RATP SEM CML

Transcription

RATP SEM CML
RATP SEM CML
Rapport d’expertise CHSCT
sur le projet de mise en place d‘un « Contrôle des titres de
transport et verbalisation électronique, recouvrement des
PV et comptabilisation des quittances »
SECAFI
Changement Travail Santé
Cabinet agréé par le ministère du Travail,
habilité IPRP et membre de la FIRPS
Direction Régionale Rhône-Alpes
Immeuble Le Green
241, rue Garibaldi – 69003 Lyon
Tél 04 78 63 60 63
SAS au capital de 910 599 €
328 921 119 RCS Paris
Numéro d’identificat ion intracommunautaire
FR 23 328 921 119
Lyon, le 16/10/2015
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
RATP
CHSCT SEM CML
Mesdames, Messieurs,
Le présent rapport rend compte de la mission qui nous a été confiée lors de la réunion
extraordinaire du 01 juin 2015. Conformément aux dispositions des articles L.4612-1 et
L.4614-12 du Code du Travail, le CHSCT de RATP SEM-CML, informé et consulté sur le
projet de mise en place du projet de « contrôle des titres de transport et verbalisation
électronique, recouvrement des PV et comptabilisation des quittances », a désigné le cabinet
SECAFI pour réaliser une expertise « Projet Important » (Cf. Délibération en annexe).
La mission a été réalisée conformément aux modalités qui ont été élaborées en concertation
avec les représentants du personnel au CHSCT, MM. DOREY, FAYOLLE, FERRY et
LE BORGNE, et avec les représentants de la direction, Mme BRUNET, Présidente du
CHSCT, M. LE MAITRE, Préventeur SEM/CML, Mme GOUX, responsable du projet ePV et
M. CHATY, Responsable RH CML. Ces modalités ont été finalisées et signées le 7 juillet 2015.
Compte tenu de la durée de la phase de cadrage et d’échanges préalables à la validation des
modalités d’expertise, mais aussi des contraintes de la période estivale, le calendrier
prévisionnel suivant a été proposé :
•
Validation des modalités d’expertise le 7 Juillet
•
Réalisation des investigations de terrain (entretiens et observations) en juillet et
éventuellement fin août/début septembre si besoin
•
Réunions de point intermédiaire le 7 septembre, le matin avec les représentants du
personnel, et l’après-midi avec la direction
•
Rédaction puis envoi du rapport le 21 septembre
•
Réunions préparatoires avec les représentants du personnel puis avec la direction le
9 octobre
•
Présentation du rapport d’expertise au CHSCT le 12 octobre
Pour exécuter nos travaux, nous avons réalisé des entretiens avec les responsables du projet
et de SEM CML, mené des entretiens et des observations des activités impactées dans les
entités ciblées lors du cadrage (attachements SCC de Noisy et Bastille, Lignes de Métro 4 et 5,
services Recouvrement CML, Comptabilité quittances et Contrôle des ventes SEM. La liste de
ces investigations figure en Annexe ainsi que celle des documents utilisés.
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Nous remercions nos interlocuteurs de leur disponibilité et pour l’organisation de ces
investigations de terrain, particulièrement dans la complexité de la situation estivale. En
effet, les absences liées aux congés, les adaptations d’organisation durant l’été (chaleur,
travaux, équipes de contrôle plus réduites…) ne nous ont pas permis d’organiser autant
d’entretiens que prévus ni de valoriser pleinement les temps d’observations. Cependant
nous avons tout de même pu mener des investigations assez diversifiées et espérons
représentatives.
Lors de la séance de travail du 7 septembre 2015 avec les élus des CHSCT puis avec la
Direction, le Cabinet a présenté une première analyse intermédiaire de la mission.
Vous trouverez, dans le corps du rapport, une présentation plus détaillée de la méthodologie
mise en œuvre incluant la liste des réunions, entretiens et observations qui ont été réalisés.
Ce rapport a été présenté en réunion plénière le 12 octobre 2015, avant d'être remis sous sa
forme définitive.
Nous vous remercions de la confiance que vous nous témoignez et restons à votre
disposition pour vous fournir toute explication complémentaire que vous estimeriez
nécessaire à l’appréciation de la situation.
Christophe BOURDELEAU
Juliette CROZIER ROMAND
Sylvain GUARD
Francis ODIER
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Sommaire
1.
2.
Analyse de la demande, problématique traitée et approche
retenue
5
1.1.
Présentation générale du projet ePV
6
1.2.
L’analyse de la problématique et le choix du périmètre de la mission
9
Besoins et attentes des différentes activités liées au Contrôle
envers le projet ePV
2.1.
Des déterminants de l’activité de Contrôle à prendre en compte pour l’ePV 14
2.2.
Une nécessaire vigilance sur la gestion de la transition et l’évolution des charges
de travail dans les services de traitement des ePV
3.
13
36
Les apports et contraintes du futur système ePV identifiés à ce
jour
54
3.1.
Regard sur l’ergonomie d’un nouvel outil informatique
55
3.2.
Les impacts potentiels sur les activités de travail et les collectifs
68
3.3.
Des aspects importants du projet restent encore à déterminer
75
3.4.
Préconisations pour le Retour d’expérience et la Prévention des risques
81
ANNEXES
88
Planning de la mission et personnes rencontrées
89
Documentation à notre disposition
90
Délibération du CHSCT SEM CML du 01 juin 2015
91
Ergonomie des logiciels
93
L’encadrement de la cybersurveillance par la CNIL
97
Glossaire
99
4
1. Analyse de la demande,
problématique traitée et
approche retenue
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1.1. Présentation générale du projet ePV
Les objectifs et enjeux du projet
Le projet de PV électronique (ePV) consiste en « la mise en place d’une nouvelle solution de
contrôle des titres de transport télébillettiques et de verbalisation électronique ». Il s’agit donc de
mettre en place un dispositif permettant la réalisation :
•
Du contrôle des titres de transport : lecture et contrôle de la télébillettique,
enregistrement des activités
•
De la verbalisation électronique : saisie des quittances et PV, impression des
justificatifs, archivage et télétransmission des quittances et PV
•
Du reporting : remontée de l’activité de verbalisation
Le projet ePV mettra ainsi à disposition des agents de la RATP :
•
Un nouvel outil portable de contrôle, de saisie et d’impression (INGENICO IWL 280),
mais pas de paiement dans un premier temps
•
Un nouveau serveur de gestion des équipements ePV (CONVERSE)
L’enjeu pour l’entreprise est de procéder à la dématérialisation de la saisie des procèsverbaux et des quittances, activités actuellement réalisées à l’aide de carnets à souches
papiers, renseignées manuellement par les agents et traités en back-office, à l’aide de la mise
en place de deux nouveaux outils.
Cet équipement conduirait à une évolution des modalités de réalisation de l’activité de
contrôle mais aussi de contrôle des ventes et comptabilité SCC, ainsi que de recouvrement.
Ce projet s’inscrit également dans un contexte d’obsolescence matérielle et logicielle de la
gestion actuelle de la solution de contrôle des titres télébillettiques de l’entreprise (LDPC).
La dématérialisation de la chaîne de traitement des infractions permettrait non seulement
« d’accélérer et simplifier les modalités de paiement des PV », mais aussi « d’augmenter le taux de
recouvrement des PV en diminuant le nombre de PV classés RI50 … et de renforcer la fiabilité des
adresses saisies ».
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Cette mise en place permettra également une « optimisation du pilotage de l’activité »,
notamment en « facilitant la fourniture à l’encadrement d’indicateurs de pilotage de lutte contre la
fraude ».
Le périmètre concerné
Les effectifs concernés par la mise en place du projet :
Changements envisagé par la
Salariés concernés par le projet
direction de projet
(source dossier CHSCT)
Agents réalisant des activités de contrôle :
•
Baisse du temps de saisie d’une
infraction, d’un PV
Equipes de contrôle des départements CML
(environ 950 agents) et SEM (environ 6000 Un seul terminal pour le contrôle
agents)
et la verbalisation
Simplification du processus
Contrôle des ventes :
•
•
Contrôle des ventes SEM (environ 50 agents)
Comptabilité des quittances SCC
Homogénéisation
du
service
(SEM/CDV) : transfert de 2 ETP
de CML vers SEM
Pôle de recouvrement (39 agents)
Accueil téléphonique et face à
face : Baisse du nombre de saisies
anticipées
Service relation clients (environ 80 agents)
Modification mineure des écrans
de saisie OASIS
Le planning du projet
Dans le dossier CHSCT, le planning suivant est indiqué :
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Le déploiement sera précédé de deux phases pilotes de mise en place du matériel sur le
terrain et de réalisation des travaux préalables dans les sites :
•
Novembre 2015 - avril 2016, phase de « pilotes techniques » : test du matériel et de
débuggage des logiciels. Tests réalisés par une équipe SEM ligne 5 (5 appareils) et une
équipe CML de l’attachement de Noisy-Le Grand (5 appareils), soit une vingtaine
d’utilisateurs pilotes.
•
A partir de mai 2016, phase de « pilotes sites » : déploiement du matériel sur les équipes
SEM de la ligne 5 (100 agents) et CML de l’attachement de Noisy-Le Grand (100 agents).
Nous n’avons pas encore de précisions sur le calendrier de déploiement, au-delà de mai 2016
si ce n’est que le déploiement est ensuite prévu site par site jusqu’en avril 2017.
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1.2. L’analyse de la problématique et le choix du périmètre
de la mission
1.2.1. La problématique retenue lors du cadrage
Dans le cadre des activités de contrôle des titres de transport, de verbalisation, de
recouvrement des PV et de comptabilisation des quittances, l’enjeu de l’introduction d’un
terminal électronique pour remplacer le traditionnel bloc papier des procès-verbaux et des
quittances, et l’écriture au crayon, est multiple et impacte l’ensemble de la chaîne de
traitement des amendes, du corps de contrôle, au pôle recouvrement en passant par le
contrôle des ventes.
Les représentants du personnel s’interrogent sur l’impact du projet sur les conditions de
travail des agents concernés. En effet, ces derniers expriment des interrogations relatives aux
adaptations nécessaires en matière de pratiques métier : Quels changements induits par la
mise en place de ce matériel pour les agents de contrôle ? Quels changements dans les
logiciels ?
Les représentants du personnel sont également surpris par la subite urgence prise par le
projet, le projet étant en réflexion depuis plusieurs années au sein de la RATP (et déjà
évoqué lors d’expertises précédentes). Ces derniers s’interrogent également sur le phasage
du projet et notamment sur les phases pilotes.
Le choix de l’outil est également source d’interrogation pour les représentants du personnel
qui s’étonnent de constater que le matériel retenu n’ait pas donné lieu à une phase de test
plus approfondie sur le terrain avant que le marché en soit passé (il est fait référence à la
mise en place de tablettes pour les agents de gare de la ligne A, dont on constaterait à
postériori, que l’outil ne serait peut-être pas adapté aux besoins du terrain), mais également
de ne pas avoir pu accéder à l’appareil retenu.
Il aurait été plus judicieux selon ces derniers de procéder à une phase de consultation sur le
choix de l’outil, puis à une consultation sur l’impact de l’outil sur les conditions de travail, et
l’organisation afférente.
Ils ont également soulevé les risques liés au recueil du numéro de téléphone portable du
contrevenant et à sa vérification « en direct » par le contrôleur, même si, suite à plusieurs
alertes sociales, la direction s’est engagée en CHSCT à le suspendre.
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Enfin, les représentants du personnel s’inquiètent de l’utilisation de certaines fonctionnalités
de l’outil, qui permettrait, le cas échéant, de tracer relativement précisément l’activité de
chaque agent avec des inquiétudes sur la cybersurveillance, et impacterait notamment les
méthodes de contrôle, mais également son pouvoir de discernement.
Sur la question des pôles recouvrement et contrôle des ventes, les représentants du personnel
évoquent une problématique de charge de travail relative à la diminution du nombre de
postes, mais s’interrogent également sur les changements dans le système de traitement des
amendes (logiciel, interface,…).
La direction met en avant que la mise en place du projet ePV :
•
S’accompagnera d’une amélioration des conditions de travail des agents de terrain
(réduction du nombre d’agrès, facilitation des saisies d’infractions, organisation du
travail simplifié par la dématérialisation des flux),
•
•
Contribuera à améliorer la relation client, notamment en garantissant la mise à
disposition des clients des justificatifs lisibles et compréhensibles, en accélérant les
modalités de paiement des PV,
Améliorera le taux de recouvrement et en réduira le délai,
•
Permettra l’optimisation du pilotage de l’activité.
Concernant la baisse d’effectifs au sein du pôle recouvrement (- 7 ETP), la direction évoque le
fait que cette baisse n’est que budgétaire mais que le service fonctionne actuellement en
surnuméraire avec des agents temporaires.
Lors du cadrage de la mission nous avons donc observé que les points de vue sur les
impacts du projet sont relativement divergents entre la direction et les représentants du
personnel. Nous avons donc formulé deux hypothèses, instruites durant l’expertise :
•
La mise en place du ePV induira des changements de pratiques de travail pour les
agents de contrôle, et pourrait remettre en question les pratiques liées au
discernement, mais également la nécessité de reconstruire une expérience autour
d’un nouvel outil de travail, particulièrement dans leurs relations avec la clientèle et
la prévention des risques.
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SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
•
Pour les agents du pôle recouvrement et du pole contrôle des ventes, les
modifications de processus de traitement seront également source de changements
dans les pratiques de travail (nature et charge). La disparition progressive de postes
au sein de ces services impactera également leur cohésion et potentiellement la
répartition de la charge de travail avec une période de transition plus complexe de
coexistence de flux papier et dématérialisés.
Notre expertise s’attache donc à instruire les questions suivantes :
•
Identifier les pratiques actuelles des agents de contrôle sur le terrain, de manière à
projeter l’activité future avec l’utilisation du ePV,
•
L’impact de la mise en place du ePV sur la relation avec les voyageurs (temps de
rédaction d’une contravention, positionnement de l’agent,…),
•
Appréhender les potentialités techniques du matériel retenu et des logiciels
développés pour l’activité,
•
Appréhender au mieux les changements dans l’activité de travail pour les agents des
pôles recouvrement et contrôle des ventes (réduction d’effectif et répartition de la
charge de travail, changements dans les interfaces logiciels, dans les pratiques et la
coexistence de flux papier et dématérialisés,…).
Investiguer le processus de gestion du projet, notamment sur le dispositif de
déploiement et l’accompagnement des agents sur le terrain (besoins en formations,
retours d’utilisateurs,…).
•
La présentation du projet au CHSCT bien en amont du déploiement général (après Mai 2016)
représente un avantage en matière de prévention des risques professionnels si la
consultation et l’avis du CHSCT permettent de faire évoluer le projet, si cela s’avère
nécessaire, dans le sens de l’amélioration des conditions de travail. Mais cela induit aussi des
contraintes pour analyser les impacts prévisionnels sur l’activité future des utilisateurs alors
que l’outil futur n’est pas encore testé sur le terrain et que les applicatifs sont en cours de
développement.
Nos investigations ont donc été limitées sur les impacts a priori du projet, sans possibilité
d’observer le test de l’appareil en condition réelle, ni même de recueillir l’avis de testeurs.
Il en a été même pour les services de traitement des ePV (recouvrement, contrôle des ventes,
comptabilité quittance). De plus le calendrier de l’expertise a contraint à la réalisation des
entretiens et observations durant la période estivale, marquée par des fréquentations
différentes et par un arrêt d’un tronçon du RER A.
En complément de l’étude des impacts, l’expertise pourra conduire à des préconisations
relatives à l’implication du CHSCT dans la suite du projet, particulièrement lors des phases
pilotes préalables au déploiement général.
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1.2.2. La démarche mise en œuvre
Nous avons combiné plusieurs modes de recueil d’informations afin de percevoir au mieux
les spécificités de l’organisation actuelle et de l’exercice des métiers concernés par le projet.
Pour cela, notre démarche privilégie les contacts terrain et articule :
•
Des observations de l’activité de travail avec des équipes des entités concernées par le
projet, au sein de SEM et de CML, afin de mieux appréhender l’activité réelle de travail et
à apprécier par nous-même la situation initiale et les impacts potentiels du projet sur les
situations de travail. Rappelons que la prévention des risques doit s’appuyer sur la
connaissance des situations réelles de travail.
•
Des entretiens individuels : Analyse du projet vu par ses concepteurs et par
l’encadrement, de manière à comprendre la logique du projet, les objectifs, les évolutions
envisagées, les contraintes, les conditions de succès, les impacts (en termes d’écarts avec
l’existant) et les risques. Présentation du matériel retenu et des évolutions SI. Egalement
des entretiens individuels avec les acteurs de la prévention : RH, préventeur, ingénieur
sécurité, médecins du travail,…
•
Des entretiens au poste de travail et entretiens collectifs avec des agents appartenant
aux entités concernées par le projet, au sein de SEM et de CML, de manière à comprendre
l’activité et les déterminants des conditions de travail, à recueillir le point de vue
(attentes, observations, …) des salariés sur le projet de PV électronique.
Les terrains retenus, pour tenir compte de la préparation des sites pilotes tout en diversifiant
les investigations seraient les suivants (sous réserve de modifications notamment en raison
de l’arrêt partiel du RER A) :
Contrôle SEM :
Ligne 5 (terrain du pilote technique)
Ligne 4 (2e terrain pour diversifier)
Contrôle CML :
Attachement de Noisy Le Grand (terrain du pilote technique)
Attachement de Bastille (2e terrain pour diversifier)
Services de traitement Contrôle des ventes SEM et Comptabilité des quittances SCC
des PV :
Service recouvrement CML
Par ailleurs, SECAFI s’est appuyé sur les analyses faites dans les expertises précédentes, ce
qui permet, pour la présente expertise, de limiter les observations de l’activité de contrôle
comme au service recouvrement.
L’analyse de données et de documents sur les activités, les effectifs, les lieux de travail, les
changements engagés dans l’entreprise en lien avec le projet de PV électronique. Mais
également des données techniques relatives au matériel retenu (Cf. Liste en Annexe).
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2. Besoins et attentes des
différentes activités liées au
Contrôle envers le projet ePV
Lors de nos entretiens avec les agents, les agents ont été invités à répondre par trois mots à la
question suivante : «
Qu’est-ce qui définit selon vous un contrôle bien fait ? »,
Le nuage de mots ci-dessous restitue le poids de chacun des 79 mots recueillis, regroupés en
thématiques.
RAPIDITE
SECURITE
RELATION CLIENT
REGLES METIERS
COLLECTIF DE TRAVAIL
DISCERNEMENT
CONFLIT
Ces thématiques se retrouvent de manière prégnante dans les résultats de notre
développement.
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2.1. Des déterminants de l’activité de Contrôle à prendre en
compte pour l’ePV
2.1.1.
Une mise en œuvre hiérarchisée des fondamentaux du
métier
Les entretiens et observations ont permis d’identifier un socle commun de compétences entre
les agents de contrôle SEM et CML. Ce socle concerne les fondamentaux du métier de
contrôle à proprement parler. Or, au vu de nos investigations, il apparaît que la mise en
œuvre de ces savoir-faire est hiérarchisée de la manière suivante :
Détermination collective du
l'environnement de contrôle
Sécurisation de cet environnement
Exercice des marges de manoeuvre
individuelles
Déterminer collectivement les cadres d’activité :
Le collectif de travail et le travail en équipe est une des notions les plus fréquemment
remontée lors des entretiens. Il s’agit en fait du point de départ essentiel à l’activité de
contrôle. Les savoir-faire liés à ce collectif sont principalement de deux ordres :
•
Le choix du terrain de contrôle :
L’équipe décide de l’endroit où aura lieu le contrôle, en fonction du moment de la journée,
du type de fréquentation, de l’agencement des lieux (pas trop proche d’un escalator, avec un
espace suffisant pour bien se positionner face au contrevenant concernant le métro…).
•
Le « décrochage » :
Le décrochage est l’acte par lequel l’équipe décide collectivement de cesser l’activité de
contrôle. Les motifs du décrochage sont principalement de deux ordres :
-
Un volume ou un flux de voyageurs crée subitement des conditions défavorables
pour la sécurité
14
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
-
Une situation grave (type agression, ou début d’émeute par exemple) lors de
laquelle l’équipe ne se sent pas en capacité d’assurer ni sa mission, ni sa
protection. Le principe est alors de prioriser la sécurité des agents, en la faisant
passer avant l’activité dite « de production ».
Cette pratique est déjà conditionnée par le bon fonctionnement du collectif de travail, étant
donné qu’elle est le fruit d’un arbitrage entre maintenir la sécurité et préserver l’image des
contrôleurs : « On ne doit pas non plus donner l’impression de perdre la face » ; « Il faut qu’on arrive
à la fois à se soustraire des situations dangereuses, et à la fois à ne pas donner l’impression d’être
faibles devant ceux qui l’ouvrent un peu plus que les autres… ».
AVIS SECAFI
Ces choix collectifs déterminent à la base les conditions de l’activité de contrôle. Ce n’est que
dans ce cadre-là que les fondamentaux du métier de contrôle, qu’ils soient collectifs ou
individuels, vont pouvoir s’exercer.
