George Russell - Philharmonie de Paris
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George Russell - Philharmonie de Paris
cité de la musique François Gautier, président Brigitte Marger, directeur général Living Time En 1995, George Russell était invité par la cité de la musique pour recréer, un quart de siècle après son éclosion, la suite Living Time, écrite à l’origine pour le plus fameux de ses anciens élèves, Bill Evans. On y entendait le Living Time Orchestra « croiser le fer » avec une vingtaine d’étudiants des conservatoires de Paris, Aubervilliers et Montreuil. La commande que lui ont faite aujourd’hui la cité de la musique et le Barbican Centre de Londres reste dans la même veine, tout en prolongeant au maximum l’idée d’un concert parcourant les différents styles qui ont marqué son existence. « Ce spectacle, explique George Russell, est inspiré par les thèmes récurrents de ma musique, dont la plupart véhiculent un hommage à fois sophistiqué et ironique à la culture américaine. J’utilise un vaste canevas de musiques pour créer un patchwork : percussions américaines, chansons pop, soul, funk, rap, blues, jazz, musiques classiques européennes et musiques électroniques. » Une aventure partagée, cette année, par plus d’une cinquantaine d’étudiants de la Guildhall School of Music and Drama de Londres et du Conservatoire de Paris. dimanche 8 mars - 16h30 / salle des concerts George Russell All about Rosie (durée : 12 minutes) Stratusphunk (durée : 10 minutes) Vertical Form VI (durée : 42 minutes) entracte Dialogue with Ornette (durée : 18 minutes) American Trilogy (partie finale de l’œuvre) It’s about Time (durée : 25 minutes) (durée : 6 minutes) George Russell, direction Living Time Orchestra Etudiants du Conservatoire de Paris Etudiants de la Guildhall School of Music and Drama de Londres commande de la cité de la musique et du Barbican Centre coproduction cité de la musique, Conservatoire de Paris, Barbican Centre et Guildhall School of Music and Drama (Londres) George Russell George Russell ou les temps du jazz D’une bonne dizaine d’années le cadet de Gil Evans - qui l’a toujours surpassé en notoriété -, le compositeur George Russell jouit pourtant d’un respect et d’une admiration quasiment similaires chez les musiciens qui connaissent son œuvre. Sans doute parce que, comme celle de son aîné, la musique de Russell semble autant faite pour la jubilation du corps - le ressort rythmique - que pour la sensualité de l’âme - l’art de la texture sonore. On sait que George Russell, jeune batteur, céda sa place au sein de l’orchestre de Benny Carter à un certain… Max Roach. Fortement impressionné par le talent de ce « jeune homme » que la cité de la musique vient de fêter en janvier 1998, Russell délaisse de plus en plus la batterie pour la plume, fournissant des arrangements aux formations de Benny Carter ou Earl Hines. Mais Russell n’a pas encore eu la révélation du langage moderne du bebop. C’est la musique de Thelonious Monk qui le pousse à quitter son Ohio natal pour New York. Là il écrit Cubana Be et Cubana Bop pour l’orchestre de Dizzy Gillespie (1946) ; là aussi il fréquente, chez Gil Evans justement, le cercle de jeunes musiciens qui vont dessiner les contours du jazz à venir : Charlie Parker, Miles Davis, John Lewis, Gerry Mulligan… Marqué par Stravinski (A Bird In Igor’s Yard, 1949), l’univers de Russell prend alors son envol avec Ezz-thetic, où se retrouvent Miles Davis, Max Roach et Lee Konitz, trois têtes de série du jazz cool. Devenu l’un des premiers théoriciens du jazz moderne avec la publication de son livre sur le « concept lydien » en 1953 (Le Concept lydien chromatique d’organisation tonale), Russell fait autorité auprès des jeunes musiciens désireux de renouveler leur langage (Art Farmer, Bill Evans) et inspire largement la « révolution modale » de Miles Davis et John Coltrane, à la fin des années 50. Prenant appui sur le cycle des quintes (do, sol, ré, la, mi, si, fa dièse), Russell construit alors une réflexion théorique sur la pan-tonalité, qui tire parti des acquis du jazz moderne autant que de ceux de la musique occidentale du vingtième siècle. C’est à cette époque qu’il écrit deux des œuvres présentées ce soir en première