Cneap : Personnel de droit privé de l`enseignement agricole

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Cneap : Personnel de droit privé de l`enseignement agricole
DOSSIER
Interview
Cneap : Personnel de droit privé
de l’enseignement agricole
Philippe Poussin,
Secrétaire général du Cneap
Fep-Mag : Sur quels sujets, les partenaires
sociaux devraient-ils avancer dans les mois
qui viennent ?
Ce dossier veut faire le point sur la situation actuelle du personnel de droit privé de l’enseignement agricole
pour mettre en évidence des revendications spécifiques et celles qui sont partagées par l’ensemble des
personnels de droit privé de la fédération. Une enquête a été renseignée par 192 salariés,
ce dossier en donne les principaux enseignements.
Terrain d’exercice
Réunis au sein du Conseil national de l’enseignement
agricole privé (Cneap), 218 établissements agricoles
scolarisent 51500 élèves et étudiants de la
quatrième à l’école d’ingénieurs, 4000 apprentis,
et 22000 stagiaires adultes.
Ces établissements proposent des formations
initiales sous statut scolaire ou par apprentissage
conduisant aux diplômes du Ministère de l'Agriculture
(Maaf) ou pour certains de l'Education nationale
et de la formation continue pour adultes.
Chaque établissement est dirigé par un chef
d’établissement et sous la responsabilité d’une
association ou d’un organisme responsable. Ces
établissements privés relevant du ministre de
l'agriculture sont liés à l’État par un contrat en
application de la loi du 31 décembre 1984 dite
«loi Rocard» différent des contrats “loi Debré”
de l’enseignement général ou technique. La
plupart des établissements d’enseignement
privé appartiennent au réseau catholique (d’autres
dépendent de l’Union nationale rurale d’éducation
et promotion, dite Unrep et on compte deux
établissements protestants).
Les personnels
Selon les données fournies par l’institution, en
2013, plus de 6 000 salariés (dont 61 % sont des
femmes) œuvrent dans ces établissements
exerçant des fonctions d’entretien, de restauration,
d’administration et d’éducation. 40 % de ces
salariés sont des personnels administratif ou
technique (Pat), 30 % des personnels de vie
scolaire (PVS) et 25 % des formateurs en formation
continue et/ou en apprentissage (formateurs et
enseignants de droit privé). Ces 6000 salariés se
répartissent en 3745 équivalents temps pleins.
Deux enquêtes, l’une élaborée par l’institution
en 2010 auprès de 65 établissements et l’autre
réalisée par la Fep-CFDT en 2012 auprès de 260
salariés établissent autour de 40 % le nombre
de salariés à temps partiel. L’enquête CFDT précise que 19 salariés sur les 260 sondés sont à
temps partiel imposé, soit 7 % d’entre eux.
L’ancienneté moyenne est de 10,1 années. Cette
valeur est sensiblement la même pour toutes les
catégories exceptée celle des directeurs adjoints
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Février 2014
LES CONSTATS RÉVÉLÉS PAR L’ENQUÊTE
DE NOVEMBRE ET DÉCEMBRE 2013
Conditions de travail
Un salarié sur deux, estime que ses conditions
de travail sont moyennes, 40 % bonnes ou très
bonnes et seulement 14 % les qualifient de
mauvaises ou très mauvaises. Pas de quoi trop
s’inquiéter mais lorsque presque deux sur trois
de ces collègues annoncent que ses conditions de
travail se sont dégradées ces dernières années,
cette évolution donne à réfléchir.
pour lesquels elle atteint 18,5 années. L’indice
salarial moyen est de 399 avec une fourchette de
944 pour les chefs d’établissements et 305 (Pat
catégorie III-1) soit un coefficient multiplicateur
de 3,1. La moyenne d’indice pour les Pat est de
347, pour les PVS de 344 et 414 pour les formateurs. Ainsi peut-on estimer autour de 1610 z
brut la rémunération moyenne mensuelle pour
un temps complet avec une ancienneté de
10 ans, soit 1,13 fois la valeur du Smic.