Le maintien d’un environnement de travail sécurisé : un savoir-faire collectif
Une fois l’environnement de travail déterminé, le collectif en assure la sécurisation durant le
contrôle grâce à trois moyens :
•
La verbalisation en binôme : lorsqu’une fraude est constatée, le contrevenant est
emmené à l’écart du flux et est verbalisé par un agent de contrôle. La règle du
binômage impose alors la présence d’un collègue à ses côtés, qui à la fois joue dans le
rapport de force face au contrevenant, mais aussi dans la surveillance de
l’environnement de travail.
•
La présence du chef d’équipe, dans une posture de veille globale : le chef d’équipe
(OCD chez CML), a pour rôle de rester en retrait pour surveiller l’activité de contrôle
dans sa globalité : respect du programme, et surtout surveillance du déroulement des
contrôles (survenue d’une situation de tension, besoin d’aide d’un collègue…).
REMARQUE SECAFI
Lors de nos observations au sein de SEM, nous avons suivi une équipe constituée de
seulement 3 agents (dont la chef d’équipe). Ce nombre réduit a entraîné des situations de
contrôle en heure de pointe durant lesquelles le binômage n’a pas été pratiqué (sinon, une
seule opportunité de contrôle à la fois) et la chef d’équipe a été amenée à verbaliser. Cela
montre que, dans certaines circonstances, ces pratiques métiers peuvent être mises à mal.
15
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
•
La substitution : Lors de la substitution, un agent prend la place de son collègue
lorsque ce dernier est en difficulté relationnelle. Les entretiens et observations ont
montré une diversité de pratiques : certains poursuivent la rédaction du PV de leur
collègue (si ce dernier n’avait pas encore rempli son numéro de matricule), certains
reprennent le PV depuis le début. Cela peut par exemple être dicté par le
comportement de la personne. Ainsi, dans certains cas, redemander au contrevenant
des informations qu’il a déjà données peut venir accentuer un climat de tension déjà
marqué.
Illustration issue des observations de travail :
Un agent commence un PV avec une personne qui devient manifestement de plus en plus
agressive (« Je n’ai pas à vous donner ces informations ! » ; « Là, faut arrêter !! »). Au bout d’un
moment, une collègue doit prendre le relais. Les relations entre l’agent et le contrevenant se
détendent un peu mais l’impatience sur le fait de fournir des données personnelles se fait
toujours ressentir. C’est pourquoi la collègue ne lui redemande pas son adresse et poursuit le
PV amorcé, mais en y apposant son numéro de matricule.
AVIS SECAFI
La substitution a permis à l’agent de reprendre un PV en cours pour optimiser les échanges
avec le contrevenant. Cela a été possible uniquement parce que le carnet de PV n’est pas
nominatif. Avec le ePV, le PV devra être repris du début.
Par ailleurs, ces techniques collectives aident à soulager la charge mentale. En effet, l’agent
doit demeurer vigilant à de nombreux déterminants :
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SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
Le
contrevenant
La rédaction
du PV
L'agent de
contrôle
L'activité
des
collègues
L'environnement
de travail
Nous identifions dans ce schéma différentes sources de déterminants de la charge mentale
lors de l’activité de contrôle :
•
Le contrevenant :
L’agent de contrôle doit en effet à la fois :
-
Gérer le déroulé des échanges : c’est-à-dire être attentif à ce qui est dit (parfois
avec une locution difficile ou dans une langue étrangère), et avoir la réponse
appropriée (Cf. : infra sur la mise en œuvre de savoir-faire individuels).
-
Pressentir la survenue d’un risque d’agression : dans la posture du contrevenant,
ses mouvements, son attitude en général,…
•
La rédaction du PV :
L’agent doit également s’assurer de la validité du PV qu’il est en train d’écrire. Cela concerne
essentiellement le remplissage des bons champs et la lisibilité de l’écriture. Les observations
et entretiens ont montré que sur ces sujets, le support actuel du PV est bien maîtrisé.
17
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
•
L’environnement de travail :
Cela concerne tout ce qui se déroule autour de la zone de contrôle c’est-à-dire
essentiellement le comportement des flux de populations : densification rendant plus
complexe le contrôle, personnes qui prennent parti pour le contrevenant… D’ailleurs, la
survenue d’une émeute est une crainte très fortement exprimée par les agents rencontrés.
Illustration issue des observations de travail :
Un agent demande sa carte d’identité à un contrevenant. Le contrevenant lui donne et elle
commence à noter l’adresse de ce dernier sur le PV. Brusquement, le contrevenant se précipite
sur elle pour lui arracher la carte mais est arrêté par un collègue qui immobilise l’agresseur.
L’agent en rédaction n’a eu aucune réaction de surprise. A posteriori elle nous indiquera
« l’avoir vu venir » alors même qu’elle avait les yeux rivés sur le carnet : « Même si on n’en a pas
l’air, on reste toujours vigilant à notre environnement. Là, je l’avais senti commencer à avoir des gestes
désordonnés, de va et vient vers moi… ».
•
L’activité des collègues :
L’agent reste toujours vigilant à l’activité de ses collègues afin de s’assurer que le contrôle se
déroule sans difficultés de leur côté : « Il faut toujours qu’on puisse se voir les uns les autres » ;
« On reste toujours un peu en veille pour les collègues ».
AVIS SECAFI
La charge mentale lors de l’activité de contrôle est lourde, et au cœur des questions de
sécurité. En effet, le risque d’une baisse de vigilance peut être de créer un terrain plus
favorable aux agressions et freiner les capacités de l’agent à les anticiper et les prévenir. Le
binômage ainsi que la présence du chef d’équipe viennent alors soulager la charge mentale
de l’agent, essentiellement pour ce qui relève de la vigilance au contrevenant (par le binôme)
et à l’environnement de travail et l’activité des collègues (par le chef d’équipe ou OCD). Cela
entraine une sécurité accrue du contrôle.
L’influence de l’introduction d’un nouvel outil sur la charge mentale est déterminante à
identifier pour anticiper d’éventuels impacts sur la sécurité des agents en contrôle.
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SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
Un éventail de marges de manœuvre individuelles pour un contrôle « en bonne
intelligence » :
Le troisième type de savoir-faire concerne cette fois la manière dont le contrôleur va, sur le
plan individuel, gérer son activité.
Cette gestion est un équilibre à trouver dans la relation avec la personne :
Client
Contrevenant
Posture
commerciale
Posture
autoritaire
Afficher une
bonne image de
la RATP
Assurer sa
propre sécurité et
la régularisation
de la situation
Pour gérer cet équilibre, l’agent dispose d’un panel de pratiques de métiers qu’il doit utiliser
et combiner en fonction des situations spécifiques qu’il rencontre :
•
Le « lâcher-prise » :
Cette pratique correspond au décrochage à l’échelle individuelle. L’agent choisi, au vu des
échanges avec la personne, de privilégier sa propre sécurité au détriment de la régularisation
de la situation
•
Le discernement :
Le code de déontologie en donne une définition. Il s’agit de reconnaître, « avant toute
décision », dans la situation du voyageur, des faits qui ne lui incombent pas (« pièges tarifaires,
dysfonctionnement d’appareil, mauvaise information, .... »). Cette reconnaissance évite de créer un
sentiment d’injustice chez l’usager et donc une situation potentiellement tendue.
19
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
AVIS SECAFI
Les pratiques du lâcher-prise et du discernement peuvent entraîner l’annulation d’un PV
déjà commencé. En effet, elles sont souvent mises en œuvre après que les échanges avec le
contrevenant, et souvent même la rédaction du PV, aient été amorcés.
Illustration issue des observations de travail :
Une jeune personne mineure est identifiée sans titre de transport, elle ne peut pas payer
tout de suite car a oublié son portefeuille et semble très intimidée par l’agent de contrôle.
L’agent amorce un PV. Lors des échanges, la mineure explique qu’elle a été déposée trop
loin par sa mère et a dû donc prendre le métro mais qu’elle ne sait pas comment cela
fonctionne. L’agent cesse alors la rédaction du PV, lui explique comment fonctionnent les
tickets et que c’est une règle à respecter impérativement, sans quoi la prochaine fois il y
aura contravention.
L’agent de contrôle nous dit par la suite : « On voit bien que ce n’est pas sa faute, que ce n’est
pas fait sciemment et visiblement, elle ne recommencera pas »
Pour que ces pratiques Métier soient possibles, l’annulation d’un PV doit demeurer
librement à la main de l’agent.
•
La mise en œuvre de « jeux d’acteurs » :
Il s’agit là des attitudes que peut adopter un agent face au contrevenant pour affirmer son
autorité et pallier le manque de prérogatives officielles : « Nous n’avons pas vraiment de droit
sur l’usager, par exemple on ne peut pas le retenir… Du coup on l’intimide » (Cf. : partie traitant du
manque de droit des agents).
AVIS SECAFI
Les jeux d’acteurs mis en œuvre par les contrôleurs exigent une certaine contenance de la
part de l’agent. Cette contenance se construit avec l’expérience et est permise que s’il y a
maîtrise de l’agent sur son environnement et ses outils de travail. En cas d’aléas, ou de
situations mal connues, l’agent perd de l’aisance et les jeux d’acteurs seront difficiles à
mettre en œuvre. Ce point ne doit pas être négligé lors de l’introduction d’un nouvel outil
(Cf. partie suivante).
20
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
•
Les mesures de clémence :
L’agent peut choisir d’appliquer le tarif en dessous du tarif constaté, excepté pour les
contraventions de 60 euros, s’il estime que cela est justifié au vu de la situation particulière
de la personne qu’il a en face de lui ou que c’est ce qu’il y a de mieux à faire au vu de la
teneur des échanges.
AVIS SECAFI
Tout comme lors du discernement ou du lâcher-prise, la mesure de clémence intervient
souvent au fil des échanges avec le contrevenant. L’agent dispose de latitudes pour choisir
le montant, et/ou de ne le remplir jusqu’à la fin.
•
La maîtrise de la durée des échanges :
La majorité des agents rencontrés ont évoqué l’importance de maîtriser la durée des
échanges avec le contrevenant. En effet, plus cette durée s’allonge et plus les tensions
peuvent apparaître : « Ce n’est jamais bon un échange qui dure… » ; « Les personnes sont en
général de plus en plus tendues au fil de la conversation, il faut donc écourter au maximum » ; « Il
faut être rapide ».
Les différentes pratiques évoquées précédemment permettent en grande partie à l’agent
d’avoir la main sur la durée des échanges : écourter les négociations par une mesure de
clémence, un lâcher-prise, ou l’exercice du discernement.
AVIS SECAFI
La maîtrise par les agents de la durée des échanges ne doit alors pas être entravée, sous
peine de voir s’accentuer les tensions. C’est pourquoi les outils à dispositions des agents
doivent leur permettre rapidité et réactivité. Globalement, l’activité de contrôle, une
activité nécessitant une perpétuelle adaptation et donc des marges de manœuvre :
Discernement
(situation,
pouvoir)
...
Environ
-nement
Situation
ADAPTATION
Horaires
Colllectif
(binome,
collègues,
RE)
Voyageurs
21
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
2.1.2.
Des difficultés communes à SEM et SCC dans l’exercice de
l’activité
Une relation clientèle qui se durcit :
De nombreux agents ont évoqué lors de nos entretiens une population d’usagers de plus en
plus « difficile » :
« Les gens sont de plus en plus irrespectueux » ; « On est sujet à bien plus d’altercations maintenant
qu’il y a même 5 ou 10 ans ».
•
Des difficultés invoquées de différents ordres :
Les agents nous ont décrit différents types de difficultés :
-
Une mise à mal de leur fonction : « Ils n’ont plus de respect pour l’autorité » ;
« Maintenant l’uniforme n’impressionne plus » ; « les contrôleurs, nous ne sommes
presque plus craints ».
-
Des clients qui supportent de moins en moins le contrôle : « Pour eux ils sont clients
et supportent mal de se faire contrôler » ; «Aujourd’hui, le client est roi… »
-
Des travailleurs de plus en plus agressifs : « De plus en plus de Mr tout le monde qui
sort du travail partent vite en vrille » ; « Souvent ces gens-là partent au quart de tour,
alors qu’on n’aurait pas soupçonnés ça de ce type de personne »
Illustration issue des observations de travail :
Lors d’un briefing d’une équipe que nous avons suivi était évoqué le cas d’un cadre qui a
frappé un contrôleur subitement lors des échanges. C’était un sujet de discussion qui a pris
du temps et sur lequel les agents ont beaucoup insisté auprès de nous : « C’est de plus en
plus fréquent »
22
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
•
L’identification de différents facteurs
Lorsque nous avons demandé aux agents comment ils expliquaient cette évolution, nous
sommes plutôt restés sur le champ du sociétal :
-
Des clients de plus en plus exigeants : avec l’idée que, de plus en plus, « tout leur
est dû ».
-
Une précarité croissante engendrant une agressivité de plus en plus fréquente :
« Les gens sont de plus en plus mal dans leur vie donc agressifs » ; « Ils sont de plus en
plus poussés à frauder avec des revenus qui se précarisent… et ils ne sont pas contents
quand ils se font prendre » ; « On voit de plus en plus de gens mal dans leur vie qui
boivent ou qui fument… donc qui partent facilement dans l’agressivité ».
-
Une
transparence
accrue
concernant
les
prérogatives
des
contrôleurs :
« Maintenant, avec les médias et les réseaux sociaux, les clients savent ce qu’on peut faire
ou ne pas faire et ils s’engouffrent dans la faille… » ; « Une fois il y a eu un reportage làdessus, après ça les clients savaient qu’on n’avait pas le droit de les retenir… » ; « Ils
connaissent même le « bis » quand on simule un appel à la police ».
AVIS ET RECOMMANDATION SECAFI
Sans nous prononcer sur ces évolutions sociétales, nous faisons le constat qu’il s’agit d’un
facteur de tension abondamment cité par nos interlocuteurs. Il entraîne une dégradation de
la perception qu’ont les agents de contrôle de leurs marges de manœuvre pour gérer les
conflits et un alourdissement de leur charge émotionnelle.
Or, face à ce facteur de tension, la contenance et les « jeux d’acteurs » que l’agent de contrôle
est en mesure d’afficher face au contrevenant prend toute son importance. Cette contenance
ne doit pas se trouver remise en cause lors du déploiement d’un nouvel outil que l’agent
ne maîtrisera pas complètement, surtout en période d’apprentissage, ou qui pourra
présenter des défaillances techniques lors des échanges.
Un nombre d’agrès important et à la fiabilité discutée
Les agents nous dressent un portrait mitigé du parc de matériel mis à leur disposition par
l’entreprise.
23
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
•
Des agrès en grand nombre, complétés par de nombreuses fournitures à emporter
également sur le terrain
Liste non exhaustive de l’ensemble des agrès emporté par les équipes lors des missions :
-
LDPC (1/agent),
-
LDPE (Décodeur, 1 ou 2 par équipe),
-
TPE (1 ou 2 par équipe),
-
Carnet PV (au moins 1 par agent, souvent 2),
-
Carnet Quittances (pour SCC, au moins 1 par agent),
-
Carnet de BIF (SEM, au moins un par agent),
-
Empoche (chaque agent),
-
Talkie (au moins un pour 3 agents),
-
Tetra (1 par équipe),
-
Téléphone portable (1 pour le Responsable d’équipe), …
Cette liste d’agrès est complétée par de nombreuses fournitures que les agents emportent
pour leur mission : agrafeuse, blanc corrector, gilet pour canalisation, crayons, solution pour
nettoyage des mains, gants, guide d’information des lignes,…
Du point de vue des agents, « Ça fait beaucoup d’outils à transporter en même temps ». Si une
partie des agrès sont portés à la ceinture, nombre d’agents se sont pourvus de sacoches
personnelles (ou de sacs à main). Ces derniers sont « plutôt bien remplis ».
•
Du matériel à la fiabilité discutée
Les agents rapportent que « pour bien faire notre travail, on a besoin de bons agrès qui
fonctionnent ». Or de nombreux retours sont fait sur des problèmes liés au matériel :
24
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
-
LDPE : « gros et encombrant pour juste vérifier un petit ticket », « pas de problèmes
particuliers avec le LDPE, si ce n’est sa taille importante »
-
LDPC : Selon les agents le LDPC est « l’agrès essentiel, il sert à réaliser 80% des contrôles,
les 20 autres % sont des tickets, sans lui on ne peut rien faire ».
De nombreux retours négatifs sont fait sur le matériel LDPC, de nature très
différentes : « problèmes de tenue de la charge », « ils sont souvent HS », « les coques sont
cassées », « Ils sont souvent en réparation », « on est souvent obligé de les relancer pendant les
missions, voir pendant une opération de contrôle », « anomalies de fonctionnement : passage
en mode maintenance de façon impromptue »,…
Afin de prévenir les situations de défaillance, les équipes prennent systématiquement
un LDPC supplémentaire avant de partir en mission. Ce sont généralement les
responsables d’équipes qui emportent un LDPC afin de pouvoir palier au
dysfonctionnement de celui d’un agent.
Le port du LDPC est également variable selon les agents. Si certains agents passent la
sangle autour de leur poignet, afin notamment de libérer leurs 2 mains facilement en
lâchant le LDPC et en le laissant pendre, d’autres préfèrent tenir le LDPC dans leur
mains sans le sangler, craignant que l’arrachage de ce dernier ne leur emporte le
poignet.
-
TPE : Sont évoqués des problèmes de connexion du matériel au réseau lors de la
réalisation de transactions. Certains endroits sont connus des agents pour être des
zones dans lesquelles le TPE ne pourra se connecter, comme par exemple « dans la
salle inférieure de la station Nation ». De plus, le matériel ne permet pas l’utilisation de
certaines cartes de crédit, comme par exemple « les cartes de type ELECTRON ».
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SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
Le fait de ne pas être en mesure de procéder à un encaissement par carte induit un
surcroit d’activité pour les agents : Ces derniers se voient contraints de produire un
PV, et donc de facturer des frais de dossier en supplément de l’amende forfaitaire.
Ces derniers remplissent également le rapport complémentaire pour expliquer les
circonstances du PV.
•
Le nombre d’agrès, une source de tension collective
En dehors des agrès portés par chaque agent pour les missions, certains, comme le TPE ou le
décodeur, sont partagés par l’ensemble de l’équipe. Le port de ces agrès, relativement
volumineux, peut s’avérer source de tension. En effet, si les équipes s’organisent pour rendre
équitable la répartition dans le temps du port de ces agrès, les échanges que nous avons eu
avec les agents montrent que c’est un sujet fort dans le fonctionnement, qui peut très vite
générer de la tension.
Illustration issue des observations de travail :
A l’issue d’un brief présentant la mission du jour, la première question posée à l’issue de la
prise de parole du responsable de mission fut « qui prend le TPE aujourd’hui ? »
•
Retour d’expérience sur la mise en place du nouvel uniforme RATP
Les agents nous font un retour très mitigé sur la nouvelle dotation proposée par l’entreprise.
En effet, si cette dotation a été « imposée contre 3200 points qui nous ont été retirés, ce qui amène
nombre d’entre à se trouver en situation déficitaire de points de dotation », le regard porté sur les
habits fournis est dur : « les pantalons s’usent rapidement entre les jambes, pour nous qui marchons
beaucoup », « Les vestes ne sont pas adaptées à l’activité de contrôle : les poches intérieures ne
permettent pas de mettre un carnet de PV ou de quittances ». Quant à la nouvelle sacoche
proposée, certains agents ne l’ont même pas commandée : « vu ce qui nous a été présenté, je
pense qu’en une semaine, les coutures vont lâcher, je vais continuer avec mes anciens outils
personnels »
AVIS ET RECOMMANDATION SECAFI
Ces constats concernant les dysfonctionnements récurrents de leur matériel évoqués par les
agents ont un impact non seulement sur le bon déroulement des actions de contrôle et de
verbalisation, mais également sur le pan de la valorisation du métier au sein de l’entreprise
où à l’extérieur. En effet, si l’image des activités de contrôle auprès du grand public est de
fait dégradée, l’exercice de cette activité au travers l’utilisation d’outils déficients participe à
un renforcement de ce sentiment, à l’image de ce propos d’un agent « déjà qu’on ne nous aime
pas, mais en plus, on n’arrive pas à travailler correctement ». L’image de l’entreprise pâtit
également de cet état de fait.
26
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
Concernant la mise en place d’un nouvel agrès, il est important de prendre les précautions
suivantes, issues de notre recueil de données concernant le LDPC. Le LDPC cristallise les
attentes relatives au terminal ePV, étant l’agrès s’en rapprochant le plus, et celui que le ePV
est censé remplacer de manière la plus prégnante :
-
Tout d’abord, afin de s’assurer de bonnes conditions d’appropriation du nouvel
agrès, il conviendra de s’assurer non seulement de la bonne qualité du matériel mis à
disposition, de sa solidité notamment, de son poids, mais également de sa bonne
prise en main et de sa facilité d’utilisation.
-
De plus, la question de la tenue en main de l’agrès est essentielle et ne pourra être
traitée qu’à travers des tests d’utilisation sur le terrain et par de futurs utilisateurs du
matériel. Ces tests permettraient également, entre autre, de mesurer la tenue dans la
durée du matériel, des batteries, et également l’impact de ce nouvel outil sur la durée
de l’acte de verbalisation.
-
Enfin, il semble essentiel de donner à voir aux futurs agents utilisateurs, une
organisation claire et efficace du processus de maintenance du matériel.
-
Le processus d’appropriation d’un nouvel outil passera également par une offre
adaptée en matière de formation, et notamment les éléments concernant la
maintenance dite « de premier niveau » de l’agrès, c’est-à-dire les phases de base de
test et de remise en fonctionnement d’un agrès présentant des dysfonctionnements
sur le terrain.
