étant la prise en charge chirurgicale.
17
Cardio&Sport
l
n°26
Dossier
Pathologies vasculaires des sportifs
Dossier
Pathologies vasculaires des sportifs
progressivement pour des exercices de
moins en moins intenses. La constatation de hernie musculaire après effort
a quasiment valeur pathognomonique
dans ce contexte (Fig. 1). D’autres
signes associés sont fréquemment retrouvés, à savoir la notion de fourmillements principalement au membre supérieur, voire de faiblesse musculaire
passagère.
Par ailleurs, la symptomatologie disparaît habituellement en 10 à 15 minutes, à l’arrêt de l’exercice. Les signes
persistent rarement dans les heures qui
suivent et, en tout état de cause, sont
le plus souvent exprimés sous la forme
Figure 1 - Hernies musculaires post-effort dans un contexte de syndrome de loge chro-
d’une simple gêne.
nique antérolatéral de jambe.
Chez un sportif, le syndrome de loges
membres supérieurs ou d’un piège po-
du bras et des loges antérolatérales de
doit être différencié du syndrome ca-
plité aux membres inférieurs pour ne
jambe est techniquement facile, au-
nalaire d’effort (le plus souvent unila-
citer que les causes les plus fréquentes.
tant la mesure dans la loge profonde de
téral avec des douleurs disparaissant
jambe est plus difficile, de par sa situa-
en quelques heures ou jours et associé
La confirmation du diagnostic néces-
tion anatomique, nécessitant un abord
parfois à une recrudescence nocturne),
site la mesure des pressions intramus-
rétro-tibial par voie postérieure.
d’une fracture de fatigue (douleur plus
culaires (PIM) dans les circonstances
localisée apparue brutalement, le plus
d’apparition de la douleur (les autres
Les mesures doivent être réalisées en
souvent unilatérale, disparaissant au
examens types IRM, scintigraphie au
décubitus dorsal. Au repos elles sont le
repos et réapparaissant pour des exer-
thallium n’ont pas encore à ce jour réel-
plus souvent normales et inférieures à
cices de moins en moins intenses)
lement fait leur preuve). Les mesures
15 mmHg. En ce qui concerne les loges
voire d’une maladie musculaire de type
sont habituellement réalisées grâce
antérolatérales de jambe, immédiate-
glycogénose (douleurs symétriques
à un moniteur de pressions de type
ment à l’arrêt de l’exercice, les valeurs
concernant plusieurs groupes mus-
Striker et exprimées en millimètres
sont considérées comme patholo-
culaires et ne disparaissant qu’après
de mercure. Les tests réalisés aux
giques au-delà de 25 à 30 mmHg (nous
plusieurs heures ou plu-
membres
supérieurs
avons pu noter des chiffres supérieurs
sieurs jours) (1).
nécessitent la répéti-
à 100 mmHg chez certains patients).
tion de mouvements
En ce qui concerne la loge postérieure
de flexion des doigts et/
de jambe les valeurs supérieures à
ou du poignet (appareil
20 mmHg sont fortement suspectes,
de musculation, gon-
surtout si celles-ci restent élevées plus
(les syndromes de loges
flement d’un brassard,
de 15 minutes après l’exercice (il ne faut
chroniques et les pièges
exercices
suspen-
donc pas, dans le doute, hésiter à renou-
vasculaires peuvent d’ailleurs être as-
sion…). Au niveau du membre infé-
veler la mesure). Pour la loge antérieure
sociés) (2). C’est dire l’importance de
rieur, nous réalisons des tests de course
du bras, les valeurs de repos sont sou-
l’examen clinique minutieux associé
sur tapis roulant avec une pente de
vent inférieures à 10 mmHg, et on peut
à des examens complémentaires (en
4 à 5 % pour favoriser le travail des rele-
considérer comme pathologique des
premier lieu Doppler artériel dyna-
veurs du pied notamment, en adaptant
chiffres supérieurs à 20 mmHg. Il faut
mique) à la recherche d’un syndrome
la vitesse aux capacités du patient. Au-
toutefois signaler qu’il n’existe pas de
de la traversée thoraco-brachiale aux
tant la mesure des pressions au niveau
consensus réel sur ces chiffres.
