Enquête publique

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Enquête publique
Votre contact :
Département Politique générale
Responsables Aménagement
du territoire et Législation
Tel : 081/390.742 ou 743
Email : [email protected]
Namur, le 17 octobre 2013
Monsieur Philippe HENRY
Ministre de l’Environnement, de l’Aménagement du territoire
et de la Mobilité de la Région wallonne
Rue des Brigades d’Irlande, 4
5100 JAMBES
Monsieur Jean-Marc NOLLET
Vice-Président, Ministre du Développement durable
et de la Fonction publique, en charge de l’Energie, du Logement et de la Recherche
Région wallonne
Place des Célestines, 1
5000 NAMUR
DGO4
Rue des Brigades d’Irlande, 1
5100 JAMBES
Par courriel : [email protected]
Objet : EOLIEN – Cartographie de l’éolien en Wallonie – Enquête publique
Messieurs les Ministres,
Madame, Monsieur,
En qualité d’association de protection de la nature, nous avons participé au
processus de consultation des parties prenantes sur le développement éolien en
Région wallonne et rendu un avis d’initiative sur le projet de cadre de référence,
ensuite révisé, actualisé et adopté par le Gouvernement wallon le 11 juillet 2013.
A présent, nous prenons connaissance du projet de « carte positive de référence
traduisant le cadre actualisé, associé à un productible minimal par lot permettant de
développer le grand éolien à concurrence d’un objectif de 3800 GWh à l’horizon
2020 » soumis à enquête publique. Celui-ci amène quelques remarques et réflexions
de notre part que nous tenions à vous partager.
2
1. Quant aux outils
Deux outils sont élaborés à ce stade : un cadre de référence et une carte positive de
référence. Ces deux outils ont valeur indicative, servant de recommandations pour
encadrer le développement éolien en Région wallonne. Pour contrer les défauts du
régime du « premier arrivé, premier servi », le Gouvernement indique avoir la
volonté d’organiser un mécanisme d’attribution « par lots ». Celui-ci devrait être
transcrit dans un cadre décrétal.
Afin de pouvoir connaître clairement les effets de la carte soumise à consultation, il
aurait été préférable de bénéficier au préalable de ce cadre décrétal. Il est, en effet,
difficile de saisir l’utilité de la carte au stade actuel (en l’absence de décret) et de
mesurer l’ensemble des implications de la carte sur le futur système par lots. De
plus, le rapport sur les incidences environnementales (RIE) ne permet pas de se
rendre compte de l’impact environnemental qu’aura la carte elle-même, ni son
découpage en lots.
Si nous nous réjouissons de l’existence d’un tel outil cartographique qui pourrait
permettre de clarifier la situation pour les acteurs de l’éolien, nous émettons
toutefois notre avis sous réserves quant à l’utilité de la carte et son statut.
2. Quant à la méthodologie de la carte
Le dossier méthodologique renseigne Natagora comme source pour les cartes
relatives à l’avifaune et aux chiroptères. Le RIE renseigne également les couches
cartographiques fournies par le DEMNA et Aves-Natagora en 2010. Le RIE signale à
cet effet que ces couches devraient être actualisées et complétées par leurs auteurs,
« celles-ci n’ayant pu être réalisées dans le temps imparti ». Nous tenons à clarifier
l’intervention de notre association dans le cadre de l’élaboration de la carte
aujourd’hui soumise à enquête publique.
Pour rappel, en octobre 2009, notre association propose au Ministre Henry un projet
d’étude nommé « AVEOLE » qui consiste en l’élaboration d’une carte de sensibilité de
l’avifaune aux risques liés aux éoliennes en Wallonie. Aucune suite n’est alors
réservée à cette demande avant le courrier de septembre 2010 par lequel le Ministre
Henry marque son accord formel pour la réalisation du projet AVEOLE qui lui
« permettra de disposer d’un outil supplémentaire d’aide à la décision ».
Malheureusement, la subvention pour la réalisation de ce projet n'est finalement
octroyée qu'en septembre 2013 et ne concerne en fait plus l'élaboration d'une carte
de sensibilité. Elle est désormais centrée sur l'impact environnemental des éoliennes
sur le Milan royal.