-
La dotation en agrès est également un sujet essentiel pour les agents. Au regard des
dysfonctionnements évoqués ci-dessus, il sera important de mettre à disposition des
agents une flotte d’appareils leurs permettant, le cas échéant, de disposer de plus
d’appareils que d’utilisateurs (chiffre à déterminer).
Un « manque de droits » induisant une théâtralisation de la relation avec les
contrevenants
Les agents renvoient fortement le « manque de droits » dont ils disposent pour réaliser leurs
activités de contrôle « Le code des transports n’est plus adapté, il date de Napoléon ». Ils expriment
à quel point, de ce fait, la théâtralisation de leurs activités est importante. N’ayant pour ainsi
dire « aucun droit ni de retenir une personne, ni d’exiger une pièce d’identité », il s’avère également
que les clients sont de mieux en mieux informés sur leurs droits et sur ceux des contrôleurs
« aujourd’hui, les clients nous disent « vous n’avez pas le droit », avant ça n’était jamais le cas ».
27
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
Les agents vivent également difficilement le fait que leur assermentation, très impliquante
pour eux, signifie si peu pour les voyageurs, à l’image de cette parole d’agent
« L’assermentation ne représente rien pour eux … c’est un poids pour nous, mais rien pour eux (les
contrevenants) ».
La situation actuelle est telle que les agents rapportent qu’il n’est possible, aujourd’hui, que
de « verbaliser les gens qui acceptent le contrôle, mais ceux qui le refusent, on ne peut quasiment rien
faire à part intimider ».
De fait, les agents mettent en place des stratégies d’intimidation afin de s’assurer de pouvoir
retenir les contrevenants au plus tôt lors des contrôles.
A l’image des pratiques du contrôle de
bus en statique, durant lesquels les agents
Agents de contrôle
de contrôle obstruent littéralement la
porte
arrière
afin
d’empêcher
les
voyageurs de descendre du bus. Si cette
pratique n’entre pas strictement dans les
pratiques recommandées par l’entreprise,
elle a pour vertu « de nous permettre de faire
notre travail et de remplir nos objectifs » (une
agent).
L’enjeu
récupérer
une
étant
de
réussir
pièce
d’identité
à
des
contrevenants avant que ces derniers ne
sortent du bus, et ne soient plus situés
Responsable d’équipe
dans un espace RATP.
AVIS ET RECOMMANDATION SECAFI
Le constat effectué par les agents de n’être finalement en mesure de verbaliser qu’une partie
des contrevenants met ces derniers face à un véritable « casse-tête éthique », comme
l’exprime l’un d’entre eux « on continue à taper ceux qui sont solvables, les autres, ma foi… ».
En effet, si la grande majorité des agents porte la conviction de traiter l’ensemble des
contrevenants de la même façon, de nombreux éléments amènent ces derniers à « vivre dans
un sentiment de frustration quasi-permanent ».
Pour pallier au manque de droits auquel ils doivent faire face, les agents développent des
postures, des jeux d’acteurs et théâtralisent au maximum leur relation avec un contrevenant.
28
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
Tout en s’assurant qu’ils ne se trouvent pas en situation de danger (veille attentive de
l’environnement immédiat, binômage, regard du Responsable d’équipe), les agents mettent
tout en œuvre pour recouvrir les contraventions immédiatement. Ces derniers ont
effectivement en tête « les objectifs tacites fixés pour les agents de contrôle, soit 11 actes par jour par
agent ».
Les postures différentes entre SEM et CML (Cf. chapitre précédent) permettent de mesurer à
quel point le fait de pouvoir se rendre visible dans les stations, derrière les portillons, pour
les agents SEM est un facteur de prévention de l’exposition au risque d’agression. En effet,
une grande majorité de contrevenants ne seront pas en situation irrégulière car ils ne se
mettront pas dans cette situation, qui relèverait du défi des agents de contrôle.
Dans le cadre de la mise en œuvre d’un procédé électronique de traitement des
verbalisations, il semble important de prendre en compte l’impact en matière d’image de ce
type d’appareil. En effet, comme nous le rapporte un agent, « avec l’ePV, les clients seront
impressionnés par le matériel, ils verront que les PV sont traités en direct, pas comme avec nos vieux
carnets poussiéreux ». D’un côté l’image technologique pourra par son efficacité participer
positivement à la théâtralisation mise en place par les agents pour procéder aux actes de
verbalisation. Mais en revers, il conviendra de bien s’assurer que, en mettant les
contrevenants de fait, dans des situations perçues comme bien plus « enfermantes »
qu’auparavant avec des risques accrus d’agression.
Un paradoxe dans lequel les agents se trouvent pris en permanence :
Production
Niveau de
la
prestation
Couverture
du territoire
29
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
•
Production : S’il ne semble pas exister de position officielle de la direction sur les
attentes en matière de production de PV de chaque agent, ces derniers évoquent
l’existence d’objectifs tacites concernant le nombre d’actes attendus pas jour et par
agent : « on attend de nous une production de 11 actes par jour et par agent, mais vous ne
trouverez rien d’officiel sur ce chiffre » (un agent). Cette production tacitement attendue
mais jamais formalisée s’exprime notamment dans les échanges avec la hiérarchie,
comme nous le rapporte un agent « « au brief, on nous fait la remarque « hier vous n’avez
pas étés bons » ».
•
Couverture du territoire : L’objet des équipes de contrôle réside notamment dans
« l’affirmation de la présence de la RATP sur l’ensemble des lignes et du territoire que nous
couvrons » (un chef d’équipe). Les agents sont donc amenés, à travers les fiches de
mission, à rayonner sur un territoire sur lequel les différentes zones présentent des
caractéristiques très différentes les unes des autres, maillant « des zones à forte
fréquentation, des zones à fort potentiel de fraude et des zones moins « rentables » » (un
agent).
•
Niveau de prestation : Les agents font état de nombreuses remarques concernant la
réalisation de contrôles dans des situations à leurs yeux dégradées, c’est-à-dire
« lorsqu’il y a dans une station, un événement qui donne une image négative de la RATP,
comme par exemple un escalier roulant en panne, des retards de trains, des stations sales,
… ». Dans ces conditions, les agents évoquent les difficultés auxquelles ils doivent
faire face, de « procéder à un contrôle des titres de transport, tout en s’exposant au
mécontentement des usagers » (un agent).
AVIS ET RECOMMANDATION SECAFI
L’articulation des trois champs Production, Couverture du territoire, Niveau de prestation
est un véritable « casse-tête » pour les agents qui sont amenés à doser les questions de
production et de couverture du territoire en intégrant des données mouvantes relatives
notamment au niveau de prestation proposée par l’entreprise.
Le contexte d’indices de production, tacites mais bien présents dans les esprits et dans les
paroles des uns ou des autres, même s’ils en sourient la plupart du temps, en laissant
entendre qu’ils sont avant tout sur le terrain et que c’est le terrain qui détermine les chiffres,
les agents ont bien en tête cette donnée. La pression exercée peut conduire selon les agents à
des situations d’exposition à des risques, souvent sur la dimension collective de la
prévention du risque d’agression. Par exemple lorsqu’un agent « se précipite sur des
contrevenants pour vite faire ses PV, sans forcément prendre garde à la situation globale et à ses
collègues … la fonction de binôme n’est alors plus assurée, le collectif est délité » (un responsable
30
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
d’équipe).
La question du niveau de prestation, évoquée fortement par les agents, revoie à celle de
l’évolution des conditions de contrôle et des attendus en matière de résultats. En effet, la
tension exprimée sur la nécessité de poursuivre une mission de contrôle, dès lors qu’il est
déploré un incident dans une station, dénote une véritable évolution des mentalités. Comme
le rapporte un agent, « avant on ne se trouvait jamais dans ce genre de situation, de contrôles dans
une station très sale ou avec un escalier roulant hors service. Maintenant, on ne nous dit plus de
quitter les lieux, on reste ». Cette notion est exprimée fortement par un autre agent sous la
forme de « On a banalisé l’incident d’exploitation », ce qui dénote un resserrement des
conditions de réalisation des contrôles, mais peut également être vécu par les agents comme
un manque de reconnaissance des difficultés rencontrées sur le terrain : « négliger le contexte
du travail au profit d’une production augmentée » (un responsable d’équipe). Cette dynamique
doit être surveillée, afin d’assurer notamment la prévention de l’exposition à des situations
conflictuelles, auxquelles les agents sont confrontés quotidiennement.
2.1.3.
Les pratiques et besoins plus spécifiques à SCC
L’objet des équipes SCC est le contrôle multimodal. Leurs missions sont organisées de
manière à permettre à une (ou deux) équipe(s) de contrôle de se rendre sur différents points
identifiés afin de procéder à des actions de contrôle dont les formes sont multiples et
fonction des modes de transport.
Des pratiques différentes de SEM
D’une manière générale, les pratiques de contrôle diffèrent de celles de leurs collègues de
SEM. En effet, là où ces derniers se rendent bien visibles, en général au niveau des tripodes
d’entrée dans les stations, afin de permettre aux contrevenants éventuels de les identifier et
de se munir d’un titre de transport, les agents SCC se dissimulent au regard des
contrevenants, en surveillant les franchissements de barrière afin d’interpeler et de
sanctionner le contrevenant.
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SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
La présence d’agents en civil
Les équipes de contrôle comportent systématiquement des agents en uniforme RATP, et sont
parfois complétées en général par un, voire deux agents en civil. Il existe également des
équipes entièrement en civil.
Agents de contrôle en uniforme, dissimulés
Flux de voyageurs
Agent de contrôle en civil,
au centre du flux
Exemple de mission de contrôle METRO à la station Bibliothèque François Mitterrand, niveau des tripodes d’entrée
Quel que soit le mode de transport contrôlé, les agents en civil peuvent intervenir dans le
déroulement du processus de contrôle. En effet, du fait de leurs pouvoirs relativement
réduits pour réaliser les contrôles, les agents ont accentué la partie impact psychologique de
l’acte de contrôle en lui conférant une certaine théâtralité, notamment à l’aide des agents en
civil, ces derniers étant des agents ayant les mêmes prérogatives que les autres. Habillés en
civil et portant un brassard orange « RATP Sécurité » il est estimé que cela leur confère un
ascendant psychologique sur le contrevenant, à l’image des inspecteurs que l’on retrouve
dans les séries télévisées ou les films. Ils se présentent comme un « recours » pour un agent
dont l’action de contrôle se complique. Lors des accompagnements, nous avons pu constater
de nombreuses fois une situation de contrôle qui commençait à se déliter (le contrevenant
refusant de présenter ses papiers, tentant de s’en aller,…). L’agent interpelle alors son
collègue en civil « monsieur s’il vous plait », l’agent en civil présente sa carte et intervient dans
la résolution du conflit.
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SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
Cette méthode de substitution « théâtralisée » est un trait important de la prévention du
risque d’agression pour les agents. En effet, s’il ne s’agit pas d’une réelle substitution (l’agent
en civil ne fait qu’amener le contrevenant à présenter ses papiers et, de par sa présence à
proximité, entretient une certaine forme de sérénité dans la relation entre les protagonistes
de la situation), cette méthode de jeux d’acteurs, vise à prévenir un grand nombre de
situations potentiellement explosive, mais également de procéder à de nombreux
encaissements.
Les équipes constituées d’agents uniquement en civil visent à pouvoir contrôler de manière
très discrète les modes de transport. Les agents approchent les clients de manière discrète,
présentant leur carte et échangeant à voix basse avec ces derniers. Les PV ou quittances sont
établis également de manière très discrète. Le savoir-faire des agents dans de telles situations
est important et les pratiques d’isolement du contrevenant également appliquées : extraire le
contrevenant d’une partie encombrée du mode de transport pour l’amener à un endroit
moins exposé, procéder à l’acte de verbalisation discrètement et poursuivre l’activité de
contrôle. Le responsable d’équipe ayant toujours la fonction de transversalité, avec la
contrainte supplémentaire de faire circuler le TPE de manière discrète entre les agents en
ayant besoin.
2.1.4.
Les pratiques et besoins plus spécifiques à SEM
Chez SEM, les équipes de contrôle présentent certaines spécificités :
Une composition d’équipe qui change régulièrement
Chez SEM, les équipes de contrôle sont appelées équipes « Maîtrise Du Territoire » (ou
MDT). Ce sont des équipes dédiées. Toutes les lignes n’en ont pas le même nombre à
disposition. Par exemple, au vu de sa taille et du nombre de stations à gérer (ligne
responsable de l’ensemble de ses stations), la ligne 4 a 5 équipes MDT à sa disposition mais
beaucoup de lignes n’en ont pas autant, voire pas du tout.
A cela s’ajoute la mise à disposition d’équipes dites « mobiles » dont la création est décidée le
jour-même avec l’éventuel surplus d’effectif à disposition.
33
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
Les agents des équipes MDT y restent pour une durée de 42 jours. Cela étant renouvelable.
Leur affectation est, contrairement aux équipes mobiles, basée sur le volontariat. Par ailleurs,
les chefs d’équipe nous ont été décrits comme relativement stables sur leur poste.
Des équipes n’effectuant pas exclusivement du contrôle
Les équipes MDT, contrairement au SCC, ne consacrent pas l’intégralité de leur service au
contrôle. L’autre part de leur activité concerne, comme l’intitulé des équipes l’indique, la
maîtrise du territoire. Cette activité recouvre en fait différentes tâches et principalement :
-
Compter les toxicomanes et « PSIE » (Personnes Séjournant Indûment dans les
Espaces) présents dans les stations et les noter sur une feuille de décompte
-
Voir si certains ont besoin d’aide, et demander à d’autres d’évacuer les lieux :
« On leur demande comment ça va, on voit si il faut appeler le SAMU social. Sinon, on
leur demande de bouger »
Au global, les équipes consacrent environ une moitié de leur temps au contrôle et l’autre
moitié à la maîtrise du territoire. D’ailleurs, les statistiques de la journée (nombre de
verbalisation par jour et par agent) sont doublées, pour les ramener à une journée de contrôle
entière.
L’encadrement : « C’est 50%contrôle-50% maîtrise du territoire »
AVIS SECAFI
De part une pratique moins fréquente que chez SCC, les agents SEM sont généralement
moins aguerris à l’activité de contrôle, même si ils sont amenés à la pratiquer
régulièrement. Ainsi ils seront aussi amenés à manipuler moins fréquemment l’ePV, ce
qui peut allonger la durée de la période d’apprentissage.
Illustration : Lors d’un accompagnement d’une équipe SEM dans les stations, nous avons constaté à
quel point les novices (ou les agents peu rompus à l’exercice du contrôle) avaient la nécessité de
disposer de plus de temps que les autres pour élaborer leur PV : relecture attentive, recherche des codes
infraction sur la feuille saumon…
Une approche du contrôle caractérisée par l’affichage de l’uniforme
Nos entretiens et observations chez SEM ont montré une conception spécifique du contrôle.
34
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
Cette conception se caractérise par l’affichage clair de l’uniforme, à la sortie des « tripodes ».
La stratégie que nous a été présentée et celle du filtrage en amont des contrevenants qui,
voyant la présence des contrôleurs vont rebrousser chemin pour acheter un titre de
transport : « On ne contrôle plus en civil » ; « On ne prend pas les gens au dépourvu, ils savent à
quoi ils s’exposent ».
De cette stratégie découle une activité de contrôle essentiellement basée sur la vérification de
Pass Navigo et de tickets de transport. En effet, les agents n’attendent pas la survenue d’un
fraudeur pour contrôler mais contrôle « dans le flux ».
35
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
2.2. Une nécessaire vigilance sur la gestion de la transition
et l’évolution des charges de travail dans les services de
traitement des ePV
2.2.1. Pôle
Recouvrement
de
CML :
un
projet
impactant
l’organisation du service et la gestion des reclassements
Le pôle Recouvrement est une des structures centrales de l’unité opérationnelle (SCC). Situé
dans les locaux de la rue Jules Vallès il a pour mission de procéder à la gestion de l’ensemble
des PVI élaborés dans le réseau, ainsi qu’à leur recouvrement. Le service accueille aussi bien
des titulaires, qu’un grand nombre de « CDD internes », soit des missions de 3 mois
renouvelables pour des agents issus des autres entités de la RATP. Les agents en missions
sont généralement des agents souhaitant passer un temps hors des métiers de contact
clientèle : restrictions temporaires, reclassement,…
Le pôle recouvrement a un effectif « d’environ 45 agents » et est composé des entités
suivantes :
Pôle
Effectif moyen (description par le
responsable du service)
Taxation
5 à 7 agents / jour
Logistique
1,5 agents / jour
Unité de recouvrement :
40 titulaires + des agents en
missions
•
Plateau téléphonique
•
Accueil face/face
L’organisation du service est dépendante des agents présents, et fonction des restrictions des
agents. En effet, nombre des agents en mission présentent des restrictions médicales
Priorité de staffing : l’accueil physique (maximum 3 agents). Un agent ne pouvant être seul,
un autre peut l’accompagner et réaliser une activité autre dans le box d’à côté (exemple :
taxation).
36
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
Synopsis de cheminement des PVI depuis leur arrivée au sein du Pôle recouvrement :
PVI
Pôle Taxation
Support recouvrement
Scan des PVI et saisie
Pôle Logistique
dans OASIS par un
prestataire
Plateau téléphonique
Accueil en face à face
Unité de
recouvrement
Les PVI en provenance des lignes et attachements sont livrés au pôle Taxation, dont les
agents procèdent au tri des PVI : déchirés, illisibles,… Les PVI utilisables sont transmis au
pôle logistique qui procède à leur expédition vers le prestataire en réalisant la saisie dans la
base de données OASIS. C’est également le pôle logistique qui réceptionne les PVI au retour
de chez le prestataire et qui procède à la gestion de leur archivage.
Une fois dans la base de données les PVI peuvent être traités par l’unité de recouvrement :
•
Soit les contrevenants se présentent au service recouvrement et leurs cas sont traités
en face à face au pôle accueil,
•
Soit les contrevenants joignent le service recouvrement par téléphone (appels
entrants) et ce sont les agents du plateau téléphonique qui réceptionnent les appels.
Les agents du plateau téléphoniques ont également pour mission de relancer les
contrevenants pour assurer le paiement des PVI (appels sortants).
37
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
Problématiques des différents pôles :
•
Pôle taxation :
Une activité très manuelle et répétitive de tri des PVI en fonction de leur validité juridique.
Selon le responsable du service, « une activité requérant rigueur et attention ». Traitement
d’environ 700 PVI en moyenne par jour.
Un effectif majoritairement constitué d’agents présentant des inaptitudes « Les restrictions
contact clientèle ne peuvent aller qu’à la taxation ».
Des critères de validité des PVI très « agent dépendants ». En dehors des grands référentiels
très macros proposés aux agents, et des formations « très synthétiques », les agents ont une
grande latitude pour décider si un PVI est valide ou non. Les critères de lisibilité sont
notamment les plus variables en fonction des agents.
•
Pôle logistique
Activité de gestion des PV papiers : expédition vers le prestataire, réception des retours,
archivage. « En moyenne 3000 à 7000 PV partent chaque jour chez le prestataire ».
Les agents de ce pôle ont une formation particulière, sont peu nombreux et le poste ne les
occupe pas à la journée. L’organisation du fonctionnement du pôle est à leur main. Il doivent
faire face à une contrainte temporelle forte dans l’activité : « faire la mallette (de PVI) le matin
pour le coursier ».
•
Plateau téléphonique :
Gestion de deux types d’appels :
Appels entrants
Appels sortants
Objets principaux : Réclamations, paiements les agents contactent les contrevenants pour
par téléphone,…
assurer le recouvrement des PVI, rappel à 60
jours
« des appels en réaction, plus difficiles à traiter,
… nombreuses créations d’anticipés »
formation nécessaire :
Formation nécessaire :
5 jours + accompagnement tutorat
1 jour + accompagnement tutorat.
« Moins d’expertise mise en œuvre car l’agent
connait le dossier avant d’avoir le contrevenant
au téléphone ».
De plus nombreux appels entrant depuis la Un gros stock de dossiers en appels sortants
mise en place des SMS adressés aux à traiter : « En permanence 8000 dossiers, et on
contrevenants.
a environ 10 jours glissants pour les traiter ».
La formation de téléacteur se réalise par étages : 5 jours + quelques mois de pratique avant
d’être titularisé. Un taux d’échec de 50% sur les agents formés, de nombreux agents décident
de retourner à leur affectation d’origine à l’issue de la formation.
38
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
Principaux logiciels utilisés : OASIS (base de données), e-Protal (système de paiement en
ligne)
« Une activité en plein boum, notamment du fait de l’accent qui est mis sur les appels sortants » (un
responsable d’équipe).
Un absentéisme important et un fonctionnement dégradé : De fortes contrainte pour
composer les équipes, du fait des nombreuses restrictions et de l’absentéisme … « je ne sais
que le matin même combien d’agents seront disponibles pour cette activité ». De nombreux échecs
suite à la formation « un taux d’échec d’environ 50 % ».
Illustration de l’absentéisme, issue des observations de travail :
Le jour de notre venue, Présence de 10 titulaires, 6 missions et absence de 8 agents. 7 agents
étaient également en vacances (staff réduit).