Les principales raisons citées pour cette dégradation
sont le manque de considération, puis la charge
de travail trop importante. D’autres critères sont
classés de façon décroissante, la mauvaise ambiance
au travail, les effectifs insuffisants, les tâches
trop diversifiées, la formation insuffisante, la
pression de la hiérarchie, heureusement le
harcèlement est placé en dernière position.
Les textes sur les obligations de service non
appliquées pour les enseignants de droit privé,
et les salaires trop bas pour l’ensemble des
salariés sont aussi des facteurs principaux de
dégradation des conditions de travail. L’évolution
du comportement des élèves rend plus difficile
l’exercice du métier. En effet, pour les PVS, il ne
s’agit pas seulement d’exercer une autorité
mais il faut aussi savoir animer, résoudre des
problèmes de groupe. Pour les Pat, les élèves
Classement des revendications
prioritaires
2
1
3
4
5
1. Evolution salariale
2. Meilleure reconnaissance du travail
3. Evolution du poste de travail
4. Meilleure reconnaissance des formations
5. Une plus grande mobilité professionnelle
ne respectent pas toujours le matériel et ne sont
pas toujours suffisamment sanctionnés. Les
formateurs soulignent la précarité de leurs
contrats. Il est alors difficile de travailler sereinement.
Relations avec la hiérarchie
Une majorité de personnels (56 %) juge les
relations très bonnes ou satisfaisantes avec le
chef d’établissement. Mais évidemment cela signifie
que 44 % les trouvent moyennes ou mauvaises…
Et les entretiens annuels d’activité et de
développement (EAAD) conçus pour favoriser la
relation entre salarié et employeurs ne semblent
pas avoir rempli leur rôle.
En effet, 28 % des salariés signalent que cet entretien
obligatoire qui devrait être annuel n’est pas organisé
dans leur établissement. Parmi les réponses
négatives plus de la moitié signalent ne pas
connaître ce dispositif ou soulignent le manque
de temps à y consacrer brandi par le chef d’établissement. Et lorsque cet entretien a lieu, près
d’un salarié sur deux déclare ne pas savoir ce que
celui-ci a permis en quoique ce soit de mettre en
lumière. L’autre moitié se partage encore en deux
parties égales, l’une signale une amélioration de
ses relations avec le supérieur hiérarchique et
l’autre s’inquiète d’une dégradation à l’issue de
l’entretien…
Quel que soit le métier exercé, tous les salariés
revendiquent avec insistance plus d’écoute et de
considération de la part de la hiérarchie. Beaucoup
réclament plus d’échanges avec leur direction
pour que celle-ci connaisse mieux leur travail.
Pour les formateurs, il faut remettre l’humain au
cœur de la formation. Des PVS demandent que
tous les salariés soient sur le même pied d’égalité.
Evolution de poste durant
ces trois dernières années
44 % des réponses sont positives, elles citent la
transformation d’un CDD en CDI, l’augmentation
de responsabilités, le recentrage des modules
d’enseignement, plusieurs personnels de vie
scolaire (PVS) sont passés d’éducateurs de vie
scolaire (EVS) à responsables de vie scolaire (RVS).
P.P : Deux sujets dominent aujourd’hui les
négociations en cours dans notre Commission
paritaire nationale (CPN). D’abord, la révision
des conventions collectives, il faut les faire évoluer
vers une convention collective unique (CCU). Le
projet de la CCU a été amorcé il y a pratiquement
dix ans et il est temps de le finaliser. Les partenaires
sociaux ont acté les dispositions communes et
les réflexions sur les dispositions spécifiques
aux grandes catégories de métiers présents
dans nos établissements sont en cours. Les
partenaires ont décidé de procéder à l’identification
de ces métiers et de les classer. Je suis très
confiant dans la poursuite de ces travaux, nous
sommes tous décidés à moderniser les dispositifs
contenus dans les actuelles conventions collectives,
mais il est nécessaire que les partenaires sociaux
s’entendent sur ce que signifie «moderniser». Le
second sujet concerne la mise en place des
dispositions prévues par la Loi de sécurisation
de l’emploi et principalement : la complémentaire santé ainsi que la question de la limite du
temps partiel désormais porté à 24 h hebdomadaires.