Parallèlement, en juin-juillet 2010, Aves-Natagora, en collaboration avec le DEMNA,
transmet à l'ULg/Gembloux des données avifaunes partielles et préliminaires dans
l’unique but alors d’évaluer la capacité d’accueil brute d’éoliennes sur le territoire
wallon. Dans la note explicative accompagnant les données SIG sur les zones
sensibles à l’éolien (sur laquelle se fondent le RIE et la méthodologie), elle précise
ainsi clairement les limites de ces données. Celles-ci sont bien temporaires et
évolutives, préliminaires, incomplètes et complémentaires à d’autres contraintes
comme Natura 2000. Elles ne pouvaient donc en aucun cas être considérées comme
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suffisantes à l’élaboration d’une couche avifaune permettant l’élaboration d’une carte
positive.
S’agissant de données brutes et à défaut de réalisation du projet de carte de
sensibilité de l'avifaune, l’association se dégage de toute responsabilité quant à
l’interpétation des données faite par les auteurs de la carte positive soumise à
enquête publique, quant à la sélection manifeste des données qui a été faite (voir
explications ci-après aux points 4 et 5) et quant au retard pris dans la mise à jour
des couches.
Nous émettons dès lors de vives réserves sur la pertinence de la carte positive.
Le RIE lui-même (pages 54-55) recommande d’ailleurs une mise à jour de ces
couches et reconnaît le risque que cela comporte pour certaines espèces dans l’état
actuel (Milan noir non cartographié par exemple).
En outre, nous regrettons que, même sur demande, les couches vectorielles
("shapefile") des zones positives de la carte n’aient pas été mises à disposition dans
le cadre de l’enquête publique. Celles-ci auraient été utiles et nécessaires à une
meilleure analyse pour formuler nos observations de la manière la plus éclairée
possible. Il y va, en l’espèce, d’un manque de transparence qui contrevient aux
principes de bonne administration. Ces couches vectorielles auraient notamment
permis de comparer les données finales avec les données brutes transmises afin
d’émettre un avis global plus pertinent. La vérification des surfaces totales et
spécifiques annoncées pour chaque contrainte aurait également pu être réalisée, ce
qui est impossible avec les documents mis à disposition dans l’enquête. 1
3. Quant aux territoires exclus
Concernant l’implantation d’éoliennes en zone forestière au plan de secteur, nous
vous rappelons être fortement opposés à l’implantation d’éoliennes en forêt. Ces
dernières constituent souvent les derniers grands espaces naturels d'un seul tenant.
Les défrichements liés à l’implantation d’éoliennes en forêt et à leur accès
contribueraient à morceler ces milieux bien plus riches biologiquement que des zones
cultivées, créant des perturbations supplémentaires pour la faune et la flore
sauvages. Rappelons que l’avifaune est particulièrement abondante en milieux
forestiers (y compris dans certaines forêts résineuses) et que les migrations
s’appuient souvent sur les massifs forestiers qui servent de repères. De même, les
forêts sont l’habitat de certaines espèces de chiroptères pour lesquelles les lisières
forestières constituent des lieux de chasse privilégiés en raison de l’abondance en
insectes. Aucune zone forestière ne peut être considérée comme « pauvre en
biodiversité ». Les forêts résineuses sont également l'habitat de plusieurs espèces
Natura 2000, notamment le Pic noir et la Chouette de Tengmalm. En plus, les lisières
et milieux ouverts (coupes et jeunes plantations) au sein des massifs résineux sont
fréquentés par de nombreuses espèces Natura 2000 comme la Pie-grièche grise, la
Bondrée apivore, le Torcol fourmillier, et pas mal d'autres espèces intéressantes
"non-Natura 2000". Nous ne pouvons donc que déplorer que le productible potentiel
global retenu par le travail de traduction cartographique des critères du CDR prévoit
explicitement de l’ordre de 170 GWh/an pour les extensions en zone forestière.
1
Pour rappel l’article D.16. du Code de l’Environnement prévoit la mise à disposition de l’information
environnementale sous un format particulier, à la demande, lorsque les formats disponibles sont
insatisfaisants.
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Or, ce différentiel de 170 GWh ne semble justifié que pour atteindre l’objectif fixé par
le Gouvernement wallon de 3800 GWh. Quel est le fondement de cet objectif ?