Une problématique forte sur le traitement des appels entrant : les « anticipés »
Le système tel qu’il fonctionne actuellement, fait qu’un PVI, lorsqu’il est élaboré par un agent
de ligne mettra « entre 8 et 10 jours » pour être saisi dans la base de donnée, c’est-à-dire pour
que le prestataire l’implémente dans OASIS (cf. synopsis ci-dessus). Or il s’avère que
« aujourd’hui, près de 30% des PVI, s’ils doivent être réglés, le sont en moins de 7 jours ». Les agents
sont donc très régulièrement obligés de créer des PVI temporaires dans la base de données,
en échangeant avec le contrevenant par téléphone (identification du numéro du PV, champs
importants, montants de l’amende,…), PVI temporaires qui seront par la suite reconnectés au
PVI réel lors de sa saisie par le prestataire.
Illustration issue des observations de travail :
Lors de nos observations, nous avons passé un temps avec un téléacteur qui a été amené à
gérer plusieurs appels entrants.
D’une manière générale, le contexte dans lequel les contrevenants effectuent leurs appels
impacte fortement la qualité des échanges : Des enfants crient derrière la personne au
téléphone, le contrevenant parle très mal le français, … un contrevenant disposant non pas
de l’original du PVI, mais d’une copie carbone bleu mal imprimée, …
Nous avons assisté à la création d’un « anticipé », ce qui nous a permis de mesurer à quel
point la récupération des informations présentes sur le PVI (notamment le numéro de 3
lettres et 3 chiffres) est difficile lorsque la relation entre l’agent et le contrevenant est
médiatisée (téléphone).
L’agent nous rapporte de plus sa perception d’une évolution clientèle : depuis 4 ou 5 ans, les
clients appellent de n’importe où : d’un café, d’une gare, d’un bus, du lieu de travail, des
enfants bruyants,… avant, ils appelaient depuis chez eux, au calme »
39
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
•
Accueil physique
Avec le développement du paiement Internet (et les avantages qu’il représente : réduction de
20 Euros, déplacement évité,…), « l’accueil physique a fortement diminué ces dernières années,
divisé par 2 depuis 3 ans » (responsable du pôle).
Malgré tout, l’accueil physique reste le poste pourvu en priorité dès le matin, en fonction de
l’effectif présent. Une formation importante est nécessaire : 5 jours + quelques mois. Cette
activité requière « de la technique, mais également des compétences en gestion de la
relation ». Le tutorat y est important. Le poste d’accueil-orientation est partagé avec le Trésor
Public, les box d’accueils RATP sont situés à l’étage au-dessus de la salle d’attente.
AVIS ET PRECONISATION SECAFI
Au sein du service recouvrement, les attentes autour de l’ePV sont contrastées. En effet, si
certains y voient un véritable levier d’amélioration de leurs conditions de travail, comme la
disparition des « Anticipés » par exemple, d’autres y voient la disparition pure et simple de
leur activité de travail (taxation), et ne se projettent que difficilement dans la future
organisation du service. De plus, les agents que nous avons rencontrés, en juillet 2015, s’ils
ont connaissance des grandes lignes du projet n’en avaient pas une vision très précise, même
s’ils ont malgré tout conscience que le projet serait prochainement mis en œuvre.
•
Des changements dans l’organisation du service :
Les impacts de la mise en place du ePV sur le service en matière d’emploi seraient la
suppression de 7 postes, dont 2 MD : pour les activités de logistique et taxation, 2 postes par
jour occupés par des titulaires devraient disparaitre.
Mais ces changements impacteront surtout la capacité du service pour accueillir des agents
temporaires présentant des restrictions au contact clients, alors qu’il est fait état d’ « environ
1000 agents temporaires dans l’entreprise ».
Cet impact sur les capacités de reclassement en interne dans l’entreprise nécessite d’être
pris en compte. De plus, de nombreux agents présentant des inaptitudes et présents
actuellement dans le service ne pourront aller sur le plateau téléphonique et s’interrogent
sur ce que l’entreprise prévoit de leur proposer.
•
Des changements dans le travail :
Une réduction drastique des « anticipés » : Avec l’ePV, selon toute logique, les PVI seront
saisis sur le terminal et très rapidement transmis automatiquement dans la base de données
OASIS. Pour les agents du pôle recouvrement positionnés sur les postes de téléphone
entrant, cela impliquera a priori une diminution forte des créations d’« anticipés ».
40
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
Les agents n’auront plus à « créer » le PV dans la base de données si le contrevenant
téléphone rapidement, dans la semaine suivant la verbalisation.
Ce constat pourrait participer à d’une amélioration des conditions de travail des agents sur le
plateau, vu les difficultés rencontrées par ces derniers pour créer les PVI dans la base OASIS.
Evolution de la charge de travail : La disparition des RI50, envisagée comme un réel progrès
par tous, ne va-t-elle pas générer, à effectif constant, une surcharge de travail pour les agents
du pôle recouvrement ? En effet, le « filtre » actuellement réalisé par le service taxation fait
sortir nombre de PVI du le circuit de recouvrement. A l’avenir, ce volume de PVI ne seront
plus invalidés et entreront dans le système. Cela augmentera donc la charge de traitement
des PV pour l’effectif actuel du service, en intégrant que les agents du pôle taxation ne seront
pas tous à même d’être redéployés sur le plateau téléphonique.
Evaluation de la charge de travail durant la période de déploiement : durant la première
phase de Pilote, le service sera amené à organiser des postes spéciaux pour intégrer les
quelques (100 ? 200 ?) PVI élaborés à l’aide du ePV, qui ne sera probablement pas connecté. Il
conviendra de prévoir bien en amont la charge de travail que représentera cette nouvelle
activité dans un service fonctionnant déjà en mode dégradé. La montée en compétence des
agents sera également à surveiller de près, notamment du fait du turn-over important dans
ce service. Des postes de travail intégrant les contraintes liées à l’activité de traitement des
ePV devront être mis en place.
Evaluation de la charge de travail durant la période de coexistence des deux circuits : il
conviendra également de ne pas négliger le circuit hors numérique (actuel), qui nécessite des
ressources sur les pôles taxation et logistique (traitée en interne ou en externe).
Actuellement, certaines tâches de l’activité logistique sont réalisées par un prestataire
externe : scan des PVI, saisie manuelle des informations dans OASIS. On peut s’interroger
sur la réalisation de ces activités à l’avenir et notamment :
-
Pendant la phase de déploiement des ePV, la baisse des PVI papiers sera forte mais
devrait durer « au moins un an et demi »,
-
A l’issue de la période de déploiement, lorsque seulement quelques entités
continueront à utiliser les carnets à souches (KHEOPS,…) ?
De plus, il semble nécessaire de mettre en place un système de maintien des compétences sur
des tâches appelées à ne plus être réalisées qu’en très petite quantité, afin de garantir à
l’entité le maintien d’une bonne qualité de service.
Afin de faciliter la tâche des téléacteurs appelés à émettre de plus en plus d’appels sortants, il
serait important, dans le cadre de la mise en place du projet ePV, de donner la possibilité aux
téléacteurs de disposer d’une reproduction exacte (image) du PVI dont disposera le
41
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
contrevenant. Ceci afin de faciliter les échanges au téléphone entre les deux protagonistes,
notamment pour permettre l’identification rapide d’informations nécessaires au traitement
du dossier par l’agent.
•
Conditions de travail dans le service :
Postes du plateau téléphonique : Si le matériel mis à disposition des agents est un matériel
standard utilisé sur nombre de plateaux téléphoniques, la mise à disposition de doubles
écrans constitue un vrai plus pour réaliser une activité où les agents sont amenés à consulter
plusieurs logiciels en même temps. En revanche, lors des observations, nous avons mesuré à
quel point l’ambiance sonore peut rapidement devenir perturbante tant les postes sont
rapprochés. Certains dispositifs de réduction des bruits ambiants pourraient être mis en
place, suite à une étude fine de cette problématique, notamment dans une perspective de
développement de l’activité.
Les aménagements de postes du pôle taxation, qui accueillent des agents souvent reclassés
et qui peuvent avoir des problèmes de santé, ne présentent pas l’aspect qualitatif et
professionnel que l’on pourrait en attendre. Il s’agit de tables recyclées. La plupart des
éléments mis à disposition des agents semblent être récupérés de divers origines (sièges,
armoires,…), ce qui ne participe pas à créer un climat propice à la bonne réalisation d’une
activité nécessitant « concentration et rigueur ». Une grande frustration est également générée
par la comparaison inévitable avec les postes du plateau téléphonique. Dans l’éventualité
d’un maintien d’une partie de l’activité de ce pôle, il conviendrait de procéder à des
améliorations des postes de travail, notamment des sièges, certains agents présentant des
douleurs dorsales qui pourraient se trouver accentuées.
Concernant le poste d’accueil des contrevenants, il semble que les préconisations proposées
dans une précédente expertise (Conditions de Travail et prévention des risques
professionnels dans l’entité « pôle Recouvrement », réalisée en décembre 2013), n’ont pas
encore pu être mises en œuvre à ce jour. Des interrogations subsistent notamment sur
l’adaptation du plan de travail sur lequel est positionné le poste de saisie informatique
relativement à l’hygiaphone et à la place disponible pour utiliser le clavier.
Ergonomie des logiciels : nous avons pu constater à quel point les différentes applications
utilisées par les agents présentent des interfaces différentes. Les agents sont amenés très
souvent à réaliser des copier/coller d’informations (numéro de dossier, nom,…) d’une
application vers une autre. Par exemple la mise en place d’un échéancier de paiement, « un
appel sur deux » (un téléacteur), nécessite un grand nombre de copier/coller.
Dans une perspective de développement de l’activité de téléacteurs, et de l’intégration de
nombre de nouveaux agents sur ces postes, un effort d’harmonisation des interfaces pourrait
être mené (TPE, OASIS, SIG, Base phrases type,…).
42
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
2.2.2.
Des services Comptabilité quittances et Contrôle des ventes
de SEM : la question charge de travail au cœur du déploiement de
projet
Chez CML, le service comptabilité quittance est chargé du traitement des quittances émises
par les agents de contrôle. Chez SEM, le service contrôle des ventes assure (entre autre) la
même mission mais pour les BIF. Ce tableau explicite les différences entre ces deux supports
de paiement.
Quittance
BIF
-
Chez CML
-
Chez SEM
-
La quittance est un support
permettant l’extinction du PV par
un paiement immédiat
-
Permet également l’extinction du PV
-
Le paiement est effectué par l’agent
de contrôle avec son empoche qui
achète des blocs de carnets aux
différents tarifs et les utilise au fil
de son activité
-
L’argent récolté avec les BIF est versé
tous les jours par la personne
chargée de distribuer ces derniers
lors de l’activité de contrôle
(souvent le chef d’équipe MDT ou
mobile)
-
Le
paiement
des
différentes
quittances est injecté « au fil de
l’eau », quittance par quittance
-
L’argent récolté avec les quittances
passe par un flux direct pour les
paiements en CB, et par un
versement
par
les
agents
individuellement tous les 15 jours
pour les chèques et espèces
Nos observations et entretiens avec les agents de ces deux services ont mis en exergue deux
types d’activité bien différents. Nous détaillerons ces spécificités avant d’évoquer l’impact
du projet ePV sur l’organisation de ces fonctions supports.
L’activité au service comptabilité quittance : un traitement fouillé et détaillé des données
•
Les effectifs du service : le service est composé en principe de 3 titulaires et 4 à 5
agents en renfort. Or au moment de notre intervention, 1 poste de titulaire était
vacant et un autre agent titulaire en arrêt longue durée et 3 anciens contrôleurs
étaient en renfort.
•
Une activité exigeante de recroisement de données
Les agents doivent saisir les recettes, en recroisant les montants et les rapports d’activité
pour que tout coïncide. Ils gèrent les recettes d’environ 1200 agents, qui versent par
quinzaine. C’est un processus complexe qui demande une rigueur importante dans le
croisement de sources de données multiples :
43
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
Ouverture des enveloppes administratives et tri par ordre alphabétique en fonction des agents
Côté
agent :
Souches
et
relevé détaillé des quittances,
Papier émis par la
fiche d’activité, relevé CB,
Banque
chèques et espèces (si il y en
a), bordereaux de versement
et rapport d’incident (si il y
Contrôle
de
conformité
grâce au recoupement des
données
Données Copelia
en a)
Saisie des données dans un logiciel spécialement créé pour le service : matricule agent,
date de versement, nombre de quittances (numéro commençant et finissant), montant
espèce, remplissage volet anomalie si besoin…
Vérification du montant général à l’aide de l’état comptable général sur le site de la banque
pour identifier d’éventuelles anomalies sur les montants globaux
Un
recroisement
de
données
« micros » abondantes et complexes
44
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
Les agents interrogés témoignent alors d’une charge mentale très élevée, nécessitant une
connaissance assez fine de l’activité des contrôleurs afin d’entrer dans le détail quittance par
quittance.
•
Un important retard accumulé
Nous avons pu constater lors de nos investigations que le service a à gérer un retard
important car était traitées au moment de notre venue (le 9 juillet) la deuxième quinzaine de
mai. Ce retard est lié au cumul d’un manque d’agents et d’un volume d’activité très
important :
-
La configuration des effectifs : avec un titulaire en activité sur 3 postes, et des effectifs
en renfort qui ne sont là que temporairement et qu’il faut donc reformer à chaque fois
Une titulaire : « En 7 ans j’ai eu à former 24 personnes ! »
-
1200 agents dans le périmètre du service, qui versent toutes les quinzaines d’où plus
de 2000 relevés à analyser par mois (en comptant les absences)
L’activité du contrôle des ventes SEM : une vision globale et un traitement des BIF qui
représente une faible part de l’activité
•
Effectifs du service : les effectifs du contrôle des ventes sont organisés de la manière
suivante (on nous a précisé que sur cet organigramme, les noms des agents ne sont
pas toujours à jour)
Cela correspond à environ 65 agents. Notons que pour donner un ordre de grandeur par
rapport au service comptabilité quittance, le traitement des BIF ne concerne ici qu’environ
300 agents.
45
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
•
Une activité dont le traitement des BIF ne compose qu’une petite partie : Le rôle du
service de contrôle des ventes SEM est de certifier les ventes du réseau, c’est-à-dire les
BIF mais pas seulement. D’ailleurs, l’activité principale du service est le traitement
des titres en retour. Les agents adoptent un point de vue global sur l’activité, qui
s’illustre par :
- Des sources de données multiples et couvrant un périmètre large :
IXXI
(traitement
anomalies
complexes)
Contrôle
CSA BIF
Contrôle de
ligne BIF
CDV
SEM
Service
clientèle
SAV titre
de
transport
Agence Co
/ Point info
ADUP
(anomalies)
-
Un référencement des BIF dans leur volume global, et non pas BIF par BIF :
Actuellement, les agents de contrôle font un versement au cours de l’achat des carnets de
BIF, puis l’activité est suivie par système de gestion de stock. Les agents du CDV SEM
reçoivent alors par service et par équipe, une fiche d’activité, et saisissent les éléments de
cette fiche dans le logiciel SEVO. Une seule session est créée par fiche de ce type :
Saisie dans SEVO du volume de BIF
des différentes catégories au global,
pas BIF par BIF
Rapprochement entre données CB
dans SEVO et données des relevés TPE
(heure, montant)
46
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
Les observations et les agents du service témoignent d’un temps de traitement d’environ 10 à
20 minutes par feuille (donc par session) en fonction du taux d’anomalies. La tâche est
également facilitée par le fait que les chefs d’équipes centralisent l’ensemble des relevés TPE
en faisant un bilan global.
Notons que la fréquence des anomalies a été décrite comme relativement élevée, avec un
exemple montré de 71 anomalies en une journée. Un nombre de 30 par jour a été cité comme
relativement habituel.
•
Un important retard accumulé :
Les agents nous ont indiqué traiter des données de mars lors de notre passage en juillet. Un
retard de 217 jours a été évoqué sur une ligne.
Les personnes rencontrées en entretiens ou lors des observations ont évoqué un contexte de
fortes tensions avec l’encadrement, en précisant que le service venait de sortir. Ce contexte
ayant entraîné un absentéisme élevé et une désorganisation du travail, il est en grande partie
responsable selon eux du retard constaté lors de notre passage.
Le projet ePV : les principaux impacts :
•
L’uniformisation des deux entités vers un système d’ « e-quittance ». Ainsi, à terme,
ePV sera connecté directement à SEVO et le contenu de l’activité des agents de
contrôle sera saisi automatiquement dans le logiciel. Le temps de saisie manuel des
agents (Cf.:supra) sera donc supprimé. Les documents papiers seront uniquement
utilisés lors de la recherche d’anomalies afin de conserver une trace physique.
Durant le début du déploiement, ePV ne sera pas tout de suite raccordé à SEVO. Les agents
auront alors seulement à cette étape un ticket ePV et le BIF annulé comme support à la place
des BIF actuels.
Par ailleurs, le système concret de collecte des recettes au sein des équipes de contrôles
(par qui ? Jusqu’où les agents de contrôles font-ils des bilans ou pas ?), restait à
déterminer au moment de notre intervention.
47
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
•
Le rassemblement de l’activité des deux services au sein du contrôle des ventes : il
est prévu de transférer deux postes de titulaires du service comptabilité quittance
vers le contrôle des ventes. Ce dernier ne traitera alors plus de BIF mais des equittances. Cela aura pour principale conséquence une multiplication des sessions à
ouvrir car le besoin sera alors d’une session par agent et par service plutôt qu’une
session par équipe et par service.
•
Des groupes de travail doivent s’ouvrir en septembre
AVIS ET RECOMMANDATION SECAFI
Pour les services Comptabilité quittances et Contrôle des ventes, au vu de ces constats, le
point de vigilance que nous pouvons identifier concerne la question de la charge de travail.
En effet, le gain de charge lié au transfert informatique de données d’ePV à SEVO reste à
nuancer et ce pour deux principales raisons :
-
Il sera nécessaire pour les agents du contrôle des ventes d’ouvrir un nombre bien
plus élevé de sessions avec les e-quittances qu’avec le système de BIF actuel.
-
Nos observations ont montré que le temps de saisie n’était pas du temps perdu dans
le sens où il permet à l’agent d’accéder avec transparence aux données d’activité. Ce
dernier peut alors détecter de manière anticipée les anomalies, ou a minima, recueillir
toutes les données utiles pour en trouver la cause a posteriori. Le ePV va alors rendre
opaque le détail des données d’activité (boîte noire), ce qui va augmenter de manière
significative le temps consacré à la gestion des anomalies. Par ailleurs, les agents ne
seront plus en mesure de les anticiper avant que le système le leur signale.
Le retard pris dans les deux services vient encore accentuer ce point de vigilance
concernant la charge, mais aussi interroger la pertinence de transférer uniquement
2 postes de la comptabilité quittance au contrôle des ventes.
A notre sens, l’encadrement devra rester vigilant sur le niveau de charge du service lors du
déploiement et avoir la latitude de constater une insuffisance en la matière. Des moyens
humains devront alors être donnés pour assurer la fluidité de l’activité et la tenue de délais
de traitement satisfaisants.
Les besoins en formation des agents SEM (a priori aucune personne physique rencontrée à
la comptabilité quittance n’est concernée par ce transfert) doivent également être précisés
48
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
2.3. Les attentes exprimées sur ePV par les agents
rencontrés
2.3.1.
La posture des agents rencontrés face au projet : entre
attente et indifférence
En introduction, nous précisons que les agents rencontrés ont manifesté soit de l’indifférence
face au projet (« Cela ne va pas changer grand-chose… »), soit de l’attente.
Cette posture d’attente est liée à différents points :
-
La diminution du nombre d’agrès à porter : il s’agit là de la préoccupation la plus
exprimée. Il existe une forte attente sur ce point et un grand regret sur le fait qu’il sera
encore nécessaire de prendre le TPE.
-
Une modernisation de l’équipement, qui valoriserait la profession de contrôleur et
fera gagner du « sérieux » face au contrevenant : « On est encore avec nos blocs
papier…Ça fait un peu ringard » ; « Pour l’affichage, on va gagner à se montrer avec un
équipement électronique, ça fait plus sérieux… ».
-
Un certain retard par rapport à d’autres entreprises : « Eux ils l’ont déjà depuis un
moment » ; « Il est temps qu’on s’y mette, on est dans les derniers » ; « Il faut vivre avec son
temps d’autres le font déjà ! »
2.3.2.
Des attentes liées à l’adéquation entre l’équipement et les
contraintes de l’activité de contrôle
Lors des entretiens, les agents ont manifesté de nombreuses attentes à ce sujet. Nous
distinguerons dans notre développement celles liées au matériel lui-même, et celles liés à
l’interface informatique.