partie : All About Rosie (créé en 1957 pour le festival de la Bradeis University) et Stratusphunk (construit sur l’échelle de « fa lydien chromatique », et créé en 1958), dans la droite ligne de ses 2 |cité de la musique George Russell recherches modales. Beaucoup plus récente, la pièce It’s About Time figure sur l’enregistrement du même nom (chez Label bleu) qui comprend la suite Living Time, donnée à la cité de la musique en 1995. Typique de la dernière manière de George Russell, où la rythmique, puissante et colorée, semble constamment guider la forme de la pièce, et en dicter la structure, distribuant les entrées des pupitres, les interventions des solistes et les constructions des tutti, It’s About Time, qui n’a encore jamais été donnée à Paris, concluera le concert. En fin de première partie, la longue pièce Vertical Form VI (enregistrée en 1977 en compagnie d’un big band suédois) présente le George Russell architecte : « C’est ce que je suis. Je construis des structures. Mon attention se porte sur la manière dont la forme évolue verticalement, et non pas forcément sur l’exposition linéaire, horizontale, de cette forme. La musique est architecture. Les bâtiments s’élèvent - ce sont des formes verticales. » La pièce suivante, Dialogue With Ornette, créée dans le cadre du New England Conservatory de Boston, où Russell enseigne depuis une trentaine d’années, n’avait été donnée jusqu’ici qu’en concert privé. Enfin, American Trilogy témoigne d’une dimension souvent ignorée du compositeur : son sens de l’humour et son amour de la dérision. Cette pièce utilise en effet l’une des chansons de prédilection des troupes américaines pendant la Seconde Guerre mondiale, You Are My Sunshine. Enregistrée en 1962 par son sextette augmenté de la voix de Sheila Jordan (pour le disque The Outer View chez Riverside), et souvent reprise depuis, elle rend compte, dans une joyeuse superposition de tempos et de tonalités, de la distanciation dont fait preuve George Russell face à l’american way of life. Ar naud Merlin notes de programme |3 George Russell biographies George Russell a commencé par le tambour dans la fanfare des Boy Scout Drum and Bugle Corps. Il reçoit ensuite une bourse d’étude qui lui permet de s’inscrire à la Wiberforce University où il se joint aux Collegians, un orchestre comprenant entre autres le saxophoniste et compositeur Ernie Wilkins. A Chicago, il rejoint le Benny Carter Band en tant que batteur, mais est vite remplacé par Max Roach, il se consacre désormais aux arrangements et à la composition, au détriment de la pratique de la batterie. Après avoir entendu le Round Midnight de Thelonious Monk, il part pour New York, où il fait partie d’un cercle de jeunes musiciens, dont Miles Davis et Gerry Mulligan, qui se ras- 4 |cité de la musique semblent autour de Gil Evans pour échanger leurs idées. Russell est hospitalisé pendant seize mois, période durant laquelle, il conçoit l’idée d’un travail théorique très remarqué : Le concept Lydien d’organisation tonale (1953). Après son séjour à l’hôpital, Russell collabore avec Dizzy Gillespie, dans une composition alliant jazz contemporain et rythmes afrocubains : Cubana-be, Cubana-bop. En 1949, sa composition A Bird in Igor’sYard, combinant des éléments des musiques de Charlie Parker et d’Igor Stravinsky, est enregistrée par le big band de Buddy DeFranco. Dans le milieu des années 50, il se lie d’amitié avec le trompettiste Art Farmer et le pianiste Bill Evans, tous deux intéressés par son « concept lydien ». Avec ces derniers, le saxophoniste Hal McCusick et le guitariste Barry Galbraith, Russell forme un sextette dans lequel Milt Hinton et Teddy Kotick jouent la basse tour à tour, et Joe Harris, Osie Johnson et Paul Motian, la batterie. Connus sous le nom du George Russell Smalltet, ils enregistrent en 1956 un album des compositions de Russell : Jazz Workshop, l’un des enregistrements marquants de la décennie. Russell reçoit la commande de la Brandies University pour une œuvre « sérieuse » de jazz, et compose sa suite d’orchestre All About Rosie, avec la participation de Bill Evans. En 1958-59, il enseigne à l’école de jazz de Lennox (Massachusetts). A partir de 1960, il commence à diriger son propre sextette