Pourquoi ne pourrait-il pas être revu pour éviter l’atteinte à la zone forestière ? Ou
pourquoi ce différentiel de 170 GWh n’est pas atteint par d’autres moyens (calcul du
taux de réussite en zone de contrainte partielle, type de machine…) ? Les objectifs
en matière d’énergie éolienne doivent pouvoir être atteints sans toucher à la forêt,
feuillue ou résineuse, qui présente toujours plus de potentiel de restauration pour la
biodiversité qu'un champ d'éoliennes.
Par ailleurs, nous nous réjouissons que la carte exclut l’implantation d’éoliennes dans
les territoires sous statuts de protection au sens de la loi sur la conservation
de la nature (réserves naturelles, sites Natura 2000, etc.). Toutefois, comme déjà
signalé, pour assurer une protection effective à ces territoires, il aurait fallu prévoir
une zone tampon dans laquelle l’implantation d’éoliennes est également interdite.
Cette zone se traduirait cartographiquement par un buffer de 200 mètres autour du
territoire concerné voire plus en fonction du cas étudié.
4. Quant aux zones d’intérêt ornithologique
Nous constatons avec satisfaction qu’une attention particulière est apportée aux
Milans, à la Cigogne noire ainsi qu'aux oiseaux des plaines agricoles. Il nous
paraît effectivement important d’attirer l’attention sur ces problématiques spécifiques
par rapport à l’impact éolien sur l’avifaune.
a) Milans
Le Milan royal, espèce figurant dans l'Annexe I de la Directive Oiseaux, est toujours
considérée « à la limite d’être menacée » selon la liste rouge des oiseaux menacés
de l'UICN. En Belgique, si les populations de Milan royal ont récemment progressé en
aire occupée et en effectif, l'espèce est toujours considérée comme « vulnérable »
sur la Liste rouge des oiseaux nicheurs menacés de Wallonie (version 2010). Ceci est
dû à la fragilité de la population dans les régions avoisinantes et à son faible effectif
en Wallonie. Le Milan peut se déplacer jusqu’à 10-15 km de son nid au moment de la
fauche des prés. Les chemins empierrés et les abords nus des éoliennes constituent
un réseau de chasse pour lui. N’étant pas « effrayé » par les éoliennes, le Milan est
par conséquent particulièrement sensible au risque de collision.
En terme de dynamique des populations, si l’implantation des quelques parcs déjà en
activité dans les cantons de l’Est (noyau de population principal du Milan royal en
Wallonie) ne semble pas encore avoir eu d'impact négatif sur l'effectif nicheur de
l'espèce, il faut cependant rester très prudent. En effet, étant donné l’inertie
inhérente à la dynamique des populations des Milans (faible taux de reproduction et
première couvée vers l’âge de trois ans), un effet sur la population (par exemple via
une diminution du taux de survie des adultes) n'est détectable qu'après plusieurs
années. De plus, avec la multiplication des parcs dans son aire de répartition
centrale, un seuil critique pouvant entrainer un impact négatif sur les populations
pourrait être atteint. Il est donc souhaitable de supprimer les zones favorables
cartographiées entre les parcs existants de Steinbach, Butgenbach,
Hunningen et Heppenbach et de passer l’ensemble de ces sites en zone
d’exclusion intégrale (voir carte 1 ci-dessous).
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Pour le surplus, selon notre analyse de la carte positive, la problématique du Milan
royal est globalement bien prise en compte. En effet, 85%2 de l’aire de répartition
des Milans est préservée de tout implantation d’éoliennes. Néanmoins, nous
constatons que 15% de l’aire de répartition de l’espèce est consacrée aux projets
éoliens, et parmi ces 15%, près de 10% de cette superficie concerne des zones
centrales pour le Milan ou des zones de forte sensibilité pour cette espèce (voir carte
1 ci-dessous). C’est le cas, par exemple, des nombreuses zones favorables dans la
région de Gouvy et Saint Vith. Si l’ensemble de ces zones devait être mis en œuvre,
cela entrainerait sans doute un impact sur la population de Milan royal. Tout octroi
de permis dans ces régions ne devrait se faire sans connaître précisément la
localisation des différents nids de Milans et leur distance par rapport au projet éolien.
Carte 1: Délimitation des zones considérées comme favorables aux éoliennes selon la carte
positive et qui sont néanmoins localisées dans des zones noyaux pour le Milan royal. La zone
indiquée par la flèche rouge devrait être exclue de la carte positive et les zones indiquées par
les flèches jaunes devraient faire l'objet d'une attention particulière.