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SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
Les exigences liées au matériel : « Solide et pratique »
Concernant le matériel à proprement parlé, les préoccupations des agents concernant
différents points :
•
La solidité du matériel :
Cette notion de solidité recouvre deux idées : résistance au choc (« On a une activité de
terrain » ; « On est dans la foule, sur le terrain, il nous faut du matériel solide ») et étanchéité
(« Quand on est amenés à contrôler sous la pluie, il ne faut pas que ça fasse tout planter »)
•
La tenue de la charge :
L’autonomie de l’ePV a été un point soulevé de manière très récurrente par nos
interlocuteurs. Derrière cela, il y a la crainte d’une panne en cours de service qui entraînerait
pour l’agent l’impossibilité de verbaliser : « Il faut que la batterie tienne largement le temps d’un
service, et ait bien le temps de se recharger avant le service suivant ! » ; « Un carnet ne tombe pas en
panne de batterie »
•
•
Des accessoires adaptés : Les accessoires cités par les agents sont :
•
Une sacoche solide et qui garde le matériel accessible
•
Un nombre suffisant de rouleaux pour la durée du service
Un rétroéclairage bien réglé :
La qualité du rétroéclairage a également été évoquée comme un progrès, notamment dans le
cadre de verbalisation en station mal éclairée. Néanmoins, une crainte est également
exprimée sur la visibilité de l’écran en plein soleil (« Si c’est comme les téléphones aujourd’hui,
parfois on ne voit plus rien quand on est en plein soleil et pour notre travail ce serait très embêtant »)
•
Des craintes de vol à aborder avec les agents :
Très fréquemment lors des entretiens, la question du vol du matériel ePV a été abordée. Les
craintes portaient d’une part sur l’impossibilité de poursuivre l’activité de contrôle (tout
comme le cas de panne de batterie), et d’autre part sur les conséquences pour l’agent luimême (responsabilité notamment) : « C’est un appareil plus moderne, le voler est plus tentant » ;
« Si on nous l’arrache, comment fait-on ? »
AVIS ET RECOMMANDATION SECAFI
Le projet devra alors éclaircir ces points et être en mesure d’apporter une solution d’urgence
pour que l’agent concerné par un vol/ une détérioration puisse poursuivre son service.
50
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
Concernant l’interface informatique : « fluide, intuitif, aidant »
L’idée soulevée en entretiens avec les agents de contrôle était la suivante : « Il faut que ce soit
aussi pratique pour nous que le papier, voire plus si possible ». Pour ce faire, les conditions posées
étaient les suivantes :
•
Un équipement qui ne doit pas jouer sur la durée des échanges :
La gestion de la durée des échanges est une compétence à part entière du contrôleur et un
outil pour réguler les tensions avec le contrevenant (Cf.: 2.1.1). En lien avec cela, les agents
ont exprimé le souhait d’une interface fluide et réactive c’est-à-dire que la saisie se fasse
rapidement, sans que le système ralentisse et qu’une aide à la saisie vienne accélérer le temps
passé par l’agent à se concentrer sur la frappe du PV : « Quand on a quelqu’un de pressé en face
de nous, ou que la tension commence à monter il ne faut pas qu’on soit à la merci d’un logiciel qui
rame ! »
•
L’idée appréciée des champs pré-remplis :
A l’heure actuelle,, certains agents pré-remplissent leurs matricule sur les PV pour gagner du
temps lors du contrôle. L’idée que l’ePV puisse pré-remplir l’heure, la date ou encore le
matricule est perçue très positivement, dans le sens où cela viendra diminuer la durée des
échanges avec le contrevenant : « On va gagner du temps » ; « Ça fait toujours du temps en moins
pendant lequel on retient les gens »
•
Le souhait d’un outil qui soulagerait la charge mentale du remplissage du PV :
A de nombreuses reprises, les agents ont précisés que si l’outil leur signalait les champs
manquants dans le PV, sans bloquer pour autant la validation de ce dernier, ce serait une
aide importante : « Parfois, on est concentré sur autre chose et on ne voit pas qu’un champ
manque » ; « Il faudrait que l’outil nous signale quand un champ manque au moins, si il n’est pas
rempli ce ne sera pas par oubli »
•
La suppression des RI 50 :
La suppression des PV illisibles grâce à l’informatique est là aussi perçu comme un vrai
progrès : « On aura plus à craindre que nos PV soit illisibles » ; « Ça fait toujours un souci en
moins… »
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SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
Des attentes fortes sur le niveau de formation
La qualité de la formation a été présentée par bon nombre de nos interlocuteurs comme une
condition essentielle à la réussite du projet. Cette qualité est définie de la manière suivante :
-
Une durée de formation théorique suffisante : « Il ne faut pas que cela soit bouclé en une
heure ou deux, il faut avoir le temps de bien voir toutes les possibilités » ; « Il faut nous
présenter l’outil suffisamment longtemps pour qu’on se familiarise »
-
Une formation qui ne doit pas s’arrêter au théorique : « On ne doit pas nous former
déconnecter du terrain » ; « Il faut que l’on ait moyen de passer par une phase de formation
pratique » ; « On ne doit pas passer de la salle de formation au contrôle en réel, il faudrait par
exemple qu’on ait pendant quelques temps papier et ePV et en fonction du contrevenant, on
s’entraine tranquillement avec le ePV…. »
AVIS ET RECOMMANDATION SECAFI
Lors de nos investigations, nous avons pu observer un agent débutant dans la verbalisation.
Bien que ses hésitations auraient pu avoir des répercussions sur la relation au contrevenant
(demande deux fois de la même information, temps de « blancs » pendant lesquels le
contrevenant manifestait son impatience…), l’aide d’un agent plus expérimenté venait
compenser cela.
Avec l’ePV, dans un premier temps, l’ensemble du personnel sera apprenant. Nous alertons
alors sur le fait que cela peut entrainer des situations tendues sur le terrain. Une formation
progressive des agents avec un mixage au sein des équipes des agents familiarisés avec ePV
et d’autres pas pourrait être envisagée.
De plus, la formation doit être adaptable en fonction du profil des agents. Ainsi, une
personne déjà habituée à manipuler un smartphone n’aura pas les mêmes besoins que
quelqu’un qui n’a pas de téléphone portable. La durée de l’apprentissage ou encore les
questions posées ne seront pas les mêmes…
Enfin, une attention particulière doit à notre sens être portée aux équipes mobiles qui sont
déjà peu familiarisées avec la pratique même du contrôle.
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SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
Des attentes sur une simplification dans l’exercice de l’activité de travail
L’informatisation du processus de verbalisation génère des attentes en matière de
simplification du travail, pour permettre aux agents de se détacher d’activités périphériques
et se recentrer sur leur cœur de métier. Par exemple, la saisie et le traitement immédiat des
données « devrait logiquement nous permettre de simplifier l’administratif, notamment la feuille de
mission, et nous permettre d’être plus disponible pour les agents lors des contrôles » (un OCQ)
Illustration issue des observations de travail :
Lors d’une mission de contrôle en sortie de bus, statique, mais pas à un terminus, nous
avons pu constater que les contraintes temporelles de réalisation du contrôle de l’ensemble
des voyageurs, imposées par les horaires à respecter par le bus (arrêt d’une durée de
5 minutes maximum), permettent au responsable d’équipe de n’être disponible que peu de
temps pour réaliser son activité de supervision du contrôle, du fait notamment de la
nécessité de remplissage de la feuille de mission (numéro de voiture, horaires,…).
De même, des attentes sont exprimées sur le post-traitement des informations, notamment
en fin de mission pour élaborer le bilan.
AVIS ET RECOMMANDATION SECAFI
Le système mis en place devrait permettre de simplifier la partie administrative de l’activité,
notamment le bilan de fin de mission, mais également les activités périphériques durant la
réalisation de la mission.
53
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
3. Les apports et contraintes
du futur système ePV
identifiés à ce jour
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SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
3.1. Regard sur l’ergonomie d’un nouvel outil informatique
3.1.1. Rappel
ergonomique
sur
la
conception
d’un
outil
informatique
Les deux champs de conception à instruire dans le cadre du développement d’un nouvel
outil utilisant l’informatique sont les suivants :
Conception / choix
du matériel
Conception des
logiciels
Alors que le traitement des informations est réalisé par le logiciel et peut s’apparenter à la
partie « activité mentale » de l’utilisateur, l'interface est le seul canal de communication entre
ce dernier et le produit informatique qu'il utilise.
Cette interface doit donc être conçue de façon à rendre concrets et évidents des traitements
informatiques qui sont par essence abstraits. De plus, l'interaction entre l'utilisateur et
l'interface est nécessairement physique : elle passe par la vision, l'audition, le toucher, la
motricité. On s'intéresse donc aussi à l'ergonomie des dispositifs d'entrée (clavier physique
ou virtuel, souris, trackball, joystick, voix, gestes…) et de sortie, d'affichage des données
(écrans, imprimantes…).
Fort de ces préceptes, il est nécessaire que les choix et la conception soient adaptés aux
caractéristiques des utilisateurs, mais également aux tâches qui seront réalisées à l’aide du
dispositif.
C’est dans cette optique que nous proposons d’analyser le dispositif choisi dans le cadre de
la mise en place du ePV.
Au regard de la documentation remise, il semble que l’argument « ergonomie de l’outil »
prenne un sens plus de l’ordre de l’argument marketing que le sens propre du mot, décrit cidessus.
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SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
Il
n’est
pas
fait
référence à l’activité
de travail des agents
de contrôle dans le
descriptif
du
matériel.
Extrait du document « Terminal ePV - Description du matériel - Version 3 - Mis à jour le 04 Décembre 2014 »
3.1.2. Le choix d’un terminal de télépaiement apporte avantages et
contraintes
Le matériel retenu (INGENICO iWL 280) est un terminal de paiement à écran tactile (3"5) et
clavier numérique 16 touches pour la rédaction des PV et quittances. Il intègre un ensemble
complet de solutions de paiement, avec de multiples options de connectivité sans fil (GPRS,
3G, Bluetooth) et la lecture de toute la télébillettique. Les possibilités de connexion 3G, de
paiement bancaire ou de GPS… ne sont pas activées pour l’instant.
Il s’agir d’un outil léger (306g), plus léger que LDPC, et de petite taille (150*78*44mm) qui
« tient dans la main d’une femme ». Il comporte une impression thermique intégrée, pour
l’impression directe de PV et quittances avec une capacité évaluée en moyenne à
25 quittances (avec double agent pour versement) et 20 PV (sans double).
Par ailleurs, le remplissage des champs de formulaires (PV et quittances) va être « assisté »
par ordinateur à plusieurs niveaux :
•
le remplissage automatique de champs obligatoires (lieu, mode, date,
identification agent…) une fois ces informations renseignée en début de mission
•
la saisie alphanumérique supprimant les informations illisibles
•
la vérification de certaines informations saisies (existence de l’adresse dans les
communes d’Ile-de-France, types et tarifs d’infraction)
•
la vérification des champs non remplis par oubli
•
la dématérialisation supprimant les problèmes de papier déchiré…
56
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
Concernant la conception du matériel, nous ne pouvons avoir qu’un regard très distancié.
Le matériel retenu est un matériel standard « adapté à l’activité de contrôle » selon le
fournisseur. Les qualités « ergonomiques » de l’appareil sont ainsi valorisées dans le
document de description du matériel, élaboré par le fournisseur :
Extrait du document « Terminal ePV - Description du matériel - Version 3 - Mis à jour le 04 Décembre 2014 »
•
Mais un outil pour quel usage ?
Des questions subsistent relativement à l’usage qui pourra être fait de ce terminal par les
agents de contrôle. En effet, nous avons par exemple noté que dans leur activité de
verbalisation, les agents ont développé un geste métier garantissant la bonne réalisation du
contrôle, en protégeant la pièce d’identité du contrevenant lorsqu’ils remplissent le
formulaire de PV, tel que prescrit dans les guides de référence métier :
57
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
Extrait du document
« mig080627_guide_pour_un_controle_fiable »
Illustration du geste métier
Nous pouvons rapporter quelques éléments issus de l’analyse bibliographique qui nous a été
fournie sur le futur terminal :
Une très grande partie du terminal sera
occupée par l’écran tactile, sur lequel il ne
sera pas possible d’appuyer une pièce
d’identité.
La
partie
constituée
par
le
clavier
numérique, soit environ un tiers de la
surface de l’appareil pourra éventuellement
être disponible et servir d’appui.
Exemple de prise en main du matériel avec tenue
d’une carte format Carte Bleue
58
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
Quelle que soit l’information renseignée dans la procédure, l’intégralité de la surface de
l’écran tactile est nécessaire :
Champs de saisie
Liste déroulante
Captures d’écran extraites du document « ePV-Procédure contrôle et verbalisation V0.8 (6) »
Dans le cas du remplissage de champs de saisie, environ la moitié de la surface de l’écran
est occupée par le clavier alphabétique virtuel.
AVIS ET RECOMMANDATION SECAFI
Le passage au ePV va permettre une véritable saisie assistée par ordinateur, avec de
multiples fonctionnalités très utiles et attendues par les agents. Elle facilitera la rédaction des
PV et quittances de tous les agents, et pourra aussi apporter une aide précieuse aux agents de
contrôle moins expérimentés (Cf. plus haut).
Mais les analyses que nous avons menées concernant l’activité telle qu’elle est réalisée
actuellement par les agents, nous amènent à poser quelques questions sur les pratiques
futures d’utilisation du nouvel appareil :
Nous pouvons tout d’abord nous interroger sur la question du maintien en main et en
sécurité de la pièce d’identité du contrevenant. En effet, il semble que le futur matériel, de
par son épaisseur, mais également du fait de la surface nécessaire pour remplir les champs,
ne permettra plus de maintenir la pièce d’identité au même niveau qu’auparavant. Les
agents voyaient deux avantages dans cette pratique :
•
Protéger la pièce et en prévenir un éventuel arrachage
•
Disposer, sans avoir à élargir leur champ de vision (i.e. bouger la tête ou les bras),
des informations à reporter dans les champs du formulaire de PV papier.
59
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
Le choix retenu est un matériel finalement peu adapté à la saisie de nombreuses informations
alphabétiques :
En effet, l’élaboration d’un PV ou d’une quittance nécessite avant tout de compléter des
champs alphanumériques. Nous pouvons donc nous étonner des disproportions existantes
entre la place réservée au clavier alphabétique, qui plus est virtuel, par rapport à celle
réservée au clavier numérique :
Surface disponible pour le clavier alphabétique
virtuel : 33 touches + barre d’espaces
Surface disponible pour les 16 touches du clavier
numérique
Le choix d’un clavier virtuel pour la partie alphabétique peut interroger, au regard des
difficultés connues pour l’utilisation de ce type de procédé, notamment depuis le
déploiement des « téléphones intelligents » (« Smartphones ») : difficulté d’activer la bonne
touche du fait de la taille de ces dernières, utilisation d’un ustensile type stylet,
développement de TMS, …
De plus, la présence d’un clavier numérique physique de 16 touches ne relève pas de la
nécessité absolue dans le cadre des activités de verbalisation, du moins pour l’instant, si ce
n’est de permettre ultérieurement de procéder à la saisie des codes secrets lors des
encaissements par carte bancaire (idem TPE).
Le passage au terminal électronique a pour objectif, notamment, de simplifier les activités de
saisie des informations relatives aux contrevenants. Or, du fait de l’occupation d’une grande
partie de l’écran par le clavier virtuel, les propositions de choix multiples sont amputées et
les deux premières propositions seulement sont accessibles à l’agent pour être sélectionnées,
les autres étant masquées par le clavier (Cf. ci-dessus, illustration de gauche). Nous pouvons
donc supposer que les agents seront amenés à renseigner un certain nombre de lettres du
mot dont ils souhaitent que l’appareil leur fasse la proposition, avant que ce dernier n’entre
dans les deux premiers choix possibles :
•
Au regard des préconisations faites par les psychologues cogniticiens, qui
préconisent, dans « les 10 règles d’or de l’ergonomie pour les mobiles », de « limiter
l’utilisation du clavier » (source LudoTic, ergonomie des interfaces), expliquant que
« Si la taille des icônes et des boutons est limitée, celle des touches d’un clavier virtuel l’est
encore plus : on peut aisément imaginer les contraintes que cela crée à une bonne partie des
utilisateurs. La seule solution, dans ce cas, est de limiter au maximum la saisie clavier. »,
60
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
•
En prenant en compte également les contraintes temporelles de rapidité et de stabilité
(bus) dans lesquelles les agents peuvent se trouver lors de la rédaction d’un PV.
Ainsi la plus-value réelle de cette option de saisie intuitive pour certains champs (noms de
rues par exemple) sera fortement réduite par la petite taille de l’écran « disponible » et le
nombre restreint de propositions affichées (2 lignes).
Le terminal choisi comporte des caractéristiques bien adaptées pour l’activité de contrôle :
faible poids, format réduit, impression intégrée, lecture télébillettique, paiement CB. Mais
son format et sa fonction principale de terminal de paiement vont aussi apporter des
contraintes gênantes dans l’activité de verbalisation (saisie et visualisation, maintien de la
pièce d’identité…). Il serait donc important de renforcer la démarche de prévention des
risques et d’adaptation de l’outil aux activités.
Ces travaux permettront, à partir d’un retour d’expérience centré sur les usages, de
déterminer comment la housse, les développements logiciels et les pratiques professionnelles
(Cf. plus loin) peuvent intégrer au mieux ces nouvelles contraintes. Plus tard, lors du
renouvellement du matériel, elles seront aussi utiles dans les critères de choix d’un matériel
de remplacement.
Des accessoires complémentaires à bien adapter aux besoins
Le terminal sera accompagné de périphériques permettant son utilisation dans les conditions
du contrôle à la RATP (présentation par la responsable du projet) :
•
Un stylet pour faciliter la saisie tactile
•
Une housse de protection en silicone permettant à la fois de protéger le terminal
des intempéries, mais également permettant une meilleure protection en cas de
choc (chute, choc contre un mur,…).
•
Une attache permettant l’accrochage du terminal à la ceinture
•
Une sangle permettant le maintien du terminal dans la main sans avoir à le tenir,
61
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
Illustration issue des observations de travail :
Concernant la sangle de maintien du terminal dans la main, nous avons eu des retours
mitigés sur l’utilisation de cette dernière avec le LDPC. En effet, si certains agents estiment
très utile de pouvoir lâcher le LDPC pour procéder à l’acte de verbalisation, sans avoir à
ranger ce dernier (en le laissant balancer sous le poignet), d’autres au contraire expriment
une peur de se voir « tirer fort sur le poignet » par un contrevenant qui tenterait d’arracher le
terminal des mains de l’agent.
AVIS ET RECOMMANDATION SECAFI
Ces accessoires semblent essentiels en complément du terminal, afin non seulement de
garantir les meilleurs conditions d’usage de l’appareil, mais également pour permettre aux
agents de disposer de possibilités diverses d’utilisation du matériel.
Nous mettrons l’accent sur l’importance de palier, à travers les accessoires mis à disposition
en complément du terminal, aux problématiques liées à la prescription de « positionnement du
justificatif de telle sorte qu’il ne puisse être arraché ». Un dispositif technique devra être trouvé
pour permettre aux agents de ne pas avoir à tenir le terminal d’une main, la pièce
justificative et le stylet de l’autre, ce qui rendra leur activité très compliquée à réaliser.
Il conviendra également de s’assurer de la bonne mise à disposition d’un dispositif de
maintien du stylet sur le terminal en dehors des phases d’utilisation, amis également lors des
phases d’utilisation (cordon ?), car comme nous l’ont dit les agents « le stylet, je ne nous donne
pas une semaine pour se le faire voler ».
De plus, afin de garantir une bonne adoption du matériel par les agents, li sera important de
veiller à la bonne qualité des accessoires de maintien et rangement du terminal, ainsi qu’à
leur durée de vie (Cf. retours concernant la nouvelle sacoche RATP).
Concernant la sangle de maintien du terminal dans la main, il conviendra, au regard du
retour d’expérience sur le LDPC, de permettre aux agents de choisir un maintien dans la
main ou pas.
62
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
3.1.3. Une conception de logiciel qui doit intégrer usage et utilité
Comme cela est décrit dans l’annexe « Ergonomie des logiciels », la conception des interfaces
devra répondre aux critères d’usage et d’utilité exprimés dans la partie précédente.
Lors de la présentation du terminal, nous n’avons malheureusement pas pu tester ce dernier
en situation. Les logiciels implémentés dans le système étaient encore des versions « béta »,
en cours de développement et non finalisées. De plus, l’absence de rouleau de papier lors de
la démonstration induisait un message d’erreur récurrent, à chaque phase d’utilisation. Au
final, la démonstration était discontinue et nécessitait fréquemment de revenir à zéro.
Le passage d’un carnet à souches à des interactions avec un logiciel
Il semble important de rappeler que la transition du carnet à souche vers un dispositif
électronique n’est pas neutre en matière d’implication de l’agent dans le remplissage du
procès-verbal.
Il est en effet connu que l’utilisation d’un système interactif monopolise une charge
cognitive bien supérieure à celle d’un papier/crayon pour son utilisateur. L’attention se
trouve « accaparée par l’écran », au détriment de la vigilance nécessaire dans l’exercice de
l’activité de verbalisation, du fait notamment de la présence d’un système dynamique (un
logiciel), différent fortement d’un système inerte comme le papier.
Or nous avons pu constater à quel point l’activité de verbalisation procède d’un équilibre
subtil entre l’attention portée sur la réalisation de la tâche de rédaction du procès-verbal ou
de la quittance et la vigilance sur l’environnement dans lequel se déroule l’activité :
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SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
Attitude
imprévisible du
contrevenant
bon remplissage de
l’ensemble des
champs
Identifica
tion des
codes
infraction
et des
montants
à régler
...
Attitude
des
voyageurs
alentours
...