Le diagnostic différentiel
le plus difficile concerne
la pathologie vasculaire
artérielle ou veineuse
Cardio&Sport
l
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®
Chez un sportif, le
syndrome de loges
doit être différencié
du syndrome
canalaire d’effort.
18
de
Les causes d’échec précoces sont plutôt
à expliquer par des diagnostics incomplets. Il faut particulièrement insister
sur les syndromes dynamiques d’effort
qu’ils soient d’origine artérielle ou neurologique et qui doivent être systématiquement dépistés même quand ils
s’expriment à bas bruit. Le syndrome
de loge chronique, quand il existe, n’est
alors que la conséquence du syndrome
dynamique. L’échec thérapeutique est
© Maridav - Istock
alors quasiment assuré. Plus rarement
il s’agit de complications post-chirurgicales limitées dans le temps (hématome secondaire à l’aponévrotomie ou
La course à pied ou la marche intensive prolongée sont responsables des syndromes de
lésion d’un nerf superficiel, comme le
loges de jambes.
nerf fibulaire superficiel).
> Traitement
rés d’un seul côté sont amenés à consul-
Les hypothèses actuelles (inadéqua-
ter dans les mois ou années qui suivent
> Conclusion
tion contenant/contenu), l’élévation
pour le côté non traité initialement.
Le syndrome de loges chroniques du
des PIM, justifient l’indication du trai-
sportif est une entité encore mal connue
tement chirurgical. Il est le seul à avoir
Pour toutes les séries publiées, les résul-
de beaucoup de praticiens. Il n’est pour-
fait la preuve de son efficacité à ce jour
tats sont très bons à excellents dans plus
tant pas rare, notamment chez les spé-
avec le repos et la suppression du geste
de 80 % des cas (4). La récidive est excep-
cialistes de course à pied, les militaires,
toxique (autre alternative thérapeu-
tionnelle, et souvent liée à un acte chirur-
les motards et les véliplanchistes. Seule
tique efficace mais peu envisageable
gical incomplet. La reprise du sport se
une bonne connaissance du geste spor-
chez les sportifs jeunes et motivés).
fait en moyenne après le deuxième mois
tif responsable, associée à un interroga-
Il faut toutefois indiquer que des études
et nous avons pu constater des reprises
toire de qualité peut conduire à évoquer
préliminaires concernant le traitement
plus précoces, sans autorisation médi-
ce diagnostic qui justifiera dans tous les
par toxine botulique, sur des syn-
cale, comme la participation à un Paris-
cas la mesure de prise de pressions in-
dromes de loges chroniques de jambe,
Dakar d’un motard, 4 semaines après
tramusculaires et, si nécessaire, le traite-
antérolatéraux, semblent montrer, à
l’intervention, avec un excellent résultat.
ment chirurgical. n
court et moyen termes des résultats encourageants (3).
Le plus souvent, quand le traitement
Bibliographie
chirurgical est proposé, il s’agit d’une
aponévrotomie sous-cutanée large et
1. Rochcongar P. Myalgies et exercices physiques. J Traumatol Sport 2000 ; 17 :
plus rarement une aponévrectomie par-
67-71.
tielle. Toutes les loges doivent être trai-
2. Feugier P. Pathologie vasculaire. In: Rochcongar P et Monod H, ed. Médecine du
tées (antérieures et latérales au niveau de
sport pour le praticien. Paris : Masson, 2009 : 347-61.
la jambe par exemple). Nous pensons lo-
3. Lecocq J, Isner-Horobeti ME. Treatment of exertional compartment syndrome
gique de proposer un traitement bilaté-
leg with botulinum toxin A: a first open pilot study. J Rehabil Med 2008 ; 47 :
ral, même quand les signes prédominent
111-2.
d’un côté et quand les pressions sont
4. Slimmon D, Bennell K et al. Long-term outcome of fasciotomy with partial fas-
élevées après l’exercice, ce qui est quasi-
ciectomy for chronic exertional compartment syndrome of the lower leg. Am J
ment systématique. En effet, dans la plus
Sports Med 2002 ; 30 : 581-8.