Nous ne sommes qu’au début de nos discussions
qui devront être achevées courant 2014. Concernant
la complémentaire santé, plusieurs difficultés
se posent, tout d’abord la petitesse de notre
réseau et du nombre de personnes concernées,
la nature du panier de prestations proposées,
les ayants droits ainsi que d’éventuelles options
accessibles aux personnes et enfin, la question
du choix des organismes dans le cadre limitatif
fixé par la loi. Il y a ensuite, la question du temps
partiel qui est redoutable parce qu’elle peut
apparaitre comme «non négociable». En fait,
il existe des situations très diverses dans les
établissements et beaucoup de salariés travaillent
actuellement sur des temps très partiels : les
formateurs, les personnels de droit privé ayant
une activité temps plein de droit public et
d’autres catégories travaillant pour plusieurs
employeurs. Les partenaires sociaux doivent
donc, avec réalisme et pragmatisme, analyser
ces différentes situations et en déduire un
accord de branche qui satisfasse tout à la fois
l’esprit de la loi de sécurisation et les spécificités
propres à nos établissements. Au-delà de ces
deux thèmes d’actualité, c’est une réflexion plus
en profondeur sur la gestion des ressources
humaines (GRH) et la progression des carrières
qui est à construire. C’est dans ce cadre que se
situe également la négociation annuelle obligatoire
(NAO).
Fep-Mag : Quelles relations le Cneap
entretient-il avec les organisations syndicales ?
P.P : En toute franchise, les relations entre le
Cneap et les organisations syndicales peuvent
réellement s’améliorer ! Sans langue de bois, il
existe une méfiance réciproque entre le collège
salarié et le collège employeur. Chacun ayant le
sentiment de ne pas être compris par l’autre ;
chacun pensant que l’autre ne peut pas ou ne
veut pas comprendre les points de vue qu’il défend.
On manque ainsi d’ambition dans ce qui pourrait
être entrepris, mais également de détermination
dans la conclusion d’accords. Comment reconstruire
cette confiance indispensable à la réussite du
dialogue social ? En affichant un courage politique
qui part de l’idée simple que conclure un accord
c’est abandonner une partie de ce qu’étaient les
revendications ou les attentes de départ et
l’assumer devant les mandants que l’on représente.
Ceci vaut pour le collège employeur et… pour le
collège salarié !
Fep-Mag : Comment le Cneap aide-t-il les chefs
d'établissements à mettre en place une vraie
gestion des ressources humaines dans les
établissements ?
P.P : La GRH est une priorité parce que l’animation
d’une communauté éducative est une mission
essentielle d’un chef d’établissement. De fait, si
une démarche intuitive peut être acceptée dans
un premier temps, il existe des «techniques»
qu’il faut acquérir. Dans le cadre de la formation
initiale des chefs d’établissement, puis de leur
formation continue, l’accent est mis sur ce sujet.
Le partage d’expériences entre pairs est également
important. Un excellent exemple est la mise en
place des entretiens annuels d’activité et
de développement (EAAD). Une GRH bien
conduite ne peut se faire seule. Le dialogue
social devient alors non seulement une obligation
légale, mais un levier pour faire progresser les
conditions de réalisation de la communauté
professionnelle au sens où l’entend désormais
le statut de l’enseignement catholique. Le statut
est fortement inspiré de l’enseignement social
de l’Eglise qui reconnait le rôle de chacun et en
particulier celui des syndicats.
Ceux-ci doivent prendre leur part de responsabilité là
où ils sont et dans le respect de leurs prérogatives,
dans la perspective de servir le «bien commun»
qui l’emporte sur le «mieux des parties».
En toute honnêteté, c’est cela qui est difficile.
Une grande partie de la culture commune n’est
pas dans cet esprit-là.
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D O S S I E R Cneap : Personnel de droit privé de l’enseignement agricole
Suite de la page 9
Des Pat se sont vu proposer un temps plein et
plus de responsabilités. Mais pour l’autre moitié,
les changements plutôt négatifs sont liés à la
nécessité de travailler plus rapidement, à la
surcharge de travail, à cause notamment de
l’accueil de groupes dans l’établissement. Enfin,
certains signalent que la stabilité et le peu
d’évolution de l’offre de formation ne permettent
guère une transformation du profil des postes.