dans la région new-yorkaise. Durant cette période, il enregistre une série d’albums, dont Ezzthetics. En 1964, George Russell Russell effectue une tournée en Europe avec son sextette, se produisant au 1er Festival de Jazz de Berlin, et s’installe en Suède pour cinq ans. Il enseigne alors son « concept lydien » à Stockholm, et se produit en tournée à travers l’Europe avec un sextette de musiciens scandinaves, parfois enrichi d’américains tels que Don Cherry. Il enseigne aussi en Finlande, en Norvège et au Danemark, et se produit avec les orchestres des radios d’Oslo et de Copenhague. En 1969, il retourne aux Etats-Unis pour un poste permanent de professeur au New England Conservatory de Boston. Ce poste lui permet de continuer ses tournées et de se produire occasionnellement avec ses propres formations. En 1986, il visite pour la première fois l’Angleterre avec le big band anglo-américain The Living Time Orchestra. Il reçoit d’autres commandes importantes entre la fin des années 80 et le début des années 90, qui aboutissent à de vastes compositions telles que Uncommnon Ground, An American Trilogy et le gigantesque Time Line pour orchestre symphonique, ensembles de jazz, chœurs, groupes de rock et danseurs, d’une durée de trois heures, composé pour la célébration du 125e anniversaire du Boston New England Conservatory en 1992. La musique de Russell réunit des éléments issus du jazz, du blues et du gospel, avec les techniques propres au sérialisme et à la musique « abstraite ». Il revendique non pas une révolution mais une évolution : les structures du blues et des chansons y sont aussi présentes tout en étant perceptibles au travers de miroirs déformants. Sa rythmique reste toujours très éloquente, et ses récentes productions ont montré qu’il s’est approprié des éléments issus des percussions africaines et du rock, les intégrant à son propre héritage du jazz. Living Time Orchestra Composé d’instrumentistes britanniques et américains, cet ensemble accompagne les tournées de George Russell. L’ensemble est constitué d’un noyau de musiciens réunis originellement pour le Contemporary Music Network en 1986, et qui pratique maintenant régulièrement la musique de George Russell. flûte Hiroaki Honshuku trompettes Stanton Davis Guy Barher Stuart Brooks notes de programme |5 George Russell trombone ténor Dave Bargeron Etudiants du Conservatoire de Paris saxophone ténor, clarinette violons cors Maria Castro Balbi Tristan Benveniste Johan Renard Joan Rouzaud Karen Brunon Emilie Langlais Ane Matxain Elena Pease Vanessa Ugarte Arnaud Roulin Reynald Parent Thomas Savy trombone basse Richard Henry saxophone alto Chris Biscoe saxophone ténor Andy Sheppard saxophone baryton, clarinette basse trombones Sébastien Llado Julien Chirol Daniel Zimermann tuba Shinya Hashimoto Peter Hurt altos guitare Claire Bobij Aurore Cany Razvan Popovici batterie, sions contrebasse, basse électrique percussions Mike Walker claviers Brad Hatfield Steve Lodder Frédéric Chapperon Muriel Gastebois Frédéric Pallem basse électrique flûte Bill Urmson Sarah Louvion batterie clarinettes Billy Ward Mathieu Fèvre Sébastien Aubrun percussion Pat Hollenbeck percus- Etudiants de la Guildhall School of Music and Drama de Londres département classique basson Arthur Menrath hautbois saxophone alto Ruth Berresford Adrian Roach Rémi Sciuto cor anglais contrebasse Tom Herbert 6 |cité de la musique Rebecca Hough George Russell basson département jazz Luke Crookes trompettes saxophone alto Douglas Waterston David Musk Alison Neale saxophone ténor harpe Victoria Freestone Rhian Hanson saxophone baryton percussions Martha Kitching Joby Burgess James Gilbert trompettes violons Nick Price Mark Hartley Sophie Dutoit Marc Paquin Annabelle Meare Maike Boldermann Caroline Clarke Lucy Curnow Ole Lindeberg Dominic Griffiths Alexandra Johnson Oliver Langford Hedvig Oftedahl Patricia Treacy trombone Tim Wate piano Ralph Weedon batterie Andrew Bratt altos Niamh Ni Chonaill Cedric Lebonnais violoncelles Siri Hilmen Sybille Hentschel Clemence Matthey Fanny Bray Tom Roff technique Olivier Fioravanti régie générale Jean-Marc Letang Christophe Gualde régie plateau Marc Gomez régie lumières Didier Panier régie son notes de programme |7