grande majorité des cas, les patients opé-
19
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Dossier
Pathologies vasculaires des sportifs
Dossier
Pathologies vasculaires des sportifs
d
Le syndrome
du défilé
thoraco-brachial
Un syndrome rare, parfois trompeur
Dr Marc Ferrière (Département de cardiologie, CHRU de Montpellier)
L
e syndrome du défilé thoraco-brachial, le thoracic
outlet syndrom, le syndrome
de la pince costo-claviculaire, le
syndrome de Paget-Schroetter,
correspondent à une seule et
même pathologie.
breuses. Elévation de la première côte,
Les signes neurologiques concernent
abaissement du thorax, hypertrophie
plus les femmes. Les plus fréquents
musculaire, traumatismes répétés de
sont des douleurs de la région sca-
cette zone et variantes
anatomiques
lèsent
les éléments vasculonerveux de cette zone.
L’atteinte qui est globalement rare est plus fré-
pulaire, cervicale, des
L’incidence du
syndrome du défilé
thoraco-brachial
est estimée de 3
à 80 pour 1000
personnes.
épaules et/ou de la
partie haute des bras.
Il peut s’y ajouter des
paresthésies des mains,
territoires médian ou
> Physiopathologie
quente dans les sports
Le syndrome du défilé thoraco-bra-
qui hypertrophient les
chial correspond à la compression
muscles de cette région,
anatomique du paquet vasculo-ner-
accentuant des troubles de la statique
douleurs peuvent être révélées par l’ef-
veux dans son passage cervico-thora-
de l’épaule et parfois majorée par les sé-
fort et mimer l’angine de poitrine. Les
cique. Selon le lieu exact de compres-
quelles d’un traumatisme local.
données électrocardiographiques de
sion et les variations anatomiques,
L’incidence du syndrome du défilé tho-
repos et d’effort normales éliminent
morphologiques
raco-brachial est estimée de 3 à 80 pour
tout doute. Une fatigabilité d’effort est
des éléments de cette région, son
1 000 personnes.
présente dans moins de 10 % des cas.
expression clinique est variable, ner-
L’atteinte est parfois bilatérale, mais
Des cervicalgies parfois positionnelles
veuse, artérielle ou veineuse domi-
alors asymétrique.
sont fréquentes.
et
fonctionnelles
cubital, ou une atrophie
des muscles latéraux de
l’éminence thénar. Ces
nante ou isolée.
Les signes vasculaires, froideur des
Trois triangles anatomiques sont le lieu
de possibles compressions. Il s’agit du
> Diagnostic
extrémités,
distaux,
triangle inter-scalénique, entre les sca-
disparition
des
pouls
phénomène de Raynaud
lènes et la partie moyenne de la pre-
Les signes neurologiques
unilatéral, traduisent l’atteinte arté-
mière côte, du triangle costo-clavicu-
Les signes cliniques sont neurolo-
rielle. Œdème, cyanose du bras ou
laire, entre le tiers moyen de la clavicule
giques, sensitifs ou moteurs, artériels
de l’épaule et circulation collatérale
et la partie haute de la première côte
ischémiques ou emboliques, veineux
veineuse de l’épaule ou de la poitrine,
et de l’omoplate, et enfin du triangle
à type de thrombose. Les signes neu-
traduisent la compression veineuse.
constitué par le petit pectoral et l’apo-
rologiques sont souvent isolés ou as-
Le syndrome de Paget-Schroetter ou
physe coracoïde. L’espace est aussi
sociés de manière discrète aux mani-
phlébite d’effort du membre supé-
fréquemment rétréci par une côte cer-
festations artérielles ou veineuses qui
rieur correspond à la thrombose aiguë
vicale, une anomalie d’implantation
sont habituellement distinctes l’une
de la veine sous-clavière et doit être
des muscles scalènes ou des bandes fi-
de l’autre.
reconnu et traité très vite pour obtenir
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20
associant plus ou moins une rotation et
irradiant le plus souvent sur le tra-
une abduction, comme lors de l’éléva-
jet du nerf cubital ou du médian. Les
tion progressive du bras et/ou lors de
manœuvres dynamiques consistent
gestes répétés de force avec lever. On
en 10 à 50 mouvements du bras et
retrouve souvent un traumatisme local
de l’avant-bras. Elles sont positives si
peu de temps avant l’apparition des
elles déclenchent symptômes ou de-
premiers symptômes.