Cependant, on remarque que 78 % des salariés
souhaitent voir leur poste évoluer avec de
meilleures conditions matérielles (50 %), plus
de responsabilités (49 %) et plus d’autonomie
(29 %) tout en regrettant que la hiérarchie ne
prenne pas assez en compte l’acquisition de
compétences par l’expérience professionnelle.
Les attentes des personnels
Témoignage : M. H. Vauthier directrice à Touscayrats (Midi-Pyrénées)
Après avoir enseigné pendant 13 ans,
Marie-Hélène Vauthier devient directrice d’un
établissement agricole privé sous contrat.
Elle occupe cette fonction depuis 25 ans aujourd’hui.
Fep-Mag : Quelle a été votre démarche lors de votre
prise de fonction ?
M.H. Vauthier : Comme je suis une ancienne
enseignante, j’ai toujours gardé à l’esprit que
l’élève était au centre et qu’il fallait privilégier la
pédagogie. La gestion de l’établissement doit
découler de la pédagogie et non l’inverse. C’est ce
qui m’a motivée avant tout, même si au départ
l’équipe pédagogique aurait préféré me voir impliquée
seulement dans l’administratif et pas dans la pédagogie.
Fep-Mag : Comment voyez-vous la situation des
personnels de droit privé ?
MHV : Quand je suis arrivée, l’établissement était
en difficulté financière. Pour démarrer on a utilisé
beaucoup de contrats aidés, progressivement ils
ont été fidélisés en CDI. J’en étais satisfaite. Mais
aujourd’hui, la pression ne cesse de monter et les
moyens s’amenuisent. J’ai l’impression d’un retour
en arrière irréversible. Quand un personnel de droit
privé s’en va, il faut que je le remplace par un
contrat aidé, ce qui me dérange, c’est que la perspective d’un emploi pérenne disparaît, on encourage
la précarité. Je peux prendre pour exemple le poste
d’une secrétaire que je souhaiterais garder. Je ne
peux la faire basculer sur un CDI, aujourd’hui le
système m’oblige à la remplacer par un contrat aidé
lorsqu’elle arrivera au terme de son contrat. Ce
n’est pas normal.
Fep-Mag : Comment organisez-vous la gestion de
votre établissement ? Estimez-vous que les salariés
de votre établissement sont assez nombreux,
formés, et suffisamment payés ?
MHV : Au début, je parvenais à distinguer les deux
budgets, budget administratif et budget pédagogique
de l’autre, je constate de plus en plus que je
grignote sur la partie administrative dans le but de
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ne rien retirer au pôle pédagogique. C’est pourquoi,
les moyens pour recruter s’amenuisent. De plus, on
demande au personnel administratif de faire de
plus en plus de choses qui nécessitent de se
former. Les formations ne sont hélas pas assez
régionalisées. Les personnels de droit privé sont
vraiment les parents pauvres tant sur le plan des
contrats que nous pouvons leur proposer que sur le
plan des formations à leur offrir.
Fep-Mag : Quels sont les atouts spécifiques à un
établissement Cneap et quels sont les principaux
obstacles à vaincre ?
MHV : Les établissements publics et les établissements
d’enseignement privé n’ont pas les mêmes moyens
d’exercice. On envie tous la position de l’autre. Je
dois dire que je ne leur envie que les moyens.
Quand on est dans un Crea à la Draaf, on remarque
que nous sommes toujours les derniers à être
servis. L’Administration défend trop systématiquement
les établissements publics. Par ailleurs les établissements de l’Education nationale ou du public sont
excessivement contraints sur le plan pédagogique,
nous, nous avons la chance d’avoir une grande
liberté d’action, nous sommes autonomes et notre
situation est là, très enviable.
Fep-Mag : Quelle difficulté rencontrez-vous
aujourd’hui ?
MHV : L’accueil des élèves en situation de handicap. En 2005, la loi paraissait généreuse, il s’agissait d’intégrer tout le monde mais en supprimant
les classes spécialisées, tout a été supprimé, y compris les moyens. Nous n’avons pas les moyens de
suivre les familles et les enfants dans de bonnes
conditions. Soit il n’y a pas de moyens, soit il faut
cesser l’hypocrisie !