Concernant le Milan noir, comme le reconnaît le RIE, il n’a pas été cartographié faute
de financement dans le temps imparti (voir commentaire sous le point 2). Ceci
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En l’absence de données vectorielles de la carte, l’analyse n’a pas pu être réalisée précisément. Ces
chiffres sont donc donnés à titre indicatif.
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représente un risque pour l’espèce vu qu’elle présente les mêmes enjeux que le
Milan royal (page 55). Il y aurait lieu d’actualiser cette donnée.
b) Oiseaux inféodés aux plateaux agricoles
Il est important d'épargner certains grands plateaux agricoles qui composent un
paysage typique (open field) en Wallonie et accueillent certaines espèces
patrimoniales spécifiquement liées à ces habitats très ouverts (Busards, Vanneaux et
Pluviers). Cette attention particulière doit permettre ainsi de refuser l’implantation de
parcs éoliens dans les zones sensibles et ce, avant même d’envisager la mise en
œuvre de mesures d’atténuation ou de compensation.
En effet, certaines espèces inféodées au milieu agricole ne peuvent pas bénéficier de
mesures de compensation. Même si un grand nombre d'espèces sont influencées
négativement par l'agriculture intensive (disparition des haies, etc...), un petit
nombre d'espèces spécialistes (et menacées à l'échelle européennes) sont justement
favorisées par l'ouverture à l'extrême des milieux: les spécialistes des "steppes
agricoles". Parmi celles-ci, les Vanneaux huppés, Pluviers dorés et Pluviers guignards
qui, chez nous, utilisent surtout ce type d'habitat comme halte migratoire ou site
d'hivernage. La littérature scientifique montre que la construction d'éolienne sur une
"steppe agricole" supprime l'attractivité de l'habitat pour ces espèces (voir
publication en fichier attaché qui démontre (voir figures très visuelles à la fin), par
une étude avant/après qu'il y a bien une perte d'habitat en ce qui concerne le
Vanneau. -> cette perte d'habitat n'est pas compensable par des mesures
d'aménagements à petite échelle. Pour cette espèce (et ses cousins le Pluvier doré et
le Pluvier guignard), seul le maintien de certaines plaines sans éolien pourrait
garantir le maintien de cet habitat particulier (grande plaine agricole très ouverte)).
Autrement dit, l'habitat devient défavorable au niveau du paysage. L'effet est
significatif : disparition des groupes d'hivernants ou de migrateurs. Cet impact n'est
pas compensable, puisqu'il faudrait théoriquement "créer" ailleurs des zones très
ouvertes, ce qui n'est ni faisable ni souhaitable. Les autres zones à proximité sont
souvent elles aussi concernées par des projets éoliens ou sont moins attractives: il
n'est donc pas possible pour ces espèces de recréer des milieux favorables ailleurs.
Concernant le Pluvier guignard, une grande partie de ses zones de halte se voient
ainsi reprise en zone favorable, si ce n'est la partie de la Hesbaye qui est exclue pour
des raisons de contraintes militaires.
L'implantation de parc éolien pourrait également avoir un impact négatif sur la faible
population de Busard cendré et Busard Saint-martin. Une analyse des zones
favorables met d’ailleurs en évidence que plus de 85% de l’aire de répartition du
Busard cendré en Wallonie se trouve au sein des zones favorables à l’implantation
d’éoliennes. On constate, en effet, que les cinq périmètres définis par le GT busard
comme particulièrement favorable aux busards (et qui font l'objet d'une politique de
développement de méthodes agri-environnementales favorables aux busards) sont
déjà concernés par des projets éoliens ou situés en zone favorable.
Nous nous interrogeons donc sur la sélection qui semble avoir été faite parmi les
plateaux agricoles d’intérêt majeur (page 55 du RIE). Certains d’entre eux ont en
effet été placés en zone favorable sans contrainte d’exclusion alors que d’autres ont
été placés en zone favorable avec au moins une contrainte partielle. Ainsi, par
exemple, on ne retrouve pas mention du Plateau du Gerny, pourtant important pour
le Pluvier Guignard en halte (espèce « parapluie » pour d’autres espèces de grande
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culture). Les plateaux de Thuin sud et de la Hesbaye entre Hannut et la Mehaigne
(importants à la fois pour les busards et les pluviers) ne sont pas pris en
considération dans leur totalité.