viennent impossibles. La manœuvre
du “chandelier” se fait en abduction à
Les signes “sportifs”
90° avec légère rétropulsion de l’épaule
Sur le plan sportif, les signes vont de la
les mains tournées vers l’extérieur. La
simple gêne aux complications sévères
manœuvre de Wright se fait en hype-
entraînant impotence, séquelles et ar-
rabduction à 180°. La manœuvre de
rêt de l’activité sportive en cause. Tous
East se fait en abduction à 90° et rota-
les sports répétitifs, violents ou asso-
tion externe.
ciés à un traumatisme et fermant un
L’imagerie
peuvent entraîner une atteinte neu-
L’électromyogramme avec mesure de la
rologique ou artérielle ou veineuse le
vitesse de conduction nerveuse (VCN)
plus souvent chronique. Les sportifs le
est un élément important du diagnos-
plus souvent concernés sont le pitcher
tic : c’est un élément fondamental dans
du baseball, le volleyeur, le basketteur,
les formes neurologiques et artérielles
le skieur-randonneur avec port de
mais aussi dans les formes d’occlusion
ski sur l’épaule au froid. La survenue
veineuse où il ne doit cependant pas
est sporadique dans ces sports, mais
retarder diagnostic et traitement. Une
certaines fédérations, comme celle
VCN inférieure à 85 m/s dans le terri-
de volley-ball en France, conseillent
toire du cubital ou du médian dans la
systématiquement de la kinésithéra-
traversée du défilé affirme le diagnostic
Tous les sports fermant un des triangles
pie spécifique à tous les joueurs, pour
et une VCN inférieure à 60 m/s oriente
anatomiques incriminés peuvent entraîner
élargir le défilé.
d’emblée les formes neurologiques
© Stocklib - Benis Arapovic
des triangles anatomiques incriminés
vers une approche décompressive
une atteinte neurologique ou artérielle ou
L’examen physique
chirurgicale.
L’examen physique va s’appuyer sur
La radiographie cervicale et du thorax
des manœuvres diagnostiques, sta-
est indispensable à la recherche d’une
une guérison sans séquelles. En de-
tiques ou dynamiques, variées et non
malformation et/ou de la séquelle d’un
hors des exceptionnelles thromboses
spécifiques. La manœuvre d’Adson as-
traumatisme local, ou d’une étiologie
artérielles ou veineuses aiguës plus
socie extension du cou-rotation de la
autre, cervicopathie, pathologie tumo-
fréquentes, la symptomatologie trom-
tête du côté à examiner et inspiration
rale…
peuse et insidieuse retarde souvent le
forcée. Le diagnostic est positif si une
Le Doppler vasculaire positionnel ou
diagnostic.
disparition du pouls radial homolaté-
dynamique, le scanner ou l’IRM sont
ral est observée. La manœuvre d’Eden
utiles et la phlébographie est le pre-
Les signes cliniques mixtes, position-
associe la position du garde à vous en
mier temps de la thrombolyse dans la
nels et transitoires, associent au niveau
inspiration forcée qui doit entraîner
thrombose aiguë de la veine sous-cla-
d’un bras des douleurs, des tremble-
une disparition du pouls artériel. La
vière.
ments, une sudation inappropriée, une
pression douce pendant 10 secondes
Les principaux diagnostics différen-
décoloration et/ou une impression de
du creux sus-claviculaire, en position
tiels sont la sclérose en plaques, la fi-
froideur localisée. Ils surviennent lors
assise, bras et épaule en légère an-
bromyalgie, les vascularites, le phéno-
des mouvements du membre supérieur
té-pulsion, entraîne des paresthésies
mène de Raynaud.
veineuse le plus souvent chronique.