Nous avons deux élèves autistes et d’autres élèves
qui ont droit à des AVS. L’année dernière, cela avait
bien fonctionné. Ces enfants ont besoin de continuité, ils construisent des relations de confiance,
cette année, il a été excessivement difficile de
conserver ces personnes car les AVS devaient être
embauchées en contrat aidé. Il a fallu rompre le
contrat actuel et tout faire auprès de pôle emploi
pour pouvoir poursuivre avec l’un de nos AVS. On
se demande parfois où est le bon sens ? Nous
avons aussi une jeune sourde en BTS, la Draaf était
«sans ligne budgétaire» pour accompagner cette
étudiante pendant ses examens, avec l’aide de la
famille nous espérons débloquer la situation.
Fep-Mag : Comment qualifieriez-vous le dialogue
social dans votre établissement. Comment établir
un vrai dialogue social au sein d’un établissement ?
Auriez-vous des pistes à proposer ?
MHV : Mon objectif est de maintenir une relation
permanente de confiance. C’est mon sentiment.
Tout se passe bien, nos échanges sont clairs,
directs, transparents. Nous avons des délégués du
personnel et un délégué syndical.
Fep-Mag : Avez-vous l'occasion de signer des
accords avec les organisations syndicales dans
votre établissement ? Si oui, sur quels sujets ?
MHV : Je ne signe pas d’accords d’entreprise.
D’ailleurs, personne ne me l’a demandé. Je préfère
travailler sur des textes de référence applicables
par tous. Créer des accords spécifiques me semble
bien compliqué. Les négociations sur le plan national
me paraissent aller dans le bon sens. Les salariés
de droit privé me semblent pris en compte. Attention
toutefois à ne pas nous imposer des mesures
applicables essentiellement dans les grosses
entreprises, nous sommes des petites structures.
Demain, on ne voudrait pas avoir à tout externaliser…
Nous préférons former et travailler avec notre
propre une équipe.
Il me semble qu’il faudrait avancer sur l’élaboration
de la convention collective unique. Un salarié peut
parfois aujourd’hui dépendre de plusieurs conventions
collectives puisqu’il cumule plusieurs fonctions.
J’ai quelqu’un dans mon établissement qui reçoit
trois fiches de paie différentes. Il faudrait vraiment
parvenir à simplifier tout cela.
Pas de scoop, la priorité des priorités c’est
l’évolution de salaire !
Viennent ensuite, l’égalité, la meilleure
reconnaissance du travail, l’évolution de
poste, la dé-précarisation entre autres pour les
formateurs, la prise en compte des formations. Il
est intéressant de constater que les salariés ne
cherchent pas à changer d’établissement, la
mobilité professionnelle est de loin la dernière des
préoccupations.
Le dialogue social
Seulement un salarié sur quatre parmi ceux qui
ont répondu à notre enquête, s’estime bien informé
de ce qui est actuellement négocié par le Cneap
avec les partenaires sociaux. Il est vrai que 69 %
des collègues interrogés ne sont pas syndiqués.
A peine 40 %, savent qu'une convention collective
unique (Pat/PVS/enseignants/formateurs) est
en train d'être discutée alors que cette négociation
est ouverte depuis des années et seulement 33 %
savent que la prévoyance va changer mais, c’est
là, il est vrai, une actualité plus récente. On peut
conclure que l’information auprès des salariés
n’est pas suffisamment relayée. D’ailleurs ceux-ci
sollicitent une information régulière par mail (flashs
spécifiques ou Newsletters) sans oublier l’affichage
en salle du personnel. En ce qui concerne leur
propre action, 61 % se déclarent prêts à se
mobiliser massivement pour faire avancer leurs
revendications mais si 84 % cite la pétition
comme outil de protestation, 50 % envisagent la
manifestation et seulement 29 % évoquent la grève.
LE POINT SUR LES DOSSIERS ACTUELS
Evolution du pouvoir d’achat
Alors que dans la même période, on enregistrait
une inflation de 7 %, de nombreuses catégories
de salariés sont restées à un niveau d’évolution
inférieur compris selon les catégories entre
2,3 % pour les Cat II-2 et 6,5 % pour les Cat II-1.