Eu égard à l’ensemble de ces observations, afin d’assurer au mieux la protection de
ces espèces, il serait donc préférable de prévoir, parmi les plateaux agricoles
identifiés, des zones d’exclusion intégrale dans chaque noyau de plateaux agricoles
et des zones de contrainte partielle pour le surplus.
c) Oiseaux d’eau
Le principal problème potentiel identifié se situe entre le nord-ouest du complexe des
barrages de l’Eau d’Heure et le nord de la vallée de la Haute Sambre, où de grandes
étendues sont attribuées à des zones favorables alors qu’on se situe aux abords de
plusieurs sites humides importants pour les oiseaux.
Concernant le cas particulier des Cygnes sauvages et de Bewick, la carte positive
telle qu'elle est présentée ne permet pas d'évaluer la réelle prise en compte de ces
deux espèces. Nous recommandons la mise en zone d’exclusion intégrale des sites
d'alimentation subsistant, étant donné que plusieurs projets éoliens affectent déjà
ces sites.
d) Migration d’oiseaux
La carte 1.28 est relative aux zones de concentration des migrations d’oiseaux
uniquement. On constate dans l’ensemble, une bonne prise en compte des
principaux couloirs de migration wallons. Notons cependant, qu’à cette échelle-ci, les
particularités locales, notamment celles liées au relief, ne sont pas prises en compte.
Les études d’incidences sur l’environnement des projets particuliers devront donc
bien analyser cette problématique au niveau local.
Nous attirons également votre attention sur la fragmentation aérienne du territoire
qu’engendrera la réalisation des différents projets éoliens sur le teritoire wallon.
Cette fragmentation constitue autant de barrières ou d’obstacles pour la faune
volante. La multiplication des projets éoliens sur le territoire wallon pourrait
engendrer un effet négatif sur le bon déroulement de la migration de la Grue cendrée
par exemple. Il y aura donc lieu d’avoir une attention particulière à la configuration
des différents projets afin de minimiser cet effet barrière.
5. Quant aux zones d’intérêt pour les chauves-souris
Au préalable, nous tenons à souligner le fait que, comme pour les données avifaune,
seules des données brutes ont été transmises par notre association. L’interprétation
et la sélection de ces données pour la réalisation des différentes cartes ne sont donc
pas de la responsabilité de Natagora-Plecotus.
Trois cartes sont à analyser :
1.19-Cavités souterraines d’intérêt scientifique
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Cette carte nous semble mal titrée. Sauf erreur, tous les points repris sur la carte ne
correspondent pas à des cavités souterraines d’intérêt scientifique au sens de la loi
du 12 juillet 1973 sur la conservation de la nature et de l’arrêté du Gouvernement
wallon du 26 janvier 1995 organisant la protection des cavités souterraines d'intérêt
scientifique. L’annexe 2 du dossier méthodologique précise d’ailleurs qu’il s’agit des
cavités correspondant aux sites d’hivernage des chauves-souris depuis 2007. Il
semble effectivement que la carte reprenne l’ensemble des cavités. Qu’en est-il de la
décision gouvernementale du 11 juillet 2013 ?
De plus, il nous semble que toutes ces cavités n’ont pas la même importance.
Certaines espèces de chauves-souris sont en effet plus sensibles que d’autres à
l’éolien et toutes les cavités ne comportent pas le même nombre d’individus. Dans
un souci de rigueur scientifique, ne pourrait-on pas établir une zone tampon d’une
distance variable autour des cavités en fonction des espèces présentes en
hibernation et du nombre d’individus? Le site de la Montagne Saint-Pierre, par
exemple, en tant que site majeur d’hibernation pour les chauves-souris en Wallonie
comme en Europe, doit pouvoir être placé totalement en zone d’exclusion intégrale.
Nous proposons ainsi que :
 toutes les cavités abritant plus de 100 chauves-souris en hibernation soient
reprises en zone d’exclusion intégrale avec une zone tampon de 4 km;
 toutes les cavités abritant de 50 à 100 chauves-souris en hibernation soient
également reprises en zone d’exclusion intégrale avec une zone tampon de
500 m;
 toutes les cavités comprenant au moins un individu des espèces suivantes :
Myotis myotis, Myotis dasycneme et Barbastella barbastellus, soient en zone
d’exclusion intégrale avec une zone tampon de 4 km.