Ecriture soignée
dans un
environnement
souvent mouvant
Position et
disponibilité des
collègues
immédiats, du
responsable
d’équipe
Facteurs ayant trait à l’attention portée sur la
réalisation de la tâche de rédaction
Facteurs ayant trait à la vigilance sur
l’environnement dans lequel se déroule l’activité
Ces données en situation sont également variables en fonction de l’état interne de l’agent
(fatigue, faim, situation personnelle,…), dont les facultés connaissent des variations tout au
long de la durée de son service, selon ses relations avec les clients, l’environnement…
AVIS ET RECOMMANDATION SECAFI
Il sera important, dans le cadre du déploiement de l’outil et de la période d’apprentissage
de permettre aux agents de pouvoir développer les « réflexes métiers » leur permettant
d’accéder à une situation d’exercice de leur métier sereine en utilisant ce nouveau terminal.
Pour ce faire, la nécessité de mettre en place un dispositif de formation accompagné d’un
deuxième dispositif de montée en compétences semble primordiale. Si une première phase
de formation initiale permettra aux agents de comprendre les logiques de fonctionnement
de l’outil, de le prendre en main ; ensuite une période de développement et stabilisation des
compétences liées à l’outil sera nécessaire. Cette deuxième période d’apprentissage devra
impérativement s’inscrire dans une temporalité plus longue (plusieurs mois) et se dérouler
dans un cadre particulier (tutorat, équipes utilisant à la fois carnet et ePV, formation
renforcée si besoin…). Le regard sur les résultats des équipes en phase de montée en
compétences devra être adapté au contexte (expérience, fonctionnement des outils, mises à
jour logiciels,...).
64
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
Processus de déploiement des terminaux :
Il sera important, bien en amont de la présentation de l’appareil aux agents, et afin de
prévenir l’exposition de ces derniers à des situations embarrassantes sur le terrain, même
lors des phases de test, de procéder à un inventaire exhaustif des postures et gestes métiers
mis en œuvre dans les situations de contrôle (tel le maintien de la pièce d’identité entre le
carnet et le pouce). Cette préconisation implique de procéder, éventuellement en
accompagnement des situations de test, mais préférablement en amont, à une véritable
analyse ergonomique des situations de travail dans lesquelles les agents sont/ seront amenés
à utiliser l’outil.
Processus d’apprentissage :
Au-delà d’un changement de posture, cette notion interroge le processus de recréation de
gestes métiers, guidés par l’outil, et qui se développeront avec l’expérience et dans le temps.
Il sera donc nécessaire de prendre en compte cette temporalité dans la phase de déploiement
des terminaux, en adaptant notamment les attendus en termes de production (« objectifs
tacites »).
Un dispositif renforcé d’accompagnement devra être mis en place autour des agents qui se
retrouveront en phases de test et d’apprentissage de ce nouvel outil. Le dispositif renforcé
devra permettre aux agents de pouvoir se concentrer sur l’utilisation et l’apprentissage du
fonctionnement du nouvel appareil, sans avoir à se soucier des éléments périphériques à
l’acte de verbalisation (vigilance à l’environnement principalement).
Un choc entre logique d’utilisation et logique de fonctionnement de l’outil
Les accompagnements d’agents ont permis de saisir les différences de pratiques dans le
remplissage des formulaires de PV. Différents facteurs influent sur l’ordre de remplissage du
formulaire :
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SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
Champs
"importants" à
remplir
Situation
à gérer
...
Pièce-s
justificative-s
•
Les « champs importants » Si les agents procèdent tous au « remplissage préférentiel des
champs essentiels », ces derniers ne donnent pas toujours les mêmes réponses quant à
la priorisation qui est faite des champs renseignés (par exemple, la date de naissance
est un champ essentiel pour certains, mais pas pour d’autres).
•
La situation peut également guider l’ordre de remplissage : si l’urgence se fait sentir
ou si, au contraire l’agent perçoit qu’il aura le temps de remplir correctement son PV,
alors, il procédera à un remplissage ligne par ligne, sans avoir à déplacer la pièce
d’identité du contrevenant. Au contraire, en cas de situation dégradée, l’agent pourra
décider de ne retenir que certains champs, quitte à bouger la pièce justificative.
•
Informations sur les pièces justificatives : les différentes pièces justificatives qui sont
présentées aux agents ne fournissent pas les informations aux mêmes endroits
(exemple adresse sur une carte d’identité ou un permis de conduire, différence entre
une carte d’identité et une carte de résident,…). Cette donnée peut guider l’ordre de
remplissage du PV papier.
AVIS ET RECOMMANDATION SECAFI
Le passage par des observations fines des pratiques des agents en matière de remplissage
des procès-verbaux est incontournable pour permettre au développement d’un outil
efficace et aidant dans l’activité de verbalisation. Sans cette étape cruciale, nécessitant de
recueillir sur le terrain les informations, puis de les confronter aux agents, afin de valider les
constats, il est possible de générer des outils contreproductifs, nécessitant un tel « cout
d’entrée/ d’utilisation » pour les agents que ces derniers s’en détournent et développent des
stratégies de contournement afin de pallier aux manquements de l’outil.
66
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
Ces analyses montreraient notamment la variété des pratiques d’utilisation du carnet de
PV, mais également de remplissage (Cf. ci-dessus) et permettraient de déterminer avec plus
de justesse les besoins de latitude concernant l’utilisation du logiciel : sessions propres à
chacun permettant à un utilisateur d’adapter au mieux l’outil à son utilisation, tant sur les
paramètres environnementaux (tout le monde ne souhaite pas un rétroéclairage de l’écran de
la même intensité), que sur les paramètres de présentation des informations/ des champs à
renseigner,…
La limitation d’une pratique métier importante pour la prévention : la substitution
Les accompagnements d’agents nous ont permis de prendre la mesure de l’importance du
levier de prévention du risque d’agression que représente la pratique de la substitution
entre agents. Sur cette question, les pratiques sont diverses : un agent peut continuer la
rédaction d’un PV sur le carnet du collègue sur lequel il prend la main, ou décider de
reprendre la procédure à zéro en remplissant un PV à partir de son propre carnet (et avec
son matricule). C’est généralement le contexte qui guidera la procédure engagée par les
agents : possibilité ou pas de reprendre une verbalisation à Zéro, niveau de réalisation des
objectifs (un agent ayant réalisé plus de gestes qu’un autre)…
AVIS ET RECOMMANDATION SECAFI
Dans le cas du terminal ePV, le matériel est codifié au démarrage de la mission pour un
agent. Il est donc prévu qu’un agent démarrant une procédure de verbalisation ne pourra
pas s’interrompre et passer la main à un de ses collègues qui finaliserait la procédure sous
son matricule (Substitution). Les agents perdraient là une marge de manœuvre importante
dans leur activité. Le risque étant de voir des agents « baisser la garde » devant certains
contrevenants en sachant que leur possibilité de sortie d’une situation conflictuelle se voit
réduit.
Le conflit éthique animant chaque agent (préserver sa santé tout en faisant son travail de
contrôle) se trouverait renforcé par l’impossibilité de recourir à cette pratique de
substitution, avec des enjeux de sécurité et de santé.
67
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
3.2. Les impacts potentiels sur les activités de travail et les
collectifs
3.2.1. Des impacts identifiés par le projet qui touchent de nombreux
métiers
Le Plan de Management du projet ePV (V4 du 22/06/2015) identifie les impacts métier
suivants :
Process
Mise à disposition outils de contrôle
(lecteurs, carnets quittances / BIF…)
Contrôle voyageur
Verbalisation
Acteur(s)
Niveau d’impact
REFONTE
CML/SCC
SEM / CSA et maîtrise
du territoire
MAJEUR
REFONTE
Déclaration de l’activité de contrôle
Mise en recouvrement
Contrôle des ventes (Suppression des
BIF)1
Maintenance des équipements de
contrôle
Gestion du parc des équipements de
contrôle
Administration SI des nouveaux outils
Maintien en condition opérationnel
(MCO) : MAJ des procédures MCO
REFONTE
Idem + CRI
REFONTE
SEM/CDV
MAJEUR
M2E
REFONTE
M2E
REFONTE
IXXI
NOUVEAU
IXXI
NOUVEAU
Les nombreux documents de projet précisent ces impacts sous forme d’objectifs,
d’améliorations ou d’axes de communication, principalement :
•
•
pour les agents :
o
Faciliter l’activité : diminution du nombre agrès, aide à la saisie…
o
Homogénéiser les pratiques : moderniser et simplifier l’organisation,
améliorer le les processus de gestion
o
Valoriser l’image par un outil moderne et performant
pour l’entreprise :
o
Optimiser la lutte anti-fraude par des justificatifs informatisés, la
réduction des délais de traitement, la fiabilité des adresses saisies, moins
de PV incomplets ou non lisibles
68
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
o
Faciliter le pilotage d’activité par l’homogénéisation des outils et
pratiques, l’automatisation de la saisie des activités, les indicateurs de
pilotage pour encadrement
o
Réduire les coûts de traitement grâce à la dématérialisation, à
l’accélération et à la simplification des modalités de paiement
AVIS SECAFI
Les impacts identifiés sont nombreux, touchent des acteurs diversifiés et sont même qualifiés
de « majeurs » pour les process de Contrôle voyageur et pour le Contrôle des ventes.
Cependant, nous n’avons pas eu connaissance d’une analyse de ces impacts notamment en
matière de conditions de travail, de santé et de sécurité au travail.
Les analyses qui suivent visent à aider le CHSCT dans cette évaluation des risques du projet
et la proposition de mesures de prévention. Elle permet aussi de montrer comment le projet
répond ou pas aux attentes des futurs utilisateurs et des besoins de leurs activités.
3.2.2. Une harmonisation des pratiques de Contrôle induite par
l’informatisation
Un des objectifs importants du projet ePV est de « Harmoniser les pratiques ». En effet la
direction considère que « Les contrôleurs de la RATP appartiennent à différents services (SCC,
SEM, SEC), historiquement séparés. Ils ont des pratiques différentes. Par exemple, les agents SCC
émettent des quittances alors que les agents SEM émettent des bulletins d’indemnité forfaitaire (BIF).
Un même outil permettra d’harmoniser les pratiques ».
Après la constitution du Département SCC, qui a regroupé les principaux corps de contrôles
des différentes activités, l’ePV doit ainsi poursuivre le rapprochement des métiers, des
processus et des outils de Contrôle des voyageurs, notamment entre les Départements SEM
(Maîtrise du Territoire, CSA) et CML puis SEC.
69
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
Le projet ePV est ainsi l’occasion d’un travail important de refonte des procédures. Il a
commencé par SCC avec 5 réunions de Groupes de Travail réalisés en juin 2015 avec des
cadres, maîtrises et assistants de tous les Attachements. Il a permis la rédaction d’un
document (ePV : procédures – V0.8 du 23.06.15) qui décrit les procédures d’utilisation de
l’appareil pour les agents de Contrôle du département CML. Il se poursuit pour SEM en
septembre 2015 également avec des Groupes de travail mais seulement avec un échantillon
de 4 ou 5 lignes.
Les résultats de ces Groupes de Travail, la révision des procédures par IFR et les arbitrages
qui s’ensuivront détermineront si les procédures seront d’emblée identiques entre SCC et
SEM ou si elles seront différentes, au moins de façon transitoire. Mis à part la
généralisation du système des Quittances, il n’existe pas a priori d’obligation de
mutualisation d’emblée des procédures entre SEM et SCC.
Cependant, les contraintes de fonctionnement de l’outil et la simplification des
développements logiciels devraient renforcer la tendance à la mutualisation. De même, les
données d’activités seront structurées de la même manière et collectées de façon
automatique.
Ainsi avec le projet ePV, les agents effectuant des missions de contrôle des voyageurs
partageront :
•
un même outil
•
des procédures harmonisées
•
l’utilisation de quittances avec les mêmes procédures de versement
•
un suivi homogène et automatisé de l’activité, facilitant la collecte et la consolidation des
données
AVIS SECAFI
L’analyse des déterminants de l’activité de Contrôle montre bien que les pratiques Métier
sont en grandes parties communes mais aussi parfois spécifiques à SEM ou à SCC.
L’informatisation de la verbalisation, comme de toute activité, conduit généralement à une
standardisation des processus pour se caler sur le fonctionnement des logiciels.
Néanmoins, compte tenu des enjeux d’efficacité du contrôle mais aussi de sécurité des
agents, le projet ePV aura à prendre en compte ces déterminants sans viser une
harmonisation ni trop rapide, ni complète.
70
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
3.2.3. Un
suivi
facilité
de
l’activité
avec
des
enjeux
de
cybersurveillance
Les quelques agents que nous avons rencontrés n’ont pas exprimés de forte préoccupation
concernant les nouvelles possibilités de l’ePV pour la surveillance de leurs activités, de leurs
déplacements ou de leur fonctionnement au sein des collectifs de travail. Néanmoins lors de
notre rencontre avec les Médecins du travail, ceux-ci ont soulevé la crainte que cet outil soit
perçu comme un moyen pour l’encadrement local de « démasquer les tricheries, d’arrêter les
arrangements entre collègues… ».
L’informatisation du Contrôle et de la verbalisation va effectivement faciliter les tâches de
reporting aussi bien pour les agents que pour les chefs d’équipes ou pour l’encadrement. En
effet l’outil permettra : l’enregistrement des activités de contrôle, l’archivage PV &
quittances, la déclaration automatisée de l’activité de contrôle.
Ainsi à tout moment, l’agent pourra accéder à son historique d’activité pour consulter les
infractions réalisées en s’authentifiant et avec un accès limité aux informations personnelles
saisies en respect des règles CNIL :
Et en fin de journée, chaque agent pourra aussi éditer son journal d’activité et le remettre à
son pilote, comme son récapitulatif de caisse.
71
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
L’entreprise compte aussi profiter des nouvelles possibilités offertes par l’ePV dans deux
domaines :
•
Améliorer l’efficacité de la lutte contre la fraude : « Un matériel plus performant de
contrôle, notamment avec plus d’informations partagées et un meilleur pilotage grâce à des
indicateurs plus précis, est susceptible d’offrir une meilleure efficacité de la lutte contre la fraude.
La possibilité d’accéder à une base d’informations (procédures, données contextualisées en fonction
de la localisation, informations fraudeurs) permet aussi d’améliorer l’efficacité du contrôle. En
outre, l’augmentation de la production, et donc du nombre de contrôle, renforce la dissuasion. »
•
Améliorer le pilotage de l’activité : « Les sites opérationnels doivent ressaisir (délais, erreurs)
l’activité de leur équipe et ils le font à un niveau assez agrégé. Une prise en compte, sans ressaisie,
des activités de contrôle permet d’améliorer la qualité de l’information des rapports d’activité, et
permet d’améliorer les délais de production des données statistiques et de pilotage. Avec une
solution ePV, la fourniture automatique de nouvelles données telles que le taux de contrôle, taux
de verbalisation, par lieux, zones FFF, réseaux … ».
Tous ces attendus, montrent bien la démultiplication des possibilités de pilotage et de
suivi de l’activité par l’informatisation des traitements. De plus, elles pourraient encore être
accrues à l’avenir par des éventuels compléments de développements logiciels. Ils sont pour
l’instant hors périmètre fonctionnel du projet, mais sont déjà identifiés et pourront donner
lieu à constitution d’un 2e lot : Paiement bancaire CB, Emission des fiches de mission,
Géolocalisation.
72
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
Les fonctionnalités de l’ePV nécessitent une sécurisation et une authentification de
l’utilisateur. Cette identification conduit donc à la traçabilité individuelle de leur
utilisation. En outre, le terminal est équipé d’un GPS qui pourra permettre la
géolocalisation, et donc un suivi des déplacements (lieu et temps mémorisables).
Toutes ces fonctionnalités renforcent les enjeux de cybersurveillance des salariés. En la
matière, le Code du travail et la CNIL fixent le cadre (Cf. Annexe). En effet la loi «
Informatique et Libertés » du 6 janvier 1978 modifiée par la loi du 6 août 2004 est applicable
dès lors qu’il existe un traitement automatisé ou un fichier manuel (c’est-à-dire un fichier
informatique ou un fichier « papier ») contenant des informations relatives à des personnes
physiques. Les données à caractère personnel ne concernent donc pas seulement les
contrevenants mais aussi les salariés.
Enfin la CNIL vient de renforcer en juin l’encadrement de la géolocalisation. On retiendra
notamment que
l’employeur
peut surveiller
les désactivations du dispositif
de
géolocalisation par les salariés. L’entreprise doit aussi restreindre le nombre de
destinataires pour les données collectées à des « personnes qui dans le cadre de leur
fonction peuvent légitimement avoir connaissance des données au regard de la finalité du
dispositif ». Enfin le suivi du temps de travail est uniquement réalisable s’il n’est pas
possible par d’autres moyens.
AVIS SECAFI
L’informatisation de la verbalisation va faciliter les tâches de récapitulation, de mémorisation
comme de suivi et de transmission des données d’activité des agents. Comme pour d’autres
métiers, elle démultiplie ainsi les possibilités de pilotage et de surveillance par l’encadrement
de terrain mais aussi de gestionnaires des sièges.
Pour l’heure, le projet ne prévoit de reproduire que les outils déjà utilisés. Mais les objectifs
énoncés par la RATP, comme les capacités du matériel et des systèmes informatiques,
montrent bien que les outils de pilotage pourraient rapidement évoluer.
Comme le préconise la CNIL, y compris pour les enjeux internes de surveillance des salariés,
il convient donc de bien encadrer tous ces dispositifs de traitement automatisé des données,
de restreindre et d’identifier les destinataires de ces informations, de limiter la
géolocalisation et le suivi du temps de travail par ces outils.
73
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
3.2.4. Une systématisation du système de Quittance qui pourrait
impacter le taux de recouvrement immédiat
Le projet ePV prévoit l’arrêt du système des BIF actuellement en vigueur à SEM. En cas
d’infraction constatée et de règlement immédiat par le contrevenant, tout agent saisira une
quittance comme le pratique actuellement SCC.
Ce passage aux eQuittances modifiera les conditions de versement à SEM avec de nouveaux
bordereaux… Mais l’analyse des données d’activités comparées entre SEM et SCC montre
des écarts importants dans le taux de recouvrement immédiat :
Le nombre d’infractions réalisées par Journée est assez comparable entre agents SEM et
SCC ; de l’ordre de 10. En revanche la proportion de BIF réalisés par SEM (43 à 45%) est
presque deux fois supérieure à celle des Quittances effectuées par SCC (27 à 29%).
Selon nos interlocuteurs, plusieurs motifs pourraient expliquer cet écart : différence de
posture de contrôle plus ou moins « commerciale », culture et animation des objectifs, ciblage
des points de contrôle à fort flux de fraude, difficulté recouvrement en réseau de surface…
AVIS ET RECOMMANDATION SECAFI
Au-delà de ces hypothèses, on peut néanmoins soulever le risque d’un passage des BIF aux
Quittances pour les agents SEM sur la part des infractions recouvertes immédiatement et
au final sur l’efficacité du recouvrement.
74
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
3.3. Des aspects importants du projet restent encore à
déterminer
3.3.1. Les Pilotes seront essentiels pour associer les utilisateurs
Après une longue période de définition des objectifs débutée en octobre 2013, de choix du
matériel, de conception et de développement des systèmes d’information, de révision des
procédures, le projet va bientôt entrer dans sa phase de pilote puis de déploiement.
Après la consultation du CHSCT, cette nouvelle étape de « Pilote technique » va permettre
de tester l’outil en situation réelle, par des utilisateurs de terrain. Elle permettra aussi
d’élaborer les contenus des formations. Les 2 sites pilotes techniques sélectionnés sont une
équipe de l’attachement SCC de Noisy et une équipe MDT du Nord de la Ligne 5. Il est
prévu de doter chaque site de 5 à 10 outils. Mais avec les rotations d’équipe, on peut penser
qu’une trentaine d’agents testeront l’outil durant cette période.
Les modalités exactes de mise en œuvre de ces Pilotes techniques sont en cours de
préparation et ne nous ont donc pas été transmises. De même seul le cahier des charges de
formation a été élaboré. Ainsi les nouvelles procédures Métier et les supports de formation
sont attendus seulement début 2016. L’objectif est de les finaliser en prenant en compte les
retours des Pilotes techniques.
75
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
Nos entretiens avec les agents, comme le courrier des Médecins du travail, montrent que les
attentes sont fortes par rapport à ces phases Pilotes. Les agents expriment en effet le besoin
d’ajuster l’outil au regard des problématiques du terrain et de pouvoir faire des allers-retours
entre les utilisateurs et les concepteurs. Ces attentes sont d’autant plus fortes que, durant la
conception, les Groupes de Travail ont été presque exclusivement réalisés avec des cadres et
maîtrises.
Il est prévu une durée de 5 mois pour ces Pilotes techniques. Puis un mois après, de lancer
les Pilotes Sites SCC puis SEM. Cette 2e phase de Pilotes concernera des sites complets, avec
une utilisation progressive de tous les agents, préalablement formés, de l’attachement SCC
de Noisy et de la Ligne 5. Ces 2 Pilotes SEM et CML devraient durer 4 mois, dont 2 mois
d’été. Dans la continuité, il est ensuite prévu de déployer tous les attachements CML et
toutes les Lignes SEM en 4 mois.
AVIS ET RECOMMANDATION SECAFI
La méthodologie de conception mise en œuvre jusqu’à maintenant n’a pas encore associé les
utilisateurs finaux du futur outil ePV. Les groupes de travail sur la conception des outils
comme sur l’évolution des processus ont été presque exclusivement constitués par
l’encadrement et les référents Métier.