C'est la raison pour laquelle la Fep-CFDT s'était
opposée à l’accord de 2012. Tous les salariés
n’avaient pas été concernés par les augmentations
salariales qui sur l’ensemble des grilles
représentaient un peu plus de 1 %. La forte
inflation sur la période de 2009 à 2013 avait
provoqué une forte érosion du pouvoir d’achat,
pour beaucoup, malgré l’évolution de l’ancienneté.
En s’opposant à cet accord, la Fep-CFDT répondait
au sentiment de ras le bol exprimé par les salariés
qui avaient signé une pétition (750 signatures,
un record dans cette branche) pour l'amélioration
de leur salaire.
Accord applicable en septembre 2013
La Fep a obtenu une hausse des rémunérations
qui bénéficie enfin à tous. Le point Fonction
Publique (PFP) qui permet de calculer le salaire
n’avait pas augmenté depuis juillet 2010. Pour
les salariés du Cneap, la Fep a proposé un coefficient multiplicateur Cneap de ce point. Il passe
donc de 55,5635 à 56,12 z. Cette hausse, encore
insuffisante mais enfin équitable, est applicable
depuis le 1er septembre 2013. Pour la Fep, il s’agit
d’un premier pas que doit poursuivre en ce sens
la négociation engagée depuis cet automne.
Un nouveau dialogue est engagé
Le 23 octobre 2012, la Fep-CFDT a envoyé un
courrier aux Présidents des Fédérations d’employeurs
ainsi qu’au Secrétaire général du Cneap. Dans ce
courrier, nous faisions le constat d’un dialogue
difficile depuis quelques temps et la situation
tendue durant les deux négociations NAO et
Convention collective unique. Ce dossier avait
pour objectif de reprendre l’ensemble des positions
et des propositions de la Fep-CFDT durant ces
cinq ans, d’expliciter le positionnement CFDT en
général et de rappeler la constance de ses
revendications. Depuis, en constatant les trois
accords signés en juin 2013 une certaine
«embellie dans le dialogue social», semble se
profiler. Comme par exemple, l’accord de tous
Le décrochage du point Cneap
les partenaires sur la mise en place d’une
prévoyance nationale. Chaque établissement
jusque-là, avait comme seule obligation, celle
de couvrir ses salariés cadres et non-cadres. Les
différences étaient grandes entre établissements,
régions, et salariés (cadres ou non cadres). Les
deux accords de prévoyance proposés sont
globalement plus intéressants et surtout équitables
entre tous les salariés, sur tout le territoire et
quel que soit le statut.
Les points de blocages actuels
On peut en identifier deux principaux. D’une part
le manque de moyens, de temps de négociation
et de travail dans les commissions paritaires
nationales. C’est le cas pour l’écriture de la
convention collective unique qui dure depuis
des années, et aussi pour le traitement de
l’actualité qui s’invite dans l’urgence, comme la
loi de sécurisation de l’emploi (de juin 2013) qui
oblige à négocier sur le temps partiel et la
complémentaire santé !
D’autre part, le manque d’information et notamment
de données sociales indispensables à l’analyse
de la situation de l’emploi, des salaires, ainsi
que des établissements, rendent la négociation
annuelle des salaires difficile.
Conclusion
La situation salariale est tendue mais elle peut
favorablement évoluer avec une responsabilité
accrue de l’ensemble des partenaires, en associant
davantage dans les établissements, les personnels
aux plans de formation, à l’organisation du travail et
à la diminution des temps partiels imposés. Il en
est de la responsabilité des chefs d’établissement.
Au niveau national, il faut accorder aux partenaires
sociaux les outils et la considération nécessaires
au débat et à la négociation. Il en est de la
responsabilité des employeurs. Dans l’écoute,
l’information et l’expression des revendications
des salariés, il en est de la responsabilité de
notre fédération, la Fep-CFDT. Et enfin, dans
l’action collective et l’engagement syndical au sein
d’un syndicat CFDT, il en est de la responsabilité
de chaque salarié !
L’équipe constitutive de ce dossier
Brigitte Cassard, Anne-Marie Jestin,
Jean-Christophe Leblanc, Pierre Houssais,
Maryline Hadjadj, Jean François Bouvrot,
Alain Deboutte, Francis Moreau
11 Fep magazine n° 186 -
Février 2014