Toutes les autres cavités pourraient alors être placées en zone de contrainte partielle
avec une zone tampon de 500 mètres.
1.27-Zones d’intérêt pour les chauves-souris
Nous nous interrogeons sur la pertinence d’une telle carte présentant les colonies
d’estivage, le choix des espèces, la taille de la zone tampon et la prise en compte
uniquement des sites d’estivage de quelques espèces. Bien que les colonies d’été ne
soient à l’heure actuelle pas encore connues pour toutes les espèces, nous proposons
de revoir cette carte de la manière suivante :
 Les colonies d’été des espèces suivantes : Pipistrellus nathusii, Myotis myotis,
Myotis dasycneme et Barbastella barbastellus, Nyctalus noctula et Nyctalus
leisleri, devraient être reprises en zone d’exclusion intégrale avec une zone
tampon de 4 km autour de ces colonies;
 Les colonies d’été des espèces suivantes reprises à l’Annexe 2 de la Directive
européenne CE/92/43 : Myotis emarginatus, Myotis bechsteinii, Rhinolophus
ferrumequinum, Rhinolophus hipposideros, seraient placées en zone de
contrainte partielle avec une zone tampon de 500m autour de ces colonies.
1.28-Zones de concentration des migrations d’oiseaux et de chauves-souris
Cette carte ne reprend absolument pas les zones de concentration des migrations de
chauves-souris. Il n’est d’ailleurs pas possible à l’heure actuelle d’établir une telle
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carte pour les chauves-souris puisque les couloirs de déplacement sont encore mal
connus. Il y aurait lieu de rectifier.
6. Quant à la place réservée aux conclusions des études d’incidences pour
l’application de la carte
En tout état de cause, la décision d’implantations d’un parc éolien semble, sur de
nombreux points, dépendre directement des résultats et conclusions de l’étude
d’incidences, indépendamment de la carte positive. Certes, les EIE constituent une
expertise scientifique indispensable pour éclairer l’autorité décisionnelle et lui
permettre d’exercer son pouvoir en pleine connaissance de cause. Mais elles restent
un outil à la décision parmi d’autres3 et, en aucun cas, ne peuvent se substituer à
une décision à part entière dans laquelle le pouvoir d’appréciation de l’autorité
décisionnelle ne s’exerce pas. Par conséquent, sans remettre en cause les
compétences des différents auteurs de ces études, il nous semble qu’en procédant
de la sorte, on perde de vue la fonctionnalité première de ces études d’incidences et
l’on fasse peser sur leurs auteurs des responsabilités qu’il ne leur revient pas
d’assumer. En outre, ne risque-t-on pas de déplacer le débat dans la sphère de la
certitude scientifique avec le production de contre-études de même valeur
scientifique ? La carte, avec les autres outils, devrait avoir pour objectif d’assurer
contre ces travers.
Pour le surplus, nous vous renvoyons à notre position générale communiquée en juin
20104. Nous nous tenons à votre disposition pour expliciter et discuter plus
amplement de ces éléments. Nous vous remercions de l’attention que vous porterez
à nos observations pour une meilleure prise en compte de la protection de la
biodiversité dans le cadre du développement éolien.
Copie de la présente est adressée à Monsieur Carlo DI ANTONIO, Ministre des
Travaux publics, de l’Agriculture, de la Ruralité, de la Nature, de la Forêt et du
Patrimoine de la Région wallonne.
Veuillez agréer, Messieurs les Ministres, Madame, Monsieur, l’expression de notre
sincère considération.
Pour Natagora,
Son Président
Emmanuël SERUSIAUX
3
Pour rappel, l’article D.69., §1er, du Code de l’Environnement énonce que « L’autorité compétente
apprécie les incidences du projet en prenant en considération l’étude d’incidences sur l’environnement ou
la notice d’évaluation des incidences sur l’environnement, les avis recueillis dans le cadre de la procédure
en autorisation et toute autre information qu’elle juge utile. »
4
http://www.natagora.be/fileadmin/Natagora/Presse/Presse_2010/CP_pdf/20100621_Natagora_position_E
oliennes.pdf
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