L’implication des agents de contrôle n’est prévue qu’à partir des Pilotes techniques. L’outil
aura alors été choisi et les applicatifs conçus en ne laissant que de faibles marges de
manœuvre d’adaptation. L’implication des utilisateurs est donc tardive. Pourtant cette
association, la plus en amont possible, est essentielle à la réussite de la conception d’un projet
de nouvelle technologie, comme le montrent les résultats de la démarche d’ergonomie des
logiciels (Cf. Annexe).
Dans ce contexte, les travaux menés dans les Pilotes vont donc être très importants. Mais leur
méthodologie n’est pas encore établie. Et surtout quelles seront à ce niveau les moyens et les
possibilités pour adapter et faire évoluer l’outil et les systèmes d’informations ? Et les délais
prévus entre la fin des Pilotes et le déploiement général sont limités à un mois.
Tout comme la consultation du CHSCT, l’expertise a été réalisée sans possibilité d’observer
l’utilisation de l’ePV ni en conditions réelles ni par des utilisateurs. Nous avons juste pu
avoir une démonstration d’un terminal qui fonctionnait encore mal.
Une consultation en amont des pilotes est cependant favorable à une meilleure prise en
compte des avis des Médecins et du CHSCT. Mais il conviendra de présenter au CHSCT,
avant le déploiement, tous les éléments du projet qui sont encore indéterminés, notamment :
contenu des formations, organisation de la maintenance, formulaire agent, méthode et
résultats des Pilotes, évolutions des processus et de l’organisation des services d’appuis…
76
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
3.3.2. Un accompagnement qui se limite pour l’instant à une
formation initiale
Le dispositif de formation prévu sera différent pour les agents SEM et CML. En effet, pour
CML tous les agents SCC et leur encadrement seront formés directement par des formateurs
spécifiques en cours de recrutement. En revanche pour SEM, seuls les agents de maîtrise
CSA et MDT et les cadres de secteur et maîtrise du territoire seront formés par l’IFR en tant
que « formateurs relais ». Les environ 6000 agents CSA et MDT du département SEM seront
formés par leur encadrement sur site selon une formation de type 2 dispensée par les
« formateurs relais ».
Le cahier des charges de formation prévoit deux volets :
•
« Théorique » de 3h en salle (max 20 participants) : pour une présentation du projet, axée
sur les changements de process et de procédures métiers pour les équipes de contrôle
•
« Pratique » 3h (max 10) : pour manipuler l’équipement
En consultant le cahier des charges, nous avons pu relever plusieurs points :
•
Des points importants seront rappelés sur le contexte règlementaire et sécuritaire
et les évolutions avec ePV :
o
Codification des infractions avec abandon des niveaux
o
Distinction entre contravention et délit
o
Contraintes CNIL et réglementation sur les données à caractère personnel
o
Les agents formés auront aussi à signer une attestation, actant notamment
la reconnaissance des consignes de sécurité à respecter lors de l’usage de
l’ePV
•
Ainsi que sur les enjeux financiers du projet et du contrôle : sécuriser les recettes,
valeur de l’équipement...
•
Il est aussi prévu de donner les « Principes d’ergonomie », mais sans aucune
précision pour l’instant. Il est seulement énoncé que la formation pratique sera
fondée sur :
•
o
une « journée type »
o
avec « vérification du bon fonctionnement »
A la fin de chaque session de formation, il est prévu un questionnaire
d’évaluation des connaissances
77
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
•
•
Enfin des points de vigilance à l’attention des formateurs sont soulignés sur « la
résistance au changement » et « les appréhensions sur la technicité » des publics à
former
En revanche, il n’est pour l’instant les points suivants ne sont pas mentionnés :
o
l’impact des changements d’outil et de procédures sur les « gestes métier »
o
les nouveaux risques liés à l’informatisation d’une activité
o
la prévention des risques en cas de dysfonctionnement de l’outil,
particulièrement dans la relation client avec le contrevenant
Les supports de formation seront réalisés par un cabinet externe d’abord pour CML/SCC.
Puis ils seront adaptés par SEM/IFR pour son périmètre. L’élaboration finale de la formation
devra s’appuyer sur l’expérience de la formation des Pilotes techniques. Mais la méthode
d’évaluation des formations n’est pas encore précisée, notamment au regard de l’expérience
des utilisateurs après la période d’apprentissage.
AVIS ET RECOMMANDATION SECAFI
En complément de ce qui a déjà été dit sur les enjeux de formation initiale et d’apprentissage
dans l’analyse ergonomique, il serait nécessaire d’intégrer à la formation une partie
spécifique à la prévention abordant par exemple : les risques de baisse de vigilance à
l’environnement dans l’une utilisation d’un outil informatique ; une formation pratique sur:
la « simulation de bug » ; les nouveaux gestes métiers préconisés face aux limitations des
possibilités de substitution…
Dans le cas de SEM, où les agents seront formés par leur encadrement en 2e niveau, il serait
utile de prévoir un module complémentaire de « formation des formateurs ».
Après la réalisation des premières formations et une période d’apprentissage suffisante, il
sera aussi nécessaire d’évaluer la formation auprès des utilisateurs. Il pourra alors être
analysé si des adaptations aux diversités d’usages et de profils sont nécessaires, et si des
compléments ultérieurs seraient nécessaires à certains agents.
78
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
3.3.3. Un fort enjeu de logistique et de maintenance pour un outil
essentiel à l’activité
Le maintien en condition opérationnelle (MCO) est l'ensemble des mesures prises pour
garantir que le passage en mode dégradé n'entraîne pas une altération inacceptable des
conditions de travail habituelles. Dans le cadre d'un plan de continuité d'activité (PCA), le
MCO couvre principalement la stratégie de sauvegarde utilisée et la méthodologie de
déploiement de celle-ci sur un environnement dégradé ainsi que la réplication de la
configuration des équipements. Il prévoit aussi, dans le cadre d'une production continue, le
remplacement des pièces défectueuses, le diagnostic des pannes, la formation, la
documentation.
Comme évoqué plus haut les attentes des utilisateurs sont fortes vis-à-vis du projet ePV, avec
des enjeux de logistique et de maintenance qui portent notamment sur :
•
La préparation, la mise à disposition et le remplacement du matériel (terminal,
consommables et accessoires) avec une organisation interne : référent local,
procédures de gestion du parc et de la maintenance, stocks, système de dépêches
•
L’installation et l’entretien des supports de connexion et de charge des terminaux
•
La robustesse d’un matériel emporté en mission et utilisé en intérieur comme en
extérieur : terminal, batterie et pile de sauvegarde
•
L’adaptation des accessoires : stylet, housse, sacoche…
•
La logistique de dépannage par M2E avec des prestations externes : fréquence de
passage selon les profils de site, délais de réparation, organisation de la logistique
et partage des informations (délais, types de pannes…) via SAGAI
Pour l’instant, ces points sont en cours de préparation avec M2E selon le calendrier suivant :
•
T4 2015 : participation aux recettes usine, à la qualification de la solution
•
T4 2015 : rédaction des procédures de maintenance et de gestion du parc
•
2016 / 2017 : déploiement – paramétrage, installation et test des équipements
•
2016 : suivi de fiabilité des équipements
79
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
AVIS ET RECOMMANDATION SECAFI
L’ePV sera un outil essentiel à l’activité de contrôle et de verbalisation. De plus, il entre dans
la relation avec le contrevenant, avec un enjeu de sécurisation des données personnelles
recueillies. Les exigences de fiabilité du matériel sont donc forts tout comme l’efficacité de la
logistique et de la maintenance qui vont être mises en œuvre.
En l’état actuel de préparation des conditions de Maintenance, nous ne pouvons qu’émettre
des points de vigilance sur l’opérationnalité de l’organisation qui va être mise en place et
pourra être testée lors des Pilotes. Il nous semble aussi important de veiller aux diversités
des besoins entre petits et grands sites, entre sites SCC et SEM, entre agents de contrôle
permanents et « temporaires ».
Nous attirons aussi l’attention sur l’intérêt du retour d’expérience sur la Maintenance, non
seulement sur son efficacité mais aussi sur ce qu’elle peut renvoyer des conditions
d’utilisation et des besoins des utilisateurs. Dans ce but, il est aussi important de prévoir un
partage des informations et une analyse croisée avec les utilisateurs des pannes et de la
maintenance.
80
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
3.4. Préconisations pour le Retour d’expérience et la
Prévention des risques
3.4.1. Une prévention des risques à mieux intégrer au projet
L’évaluation des risques professionnels fournie au CHSCT ne relève « aucune
modification »
Une évaluation des risques professionnels est jointe au dossier de consultation du CHSCT.
Cette évaluation ne recense « aucune modification »dans la hiérarchisation des différents
risques énumérés (selon le Référentiel Risques RATP). Et elle conclut que le projet ePV n’a
« pas d’impact sur la hiérarchisation des risques ».
Elle relève néanmoins que « le temps de la transaction diminue de deux minutes en moyenne ».
Cette conclusion serait fondée sur quelques essais réalisés avec le Responsable de projet. Ces
essais ont été réalisés « en bureau » et avec l’outil alors disponible. En effet, il est considéré
que « Les risques pris par les contrôleurs dans l’exercice de leur métier diminuent avec un moindre
temps de verbalisation ». L’objectif énoncé en interne est ainsi de « délivrer une quittance en
moins de 2mn et un PVI en moins de 3mn ».
Par ailleurs, l’évaluation met en avant la réduction du nombre et du poids des agrès
transportés : 3 en moins par agent et gain de 527g.
Enfin, en mesures d’accompagnement pour les équipes sont précisées les formations pour
les agents et les managers. Elles visent notamment à limiter les risques accrus en période
d’apprentissage.
L’équipe projet a aussi identifié un autre apport de l’ePV pour renforcer la vigilance du
Pilote d’équipe : « Le pilote doit garder un œil vigilant sur le déroulement des opérations et prévenir
les conflits, tout en devant aujourd’hui consigner l’activité de l’équipe. L’ePV permettra de décharger
le pilote de sa tâche de saisie d’activité pour se concentrer sur le bon déroulement des opérations, ce qui
réduira les risques pris par l’équipe des contrôleurs ».
81
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
Cependant le travail de fond engagé sur les procédures et les processus n’est pas mentionné.
Peut-être parce que la Prévention des risques professionnels n’est pas explicitement intégrée
dans la démarche. Ou que l’équipe interne d’Ergonomie n’est pas intervenue durant la phase
de conception ?
Des préconisations déjà formulées par l’IFAS et par les médecins du travail
En amont de la consultation du CHSCT, la RATP a fait réaliser par l’Institut Français
d’Action sur le Stress un « Diagnostic des RPS liés au projet Equipement PV électronique ».
Les conclusions de cette étude (30/04/2015) ont été jointes au dossier de consultation. Cette
étude a été réalisée à partir de :
•
21 entretiens individuels, essentiellement d’encadrement, 2 agents SCC ont été
vus
•
3 entretiens collectifs avec des médecins du travail, des représentants syndicaux et
des représentants de la direction
•
une visite au Pôle Recouvrement
•
une étude documentaire
Les conclusions de ce diagnostic préalable des possibles impacts du projet en matière de RPS
proposent une série de préconisations, notamment :
la désignation d’un référent ePV par site
des formations complémentaires pour les agents en difficulté
un déploiement progressif avec un retour d’expérience
rappel des procédures métier du contrôle, notamment du « binômage » pour assurer
la sécurité de l’agent qui saisit
vigilance sur les indicateurs d’activité (individuel/ collectif)
Les Médecins du travail du périmètre SEM et SCC ont été invités à une réunion avec l’IFAS.
Sollicités par l’équipe projet ePV sur les conseils du Préventeur, onze d’entre eux se sont
aussi réunis et ont rédigé un courrier de 4 pages pour donner leur avis sur le projet ePV.
Dans ce courrier détaillé, ils relèvent ainsi notamment :
•
« les améliorations attendues des conditions de travail des agents
•
des interrogations sur les impacts et les conséquences en termes notamment de travail, de
charge mentale et cognitive, de formation et de problématiques spécifiques liées aux
situations particulières
•
leur inquiétude commune concernant les répercussions pour les agents en inaptitude
travaillant au pôle recouvrement comme agents de taxation »
82
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
Et les médecins formulent également une série de préconisations et propositions que nous
pouvons synthétiser ainsi :
réaliser une évaluation amont des impacts de l’outil sur le travail
prévoir des formations adaptées aux profils des agents
prévenir les risques (malveillance, agression) par la redéfinition des consignes et
l’anticipation des craintes
assurer une veille attentive et effective par le management des situations difficiles
mettre en place une démarche pluridisciplinaire d’évaluation et de prévention en
amont
réaliser un retour d’expérience diversifié auprès des utilisateurs des différents corps
de métier
prévoir des adaptations locales si besoin
Lors de notre entretien avec les Médecins du travail, en juillet, ceux-ci n’avaient reçu aucune
réponse à leur courrier. Les responsables du projet nous ont dit que les préconisations de
l’IFAS avaient toutes été retenues. Et que celles des Médecins restaient à étudier.
3.4.2. Les recommandations complémentaires de SECAFI
Nos analyses précédentes et les recommandations déjà formulées plus haut vont dans le
même sens et complètent les préconisations du diagnostic des RPS et des Médecins du
travail. En écho aux propos des Médecins, il nous semble effectivement essentiel de lancer au
plus vite « une première étape efficiente de cette démarche ‘’Evaluation /Prévention’’
pluridisciplinaire en amont de la mise en application opérationnelle du projet ».
Les recommandations suivantes visent donc à récapituler comment cette démarche pourrait
être mise en œuvre à court et moyen termes. Elles placent ainsi au cœur de projet les
utilisateurs de l’outil, ou plutôt du système ePV qui intègrent à la fois le terminal et le
système d’information mais aussi l’organisation du travail, le management et la prévention.
Certaines recommandations pourront être mise en œuvre dès maintenant sur les Pilotes,
d’autres en préparation du déploiement général et certaines seulement à plus longue
échéance en fonction des possibilités d’adaptation et d’évolution du matériel et des logiciels.
83
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
1. Intégrer la compétence
ergonomique au sein de
l'équipe projet
5. Organiser une veille et un
appui managérial pour les
situations problématiques et
les agents en difficulté
2. Construire une boucle
de prévention
associant les différents
acteurs
Agents
utilisateurs en
situations
4. Renforcer l'accompagnement
durant la période
d'apprentissage et de transition
3. Prévoir un retour
d'expérience large durant les
Pilotes (outil, logiciel, métier,
aléas...)
RECOMMANDATIONS SECAFI
Les 5 recommandations ci-dessous visent à améliorer la réussite économique et sociale du
projet ePV qui vise à moderniser toutes les activités liées à la verbalisation. Elles s’inscrivent
ainsi dans une démarche d’amélioration des conditions de travail et de prévention des
risques le plus en amont possible.
Les recommandations proposent ainsi d’enrichir la structure Projet dans une approche
pluridisciplinaire et associant les principaux acteurs (équipe projet, management de
terrain, RH et formateurs, acteurs de la prévention, agents utilisateurs). Chacune de ces
recommandations est déclinée en propositions concrètes, en points de vigilance ou en pistes
d’actions.
1. Intégrer la compétence ergonomique au sein de l'équipe projet
•
Centrer sur les usages le retour d’expérience réalisé dans les pilotes avec l’appui de
compétences ergonomiques
•
Vérifier que l’utilisation de l’ePV préserve les prérogatives de décision et de
discernement nécessaires à l’activité de contrôle et à ses exigences d’adaptation et de
sécurité : maîtrise de la durée des échanges, lâcher-prise, mesures de clémence,
substitution, jeux d’acteurs, binômage…
•
Mettre en œuvre une étude de l’ergonomie logicielle orientée utilisateur telle que
détaillée précédemment et en annexe : à la fois pour le terminal ePV, mais aussi pour
l’harmonisation des interfaces utilisées en services supports (TPE, OASIS, SIG, Base
phrases type,…)
84
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
•
Prévoir des études de terrain avec un panel représentatif d’utilisateurs pour vérifier
les principaux paramètres d’utilisation du matériel : durée de saisie des PV et des
quittances, tenue en main de l’agrès, fiabilité dans la durée du matériel et des
batteries…
•
Envisager si des adaptabilités du système ePV (matériel, accessoires, logiciels,
paramétrages…) sont nécessaires et possibles à plus ou moins court terme, pour
prendre
en
compte
les
diversités
de
situations
(sous-terrain/extérieur,
statique/dynamique…) et de profils des agents (métier, niveau d’expérience,
vision…)
•
Donner la possibilité aux téléacteurs du Recouvrement de disposer d’une
reproduction exacte (image) du PVI imprimé dont disposera le contrevenant
•
Renforcer les dispositifs de réduction des bruits ambiants au plateau téléphonique
du Recouvrement, suite à une étude fine de cette problématique, dans une
perspective de développement de l’activité et réaliser l’adaptation du plan de travail
du poste d’accueil des contrevenants au pôle Recouvrement (attendus depuis fin
2013)
2. Construire une boucle de prévention associant les différents acteurs
•
Associer davantage les utilisateurs dès la conception, en assurant une information
préalable du projet au CHSCT, et en l’associant à cette démarche « centrée
utilisateurs »
•
Travailler conjointement sur un Formulaire agent qui précise les engagements
mutuels des agents mais aussi de l’entreprise, notamment en matière de
responsabilité (vol, dégradation…) et de suivi de l’activité (non activation GPS et
géolocalisation, finalités des données collectées, restriction des destinataires de ces
données…)
•
Partager avec le CHSCT le retour d’expérience des phases Pilotes et les tableaux de
bord du déploiement
•
Travailler sur les adaptations nécessaires des pratiques métiers en cas de
Substitution impossible avec l’ePV
•
Prévoir des mesures de précaution en cas de dysfonctionnement de l’outil ; par
exemple quelles modalités d’arrêt/retrait de la verbalisation si un terminal
commence à dysfonctionner
85
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
•
Etudier les impacts d’une meilleure efficacité de l’ePV qui à la fois renforce l’image
et l’autorité (théâtralité) du contrôleur mais peut aussi accroître « la peur/
l’enfermement » du contrôle (pression, vérification de l’adresse, recueil du N° de
portable) et le risque d’agressivité
•
Dans la période de maintien d’une partie de l’activité Taxation du Recouvrement, il
conviendrait de procéder à des améliorations des postes de travail, notamment des
sièges, certains agents présentant des douleurs dorsales qui pourraient se trouver