21
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Dossier
Pathologies vasculaires des sportifs
Dossier
Pathologies vasculaires des sportifs
> Traitement
La thrombolyse
gestes de décompression, résection
La diversité des thérapeutiques sou-
La thrombolyse est le premier geste de la
d’anévrysme, et/ou reconstruction avec
ligne l’intérêt d’une approche multidis-
thrombose veineuse aiguë, faite par voie
pontage. Dans les formes neurologiques
ciplinaire.
locale, elle ne doit pas être retardée par
peu sévères (75 % des cas), la kinésithé-
une anticoagulation. Elle précède une
rapie est indiquée. La chirurgie décom-
La kinésithérapie
chirurgie de décompression qui doit se
pressive associée à une thrombolyse et/
La kinésithérapie est surtout le traite-
faire dans les délais les plus courts qui
ou une neurolyse est indiquée dans les
ment des formes neurologiques peu
conditionnent le résultat fonctionnel.
autres cas ou dans les récidives. La sym-
sévères. Les muscles “ouvreurs” du
Elle sera suivie ou non d’anticoagula-
pathectomie dorsale a des indications
défilé sont le trapèze, l’angulaire, le
tion sur une courte période.
particulières. Dans la forme angineuse,
la kinésithérapie et parfois la décom-
sterno-cléido-mastoïdien, le rhomboïde et le grand dentelé. Les muscles
La sympathectomie
“obturateurs” sont les scalènes an-
La sympathectomie dorsale est contre-
térieur et moyen, le sous-clavier, le
indiquée dans les formes veineuses.
petit et le grand pectoral et le grand
Elle est indiquée dans les formes récidi-
> Conclusion
dorsal. Une ouverture et la libération
vantes, les formes hyperalgiques, l’hy-
Le syndrome du défilé thoraco-bra-
des scalènes est obtenue en quelques
perhydrose, le phénomène de Raynaud.
chial est rare. Il peut entraîner l’arrêt
séances par technique d’inhibition
pression sont souvent efficaces.
définitif de l’activité. Parfois trompeur
Les indications varient
selon les formes
son diagnostic peut être très difficile.
ration sensorielle. La deuxième phase
qui est plus longue a pour but d’une
Dans le syndrome de Paget-Schroetter
qui réclame un diagnostic rapide et
part une rééquilibration posturale par
la séquence thrombolyse locale-décom-
un traitement urgent a aujourd’hui un
abaissement des épaules et de la res-
pression doit être la plus rapide possible.
pronostic fonctionnel très favorable
piration en privilégiant la respiration
Dans les formes artérielles la chirurgie
avec la séquence thrombolyse locale et
abdomino-diaphragmatique qui n’hy-
non mutilante se développe pour les
décompression quasi immédiate. des muscles hypertrophiés et amélio-
La forme avec phlébite d’effort grave
n
pertrophie pas les scalènes, et d’autre
part un changement des gestes et de la
position pendant le sommeil.
Pour en savoir plus
La chirurgie de décompression
1. Huguenin P, Ferry MF, Petry D, Goepfert P. La masso-kinésithérapie des syn-
La chirurgie de décompression par
dromes de la traversée cervico-thoraco-brachiale. Rev Readap Fonct Prof Soc 1994 ;
voie transaxillaire, infra ou supra-
21 : 56-66.
claviculaire selon le siège de la com-
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pression, associée à une neurolyse
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Schroetter syndrome). J Vasc Surgery 2008 ; 47 : 809-20.
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3. Nichols AW. Diagnosis and management of thoracic outlet syndrome. Current
aberrants, est proposée dans les
Sports Med Rep 2009 ; 8 : 240-9.
formes neurologiques sévères. Une
4. Rochkind S, Shemesh M, Patish H et al. Thoracic outlet syndrome, a multidisci-
chirurgie mini-invasive sans résec-
plinary problem with microsurgical management without rib resection. Acta Neu-
tion de la première côte est proposée
rochir 2007 ; 100 : 145-7.
avec succès par certaines équipes.
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Une chirurgie vasculaire reconstruc-
artery during thoracic shoulder manœuvres. Man Ther 2009 ; 14 : 19-27.
tive est parfois nécessaire, avec pon-
6. Watson LA, Pizzari T, Balster S. Thoracic outlet syndrome part 1: clinical manifes-
tage veineux en cas de thrombose
tations. Man Ther 2009 ; 14 : 586-95.
veineuse sous-clavière aiguë ou an-
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cienne, pontage artériel et/ou résec-
University Medical Center. Proc Baylor Univ Cent 2007 ; 20 : 125-35.
tion d’anévrysme.
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