DES BAFFES, DES CONS ET UN DESTIN DE “SORCIER”

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DES BAFFES, DES CONS ET UN DESTIN DE “SORCIER”
danslaville
“RAYMOND” AU KVS
DES BAFFES, DES CONS
ET UN DESTIN DE “SORCIER”
Josse De Pauw est Raymond G.,
un entraîneur de football revenant
sur des moments clés qui ont fait
de sa vie ce qu’elle est…
L’idée est de Manu Riche, documentariste adorateur depuis toujours
d’un “grand petit homme”, les mots sont
de Thomas Gunzig, auteur qui a toujours préféré
les petites histoires dans les têtes que les grandes
histoires officielles, l’interprétation est celle de
Josse De Pauw qui fait revivre par la gouaille et la
gesture l’entraîneur star de football Raymond
Goethals avec une force impressionnante. Les
bruits sont ceux du stade, quand la pression monte
et que le public crie… Le monologue bilingue
truffé de tournures de phrases bizarres, d’associations de mots succulentes, est celui du Raymond
Goethals réinventé par Gunzig et Riche. Mais
“Raymond” qui se joue en ce moment au KVS ne
parle pas vraiment foot et anecdotes de foot, et on
est loin de la biographie sur fond de “ola” et de name-dropping de superstars du ballon rond.
TARZAN, MAIN DE DIEU ET BÉBÉS CHIENS
Dans les coulisses d’un match dont on ne sait rien,
un homme se verse un verre, tranquille, limite désabusé. Il parle à quelqu’un que l’on ne voit pas et
qui n’intervient pas. Dans son costume beurre
frais, comme un général cubain à la retraite, il nous
toise, imperturbable… Raymond est là, sous la
paupière lourde et la main digressive. Ces instants
de calme seront les derniers, car tout de suite commence l’histoire des secrets de son existence. “Je
vais te dire”, commence Raymond… S’ensuit des
souvenirs qui ont finalement fabriqué l’homme et
des théories fabuleuses. La première : “A un moment donné, ça cale, quoi que tu fasses”. Pour le
môme qu’il a été, ça a calé quand son père, méchant homme, lui balance une baffe injuste. La
Josse De Pauw
incarne Raymond
Goethals dans
toute sa démesure et son
parler brusseleir.
© Danny Willems
deuxième (qui ne fonctionne que pour les hommes,
s’excuse-t-il) : le moteur de tout, c’est une belle
fille, “rien de plus beau qu’une belle fille” même si
elle peut être “conne comme une chèvre”. Ici, c’est
Tineke, dont Raymond va s’emplir la tête à se la
faire tourner dans le sens inverse à celui imprimé
par la gifle… Et comme la 3e théorie énumère que
“tout le monde a du cinéma dans le cœur”, c’est Johnny Weissmuller interprétant Tarzan qui fait son
entrée dans les explications parfois fumeuses, parfois tactiques d’un Raymond au soir de son existence mais à son affaire avec ces quelques heures
(supposées) qui auront donné le sens à sa vie.
Josse De Pauw, dans cet univers à la Hugo Claus,
n’est plus un vecteur, il devient ce Raymond-là,
tout en exagération, tout en deux langues qui se
confortent et se comprennent sans problème, on
devient naturellement belge à écouter cette
prouesse ! Et c’est vrai qu’il excelle Josse De
Pauw, tout le temps et aussi quand il raconte la demi-finale de la Coupe du Monde de 1986 avec les
arbitres qui n’ont rien vu et la “main de Dieu” de
Maradona… A nous faire regretter que le texte
n’ait pas un peu plus investigué dans cette voie.