accentuées
3. Prévoir un retour d'expérience large durant les Pilotes (outil, logiciel, métier, aléas...)
•
Inclure dans le retour d’expérience : le matériel et les accessoires, les logiciels, les
formations, les gestes métier et le fonctionnement collectif, la logistique et la
maintenance, les situations d’aléa
•
Bâtir une démarche pluridisciplinaire de retour d’expérience (intégrant notamment
ergonomie et Qualité de Vie au Travail)
•
Veiller aux risques de biais dans la sélection des utilisateurs des pilotes (très
motivés, peu critiques, triés par la hiérarchie, adeptes de nouvelles technologies…)
•
Eviter une écoute des remontées utilisateurs avec une vision trop centrée sur l’outil
et pas assez sur les usages (courants et aléas) et sur les diversités (profils, situations)
•
Prévoir des tests étendus sur les temps de transaction avec ePV, en faisant la
distinction entre temps de rédaction et temps de négociation
•
Associer les préventeurs à la démarche, notamment Médecins du travail et CHSCT
pour proposer des actions d’amélioration et des mesures de prévention
•
Prévoir un retour d’expérience sur les formations (SCC et SEM), au-delà des
évaluations
de
fin
de
session,
après une
période
suffisante
d’utilisation
(questionnaire, entretiens)
4. Renforcer l'accompagnement durant la période d'apprentissage et de transition
•
Identifier les besoins de maintien des souches papier plus ou moins transitoires, le
calendrier prévisionnel et les impacts sur l’organisation et les charges de travail
notamment des services supports
•
Organiser et faire connaître le circuit de remontées pour les utilisateurs en
prévoyant des retours sur la prise en compte de ce qui a été remonté
86
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
•
Prévoir la possibilité d’accompagnement durant une 2e période d’apprentissage
selon les besoins : tutorat, mixage des équipes (agents +/- familiarisés), formation
renforcée
•
Eviter toute baisse d’effectif dans les services supports sans certitude qu’une baisse
de charge prévue est bien constatée :
•
le Recouvrement, durant la phase de Pilote technique, devra d’abord intégrer
manuellement les ePV saisis qui ne seront pas transmis par informatique
•
ensuite l’activité taxation va progressivement diminuer, mais des PV papier
vont encore devoir être traités donc avec 2 circuits parallèles à maintenir
•
la diminution des RI 50 et autres PV invalides va augmenter le nombre de PV
à recouvrer
•
au Contrôle des ventes la charge pourrait augmenter par la nécessité d’ouvrir
un nombre bien plus élevé de sessions avec les e-quittances qu’avec le
système de BIF actuel
•
et le temps consacré à la gestion des anomalies devrait devenir plus complexe
(boîte noire) et donc plus long
5. Organiser une veille et un appui managérial pour les situations problématiques et les
agents en difficulté
•
Sensibiliser l’encadrement de proximité à une écoute « bienveillante » sur les pannes
et dysfonctionnements rencontrés par les agents pour cet outil qui est central dans
leur activité
•
Recevoir et traiter les usages considérés a priori comme « non conformes » du ePV
pour identifier les éventuels besoins d’adaptation ou risques du projet
•
Veiller dans l’attribution des objectifs, surtout durant la période d’apprentissage, à
la bonne articulation des trois champs Production/ Couverture du territoire/ Niveau
de prestation, afin d’assurer notamment la prévention de l’exposition à des situations
conflictuelles, auxquelles les agents sont confrontés quotidiennement
•
Porter une attention particulière aux équipes mobiles SEM qui sont déjà peu
familiarisées avec la pratique même du contrôle
•
Anticiper les impacts sur les capacités de reclassement dans les services support
(recouvrement, comptabilité, contrôle des ventes), et le risque que de nombreux
agents présentant des inaptitudes et présents actuellement dans le service
Recouvrement ne pourront pas aller sur le plateau téléphonique
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SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
ANNEXES
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SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
Planning de la mission et personnes rencontrées
Dates
25/06/2015
après-midi
30/06/2015
après-midi
9/07/2015
16/07/2015
9/07/2015
après-midi
15/07/2015
15/07/2015
soirée
16/07/2015
matin
16/07/2015
Après-midi
17/07/2015
matin
17/07/2015
après-midi
21/07/2015
21/07/2015
22/07/2015
22/07/2015
22/07/2015
27/07/2015
26/08/2015
26/08/2015
27/08/2015
27/08/2015
Matin
28/07/2015
matin
28/07/2015
après-midi
04/09/2015
Matin
04/09/2015
Matin
Personnes et qualités
Lieu
Entretiens individuels (OCQ) et collectifs (agents)
Attachement de Noisy le
Grand
Pôle recouvrement (Jules
Vallès)
Pôle recouvrement (Jules
Vallès)
Service comptabilité
quittance Jules Vallès
Ligne 5, pôle nord
Observation du travail : Equipe CSA, ligne 5
Ligne 5
Observations de travail : briefing et accompagnement contrôleur
SCC Bastille
Entretien avec le management de l’attachement de Noisy le Grand
Entretien avec le management du pôle Recouvrement
Entretiens et observations au sein du pôle Recouvrement
Observations de travail et entretiens avec agents présents
Entretien collectif OCQ
Entretiens individuels 2 agents de maîtrise
Entretien agent de maîtrise
Entretien collectif agents MDT
SEM MDT L4 station Les
Halles
Observation de travail : suivi d’une équipe MDT
SEM MDT L4
Mme GOUX, responsable de projet ePV
Dr JOUANNIQUE, KERLO-BRUSSET, TENNENBAUM, et ALLANIC,
médecins du travail
M. WIEBER, DUO SCC
M. LE MAITRE, Préventeur SEM
Mme SALGADO, Département Unité MSC-SEM, support Lignes métro et
RER
Entretiens avec la responsable de service et deux chefs d’équipe
Observations de travail dans les unités du service
Maison RATP, Bercy
2 entretiens collectifs Agents SCC (8 agents), entretien individuel OCQ,
SCC Bastille
Maison RATP, Bercy
CML, Jules Vallès
Maison RATP, Bercy
Maison RATP, Bercy
Service contrôle des
ventes Jules Vallès
Attachement de Noisy le
Grand
3 Observations du travail en accompagnement des équipes
Réseau RATP
2 entretiens collectifs Agents SCC (4+ agents), entretien individuel OCQ,
Attachement de Noisy le
Grand
Entretien collectifs OCQ
SCC Bastille
Entretiens individuels (3 agents sur SEM L4)
Entretien collectif OCD (Bastille)
SEM MDT L4 et SCC
Bastille
Observations du travail équipe SCC Bastille
Réseau RATP
Observations du travail : équipe MDT Ligne 4
Réseau RATP
89
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
Documentation à notre disposition
•
Un descriptif détaillé du matériel retenu (documentation technique du matériel iWL280),
sur les différents matériels et critères ayant conduit au choix de celui-ci (Grille de
notation)
•
Le cahier des charges élaboré pour le développement des applications RATP sur le
matériel (Cahier des Spécifications Fonctionnelles et Techniques – Equipement ePV et
Matrice des caractéristiques matérielles)
•
Le Plan Management Projet ePV-003 V4
•
Données annuelles 2012, 2013, 2014 sur ne nombre de PV, de BIF/ Quittances, la
répartition des modes de paiement par Département (RER, SCC, SEM, SEC)
•
Les cahiers des charges supports de formation dédiés au nouvel outil (ePV-CDC-158 EDB
formation SEM V2)
•
Le calendrier « CHSCT » du déploiement du projet ePV
•
Les procédures métiers actuelles SCC (Guides Juridique, Contrôle fiable, Pratiques
professionnelles) et projetées (ePV : procédures - V0.8)
•
Le RAPPORT 2014 DE LA SITUATION GENERALE DE L'HYGIENE, DE LA SECURITE
ET DES CONDITIONS DE TRAVAIL
•
La Charte RATP pour le bon usage des Technologies de l’Information et de la
Communication
•
Les protocoles Mutualisation
du contrôle des ventes et Adaptation activités
fonctionnelles et transversales
•
Point maintenance ePV – M2E (07/01)
•
Le rapport de diagnostic des RPS liés au projet élaboré par l’IFAS
•
Le courrier collectif de 4 pages adressé par des médecins du travail SST des départements
SEM-CML sur le projet ePV à la direction de projet
90
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
Délibération du CHSCT SEM CML du 01 juin 2015
« Demande Expertise sur le @PV
Le CHSCT SEM-CML est consulté sur le projet « du contrôle et des titres de transport et
verbalisation électronique, recouvrement des PV et comptabilisation des quittances »
Le projet concerne directement :
•
Les agents en mission de contrôle des départements SEM et CML
•
Les agents du recouvrement, de la taxation et comptabilisation des quittances
Soit un impact sur environ 6500 agents de l’Établissement SEM CML.
Les changements concrets envisagés sont considérables. Ils portent notamment sur la rédaction des
PVI, leur comptabilisation, leur taxation, leur recouvrement. Ils portent également sur l'effectif des
agents puisque des postes doivent disparaître (au moins 7 postes ETP sur SEM et CML). Sans
négliger la formation de l'ensemble des agents utilisant ce nouvel outil.
Afin de pouvoir donner un avis sur les conséquences de ce projet sur le travail réel des agents, sur les
conditions de travail et sur l’exposition des agents aux risques professionnels, les représentants du
personnel au CHSCT souhaitent disposer d’une expertise réalisée par un cabinet agréé par le ministère
du Travail, conformément à l’article L4614-12 du code du Travail.
L’objet de l’expertise est le suivant :
D'une part :
•
étudier la constitution technique de l'appareil en lui-même et de sa partie logiciel, en réalisant
une expertise ergonomique, comme sa praticité in situ, son utilisation à prise et fin de service, son
autonomie, son utilisation pour les droitiers et les gauchers, l'impact de ses matériaux sur
l’environnement, ainsi que la possible nocivité de son système d'impression (BPA, encre, etc.) , sans
que cette liste ne soit exhaustive,
•
une évaluation continuelle de la praticité de l'outil et des difficultés éventuellement
rencontrées au fur et à mesure de son déploiement est nécessaire,
•
étudier la sécurisation des données et des risques de perte de celles-ci.
D'autre part :
•
caractériser les changements réels induits par l'impact sur l'arrivée de cette nouvelle
technologie auprès des agents en mission de contrôle (CML et SEM) et du « back office » (Pôle de
recouvrement, agents de taxation, comptabilisation des quittances, etc.),
•
étudier la visibilité sur le reclassement des agents perdant leurs missions,
•
étudier l'augmentation de la charge de travail pour les agents restants,
•
étudier spécifiquement les risques psychosociaux,
91
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
•
analyser la prévention des risques professionnels en vue de son inscription dans le document
unique,
•
étudier les impacts de la nouvelle organisation du travail, ainsi que des outils, nouveaux ou
non, nécessaire à sa réalisation,
étudier les modalités de transition et le dispositif d’accompagnement,
étudier les contenus et les modalités des formations à réaliser,
formuler toute proposition qui paraîtrait utile pour l’amélioration des conditions de travail et
de santé, et la prévention des risques professionnels.
Dans le respect de l'article L.4121-1 et L.4121-2, trouver les mesures adaptées à la protection des
salariés.
Mandat est donné au membre du CHSCT SEM/CML, Marc DOREY, pour prendre toutes
dispositions utiles et nécessaires à l'exécution de cette décision, notamment pour prendre contact avec
un expert afin de voir le Comité désigner un cabinet.
Éventuellement il pourra engager toutes les procédures administratives ou judiciaires requises pour la
bonne application des missions et prérogatives du CHSCT.
Pour : 6
Contre : 3
Abstention : 0 »
92
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
Ergonomie des logiciels
Il existe trois angles d’études portant sur les interactions homme/logiciel :
>
Un angle portant sur les caractéristiques physiques du poste de travail (postures
de travail, ambiances thermiques, lumineuses, acoustiques, etc.) : on se situe au
niveau plus large du contexte de mise en place du logiciel ;
>
Un angle portant sur les caractéristiques physiques du logiciel (codage couleur,
taille des caractères, densité des données, etc.) : on se situe au niveau du confort
d’utilisation du logiciel. ; il existe des normes relatives à ces points (AFNOR) ;
>
Un angle portant sur la compatibilité entre le logiciel, les procédures de travail et
les caractéristiques mentales des utilisateurs. Les deux questions qui se posent
sont : le logiciel est-il simple d’utilisation (utilisabilité)? Permet-il d’effectuer les
tâches qui sont demandées à l’utilisateur (utilité)?
L’ergonomie des logiciels étudie principalement le troisième angle. Elle concerne
« l’adaptation du logiciel à l’usager en tant qu’il traite de l’information. En d’autres
termes, l’objectif est d’adapter les comportements de l’ordinateur, c’est-à-dire ses
manifestations externes, au fonctionnement cognitif de l’usager dans le sens évidemment
d’une assistance la plus efficace et la moins contraignante » possible (Bisseret, 1982).
« L’ergonomie est la mise en œuvre de l'ensemble des connaissances scientifiques relatives à
l'Homme et nécessaires pour concevoir des outils, des machines et des dispositifs qui puissent être
utilisés par le plus grand nombre avec le maximum de confort, de sécurité et d'efficacité »
(Wisner, 1972)
Une interface informatique doit satisfaire à deux grands critères : l’utilité et
l’utilisabilité. Un système de bonne qualité ergonomique devra être à la fois utile et
utilisable.
La notion d’utilité
>
Les fonctionnalités proposées par le système doivent être utiles : l'interface doit
servir à faire quelque chose, et ce quelque chose doit être pertinent au regard des
objectifs de l'utilisateur. L'application doit servir un besoin.
>
Un système peut respecter tous les critères d'utilisabilité mais être inutile. C'est
l'adéquation entre l'activité et l'outil qui permettra de dire que cet outil est utile.
93
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
>
Les méthodes d'analyse de l'activité nous permettent de cerner quelles
fonctionnalités doit fournir l'application, autrement dit quelles fonctionnalités
sont utiles.
>
Dans le cas de l’utilisation de plusieurs logiciels, il est nécessaire de s’interroger
sur les éventuelles fonctionnalités redondantes et plus largement sur leur
articulation.
>
L’ergonome va s’intéresser à l’adéquation entre la tâche à réaliser, la façon dont
celle-ci est effectuée (activité), et les fonctionnalités du logiciel). Il est fréquent de
constater une inadéquation partielle entre la tâche à réaliser et ce que permet
effectivement de faire le logiciel.
La notion d’utilisabilité
>
Le système doit être facile à utiliser. L'interface doit donc permettre à l'utilisateur
d'exploiter au mieux les fonctionnalités du système. Une interface utilisable doit
permettre à l'utilisateur de réaliser une action rapidement et efficacement.
>
>
De façon générale, l'utilisabilité d'un système comprend :
•
sa facilité d'utilisation,
•
sa facilité d'apprentissage,
•
son efficacité d'utilisation,
•
son utilisation sans erreurs,
•
la satisfaction de ses utilisateurs.
L'utilisabilité se décline aussi différemment en fonction du contexte et de
l’utilisateur.
>
Dans le cas de l’utilisation de plusieurs logiciels, il est nécessaire de s’interroger
sur les différentes logiques d’utilisation des logiciels qui peuvent induire en
erreur l’utilisateur (risque de confusion lié par exemple à une architecture proche
mais malgré tout différente, sur l’utilisation d’un vocabulaire identique mais
recouvrant des réalités différentes, etc.).
>
L’ergonome regarde s’il existe des systèmes d’aide à l’utilisateur, si celui-ci a la
possibilité d’interrompre le travail en cours, si le logiciel dispose d’un système de
sauvegarde, si l’utilisateur peut effectuer une autre tâche en parallèle, etc.
94
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
>
L’utilité réelle d’un logiciel et sa facilité d’utilisation sont d’autant plus grands
qu’il est conçu pour être compatible avec les modes de fonctionnement des
utilisateurs au plan physiologique (perception, compatibilité des commandes,
lisibilité...), au plan des tâches (lecture, saisie, dialogue...), au plan du langage
(codes, lexique...), au plan cognitif (modélisation des raisonnements) et psychique
(projets personnels...).
Les impacts de la mise en place d’un logiciel peu ou pas adapté à l’utilisateur et à la tâche
qu’il doit effectuer
Impacts sur l’activité :
>
Erreurs et pertes de temps liées à la difficulté de prise en main du logiciel,
>
Données manquantes du fait de l’impossibilité d’intégrer les cas nouveaux ou non
standards,
>
Utilisation d’autres outils en parallèle (par exemple outil ‘papier-crayon’) pour
palier aux ‘défauts’ du logiciel et, de ce fait, augmentation de la charge de travail,
etc.
Impacts sur les relations sociales au travail :
>
La transformation du travail induite par la mise en place d’un logiciel a des
répercussions humaines et sociales (logiciel remplaçant les échanges entre les
personnes, pertes des informations qui se passaient de façon officieuse mais qui
étaient nécessaires à la bonne marche du travail, tensions liées aux difficultés de
maîtrise du logiciel, etc.)
Impacts sur l’entreprise :
>
Désorganisation, coûts liés aux erreurs et pertes de temps,
>
Investissement ‘perdu’ dans un logiciel qui s’avère mal ou non adapté aux tâches
à effectuer,
>
Apparition de risques psycho-sociaux, climat social se détériorant, etc.
Impacts sur l’utilisateur :
>
Fatigue cognitive,
>
Stress,
>
Démotivation, etc.
95
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
Brève bibliographie et références
•
E. Brangier. L'ergonomie des logiciels : approche psycho-ergonomique de
l'interaction homme-ordinateur. Note bibliographique.
•
C.Bastien & D.Scapin. La conception de logiciels interactifs centrée sur l’utilisateur :
étapes et méthodes.
•
J.M. Burkhardt & J.C. Spérandio. Ergonomie et conception informatique.
•
Normes AFNOR
•
Site web Ergolab
96
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
L’encadrement de la cybersurveillance par la CNIL
Des moyens de cybersurveillance à encadrer
Les fonctionnalités de l’ePV nécessitent une sécurisation et une authentification de
l’utilisateur. Cette identification conduit donc à la traçabilité individuelle de leur
utilisation. En outre, le terminal est équipé d’un GPS qui peut permettre la géolocalisation,
et donc un suivi des déplacements (lieu et temps mémorisables).
Toutes ces fonctionnalités renforcent les enjeux de cybersurveillance des salariés. En la
matière, le Code du travail et la CNIL fixent le cadre.
La loi « Informatique et Libertés » du 6 janvier 1978 modifiée par la loi du 6 août 2004 est
applicable dès lors qu’il existe un traitement automatisé ou un fichier manuel (c’est-à-dire
un fichier informatique ou un fichier « papier ») contenant des informations relatives à des
personnes physiques.
En effet, ces applications enregistrent de nombreuses informations à caractère personnel sur
les clients mais aussi sur les salariés. La loi Informatique et Libertés fixe un cadre à la
collecte et au traitement de ces données afin de les protéger, dans la mesure où leur
divulgation ou leur mauvaise utilisation est susceptible de porter atteinte aux droits et
libertés des personnes, ou à leur vie privée.
L’article L1121-1 du code du travail (anciennement L120-2) précise également que « la mise
en place d’un dispositif de contrôle des salariés ne doit pas conduire à apporter aux droits et
libertés des personnes de restrictions qui ne seraient pas proportionnées au but recherché et
justifiées par l’intérêt légitime de l’entreprise ».
Le respect, par les entreprises et administrations, des règles de protection des données à
caractère personnel est un facteur de transparence et de confiance à l’égard des salariés. C’est
aussi un gage de sécurité juridique pour les employeurs qui sont responsables de ces
traitements informatiques et de la sécurité des données personnelles qu’ils contiennent. Ils
peuvent ainsi voir leur responsabilité, notamment pénale, engagée en cas de non-respect des
dispositions de la loi.
97
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
Le rôle de la CNIL et les obligations à respecter
La CNIL (Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés) est l’autorité chargée
d’assurer le respect des dispositions de la loi « Informatique et Libertés ».
Elle a ainsi précisé dans quelles conditions des dispositifs de contrôle de l'activité des
salariés peuvent être mis en place (fichiers du personnel, badges, pointeuses,
autocommutateurs, vidéosurveillance...).
Concernant ces outils de cybersurveillance, l’employeur doit au préalable consulter les
représentants du personnel et informer les salariés. Ces dispositifs doivent également être
déclarés à la CNIL.
L’article L2323-32 du code du travail (anciennement L 432-2-1) stipule que : « Le comité
d'entreprise est informé et consulté, préalablement à la décision de mise en œuvre dans l'entreprise,
sur les moyens ou les techniques permettant un contrôle de l'activité des salariés ». Les
employés doivent, dans tous les cas de figure, être informés individuellement de l'existence
des traitements contenant des données personnelles les concernant par note, affichage,
publication dans le journal interne, courriel.
Pour faciliter l’application de cette Loi en entreprise, lors de sa refonte en 2004, il a été
institué, la possibilité de désigner dans chaque entreprise concernée un correspondant à la
protection des données ou Correspondant Informatique et Libertés (CIL) Il a vocation à
être un acteur interne et un relais incontournable de la culture « informatique et libertés ». Sa
désignation est facultative, mais exonère de déclaration la plupart des fichiers.
Un renforcement de l’encadrement de la géolocalisation
La CNIL vient de renforcer l’encadrement de la géolocalisation selon la nouvelle norme
simplifiée n°51 de juin 2015. Ainsi la durée de conservation des données est limitée à 2 mois,
l’activation d’un dispositif antivol ne peut intervenir que lorsque le vol constaté, le contrôle
des km parcourus est impossible, mais l’employeur peut surveiller les désactivations du
dispositif de géolocalisation par les salariés. Le nombre de destinataires pour les données
collectées doit être restreint à des « personnes qui dans le cadre de leur fonction peuvent
légitimement avoir connaissance des données au regard de la finalité du dispositif ». Et
l’entreprise doit préserver la sécurité des données et empêcher l’accès par des tiers. Enfin le
suivi du temps de travail est uniquement réalisable s’il n’est pas possible par d’autres
moyens.
98
SECAFI CTS / RATP SEM-CML – Rapport d’expertise CHSCT ePV – 16.10.2015
Glossaire
A3C Alternance courte au contrôle classique
AFM Amende Forfaitaire Majorée
AM Agent de Maîtrise
AMOA Assistant du Maître d’Ouvrage
AT Accident du Travail
BIF Bulletin d’Indemnité Forfaitaire
CIC Centre d’Information du Contrôle
CML Commercial (Département)
M2E Maintenance des Equipements et
systèmes des Espaces
MCO Maintien en Condition Opérationnelle
MDT Maîtrise Du Territoire
MOA Maître d’Ouvrage
MOE Maître d’Œuvre
OC Opérateur de Contrôle
OCD Opérateur de Contrôle (métier de
Développement)
COSU AT COmité de SUivi des Accidents
OCQ Opérateur de Contrôle Qualifié
du Travail
OFQ Opérateur Fonctionnel Qualifié
CPP Code de Procédure Pénale
OFQD Opérateur Fonctionnel Qualifié
CSA Contrôle Sécurisation Assistance
(métier de Développement )
CSOM Congé spécial d’ordre médical
PEP Prime d’efficacité personnelle
DDI Dossier de Décision d’Investissement
PVI Procès-Verbal d’Infraction
EAP Entretien d’Appréciation et de Progrès
REX Retour d’EXpérience
ePV PV électronique
RH Ressources Humaines
ETP Equivalent Temps Plein
RPS Risques Psycho-Sociaux
GIS
Gestion
Innovation
Sociale
RRH Responsable Ressources Humaines
(Département)
SCC Service du Contrôle Clientèle (CML)
GPSR Groupe de Protection et de
Sécurisation des Réseaux
SCOR Service et Contrôle Opérationnel des
Réseaux (accord)
IAPR
Institut
d’Accompagnement
Psychologique et de Ressources
SEC Sécurité (Département)
IHM Interface Homme Machine
JUR Juridique (Département)
LDM Lecteur Décodeur Magnétique
LDPC Lecteur Décodeur Portable de
Contrôle
MD Métier en Développement
MO Manager Opérationnel
SEM Services et Espaces Multimodaux
(Département)
SI Système d’Information
SIT
Systèmes
d'Information
et
Télécommunications (Département)
de
SRC Service Relation Clients / CML
STIF Syndicat des Transports d’Ile-de-France
TPE Terminal de Paiement Electronique
OASIS Outils d'Analyse, de Suivi des
Infractions, et de Statistiques
UO Unité Opérationnelle
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