éditorial - Enjeux internationaux

Transcription

éditorial - Enjeux internationaux
Exit
E…x internationaux !
PAR ANNE-MARIE IMPE
Rédactrice en chef
Peut-on s’approprier des mots comme liberté,
égalité, enjeux, défis, questions ou altermondialisation ? Le droit des marques est éminemment
complexe, varie d’un pays à l’autre et a beaucoup
évolué au cours des dernières décennies. Il n’est
donc pas possible de donner une réponse simple et
unique à cette question. Pour certains de ces mots,
et sous certaines conditions, c’est parfaitement
possible, même s’il s’agit de mots génériques, ne
résultant d’aucune création intellectuelle.
Il suffit de les déposer, en arguant d’un motif
précis, et de payer la somme nécessaire. Vous en
devenez alors le détenteur exclusif. En tant que
patron de presse, vous pouvez par exemple
déposer un mot comme titre de magazine, pour
peu qu’il n’ait pas encore été utilisé à cette fin,
et en verrouiller tout emploi ultérieur.
Vous me direz qu’il n’est que prudent, normal, logique, pour un directeur de publication
de déposer le titre de son journal ou magazine,
afin d’éviter que d’autres ne se l’approprient, ne
lui fassent concurrence ou n’installent une confusion possible entre leur titre et le sien. C’est
vrai. Ce qui est plus difficilement compréhensible, par contre, c’est qu’il n’y ait parfois pas
que le mot lui-même qui soit bloqué, privatisé,
mais aussi, toutes ses déclinaisons combinées.
C’est exactement ce qui nous arrive à Enjeux
internationaux! La combinaison de ces deux mots
n’était pas déposée comme titre de magazine
(nous l’avions bien sûr vérifié), mais une société
française avait déposé « ENJEUX ». Et bien que
cette publication ne traite nullement ni de questions internationales, ni même d’actualité, mais
appartienne à la presse professionnelle française,
ses propriétaires nous ont adressé une « mise en
demeure de cesser immédiatement l’usage du signe
‘ENJEUX internationaux ’ à quelque titre que ce
soit en France et au Benelux ». Et nous ont par
ailleurs informés qu’ils avaient « consenti une
licence des marques ‘ENJEUX’ » à un autre groupe
de presse qui a, quant à lui, combiné le mot précité avec deux autres, n’incluant cependant nullement le qualificatif « internationaux ».
Nous mettre en demeure de cesser immédiatement l’usage du titre, alors que notre revue
existe depuis quatre ans, en est à sa seizième
livraison, et que la société détentrice du titre
ENJEUX ne s’était jamais manifestée jusque-là,
nous a pour le moins surpris.
Nous avions à l’esprit la coexistence pacifique
de titres comme Le Courrier de l’UNESCO, le
Courrier de l’Escaut, Le Courrier et Courrier international et n’avions dès lors jamais soupçonné
que le dépôt du mot ENJEUX puisse nous empêcher d’utiliser le titre Enjeux internationaux.
Publiée par une association sans but lucratif,
dotée d’un capital réduit à sa plus simple
expression, notre revue n’a pas les capacités
financières nécessaires pour se lancer dans une
longue procédure judiciaire. Nous avons dès
lors tenté une négociation.
En gage de notre bonne foi, nous avons proposé de changer le nom de notre publication et
son logo, dès la prochaine parution. Nous souhaitions, par contre, publier tel quel, avec son titre
habituel, le numéro 17, qui était prêt à imprimer,
invoquant le préjudice considérable que représenterait l’obligation de trouver dans l’urgence un
nouveau titre et de concevoir un nouveau logo.
A ce courrier pourtant conciliant, nous n’avons
reçu aucune réponse.
Que faire dès lors ? Publier la revue sous son
titre habituel? Nous n’avons pas voulu en prendre
le risque, même si nous sommes convaincus qu’il
n'y a aucune confusion possible entre le titre
Enjeux internationaux et la marque qui nous est
opposée. En extrême urgence (car nous avions
des échéances par rapport à vous, chers lecteurs,
dont le festival Yambi, et il nous fallait donc
imprimer au plus vite), nous avons opté pour :
E…x internationaux , comme exit Enjeux internationaux ! Une solution toute provisoire, puisqu’elle ne sera utilisée que pour ce seul numéro.
La suite de l’histoire ? Elle reste à écrire, dans
le plus strict respect du droit. Et dans l’esprit
des valeurs exprimées dès l’édito du premier
numéro de la revue, en juin 2003.
éditorial
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