Truculentes, sans pause, les 100 minutes de “Raymond” se font un peu longues sur la fin et ceux qui
connaissent bien Raymond Goethals manqueront
peut-être de matière. Mais le sens du détail travaillé dans ce monologue devient une poésie du
quotidien. Comme ce mur de cuisine “Celui où ta
mère accroche toujours les calendriers avec les
photos de bébés chiens”, comme cet enfant qui
pèse “dans les 45 kg et c’est que des os”. Comme
ce collègue du père, “M. Pannekoek ou Snottebel,
je ne sais plus”, qui était “encore plus con que ça”
et dont le fils était “un con. Un con avec des poils”
qui va pourtant jouer un rôle décisif dans l’histoire
de Raymond… Ce qui fait énoncer au Sorcier sa
dernière théorie en forme de pirouette absurde :
“La vie parfois, te fait des blagues… mais elle a un
humour bizarre”. Portée par Josse De Pauw, elle a
quand même valu le coup cette vie-là…
E.W.
Jusqu’au 10/03, au KVS, 9 Quai aux Pierres de Taille – 1000 Bruxelles. www.kvs.be (et en
tournée en Flandre ensuite)
5E ÉDITION POUR L’OFFSCREEN
l’Offscreen Film Festival fait
assurément
partie
de
ceux-là.
A une époque où le
septième art n’a jamais autant misé
sur les blockbusters, les remakes ou les
suites, où le formatage ambiant a du coup tendance à
surconsidérer un film original – le succès mondial pour
“The Artist” en serait une illustration –, c’est une
aubaine que des Festivals
existent pour nous ramener à
l’essence-même du cinéma.
Au vu de la programmation
de sa cinquième édition,
Articulé en dix cycles dans
cinq endroits (Cinematek, cinéma Nova, Bozar, cinéma
Rits et Beursscchouwburg),
l’Offscreen nous suggère 70
séances pendant trois grosses semaines. Films indépendants, hors circuit voire
trashs, classiques cultes et
courts métrages étranges,
composent un menu très particulier, mais où chacun
pourra y trouver son bonheur.
Parmi les quelques avantpremières, on épinglera le th-
riller vintage “Keyhole” (7 et
10/3, Nova), avec Isabella
Rossellini (photo). Impossible, dans la section Home
Sweet Home, de passer à
côté du “Locataire” (8/3, Cinematek) de Roman Polanski, avec Isabelle Adjani,
du film d’épouvante “Poltergeist” (10/3, Cinematek) ou
du mémorable “Inferno”
(24/3, Nova) de Dario Argento. Spécialisée en courts
métrages animés surréalistes, Suzan Pitt viendra spécialement de Californie évoquer son œuvre (8/3, Nova).
Tout comme le fera d’Italie
l’un des grands maîtres de
l’horreur, Ruggero Deodato,
présent pour la projection de
cinq de ses films, dont “Cannibal
Holocaust”
(17/3,
Nova), qui servit de rampe de
lancement au “Blair Witch
Project”. Adepte du polar,
Umberto Lenzi fera lui aussi
le déplacement d’Italie du 22
au 24 mars pour présenter,
entre autres, “Cannibal Ferox” (23/3, Nova), film qui fut
interdit dans une trentaine
de pays en 1981, et “Paranoia
(Orgasmo)”
(24/3,
Nova), qui fit scandale aux
USA en 1969.
DAVID HAINAUT
Du 7 au 25 mars à la Cinematek, le Nova, le Bozar, le
Rits et le Beursschouwburg. Prix variables selon les
cinémas. www.offscreen.be
UN BAL
MODERNE,
MODULAIRE,
POPULAIRE !
Le Bal moderne fait son
grand retour à La
Tentation et pour ce
faire, il invite le Lindy
Hop, une danse swing
qui a vu le jour à la fin
des années 20 mais
également le bal
populaire reprenant des
danses traditionnelles
issues du répertoire
folklorique de tous les
pays d’Europe. Les
danses sont conçues
pour n’exclure personne,
même ceux venus sans
partenaire. Bal Modulaire
les 9/03 et 27 /04 à
20h30 à La Tentation, rue
de Laeken, 28 - 1000
Bruxelles. www.latentation.be
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